SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. Daniel Hoeffel

1. Procès-verbal (p. 1).

2. Dépôt d'un rapport du Gouvernement (p. 2).

3. Maîtrise de l'immigration. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 3).

Rappel au règlement (p. 4)

MM. Jacques Mahéas, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Article 15 (p. 5)

Amendement n° 27 rectifié de la commission et sous-amendement n° 113 rectifié bis de M. Jean-Pierre Schosteck. - MM. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois ; le président, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié rédigeant l'article.

Article 16 (p. 6)

Mme Marie-Christine Blandin, MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le ministre, Jacques Mahéas.

Amendement n° 261 de M. Robert Bret et sous-amendement n° 326 de M. Michel Dreyfus-Schmidt. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Jacques Mahéas, Mme Nicole Borvo, MM. René Garrec, président de la commission des lois ; le président. - Rejet du sous-amendement, de la première partie de l'amendement et, par scrutin public, de la seconde partie de l'amendement ; rejet de l'ensemble de l'amendement.

Amendement n° 28 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Rappel au règlement (p. 7)

M. Jacques Mahéas.

Article 17 (p. 8)

Amendement n° 29 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 18. - Adoption (p. 9)

Article 19 (p. 10)

Amendements n°s 262 de M. Robert Bret et 30 rectifié de la commission. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt, Jacques Mahéas. - Rejet de l'amendement n° 262 ; adoption de l'amendement n° 30 rectifié.

MM. Jacques Mahéas, Louis Souvet.

Adoption de l'article modifié.

Article 19 bis (p. 11)

MM. Robert Bret, Michel Dreyfus-Schmidt.

Amendement n° 31 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 155 de Mme Michèle André. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas, Patrice Gélard. - Rejet.

Amendement n° 32 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 19 ter (p. 12)

Amendement n° 156 de Mme Michèle André. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Adoption de l'article.

Article 20 (p. 13)

Amendement n° 157 de Mme Michèle André. - Mme Michèle André, MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet.

Adoption de l'article.

Article 21 (p. 14)

Amendement n° 158 de Mme Michèle André. - Mme Michèle André, MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, le président, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet.

Adoption de l'article.

Article additionnel après l'article 21 (p. 15)

Amendement n° 263 de M. Robert Bret. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 22 (p. 16)

MM. le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas, Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Marie-Christine Blandin.

Amendements n°s 159, 160, 163 de Mme Michèle André, 114 de M. Laurent Béteille ; amendements identiques n°s 161 de Mme Michèle André et 264 de M. Robert Bret ; amendements n°s 317 du Gouvernement, 164 de Mme Michèle André et 304 de M. Georges Othily. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Jacques Mahéas, Laurent Béteille, Robert Bret, le ministre, Georges Othily, le rapporteur. - Retrait des amendements n°s 164, 159 et 304 ; rejet des amendements n°s 160, 163, 161, 264 ; adoption des amendements n°s 114 et 317.

MM. Robert Bret, Michel Dreyfus-Schmidt.

Adoption de l'article modifié.

Article 23 (p. 17)

MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le ministre.

Adoption de l'article.

Article 24 (p. 18)

Mme Nicole Borvo.

Amendements n°s 165 à 174 de Mme Michèle André, 265, 266 rectifié, 267 de M. Robert Bret, 221, 115 de M. Laurent Béteille, 116 de M. Patrice Gélard, 318 du Gouvernement et 305 de M. Georges Othily. - MM. Jacques Mahéas, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Mme Nicole Borvo, MM. le ministre, Georges Othily, le rapporteur. - Retrait des amendements n°s 305 et 165 ; rejet des amendements n°s 265, 166 à 170 ; adoption de l'amendement n° 221.

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

M. Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet de l'amendement n° 266 rectifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt.

Suspension et reprise de la séance (p. 19)

Rejet des amendements n°s 171 à 174 ; adoption des amendements n°s 115, 116, 267 et 318.

Adoption de l'article modifié.

Article 25 (p. 20)

Amendement n° 33 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 34 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 25 (p. 21)

Amendement n° 268 de M. Robert Bret. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet.

Articles 26 et 27. - Adoption (p. 22)

Article 28 (p. 23)

M. Jacques Mahéas.

Amendements identiques n°s 176 de Mme Michèle André et 269 de M. Robert Bret ; amendements identiques n°s 177 de Mme Michèle André et 270 de M. Robert Bret ; amendement n° 35 de la commission ; amendements identiques n°s 36 de la commission, 178 de Mme Michèle André et 271 de M. Robert Bret ; amendements n°s 179 de Mme Michèle André, 37 rectifié de la commission, 123 rectifié de M. Christian Demuynck, 38 de la commission et sous-amendement n° 314 de M. Robert Bret ; amendement n° 39 rectifié de la commission. - M. Jacques Mahéas, Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, Christian Demuynck, le ministre, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet des amendements n°s 176, 269, 177, 270 et 179 ; adoption des amendements n°s 35, 36, 178, 271, 37 rectifié, 123 rectifié, du sous-amendement n° 314, de l'amendement n° 38 modifié et de l'amendement n° 39 rectifié.

Adoption de l'article modifié.

Article 29. - Adoption (p. 24)

Suspension et reprise de la séance (p. 25)

4. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 26).

5. Maîtrise de l'immigration. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 27).

Article 30 (p. 28)

M. Robert Bret.

Amendements n°s 180 de Mme Michèle André, 273 de M. Robert Bret et 40 de la commission. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Robert Bret, Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois ; Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. - Rejet des amendements n°s 180 et 273 ; adoption de l'amendement n° 40.

Adoption de l'article modifié.

Article 31 (p. 29)

Amendement n° 181 de Mme Michèle André. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin public.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 31 (p. 30)

Amendement n° 309 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 41 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 32. - Adoption (p. 31)

Article 33 (p. 32)

M. Robert Bret, Mme Marie-Christine Blandin, MM. le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt.

Amendements identiques n°s 182 de Mme Michèle André et 280 rectifié de M. Robert Bret ; amendement n° 42 de la commission et sous-amendement n° 320 de Mme Michèle André ; amendements n°s 183 de Mme Michèle André, 43 de la commission et sous-amendement n° 327 rectifié de M. Patrice Gélard ; amendements n°s 184, 186 de Mme Michèle André, 44 à 46 rectifié, 47 à 49 rectifié, 50 rectifié, 51 rectifié, 52 de la commission, 274, 275 de M. Robert Bret ; amendements identiques n°s 185 de Mme Michèle André et 276 de M. Robert Bret ; amendements n°s 53 à 56 de la commission, 322, 323 du Gouvernement, 57 de la commission et sous-amendement n° 219 de M. Laurent Béteille ; amendements n°s 277 à 279, 281 de M. Robert Bret, 58, 310, 59 rectifié bis, 60, 61, 311, 62 à 64 de la commission, 226 de M. Patrice Gélard, 187 et 188 de Mme Michèle André. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Robert Bret, le ministre, Jean Chérioux. - Retrait des amendements n°s 281 et 187 ; rejet des amendements n°s 182, 280 rectifié, 275, 185, 276 à 279 et 188 ; adoption du sous-amendement n° 320 et de l'amendement n° 42 modifié, du sous-amendement n° 327 rectifié et de l'amendement n° 43 modifié, des amendements n°s 44 à 46 rectifié, 47 à 49 rectifié, 50 rectifié, 51 rectifié, 52 à 56, 322, 323, du sous-amendement n° 219 et de l'amendement n° 57 modifié, des amendements n°s 58, 310, 59 rectifié bis, 60, 61, 226, 311, 62 à 64, les amendements n°s 183, 184, 186, 274 devenant sans objet.

Amendement n° 329 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 34 (p. 33)

Amendement n° 189 de Mme Michèle André. - Mme Michèle André, MM. le rapporteur, le ministre, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet.

Amendement n° 330 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 190 de Mme Michèle André. - Devenu sans objet.

Amendement n° 65 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 302 rectifié de M. Jean-Pierre Schosteck, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 191 de Mme Michèle André. - Mme Michèle André, MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 66 de la commission. - Adoption.

Amendement n° 282 de M. Robert Bret. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements n°s 283 de M. Robert Bret et 67 à 69 rectifié de la commission. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Rejet de l'amendement n° 283 ; adoption des amendements n°s 67 à 69 rectifié.

Amendement n° 117 de M. Roger Karoutchi. - MM. Jean-Jacques Hyest, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement n° 70 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendements identiques n°s 192 de Mme Michèle André et 284 de M. Robert Bret ; amendements n°s 71 et 72 de la commission. - Mmes Michèle André, Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet des amendements n°s 192 et 284 ; adoption des amendements n°s 71 et 72.

Amendements identiques n°s 193 de Mme Michèle André et 285 de M. Robert Bret ; amendement n° 73 de la commission. - Mmes Michèle André, Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Rejet des amendements n°s 193 et 285 ; adoption de l'amendement n° 73.

Adoption de l'article modifié.

Renvoi de la suite de la discussion.

6. Dépôt d'une proposition de loi (p. 34).

7. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 35).

8. Dépôt de rapports (p. 36).

9. Dépôt de rapports d'information (p. 37).

10. Ordre du jour (p. 38).

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport sur l'exécution de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, établi en application de l'article 7 de cette loi.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

3

MAÎTRISE DE L'IMMIGRATION

Suite de la discussion d'un projet de loi

déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 396 rectifié, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France. [Rapport n° 1 (2003-2004).]

Rappel au règlement

 
 
 

M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Aux termes du règlement de notre assemblée, il n'est pas permis de déposer un amendement à tout moment de la discussion d'un texte, ce qui est logique et propre à assurer la bonne marche de nos débats. Cependant, lorsqu'un membre du Gouvernement nous suggère d'étudier une proposition autre que celle qu'il avait d'abord présentée en séance, consistant, en quelque sorte, à pénaliser les femmes de la communauté turque maintenues cloîtrées chez elles, il est normal que nous souhaitions, en retour, formuler nos observations, de façon que le ministre puisse, le cas échéant, en tenir compte.

Par ailleurs, je tiens à indiquer à M. Sarkozy que, selon les chiffres de son propre ministère, notre pays compte non pas 400 000 immigrés turcs titulaires d'une autorisation de séjour, mais 178 000, ce qui représente tout de même une communauté importante.

En outre, je souligne qu'il existe des situations particulières. Ainsi, dans mon département, une partie de la communauté turque est de confession chrétienne : cela ne correspond donc pas tout à fait à la description faite lors de la précédente séance.

Quoi qu'il en soit, de manière à pénaliser le moins possible les femmes concernées, je propose, monsieur le ministre, que le demandeur d'un regroupement familial doive s'engager à tout mettre en oeuvre pour faciliter l'intégration de son conjoint et de ses enfants. S'il ne tient pas ensuite cet engagement, c'est lui en premier lieu qui devra en subir les conséquences.

Je vous prie, monsieur le ministre, de bien vouloir prendre en considération cette suggestion.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Mahéas, comme vous le savez très bien, la communauté turque de France comprend à la fois des Turcs qui vivent en France tout en conservant leur nationalité et un certain nombre d'anciens ressortissants turcs devenus Français mais demeurés extrêmement attachés à leur communauté d'origine. Celle-ci compte, selon les associations turques de France elles-mêmes, qui sont nombreuses et dynamiques, quelque 400 000 membres, parmi lesquels des Turcs, des Franco-Turcs et des Français d'origine turque. Telle est la source du chiffre que j'ai cité.

Cela étant, monsieur Mahéas, je vais étudier avec beaucoup d'intérêt la proposition du groupe socialiste, afin, le cas échéant, de la retenir en tout ou en partie. Tout dépend de la façon dont, les uns et les autres, nous concevons ce débat. Nous avons déjà pu esquisser un rapprochement sur certains points, en particulier la semaine dernière. Hier, en revanche, pour diverses raisons, les échanges furent plus tendus, plus difficiles. A cet égard, monsieur Dreyfus-Schmidt, si vous n'êtes pas toujours directement responsable de cette évolution, vous jouez toujours un rôle... (Rires.) Cela correspond d'ailleurs peut-être à mon propre tempérament ! Ne voyez donc pas dans mes propos une critique ; en tout cas, de mon point de vue, ce n'est pas une offense. (Sourires.)

Quoi qu'il en soit, si nous nous inscrivons dans un débat constructif, monsieur Mahéas, où, tout en manifestant un désaccord global quant à la philosophie du projet de loi, vous souhaitez, sur certains points, amender et améliorer celui-ci, le Gouvernement est prêt à consentir des efforts.

M. Jacques Mahéas. Cela a été le cas à propos des étudiants !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Oui, monsieur Mahéas. En outre, vous avez accepté la création d'un fichier des empreintes digitales des demandeurs de visa, tandis que, pour ma part, j'ai également fait des concessions.

Par conséquent, si nous travaillons dans cet état d'esprit, le Gouvernement est disposé à oeuvrer avec l'ensemble des forces politiques, y compris le parti socialiste. J'étudierai donc votre proposition cet après-midi, monsieur Mahéas, afin de vous donner une réponse ce soir ou cette nuit. De toute façon, la procédure parlementaire offre toujours une solution permettant de déposer un amendement faisant l'objet d'un consensus entre nous, si le rapporteur est d'accord.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il n'y a aucun problème !

M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, monsieur Mahéas.

DISCUSSION DES ARTICLES (suite)

M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 15.

TITRE Ier (suite)

Art. 14 bis (interruption de la discussion)
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Art. 16

Article 15

L'article 20 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, la somme : « 1 500 EUR » est remplacée par la somme : « 5 000 EUR » ;

bis Après le troisième alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'amende prévue au premier alinéa n'excède pas 3 000 EUR par passager lorsque l'entreprise a mis en place et utilise, sur le lieu d'embarquement des passagers, un dispositif agréé de numérisation et de transmission, aux autorités françaises chargées du contrôle aux frontières, des documents de voyage et des visas. » ;

ter Dans le 2° du II, les mots : « les documents requis » sont remplacés par les mots : « des documents non falsifiés » ;

2° Au premier alinéa du III, la somme : « 1 500 EUR » est remplacée par la somme : « 5 000 EUR » ;

3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Est punie de la même amende l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque, dans le cadre du transit, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et démuni du document de voyage ou du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable compte tenu de sa nationalité et de sa destination. »

M. le président. L'amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit cet article :

« L'article 20 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa du I, la somme : "1 500 EUR" est remplacée par la somme : "5 000 EUR" ;

« 2° Après le premier alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Est punie de la même amende l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque, dans le cadre du transit, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et démuni du document de voyage ou du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable compte tenu de sa nationalité et de sa destination. » ;

« 3° Après le quatrième alinéa du I, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« L'amende prévue aux premier et deuxième alinéas est réduite à 3 000 EUR par passager lorsque l'entreprise a mis en place et utilise, sur le lieu d'embarquement des passagers, un dispositif agréé de numérisation et de transmission, aux autorités françaises chargées du contrôle aux frontières, des documents de voyage et des visas.

« Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les modalités d'application de l'alinéa ci-dessus. Il précise la durée de conservation des données et de mise à jour des informations enregistrées, les modalités d'habilitation des personnes pouvant y accéder ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès. » ;

« 4° Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :

« Les amendes prévues aux premier, deuxième et cinquième alinéas du I ne sont pas infligées : » ;

« 5° Le 1° du II est ainsi rédigé :

« 1° Lorsque l'étranger a été admis sur le territoire français au titre d'une demande d'asile qui n'était pas manifestement infondée ; » ;

« 6° Le 2° du II est ainsi rédigé :

« Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste. » ;

« 7° Au premier alinéa du III, la somme : "1 500 EUR" est remplacée par la somme : "5 000 EUR". »

Le sous-amendement n° 113 rectifié, présenté par M. Schosteck et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 27 pour modifier l'article 20 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par deux alinéas ainsi rédigés :

« ...° Le III est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'étranger ainsi débarqué sur le territoire français est un mineur sans représentant légal, la somme de 3 000 EUR ou de 5 000 EUR doit être immédiatement consignée auprès du fonctionnaire visé au troisième alinéa du I. Tout ou partie de cette somme est restituée à l'entreprise selon le montant de l'amende prononcée ultérieurement par le ministre de l'intérieur. Si l'entreprise ne consigne pas la somme, le montant de l'amende peut être porté respectivement à 6 000 EUR ou à 10 000 EUR. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de cette consignation et de son éventuelle restitution, en particulier le délai maximum dans lequel cette restitution doit intervenir. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 27 rectifié.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit de prévoir, au 3°, la prise d'un décret après avis de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, afin d'encadrer la numérisation, la transmission, la consultation et la conservation des données transmises par les compagnies aux autorités françaises et relatives aux documents de voyage.

Au 5°, il s'agit de supprimer un cas de dispense d'amende pour les transporteurs.

L'article 20 bis de l'ordonnance prévoit actuellement que les entreprises de transport qui débarquent des étrangers démunis des documents de voyage requis sur le territoire français sont punies d'une amende. Toutefois, l'amende ne leur est pas infligée dans deux cas.

Le premier cas concerne l'étranger débarqué qui demande l'asile et entre sur le territoire français parce que sa demande d'asile n'a pas été jugée manifestement infondée. Cette dispense vise à éviter que les transporteurs refusent systématiquement l'embarquement aux étrangers, alors même que ceux-ci présentent toutes les caractéristiques de vrais réfugiés.

Le second cas de dispense concerne les étrangers qui demandent eux aussi l'asile et qui sont admis sur le territoire français. Ce second cas recouvre le premier, mais son champ est plus vaste. En effet, il inclut des étrangers qui, certes, ont demandé l'asile, mais qui ont été admis en définitive pour d'autres raisons.

Cette situation a pour effet de ne pas inciter les entreprises de transport à contrôler les documents de voyage, puisque de nombreuses dispenses d'amende sont accordées pour ce second motif. L'amendement tend donc à supprimer ce cas de dispense, pour ne conserver que celui du demandeur d'asile dont la demande n'est pas manifestement infondée.

Au 6°, il s'agit de revenir en partie sur le dispositif adopté par l'Assemblée nationale.

Parmi les cas de dispense de l'amende pour les transporteurs, on trouve également, dans le texte de l'ordonnance, l'hypothèse où le transporteur démontre que les documents requis lui ont été présentés à l'embarquement ou que les documents ne présentaient pas d'irrégularité manifeste. L'Assemblée nationale a modifié le dispositif en prévoyant de demander aux transporteurs non plus de démontrer que les documents requis ont été présentés, mais d'établir que des documents non falsifiés leur ont été présentés. On voit mal comment un transporteur pourrait établir qu'il s'agit de documents non falsifiés. En outre, si les documents ne doivent pas être faux, comment pourra-t-il s'exonérer d'amende en prouvant qu'ils ne présentent pas d'irrégularité manifeste ?

L'amendement tend donc à ce que les entreprises soient dispensées d'amende lorsqu'elles établissent que les documents requis leur ont été présentés et que ceux-ci ne présentaient pas d'irrégularité manifeste. De la sorte, cela incitera fortement les entreprises à numériser les documents de voyage, car elles pourront ainsi échapper à l'amende en prouvant que tous les documents requis non manifestement irréguliers leur ont été présentés.

M. le président. Le sous-amendement n° 113 rectifié n'est pas soutenu.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président.

M. le président. Il s'agit donc du sous-amendement n° 113 rectifié bis.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ce sous-amendement à l'amendement n° 27 rectifié de la commission vise à créer un système de consignation du montant des amendes encourues par les transporteurs lorsque l'étranger débarqué est un mineur isolé.

