C. DES VULNÉRABILITÉS ENCORE TROP IMPORTANTES FACE AU RISQUE D'UNE PROBABLE REPRISE ÉPIDÉMIQUE

1. Une amélioration progressive de la situation sanitaire

Dans chaque territoire concerné, les autorités ont pris tout au long de la crise des mesures spécifiques, adaptées à leur situation propre , pour stopper la progression de l'épidémie. Ces mesures ont fait l'objet d'échanges dans des instances d'information et de concertation réunissant les principaux partenaires intéressés - services de l'État, élus, chambres consulaires. Elles ont été arrêtées par les préfets et, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, dans le cadre de leurs compétences respectives, par les représentants de l'État et les autorités gouvernementales locales, la politique sanitaire relevant de ces dernières.

Outre le couvre-feu, un confinement strict a été imposé à la Martinique, en Guadeloupe, dans certaines zones de Guyane, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, et un confinement partiel à La Réunion. La rentrée scolaire a été reportée aux Antilles et en Guyane et les écoles ont été fermées en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Des restrictions ont également été apportées aux conditions d'entrée sur ces territoires (exigence d'un motif impérieux et d'un teste PCR négatif, sas sanitaire en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française).

Ces mesures de freinage différenciées et, dans certains territoires tout au moins, les progrès de la vaccination, ont permis une forte diminution des cas positifs, des hospitalisations et des patients en réanimation .

Au cours des dernières semaines, la situation sanitaire est progressivement redevenue sous contrôle, même si elle demeure contrastée selon les territoires.

Aux Antilles, le taux d'incidence est redescendu début novembre autour de 50 cas pour 100 000 habitants, excepté en Martinique où il est encore de l'ordre de 100.

En Guyane, il est encore de l'ordre de 130, avec de fortes disparités territoriales, puisqu'il est supérieur à la moyenne à Cayenne et Kourou.

A La Réunion, le taux d'incidence est nettement remonté au-dessus du seuil d'alerte et dépasse désormais 150 cas pour 100 000  habitants, même si le nombre d'hospitalisés et de patients en réanimation n'augmente que modérément. Le taux d'incidence reste en revanche au-dessous de 50 à Mayotte.

En Nouvelle-Calédonie, le taux d'incidence est passé sous les 100 cas pour 100 000 habitants alors qu'il est redescendu à 12 en Polynésie française.

Cette évolution dans l'ensemble positive a permis un assouplissement des mesures de restriction des déplacements et activités.

L' état d'urgence sanitaire a été levé à La Réunion le 15 octobre 2021. Il est resté en vigueur en Guadeloupe, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, en Polynésie Française et en Nouvelle-Calédonie jusqu'au 15 novembre 2021. Il ne demeure applicable qu'à la Guyane et à la Martinique, jusqu'au 31 décembre prochain 11 ( * ) .

Si un couvre-feu est maintenu en Martinique, en Guyane et en Nouvelle-Calédonie, les restrictions applicables aux déplacements en journée ne le sont que dans certaines zones de Guyane, où ils sont soumis à attestation, et le week-end en Nouvelle-Calédonie.

Dans les départements d'outre-mer, l'exigence de motifs impérieux et d'un test PCR négatif pour entrer sur le territoire ne subsiste que pour les passagers non-vaccinés. C'est également le cas en Polynésie française, ainsi que pour les passagers vaccinés provenant de zones rouge, cette exigence se doublant d'une obligation d'isolement de 10 jours. En Nouvelle-Calédonie, l'exigence d'un motif impérieux a été levée le 1 er novembre, mais l'entrée est subordonnée, pour les plus de 18 ans, à une obligation de vaccination (sauf contre-indication médicale) et tous les entrants restent soumis à une obligation d'isolement.

