CHAPITRE II -

DES SERVICES FINANCIERS EN MAL D'OXYGÈNE

Les services financiers de La Poste représentent l'un des trois métiers de La Poste, à côté du courrier et du colis, et réalisent près du quart de l'activité du groupe. Assurés par un établissement public, à caractère partiellement monopolistique, mais exercés dans un contexte pleinement concurrentiel, ces services se trouvent dans une situation paradoxale que leurs concurrents ont tendance à considérer comme un « péché originel » :

- d'une part, le secteur bancaire souligne que la diffusion des services financiers de La Poste bénéficie de la capillarité exceptionnelle de son réseau , pierre angulaire du monopole du courrier. Le réseau postal compte 17.000 points de contact 41 ( * ) et peut s'interpréter en conséquence comme le réseau bancaire le plus dense de France. Mieux, le nombre de points de contact du réseau postal équivaut à trois fois celui du deuxième réseau bancaire français (celui du Crédit Agricole 42 ( * ) ). Le tableau ci-dessous reflète cet atout décisif dont jouit La Poste à l'égard de ses concurrents :

La Poste et principaux réseaux bancaires

Nombre d'agences bancaires
et de bureaux de Poste

La Poste

17 015

Crédit Agricole

5 637

Caisse d'Epargne

4 825

Crédit Mutuel/ CIC

3 193/1 372

Société Générale

2 004

Banques Populaires

1 956

BNP Paribas

1 976

Crédit Lyonnais

1 708

Source : La Poste

Outre ce réseau particulièrement étendu, La Poste détient le privilège de distribuer, en duopole avec les Caisses d'épargne, le livret A , épargne liquide à taux réglementé particulièrement prisée des Français ;

- d'autre part, comme le fait valoir La Poste, ses services financiers pâtissent de rigidités fortes et coûteuses 43 ( * ) : ils supportent des charges financières considérables du fait-même de ce réseau postal dont la configuration est ostensiblement éloignée de l'optimum économique et dont la densité, comparée à celle des réseaux bancaires classiques, est moins bien corrélée à celle de la population ; de plus, ils assument, de fait, d'autres missions d'intérêt général 44 ( * ) , notamment d'ordre social ; enfin, ils sont tenus, par la loi, d'évoluer dans un pré carré précisément délimité .

I. LES SERVICES FINANCIERS DE LA POSTE, RIDÉS PAR UNE LONGUE HISTOIRE

A. UNE GAMME DE PRODUITS EN EXTENSION PROGRESSIVE MAIS ENCADRÉE PAR LA LOI DE 1990

1. L'affirmation séculaire de la mission financière de La Poste

Le réseau financier postal est né pour répondre au besoin d'une collecte de proximité.

Demandés par les maires ruraux sous le Second Empire, les premiers services financiers de La Poste prennent leur essor au début de la Troisième République 45 ( * ) . L'Etat confie alors à La Poste des missions financières dans les zones les plus reculées du territoire, non desservies -déjà- par les banques privées.

On peut rappeler, pour mémoire, le rôle tenu par La Poste dans la création des mandats et de l'épargne populaire à la fin du dix-neuvième siècle, ou encore dans la diffusion de la monnaie scripturale au début du siècle dernier, ainsi que dans la vulgarisation de l'accès aux valeurs mobilières dans les années 1980 comme dans la banalisation de la carte porte-monnaie électronique. Cette mission séculaire s'est encore vue confirmée récemment, lors du passage du franc à l'euro, dont La Poste a été l'une des chevilles ouvrières essentielles.

Historiquement, les services financiers de La Poste ont donc fait office de vecteur de promotion et d'élargissement de l'accès aux services bancaires de tous les citoyens. Si l'offre bancaire privée suffit aujourd'hui à couvrir les besoins de nos concitoyens en la matière, votre rapporteur juge qu'il n'est pas inutile de souligner la part qu'a pris La Poste, au fil de son histoire, dans le développement de cette offre.

* 41 Se décomposant en 14.000 bureaux de poste et guichets et environ 3.000 agences postales, lesquelles proposent des activités de guichet limitées.

* 42 Lequel devrait toutefois, au terme de son rapprochement avec celui du Crédit Lyonnais, compter 9.000 points de vente.

* 43 Les missions « citoyennes » de La Poste en matière de services financiers représentent une charge évaluée à 800 millions d'euros (FO).

* 44 Opérations sur les petits livrets A, paiement de 50 % du RMI national, mandats...

* 45 Pour plus de détails, voir le rapport n° 42 1997-1998 de votre rapporteur : « Sauver La Poste : devoir politique, impératif économique ».

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