3. Peut-on encore parler d'impôts directs locaux ?

Jusqu'à ces dernières années, il était aisé d'identifier le produit des impôts directs locaux, qui correspondait au produit perçu par les collectivités locales, qu'il soit acquitté par les contribuables ou par l'Etat, qui prend en charge les dégrèvements. Les compensations étaient d'une nature différente, distinctes des ressources fiscales. Elles font d'ailleurs l'objet de notification, comme les dotations de l'Etat, et ne sont pas inscrites en recettes fiscales dans les budgets locaux.

Aujourd'hui, les compensations ne sont plus un phénomène marginal . Leur montant a été multiplié par 13 depuis 1983 et par 3,3 depuis 1987 et s'établit en 2000 (en tenant compte de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation), à 66,4 milliards de francs, soit près de 20 % du montant total du produit de la fiscalité directe locale, 345,4 milliards de francs. Le caractère massif du remplacement de recettes fiscales locales par des compensations se traduit par un brouillage de la ligne de partage entre fiscalité et compensations.

Par exemple, en 1999, les régions ont comptabilisé dans leur budget la compensation de la suppression de la taxe additionnelle régionale aux droits de mutation à titre onéreux comme des recettes fiscales, de sorte que l'analyse de leurs comptes administratifs ne permet pas de faire apparaître une diminution de la part de leurs recettes fiscales dans leurs recettes totales.

De même, la suppression de la part " salaires " de la taxe professionnelle, soit un tiers de l'assiette de cet impôt, a remis en cause la fiabilité du principal indicateur de richesse des collectivités locales, le potentiel fiscal. Celui-ci se définissait en effet par l'application aux bases des " quatre taxes " du taux moyen national d'imposition à chacune de ces taxes. Or, avec la suppression de la part " salaires " de la taxe professionnelle, les écarts relatifs entre le potentiel fiscal des collectivités ont été bouleversés car toutes n'avaient pas la même proportion de bases " salaires " sur leur territoire. En conséquence, les collectivités dans lesquelles les bases " salaires " étaient importantes ont vu leur potentiel fiscal augmenter, au détriment de celles dans lesquelles la part des bases " salaires " était moins importante.

La modification des écarts relatifs de potentiel fiscal ayant des conséquences sur l'éligibilité aux différentes dotations de solidarité versées par l'Etat, ainsi que sur le montant des attributions de ces dotations, la loi du 28 décembre 1999 relative à la prise en compte du recensement général de population de 1999 dans la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales a modifié la définition du potentiel fiscal des communes et des départements en y intégrant la compensation de la suppression de la part " salaires ", afin de neutraliser les effets de la réforme de la taxe professionnelle.

Cette évolution améliore à court terme la fiabilité de cet indicateur. A moyen terme, en figeant les écarts, elle en réduit la pertinence. En effet, en majorant le produit total pris en compte, l'intégration des compensations limitera l'effet sur le potentiel fiscal des augmentations et des diminutions de bases.

En tout état de cause, peu à peu, l'expression " fiscalité locale " tend à devenir un terme générique qui englobe non seulement le produit des impôts locaux mais également les compensations, qui ne sont pourtant plus des recettes fiscales puisque leur montant n'évolue ni en fonction des taux, ni des bases des impôts locaux.

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