Il faut enfin souligner que bien qu'aucun cas positif n'y ait été détecté depuis fin avril, un régime contraignant d'entrée et de sortie a été imposé à Wallis-et-Futuna durant plusieurs mois. En effet, une « bulle sanitaire » est établie entre la Nouvelle-Calédonie et ce territoire. Celui-ci a été atteint par le virus au printemps 2021. Ce n'est qu'après avoir de nouveau été déclaré « covid-free », mi-juillet, qu'un reprise limitée des vols a été envisagée à compter du 30 août. Mais à peine celle-ci intervenue, la dégradation de la situation en Nouvelle-Calédonie a de nouveau interrompu les liaisons aériennes.

Les répercussions de l 'isolement prolongé de Wallis-et-Futuna sont particulièrement sensibles en matière sanitaire. Depuis un an et demi, les missions de médecins spécialistes sur le territoire sont pratiquement suspendues. De même, en raison de l'interruption des liaisons, des patients n'ont pu se rendre en Nouvelle-Calédonie où s'effectue leur prise en charge médicale et d'autres qui y recevaient des soins n'ont pu revenir à leur domicile. Toutefois, au vu de l'amélioration de la situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie, le conseil de gouvernance des îles 12 ( * ) s'est prononcé le 3 novembre dernier en faveur de la reprise des liaisons aériennes . Un vol hebdomadaire doit ainsi reprendre à compter 18 novembre. L'entrée sur le territoire sera subordonnée à des motifs impérieux 13 ( * ) . Ce rétablissement des vols, qui était nécessaire, met toutefois en lumière les risques pesant sur les communications vers et depuis le territoire tant que le taux de vaccination (un peu plus de 50 % de la population) le rend vulnérable à la propagation du virus.

2. Une couverture vaccinale encore insuffisante pour prévenir une 5ème vague

Au regard de la situation dans les outre-mer à la veille de la quatrième vague, le taux de vaccination a nettement progressé, avec de toutefois de très fortes disparités entre territoires .

Taux de vaccination dans les territoires ultramarins

(Données disponibles au 15 novembre 2021)

Population de plus de 12 ans

Population générale

1 dose

schéma complet

1 dose

schéma complet

Guadeloupe

40,8 %

37,6 %

35,4 %

32,7 %

Guyane

39,4 %

34,2 %

29,4 %

25,5 %

La Réunion

73,8 %

70,9 %

60,6 %

58,2 %

Martinique

42,1 %

38,8 %

37,1 %

34,2 %

Mayotte

83,6 %

66,4 %

53,7 %

42,6 %

St Barthélemy

77,8 %

73,0 %

68,3 %

64,1 %

St Martin

46,6 %

41,9 %

37,5 %

33,7 %

St Pierre-et-Miquelon

88,5 %

85,5 %

-

-

Nouvelle-Calédonie

77,3 %

71,8 %

66,0 %

61,3 %

Polynésie française

69,2 %

67,6 %

57,6 %

55,2 %

Wallis-et-Futuna

67,3 %

66,1 %

54,4 %

53,5 %

France entière

89,0 %

87,0 %

76,6 %

75,0 %

Sources : Santé publique France, agences régionales de santé, préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon, gouvernement de Nouvelle-Calédonie, gouvernement de Polynésie française, préfet, administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna. Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, le taux figurant dans la colonne « schéma complet » correspond à la population de plus de 12 ans ayant reçu une deuxième dose.

Saint-Pierre-et-Miquelon possède une couverture vaccinale équivalente à la moyenne nationale ; Saint-Barthélemy , la Nouvelle-Calédonie et, dans une moindre mesure, La Réunion , s'en approchent. La campagne de vaccination a touché plus de 80 % de la population éligible à Mayotte , mais un déficit important demeure pour l'administration de la seconde dose.

La vaccination a également bien progressé en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna , tout en restant insuffisante.

En revanche, la Guyane et les collectivités antillaises , à l'exception de Saint-Barthélemy, demeurent à des niveaux très faibles. L'épisode douloureux de cet été, quasi-exclusivement subi par des non vaccinés, n'entraîne pas d'effet accélérateur sur la campagne de vaccination . En effet, dans ces collectivités, la vaccination a progressé de manière régulière mais extrêmement lente, alors qu'une nette accélération s'est produite mi-juillet à La Réunion et à Mayotte.

