(1) Un cadre général : le GAFI

Le GAFI édicte des normes en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, qui ont une portée trop incertaine.

Les règles édictées par le GAFI concernent tant les organismes financiers tels que les banques ou les sociétés d'assurances pour l'essentiel que des acteurs non financiers en raison de leur lien avec les transactions financières. Il s'agit notamment des avocats, des comptables, des agents immobiliers...

Ces règles visent à la mise en place de systèmes de vigilance quant à la connaissance du client (le principe essentiel connu en anglais de « Know your customer ») et la surveillance des transactions.

Les standards du GAFI font l'objet d'évaluations mutuelles 309 ( * ) qui sont ensuite examinées en séance plénière. Le prochain cycle d'évaluations débutera à la fin de 2013, sur le fondement de standards révisés qui ont été adoptés en 2012. Une méthodologie nouvelle est également en cours de discussion afin d'accroître l'évaluation de l'efficacité des dispositifs.

(2) Le délit de blanchiment de fraude fiscale

Aux termes de l'article 324-1 du code pénal, le blanchiment consiste à « faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect . ». C'est donc une infraction de conséquence qui exige la préexistence d'un crime ou délit.

S'agissant plus particulièrement du blanchiment de fraude fiscale 310 ( * ) , celui-ci constitue une infraction distincte et autonome par rapport à l'infraction sous-jacente . Contrairement à la fraude fiscale, sa poursuite n'est donc pas subordonnée au dépôt d'une plainte préalable de l'administration fiscale, ni à l'avis conforme de la commission des infractions fiscales 311 ( * ) .

L'audition de M. Jean-Baptiste Carpentier 312 ( * ) , directeur du service traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (Tracfin),et celle de Mme Maryvonne Caillibotte, directrice des affaires criminelles et des grâces au ministère de la justice et des libertés 313 ( * ) , ont permis de mettre en lumière la portée de cette évolution jurisprudentielle, en insistant sur l'alignement du régime des poursuites du chef de blanchiment de fraude fiscale sur celui du blanchiment des autres crimes et délits prévus par le Code pénal.

La jurisprudence a ainsi permis de « rompre tout lien procédural entre la fraude fiscale et le blanchiment des produits de celle-ci, ce qui facilite la mise en oeuvre des poursuites contre les auteurs du blanchiment ». 314 ( * ) Elle a également conduit, selon Mme Maryvonne Caillibotte, à renforcer l'efficacité des services en autorisant l'ouverture d'une enquête de flagrance, au contraire de la fraude fiscale 315 ( * ) , évitant ainsi tout risque de perte de preuve ou de collusion.

Cette avancée n'a pas été remise en cause par l'ordonnance du 30 janvier 2009 transposant la troisième directive anti-blanchiment sous certaines réserves 316 ( * ) .


* 309 La France a été évaluée en février 2011 : le dispositif français se classe ainsi « parmi les plus robustes du GAFI » . « La France est en mesure de proposer un éventail large de mesures d'entraide judiciaire pour les enquêtes et les poursuites ayant trait au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme. Les mesures disponibles en matière d'extradition sont également satisfaisantes même s'il reste difficile de déterminer l'efficacité du régime en place en l'absence de statistiques adéquates » Faisant partie des derniers pays évalués lors de ce 3ème cycle d'évaluation (2005-2011), la France ne sera évaluée à nouveau que dans plusieurs années.

Cf . http://www.fatf-gafi.org/media/fatf/documents/reports/mer/MER%20France%20ful.pdf

* 310 L'article L561-15 du code monétaire et financier a étendu l'obligation de déclaration au titre du blanchiment aux « ... sommes ou opérations dont ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles proviennent d'une fraude fiscale lorsqu'il y a présence d'au moins un critère défini par décret ... ».

* 311 Dans son arrêt du 20 février 2008 dit « Talmon » (Cass. crim. , 20 février 2008, n° 07-82.977), la Cour de cassation a consacré cette autonomie juridique en considérant que « la poursuite du délit de blanchiment, infraction générale, distincte et autonome, n'est pas soumise aux dispositions de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales » Toutefois, les éléments constitutifs de l'infraction sous-jacente doivent être démontrés par l'enquête sous le contrôle du juge.

* 312 Cf . audition du 3 avril 2012.

* 313 Cf . audition du 2 mai 2012.

* 314 Source : Mme Maryvonne Caillibotte, directrice des affaires criminelles et des grâces au ministère de la justice et des libertés.

* 315 En cas de fraude fiscale, la plainte de l'administration n'intervient qu'après un contrôle fiscal ce qui exclut donc toute flagrance.

* 316 « La Directive limite l'envoi du signalement à la DGFIP au cas où seule l'infraction sous-jacente de fraude fiscale est visée par les investigations du service Tracfin (3 ème alinéa du II de l'art. L. 561-23 du code monétaire et financier). La plainte de l'administration fiscale n'a pas à être sollicitée par le procureur de la République dès lors que l'enquête n'a pas été initiée à la suite d'un signalement du service Tracfin (4 ème alinéa du II de l'art. L. 561-29 du code monétaire et financier. » Source DNEF.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page