II. .... EN RAISON DES LOURDEURS DES PROCÉDURES EUROPÉENNES À METTRE EN oeUVRE ET DE LA SPÉCIFICITÉ DU SYSTÈME D'ACHAT DES DENRÉES FRANÇAIS

A. DES EXIGENCES TROP IMPORTANTES DE LA COMMISSION EUROPÉENNE AU REGARD DU FAIBLE MONTANT DU FONDS ET DE L'IMPLICATION D'ACTEURS ASSOCIATIFS...

La gestion du FEAD s'apparente à la gestion d'un fonds structurel - qu'il n'est pas formellement - difficile à concilier avec un modèle associatif fondé sur le bénévolat.

1. Des exigences européennes qui imposent un taux d'erreur maximum de 2 %

Le degré d'exigence requis par la Commission européenne est très élevé dans la gestion du FEAD . Il s'illustre notamment par le seuil d'erreur toléré par la Commission européenne qui a été fixé à 2 %.

Pour rappel, pour la clôture de chaque exercice comptable, la Commission s'appuie sur les contrôles d'opération effectués par les autorités d'audit (la CICC en France). Celles-ci procèdent à un contrôle sur un échantillon d'opérations et en extrapolent un taux d'erreur sur l'ensemble des opérations de l'exercice comptable.

La Commission tolère un taux d'erreur maximum de 2 % - « seuil de matérialité » - pour que l'autorité d'audit nationale puisse émettre un avis « favorable » sur la clôture de l'exercice comptable . Un avis « avec réserve » ou même « négatif » est, en effet, susceptible d'entraîner une interruption des paiements par la Commission.

À titre d'illustration, pour la clôture de l'exercice comptable 2016/2017 du FEAD, la CICC a effectué un contrôle d'opérations entre septembre et décembre 2017 sur un échantillon de 9 opérations dans lequel elle a évalué un taux d'erreur de 3 %. Sur proposition de la CICC, la DGCS a ainsi accepté de procéder à une correction financière supplémentaire de 126 000 euros sur l'ensemble de cet exercice comptable, afin de permettre une validation sans réserve des comptes par la CICC.

Parmi ces irrégularités constatées, la non-application des pénalités aux fournisseurs de denrées par FranceAgriMer (FAM), sujet qui fait l'objet d'une interprétation très restrictive de la part de la CICC. Cette dernière demande ainsi l'application des pénalités, au stade de la demande de remboursement à l'UE, et donc des études de dossiers très approfondis au stade des CSF, pour des retards de livraison qui ne sont pas imputables aux fournisseurs mais plutôt aux associations, pour diverses raisons (manque de place ou de bénévoles à la date prévue par le marché). La DGCS - comme vos rapporteurs d'ailleurs - considèrent qu'il s'agit d'éléments de gestion nécessitant une certaine souplesse d'exécution. FAM, qui n'a ainsi pas appliqué un certain nombre- s'est vu contrainte de demander en remboursement, à la Commission européenne, les montants défalqués du montant des pénalités non appliqués, entrainant ainsi une perte budgétaire pour FAM, et in fine , pour l'État français .

Ces règles de procédure sont ainsi complexes et trop lourdes au vu du faible montant du FEAD - comparativement aux autres fonds européens - et de la gestion en grande partie bénévole du dispositif sur le terrain.

2. Le faible montant du FEAD au regard des autres fonds structurels européens

Les règles européennes pour ce « petit » fonds d'aide alimentaire semblent excessives comparées à sa taille . Il ne constitue pas formellement un fonds structurel, dans les textes, mais ses règles de gestion sont aussi strictes que celles du FEDER ou FESE dont le budget est 20 à 50 fois plus important.

*Le fonds européen de développement régional (Feder), fonds social européen (FSE), fonds européen agricole pour le développement dural (Feader) et fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp).

Source : Commission européenne

Ainsi, le Pôle national de certification des fonds européens (PNCFE) de la DGFiP - qui s'occupe également du FSE - a dû pour un programme opérationnel de 499 millions d'euros (et 0,5 ETPT dédiés), produire autant de documents et appliquer les mêmes exigences que pour le programme opérationnel national FSE (2,9 Mds d'euros) à savoir une documentation poussée de toutes les procédures et analyse des risques, des rapports de contrôles plus détaillés, la mise en place du contrôle interne.

3. Un niveau d'exigence difficile à respecter pour un secteur associatif reposant sur le bénévolat

La complexité des règles est aussi trop élevée pour un secteur associatif - fondé sur le bénévolat - qui déploie sur le terrain le dispositif.

La gestion du FEAD comporte une double spécificité : le bénévolat et la gestion de denrées alimentaires qui sont deux facteurs, pour vos rapporteurs, à prendre en compte dans le niveau d'exigence demandé par la Commission européenne à la France.

Même si bénévolat ne signifie par « amateurisme » - comme ont pu le souligner les associations en audition , surtout dans le domaine alimentaire où les règles d'hygiène et de sécurité sont très strictes, les bénévoles sont souvent insuffisamment outillés pour répondre à ces exigences et surtout un peu perdus par l'existence de tous ces contrôles , dont les règles frisent parfois l'absurde (la Commission impose, par exemple, le format A3 et non A4 des affichettes avec le drapeau de l'Union devant être exposées dans les centres de distribution).

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