ÉVOLUTION DE LA CAMPAGNE VACCINALE AUX ANTILLES,
EN GUYANE ET DANS L'OCÉAN INDIEN

Nombre de personnes ayant reçu au moins une dose de vaccin pour 100 000 habitants

Source : covidtracker.fr

En Polynésie française , la vaccination a progressé de vingt-cinq points entre la fin juillet, date du déclenchement de la vague épidémique, et la fin août.

En Nouvelle-Calédonie , elle a fortement augmenté au début du mois de septembre, au moment de la flambée épidémique, mais également après l'adoption par le Congrès, le 3 septembre, d'une délibération instaurant l'obligation vaccinale . En application de cette délibération, toutes les personnes majeures présentes sur le territoire doivent être vaccinées d'ici le 31 décembre 2021 . À ce stade, cette obligation n'est pas assortie de sanctions, celles-ci étant renvoyées à une délibération ultérieure du Congrès « si l'évolution du taux de vaccination dans les prochains mois ne permet pas une protection suffisante de la population en cas d'introduction du virus ou si la situation sanitaire se dégrade de manière significative » 14 ( * ) .

ÉVOLUTION DE LA VACCINATION EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Nombre de personnes ayant reçu une 1 ère et une 2 ème dose

Source : gouvernement de Polynésie française

ÉVOLUTION DE LA VACCINATION EN NOUVELLE-CALÉDONIE

Nombre de personnes ayant reçu une 1 ère et une 2 ème dose

Source : gouvernement de Nouvelle-Calédonie

Dans les territoires de l'Océan indien et du Pacifique, la vaccination a accru la protection des populations face aux risques de reprise épidémique, mais elle demeure encore insuffisante pour prévenir toute remontée qui impliquerait des prises en charge hospitalières.

Aux Antilles , le risque d'une 5 ème vague se traduisant de nouveau par un nombre élevé de formes sévères , une forte mobilisation des capacités d'hospitalisation et de réanimation , avec des conséquences sur la prise en charge d'autres pathologies, et un taux de mortalité élevé , a été jugé très probable par les interlocuteurs rencontrés par la délégation de la mission d'information. À peine la moitié des 65-74 ans disposent d'un schéma vaccinal complet et les taux sont de 7 à 10 points inférieurs pour les plus de 75 ans.

La situation est plus défavorable encore en Guyane , avec des niveaux de vaccination inférieurs de cinq points à ceux des Antilles pour les plus de 65 ans.

Certes, la circulation du virus au cours des dernières semaines et des derniers mois a pu contribuer à l' immunité d'une partie de la population.

Selon la dernière enquête de séroprévalence publiée il y a quelques jours par l'Institut Pasteur de Guyane , 63,9 % de la population guyanaise possède des anticorps contre le Sars-CoV-2 en ayant contracté la maladie ou par la vaccination. Or un quart de la population dispose d'un schéma vaccinal complet, environ 30 % ayant reçu une dose.

Il n'a pas été possible à la mission d'information de disposer d'information de même nature sur le niveau d'immunité aux Antilles 15 ( * ) .

En tout état de cause, même si l'immunité naturelle chez les non-vaccinés y était comparable à celle estimé pour la Guyane, elle demeurerait très inférieure au niveau nécessaire pour empêcher la circulation du virus, qui est évalué à au moins 90 % de la population compte tenu du caractère contagieux et pathogène du variant delta.

Aux Antilles comme en Guyane, la part de la population vulnérable vis-à-vis d'une reprise épidémique est donc toujours très importante.

3. Des freins puissants à la vaccination aux Antilles

La question de la vaccination a été au coeur des entretiens menés par la délégation de la mission d'information qui s'est rendue en Martinique et en Guadeloupe du 17 au 21 octobre dernier.

