2. Le passage autoritaire aux 35 heures pourrait fragiliser de nombreuses entreprises

Plusieurs organisations représentatives des salariés et des employeurs ont été auditionnées par la commission des Affaires sociales.

Au-delà des positions de principe, le sentiment le plus souvent évoqué par les intervenants fut celui du scepticisme quant à la méthode choisie par le Gouvernement.

Un constat est revenu plusieurs fois, celui que les entreprises se répartiraient en trois catégories quant à leur position vis-à-vis de ce texte :

1/ les entreprises en bonne santé qui devraient bénéficier à plein de l'effet d'aubaine, parce qu'elles avaient de toute façon l'intention de réduire et de réorganiser le temps de travail.

2/ les entreprises qui pourraient effectivement mettre en oeuvre des dispositifs de réduction du temps de travail et pour lesquelles les incitations devraient être utiles.

3/ les entreprises qui ne ne devraient pas pouvoir supporter les difficultés liées au surcoût salarial et pour lesquelles les perspectives de licenciements ou de faillites ne constitueraient pas une simple hypothèse.

Cette dernière catégorie est bien sûr la plus préoccupante puisqu'elle aurait à pâtir d'un dispositif censé faciliter la réorganisation et la réduction du temps de travail. Il faut bien remarquer qu'un simple abandon de l'article premier lèverait les hypothèques qui pèsent sur cette catégorie d'entreprises.

La loi " de Robien " concernait les deux premières catégories d'entreprises. Les premiers bilans ont souligné que des effets d'aubaine ne pourraient être exclus concernant certaines entreprises. Cependant, dans la plupart des cas, l'aide financière a été déterminante pour initier des accords qui sans elle n'auraient pu être signés dans les mêmes conditions. Le caractère strictement volontaire de la loi " de Robien " excluait que des entreprises puissent être mises en difficulté du fait de ce dispositif.

Le dispositif du Gouvernement a certes le mérite de réduire les effets d'aubaine, mais son caractère majoré limite l'intérêt du dispositif pour les cadres.

Par ailleurs, l'article premier pourrait mettre en difficulté nombre d'entreprises.

On peut se demander si un reprofilage de la loi " de Robien " n'aurait pas permis de limiter les effets d'aubaine sans mettre en péril nombre d'entreprises du fait des conséquences de la baisse de la durée légale du travail.

Comparatif des coûts salariaux des pays industrialisés

Source Rexecode

Le rapporteur a souhaité procéder à des auditions en complément de la commission.

L'ensemble des organisations auditionnées 42( * ) ont mis en avant l'impact d'un abaissement de la durée légale du travail sur les salaires.

Les représentants du secteur de la production audiovisuelle ont expliqué que ce surcoût salarial pourrait accélérer la délocalisation des tournages vers l'Europe de l'Est, 60 à 70 % des coûts d'un film étant représentés par la main-d'oeuvre.

La main-d'oeuvre des intermittents du spectacle étant qualifiée, le dispositif d'aide semble particulièrement inadapté à ce secteur.

Les représentants des sociétés d'économie mixte se sont posé la question de l'articulation du dispositif gouvernemental avec le plan emploi-jeunes ; les embauches de jeunes font-elles partie du quota de 6 % ?

Les représentants des industries agro-alimentaires ont fait part de leur souhait que des progrès soient faits en termes d'annualisation ; ils ont insisté pour que les entreprises qui ont déjà avancé dans la voie de la réduction du temps de travail ne soient pas pénalisés par le nouveau dispositif. Ils ont enfin fait part de leurs craintes quant aux modifications adoptées en première lecture sur la notion de travail effectif.

Les représentants du commerce et de la distribution ont expliqué que leur convention collective avait déjà moralisé l'utilisation du temps partiel.

Les représentants des transports ont insisté sur leurs craintes quant à la limitation des interruptions quotidiennes (transports scolaires) et sur les risques de distorsion de concurrence.

Les représentants de la Confédération de la mutualité, des coopératives et du Crédit agricole ont mis en avant les risques d'une accélération de la désertification rurale ; ils ont insisté sur les évolutions technologiques en cours dans le secteur bancaire qui pourraient fragiliser l'emploi si des modulations n'étaient pas adoptées.

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