C. ... FRAGILISÉS PAR L'INSUFFISANCE DES RECOUVREMENTS ET DE LA RÉPRESSION

1. Des redressements globalement insuffisants

Lors de son audition, M. Philippe Parini, directeur général des finances publiques, a souligné que la fusion entre la DGI et le Trésor public devait notamment favoriser une meilleure synergie entre le contrôle et le recouvrement .

Au-delà de cette observation générale, la commission d'enquête s'est interrogée sur les mesures susceptibles d'améliorer les performances des trois directions spécialisées dans le traitement des dossiers comportant une dimension d'évasion fiscale qui, selon la Cour des comptes, enregistrent des résultats inégaux .

a) L'analyse des performances de la direction chargée du contrôle fiscal des entreprises

Synthèse des observations présentées en 2012 par la Cour des comptes sur les performances de la direction des vérifications nationales et internationales.

Chargée du contrôle fiscal des grandes entreprises , la DVNI a su pour l'essentiel faire évoluer ses méthodes et préserver ses résultats. Elle a mis en place une organisation performante du recouvrement et du contentieux, facilitée par la nature de son portefeuille, ce qu'attestent différents indicateurs : le taux de recouvrement du contrôle fiscal au bout de deux ans (recouvrement en 2009 des créances de 2007) est de 84 %. En 2009, le taux de recouvrement moyen des droits et pénalités émis en 2007, 2008 et 2009 s'élevait à 77,5 % . L'analyse des résultats obtenus par la DVNI en matière de contrôle fiscal montre que, depuis que la démarche d'analyse-risque a été généralisée, depuis 2005, la médiane des droits nets a presque doublé. La pertinence des requêtes d'analyse-risque est évaluée chaque année, selon une démarche itérative permettant leur amélioration régulière.

Cinq principales critiques lui sont toutefois adressées :

- elle tend à concentrer son activité sur les entreprises à plus forts enjeux , ce qui explique ses résultats au plan budgétaire mais la conduit à négliger les entreprises à moindres enjeux ;

- de plus, la DVNI assure une couverture inégale des différents impôts, la TVA étant sensiblement moins contrôlée que l'impôt sur les sociétés ;

- le contrôle des dépenses fiscales, accru récemment dans le cadre des contrôles liés au plan de relance (crédit d'impôt recherche, report en arrière des déficits), est encore insuffisamment développé ;

- enfin, la DVNI réalise par ailleurs un nombre élevé de redressements à « effet de décalage » , liés par exemple aux provisions comptables, dont l'intérêt du point de vue budgétaire est limité, parce qu'ils se traduisent par des baisses de recouvrement équivalentes les années suivantes (effets de trésorerie du fait du décalage dans le temps) ;

- enfin, l'accès aux comptabilités informatisées des entreprises reste à développer.

Son directeur, M. Olivier Sivieude, a rappelé lors de son audition que la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI) est chargée du contrôle fiscal des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 150 millions d'euros, ou 75 millions d'euros lorsqu'il s'agit de prestataires de services. Sont ainsi concernées environ 3 500 entreprises établies en France - mais pas nécessairement « françaises »- y compris les entreprises du CAC 40. Les filiales relèvent également de la compétence de la DVNI, ce qui lui permet d'avoir une vision de l'ensemble des groupes et de contrôler, au total, 70 000 entreprises.

Cette direction compte 500 personnes , presque exclusivement des cadres de catégorie A, et ses 350 vérificateurs sont spécialisés par secteur socioprofessionnel - banque, assurance, industrie, etc.... Ils sont aidés dans leurs travaux par des vérificateurs informaticiens, spécialisés dans les domaines informatiques et fiscaux, et par des « experts maison », formés en interne, spécialisés dans les questions internationales et financières. Le contrôle fiscal d'un grand groupe est généralement effectué par deux vérificateurs généraux, un vérificateur informaticien et au moins un expert voire deux : ce sont donc quatre, cinq ou six personnes qui se rendent dans l'entreprise concernée.

A ce sujet, et par comparaison, M. Thierry Lamorlette a rappelé que, dans les années 1990, le fisc américain avait contrôlé l'entreprise Nissan, en envoyant 70 agents dans ses locaux « équipés de fusils à pompes et de menottes » et que les Japonais avaient répliqué en imposant un redressement à Coca-Cola à hauteur de 7,5 milliards de yens, après un contrôle ayant mobilisé 50 vérificateurs. Comme en témoignent les données de l'OCDE ( cf . tableau supra ) l'administration fiscale française comptait en 2007 environ 128 000 agents contre 92 000 aux États-Unis pour une population totale cinq fois supérieure (300 millions contre 61,5), ce qui milite pour un redéploiement des effectifs vers le contrôle fiscal.

La DVNI apporte une contribution essentielle à l'alimentation des caisses de l'État. Ses rappels ont augmenté de 50 % en quatre ans, pour atteindre aujourd'hui 4,2 milliards d'euros de droits et pénalités . Sous réserve des rappels en prix de transfert dont le recouvrement est suspendu en cas d'engagement d'une procédure amiable, ces sommes sont recouvrées à hauteur de 85 %, les 15 % restants faisant l'objet de contentieux . Un peu plus du tiers des 1 360 contrôles effectués en 2011 comportaient au moins un élément d'extranéité fiscale.

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