Les deux départements ont bénéficié d'une mise à disposition précoce des vaccins et la vaccination y a été ouverte aux différentes catégories de population plus rapidement que dans l'hexagone. Elle demeure pourtant à un niveau extrêmement bas et se heurte à des résistances puissantes.

a) De nombreux facteurs de défiance vis-à-vis de la vaccination

Lors d'une consultation citoyenne menée cet été sur près de 6 000  personnes en Martinique 16 ( * ) , un répondant sur deux déclarait ne pas vouloir se faire vacciner , cette proportion dépassant les 65 % chez les 18-34 ans puis diminuant avec l'âge, excepté pour la tranche des 75 ans et plus. Un quart des répondants se disaient opposés à la vaccination contre le covid-19 et les deux-tiers n'étaient pas en accord avec le fait que la vaccination constituait une solution pour venir à bout de l'épidémie et retrouver progressivement une vie normale. Les alternatives proposées se partageaient entre l'utilisation de traitements 17 ( * ) ou la mise en place d'un confinement strict, la fermeture des frontières et le respect des gestes barrières.

Combinées à l'opposition au passe sanitaire et à l'obligation vaccinale pour les personnels de santé, les motivations exprimées pour justifier l'hostilité, les réticences ou les doutes vis-à-vis de la vaccination ne diffèrent pas fondamentalement de celles constatées dans l'hexagone.

Elles trouvent cependant aux Antilles un écho beaucoup plus important lié à de multiples facteurs :

- une moindre adhésion aux traitements issus de l'industrie pharmaceutique et une inclination traditionnelle à privilégier le recours à la pharmacopée locale et à des traitements alternatifs ;

- une propension sans doute plus marquée qu'ailleurs à relativiser les effets de la pandémie au regard des autres risques qui caractérisent ces territoires (cyclones, séismes, éruptions volcaniques) ;

- la place démesurée prise par les réseaux sociaux , vecteurs privilégiés d'informations contestables ou erronées sur la pandémie, les vaccins, les traitements et la gestion de la crise sanitaire ;

- la défiance d'une partie de la population vis-à-vis de l'État et de la parole officielle , pour des raisons très profondément ancrées tenant à l'histoire de ces territoires, mais aussi, de manière plus contemporaine, à l'occultation prolongée des conséquences de l'usage de la chlordécone ; de ce point de vue, l'opposition à la vaccination promue par les autorités comporte une dimension identitaire ;

- l' instrumentalisation de la question vaccinale par des mouvances politiques y trouvant des opportunités de déstabilisation.

b) Une tension sociale qui fige les positions au sein de la population

La délégation de la mission d'information a constaté, lors de son déplacement aux Antilles, une tension palpable autour de la question de la vaccination .

L'opposition à la vaccination se manifeste de façon virulente, par des mises en cause ou des menaces inacceptables à l'encontre de ceux qui en soulignent la nécessité, qu'il s'agisse de fonctionnaires, d'élus, de médecins, d'acteurs du monde économique, culturel ou social.

L'opinion publique est très divisée. Si une importante minorité reste très déterminée dans son rejet, plusieurs interlocuteurs de la délégation ont souligné le sentiment de peur qui caractérise une fraction de la population : peur du virus, plus encore peur du vaccin, mais également peur de prendre parti ou de se singulariser dans un contexte où la non-vaccination demeure aujourd'hui la norme dominante.

Sans être hostiles au vaccin, beaucoup d'Antillais hésitent encore à franchir le pas . Et il est révélateur que parmi ceux qui s'y rallient, certains veuillent le faire en toute discrétion, en se rendant dans une commune autre que celle de leur domicile ou en exigeant une stricte confidentialité, comme cela a été rapporté à plusieurs reprises à la délégation, que ce soit par peur d'être mal considérés ou pour ne pas faire apparaître qu'ils se sont déjugés.

c) Des autorités en difficulté face à l'activisme antivaccinal

La force de l'activisme antivaccinal tout comme l'hostilité ou la réserve d'un part importante de la population ont très certainement été sous-estimées dans les premiers mois de la campagne vaccinale.

La véritable contre-campagne véhiculée par les réseaux sociaux a beaucoup plus porté qu'une communication institutionnelle calquée sur celle conduite dans l'hexagone, peu adaptée aux particularités du contexte local et n'impliquant guère les acteurs de proximité tels que les professionnels de santé ou les élus.

