II. UNE EUROPE AGRICOLE RÉNOVÉE DONT L'ÉVOLUTION EST À NOUVEAU INDISPENSABLE

Le 25 mars 1957 était signé à Rome le traité instituant, entre six pays, le Communauté économique européenne (CEE) ; en 1962, étaient adoptés les premiers règlements instituant la Politique agricole commune (PAC).

L'histoire de l'agriculture européenne s'identifie à celle de l'Europe, la PAC ayant été pendant longtemps la seule politique " intégrée " entre les États membres.

Reposant sur l'article 39 du Traité de Rome et sur ces trois principes fondamentaux que sont la préférence communautaire, la solidarité financière entre les États membres et l'unité des prix et des marchés, une réforme importante de la PAC a été décidée en 1992.

La PAC est un des leviers majeurs de l'évolution de l'agriculture française. Elle l'a profondément façonnée dans ses productions, ses exploitations, son organisation et ses paysages. Toute politique nationale ignorant l'évolution de la PAC serait vouée à l' échec. C'est pourquoi le Sénat a souhaité, dès la présentation des propositions du " Paquet Santer ", constituer une mission d'information tendant à faire le bilan de la réforme de 1952, à examiner les nouveaux projets vision moderne et dynamique de l'agriculture européenne, tout en prenant en compte les contraintes budgétaires et internationales qu'il est désormais impossible d'ignorer.

La mission d'information de votre Commission des affaires économiques a présenté son rapport au mois de juin dernier. Votre rapporteur se limitera à en présenter une brève synthèse et à donner les derniers développements de cette réforme. Il est en effet essentiel, lors de ce débat sur le projet de loi d'orientation agricole, d'avoir à l'esprit les points fondamentaux de la réforme de la PAC. Ne pas en tenir compte aboutirait au mieux à progresser de manière parallèle sur les dossiers européen et national sans aucune interférence -ce qui serait regrettable et inefficace-, au pire, à adopter des stratégies divergentes - ce qui se révèlerait catastrophique.

A. BILAN ET ENJEUX DE LA PAC

1. Le bilan contrasté de la PAC depuis 1992

La réforme de 1992 a constitué un tournant majeur pour la PAC , depuis sa mise en place dans les années 1960. Visant à remédier au déséquilibre de certains marchés, à l'augmentation des dépenses agricoles et à l'érosion des revenus des agriculteurs, elle a consisté en une baisse importante du prix des produits agricoles, assortie d'une compensation intégrale de ses effets par un soutien direct aux exploitants , conditionnée à une maîtrise accrue de la production (gel des terres). Des mesures d'accompagnement (environnement, préretraites) ont également été mises en place 15( * ) .

Le bilan de cette réforme est contrasté

La production de céréales n'a été que temporairement maîtrisée ; en viande bovine, la maîtrise souhaitée de la production et l'extensification encouragée des élevages ne se sont qu'insuffisamment réalisées. Bien plus, les évolutions favorables qui sont intervenues, telles que la reconquête par les céréales Européennes du marché de l'alimentation animale ou l'amélioration des revenus agricoles tiennent presque autant à des facteurs externes à la réforme de la PAC qu'à sa vertu intrinsèque.

Certains atouts, notamment en matière d'exportation de blé européen, n'ont pas été pleinement valorisés, tandis que s'enclenchait une logique lourde de conséquences pour le rôle et le statut de l'agriculture en Europe : le basculement du financement du soutien collectif à l'agriculture du consommateur vers le contribuable, avec pour corollaire une dépendance accrue du revenu agricole vis-à-vis du financement public .

Certains défauts de la PAC n'ont pas été corrigés , tels que l'imparfaite prise en compte de la diversité agricole européenne (productions méditerranéennes, d'Outre-mer, zones de montagne...) ou la concentration excessive des crédits de la PAC sur certaines exploitations et certaines zones.

La préférence communautaire a, quant à elle, été mise à mal , tant par la transformation des mécanismes douaniers agricoles européens, induite par les accords du GATT de 1994, que par l'ouverture de contingents d'importation à tarif préférentiel ou la négociation d'accords d'association entre l'Union Européenne et les pays tiers.

Le récent débat sur l'accord commercial ambigu entre l'Union européenne et le Mercosur illustre la politique de la Commission européenne en matière d'association avec les pays tiers. Le lancement de négociations sur cette zone de libre échange entre l'Union européenne et le Mercosur (plus le Chili) a été approuvé par la Commission européenne, malgré une forte opposition de la part de la France, au mois de juillet dernier.

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