B. UNE RÉÉVALUATION DU CONTRÔLE DE LÉGALITÉ ?

Le contrôle de légalité figure au premier rang des missions devant être réévaluées.

Cette réévaluation passe tout d'abord par un renforcement des effectifs et des compétences alloués à cette mission.

Au regard des chiffres communiqués par le ministère de l'Intérieur, ces effectifs ont connu une baisse de 1 200 à 800 équivalents temps plein (ETP) entre 2008 et aujourd'hui.

Dans ce contexte, la directive nationale d'orientation (DNO) des préfectures et sous-préfectures 2016-2018 prévoit « le renforcement des moyens des préfectures dédiés à l'exercice du contrôle en termes d'effectifs et de compétences » avec « un nouveau programme de formation [...] dès 2017 ».

Afin d'aider le réseau préfectoral dans cette tâche, le PPNG entend conforter le Pôle d'appui interrégional au contrôle de légalité (PIACL).

Créée en 2006, cette structure, située à Lyon et rattachée à la Direction générale des collectivités locales (DGCL), regroupe une quinzaine de juristes ayant pour mission de répondre aux demandes d'avis des préfets. Pour ce faire, le PIACL produit des notes d'analyse - au nombre de 2 000 en 2015 -, qui constituent un outil d'aide à la décision pour les préfets, dans le respect de leur pouvoir décisionnaire.

Dans le cadre du PPNG, le PIACL doit être complété par deux nouveaux services : l'un dédié à l'appui au contrôle budgétaire, et l'autre à l'expertise des montages juridico-financiers complexes.

Lors de son audition par vos rapporteurs, François Pesneau, sous-directeur des compétences et des institutions locales à la DGCL, a relevé l'intérêt de ce second service pour les projets locaux. Cette cellule doit permettre de renforcer la capacité des préfets à accompagner les collectivités territoriales dans l'élaboration de grands projets, tels que les délégations de service public (DSP), les baux emphytéotiques administratifs (BEA), les partenariats publics privés (PPP), les dossiers soumis à la loi sur l'eau ou les équipements sportifs de grande ampleur.

La création de cette structure témoigne d'une évolution de la mission dévolue au PIACL, davantage orientée vers une fonction d'appui aux projets, ainsi que l'a indiqué le sous-directeur : « C'est une légère inflexion pour le PIACL, qui est passé d'un outil exclusivement juridique, à un outil également orienté vers une sorte d'assistance à maîtrise d'ouvrage, d'"ingénierie territoriale". Il s'agit de quelque chose de novateur, mis en place dans le cadre du PPNG, qui rappelle que le contrôle de légalité n'est pas que du contrôle. »

Dans le même ordre d'idées, le PPNG prévoit également la création de 8 pôles d'appui juridique, dans 4 types de contentieux : la police administrative et la sécurité routière (4 pôles), les ressources humaines (1 pôle), les contrats et les marchés publics (1 pôle), le concours de la force publique et la responsabilité de l'État (2 pôles).

Rattachées organiquement à certaines préfectures de département, ces structures ont vocation à apporter leur concours à l'ensemble du réseau préfectoral. Elles participent d'une mise en réseau des compétences, promue par le ministère de l'Intérieur, et dont son secrétaire général, Denis Robin, a rendu compte à vos rapporteurs : « Nous souhaitons faire monter en puissance certaines préfectures au niveau national sur des thématiques juridiques fortes, avec une mise en réseau pour que ces préfectures puissent donner des conseils à l'ensemble des autres. »

À l'occasion de leur déplacement à Orléans, vos rapporteurs ont pris connaissance du déploiement d'un pôle d'appui juridique consacré à la police administrative au sein de la préfecture, qui doit être le correspondant sur ce thème des préfectures de la zone Ouest de la France.

Vos rapporteurs jugent utile, quoique trop limité, ce renforcement des moyens et des compétences alloués au contrôle de légalité, dont ils souhaitent voir la dimension de conseil renforcée.

Les réponses apportées à la consultation témoignent de l'attachement des élus locaux aux conseils délivrés par les services préfectoraux, avant ou pendant le contrôle de légalité. 45,1% des répondants estiment en bénéficier, contre 36,1% d'avis contraire. Aussi le contrôle de légalité est-il perçu comme protecteur, pour 76,2% des participants, et peu contraignant, pour 56,2% d'entre eux.

Autre évolution sensible, les modalités de transmission des actes soumis au contrôle de légalité continuent d'être modernisées.

Cette télétransmission des actes a été promue dès 2007 pour le contrôle de légalité, avec l'application ACTES, et en 2011 pour le contrôle budgétaire, avec l'application ACTES budgétaires.

Depuis lors, elle n'a pas été généralisée, le taux de raccordement étant en 2014 de 40% pour la première application et de 19% pour la seconde, selon le rapport public annuel 2016 de la Cour des comptes 10 ( * ) .

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a rendu obligatoire d'ici 2020 la transmission électronique des actes soumis au contrôle de légalité, pour les régions, les départements, les communes de plus de 50 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (article 128). Un objectif similaire a été fixé pour le contrôle budgétaire (article 107).

Il ressort de la consultation des retours positifs des élus locaux quant à la télétransmission des actes. 63,4% des répondants ont ainsi indiqué avoir recours à la transmission des actes soumis au contrôle de légalité. Il s'agit pour eux d'un outil utile (86,7%), rapide (88,1%) et peu coûteux (61,4%).

Si l'intérêt de la télétransmission des actes est indéniable, vos rapporteurs constatent néanmoins qu'elle bute parfois sur des difficultés techniques ou financières, dans les plus petites communes.

Enfin, le champ des actes transmissibles au titre du contrôle de légalité ne cesse d'être resserré.

Partant du constat de son incapacité à contrôler la légalité de l'ensemble des actes des collectivités territoriales, l'État a défini des priorités nationales - la commande publique, l'urbanisme et l'aménagement et la fonction publique territoriale actuellement -, qui peuvent être complétées par des priorités locales, avec une circulaire du 25 janvier 2012 succédant à celle du 17 janvier 2006.

D'après les chiffres communiqués par le ministère de l'Intérieur, sur les 5 millions d'actes pris par les collectivités territoriales, 20% sont contrôlés, le contrôle étant systématique pour les actes relevant des champs prioritaires, et effectué par échantillon pour les autres.

Dans le prolongement de ce mouvement, le Gouvernement s'est engagé, dans le cadre de la revue des missions, à « tenir compte de la récurrence des irrégularités constatées pour, le cas échéant, alléger la fréquence des contrôles sur les actes de certaines collectivités engagées dans des démarches d'autocontrôle » (mesure 9) et à « réduire par bloc homogène d'actes la liste des actes transmissibles » (mesure 10).

Lors du comité interministériel aux ruralités, qui s'est tenu à Vesoul le 14 septembre 2015, la réduction de la liste des actes transmissibles sur un premier bloc de compétence « administration générale » a été annoncée.

Vos rapporteurs prennent acte de ce resserrement du champ des actes transmissibles, tout en soulignant qu'il laisse dubitatives les plus petites communes, selon lesquelles le contrôle de légalité est avant tout synonyme de sécurité juridique.

Les élus locaux consultés par vos rapporteurs ont ainsi jugé non souhaitables la réduction du champ des actes transmissibles, à hauteur de 49,9%, contre 40,8% d'avis contraires, et les démarches d' « autocontrôle » par les collectivités territoriales ou leurs groupements de la légalité de leurs actes, pour 50,4% d'entre eux.


* 10 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, p. 344 et 345.

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