Le but est d'inciter les transporteurs a être plus attentifs, lors des embarquements, lorsqu'ils constatent qu'un passager est un mineur non accompagné par ses parents. Cette disposition est une réponse à la recrudescence du nombre des mineurs isolés débarqués en France : en 2002, 1 167 mineurs isolés ont ainsi été placés en zone d'attente.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 113 rectifié bis.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste s'abstient.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié, modifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 15 est ainsi rédigé.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur le président, le Gouvernement était favorable à l'amendement et au sous-amendement ! (Rires.)

M. le président. Monsieur le ministre, j'ai tellement l'habitude de voir le Gouvernement approuver la position de la commission que j'ai commis un acte involontaire et sous-estimé le poids du Gouvernement dans un débat de cette nature ! (Nouveaux rires.) Toute équivoque est maintenant levée.

Art. 15
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Art. 17

Article 16

L'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, les mots : « , alors qu'elle se trouvait en France ou dans l'espace international des zones aéroportuaires situées sur le territoire national, » sont supprimés ;

2° Dans le même alinéa, les mots : « ou dans l'espace international précité » sont supprimés ;

3° Dans le troisième alinéa du I, les mots : « , alors qu'il se trouvait en France ou dans l'espace international mentionné au premier alinéa, » sont supprimés ;

4° La dernière phrase du même alinéa est supprimée ;

5° Le quatrième alinéa du I est ainsi rédigé :

« Sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un Etat partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000. » ;

6° Avant le dernier alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l'application des deuxième, troisième et quatrième alinéas du présent I, la situation irrégulière de l'étranger est appréciée au regard de la législation de l'Etat membre ou de l'Etat partie intéressé. En outre, les poursuites ne pourront être exercées à l'encontre de l'auteur de l'infraction que sur une dénonciation officielle ou sur une attestation des autorités compétentes de l'Etat membre ou de l'Etat partie intéressé. » ;

7° Le II est ainsi rédigé :

« II. - Les personnes physiques coupables de l'un des délits prévus au I encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;

« 2° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire. Cette durée peut être doublée en cas de récidive ;

« 3° Le retrait temporaire ou définitif de l'autorisation administrative d'exploiter soit des services occasionnels à la place ou collectifs, soit un service régulier, ou un service de navettes de transports internationaux ;

« 4° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction, notamment tout moyen de transport ou équipement terrestre, fluvial, maritime ou aérien, ou de la chose qui en est le produit. Les frais résultant des mesures nécessaires à l'exécution de la confiscation seront à la charge du condamné. Ils seront recouvrés comme frais de justice ;

« 5° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.

« Toute violation de cette interdiction sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 EUR ;

« 6° L'interdiction du territoire français pour une durée de dix ans au plus dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal. L'interdiction du territoire français entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement. » ;

8° Au premier alinéa du III, les mots : « Sans préjudice de l'article 19 » sont remplacés par les mots : « Sans préjudice des articles 19 et 21 quater » ;

9° Le 1° du III est complété par les mots : « , sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément » ;

10° Le 2° du III est complété par les mots : « , sauf s'ils sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou lorsque la communauté de vie a cessé » ;

11° Le III est complété par un 3° ainsi rédigé :

« De toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. »

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, vous avez fait des choix, concernant le centre de la Croix-Rouge de Sangatte, inspirés par la conviction que celui-ci attirait les clandestins. L'honnêteté me conduit à reconnaître que vous avez fait le choix de la démolition non pas seul, mais après avoir consulté des élus.

La majorité des associations, Mme Hélène Flautre, députée européenne, M. Louis Mermaz et moi-même vous avions alerté sur le fait que l'installation d'un centre couvert était un acte humanitaire de protection de clandestins errants, livrés au froid et à la pluie, et non une aubaine pour des étrangers en situation irrégulière. Depuis longtemps maintenant, il n'y a plus d'abri, mais les sans-papiers sont toujours là : plus précaires, plus mouillés, plus malades, plus disséminés... mais toujours là !

La volonté affichée à l'article 16 de combattre les réseaux mafieux, les passeurs sans scrupules, répond à notre souci commun de punir tous ceux qui s'enrichissent grâce à la misère des autres. Et tant mieux si des condamnations mettent un terme à leurs sombres trafics !

Toutefois, attention aux dégâts collatéraux qui frapperaient les personnes animées de préoccupations humanitaires, qu'elles soient isolées ou réunies en association. Pour l'instant, ce sont elles qui se trouvent menacées à cause d'une soupe, d'un pull, d'un lit. Les enfants qui rentrent de l'école demandent à leurs parents qui sont ces gens réfugiés sous un porche, et les parents dormiraient mal s'ils ne faisaient preuve d'un minimum de fraternité, cette fraternité qui est l'un de ces principes de notre République qu'il serait doux de connaître pour être considéré comme intégré.

Monsieur le ministre, Jean-Claude Lenoir et Charles Framezelle ont été mis en examen pour avoir apporté une aide à des étrangers en situation irrégulière. Or nous sommes là très loin des réseaux mafieux.

Des dizaines de personnes vont-elles demain, avec l'application de ce texte, se voir condamnées ? Verront-elles leurs biens saisis ? Il convient d'éloigner le spectre de cette menace, c'est pourquoi nous serons très attentifs au sort qui sera réservé à l'amendement de M. Bret.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous voterons contre l'article 16.

La loi comporte déjà des dispositions visant à condamner le délit consistant à tenter de faciliter, par une aide directe ou indirecte, l'entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d'un étranger. Nous avions naguère obtenu que ne soient pas susceptibles d'être poursuivis pénalement les ascendants ou descendants de l'étranger et leurs conjoints, les frères et soeurs de l'étranger et leurs conjoints, le conjoint de l'étranger ou la personne qui vit notoirement en situation maritale avec celui-ci.

Or voilà que l'on entend une nouvelle fois durcir le dispositif, et ce d'une manière absolument inadmissible.

Tout d'abord, on prévoit que les personnes visées encourront l'interdiction de séjour et l'interdiction judiciaire du territoire français, alors que l'on prétendra tout à l'heure supprimer la « double peine » !

Mais on souhaite aller plus loin encore, en introduisant des conditions de communauté de vie, de non-séparation de corps ou de partage d'un domicile commun pour que les conjoints des parents de l'étranger que j'ai cités puissent bénéficier de l'immunité. Il en va d'ailleurs de même pour le conjoint de l'étranger ou pour la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui, puisque la commission propose de prévoir des restrictions identiques à leur encontre.

En tout état de cause, pourquoi cet acharnement contre des personnes qui, malgré tout, conservent des liens suffisamment étroits avec l'étranger pour choisir de lui tendre une main secourable ?

Mais ce n'est pas tout ! Nos collègues députés communistes avaient déposé un amendement visant à inclure dans le champ du dispositif les seules personnes ayant agi dans un but lucratif. Il leur a été répondu, notamment par M. le ministre, qu'il existe des filières n'agissant pas à titre lucratif. M. le ministre renouvellera sans doute cette réponse tout à l'heure !

Cela étant, à l'Assemblée nationale, on a fini par admettre que l'immunité profiterait « à toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché - c'est-à-dire l'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier - était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, etc. ». Ainsi, si l'on ait sauvé la vie de quelqu'un, on ne sera pas poursuivi. C'est bien la moindre des choses, mais cela ne répond évidemment pas au souci qui est le nôtre : des associations agissant dans un but humanitaire pourront se voir poursuivies.

D'ailleurs, comme s'il ne suffisait pas d'agir pour sauvegarder la vie ou l'intégrité physique, le texte introduit une exception : « sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte ». Si je comprends bien, cela signifie que si l'étranger, reconnaissant qu'on lui a sauvé la vie, vous fait un cadeau, vous pouvez être poursuivi. C'est absolument grotesque.

Aussi, je le répète, nous voterons contre l'article 16.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Peut-on demander républicainement à M. Michel Dreyfus-Schmidt de s'abstenir d'employer des termes injurieux comme le mot « grotesque » ? La conviction de l'autre, maître Dreyfus-Schmidt, n'est pas forcément grotesque. On peut être en désaccord sans que celui qui ne pense pas comme vous soit forcément ridicule. Vous qui aimez tant donner des leçons sur les droits de l'homme, permettez-moi de vous en servir modestement une : le premier des droits de l'homme, c'est de respecter celui qui n'a pas forcément vos convictions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Absolument !

M. Gérard Cornu. Très bien !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est injurieux !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non, il n'y a rien d'injurieux dans mes propos.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le mot « absurde » que vous avez employé hier, c'était pire !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Par ailleurs, ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs, est la transposition dans le droit français de la convention de Palerme.

M. Jacques Mahéas. On va en parler !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Encore une fois, chaque fois que cela vous fait mal, il faut que vous protestiez !

M. Jacques Mahéas. Mais non !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais attendez la fin, car ce n'est pas terminé !

La ratification de la convention de Palerme - et c'est extrêmement intéressant - a été décidée à l'unanimité,...

M. Alain Gournac. Tiens, tiens !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... c'est-à-dire que le groupe socialiste, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, l'a votée. Or nous vous proposons la transposition de ce qui figure dans la convention de Palerme.

M. Jacques Mahéas. C'est inexact !

M. Alain Gournac. Ça fait mal !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Donc, quand une disposition est inscrite dans la convention de Palerme, vous la votez, mais quand elle figure dans le projet de loi présenté par le Gouvernement, vous ne la votez pas. C'est encore une incohérence, qui explique tant de choses !

En outre, que reprochez-vous à ce texte ? Il prévoit d'aggraver les peines contre les esclavagistes des temps modernes, que nous voulons tous combattre, gauche et droite. Qui peut bien penser qu'il est mal d'aggraver les peines contre les passeurs ? Mme Blandin et le parti socialiste ont dit : « Jamais nous ne voterons cela ! » Soit ! Vous avez parfaitement le droit de ne pas voter cette disposition, mais alors, vous ne pourrez plus dire que vous êtes contre les passeurs !

Quant à l'immunité pénale pour les associations, c'est la première fois qu'elle figure dans un texte législatif. Ce qui existait de facto, nous vous proposons de l'inscrire de jure. S'il y avait donc un article qui nécessitait consensus entre nous, c'est bien celui-ci. Je m'aperçois que, même lorsqu'il s'agit d'être plus sévère à l'égard des passeurs, le parti socialiste ne veut pas prendre ses responsabilités, et je le regrette.

M. Alain Gournac. Nous aussi !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, sur l'article.

M. Jacques Mahéas. Vous ne m'en voudrez pas, monsieur le ministre, si je vous dis que vous êtes stupéfiant.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ça, c'est mieux !

M. Claude Estier. Ce n'est pas injurieux !

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas du tout injurieux !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est même flatteur !

M. Jacques Mahéas. Mais vous-même ou vos collaborateurs, avez-vous lu la convention de Palerme ? Vous l'avez souligné, à l'Assemblée nationale comme ici, les socialistes ont voté le projet de la loi de ratification de cette convention. C'est tout à fait vrai !

M. Alain Gournac. Ah !

M. Jacques Mahéas. Je rappelle qu'il s'agit d'un protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée.

L'exemple, fourni par Mme Blandin, de deux individus poursuivis, et condamnables selon votre loi...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non, la loi n'est pas votée : elle n'existe pas ! On ne peut pas condamner sur la base de cette loi !

M. Jacques Mahéas. Ne jouez pas sur les mots, monsieur le ministre ! Il s'agit de personnes qui sont mises en examen. On sait ce qu'est une mise en examen !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. La loi n'est pas votée !

M. Jacques Mahéas. Je vais y venir !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Comment peut-on condamner quelqu'un sur la base d'une loi qui n'est pas votée ?

M. Jacques Mahéas. Si vous ne me laissez pas m'exprimer, monsieur le ministre, je vais finir par dire exactement comme vous : vous ne voulez pas que je m'exprime parce que cela vous fait mal ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je souffre, monsieur Mahéas !

M. Jacques Mahéas. J'utilise à mon tour vos propres mots pour prouver que, quelquefois, ils sont déplacés dans cet hémicycle !

J'en viens très brièvement à la forme et au fond de la convention de Palerme.

D'abord, cette convention, dont j'ai le texte par-devers moi, n'est pas en vigueur. En effet, elle a été ratifiée par trente-huit parties, mais il faudrait qu'elle le soit par quarante. Certes, on n'en est pas très loin. Mais ce qui m'inquiète beaucoup, c'est que l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni n'ont pas encore procédé à cette ratification.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils attendent M. Berlusconi !

M. Jacques Mahéas. Ensuite, ce protocole entrera en application trente jours après la date de dépôt de l'instrument.

La question mérite d'être posée : peut-on faire référence, dans une loi, à la convention de Palerme alors que celle-ci - au moment où j'ai consulté ces documents - n'a pas été ratifiée par quarante Etats ? C'est une question de forme. Ce n'est pas très important, mais il importe tout de même de vérifier la légalité de ce point.

S'agissant du fond, que prévoit la convention de Palerme ? Pour être incriminé, il faut avoir commis intentionnellement les infractions pénales. Je demande simplement que vous le précisiez dans votre texte. Je ne parle pas des associations pour lesquelles vous avez fait un pas, et je vous en donne acte, monsieur le ministre. En l'occurrence, il s'agit de l'individu : « Sera puni celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire et/ou sur l'espace de cette convention. »

Lors de mon intervention dans la discussion générale, je vous ai dit que, dans notre pays, la main tendue, cela existait et que, en tant que maire d'une ville située dans la Seine-Saint-Denis, j'avais tendu cette main à plusieurs reprises. Très franchement, je ne me suis pas senti coupable ! Je n'ai pas demandé à la jeune femme accompagnée de son bébé qui se trouvait à la porte de mon bureau si, alors qu'elle était à la rue, elle avait ou non des papiers. De même que je n'ai pas demandé non plus à la femme battue qui est venue me voir si effectivement elle était en situation régulière.

Je vous pose la question : suis-je celui qui a facilité ou tenté de faciliter l'entrée irrégulière d'un étranger sur le territoire ? Je vous l'assure, en ce qui me concerne, il n'y avait pas de caractère intentionnel, et je n'en ai tiré, d'après la convention de Palerme, directement ou indirectement, aucun avantage financier ou matériel.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, comme votre présentation était particulèrement honnête, le Gouvernement tient absolument à vous répondre, ne doutant pas qu'il lui reste une possibilité de vous convaincre.

Premièrement, je livre un élément au débat : la convention de Palerme est entrée en vigueur le 29 septembre 2003, car nous avons dépassé le nombre fatidique des quarante signataires. J'admets bien volontiers, étant donné qu'il n'est déjà pas facile pour un gouvernement de suivre la progression de ce nombre, que ce n'est pas plus aisé pour les parlementaires. Je livre donc cet élément à titre bibliographique.

Deuxièmement, je vais vous faire passer le texte que le Gouvernement vous présente et le texte de la loi RESEDA : vous constaterez, monsieur Mahéas, qu'il n'y a aucune différence, à l'exception des circonstances aggravantes, dans les conditions que j'ai évoquées.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pour les particuliers !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non !

Troisièmement, s'agissant de l'intentionnalité - je parle cette fois-ci sous le contrôle des juristes de la Haute Assemblée, qui sont nombreux -, la caractéristique du droit pénal, et c'est même ce qui fait sa différence avec le droit civil, c'est que, pour qu'il y ait infraction, il faut qu'il y ait une claire conscience et une intention délictueuse. S'il n'y a pas d'intention délictueuse, il n'y a pas de délit. Au civil, on peut être condamné sans intention ; au pénal, on ne peut pas l'être. Si je me saisis d'un cendrier en pensant qu'il est à moi, je ne commets pas une infraction pénale. Il faut que je manifeste l'intention de dérober quelque chose qui n'est pas à moi. Vous connaissez cette autre règle : en fait de meuble, possession vaut titre. Par conséquent, votre démonstration sur l'intention, monsieur Mahéas, est extrêmement sympathique !

Enfin, vous êtes généreux et courageux. Vous pourrez le rester. Une fois ma loi votée, vous serez toujours aussi généreux, toujours aussi courageux et vous ne courrez aucun risque. Admettez que c'est quand même la meilleure situation pour se présenter comme un individu courageux !

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Jacques Mahéas. Nous avons deux contre-exemples !

M. le président. L'amendement n° 261, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« I. _ Dans le second alinéa du 5° de cet article, après les mots : "tenté de faciliter", insérer les mots : "dans un but lucratif". »

« II. _ Compléter le même alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits ayant, en vertu de leurs statuts, vocation, en France, à défendre ou à assister les personnes étrangères sont exclues du champ d'application de cet article. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous l'avons dit pendant la discussion du projet de loi relatif à l'adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité et nous le répétons aujourd'hui, il n'est pas acceptable d'ériger en délinquants, sinon en grands criminels, ceux qui, de façon désintéressée, apportent une aide aux étrangers en situation irrégulière, spécialement dans un contexte où, on le sait bien, ces derniers sont la proie de passeurs peu scrupuleux, quand ce n'est pas de véritables mafias.

Ce rôle humanitaire est indispensable face à la détresse de ces êtres humains qui vont jusqu'à mettre leur vie en péril pour fuir guerres, famines ou misère, pour gagner un monde qu'ils espèrent meilleur. Nous en avons eu encore un tragique exemple ce week-end avec la découverte d'un homme mort de froid dans le train d'atterrissage d'un avion assurant la liaison Brazzaville-Paris.

Monsieur le ministre, il est impératif de protéger contre des poursuites abusives ces associations, comme le GISTI, la CIMADE, le MRAP, la LDH, et tant d'autres au niveau local, qui portent assistance aux étrangers : la question est de savoir, non pas si elles sont ou non en accord avec une politique gouvernementale, mais s'il faut ou non encourager l'implication associative.

Vous nous proposez, et ce point vient de faire l'objet d'un débat, la transposition de la convention de Palerme qui concerne en effet les trafics de migrants, donc directement les réseaux mafieux.

A notre amendement qui reprend les termes de la directive relative à l'aide à l'entrée, au transit et au séjour irréguliers, en précisant que le délit est constitué lorsqu'il y a un but lucratif, vous avez répondu à l'Assemblée nationale, comme l'a rappelé M. Michel Dreyfus-Schmidt, que le critère était malaisé à manipuler et pouvait laisser de côté des mouvements antirépublicains.

Je ne pense pas qu'il y ait de danger, et ce d'autant moins que - faut-il le redire ? - le Sénat vient d'adopter conforme la disposition qui érige en crime organisé cette aide à l'entrée et au séjour irréguliers. Dès lors, cette précision ne mettrait nullement à l'abri tous ces mouvements terroristes ou extrémistes que nous avons tous à coeur de combattre, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons dans l'hémicycle, et personne ne peut en douter.

Les propos tenus voilà une semaine dans cette enceinte par votre collègue M. Perben et par le rapporteur de la commission des lois ne nous ont pas rassurés, bien au contraire : à la proposition de trouver une rédaction qui mettrait à l'abri de poursuites les associations ayant pour objectif d'apporter une aide désintéressée aux étrangers, le rapporteur M. Zochetto a dit que dès lors que ces associations agissent dans le respect de la loi, il n'y a aucun problème. Quant au garde des sceaux, il a indiqué qu'une « association ne sera pas exonérée de sa responsabilité pénale si elle commet une infraction ».

Ces dispositions, comme la lecture qui en est faite, sont une épée de Damoclès pour les nombreuses personnes qui agissent dans un but altruiste et tout simplement humain. Je serais donc heureux, au-delà de l'aspect polémique du débat, d'avoir votre opinion sur cette question.

Pour toutes ces raisons, nous demandons à l'ensemble de nos collègues d'adopter notre amendement afin d'éviter de telles dérives risquant de mettre gravement en danger ces associations qui jouent un rôle très utile. Non seulement pour l'ensemble des questions soulevées aujourd'hui mais dans bien d'autres domaines, nous avons effectivement besoin d'elles.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à restreindre le délit d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers au seul but lucratif et à créer une immunité de fait au profit des associations de défense d'étrangers.