De même, seule la fraction la plus convaincue de la population s'est rendue spontanément dans les centres de vaccination.

Face à cette situation, des inflexions ont été apportées .

La communication a été réorientée et axée sur les préoccupations de la population et la réponse aux arguments avancés par les anti-vaccins. Les opérations d' « aller vers » se sont multipliées, en particulier avec les tournées de « vaccibus » généralement financés par les collectivités locales. Plusieurs élus se sont impliqués, par des prises de position publiques ou des initiatives locales, et certains de manière très engagée, même si d'autres demeurent sur la réserve ou ne se considèrent pas légitimes pour formuler des préconisations en matière de santé publique.

En Martinique, un comité citoyen de transparence, composé de sept représentants de la société civile, a été mis en place. Il s'est fait le relai auprès des autorités ou de professionnels de santé des interrogations de la population sur la gestion de la crise sanitaire, la vaccination ou encore les traitements. Il a publié depuis le mois d'août cinq communications qui ont été signalées dans la presse locale, mais qui mériteraient une diffusion plus large qu'il n'est pas dans les moyens du comité d'opérer. Il ne dispose d'un site internet que depuis la mi-novembre 18 ( * ) .

Ces évolutions sont intervenues assez tardivement et n'ont pour l'instant produit que des effets limités, alors que localement, les questions de la vaccination et de l'obligation vaccinale des soignants tendent désormais à se confondre dans l'esprit de l'opinion publique, relativisant les considérations d'ordre strictement scientifique et sanitaire.

Les solutions de proximité pour la vaccination se sont multipliées, mais les résultats demeurent inégaux. Ils sont meilleurs là où la population a été préalablement sensibilisée, notamment par une implication des municipalités.

d) Des ressorts comparables en Guyane

La mission d'information n'a pu recueillir des éléments aussi détaillés sur les ressorts du faible taux de vaccination en Guyane, mais ceux dont elle dispose montrent qu'avec des différences liées au contexte local, à la géographie et aux caractéristiques de la population, les problématiques sont assez voisines de celles rencontrées aux Antilles.

Les mouvements hostiles à la vaccination recueillent un écho important, les doutes sur les effets du vaccin sont répandus, la parole des autorités et des scientifiques est mise en cause.

Comme aux Antilles, la communication a été ajustée, notamment par des supports dans les différentes langues parlées sur le territoire. Un comité citoyen de la transparence de 17 membres a également été mis en place à la fin du mois de septembre.

Pour répondre aux objections à l'encontre des vaccins à ARN messager, le territoire a été approvisionné à la mi-octobre en vaccins Janssen sans que cela ne modifie sensiblement la progression de la vaccination qui demeure toujours extrêmement lente.

4. Une mise en oeuvre difficile de l'obligation vaccinale dans le secteur sanitaire

Pleinement en vigueur dans l'hexagone depuis le 16 octobre, l'obligation vaccinale des personnels des établissements de santé et des professionnels médicaux et paramédicaux libéraux prévue par la loi du 5 août dernier relative à la gestion de la crise sanitaire a fait l'objet outre-mer d'un calendrier aménagé compte tenu des effets prolongés de la vague épidémique de l'été dernier. Les échéances d'engagement dans le parcours vaccinal et d'exigence d'un schéma complet ont été décalées. Le contrôle de cette obligation dans les établissements hospitaliers s'effectue de manière échelonnée : à l'égard des cadres et personnels médicaux tout d'abord, des personnels affectés aux fonctions support ensuite et enfin des personnels soignants non médicaux.

En Nouvelle-Calédonie , le Congrès, par sa délibération du 3 septembre dernier, a instauré une obligation de vaccination, à compter du 31 octobre 2021 et sous peine d'une amende de 175 000 francs CFP (1 458 euros) de plusieurs catégories de personnels 19 ( * ) . À l'issue d'une table ronde sociale tenue le 23 octobre, il a été décidé de reporter cette obligation au 31 décembre 2021.

