b) La validation des acquis de l'expérience : les limites d'un outil innovant

La validation des acquis de l'expérience (VAE), dont l'accès a été élargi par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, permet à toute personne engagée dans la vie active depuis au moins trois ans de se voir reconnaître ses compétences professionnelles, en vue de l'acquisition, en tout ou partie, d'un diplôme, d'un titre professionnel ou d'une certification.

Ce droit constitue un outil de promotion sociale, dont les enjeux économiques et sociaux sont majeurs face aux besoins croissants de qualification : en effet, 30 % de la population active n'a aucun diplôme alors même qu'elle a acquis des compétences par la pratique et qu'elle est qualifiée pour occuper un emploi.

La VAE connaît un rythme de développement soutenu : depuis 2003, 300 000 personnes ont assisté à des réunions d'information ; depuis 2002, plus de 45 000 titres et diplômes ont été obtenus par cette voie (près de 21 000 en 2005, soit une hausse de 28 % en un an), les plus demandés étant les diplômes d'aide soignant et d'auxiliaire de vie sociale.

Toutefois, comme l'a relevé un récent rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale, « dans la mesure où seulement 0,5 % de la population active a participé à une réunion d'information sur la VAE en 2004, il est indispensable (...) de donner un nouvel élan à cette voie de certification. » 21 ( * )

En effet, la mission a pu identifier, au cours de ses auditions, certaines limites au dispositif.

Tout d'abord, la démarche de VAE s'inscrit dans un processus lourd, long - la durée moyenne d'instruction des dossiers est de neuf mois - et complexe , qui peut s'avérer dissuasif. Ainsi, en 2005, plus de 30 % des candidats ont abandonné la procédure en cours de démarche 22 ( * ) .

Par ailleurs, cette procédure, qui repose sur la présentation d'un dossier écrit, conserve un caractère « scolaire » et peut décourager, sans un accompagnement adapté, ceux qui ont été marqués par un échec à l'école. Comme l'a souligné M. Jean Michelin, directeur de la formation de la fédération française du bâtiment, les modalités de reconnaissance de cette expérience se font, quand elles mènent à des titres d'État, « par rapport à des référentiels de diplômes d'abord construits pour la formation initiale de nos enfants » , qui sont inadaptés « aux personnes qui sont devenues en dix ans ouvriers professionnels reconnus par leurs pairs. »

Dans le même sens, l'évaluation des compétences exprimées en situation de travail, au-delà de celles des savoirs théoriques acquis en formation, suppose un changement de posture qui n'est pas encore bien intégré dans la « culture » des enseignants participant aux jurys de validation.

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Au terme de l'examen de ce premier champ d'évaluation, il apparaît que la capacité de notre système de formation professionnelle à répondre au défi de l'« employabilité » de l'ensemble des actifs n'est pas encore à la hauteur des enjeux de notre économie moderne.

Or, la nécessité d'élargir l'accès de tous à une formation de base de qualité est une priorité d'autant plus forte, que, comme le relevait M. André Gauron dans un rapport sur la formation tout au long de la vie publié en 2000, « à mesure que le niveau d'éducation s'élève, le lien entre faible niveau scolaire et exclusion se renforce » ; « ni les réformes de la loi de 1971 qui se sont succédées, ni les dispositifs d'insertion mis en place, n'ont eu pour objectif de répondre au défi que constituent, pour la société française, le faible niveau de formation passée et les sorties prématurées du système scolaire sans le capital de formation minimum nécessaire pour accéder à l'emploi. » 23 ( * ) De fait, les dispositifs d'aide à l'emploi et d'insertion sont venus combler une lacune, mais ils n'ont pas permis de répondre au problème de fond, qui renvoie à la façon dont doit désormais être conçue, compte tenu du caractère de moins en moins linéaire des parcours professionnels, l'articulation entre la formation et l'emploi, en vue de permettre à chacun, et notamment à ceux qui sont les moins qualifiés, d'évoluer dans ses compétences et de rester « employable » tout au long de sa carrière.

* 21 « La validation des acquis de l'expérience à l'éducation nationale », rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale, novembre 2005.

* 22 Ce chiffre concerne la VAE sur les diplômes de l'éducation nationale.

* 23 « Formation tout au long de la vie. Une prospective économique », M. André Gauron, conseiller à la Cour des comptes, Conseil d'analyse économique, 2000.

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