Concernant le but lucratif, cette condition limitative du champ de l'infraction pose des problèmes de preuve importants. En outre, cette définition ne permettrait pas de couvrir les cas d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers dans un but terroriste.

S'agissant de l'immunité, un amendement adopté par l'Assemblée nationale, sur l'initiative du groupe socialiste, doit déjà protéger les personnes physiques ou morales, donc les associations, qui viennent en aide à un étranger confronté à un danger grave. Il ne convient pas d'aller plus loin au risque d'ouvrir la porte aux filières, qui profiteront de cette immunité.

Par ailleurs, je me permets de rappeler que le projet de loi ne modifie pas la définition de l'infraction d'aide au séjour irrégulier. Les associations ne sont donc pas menacées par ce texte.

Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. N'ayant pas obtenu de réponse claire de nature à apaiser mon inquiétude concernant des personnes dont la démarche est strictement humanitaire - sans retour lucratif, bien entendu -, nous ne pouvons qu'approuver l'amendement présenté par M. Bret. Nous souhaiterions que le Gouvernement nous rassure sur ses intentions quant au comportement de l'Etat à l'égard de ces gens qui nourrissent, apportent des vêtements, un lit, etc.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je retire le mot : « grotesque », non pas qu'il n'exprime pas très exactement ma pensée, mais parce qu'il vous a choqué, monsieur le ministre. Votre texte est « extravagant jusqu'à l'absurde » ! Cela, vous me permettrez de le dire, puisque ce sont les termes que vous avez vous-même employés à notre égard hier soir, nous vous avons d'ailleurs répondu et sur la forme et sur le fond.

Il ne faut pas nous raconter des histoires ! La convention de Palerme contre les filières, oui ! Figurait déjà dans le texte tout ce qu'il fallait pour cela, au nom de Palerme. Nous ne disons pas le contraire : nous sommes tous contre les filières.

Mais, en l'occurrence, ce que nous avons dénoncé, ce sont des mesures aggravées contre des individus, notamment le conjoint, le concubin, les proches. Aussi, ne nous faites pas dire autre chose que ce que nous avons dit !

Certes, vous nous avez donné un cours de droit intéressant. C'est vrai qu'en fait de meubles, possession - de bonne foi, ajoute-t-on à la faculté - vaut titre de propriété. Mais cela, c'est du droit civil, et non du droit pénal.

Quant à votre cours sur l'intention, il est tout de même assez extraordinaire ! Certains peuvent agir, à titre caritatif en effet, dans le but d'aider les gens. Oui, l'intention est là. On ne peut pas le cacher, on ne peut pas le nier.

Vous dites que, jusqu'à présent, il n'existait aucun dispositif pour les protéger en quoi que ce soit. J'en conviens, mais il n'y avait pas non plus de poursuites. Or, le texte actuel permet les poursuites. J'en veux pour preuve que, précisément, il y en a.

Peut-être pourrait-on sous-amender ou rectifier l'amendement n° 261 - je livre l'idée.

S'agissant du I et de l'expression « dans un but lucratif », nous nous sommes expliqués.

Le II est ainsi rédigé : « Les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits ayant, en vertu de leurs statuts, vocation, en France, à défendre ou à assister les personnes étrangères sont exclues du champ d'application de cet article. » Je suggère la modification suivante : « déclarées depuis au moins cinq ans à la date de la publication de la loi », afin d'éviter que ne se créent d'autres associations - qui seraient suspectes - que celles que nous connaissons, qui ont fait leurs preuves et qui, fort heureusement, sont déjà, sinon nombreuses, du moins plurielles. Monsieur le ministre, si nous sommes d'accord sur le fond, proposez-nous quelque chose.

Ce que nous ne voulons pas, nous, c'est que les gens qui, pour reprendre l'expression parfaitement juste de Mme Blandin, agissent, apportent une aide mais qui le font à titre strictement humanitaire puissent être poursuivis.

Aussi, je dépose un sous-amendement pour modifier le texte dans le sens que j'ai indiqué afin que personne ne croit que nous aurions je ne sais quelle idée derrière la tête.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 326, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, et ainsi libellé :

« Dans le dernier alinéa de cet amendement, remplacer les mots : "des faits", par les mots : "de la publication de la loi n° du relative à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France,". »

La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 326.

M. Robert Bret. Après avoir écouté notre rapporteur et au vu de ce qui a été voté par l'Assemblée nationale, je constate que l'on ne répond pas complètement aux inquiétudes et aux interrogations des associations.

Or, il est indispensable aujourd'hui, et il en va de notre responsabilité, de les protéger dans leurs missions. Notre amendement modifié, si M. le ministre en est d'accord, par le sous-amendement déposé par Michel Dreyfus-Schmidt, au nom du groupe socialiste, doit donc être pris en compte.

La question est vraiment importante. Au-delà de tout discours humaniste, c'est concrètement que l'on vérifie la volonté ou non de répondre aux besoins d'associations qui oeuvrent dans ce domaine.

Monsieur le ministre, vous avez affirmé en préambule que vous souhaitiez un grand débat national sur l'immigration. Mais depuis le début de nos discussions - cela se vérifiera dans le Journal officiel -, sur les amendements qui visent à modifier ou à enrichir le texte, vous ne nous répondez jamais.

C'est une bien curieuse conception du débat démocratique et cette absence de réponse peut montrer, monsieur le ministre, en quelle estime vous tenez le Parlement et ses élus !

Je vous demande donc, sur cet amendement comme sur les autres, de nous faire connaître chaque fois l'opinion du Gouvernement. Il en va de la clarté de nos débats.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 326 ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission n'a pas été consultée, puisque ce sous-amendement vient d'être déposé en séance. Mais, à titre personnel, je n'y suis pas favorable !

Je rappellerai simplement qu'un amendement adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative du groupe socialiste doit déjà protéger les personnes physiques ou morales, donc les associations.

Nous ne souhaitons pas aider les filières ; bien évidemment, nous voulons les combattre. (M. Jacques Mahéas proteste.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous n'avons jamais dit que nous voulions les soutenir !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il est identique à celui de la commission.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 326.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le rapporteur a dit par deux fois que l'Assemblée nationale avait adopté un article visant à protéger les associations. Je voudrais tout de même rappeler que ce que vous avez ainsi admis, c'est qu'il n'y a pas de poursuites pénales à l'encontre des personnes physiques ou morales lorsque l'acte reproché est, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger..., sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte.

C'est de la roupie de sansonnet, permettez-moi de vous le dire ! On n'est pas poursuivi uniquement dans le cas où l'on sauve la vie. Encore heureux ! On devrait même recevoir la médaille du sauvetage et être à l'honneur.

Ces dispositions ne répondent absolument pas à notre souci de ne pas voir poursuivis ceux qui agissent dans un but purement caritatif.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Je tiens à compléter les propos de notre collègue, Michel Dreyfus-Schmidt : la loi sanctionne explicitement la non-assistance à personne en danger. Vous ne pouvez donc pas dire, monsieur le rapporteur, que le texte adopté par l'Assemblée nationale protège les associations. Il leur permet seulement de respecter la loi.

N'utilisez pas de faux arguments pour essayer de vous dédouaner !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 326.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 261.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous demandons un vote par division sur cet amendement, et un scrutin public sur le paragraphe II.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. On a déjà commencé de voter !

M. le président. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'amendement n° 261, non modifié. Si nous pouvions considérer cet amendement dans sa globalité, ce serait aussi clair ! En effet, en rejetant le sous-amendement n° 326, le Sénat, implicitement, n'a pas adopté la séparation des paragraphes I et II.

Je suis sûr de pouvoir compter, au moins sur ce plan, sur votre entière compréhension, monsieur Dreyfus-Schmidt, compte tenu de l'expérience que vous avez des fonctions que j'occupe en cet instant.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, sur le fond, je ne suis pas du tout d'accord avec vous.

Le sous-amendement n° 326, qui était relatif au paragraphe II de l'amendement n° 261, a été repoussé à main levée. N'en parlons plus.

En ce qui concerne l'amendement n° 261, j'ai déjà demandé tout à l'heure, et je le confirme, un vote par division.

Je demande par ailleurs un scrutin public sur son paragraphe II.

M. René Garrec, président de la commission des lois, et M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Le vote était commencé !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote sur l'amendement n° 261.

Mme Nicole Borvo. Je regrette vraiment que le Gouvernement ne nous ait pas donné son avis parce que nous avons présenté la même demande à M. le garde des sceaux dont la réponse a été inquiétante. Or il serait tout à notre honneur aux uns et aux autres de réfléchir plus avant à cette question.

Je constate que ce n'est pas possible et je voudrais, monsieur le président, faire porter ma demande de scrutin au public, non pas sur l'article 16, mais sur notre amendement n° 261.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le vote est commencé !

M. Robert Bret. Non ! Il n'est pas commencé !

M. le président. C'est un élément nouveau. Mme Borvo demande que le Sénat se prononce par scrutin public sur l'ensemble de l'amendement n° 261. De son côté, M. Dreyfus-Schmidt demande un vote par division sur cet amendement. En outre, je suis saisi d'une demande de scrutin public du groupe CRC sur l'article 16. Tout cela pourrait bien finir par trois scrutins au lieu d'un ou de deux !

M. René Garrec, président de la commission. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. René Garrec, président de la commission. Selon le règlement, « dans les questions complexes, la division du texte est de droit lorsqu'elle est demandée... ».

Or depuis quand cette question est-elle complexe ?

M. Jacques Mahéas. C'est vous qui posez la question !

M. René Garrec, président de la commission. Comme mes collègues, j'estime qu'il ne faut pas inventer des complexités qui n'existent pas.

M. Henri de Raincourt. Ah ! C'est un élément nouveau !

M. le président. Je souhaite faire l'économie d'un certain nombre d'explications de vote supplémentaires, parce que je crois que tout a été dit sur le I, sur le II, sur l'ensemble et sur la totalité ! (Sourires.)

Dès lors, je mets aux voix le paragraphe I de l'amendement n° 261.

(Ce texte n'est pas adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix, par scrutin public, le paragraphe II de l'amendement n° 261.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je souhaiterais savoir si c'est vous, monsieur le président, qui avez décidé du vote par division. En effet, j'ai peut-être raté un épisode, mais je n'ai pas entendu que la Haute Assemblée avait été interrogée sur cette intéressante proposition de M. Michel Dreyfus-Schmidt.

Si le président décide qu'il s'agit d'une situation complexe et que la division est de droit, naturellement, je m'inclinerai, mais cela n'a pas été précisé.

M. le président. Monsieur le ministre, à un certain moment, accéder à une demande de vote par division peut permettre de faire l'économie d'un certain nombre d'explications complémentaires !

M. Louis Souvet. Cela m'étonnerait !

M. le président. J'essaie de tenir compte du facteur psychologique qui vient s'ajouter au caractère technique.

Je mets aux voix le paragraphe II de l'amendement n° 261.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ? ...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)


M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 12 :

Nombre de votants314
Nombre de suffrages exprimés314
Pour114
Contre200

Je mets aux voix l'ensemble de l'amendement n° 261.

Mme Nicole Borvo. Je retire ma demande de scrutin public.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le 10° de cet article :

« 10° Le 2° du III est ainsi rédigé :

« 2° Du conjoint de l'étranger, sauf s'ils sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. Les notions de séparation de corps et d'autorisation à résider séparément ne s'appliquent qu'au mariage.

Quant à la communauté de vie, si elle a cessé, la personne ne peut plus être considérée comme vivant notoirement en situation maritale avec l'étranger.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste est contre, même si cet amendement contribue à mieux rédiger l'article.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.

Mme Nicole Borvo. Je retire ma demande de scrutin public.

(L'article 16 est adopté.)

Rappel au règlement

 
 
 

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour un rappel au règlement.

M. Jacques Mahéas. Il se crée une atmosphère inhabituelle d'invectives entre le ministre de l'intérieur et le groupe socialiste. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Qui a commencé ?

M. Jacques Mahéas. En effet, lorsque Michel Dreyfus-Schmidt a employé le qualificatif « grotesque », le ministre a été outré. Je me suis donc fait remettre le compte rendu analytique du 9 octobre 2003 où figure la réponse de M. le ministre à mon intervention. Je vous en donne lecture : « Grotesque... »

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'était mérité !

M. Jacques Mahéas. « ... pardon de vous interrompre, mais votre argumentation est grotesque... »

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'était deux fois mérité, monsieur Mahéas !

M. Jacques Mahéas. « Il est donc grotesque... » Vous avez employé trois fois le mot « grotesque » !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Et cela en mérite une quatrième !

M. Jacques Mahéas. Ne faites pas ce que vous n'admettez pas des autres, monsieur le ministre. Nos débats y gagneront en sérénité !

Art. 16
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 18

Article 17

Il est rétabli, après l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, un article 21 bis ainsi rédigé :

« Art. 21 bis. - I. - Les infractions prévues au I de l'article 21 sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 EUR d'amende :

« 1° Lorsqu'elles sont commises en bande organisée ;

« 2° Lorsqu'elles sont commises dans des circonstances qui exposent directement les étrangers à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;

« 3° Lorsqu'elles ont pour effet de soumettre les étrangers à des conditions de vie, de transport, de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité de la personne humaine ;

« 4° Lorsqu'elles sont commises au moyen d'une habilitation ou d'un titre de circulation en zone réservée d'un aérodrome ;

« 5° Lorsqu'elles ont comme effet, pour des mineurs étrangers, de les éloigner de leur milieu familial ou de leur environnement traditionnel.

« II. - Outre les peines complémentaires prévues au II de l'article 21, les personnes physiques condamnées au titre des infractions visées au I du présent article encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.

« III. - Les étrangers condamnés au titre de l'un des délits prévus au I encourent également l'interdiction définitive du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal. »

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le 4° du I du texte proposé par cet article pour l'article 21 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée par les mots : "ou d'un port". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission du délit d'aide à l'entrée ou au séjour irrégulier au moyen d'une habilitation ou d'un titre de circulation en zone réservée d'un aérodrome est une circonstance aggravante. L'amendement étend cette circonstance aux zones réservées des ports.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article n° 17, modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Art. 17
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 19

Article 18

L'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « de l'infraction à l'article 21 » sont remplacés par les mots : « des infractions prévues aux articles 21 et 21 bis » ;

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de condamnation pour les infractions prévues au I de l'article 21 bis, le tribunal pourra prononcer la confiscation de tout ou partie des biens des personnes morales condamnées, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » - (Adopté.)

Art. 18
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 19 bis

Article 19

Après l'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 21 quater ainsi rédigé :

« Art. 21 quater. - I. - Le fait de contracter un mariage aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.

« Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage aux mêmes fins.

« Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 750 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée.

« Les personnes physiques coupables de l'une ou l'autre des infractions visées au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;

« 2° L'interdiction du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal, pour une durée de dix ans au plus ou à titre définitif ;

« 3° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.

« Les personnes physiques condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du présent I encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.

« II. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux deuxième et troisième alinéas du I du présent article.

« Les peines encourues par les personnes morales sont :

« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;

« 2° Les peines mentionnées aux 1° , 2° , 3° , 4° , 5° et 9° de l'article 131-39 du code pénal.

« L'interdiction visée au 2° de l'article 131-39 du même code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

« Les personnes morales condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du I encourent également la peine de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 262, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 21 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« Art. 21 quater. - I. - Le fait de contracter un mariage aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 EUR d'amende. Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage aux mêmes fins.

« Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 300 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée.

« Les personnes physiques coupables de l'une ou l'autre des infractions visées au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;

« 2° L'interdiction du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal, pour une durée de dix ans au plus ou à titre définitif ;

« 3° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.

« Les personnes physiques condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du présent I encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.

« II. _ Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux deuxième et troisième alinéas du I du présent article.

« Les peines encourues par les personnes morales sont :

« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;

« 2° Les peines mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 5° et 9° de l'article 131-39 du code pénal ;

« L'interdiction visée au 2° de l'article 131-39 du même code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

« Les personnes morales condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du I encourent également la peine de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 262.

Mme Nicole Borvo. Nous reparlons des mariages, puisque l'article 19 crée un nouveau délit pour réprimer le fait de contracter ou d'organiser un mariage dans le seul but d'obtenir un titre de séjour.

Comme si cela ne suffisait pas, les sanctions ont été étendues à l'Assemblée nationale par M. Mariani à ceux qui contractent un mariage aux seules fins d'acquérir ou de faire acquérir la nationalité française.

Bien sûr, je ne dis pas qu'il ne faut pas lutter contre les réseaux qui organisent des unions dans de telles conditions, mais il faudrait au moins que nous disposions d'un état des lieux. En effet, comme en matière de délinquance, nous manquons cruellement de chiffres précis sur ces « mariages blancs ». A combien peut-on estimer le nombre des mariages de complaisance organisés chaque année ? Et qu'en est-il exactement de l'importance et de l'implantation des réseaux que vous évoquez, monsieur le ministre ?

J'estime, pour ma part, qu'appréhender les mariages mixtes sous un angle uniquement répressif, ainsi que vous le faites, c'est un peu court et, que vous l'admettiez ou non, quelle que soit votre intention, cela ne fait que jeter la suspicion sur tous les mariages mixtes, voire sur tous les couples mixtes. C'est pourquoi nous considérons qu'il s'agit d'une disposition stigmatisante.

En fin de compte, ceux qui seront inquiétés, ce ne sont pas les réseaux, mais bel et bien tous ceux qui souhaiteront s'unir en toute liberté avec une personne qui n'est pas de leur nationalité.

Cette disposition est non seulement inutile mais aussi disproportionnée.

Inutile, car les tribunaux ont déjà les moyens de réprimer les faits visés en poursuivant les intéressés pour aide au séjour irrégulier, l'étranger en situation irrégulière étant quant à lui poursuivi pour séjour irrégulier : c'est l'article 21 de l'ordonnance de 1945.

J'ajoute que, s'agissant de réprimer les réseaux qui organisent des mariages frauduleux, le même article de cette ordonnance prévoit déjà une aggravation des sanctions si l'infraction a été commise en bande organisée : dix ans d'emprisonnement et 750 000 euros d'amende.

Commençons par appliquer la loi existante avant de la réformer inutilement. Cela est d'ailleurs vrai dans beaucoup des autres domaines que nous abordons depuis quelque temps sur l'initiative du Gouvernement.

Cette mesure est, de plus, disproportionnée. A tel point d'ailleurs que M. le rapporteur a dû revoir le montant des amendes prévues par le texte initial, et acceptées par l'Assemblée nationale, pour les diviser par deux !

Il convient en outre de souligner que les mariages de complaisance ne concernent pas uniquement les étrangers voulant obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. En effet, qui n'a jamais entendu parler de mariages de complaisance entre Français pour obtenir tel ou tel avantage ? Il faut considérer qu'il s'agit d'un délit et le sanctionner en conséquence. Or, en l'espèce, les « mariés complaisants » ne risquent que l'annulation du mariage : aucune amende ni peine de prison n'est prévue.

Au total, nous considérons que, aussi grave soit-elle, cette disposition procède d'un effet d'affichage et qu'elle a pour seul objectif de flatter une partie de l'opinion publique qui ne voit l'immigré que comme un délinquant potentiel, un voleur, un fraudeur, y compris en matière de mariage.

A mes yeux, d'ailleurs, les mariages mixtes constituent avant tout des signes, voire des facteurs d'intégration.

C'est pour toutes ces raisons que nous demandons la suppression de l'article 19.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 30 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 262.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'article 19 du projet de loi tend à la création d'une infraction pénale spécifique et d'un dispositif cohérent de sanctions à l'encontre du fait de contracter ou d'organiser un mariage aux fins d'obtenir ou de faire obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. Ce dispositif permettrait de dissuader les réseaux criminels spécialistes des mariages de complaisance.