Une obligation comparable 20 ( * ) a été prévue en Polynésie française , à compter du 23 octobre et sous peine d'une amende du même montant et d'une majoration du ticket modérateur pour le remboursement des soins, par la loi du pays du 23 août 2021 relative à la vaccination obligatoire dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire liée à la covid-19. Le 13 octobre dernier, le président du pays a annoncé son report de deux mois, jusqu'au 23 décembre.

Cette obligation a suscité de vives contestations, particulièrement aux Antilles et en Guyane, débouchant sur des conflits sociaux dans de nombreux établissements hospitaliers. À la suite de la médiation engagée en Martinique, le Gouvernement y a également repoussé au 31 décembre l'exigence d'un schéma vaccinal complet, les personnels devant justifier d'une première injection avant le 6 décembre.

À la veille des échéances initiales, les estimations sur le taux de vaccination des personnels concernés étaient particulièrement basses. Elles sont aujourd'hui nettement plus élevées, davantage de personnels ayant déclaré leur statut vaccinal ou régularisé leur situation.

Ainsi, le taux de professionnels libéraux engagés dans le parcours vaccinal est supérieur à 80 % et atteint même 95 % à La Réunion.

L'agence régionale de santé de Guadeloupe indique que le taux de vaccination du personnel est de 85 % au CHU de Pointe-à-Pitre, de 95 % au centre hospitalier de Basse-Terre, de 99 % à celui de Marie-Galante, de 90 % à celui de Saint-Martin et de près de 100 % à la clinique des Eaux Claires de Baie-Mahault. 60 % des Ehpad ont un taux de vaccination compris entre 90 % et 100 %.

À La Réunion, 94 % des personnels établissements de santé et médico-sociaux sont en conformité avec l'obligation vaccinale et 85 % au centre hospitalier de Mayotte.

En Martinique, le taux de vaccination du personnel du CHU n'avoisinerait en revanche que les 50 % 21 ( * ) et en Guyane, il n'est que de 64 % pour l'ensemble des établissements de santé.

Aux yeux de la mission d'information, l'obligation fixée par la loi doit pleinement s'appliquer outre-mer. Il est en revanche légitime que sa mise en oeuvre obéisse à des modalités adaptées à la situation de chaque territoire et que les équipes compétentes soient en mesure de répondre à toutes les interrogations des personnels concernés.


* 11 Loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire.

* 12 Il est composé des autorités coutumières, politiques, religieuses et administratives.

* 13 Retour à sa résidence principale, retour d'évacuation sanitaire, missions essentielles ou prises de postes.

* 14 Délibération n° 44/CP du 3 septembre 2021 instaurant une obligation vaccinale contre le virus SARS-CoV-2 en Nouvelle-Calédonie

* 15 Une enquête de séroprévalence de Santé publique France est en cours pour la Guadeloupe.

* 16 Enquête communiquée par l'agence régionale de santé de Martinique.

* 17 Médecine alternative ou traditionnelle, développement de nouveaux traitements, recours à des traitements existants mais non prescrits tels que l'ivermectine ou l'hydroxychloroquine.

* 18 www.cctransparencemartinique.info

* 19 Personnes exerçant une activité professionnelle dans les domaines suivants : transport aérien et maritime, secteur portuaire et aéroportuaire ; mise en oeuvre des mesures de quarantaine ; établissements de soins publics ou privés ; secteurs sensibles dont l'interruption entrainerait des conséquences néfastes sur le fonctionnement du pays ou affecterait la sécurité ou l'ordre public.

* 20 Personnes exerçant une activité professionnelle ou bénévole les exposant ou exposant les personnes dont elles ont la charge à des risques de contamination : professionnels de santé ; personnels des établissements de soins publics ou privés ou accueillant des personnes âgées, des enfants, des personnes handicapées ; personnes au contact du public dans les services publics, les commerces, les activités de prestation de service ; personnes de plus de 16 ans atteintes de certaines affections, personnes exerçant des activités essentielles au fonctionnement de la Polynésie française ; personnes exerçant des activités dans lesquelles les gestes barrières ne peuvent être respectés.

* 21 Déclaration du directeur général (Frances Antilles - 15 novembre 2021).

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