D. RÉSOLUTION SUR LA PROPOSITION DE DIRECTIVE RELATIVE AUX NORMES ET PROCÉDURES COMMUNES APPLICABLES DANS LES ÉTATS MEMBRES AU RETOUR DES RESSORTISSANTS DE PAYS TIERS EN SÉJOUR IRRÉGULIER (14 FÉVRIER 2007)

Sur le rapport de notre collègue François-Noël Buffet, la commission avait adopté le 14 février 2007 une résolution 13 ( * ) , devenue résolution du Sénat, sur une proposition de directive relative aux normes et procédures applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Cette proposition présentée par la Commission européenne le 1 er septembre 2005, s'attache à définir une procédure complète en matière de retour depuis la prise de la décision d'éloignement jusqu'au placement en rétention et l'éloignement effectif.

La résolution du Sénat

La résolution du Sénat était très critique , notamment quant au respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Elle demandait surtout au gouvernement de s'opposer à une harmonisation de la durée de la rétention fixant une durée minimale, a fortiori égale à quatre mois. Elle remarquait de manière générale que les garanties offertes aux étrangers par la proposition de directive étaient moins protectrices que celles prévues par la législation française.

En outre, si elle estimait que la création d'une interdiction du territoire européen constituait un message fort de solidarité européenne en matière de lutte contre l'immigration illégale, elle invitait le Gouvernement à parvenir à un accord sur cette question tout en veillant au strict respect des principes de valeur constitutionnelle.

En effet, il convient de veiller à ce que cette interdiction du territoire européen ne présente pas un caractère automatique. Dans sa décision n° 93-325 DC du 13 août 1993, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution, et plus particulièrement à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen , la disposition prévoyant que « tout arrêté de reconduite à la frontière entraîne automatiquement une sanction d'interdiction du territoire pour une durée d'un an sans égard à la gravité du comportement ayant motivé cet arrêté, sans possibilité d'en dispenser l'intéressé ni même d'en faire varier la durée ».

Or la création d'une interdiction du territoire européen remettrait en cause notre summa divisio entre, d'une part, les décisions d'expulsion et les interdictions judiciaires du territoire et, d'autre part, les mesures de reconduite à la frontière. Seules les premières continuent de produire des effets après leur exécution. Les personnes expulsées sur décision administrative ou interdites de territoire français par le juge ne peuvent demander à revenir en France. Elles font l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le SIS.

En revanche, les étrangers qui font l'objet d'un simple arrêté de reconduite à la frontière ou d'une obligation de quitter le territoire français peuvent revenir immédiatement en France. Une fois exécuté, un arrêté de reconduite à la frontière épuise tous ses effets. Il ne vaut pas interdiction du territoire français .

Etat de la négociation

La présidence slovène s'efforce de parvenir à un accord définitif sur ce texte. Toutefois, le Parlement européen ne s'est pas encore prononcé 14 ( * ) , seule la commission LIBE ayant remis son rapport le 27 septembre 2007. La procédure applicable est celle de la codécision.

Concernant la durée de rétention , la commission LIBE propose que « la rétention cesse d'être justifiée au terme d'une période de trois mois. Les États membres peuvent raccourcir ce délai ou le prolonger d'un maximum de dix-huit mois lorsque, en dépit de tous les efforts raisonnables, l'opération d'éloignement risque de durer plus longtemps faute de coopération de la part du ressortissant de pays tiers concerné ou en raison de retards apportés à la fourniture des documents nécessaires par les pays tiers ou lorsque la personne concernée représente une menace prouvée pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale. »

Selon les informations recueillis par votre rapporteur, le Conseil devrait parvenir prochainement à un accord politique sur cette question, lequel ne devrait pas être beaucoup modifié par le Parlement européen. La durée maximale serait fixée à six mois avec la possibilité de porter cette durée à dix-huit mois dans certains cas exceptionnels. Aucune durée minimale ne serait fixée. L'harmonisation des durées de rétention serait donc très peu contraignante et validerait ainsi des législations nationales prévoyant des durées très longues au regard de la législation française.

Concernant l'interdiction du territoire européen , la commission LIBE propose de transformer en simple faculté la quasi-obligation d'assortir de cette mesure les décisions d'éloignement. Côté Conseil, la position ne semble pas encore définitivement arrêtée.

De manière générale, le texte qui devrait être adopté serait peu contraignant et validerait les législations des Etats membres les moins protectrices des droits des étrangers, par exemple la possibilité de placer des mineurs non accompagnés en rétention.

* 13 Cette résolution a été adoptée à la suite de l'examen de deux propositions de résolution, l'une présentée par M. Robert Del Picchia au nom de la délégation pour l'Union européenne du Sénat, l'autre par M. Robert Bret et plusieurs de ses collègues.

* 14 La proposition devrait être examinée en séance plénière le 21 mai prochain.

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