La définition du délit semble satisfaisante et assez précise dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale.

Avec les montants réalistes que nous proposons pour les amendes à travers l'amendement n° 30 rectifié, le dispositif serait équilibré, mettant simultanément en avant la gravité du détournement des institutions matrimoniales et celle du détournement des dispositions relatives au droit au séjour.

Le mariage n'est pas un chiffon de papier, mes chers collègues, c'est une institution centrale dans notre société, permettant à l'individu et à la famille de s'épanouir.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à l'amendement n° 262.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Un nombre considérable d'élus nous ont alertés sur la recrudescence des mariages frauduleux, et ces élus appartiennent à toutes les sensibilités politiques.

J'ai sous les yeux une lettre que m'a adressée le préfet de l'Essonne au mois de mars 2003 pour attirer mon attention sur « l'inquiétude de maires de grandes villes confrontés à une recrudescence des mariages frauduleux ». Et, parmi ces maires qui l'ont saisi, le préfet de l'Essonne cite le sénateur-maire des Ulis, Paul Loridant, le député-maire d'Evry, Manuel Valls, et le maire de Corbeille-Essonne, Serge Dassault.

Dans une autre lettre, que j'ai reçue aujourd'hui même, une femme dont je ne dirai que le prénom, Emmanuelle, m'explique combien elle se trouve désemparée après avoir été abusée par un individu qui, peu après l'avoir épousée, a quitté le domicile conjugal, ne faisant face à aucune de ses obligations à partir du moment où il avait obtenu ses papiers.

Ce n'est pas une question sur laquelle le Gouvernement et l'opposition ne peuvent que s'affronter puisque, je le répète, des maires de toute sensibilité politique nous demandent de réagir : ils n'en peuvent plus de devoir célébrer de telles unions !

Je crois que tous les élus de terrain qui sont ici peuvent en porter témoignage, car ils sont tous confrontés à cette réalité et ont besoin qu'on les aide. C'est ce que le Gouvernement vous propose avec cet article.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 262.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sur le principe, le fait de rendre condamnables ceux qui ne se marient que dans un but de fraude peut se comprendre. Mais deux écueils se présentent.

Tout d'abord, la preuve sera extrêmement difficile à rapporter.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas vrai !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par ailleurs, un mariage de complaisance peut aussi être à l'origine d'un très bon couple ! C'est un peu « Mettez-vous à genoux et vous croirez »...

Cependant, l'article 19 va plus loin puisqu'il prévoit également l'interdiction du territoire français. Vous savez que, tout à l'heure, nous proposerons de supprimer totalement l'interdiction judiciaire du territoire. Je voudrais donc que le débat ne soit pas faussé, qu'il soit complet lorsque nous aborderons cet aspect et que, le cas échéant, monsieur le ministre, vous demandiez une seconde délibération pour supprimer du texte l'interdiction judiciaire du territoire là où elle se serait déjà glissée avant que nous débattions sur sa suppression complète.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo. Qui dit que nous sommes pour les mariages frauduleux ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous !

Mme Nicole Borvo. Mesurez-vous bien la gravité des peines que vous prévoyez pour ce type de délit ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais c'est un délit très grave !

Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, je crois que, avec ce dispositif, il sera moins risqué de tuer sa femme...

M. Robert Bret. Ou son mari ! (Sourires.)

Mme Nicole Borvo. ... que d'essayer de chercher à épouser quelqu'un pour avoir la nationalité française !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Voilà un argument brillant !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Permettez-moi d'enfoncer le clou. Dans votre intervention, monsieur le ministre, vous avez clairement indiqué que le groupe socialiste du Sénat était manifestement laxiste alors que, dans l'Essonne, des maires socialistes vous réclamaient une mesure allant dans le sens de la condamnation des mariages blancs.

Mme Nicole Borvo. Ils ne réclament tout de même pas des peines de cinq ans, voire de dix ans d'emprisonnement !

M. Jacques Mahéas. Nous le répétons : nous sommes évidemment contre les mariages blancs et pour la lutte contre les filières plus ou moins mafieuses qui organisent de tels mariages.

En tant que maire d'une ville de plus de 30 000 habitants, depuis plus de vingt ans, je célébre des mariages. Or je n'ai eu l'occasion de saisir le procureur de la République qu'une seule fois. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mes chers collègues, on ne peut pas à la fois dire que le maire est compétent lorsqu'il s'agit de signer les attestations d'accueil et qu'il est incompétent lorsqu'il s'agit de juger si un mariage est frauduleux ou non.

Evidemment, la saisine du procureur de la République est facilitée s'il y a une opposition au mariage. Mais force est de reconnaître - il serait d'ailleurs très intéressant de disposer de statistiques en la matière - que cela se produit très rarement. Dans le cas unique que je citais, la personne qui s'opposait au mariage ne s'est manifestée qu'après la célébration ; ce n'était qu'un quart d'heure après, mais il était déjà trop tard et c'est alors que j'ai saisi le procureur de la République.

Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons que nous interroger sur le niveau des sanctions. D'autant qu'il peut s'agir de situations extrêmement douloureuses. Ainsi, le mariage que j'ai évoqué avait nécessité l'autorisation des parents de la jeune fille compte tenu de l'âge de celle-ci.

Nous ne sommes pas contre une disposition de cet ordre sur le principe, mais, avant que nous soyons amenés à nous prononcer, il serait bon que nous puissions disposer de quelques éléments d'appréciation. Parce qu'il y a tout de même une certaine disproportion entre le nombre de recours en annulation et l'explosion du nombre de mariages blancs que vous nous décrivez, monsieur le ministre.

Y a-t-il peu de recours en annulation parce que, une fois le mariage prononcé, les personnes qui seraient susceptibles de les introduire n'en ont pas la capacité ? Peut-être conviendrait-il alors de leur apporter une aide.

En tout cas, monsieur le ministre, sachez que nous sommes opposés aux mariages blancs, mais que nous aimerions avoir des indications un peu plus précises que les lettres que vous avez mentionnées.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, je veux rendre hommage à votre grande cohérence : vous êtes contre les mariages blancs, mais vous êtes tout autant contre l'idée de faire quoi que ce soit pour les éviter ! C'est en fait l'attitude que, pendant cinq ans, vous avez eue à propos de l'insécurité : vous étiez contre l'insécurité, mais vous vous demandiez si elle existait vraiment et, à force d'organiser des colloques sur le sujet, vous avez exaspéré les Français, qui vous ont tourné le dos !

S'agissant de l'immigration clandestine, nous nous trouvons exactement dans la même situation : vous n'osez pas dire que vous êtes pour une certaine forme de tolérance, car vous savez que les Français ne la supportent plus, mais, en même temps, vous n'osez pas « enclencher la première » pour faire quelque chose. Ce que vous nous proposez, c'est sans doute de procéder à de nouvelles études, d'organiser de nouveaux colloques, d'élaborer de nouveaux rapports sur un sujet que chacun connaît et sur lequel les Français nous ont demandé, en avril 2002, d'agir.

Nous sommes au coeur d'un débat politique majeur : sommes-nous, oui ou non, décidés à prendre le taureau par les cornes pour éviter que certains abusent de pauvres femmes en vue d'obtenir la nationalité française ?

Je respecte tout à fait le témoignage de M. Mahéas, mais, si les lettres que j'ai citées ne l'ont pas convaincu, sa propre expérience ne m'a pas convaincu davantage. Ce que, moi, je sais, c'est que je reçois quantité de témoignages d'élus, de gauche comme de droite, qui demandent à l'Etat de ne plus les laisser seuls.

Les Français nous ont donné mandat d'agir ; maintenant, la Haute Assemblée est informée ; le Gouvernement propose d'agir ; le groupe socialiste hésite à agir. Eh bien, je propose que nous le laissions à ses hésitations et que, nous, nous avancions ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jacques Mahéas. Il ne s'agit absolument pas de cela !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous avez déjà expliqué votre vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je veux seulement dire à M. le ministre que nous nous sommes mal compris. Nous avons simplement demandé des précisions. Nous hésitions à prendre part au vote, mais, pour ne pas fournir d'arguments à M. le ministre, nous voterons l'amendement de la commission et l'article 19 ainsi modifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 262.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'article 19.

M. Jacques Mahéas. Décidément, nous avons du mal à nous faire comprendre, monsieur le ministre ! (Exclamations et rires sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe François. Vous, c'est sûr !

M. Jacques Mahéas. J'ai bien indiqué, et le compte rendu de nos débats en fera foi, que nous étions contre les mariages blancs. J'ai témoigné de mon expérience. Je ne conteste pas qu'ailleurs, par exemple dans l'Essonne, un certain nombre de difficultés puissent se rencontrer.

J'ai constaté, d'autre part, que le niveau des peines était très élevé, et d'ailleurs notre assemblée l'a abaissé sur proposition de la commission.

J'ai aussi demandé que nous soient apportées certaines précisions quant au nombre des recours en annulation, mais, monsieur le ministre, vous n'avez pas pu nous les fournir. Vous vous contentez de nous donner un sentiment et de faire état de deux lettres. Sur votre bonne foi - il est assez rare que je la reconnaisse -, étant contre ces mariages blancs, nous allons voter cet article 19. Alors, monsieur le ministre, ne nous prêtez pas une attitude qui n'est pas la nôtre !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, pour explication de vote.

M. Louis Souvet. Expérience contre expérience, la mienne vaut peut-être celle de M. Mahéas. Je ne suis le maire que d'une modeste commune de 30 000 habitants et, chez nous, cette année, au moins quatre mariages blancs ont été empêchés. Il n'y a pas forcément de recours en annulation, tout simplement parce que nous les découvrons avant la célébration.

Mme Nicole Borvo. Tant mieux !

M. Louis Souvet. Ce fut encore le cas il y a deux ou trois mois. Nous avons été alertés par la police de l'air et des frontières. Les documents avaient été falsifiés d'une manière si habile que, sans son intervention, nous n'aurions pu déceler la fraude.

Je crois donc qu'il faut s'en tenir à la rigueur de ce que nous faisons. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 19, modifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste vote pour.

(L'article 19 est adopté.)

Art. 19
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 19 ter

Article 19 bis

Après l'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 21 quinquies ainsi rédigé :

« Art. 21 quinquies. - Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier sera tenu d'acquitter une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.

M. Robert Bret. Le présent article, qui a été introduit par l'Assemblée nationale, vise à imposer à l'employeur qui a recruté un étranger en situation irrégulière la prise en charge des frais de réacheminement vers le pays d'origine.

A la lecture de cet article, on peut mesurer le déséquilibre qui existe entre la sanction à l'égard de l'employeur de main-d'oeuvre irrégulière et celle dont fait l'objet le travailleur clandestin : ce dernier, à la suite de l'adoption, la semaine dernière, de l'amendement de notre collègue Jean-Jacques Hyest, se verra immédiatement expulsé, au même titre que le proxénète ou le trafiquant de drogue, s'il est titulaire d'une carte qui ne lui donne pas l'autorisation de travailler. Initialement, le travailleur clandestin se voyait même infliger une amende de 3 750 euros et une interdiction du territoire de trois ans !

De l'autre côté se trouve l'employeur qui, lui, a fait consciemment le choix de l'embauche d'un travailleur clandestin, dans le but, faut-il le rappeler ? d'une exploitation éhontée et à bas prix. Il pourra se voir, certes, infliger des amendes et des peines complémentaires, mais l'on sait, monsieur le ministre, que ces poursuites restent rares : 7 % seulement des verbalisations pour travail au noir concernaient des étrangers sans papiers en 2002.

Pourtant, ces pratiques sont loin d'être des cas isolés. Voilà quelques jours, nous en avons eu à nouveau un exemple avec la mise en examen et l'incarcération à Bordeaux d'un homme qui proposait, contre rémunération, aux exploitants agricoles de la Gironde les services d'ouvriers agricoles marocains à des conditions « très avantageuses », en infraction, bien sûr, avec toutes les dispositions régissant l'emploi de personnes étrangères. Ces ouvriers entrés avec des visas touristiques étaient contraints de verser des « droits d'inscription » de 1 500 euros chacun !

Cette affaire, monsieur le ministre, confirme l'exploitation des personnes étrangères dans le cadre des travaux saisonniers, sur laquelle, il n'y a pas si longtemps, j'ai attiré l'attention de votre ministère à travers une question écrite.

Comme le souligne Pierre Brelan, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique, l'INRA, dans un article d'avril 2003 publié dans Le Monde diplomatique, alors que la production des fruits et légumes constitue l'un des secteurs les plus soumis au libéralisme sauvage dans le cadre de la PAC, « il faut une armée de réserve d'ouvriers agricoles qui est assurée par la main-d'oeuvre immigrée clandestine. Il y a une véritable articulation, une complémentarité officielle ».

On le sait, les rares études menées en ce domaine confirment que certaines pratiques confinent à un véritable esclavagisme. Je souhaite à nouveau dire ici que ce n'est pas par la pénalisation du travailleur clandestin, qui est avant tout victime, que l'on combattra le travail clandestin et les filières qui en découlent. Dans l'exemple récent que j'ai cité, il y avait des rabatteurs qui oeuvraient au Maroc : c'est à eux qu'il convient de s'attaquer, monsieur le ministre !

De plus, l'amendement voté à l'article 6 bis suscite d'autres interrogations : par exemple, expulsera-t-on le demandeur d'asile qui travaillera ?

Cet article, qui pose donc de réels problèmes, mérite, monsieur le ministre, un débat de fond.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'article 19 - que nous avons voté - avait, par rapport à beaucoup d'autres articles de ce projet de loi, le mérite de faire la différence entre les filières et les cas particuliers.

Mme Borvo nous dit que les peines sont élevées. Cinq ans, c'est tout de même moins que pour l'assassinat ou le meurtre, même de son conjoint, et, par-dessus le marché, nous devons rappeler qu'en France les textes indiquent des peines maximales mais que les tribunaux ont la latitude de descendre jusqu'à l'exemption de peine ! Le chiffre n'est donc pas extrêmement important.

Mais la différence était faite dans l'article 19 : les peines étant portées à dix ans lorsque l'infraction était commise en bande organisée, contre cinq ans dans les autres cas.

Ici, avec l'article 19 bis, il en va tout autrement puisque, nous allons le voir, on ne fait pas de différence entre le responsable de la filière et les employeurs en général - à cette réserve près que l'on ne prévoit cependant pas le bannissement si l'employeur est français : s'il était étranger, on pourrait toujours lui retirer sa carte de résident...

M. Jean-Jacques Hyest. C'est le cas !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non ! Ce n'est pas du tout le cas ! Le texte prévoit : « Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger... ». Celui qui est visé, c'est donc l'employeur en général.

Effectivement, on peut considérer que ce qui est prévu contre le négrier est tout à fait insuffisant et qu'il faudrait frapper beaucoup plus fort. Nous avons d'ailleurs déposé un amendement à cette fin.

En revanche, il faut faire une différence s'il s'agit d'un petit employeur - qu'il soit ou non étranger - qui rend service, par exemple, à quelqu'un qui n'est ni régularisable ni expulsable, ou à quelqu'un qui n'a pas le droit de travailler bien qu'ayant un titre de séjour. En effet, autant il est tout à fait normal, dans le premier cas, de demander que le billet d'avion soit payé par l'employeur, autant cela ne va pas de soi dans le second cas.

Nous avons donc déposé un amendement qui tend à ce que ce dispositif soit facultatif et, surtout, à ce qu'il soit judiciaire. Si des peines doivent intervenir, il faut que les tribunaux se prononcent et arbitrent.

M. Jacques Mahéas. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 21 quinquies de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourraient être engagées à son encontre", insérer les mots : "et de la contribution spéciale au bénéfice de l'Office des migrations internationales prévues à l'article L. 341-7 du code du travail". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement précisant que la contribution forfaitaire à la charge des employeurs ne se substitue pas à la contribution à l'Office des migrations internationales en cas d'introduction d'un travailleur étranger sans passer par l'intermédiaire de l'OMI.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 155, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour insérer un article 21 quinquies dans l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "sera tenu d'acquitter" par les mots : "pourra avoir à acquitter". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je reviens d'un mot sur l'amendement n° 31 : il n'y a pas que l'OMI, il y a également les services municipaux, par exemple. Mais je n'insiste pas, c'est voté. Un peu rapidement à mon goût, mais c'est voté...

J'en viens à l'amendement n° 155.

Le texte qui est proposé dispose : « L'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier sera tenu d'acquitter une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

Nous proposons de remplacer « sera tenu d'acquitter » par « pourra avoir à acquitter », pour que la porte reste ouverte, étant entendu que la sanction doit être obligatoire pour le négrier et facultative pour le petit employeur, qu'il soit français ou étranger.

Monsieur le ministre, je fais appel à votre appréciation : si vous estimez que notre idée n'est pas fausse et qu'il faut faire une différence entre les filières et l'individu qui agit non pour s'enrichir mais pour rendre service, alors il serait normal, à ce moment-là, que la juridiction se prononce à cet égard.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les auteurs de l'amendement souhaitent que les sanctions contre les employeurs d'étrangers en situation irrégulière soient facultatives et appréciées en fonction de la gravité de l'infraction.

L'article 19 bis tend à créer, à la charge de l'employeur, une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement.

Il convient que cette sanction soit toujours infligée, afin de dissuader réellement les employeurs.

L'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je suis désolé, monsieur Dreyfus-Schmidt, mais, si l'on adoptait votre amendement, une famille bourgeoise qui a fait venir une petite Philippine sans papiers pour ne pas acquitter de charges n'aurait pas à payer le billet de retour et l'ensemble des contribuables, notamment les plus modestes, devraient payer à sa place !

Voyez-vous, telle n'est pas ma conception de l'égalité républicaine ! La famille bourgeoise qui fait venir une irrégulière, qui l'emploie sans la déclarer, devra payer le billet d'avion lorsque cette personne aura été trouvée. Il est parfaitement normal que l'employeur assume les conséquences de son choix. Sinon, comment faire respecter la loi ?

De plus, comment faire la différence entre la petite entreprise et la moyenne entreprise ? Trouvez-vous plus judicieux qu'un artisan ou un agriculteur emploie au noir plutôt qu'un industriel ?

Il y a une règle : il est interdit de faire travailler des gens sans les déclarer, parce que la personne qui est employée sans être déclarée n'est pas la seule à être pénalisée, c'est l'ensemble de nos compatriotes qui sont pénalisés par ces comportements, ceux qui ne paient pas faisant payer tous les autres.

Je souhaite donc le maintien de l'article du Gouvernement.

Je ne désire pas du tout peiner M. Dreyfus-Schmidt, mais je lui rappelle que, lorsque nous avions débattu en son temps de l'amendement visant à augmenter la défiscalisation du personnel employé par des familles, le groupe socialiste s'était ému de cette situation. Or il nous propose un dispositif qui reviendrait à les exonérer de ce que devraient payer par ailleurs les chefs d'entreprise !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il n'y a aucune raison d'agir ainsi.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Une fois de plus, nous nous sommes mal fait comprendre ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Nous avons dit non pas que l'employeur bourgeois d'une petite Philippine ne devrait pas payer,...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est pourtant un « petit employeur » !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons dit : « pourra » payer !

M. Jacques Mahéas. ... mais que la possibilité devrait être laissée, après jugement, de mettre ou non le billet d'avion à la charge de l'employeur.

Il faudrait, tout d'abord, définir qui est employeur.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il faut créer une commission ! On en reparlera dans trois ans !

M. Jacques Mahéas. Si, à la sortie d'une grande surface de bricolage, Mme Dupont confie la pose de son papier peint à une personne de bonne volonté qui lui propose ses services, devient-elle pour autant employeur ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.)

