2. L'insertion des territoires dans l'ensemble européen

a) L'exigence d'une structuration efficace des territoires

Les travaux menés par le Sénat sur l'aménagement du territoire 37( * ) ont parfaitement mis en évidence que toute dérive vers une recentralisation de l'action publique ne pourrait avoir que des conséquences néfastes sur la structuration des territoires et sur la recherche indispensable de la cohésion territoriale.

L'ouverture des frontières rend indispensable une structuration forte des territoires afin de les mettre en position de capter les flux de richesses circulant dans l'ensemble communautaire. Dans cette perspective, c'est bien un aménagement multipolaire qu'il convient de promouvoir. En faisant ce choix, les politiques publiques nationales permettront une intégration efficace du territoire dans l'Union européenne.

La mise en oeuvre d'un tel objectif est néanmoins subordonnée à une claire définition des responsabilités des différents niveaux d'administration. L'Etat doit être recentré dans ses fonctions essentielles et porteur d'un projet national. Il lui revient de définir une stratégie d'ensemble, de corriger les déséquilibres financiers entre les collectivités territoriales et de mettre en place les grandes infrastructures intellectuelles et de communication. Pour le reste, il doit déléguer aux collectivités décentralisées l'essentiel des actions qu'exige sur le terrain l'aménagement du territoire, en leur transférant les moyens financiers et humains.

Ces orientations ont été concrétisées dans la loi d'orientation du 4 février 1995 qui précise que la politique d'aménagement et de développement du territoire est conduite par l'Etat " en association avec les collectivités territoriales dans le respect de leur libre administration et des principes de la décentralisation " et dans la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, dont l'article 1 er a repris la même formulation.

Mais cet aménagement multipolaire suppose que tous les territoires soient également pris en compte dans les politiques d'aménagement du territoire. Le Sénat a, en conséquence, pu légitimement regretter que les nouvelles orientations retenues par la loi du 25 juin 1999 aient été marquées par la thèse selon laquelle la ville serait le lieu privilégié de la compétitivité internationale alors que les zones rurales seraient des zones de handicap à compenser et le plus souvent associées à la question des espaces naturels. Conforter les espaces périurbains, lutter contre la césure entre ville et campagne, seront donc autant de défis pour les politiques publiques dans les prochaines années.

b) La place croissante des politiques communautaires

L'insertion du territoire dans l'ensemble européen est également marquée par la place croissante des politiques communautaires qui ont des effets directs sur l'action publique nationale et locale.

Tel est évidemment le cas de la politique régionale européenne , laquelle représente désormais le deuxième poste de dépense de l'Union derrière la politique agricole commune.

Or la France ne tire pas tout le bénéfice de cette politique régionale, pour différents motifs qui tiennent notamment , votre rapporteur y reviendra, aux conditions de gestion des crédits communautaires au plan national.

En outre, les élus locaux ne sont pas toujours bien informés des " circuits " de financement communautaire. Ainsi, interrogés dans le cadre des Etats généraux organisés en Auvergne, le 12 mai dernier, 49% des élus de cette région estimaient manquer des informations nécessaires en matière de financement européen.

Cette insertion dans l'Union européenne concerne aussi les départements d'outre-mer. Après l'adoption en 1989 d'un programme qui leur était spécifiquement destiné (POSEIDOM), le traité d'Amsterdam a modifié l'article 299.2 du traité de Rome en permettant au Conseil de prendre des " mesures spécifiques " tenant compte des caractéristiques particulières des régions ultrapériphériques.

Sans qu'il soit besoin d'insister, on rappellera que c'est également l'environnement juridique et financier de l'action publique nationale qui est désormais de plus en plus influencée par les textes élaborés au niveau communautaire. Pour ne citer que quelques exemples particulièrement importants pour l'action des collectivités locales, on mentionnera le domaine de l 'environnement (qualité et assainissement des eaux, gestion des déchets) et celui des marchés publics . Le rapport d'étape de votre mission d'information a aussi souligné le poids croissant des normes techniques d'origine européenne.

La fonction publique territoriale a également été concernée par le développement de la construction européenne. La loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 a, en effet, ouvert certains emplois aux ressortissants communautaires, en vertu de l'article 39 du traité de Rome relatif à la liberté de circulation des travailleurs.

La démocratie locale n'échappe pas à ces évolutions. Introduit par le traité de Maastricht, l'article 19.1 du traité de Rome garantit le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales des citoyens de l'Union européenne résidant dans un Etat de l'Union dont ils ne sont pas ressortissants. Les modalités d'exercice de ce droit ont été précisées dans une directive du Conseil du 19 décembre 1994. Il a par la suite été inscrit dans notre Constitution ( article 88.3 ) et fait l'objet de la loi organique n° 98-404 du 25 mai 1998.

La mise en place de l'euro implique un certain nombre d'adaptations budgétaires et comptables. Jusqu'en 2002, les collectivités locales continueront à réaliser la plupart de leurs opérations en francs avant qu'à cette date leurs comptabilités ne basculent vers l'euro.

Page mise à jour le

Partager cette page