2. La métamorphose en banque postale : trop brutale

Pour autant, convient-il de métamorphoser instantanément les services financiers de La Poste en banque postale ? Votre rapporteur ne le pense pas. A ses yeux, les postiers ne sont pas des banquiers. Historiquement, La Poste collecte de l'épargne mais octroie peu de crédits. Et une métamorphose brutale en banque apparaîtrait aujourd'hui surdimensionnée par rapport à l'objectif : donner aux services financiers de La Poste un nouveau souffle.

Le spectre de la création d'une banque postale a d'ailleurs trop souvent été brandi sans ménagement, suscitant des inquiétudes compréhensibles au sein du personnel de La Poste. Votre rapporteur considère en conséquence qu'une telle décision n'est pas d'actualité .

Si en plus, cette création signifiait la séparation de La Poste-courrier et de La Poste financière, elle serait inacceptable. L'unité du groupe et son caractère multi-métiers comptent parmi ses principales forces. Ils doivent donc être préservés. S'il en était besoin, l'exemple allemand confirmerait l'impasse dans laquelle conduirait une séparation organique. Deutsche Post, qui avait pris le parti de créer une banque postale et de s'en défaire, a été conduite à rapatrier la Postbank dans son giron six ans après, en décembre 1999. Son Président, M. Zumwinkel, rencontré en 1997 par votre rapporteur, lui avait même indiqué à cette époque que c'était la seule véritable erreur stratégique qu'il avait commise dans la mise en oeuvre de la restructuration de cette poste.

Dans le rapport 61 ( * ) du Haut conseil du secteur financier public et semi-public, remis au gouvernement par M. Dominique Baert, son président, en décembre 2001, la question de la création d'une banque postale a été abordée sans détour. Afin d'épargner aux services financiers de La Poste une mort lente, ce rapport plaidait, lui , au nom de la logique industrielle et commerciale, pour la création d'une banque de plein exercice. Sans nier les difficultés qu'un tel projet soulèverait, le Haut Conseil soulignait -avec pertinence- les avantages d'une telle transformation, qui seraient de trois ordres :

- d'abord, la banque postale serait soumise au droit commun du secteur , avec tout ceci implique d'exigences en matière de capitalisation, de ratio de solvabilité, de comportement et de surveillance, ce qui permettrait d'assainir la concurrence ;

- ensuite, cette transformation permettrait de remédier aux dysfonctionnements du mécanisme déresponsabilisant que représente la distribution, par La Poste, de crédits produits et gérés par la Caisse des dépôts et consignations et dont le risque final est supporté par l'Etat ;

- enfin, la création d'une banque postale réaliserait une séparation comptable claire entre les différentes activités du groupe, coupant court à tout -faux ?- procès des banques concurrentes à l'égard de La Poste.

A ces avantages, il conviendrait sans doute d'ajouter la plus grande facilité de manoeuvre qu'apporterait à la société la détention d'un capital, ainsi que la faculté qui se trouverait dès lors ouverte d'optimiser la gestion actif/passif et donc d'améliorer la rentabilité et la régularité du résultat.

Sans nier ces arguments, votre rapporteur estime que l'urgence n'est pas, aujourd'hui, dans la transformation radicale des services financiers de La Poste en banque de plein exercice : c'est, en tout cas, sa conviction en raison de la grande attention qu'il accorde aux enjeux de la gestion des personnels à La Poste.

* 61 Un secteur financier public, pour quoi faire ?

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