Quoi qu'il en soit, nous demandons que le juge puisse décider si cette dame doit payer le billet d'avion de retour. Mais nous considérons que c'est un non-sens, pour ce type de délit, d'obliger le juge à ordonner le paiement du billet de retour.

De surcroît, la personne qui fait poser son papier peint ne sait peut-être même pas que son employé est en situation irrégulière ! Nous avons tous vu, à la porte de grandes surfaces de bricolage, des gens venir faire leur « marché » de travailleurs au noir le matin !

Si les statistiques que j'ai lues sont exactes, 70 % de Français travaillent au noir...

M. Hilaire Flandre. Encourageons-les ! Allons-y !

M. Jacques Mahéas. ... et environ 30 % de travailleurs étrangers font de même. Ils sont aussi condamnables les uns que les autres, mais laissez au juge le soin d'apprécier !

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Après les mariages blancs, le travail au noir !

Comme l'a très bien rappelé M. Mahéas, seuls les employeurs d'étrangers seraient durement sanctionnés financièrement par la disposition que nous condamnons. Les Français qui sont employés au noir ou qui travaillent au noir, eux, ne sont pas visés par ce dispositif.

M. Jean-Jacques Hyest. On ne va pas les renvoyer s'ils sont Français !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. On ne va pas expulser des Français, quand même !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. Jacques Mahéas vous dit que nous n'avons pas réussi à nous faire comprendre. Il n'est pire sourds que ceux qui ne veulent pas entendre !

Monsieur le ministre, vous dites que nous ne voulons pas que les bourgeois paient pour la petite Philippine. Or ceux-là devraient payer deux fois !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Pourquoi ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais il ne s'agit pas de cela. Lorsque nous proposons d'écrire : « pourra avoir à acquitter », cela signifie que la juridiction devra être saisie et devra apprécier selon les cas.

M. Hilaire Flandre. Cinq ans plus tard !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Les bourgeois ne sont en effet peut-être pas les seuls à avoir recours aux services d'un travailleur étranger, ne serait-ce que dans un but caritatif, par exemple en employant une personne qui a besoin de travailler mais qui ne peut pas le faire régulièrement.

Alors, monsieur le ministre, ne déformez pas nos propos ! Dites plutôt que vous ne voulez pas retenir nos idées, qui ont pourtant le mérite de faire la différence entre les situations. Pour faire de la bonne justice, il faut considérer les cas d'espèce !

Vous, vous ne le voulez pas. Dites-le franchement, mais ne caricaturez pas nos propositions !

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.

M. Patrice Gélard. J'en arrive à ne plus rien comprendre !

M. Alain Gournac. Moi non plus !

M. Patrice Gélard. Les sénateurs de l'opposition nous disent qu'ils sont contre les mariages blancs, puis ils déposent des amendements ou votent dans le sens de la perpétuation de ce phénomène.

Ils nous disent qu'ils sont contre le travail au noir et le travail clandestin, puis ils nous proposent des amendements qui, en fin de compte, permettront de les généraliser.

MM. Jacques Mahéas et Michel Dreyfus-Schmidt. C'est faux !

M. Patrice Gélard. Où va-t-on ?

Nous en avons assez de ces débats et de ces discussions qui dégénèrent et qui n'ont qu'un seul but : nous faire perdre du temps. Nous ne l'acceptons pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 155.

Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC s'abstient.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Même les communistes ne vous suivent pas !

M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 21 quinquies de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée : "Le montant total des sanctions pécuniaires pour l'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail ne peut excéder, selon le cas, le montant de l'amende encourue en cas d'infraction aux articles 21 ou 21 bis de la présente ordonnance ou à l'article L. 364-3 du code du travail". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à plafonner le montant cumulé des amendes pénales et administratives encourues par un employeur pour l'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail, afin de respecter le principe de proportionnalité posé par le Conseil constitutionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 19 bis, modifié.

(L'article 19 bis est adopté.)

Art. 19 bis
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Art. 20

Article 19 ter

I. - Le 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est complété par les mots : « ou si pendant cette même durée l'étranger a méconnu les dispositions de l'article L. 341-4 du code du travail ».

II. - Dans le dernier alinéa du I du même article, les mots : « immédiatement mis en mesure » sont remplacés par les mots : « mis en mesure, dans les meilleurs délais, ».

M. le président. L'amendement n° 156, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer le II de cet article. »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement a pour objet de supprimer une disposition introduite par l'Assemblée nationale, sur proposition de ceux que j'ai appelés les « maximalistes », et qui ne figurait pas dans le texte initial du projet de loi.

Cette disposition prévoit que l'étranger auquel est notifié un arrêté de reconduite à la frontière devra être mis en mesure d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix, non plus « immédiatement » mais « dans les meilleurs délais », afin de rendre ce texte cohérent avec les dispositions du projet de loi portant adpatation de la justice aux évolutions de la criminalité. En effet, lors de l'examen de ce dernier projet, ici même, M. le rapporteur a précisément proposé au Sénat, qui l'a suivi, de revenir au mot « immédiatement ». Quoi qu'il en soit, l'expression « dans les meilleurs délais » ne veut rien dire.

Il n'y a aucune raison, au moment même où l'on notifie à l'étranger l'arrêté de reconduite à la frontière, de ne pas lui dire « immédiatement » qu'il peut avertir un conseil, le consulat ou une personne de son choix !

Voilà pourquoi, dans un but de coordination entre les deux textes qui, par hasard, se sont succédé devant nous depuis le début de la session, nous sommes convaincus que vous accepterez enfin un amendement socialiste.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 156, en raison des contraintes particulières qui pèsent sur la procédure de reconduite à la frontière.

Les difficultés fréquentes d'interprétariat exigent en effet une certaine souplesse dans la procédure. Ce facteur explique que, contrairement à ce qui a pu se produire lors des débats sur le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, il convient de conserver l'expression « dans les meilleurs délais ».

Toutefois, je peux déjà annoncer que la commission des lois sera favorable aux amendements n°s 183 et 191, qui rétablissent l'information « immédiate » - et non plus « dans les meilleurs délais » -, du procureur de la République des décisions de placement en centre de rétention et de maintien en zone d'attente. Dans ces derniers cas, en effet, aucune contrainte particulière n'empêche l'information « immédiate » du procureur. L'obstacle de langue ne peut être invoqué.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarcozy, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ne pourrait-on pas, à la rigueur, préciser : « sauf difficultés insurmontables » ? (Non ! sur les travées de l'UMP.) Franchement, il nous paraît tout de même normal de prévenir « immédiatement » l'intéressé de ses droits !

Vous m'opposez le fait que des difficultés peuvent survenir. Alors, écrivez : « sauf difficultés insurmontables, immédiatement... » ! (M. le rapporteur fait un geste de dénégation.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 156.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 19 ter.

(L'article 19 ter est adopté.)

Art. 19 ter
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Art. 21

Article 20

Au deuxième alinéa du I de l'article 22 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « soixante-douze heures ».

M. le président. L'amendement n° 157, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Au début de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« ... Le premier alinéa du I de l'article 22 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est ainsi rédigé :

« L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière peut, dans les 72 heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif. Lorsque l'étranger est maintenu en rétention administrative, ce délai court à compter de sa première présentation devant le juge des libertés et de la détention. »

La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. Dans sa rédaction issue de la loi du 8 janvier 1990, l'article 22 bis de l'ordonnance de 1945 disposait que l'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les vingt-quatre heures suivant sa notification, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif.

La loi RESEDA a allongé le délai de recours en distinguant deux hypothèses : si la notification intervient par voie administrative, le délai passe de vingt-quatre à quarante-huit heures ; si elle se fait par voie postale, le recours peut être formé dans les sept jours qui suivent. L'arrêté ne peut pas être exécuté tant que le délai de recours n'est pas venu à son terme et, si le recours a été formé, tant qu'il n'aura pas été jugé.

L'article 20 du projet de loi tend à allonger le délai dont dispose le président du tribunal administratif ou son délégué pour statuer sur un recours dirigé contre un arrêté de reconduite à la frontière. Ce délai passe de quarante-huit à soixante-douze heures. Notre amendement vise donc à allonger le délai, actuellement de quarante-huit heures, pendant lequel un étranger peut contester l'arrêté de reconduite à la frontière, en le portant à soixante-douze heures, lui permettant ainsi d'exercer son droit de recours dans de meilleures conditions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à allonger le délai dans lequel l'étranger peut déposer un recours contre l'arrêté de reconduite à la frontière notifié par voie administrative dont il est l'objet.

Si cet amendement était adopté, l'étranger ne serait pas susceptible d'être éloigné avant l'écoulement d'un délai de soixante-douze heures, auquel peut s'ajouter le délai nécessaire au juge pour statuer. Le projet de loi fait d'ailleurs passer le délai maximal pendant lequel le juge administratif peut statuer à compter de sa saisine de quarante-huit heures à soixante-douze heures.

Au total, avec ces deux mesures, l'étranger pourrait ne pas pouvoir faire l'objet d'une mesure d'éloignement pendant les six premiers jours de sa rétention.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Exactement !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Certes, aux termes de ce projet de loi, la durée maximale de rétention passe à trente-deux jours, mais l'objectif recherché n'est pas d'allonger la durée de toutes les rétentions. Ces trente-deux jours doivent seulement permettre de remédier aux cas les plus difficiles, qui ne peuvent pas être à l'heure actuelle réglés en douze jours.

Il est une raison supplémentaire de ne pas allonger de quarante-huit à soixante-douze heures le délai pendant lequel l'étranger peut déposer un recours contre l'arrêté de reconduite à la frontière : des garanties nouvelles en matière d'exercice des droits de l'étranger sont apportées par ce texte. L'interprétariat en est d'ailleurs l'illustration. Du fait de ces garanties, le délai actuel de quarante-huit heures est suffisant pour que l'étranger ait la possibilité d'exercer ses droits.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.

M. Robert Bret. Nous voterons l'amendement n° 157, déposé par nos collègues socialistes. Comme la durée fortement allongée de la rétention administrative doit s'accompagner nécessairement d'un allongement corrélatif du droit de contester l'arrêté de reconduite à la frontière, un délai de soixante-douze heures semble d'autant plus adéquat que, très souvent, dans les premières heures de l'arrivée en centre de détention, aucune disposition n'est prévue pour aider l'étranger dans l'exercice de ses droits, et précisément dans l'exercice du droit de recours. En effet, ni associations ni avocats ne sont présents et les moyens matériels, par exemple des lettres types de recours, ne sont pas toujours réunis.

Prévoir que le délai court à compter de la présentation devant le juge des libertés et de la détention apparaît comme une solution opportune dans la mesure où cette visite constitue souvent le seul moyen pour l'étranger de se voir expliquer la procédure applicable, ainsi que les voies de recours qui lui sont attachées.

Voilà les raisons pour lesquelles nous voterons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais rappeler les propos qu'a tenus le rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale, M. Mariani, tels qu'ils figurent dans le compte rendu analytique des débats, à propos d'un amendement de M. Pinte qui tendait à faire partir le délai de l'arrivée dans le centre de rétention : « Des arguments peuvent plaider pour une évolution : il arrive que le délai de recours soit épuisé lors de l'arrivée dans le centre de rétention. » Le rapporteur n'a pas pour autant accepté les trois amendements qui venaient du groupe socialiste, des Verts et de M. Pinte. Il a argué : « Cependant, les dispositions proposées nuiraient à l'efficacité des mesures d'éloignement, car elles allongeraient à l'excès la durée de la phase juridictionnelle pendant laquelle l'étranger ne peut être éloigné. » Au moment où l'on demande de porter le délai de rétention de douze à trente-deux jours, il s'agit de quarante-huit heures !

« La commission a donc préféré faire porter l'effort sur l'information » - on vient de voir ce qu'il en est, dans les meilleurs délais ! - « des étrangers concernés : ce sera l'objet d'amendements à l'article 33. »

C'est une mauvaise solution. Je répète que MM. Caresche, Mamère et Pinte mettaient tous trois en garde contre le risque que des personnes arrivent trop tard au centre de rétention pour pouvoir exercer leur droit de recours. En effet, la procédure va très vite, puisque le juge est tenu, je le rappelle, de statuer dans les quarante-huit heures. Il faut éviter cette situation et le seul moyen, c'est évidemment d'adopter notre amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 20.

(L'article 20 est adopté.)

Art. 20
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Art. additionnel après l'art. 21

Article 21

L'article 23 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par ailleurs, sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, les motifs de l'arrêté d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de la date d'adoption de l'arrêté. Ce réexamen tient compte de l'évolution de la menace que constitue la présence de l'intéressé en France pour l'ordre public, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de l'arrêté. L'étranger peut présenter des observations écrites. A défaut de notification à l'intéressé d'une décision explicite d'abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite refusant l'abrogation. Cette décision est susceptible de recours dans les conditions prévues à l'article R. 421-2 du code de justice administrative. Le réexamen ne donne pas lieu à consultation de la commission prévue à l'article 24. »

M. le président. L'amendement n° 158, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit la quatrième phrase du texte proposé par cet article pour compléter l'article 23 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 : "Dans un délai de deux mois, une décision explicite de refus ou d'abrogation devra être notifiée à l'intéressé". »

La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. L'article 23 de l'ordonnance de 1945 prévoit que l'expulsion d'un étranger peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si sa présence sur le territoire français constitue une menace pour l'ordre public. Le deuxième alinéa de cet article dispose toutefois que l'arrêté d'expulsion peut être abrogé à tout moment. Il prévoit également que, lorsque la demande d'abrogation est présentée à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de l'exécution effective de cet arrêté, elle ne peut être rejetée qu'après avis de la commission du titre de séjour devant laquelle l'intéressé peut se faire représenter.

Le projet de loi complète cet article afin de prévoir, tous les cinq ans, un réexamen systématique par l'administration de ces mesures d'expulsion pour tenir compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa vie personnelle et des garanties de réinsertion professionnelle. Il s'agit d'une des mesures tendant à restreindre l'application de la « double peine ».

Cette disposition constitue une avancée qu'il convient de souligner. L'Assemblée nationale a complété ce dispositif afin de permettre à un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement de présenter par écrit des observations, dans le cadre d'une nouvelle procédure d'examen des arrêtés d'expulsion instituée par cet article tous les cinq ans.

Notre amendement reprend un amendement qui avait été déposé à l'Assemblée nationale par Etienne Pinte. Il prévoit que, dans un délai de deux mois, une décision motivée soit notifiée à l'étranger. Il convient, en effet, compte tenu des conséquences tant pour la personne concernée que pour sa famille, que la décision de refus lui soit signifiée et expliquée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir qu'une décision explicite de refus ou d'abrogation devra être notifiée à l'intéressé à l'issue du réexamen automatique des motifs d'arrêté d'expulsion prévu à l'article 21 du projet de loi. Cette précision semble inutile dans la mesure où le texte prévoit, à défaut de notification à l'intéressé d'une décision explicite d'abrogation dans les deux mois, que le réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite refusant l'abrogation.

Par conséquent, l'étranger pourra exercer les voies de recours quant à la décision s'il l'estime nécessaire. De plus, il convient de laisser une certaine souplesse dans l'application de cette procédure par l'administration. L'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.

M. Robert Bret. Je souhaiterais présenter un sous-amendement ainsi libellé : « Rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par cet article pour compléter l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le réexamen donne lieu à consultation de la commission prévue à l'article 24." »

L'article 21 du projet de loi prévoit un réexamen systématique, tous les cinq ans, des motifs de l'arrêté d'expulsion prononcé sur la base d'une menace pour l'ordre public. A ce titre, il constitue une avancée dans la mesure où la menace que représente l'étranger pour l'ordre public peut évoluer en fonction de considérations tenant tant à la notion même d'ordre public qu'à la situation personnelle de l'étranger expulsé - je pense notamment à sa situation familiale ou aux problèmes de réinsertion.

Le fait d'avoir permis à l'étranger de présenter ses observations constitue également un progrès certain, alors que, la plupart du temps, les décisions prises revêtent un caractère unilatéral.

Néanmoins, il conviendrait de prévoir, par symétrie avec le deuxième alinéa de l'article 23 de l'ordonnance de 1945, que la commission d'expulsion est consultée sur ce réexamen dans les mêmes formes, de façon à permettre à l'étranger de présenter ses observations.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons ce sous-amendement.

M. le président. Monsieur Bret, il s'agit en l'occurrence non pas d'un sous-amendement, car un sous-amendement vient se greffer sur le texte d'un amendement, mais d'un amendement nouveau qui, de ce fait, compte tenu du dépassement des délais, n'est pas, à mon grand regret, recevable.

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, nous ne nous faisons pas d'illusions : nous savons que tout ce que nous proposons, ou à peu près, est rejeté. Même lorsque nous demandons un scrutin public - je le dis à votre intention -, cela ne signifie pas forcément que nous pensons que, de ce fait, notre amendement sera adopté ! Il s'agit de marquer son importance et de permettre à certains de nos collègues de se prononcer en sa faveur. En effet, nous sommes en général cent douze, or nombre de nos amendements ont obtenu cent treize, cent quatorze, et même cent quinze voix. Je tenais à le dire. (Rires et exclamations sur cernaines travées de l'UMP.)

M. Henri de Raincourt. C'est bien !

M. Hilaire Flandre. C'est un succès !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela signifie que, parmi vous, certains ne se contentent pas d'être présents. D'ailleurs, au début de la séance, personne ne s'est proposé pour défendre un amendement présenté au nom de M. Schosteck et du groupe de l'UMP. Il est tombé !

M. René Garrec, président de la commission. Il a été défendu !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le rapporteur s'est finalement dévoué

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ce n'était pas du dévouement, je fais partie du groupe UMP !

M. le président. Nous vous remercions, monsieur Dreyfus-Schmidt, de ce rappel historique ! (Sourires.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout ceci pour vous dire que, en la matière, M. Pinte a mené un combat solitaire au sein de l'UMP, même s'il a profité du recul de M. le ministre sur la « double peine ». M. le ministre a emporté l'adhésion de la majorité, ce qui n'a pas été le cas de M. Pinte. MM. Mamère et Caresche avaient également déposé des amendements similaires.

S'il est bien, en effet, d'examiner les arrêtés d'expulsion tous les cinq ans, il est évidemment complètement idiot de ne pas notifier et motiver le refus d'abrogation à l'intéressé de manière qu'il puisse éventuellement exercer un recours ou qu'un parlementaire, M. Pinte, par exemple, ou l'un d'entre vous - vous êtes en effet nombreux à intervenir pour des cas particuliers - puisse le faire en connaissance de cause.

C'est pourquoi il est très important que le refus d'abrogation ne soit pas tacite. Il doit absolument être notifié, d'une part, et être motivé, d'autre part. Nous avons donc repris l'amendement de M. Pinte qui nous paraît parfaitement justifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 158.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 21.

(L'article 21 est adopté.)

Art. 21
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Art. 22

Article additionnel après l'article 21

M. le président. L'amendement n° 263, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Dans l'avant-dernière phrase du dernier alinéa de l'article 24 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, les mots : "avec l'avis motivé de la commission, à l'autorité administrative compétente pour statuer" sont remplacés par les mots : "avec l'avis conforme de la commission, à l'autorité administrative en charge d'appliquer cet avis". »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, l'article 24 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précise les conditions dans lesquelles une expulsion peut être prononcée à l'encontre d'un étranger.

J'en rappelle les grandes lignes. Tout d'abord, l'étranger doit être préalablement avisé de l'expulsion. Ensuite, il est convoqué pour être entendu par une commission siégeant sur convocation du préfet. Cette convocation doit être remise à l'étranger quinze jours avant la réunion de ladite commission et préciser que ce dernier a le droit de se faire assister d'un conseil et d'être entendu par un interprète. Il peut, en outre, demander à bénéficier de l'aide juridictionnelle.

