B. LE DÉCOUPLAGE PARTIEL DES TERRITOIRES D'INTERVENTION EST-IL PROBLÉMATIQUE ?

1. Un découplage partiel des territoires d'intervention

Ces deux zonages ne se recoupent que partiellement compte tenu de l'étendue de la cartographie de l'éducation prioritaire : seuls 1,9 % des établissements situés en ZUS ne sont pas dans le périmètre de l'éducation prioritaire , et 71% des collégiens relevant de l'éducation prioritaire sont inscrits dans des établissements qui sont situés hors ZUS.

Education prioritaire - politique de la ville

Source : rapport de la Cour des comptes

Selon les termes de la direction générale de l'enseignement scolaire, « l'éducation prioritaire n'est pas une réalité urbaine », l'aire d'attraction des établissements scolaires dépassant le cadre de la proximité géographique immédiate. Les critères scolaires, qui se substituent aux critères de revenus en éducation prioritaire sont-ils moins stables que les critères de revenus ou de résidence qui sont au coeur de la politique de la ville ? Il conviendrait de vérifier si cette appréciation divergente d'une carte évolutive et d'une carte plus stable se vérifie sur le moyen et long terme ou, s'il s'agit pour l'éducation nationale, de faire valoir une spécificité qui justifierait son autonomie vis-à-vis de la politique en faveur des zones urbaines sensibles.

2. L'impact de l'assouplissement de la carte scolaire

En tout état de cause, vos rapporteurs spéciaux soulignent l'importance de la prise en compte des dynamiques des aires d'attraction des établissements scolaires qui peuvent conduire à la création de « ghettos scolaires », notamment suite à la suppression de la carte scolaire . La Cour des comptes note dans son rapport que « sur les 254 collèges « Ambition réussite », 186 établissements ont perdu des élèves , ce qui s'est traduit par une plus grande concentration dans ces collèges des facteurs d'inégalités contre lesquels doit lutter la politique d'éducation prioritaire. »

Un rapport des inspections générales du ministère de l'éducation nationale sur  « les nouvelles dispositions de la carte scolaire ( 4 ( * ) ) », remis en octobre 2007 ( 5 ( * ) ), a rappelé que « les familles renseignées et intéressées par l'assouplissement de la carte scolaire agissent aussi pour échapper à la mixité sociale ». Or ce rapport a souligné que « ce sont moins les performances du collège et son offre d'enseignement qui sont dissuasives, que son implantation ».

Ces risques de dérive ont alerté le conseil national des villes, qui, dans son avis du 10 février 2009 relatif à « la mise en oeuvre des mesures de la dynamique Espoir Banlieues relatives à l'éducation » , a exprimé des réserves sur les récentes mesures d'assouplissement de la carte scolaire : « Le Conseil exprime ses réserves sur des mesures d'assouplissement de la carte scolaire qui ne seraient pas fortement encadrées par des dispositions volontaristes permettant d'accroître la mixité sociale. Il considère que ces dispositions devraient être plus largement connues et faire l'objet d'une information des collectivités locales intéressées, afin que soit élaboré avec elles un véritable projet éducatif d'ensemble permettant de faire bénéficier ces établissements des ressources des uns et des autres. (...) Il souhaite en outre qu'un premier bilan des nouvelles mesures soit dressé à la fin de la présente année scolaire, notamment dans les quartiers relevant de la politique de la ville, afin de mieux connaître les caractéristiques des établissements qui ont perdu des élèves et de ceux qui ont été les plus demandés, les motivations des familles, l'effet des nouvelles dispositions sur la mixité sociale dans les établissements, les mesures qui ont été prises pour aider les établissements les plus en difficulté ».

Les conséquences de l'assouplissement de la carte scolaire sont délicates à apprécier. Toutefois, s'agissant des établissements situés en éducation prioritaire et faisant face à une diminution du nombre d'élèves , vos rapporteurs spéciaux estiment indispensable de comprendre les raisons des phénomènes d'évitement et d'y remédier le plus rapidement possible. Ils notent à ce titre que le découplage qui peut exister entre le périmètre de l'éducation prioritaire et celui de la politique de la ville pourrait se révéler problématique car l'attractivité des établissements scolaires ne repose pas uniquement sur des critères scolaires .

* 4 Les mesures de la note ministérielle du 4 juin 2007 relative aux secteurs des collèges doivent être confirmées par une mesure générale de suppression des secteurs, prévue pour exécution en 2010.

* 5 Rapport IGAENR-IEN n° 2007-094, Octobre 2007 : « Les nouvelles dispositions de la carte scolaire ».

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