Devant cette commission, l'étranger fait valoir toutes les raisons qui, selon lui, militent contre son expulsion. Un procès-verbal enregistrant ses explications est alors transmis, « avec l'avis motivé de la commission, à l'autorité administrative compétente pour statuer ». Nous proposons de préciser que le procès-verbal est transmis « avec l'avis conforme de la commission, à l'autorité administrative en charge d'appliquer cet avis ».

Le présent projet de loi ne modifie pas la procédure d'expulsion. Or, il importe que l'avis de la commission d'expulsion redevienne un avis conforme. Il est en effet nécessaire que l'autorité administrative soit liée par l'avis de la commission d'expulsion, car nous constatons que trop d'expulsions sont encore décidées unilatéralement par l'administration, sans garantie, par exemple, quant au respect du droit à la vie privée et familiale. Les cas d'expulsions se déroulant dans des circonstances pour le moins ubuesques sont fréquents.

Nous en avons eu encore un exemple avec cette jeune femme rwandaise, accompagnée de son bébé de deux ans, qui a été embarquée, vendredi dernier, sur le vol de 14 h 40 pour Cotonou, alors même que son arrêté d'expulsion avait été levé le même jour, à 13 heures !

Tel est l'esprit dans lequel nous avons proposé cet amendement dont tout le monde, je pense, comprendra l'intérêt.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir que la commission d'expulsion rende un avis conforme dans le cadre de la procédure d'expulsion prévue à l'article 24 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.

Il me semble au contraire nécessaire de maintenir un avis consultatif, afin que l'autorité de décision, en l'occurrence le préfet, ne soit pas liée par cet avis et conserve une marge d'appréciation. Le dispositif actuel paraît tout à fait équilibré et la commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 263.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 21
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 23

Article 22

L'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 25. - Sous réserve des dispositions de l'article 26, ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 :

« 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, et ce depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an en cas de reconnaissance postérieure à la naissance de l'enfant ;

« 2° L'étranger marié depuis au moins deux ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ;

« 3° L'étranger qui justifie par tous moyens qu'il réside habituellement en France depuis plus de quinze ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ;

« 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ;

« 5° L'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ;

« 6° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.

« Ces mêmes étrangers ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22.

« Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger entrant dans l'un des cas énumérés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application des articles 23 et 24 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans. »

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Au moment d'aborder l'ensemble des articles qui traitent de ce qu'il est convenu d'appeler la « double peine », il me semble utile de préciser l'état d'esprit du Gouvernement sur cette question. Juridiquement, l'expression n'a d'ailleurs aucune signification ; je la retiendrai néanmoins pour la commodité de l'exposé et pour faciliter la compréhension de chacun. Je voudrais, en effet, que les membres de la Haute Assemblée comprennent bien quelle a été la démarche du Gouvernement.

J'ai évolué sur la question de la « double peine ». En effet, il m'est arrivé de prendre position sur cette question sans connaître la réalité du problème que j'ai découverte en recevant sur mon bureau un certain nombre de dossiers qui m'ont permis de comprendre de quoi il s'agissait. Disons les choses comme elles sont : avant d'être confronté à cette réalité, j'avais sans doute une vision quelque peu idéologique d'une question qui est profondément humaine.

Mme Nicole Borvo. Ah !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'aimerais que l'on comprenne le raisonnement du Gouvernement. Trois catégories de personnes doivent être distinguées, et il ne faut pas qu'il y ait d'amalgame dans ce débat très important.

La première catégorie, ce sont les Français qui commettent des délits ou des crimes. Ils sont condamnés à de la prison et, une fois qu'ils ont purgé leur peine, ils restent sur le territoire national.

La deuxième catégorie, ce sont les étrangers qui commettent des crimes ou des délits. Ils sont condamnés et ils sont expulsés après avoir payé leur dette. Parce qu'ils sont étrangers, nous ne les gardons pas, nous les expulsons.

Enfin, la troisième catégorie, celle sur laquelle se focalise principalement - en vérité, les choses sont plus compliquées que cela - la question de la « double peine », est composée de personnes qui sont juridiquement étrangères mais qui se trouvent de facto françaises du fait de l'ancienneté de leur implantation ou des liens qu'elles ont créés avec notre pays.

Je prendrai deux exemples.

M. Chalabi - non pas le chef du groupe terroriste, mais son frère - est né en France. Il est Algérien, mais n'a jamais mis les pieds en Algérie. Il a eu grand tort - c'est une affaire entendue - de ne pas faire régulariser sa situation. C'est un homme qui a environ 35 ans et qui a été condamné, pour association de malfaiteurs, à quatre ans d'emprisonnement. Les Algériens n'ont jamais voulu accorder un visa de retour consulaire à mes prédécesseurs pour une raison qui s'explique d'ailleurs parfaitement : pourquoi voulez-vous que les Algériens récupèrent quelqu'un qui n'a jamais vécu chez eux, qui n'a pas de famille en Algérie et dont tout démontre qu'il est de facto Français ?

Le second exemple est celui de M. Bouchelaleg, un Marocain qui est arrivé en France à l'âge de quatre ans, dont la femme est française, dont les six enfants sont nés en France, donc Français, et qui a commis un certain nombre de fautes. Jamais le Maroc n'a accordé de visa de retour consulaire pour ce ressortissant, arguant du fait que M. Bouchelaleg a peut-être des papiers marocains, mais qu'en vérité il n'a aucune attache au Maroc.

Telles sont les catégories de population concernées par la question de la « double peine ».

Ce qui m'a fait évoluer, c'est une conviction double que j'aimerais faire partager à la Haute Assemblée, non pas par discipline - cela n'a aucun sens sur des questions de cette nature -, mais par conviction, car nous devons, me semble-t-il, émettre sur ce sujet un vote de conviction, qui est le seul vote respectable.

Il y a donc deux raisons pour lesquelles j'ai évolué sur cette question et qui me font vous proposer aujourd'hui ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs.

Premièrement, je considère qu'il est parfaitement injuste, quand quelqu'un a commis une faute, de faire peser le poids de celle-ci sur les épaules de la femme ou des enfants qui n'y sont pour rien. Rien ni personne ne me fera changer d'avis de ce point de vue !

Je suis pour une politique de fermeté - je crois l'avoir démontré -, mais au nom de quoi les enfants de M. Bouchelaleg devraient-ils payer deux fois ? La première parce que leur père a fait de la prison et, la seconde, parce que, du fait que le père a fait de la prison, ils devraient être privés de parents. Chacun comprend ici qu'en tout état de cause il n'est pas question, même si l'on exclut M. Bouchelaleg, d'expulser ses six enfants puisqu'ils sont Français.

Au nom de quoi condamner la femme de M. Bouchelaleg, qui est Française, à vivre sans son mari, et ses enfants, qui sont Français, à vivre sans leur père ? Cela conduirait à une situation parfaitement absurde. Pourquoi devraient-ils payer ? C'est la première raison : la « double peine », telle qu'elle était inscrite, est injuste.

Si je n'ai pas convaincu avec ce premier argument, je pense convaincre avec un second, à savoir que la « double peine » est totalement inapplicable. En effet, comment voulez-vous que quelqu'un dont la femme et les enfants sont Français et vivent sur le territoire français, que vous allez expulser vers un pays où il ne vit plus depuis des années, voire où il n'est jamais allé, n'ait pas pour première et seule idée de revenir dans le pays d'où on l'a expulsé ?

Je crois qu'une politique ferme, c'est une politique qui est juste. Elle est, elle peut être ferme parce qu'elle est juste. Or la « double peine », telle qu'elle était organisée, n'est pas juste.

M. Jospin avait dit qu'il aimerait changer la « double peine », mais que l'opinion publique française n'y était pas prête. Je considère, pour ma part, que c'est une erreur politique majeure. En effet, les responsables politiques que nous sommes, soit nous avons des convictions et, dans ce cas-là, battons-nous pour convaincre, soit nous n'en avons pas et, dans ce cas-là, nous ne nous battons sur rien !

Se demander si l'opinion publique est prête, c'est se poser une question absurde. En effet, elle laisserait accroire que nous autres, les responsables politiques, nous pensons que les Français sont incapables de comprendre ce qui est juste, ce qui est généreux et ce qui est utile. Si nous pensons que c'est utile, alors il faut le faire et le faire maintenant !

M. Christian Cointat. Très bien !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Un dernier point pour que les choses soient parfaitement claires : je n'ai pas voulu entrer dans des exceptions, à deux réserves près - peut-être y reviendrons-nous dans le cadre du débat. Pourquoi un tel choix ? Parce que, à entrer dans les exceptions - par exemple, pour trafic de drogue ou pour viol - on passerait à côté de la logique de la « double peine ». Moi, si je vous demande de réformer la « double peine », c'est, non pas parce qu'il y a des crimes ou des délits qui seraient moins graves que d'autres, mais parce qu'il s'agit de Français, en fait, de facto.

Je n'ai gardé que deux exceptions : l'espionnage et le terrorisme, qui traduisent l'une et l'autre un refus de s'intégrer dans la société française. En effet, ce n'est pas la marque d'une très grande intégration que de comploter contre l'Etat français ou de vouloir le détruire ! Non pas que je considère que l'espionnage est plus grave que le viol, mais le viol ne traduit pas un refus de la nation française, alors que le terrorisme constitue en soi un refus de ce qu'est l'Etat français.

Enfin, monsieur le président, je voudrais terminer en m'adressant à la majorité. Pour nous, qu'est-ce qu'une politique équilibrée ? Cette réflexion politique est pour moi majeure. La France est un pays contradictoire, qui veut à la fois l'autorité et l'humanité. La France souhaite la liberté de faire ce que l'on veut et, dans le même temps, la fermeté que l'on se doit.

Comment peut-on répondre à ces deux aspirations contradictoires ? Par une politique équilibrée. Or, longtemps, on s'est trompé sur ce qu'était l'équilibre. L'équilibre, ce n'est pas la moitié d'une idée forte. La moitié d'une idée forte, ça fait une idée faible. L'équilibre, ce sont deux idées fortes qui se complètent et qui se répondent.

Ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs, contient deux idées fortes : la lutte contre l'immigration clandestine et, en même temps, la générosité, l'humanité, de la réforme de la « double peine ». Voilà pourquoi ce projet de loi fera honneur à ceux qui le voteront ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.

M. Robert Bret. L'article 22, comme l'a rappelé monsieur le ministre, est relatif aux catégories d'étrangers protégés contre les mesures d'expulsion prononcées au titre de menace pour l'ordre public.

Il s'agit en l'espèce d'une protection relative, puisqu'elle saute dès lors que l'étranger est condamné à plus de cinq ans d'emprisonnement ferme, ce qui constitue un recul de taille par rapport à la situation actuelle.

En outre, cette modification de l'article 25 de l'ordonnance aboutit à exclure de la protection contre l'expulsion un certain nombre de personnes qui pensent en faire l'objet dans la situation actuelle. Les étrangers résidant régulièrement en France qui n'ont pas été condamnés définitivement à une peine d'au moins un an de prison ferme - c'est le 7° de l'article 25 - ne sont désormais plus protégés contre l'expulsion, de même que ceux qui résident en France sous le statut étudiant, y compris lorsqu'ils sont sur notre territoire depuis plus de quinze ans.

De plus, la protection octroyée aux six autres catégories l'est parfois sous condition renforcée par rapport à la rédaction actuelle. Ainsi la protection liée à l'ancienneté du séjour est assortie de la condition de ne pas avoir été sous statut étudiant. Les parents d'enfants français doivent contribuer, effectivement, à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance ou depuis un an en cas de reconnaissance postérieure.

Les avancées relatives à la « double peine », monsieur le ministre, car il s'agit bien d'avancées, sont donc singulièrement relativisées ! Nous le regrettons particulièrement, alors que vous avez eu le courage de vous attaquer à cette question qui est source d'injustice, notamment pour les familles et les enfants, et qui aurait dû être traitée depuis bien longtemps.

Les sénateurs communistes y sont d'autant plus sensibles qu'ils ont combattu en faveur d'une telle réforme au moyen de je ne sais combien d'amendements lors de nos débats ou encore par le dépôt de propositions de loi. Nous aurions vivement souhaité que le Gouvernement aille au bout de la logique en supprimant cette protection relative au profit d'une protection absolue à vocation large. Mais, à bien vous écouter, monsieur le ministre, quand vous vous adressez à votre majorité, on comprend aussi les limites de vos marges de manoeuvre !

Les amendements que nous avons déposés, notamment à l'article 24, et que défendra ma collègue Mme Nicole Borvo, nous permettront de mieux nous expliquer sur cette question importante, qui peut permettre au Parlement de faire une avancée significative en faveur de ces populations.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, sur l'article.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, nous devons vous féliciter d'avouer publiquement que vous avez évolué sur ce sujet.

En effet, le 28 novembre 2002 - ce n'est pas si loin ! -, à l'Assemblée nationale, lorsque le groupe socialiste proposait de modifier cette « double peine », vous n'aviez pas répondu présent. Bien au contraire, vous aviez soutenu les positions de députés - même celle du futur rapporteur - qui étaient contre l'abolition, bien évidemment en partie, de cette « double peine ».

Vous avez fait oeuvre pédagogique, et ce fut quasiment un exploit de convaincre, notamment, M. Leonetti, qui disait : « Nous ne pensons pas qu'il soit opportun de légiférer (...). Qu'y a-t-il de pénalisant à rentrer chez soi ? Je le maintiens : juridiquement, il n'y a pas de double peine », et M. Folliot, apparenté UDF, qui affirmait les mêmes intentions. Je ne peux pas, hélas ! vous lire tout ce qui a été dit.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est un peu politicien, quand même !

M. Jacques Mahéas. Cela vous gêne, je le comprends bien !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas à la hauteur ! Soit on veut résoudre le problème, soit on veut le compliquer !

M. Jacques Mahéas. Laissez-moi m'exprimer !

M. Grand disait également : « Il s'agit en fait de supprimer une sanction complémentaire (...) que vous considérez, pour des raisons idéologiques et politiques, comme une double peine. (...) Doit-on abolir cette sanction complémentaire de reconduite à la frontière d'un ressortissant étranger, hors Communauté européenne, ayant commis dans notre pays un grave délit ? Ma réponse est résolument non. S'agit-il en l'occurrence d'une double peine ? Ma réponse est résolument non. »

Le comble, c'est effectivement l'attitude de M. Thierry Mariani, qui, tout comme vous, a dû changer d'avis en quelques mois...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis !

M. Jacques Mahéas. Mais je n'ai jamais dit que vous étiez un imbécile !

M. Henri de Raincourt. Ce serait inexact ! (Sourires.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Merci de le dire !

M. Jacques Mahéas. Ce serait inexact, je suis d'accord avec vous, et ce serait inconvenant de tenir un tel propos dans cette assemblée !

M. Mariani, donc, déclarait : « Vous considérez cette peine comme double, pas nous. Cette peine justifiée n'est pas double. Je suis résolument contre le principe de l'abolition de la double peine. »

Le moins que l'on puisse dire est que, sur les bancs de la droite, vous étiez si peu convaincus de ce qui vous était proposé que vous n'avez même pas voulu en discuter et que ce texte a été balayé d'un revers de main !

Tout à l'heure, vous avez très bien défini les difficultés humaines et juridiques liées à cette « double peine ». A certains moments, le groupe socialiste a essayé de faire évoluer la mesure, mais il n'a pas toujours trouvé d'oreilles attentives. Il faut le dire. Nous, membres du groupe socialiste du Sénat, nous n'avons pas changé et nous avons toujours la même attitude.

Nous pensons que vous avez fait un pas en avant, mais qu'il faut encore améliorer les choses.

M. Jean-Claude Gaudin. Vous allez nous le faire regretter !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils ne veulent pas la résolution de ce problème !

M. Jacques Mahéas. Cette peine, introduite dans le code pénal en 1970, ne visait au départ que certaines infractions à la législation sur les stupéfiants. Depuis, son champ a été progressivement étendu à des infractions très diverses telles que les infractions à la législation sur l'hébergement collectif, les infractions commises lors des manifestations sportives, les infractions à la législation du travail des étrangers, les crimes contre l'humanité - c'est logique -, les atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation, le terrorisme, la participation armée à un attroupement, à une manifestation ou à un groupe de combat, la corruption de magistrat, la subordination de témoin, la torture, les actes de barbarie, les violences et agressions sexuelles, le proxénétisme, le vol, l'extorsion de fonds et le recel aggravé. Au total, l'interdiction du territoire français peut être prononcée pour plus de deux cents infractions !

M. le président. Concluez, monsieur Mahéas !

M. Jacques Mahéas. Nous remercions au passage...

M. Jean-Claude Gaudin. Vous pouvez remercier M. le ministre !

M. Jacques Mahéas. ... toutes les associations et les individus - Bertrand Tavernier, le MRAP, le GISTI, la CIMADE, le collectif pour la « double peine » - qui ont oeuvré pour faire évoluer la situation des étrangers. Nous nous réjouissons que des associations puissent aiguiller les politiques afin que le droit soit modifié dans le bons sens.

Sur cet article 22, nous proposerons différents amendements tendant à supprimer l'interdiction du territoire français, sauf pour les infractions actuellement exclues de l'obligation de motivation spéciale de l'article 131-30 du code pénal, c'est-à-dire les crimes contre l'humanité, les atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation et les infractions de terrorisme puisque, pour les plus graves d'entre elles, l'expulsion peut toujours être décidée, y compris en urgence absolue et sans consultation de la commission d'expulsion.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, il y a des moments où chacun doit essayer de s'élever au-dessus de ses intérêts partisans pour servir l'intérêt général. Ce que vous venez de faire n'est pas très bien, car on ne réformera pas la « double peine » de façon consensuelle en cherchant à humilier les uns ou les autres. On ne réformera la « double peine » qu'en élevant tout le monde vers le haut.

J'ai moi aussi beaucoup travaillé avec les associations. Mais il ne s'agit pas d'un combat des associations contre les politiques. Ce n'est pas non plus une victoire posthume d'une partie de la gauche contre une partie de la droite. Il s'agit de la prise de conscience d'une réalité humaine douloureuse qui nous interpelle tous.

Continuez comme cela, monsieur Mahéas, en essayant d'exploiter des failles politiques ; vous ne parviendrez qu'à faire se cabrer une partie des élus qui n'accepteront pas cette humiliation et, à l'arrivée, ceux qui paieront, ce n'est pas vous, ce sont ceux qui, à l'extérieur, attendent ce que nous allons faire. («Très bien ! » sur les travées de l'UMP.)

Si nous voulons que ce débat soit utile, qu'il aille jusqu'au bout d'une démarche, personne ne doit chercher à humilier l'autre.

M. Jean-Claude Gaudin. Très bien !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai dit moi-même que j'avais changé d'avis. Je n'en tire aucune gloire et je n'en ai aucune honte. Ce qui compte, c'est l'avenir, et ce qui restera, c'est l'action de ceux qui auront eu le courage de supprimer une injustice. (« Bravo ! » et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le ministre, je pourrais m'en tenir à un mot en vous disant : « merci ! ». Mais peut-être devrais-je ne rien dire du tout !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce serait mieux !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout de même, nous voulons bien vous rendre hommage.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je ne vous le demande pas !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais nous aimerions que vous nous rendiez aussi hommage. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Gaudin. C'est plus difficile !

M. Laurent Béteille. Pour ce que vous avez fait pendant cinq ans ? Pour votre courage politique ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En effet, ce que vous avez découvert, il y a longtemps que nous le disions. (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Jean-Claude Gaudin. Pouquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il ne fallait pas vous gêner !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous êtes convaincu aujourd'hui, grâce à votre expérience personnelle. Toutefois, je ne peux pas ne pas rappeler ce que proposait la majorité sénatoriale en 1992 lors de la discussion de la réforme du code pénal.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous ne les aviez pas convaincus !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous non plus, nous ne vous avions pas convaincu à l'époque.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est normal !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Lors de l'examen de la loi Chevènement, nous ne vous avions pas convaincus non plus, et vous n'aviez pas voté notre proposition de suppression de la « double peine ».

Monsieur le ministre, comme vous le dites, tout le monde peut changer. Tant mieux ! Mais nous avons quand même le droit de dire que nous réclamons cette suppression depuis fort longtemps. J'ai également le droit de rappeler que, dans les discussions sur le code pénal, la majorité sénatoriale demandait une interdiction judiciaire du territoire obligatoire dans de très nombreaux cas.

Je vous rappelle les propos que je tenais ici même le 22 avril 1992 : « Monsieur le président, il est dommage de ne pas pouvoir procéder à un vote unique sur les amendements de ce type et se prononcer sur le principe une fois pour toutes. En effet, nous rencontrons cette discussion continuellement depuis le début de l'examen des dispositions du code pénal. Je me contenterai de dire : pas de peines complémentaires obligatoires, que cela concerne ou non les étrangers.

« J'ajoute que l'on ne m'a toujours pas expliqué les raisons pour lesquelles vous demandez que l'interdiction du territoire français soit prononcée à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus. (...)

« Nous demandons, pour notre part, que l'interdiction du territoire soit une possibilité et soit exclue dans les cas où les étrangers méritent une protection particulière parce qu'ils sont quasiment français. Là encore, le texte que vous proposez est un texte d'affiche ».

Finalement, sur le code pénal, un accord était intervenu le Sénat étant, comme toujours, de droite et l'Assemblée nationale de gauche. Une commission mixte paritaire s'était réunie et n'avait été retenue que l'interdiction du territoire, sauf dans certains cas, et, évidemment, elle était facultative.

Et puis, intervinrent les lois Pasqua, Debré et Chevènement et, à chaque fois, nous avons proposé que la « double peine » soit supprimée et que certaines personnes soient protégées en raison du lien étroit et ancien qui les unit à la France.

Permettez-nous, pour l'histoire, de le rappeler, d'autant que - et nous l'avons expliqué - nous allons aujourd'hui plus loin. Nous ne tenons pas à être des précurseurs, mais nous souhaitons que vous nous suiviez.

Votre texte, vous le savez, ne mentionne pas les nombreux cas où l'interdiction du territoire ne devrait pas non plus pouvoir être prononcée. A l'Assemblée nationale, M. Pinte - encore lui ! - a déposé de très nombreux amendements qui n'ont pas été retenus.

Vous me répondrez sans doute : c'est déjà cela, n'en demandez pas trop. Mais si ! Puisque l'Etat peut dans tous les cas expulser tout étranger dangereux pour l'ordre public, supprimons complètement l'interdiction judiciaire du territoire. Le Gouvernement prendra ses responsabilités. Des recours seront évidemment possibles pour savoir s'il s'agit bien d'un cas d'urgence absolue ou d'une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat. Ainsi, il n'y aura plus de discussion devant les tribunaux pour savoir si telle personne doit ou non être protégée.

C'est pourquoi nous demandons, sinon la suppression de l'article 22, du moins sa réserve, de manière que vous puissiez, monsieur le ministre, nous faire part de votre sentiment sur notre suggestion.

M. Pinte, qui connaît bien ce problème, n'est pas loin de penser comme nous : la suppression de la possibilité pour les tribunaux, dans tous les cas, de prononcer une peine d'interdiction du territoire serait, finalement, la meilleure solution. On s'en remettrait alors à la procédure administrative, dans laquelle des recours sont possibles, et cette question n'empoisonnerait plus personne.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, aujourd'hui, à dix-sept heures précises, vous nous avez, pendant cinq minutes, répété mot pour mot les termes du discours liminaire que vous avez prononcé la semaine dernière, lors de l'ouverture de notre débat sur le présent projet de loi. Je rappelle très brièvement vos propos. Il y a trois catégories de personnes : les Français qui commettent un délit, qui vont en prison, et qui en sortent ; les étrangers qui commettent un délit, qui vont en prison, et que l'on expulse ; enfin - et ce sont eux qui posent un problème - les étrangers juridiquement étrangers, mais Français dans les faits.

Le seul changement a été de demander si l'opinion publique était prête. C'est une question absurde, question que vous aviez évoquée la semaine dernière sous la forme : le rôle d'un homme politique est non pas de suivre l'opinion, mais de montrer le chemin des choses justes.

Dans cette répétition, je vois l'utilité de convaincre à nouveau les membres de votre majorité, au départ peu enclins aux limitations de la « double peine ». J'y vois aussi un souci de médiatisation renouvelé d'un acte humain au coeur d'une loi, hélas ! de fermeture de la France.

Mais la médiatisation ne suffit pas et vous n'allez pas au bout de la logique. Alors, moi aussi, je vous répèterai très brièvement mes arguments. C'est toute l'interdiction judiciaire du territoire français qu'il faut abolir. L'Etat dispose d'un autre outil : l'arrêté ministériel d'explusion encadré par la commission des expulsions. Les termes - sans fondement -, « double peine » sont hélas ! bien révélateurs du climat de suspicion qui pèse sur les étrangers, dont la première peine est alors de venir d'ailleurs, tout simplement.

Une France d'accueil en 2003, après les tergiversations des uns et des autres, mérite donc mieux qu'une demi-mesure et c'est l'interdiction judiciaire du territoire français qu'il faut purement et simplement abolir.

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Toutefois, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.

L'amendement n° 159, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous aurions aimé que M. le ministre nous réponde sur notre suggestion de supprimer complètement l'interdiction judiciaire du territoire.

Le présent amendement a pour objet de supprimer l'article 22, de manière à ne retenir que l'expulsion par l'autorité administrative.

Evidemment, si le Sénat n'est pas d'accord avec cette suppression, nous examinerons l'article 22 tel qu'il est. Mais cet amendement fait partie d'une batterie d'amendements tendant à supprimer complètement, je le répète, l'interdiction judiciaire du territoire.

J'aimerais que M. le ministre nous donne son sentiment sur l'évolution possible dans ce domaine.

M. le président. L'amendement n° 160, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« I. - Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "entretien et" par les mots : "entretien ou".

« II. - Dans le même alinéa, après les mots : "prévues par l'article 371-2 du code civil", insérer les mots : "sauf dans le cas où il est dans l'impossibilité de travailler". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Comme vient de l'expliquer M. Dreyfus-Schmidt, nous proposons de supprimer l'article 22, pour que le problème de l'expulsion ne relève que du ministre de l'intérieur ou du préfet, dès lors que la présence de l'étranger constitue une menace grave pour l'ordre public.

L'amendement n° 160 est un amendement de repli pour le cas où l'amendement n° 159 ne serait pas retenu.

Nous proposons de maintenir la définition actuelle de l'autorité parentale.

Nous souhaitons le maintien de la protection contre les expulsions d'un père ou d'une mère d'enfant français. Mais, une fois de plus, vous réduisez les cas qui ouvrent droit à cette protection relative, et vous imposez désormais des conditions cumulatives en cohérence avec l'article 12, qui traitait du contrôle de l'effectivité d'une paternité pour la délivrance d'une carte de résident.

Je m'étonne de cette sévérité dans la mesure où la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale a donné une définition stricte de l'autorité parentale, qui suffit à elle-même dans la lutte contre ces paternités dites « de complaisance ». Il s'agit de l'article 372 du code civil.

De même, en intégrant une condition financière à la définition de la parentalité, vous vous opposez à la définition juste et équilibrée retenue par le Conseil constitutionnel. Ainsi, dans une décision du 22 avril 1997, le Conseil constitutionnel a précisé les critères pour admettre que « doit être regardé comme subvenant effectivement aux besoins de l'enfant le père ou la mère qui a pris les mesures nécessaires, compte tenu de ses ressources, pour assurer l'entretien de celui-ci ».

Je tenais à rebondir sur cette jurisprudence constante pour justifier notre volonté d'insérer dans la loi les mots : « sauf dans le cas où il est impossible de travailler ». Comment comptez-vous vous comporter avec les personnes qui sont privées d'emploi pour cause de chômage, d'invalidité, etc. ? Ne croyez-vous pas que l'on peut se considérer comme parent sans pour autant pouvoir contribuer financièrement à l'entretien de son enfant ? Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs su traiter ce problème en précisant que l'entretien d'un enfant s'apprécie « compte tenu des ressources » des père et mère.

En imposant des conditions cumulatives et non plus alternatives, vous créez une très large discrimination sociale et vous portez atteinte à l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant.

M. le président. L'amendement n° 114, présenté par MM. Béteille, Gélard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Après les mots : "code civil", rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 : "Lorsque la qualité de père ou de mère d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à sa naissance, la condition de contribution à son entretien et à son éducation doit être satisfaite depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an ;". »

La parole est à M. Laurent Béteille.

M. Laurent Béteille. Cet amendement est essentiellement rédactionnel.

Nous avons souhaité éviter une mauvaise interprétation du texte voté par l'Assemblée nationale, qui pourrait laisser penser que les parents, y compris celui qui a reconnu l'enfant dès la naissance, doivent justifier de l'avoir entretenu depuis lors ou depuis plus d'un an.

En fait, cette disposition concerne la reconnaissance d'un enfant postérieure à la naissance, et nous vous proposons, par conséquent, de rédiger ce texte différemment, mais en lui conservant le sens qu'a voulu lui donner l'Assemblée nationale.

M. le président. L'amendement n° 163, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "deux" par le mot : "un". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Il s'agit d'un amendement de repli, qui vise à ramener de deux ans à un an la durée du mariage exigée d'un étranger pour bénéficier d'une protection relative contre une mesure administrative d'éloignement. La durée du mariage de un an est issue de la loi RESEDA du 11 mai 1998.

On parle de la fin de la « double peine », mais, en fait, elle continuera à s'appliquer. J'en veux pour preuve que sont énumérées, à l'article 22, un certain nombre de conditions qui sont restrictives dans leur application.

Comme je l'ai indiqué lors de ma précédente intervention, ce sont des conditions cumulatives : l'autorité parentale et les conditions de ressources permettant l'entretien d'un enfant.

Nous sommes toujours là dans l'état d'esprit de l'étranger fraudeur.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 161 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 264 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Dans le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "quinze" par le mot : "dix". »

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 161.

M. Jacques Mahéas. C'est dans le même état d'esprit que nous vous présentons cet amendement, puisqu'il s'agit de remplacer le mot « quinze » par le mot « dix ». C'est un amendement de repli, qui tend à prévoir que l'étranger qui justifie par tous moyens qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans et non pas quinze ans, ne peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion.

Convenez tout de même que dix ans est un délai raisonnable et que le fait de porter cette durée à quinze ans n'est pas, me semble-t-il, une harmonisation voulue par la Communauté européenne. S'il en était ainsi, nous serions effectivement heureux de l'apprendre de M. le ministre.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 264.

M. Robert Bret. Les modifications de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que vous proposez apparaissent, sur certains points, en recul par rapport à la situation actuelle.

Tel est le cas de l'exigence d'une résidence habituelle depuis plus de quinze ans en France, alors que le 3° de l'article 12 bis prévoit l'octroi de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention : « vie privée et familiale » à tout étranger qui, « ne vivant pas en état de polygamie, justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans », sauf s'il a le statut d'étudiant.

De la même façon, la carte de résident est délivrée de plein droit - le projet de loi n'opère aucune modification sur ce point - à l'étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans.

Dès lors, monsieur le ministre, ne convient-il pas d'harmoniser les durées afin de protéger, dès dix ans de résidence habituelle, contre une mesure d'expulsion constitutive de la « double peine » ?

Tel est le sens du présent amendement, qui est identique à l'amendement n° 161 de nos collègues socialistes.

M. le président. L'amendement n° 317, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« I. _ Supprimer le 6° du texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945.

« II. _ Au dernier alinéa de ce même article, remplacer les mots : "l'étranger entrant dans l'un des cas énumérés aux 1° , 2° , 3° , 4° et 5° peut", par les mots : "l'étranger peut". »

La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est un amendement de coordination qui anticipe sur l'amendement que présentera le groupe communiste républicain et citoyen à l'article 24 et visant à faire passer les étrangers malades de la protection relative à la protection absolue. Le Gouvernement émettra un avis favorable à cet égard.

M. le président. L'amendement n° 164, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° L'étranger ayant suivi une scolarité au moins depuis l'âge de 16 ans jusqu'à sa majorité, qui poursuit effectivement des études supérieures constituées par un enseignement à caractère universitaire ou une formation à caractère professionnel dans un établissement public ou privé habilité à délivré des diplômes visés par l'Etat ; »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. En ce qui concerne les étudiants, vous avez proposé une autre formulation, puisque la condition de situation régulière a été introduite.

Nous retirons cependant cet amendement, car votre proposition nous paraît positive.

M. le président. L'amendement n° 164 est retiré.

L'amendement n° 304, présenté par M. Othily, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé : « ...° Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas au département de la Guyane. »

La parole est à M. Georges Othily.

M. Georges Othily. Cet article 22 trouvera sa pleine application sur le territoire français de la métropole. En raison de la situation particulière de la Guyane, je ne peux accepter toutes ses dispositions, d'autant que l'article 73 de la Constitution dispose : « Le régime législatif et l'organisation administrative des départements d'outre-mer peuvent faire l'objet de mesures d'adaptation nécessités par leur situation particulière ». C'est d'ailleurs ce qui s'est produit à la Réunion avec la loi portant révision du titre XII de la Constitution.

Compte tenu de la spécificité de la Guyane, les dispositions du présent article ne doivent pas s'appliquer à ce département. Aujourd'hui, on ne peut pas dire que la Guyane est française, dans la mesure où près de 60 % de sa population est composée de communautés étrangères. Loin de nous tout esprit de xénophobie ou de racisme, mais on ne peut pas vouloir le développement d'un pays, la cohésion sociale, la reconnaissance de l'identité culturelle guyanaise, tout en acceptant ce qu'on a laissé faire sur ce territoire depuis de très nombreuses années et qui n'aurait jamais dû être fait.

C'est non seulement le sénateur de la Guyane, mais aussi les maires, les élus et la population qui vous demandent, pour éviter les très graves incidents qui risquent d'éclater très prochainement, de voter l'amendement que je vous propose. Il s'agit tout simplement de salubrité publique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les huit amendements restant en discussion ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 159 vise à supprimer l'article 22 du projet de loi tendant à modifier l'article 25 de l'ordonnance relatif aux protections relatives dont peuvent bénéficier certains étrangers.

Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui est favorable à l'évolution prévue au présent article du projet de loi et qui s'inscrit dans une réforme globale de la « double peine ». De plus, l'essentiel des modifications prévues à cet article visent à prendre en compte l'instauration, à l'article 24 du projet de loi, d'une protection absolue contre les arrêtés d'expulsion.

La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 159.

L'amendement n° 160 tend à modifier les conditions devant être remplies par l'étranger parent d'un enfant français qui souhaite bénéficier d'une protection relative contre un arrêté d'expulsion.

Le dispositif issu de la première lecture à l'Assemblée nationale s'appuie notamment sur les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil et convient parfaitement à la commission des lois.

De plus, comme cela a déjà été précisé à l'occasion de la discussion de l'amendement n° 142, il n'est pas souhaitable de compléter les conditions prévues. L'avis de la commission est donc défavorable.

L'amendement n° 114 a pour objet de préciser la rédaction du texte proposé pour l'article 25 de l'ordonnance en indiquant que la condition de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant qui doit être satisfaite par l'étranger depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an s'applique au cas de reconnaissance de l'enfant par l'étranger postérieurement à la naissance.

Cet amendement n° 114 clarifie le texte sans le modifier et reprend une formulation déjà employée au 5° de l'article 12 de l'ordonnance. La commission a émis un avis favorable.

L'amendement n° 163 vise à rétablir la durée d'un an de mariage nécessaire pour que l'étranger puisse, en remplissant les autres conditions prévues au 2° de l'article 25 de l'ordonnance, bénéficier d'une protection relative contre un arrêté d'expulsion.

Cet amendement est contraire à la position de la commission des lois, qui est favorable, elle, à la nouvelle rédaction de l'article 25 de l'ordonnance prévue à l'article 22 du projet de loi, notamment s'agissant de l'extension à deux ans de la durée de mariage nécessaire pour pouvoir bénéficier de cette protection. La commission a émis un avis défavorable.

Les amendements identiques n°s 161 et 264 visent à réduire de quinze à dix ans le nombre d'années de résidence habituelle dont il doit être justifié par l'étranger pour bénéficier d'une protection relative contre un arrêté d'expulsion en vertu du 3° de l'article 25 de l'ordonnance telle que modifiée par l'article 22 du projet de loi.

Cette modification ne semble pas souhaitable, notamment parce que la même durée de dix ans est retenue pour l'étranger résidant régulièrement et non habituellement en France, au 4° du même article. De plus, le nombre d'années retenu est conforme au droit en vigueur. L'avis de la commission est défavorable.

L'amendement n° 317 est un amendement de coordination avec l'amendement n° 267. Il a pour objet de faire bénéficier les étrangers les plus gravement malades et ne pouvant recevoir effectivement de traitement approprié dans leur pays d'origine d'une protection absolue contre l'expulsion.

La commission des lois n'a pas pu se prononcer sur cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

S'agissant de l'amendement n° 304, la suppression de toutes les protections contre la « double peine » pour une partie du territoire français, en l'occurrence la Guyane, s'avère difficile à envisager, même si je conçois tout à fait les difficultés que vous rencontrez, monsieur Othily.

Dans le projet de loi, il est prévu la création d'une commission qui statue sur les conditions particulières de l'immigration en Guyane. Il conviendra donc de revoir l'ensemble de ces questions à l'occasion de leur examen par cette commission.

Je vous propose donc, mon cher collègue, de retirer votre amendement après avoir entendu le Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement partage en tous points les explications données et les positions prises par M. le rapporteur concernant, notamment, l'amendement n° 114 présenté par M. Béteille, sur lequel il a émis un avis favorable.

Mais je me tourne vers M. Othily.

En premier lieu, il me semble tout à fait inconstitutionnel de prévoir une loi pénale qui ne s'appliquerait pas sur le territoire de la Guyane. La censure du juge constitutionnel ne ferait aucun doute. En effet, la loi pénale s'applique sur l'ensemble du territoire national, dont la Guyane fait partie.

En deuxième lieu, monsieur le sénateur, pour m'être rendu en Guyane, voilà peu de temps, je puis dire que votre constat est lumineux de véracité. Quel est le problème de la Guyane ? C'est celui d'une immigration incontrôlée provenant, notamment, de cette frontière avec le Surinam, le Maroni, qui, pour être magnifique, n'en est pas moins très difficile à garder. Or la « double peine » ne saurait constituer une mesure de régulation de l'immigration clandestine, cela n'a rien à voir.

J'ai donné des instructions aux préfets pour qu'ils doublent le nombre d'expulsions et, s'agissant de la Guyane, nous essaierons, avec le préfet Mancini, de faire même davantage. Mais, je le répète, la « double peine » n'a rien à voir ici, ce n'est pas une mesure de régulation de l'immigration clandestine.

En troisième lieu, je vous propose, monsieur Othily, que nous travaillions ensemble, dans le cadre de la commission ici créée, pour voir, notamment en termes d'effectifs, quels moyens nous permettraient d'être plus efficaces afin que la Guyane ne soit pas submergée par un flux migratoire, notamment de Guyaniens - qu'il ne faut pas confondre avec les Guyanais - et de Surinamiens, et répondre ainsi à la juste inquiétude qui est la vôtre.

Au bénéfice de ces explications, vous pourrez convenir que la « double peine » ne change rien. La preuve ? A dispositif de « double peine » inchangé, vous êtes déjà submergés. Si la « double peine » était un rempart, la situation que vous venez de décrire avec beaucoup d'éloquence vaudrait condamnation du maintien de la « double peine » telle qu'elle existe.

En revanche, le Gouvernement apportera des solutions spécifiques et constitutionnelles, qui n'ont rien à voir avec la « double peine », pour la Guyane.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 159.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je regrette vraiment que M. le ministre n'ait pas daigné nous dire ce qu'il pensait de la suppression complète - aujourd'hui, demain ou après-demain -, de l'interdiction judiciaire du territoire. S'il veut bien nous le dire, nous serons satisfaits.

M. Nicolas Sarkozy, ministre, Monsieur Dreyfus-Schmidt, me permettez-vous de vous interrompre ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous en prie, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.

M. Nicolas Sarkozy, ministre, Excusez-moi si je ne me suis pas davantage expliqué, ce n'était pas du tout par arrogance, mais parce que je pensais que chacun s'était déjà beaucoup exprimé.

Le groupe socialiste veut supprimer l'interdiction judiciaire du territoire français en faisant croire que l'on peut réformer la « double peine » par ce coup de baguette magique.

Monsieur le sénateur, il ne sert à rien de supprimer l'interdiction judiciaire du territoire français si l'on ne réforme pas en même temps le régime de l'expulsion. En effet, il serait trop facile de reprendre de la main gauche ce que l'on aurait donné de la main droite !

Par ailleurs, indépendamment de la « double peine », l'interdiction du territoire français est très utile pour les infractions à la législation sur les étrangers, qui représentent 6 000 des 7 000 ITF prononcées chaque année, en attendant, je l'espère, beaucoup plus. Or ces infractions à la législation sur les étrangers n'ont rien à voir avec la question de la « double peine ».

Je me suis engagé à réformer la «double peine », et nous cheminons ensemble sur ce dossier, mais je ne me suis pas engagé, bien au contraire, à empêcher l'expulsion des étrangers en situation irrégulière.

M. Jean-Jacques Hyest. Evidemment !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas du tout le même cas de figure.

Je ne veux nullement fuir mes responsabilités et, si nous pouvons avoir un point de consensus sur la « double peine », il n'est pas question que nous nous passions de l'interdiction du territoire français, qui concerne à 90 % des infractions à la législation sur les étrangers et, pour le reste, des infractions commises par des étrangers sans lien avec la France - je pense aux hooligans dans les manifestations sportives ou aux trafiquants de drogue dans les aéroports - cas pour lesquels je souhaite pouvoir continuer à utiliser des interdictions du territoire. La suppression de cette peine aurait des conséquences telles que, pour le coup, l'argumentation de M. Othily prendrait une pertinence toute nouvelle. Il faut savoir, en effet, que, en Guyane, on prononce de nombreuses interdictions du territoire et qu'elles sont absolument nécessaires.

Ce que je veux, c'est réformer la « double peine », qui correspond à des cas bien précis, et pas l'interdiction du territoire français. J'assume ce désaccord entre nous, mais voilà la réponse que je voulais vous faire, monsieur Dreyfus-Schmidt, en vous priant de m'excuser de ne pas l'avoir fait d'emblée.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. La réponse du ministre est double.

Comme il veut arriver à ses fins, il sait très bien nous dire que l'on doit pouvoir continuer à retirer leur titre de séjour aux personnes qui sont passibles d'une peine. Et, à ce moment-là, il n'y a aucun problème : il n'y a pas besoin d'interdiction du territoire prononcée en justice.

Par ailleurs, il reste toujours la possibilité de l'arrêté administratif d'expulsion sur lequel, encore une fois, nous sommes d'accord.

Bon, je note qu'il vous aura fallu longtemps, monsieur le ministre, pour que vous vous convertissiez à l'idée sinon de la suppression, du moins de la réduction de la « double peine ». J'espère que nous aurons moins longtemps à attendre pour vous voir convaincu du bien-fondé de notre point de vue d'aujourd'hui.

Nous retirons l'amendement n° 159.

M. le président. L'amendement n° 159 est retiré.

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 160.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit encore une fois de protéger le père ou la mère d'enfant français résidant en France et d'empêcher que l'on puisse l'expulser et lui interdire le territoire. En effet, on lui demande d'établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis la naissance ; enfin, c'est vraiment extraordinaire : n'en demandons pas tant !

Notre amendement n° 160 a pour objet de préciser « sauf dans le cas où il est dans l'impossibilité de travailler ». Car il s'agit du père ou de la mère d'un enfant français, ne l'oublions pas ! Même s'il n'a commencé à payer la pension qu'au bout de deux mois, et même s'il ne l'a paie pas - il peut être amené à le faire par la suite -, il y a des liens du sang qui ne sont pas contestables ! Je ne comprends pas pourquoi, monsieur le ministre, vous tenez à ces mesures qui marquent un tel recul par rapport aux protections existantes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 160.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 163.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 161 et 264.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 317.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En fait, monsieur le président, j'avais levé la main pour intervenir sur l'amendement n° 161.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Tant pis !

M. le président. Nous en sommes parvenus à la mise aux voix de l'amendement n° 317, mon cher collègue.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est vrai, comme dit M. Gélard, que nos amendements n'étant de toute façon pas retenus, ce n'est pas la peine que nous les défendions !

M. Patrice Gélard. Je n'ai pas dit cela !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 317.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur Othily, l'amendement n° 304 est-il maintenu ?

M. Georges Othily. L'Assemblée nationale a introduit, à l'article 44 quater, une commission composée de parlementaires, d'acteurs socio-économiques et d'élus, afin qu'ils réfléchissent tous ensemble aux adaptations à apporter aux textes concernant l'immigration en Guyane.

Il y a de cela une quinzaine d'années, j'avais formulé un certain nombre de propositions, qui, malheureusement, n'avaient pas pu aboutir.

Je souhaite que cette nouvelle commission ne soit pas un autre de ces « comités Théodule »...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je m'y engage !

M. Georges Othily. ... et que, très rapidement, elle soit installée pour que nous puissions mettre un frein à ce déversement des communautés étrangères qui viennent vivre de notre système social. Nous déposerons d'ailleurs un amendement en ce sens lors de l'examen de l'article 44 quater.

En espérant que cette proposition soit acceptée,...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Elle le sera !

M. Georges Othily. ... je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 304 est retiré.

La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote sur l'article 22.

M. Robert Bret. Nous allons voter l'article 22. Il faut savoir reconnaître les avancées réalisées, d'autant que le sujet interdit la polémique. Il y a trop de souffrance et de douleur derrière ce que l'on appelle communément la « double peine ». A nous de montrer le chemin, comme nous le faisons aujourd'hui, pour apporter demain d'autres réponses, plus complètes.

Pour nous, sénateurs du groupe CRC, ce n'est qu'une étape sur la voie de l'abolition totale de l'interdiction du territoire français.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si cela ne gêne pas M. le ministre, si, ce faisant, nous ne le compromettons pas, nous allons, nous aussi, voter cet article !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Cela ne fait pas trop mal ? (Sourires.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En effet, il serait tout de même étonnant - et vous en seriez vous-même, monsieur le ministre, assez étonné - que nous ne votions pas ce qui va dans le sens de ce que nous réclamons depuis si longtemps.

M. Jean Chérioux. Cela paraît logique !

M. le président. Je mets aux voix l'article 22, modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Art. 22
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 24

Article 23

Après l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 25 bis ainsi rédigé :

« Art. 25 bis. - L'expulsion peut être prononcée :

« 1° En cas d'urgence absolue, par dérogation à l'article 24 ;

« 2° Lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25 ;

« 3° En cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation aux articles 24 et 25. »

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'article 23 est bien curieux. En effet, il insère, après l'article 25 de l'ordonnance, un article 25 bis qui reprend presque intégralement le texte de l'ancien article 26 de l'ordonnance.

Ainsi, dans le texte proposé, l'expulsion peut être prononcée, premièrement, en cas d'urgence absolue, par dérogation à l'article 24 de l'ordonnance ; deuxièmement, lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25 de l'ordonnance, et, troisièmement, en cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation aux articles 24 et 25 de l'ordonnance.

Nous étions prêts à supprimer les articles 24 et 25 de l'ordonnance et à faire de cet article-ci la seule possibilité, au demeurant, très large, d'expulsion administrative, en supprimant totalement l'interdiction judiciaire du territoire.

Si on compare à ce « nouvel » article 25 bis l'ancien article 26, on voit que ce dernier prévoyait, de même, que l'expulsion pouvait être prononcée, premièrement, en cas d'urgence absolue, par dérogation à l'article 24 de l'ordonnance - le texte est identique - ; deuxièmement, lorsqu'elle constituait une « nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25 de l'ordonnance » - exactement comme dans l'article prétendument créé en cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constituait « une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique » - exactement le texte de l'article prétendument nouveau - l'expulsion pouvait être prononcée par dérogation aux articles 24 et 25.

Enfin, monsieur le ministre - je m'adresse souvent à vous parce que vous, au moins, vous nous écoutez, à défaut de nous entendre toujours - il était ajouté que les procédures prévues ne pouvaient être appliquées à l'étranger mineur de dix-huit ans. Cette mention figurait dans l'ancien article 26, mais n'est plus dans le nouvel article 25 bis inséré par l'article 23.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Parce que c'est dans l'article 24 !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui, mais l'article 24, ce n'est pas tout à fait la même chose. Mais enfin...

M. le président. Je mets aux voix l'article 23.

(L'article 23 est adopté.)

Art. 23
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 25

Article 24

L'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 26. - I. - Sauf en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion des personnes, ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion, y compris dans les hypothèses mentionnées au dernier alinéa de l'article 25 :

« 1° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ;

« 2° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans ;

« 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui est marié depuis au moins trois ans soit avec un ressortissant français ayant conservé la nationalité française, soit avec un ressortissant étranger relevant du 1° , à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé ;

« 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, et ce depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an en cas de reconnaissance postérieure à la naissance de l'enfant.

« Sauf en cas d'urgence absolue, les dispositions de l'article 24 sont applicables aux étrangers expulsés sur le fondement du présent I.

« Les étrangers relevant du 1° ne peuvent pas faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière prise en application de l'article 22.

« II. - L'étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l'objet ni d'un arrêté d'expulsion, ni d'une mesure de reconduite à la frontière prise en application de l'article 22. »

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, sur l'article.

Mme Nicole Borvo. Je profiterai de cette prise de parole pour défendre en même temps l'amendement n° 265.

Monsieur le ministre, la protection que le présent article vise à instaurer est un point positif dans un texte qui reste très négatif. Il faut juste prendre cette avancée pour ce qu'elle est, ni plus ni moins. Elle n'est pas une révolution puisqu'elle ne remet pas en cause le principe de la « double peine ».

En tout état de cause, il existe une grande incompréhension sur le fait qu'on supprime l'interdiction du territoire français comme « double peine » mais qu'on maintient la possibilité de reconduite à la frontière en cas d'infraction à la législation sur le séjour des étrangers.

La réforme de la « double peine » ne constitue donc pas un bouleversement. On le sait, de nombreuses situations subsisteront dans lesquelles des individus seront privés de leur seul pays d'attache, la France. Bien que ces individus aient déjà payé leur dette à la société, ils seront reconduits à la frontière, au seul motif d'une nationalité « de papier », car il est bien convenu que leur pays d'attache est la France.

Néanmoins, c'est une avancée face à la logique « guillotine » en vigueur à l'heure actuelle, logique que les associations dénoncent depuis de nombreuses années.

Je voudrais d'ailleurs rendre hommage à ces associations pour le combat acharné qu'elles ont mené. Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué comment votre position avait évolué. Or vous n'êtes pas un citoyen lambda, et il faut bien dire que l'ensemble de la population, y compris de nombreux politiques, ignorait totalement ce qu'était la « double peine ».

Si le problème a commencé à être compris, c'est bien grâce aux associations qui, depuis des années - bien avant que le Gouvernement ne s'en préoccupe - se sont intéressées à la question.

Il convient aussi de remercier Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Thorn pour les films formidables qu'ils ont réalisés au sujet de tranches de vies brisées. Ils ont ainsi sensibilisé l'opinion publique - peut-être encore faiblement - et une partie de la classe politique. Pour avoir participé à plusieurs débats autour de ces films, j'ai constaté qu'ils contribuaient à lever de nombreuses incompréhensions et à permettre une meilleure perception de ces questions.

Monsieur le ministre, nous vous rendons grâce d'avoir engagé cette réforme qu'avec d'autres, et ils n'étaient pas si nombreux, les parlementaires communistes réclamaient depuis de nombreuses années. Vous avez d'ailleurs pu constater que, depuis quelque temps, nous nous sommes efforcés d'accélérer le mouvement en déposant, chaque fois que cela était possible, des amendements sur différents textes. Evidemment, dans la mesure où ces amendements n'émanaient pas du Gouvernement, ils ont été rejetés.

Cela dit, nous n'allons pas maintenant bouder notre plaisir de voir cette question enfin sortie de l'ombre. Comme l'a souligné Robert Bret, nous sommes favorables à toute avancée, même partielle. Nous n'avons aucun a priori idéologique et nous vous suivrons donc sur ce point, même si nous ne sommes pas entièrement satisfaits, loin s'en faut. Cette position ne change en rien l'appréciation très critique que nous portons sur l'ensemble de votre texte.

L'article 24 du projet de loi définit les catégories de personnes bénéficiant d'une protection absolue contre l'expulsion. Il présente des avancées par rapport au droit actuel, mais elles sont très limitées et risquent d'être sujettes à des interprétations différentes pouvant aboutir à des décisions arbitraires. Tel est le cas de la notion de « comportements de nature à porter atteinte ». Cette expression extrêmement floue risque, une fois l'élan de générosité retombé, de réduire à une peau de chagrin cette amélioration de notre droit. C'est pourquoi, à cette expression vague et subjective, nous vous proposons de substituer la notion juridique d'« indices graves et concordants laissant présumer qu'il a commis ou tenté de commettre des actes », notion bien connue en droit pénal.

A l'Assemblée nationale, où le présent amendement a déjà été discuté, le rapporteur a affirmé que l'on se trouvait dans le domaine non pas judiciaire mais administratif. Cette position me semble surréaliste. Ce n'est pas parce que l'on est dans le domaine administratif qu'une notion n'a pas à être juridiquement définie. Je ne comprends pas quel est le problème. Un juge contrôle la légalité des actes de l'administration sur le fondement de la loi et des principes généraux du droit. Rien ne s'oppose, par conséquent, à l'adoption de cette disposition.

M. le président. Je suis saisi de dix-huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Toutefois, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.

L'amendement n° 165, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Nous défendrons cet amendement n° 165 avec le même état d'esprit.

L'article 24 définit cinq catégories d'étrangers presque totalement protégés contre cette mesure administrative d'éloignement du territoire.

Sauf en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'État, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion des personnes, ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion, même s'il a été condamné définitivement à une peine supérieure à cinq ans d'emprisonnement : l'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans ; l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui est marié depuis au moins trois ans soit avec un ressortissant français ayant conservé la nationalité française, soit avec un ressortissant étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant et qu'il subvienne effectivement à ses besoins.

Le texte précise que l'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ne peut faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière.

Il précise également que l'étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l'objet ni d'un arrêté d'expulsion ni d'une mesure de reconduite à la frontière.

Certes, ce dispositif constitue une avancée substantielle par rapport au droit en vigueur. Mais puisque l'on décide d'aborder ce sujet, qui était tabou jusqu'à présent, allons au bout de la réflexion en supprimant purement et simplement interdiction du territoire. En tout état de cause, cette suppression ne laisserait pas les autorités démunies puisque l'article 23 du projet de loi leur permet de prononcer une expulsion.

Cette mesure est immédiatement exécutoire lorsque la présence d'un étranger sur le territoire national constitue une grave menace pour l'ordre public. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'un étranger expulsé ne peut en aucun cas revenir en France tant qu'il n'a pas obtenu l'abrogation de son arrêté d'expulsion.

M. le président. L'amendement n° 265, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Au début du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, remplacer les mots : "Sauf en cas de comportement" par les mots : "Sauf en cas d'indices graves et concordants laissant présumer qu'il a commis ou tenté de commettre des actes". »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Cet amendement a déjà été défendu.

M. le président. L'amendement n° 166, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "en cas de comportements" par les mots : "s'il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu'il a commis ou tenté de commettre des actes". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tous nos amendements sont homothétiques de ceux que nous avions déposés sur l'article 22. Nous ne les retirons pas, mais nous ne nous faisons aucune illusion sur leur sort.

Monsieur le ministre, vous savez que de nombreuses personnes qui ne devraient pas être interdites du territoire français risqueront de l'être judiciairement.

Dans ce cas, la solution s'impose : il faut demander la grâce présidentielle. J'ai d'ailleurs connu un président de la République qui, dans des cas similaires, a largement fait usage de son droit de grâce. Ceux qui en ont bénéficié lui en sont reconnaissants ; ils ont amplement mérité la confiance qui leur a été faite.

Monsieur le ministre, nous nous permettrons, les uns et les autres, de vous signaler des cas qui ne sont pas prévus par la loi, telle que vous êtes en train de la faire voter. Nous vous demanderons d'intervenir auprès de la présidence de la République pour appuyer des demandes de grâce. Au moins cette démarche permettra-t-elle de répondre au souci qui est le nôtre, mais qui est également celui de M. Pinte puisqu'il a déposé des amendements identiques à ceux que nous soumettons aujourd'hui à votre examen.

M. le président. L'amendement n° 167, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le troisième alinéa (2°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "régulièrement" par le mot : "habituellement". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement est homothétique.

M. le président. L'amendement n° 168, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le troisième alinéa (2°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "vingt" par le mot : "quinze". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Amendement homothétique.

M. le président. L'amendement n° 170, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le quatrième alinéa (3°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "régulièrement" par le mot : "habituellement". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Amendement homothétique.

M. le président. L'amendement n° 221, présenté par M. Béteille et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Dans le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "depuis plus de dix ans et qui" insérer les mots : ", ne vivant pas en état de polygamie,". »

La parole est à M. Patrice Gélard.

M. Patrice Gélard. Cet amendement vise à lutter contre la polygamie. Il se justifie par son texte même.

M. le président. L'amendement n° 169, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« A la fin du quatrième alinéa (3°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, supprimer les mots : "à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Amendement homothétique !

M. le président. L'amendement n° 266 rectifié, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le cinquième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France :

« 4° L'étranger père ou mère d'un enfant français résidant en France, à condition qu'il contribue effectivement à l'entretien ou à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil. »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. L'article 24 du projet de loi fixe des conditions extrêmement rigoureuses pour bénéficier d'une protection absolue contre des mesures d'expulsion.

En effet, il est prévu que le parent d'un enfant français vive régulièrement sur le territoire français depuis dix ans pour prétendre à cette protection, étant entendu qu'il doit contribuer à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance, ou depuis un an en cas de reconnaissance postérieure à la naissance.

On sait que la réforme de la « double peine » a un double objet : d'une part, prendre en considération la situation de la personne qui est devenue française de fait, par les liens qu'elle a créés avec la France ; d'autre part, ne pas faire payer de façon démesurée la famille par ricochet - c'est vous-même, monsieur le ministre, qui l'avez souligné -, particulièrement les enfants en les privant de père ou de mère.

Imposer une condition de durée aussi longue empêche d'atteindre ce but. C'est pourquoi nous vous proposons de la supprimer et de prévoir une protection pour tout parent d'enfant français dès lors qu'il assume son rôle de parent.

M. le président. L'amendement n° 172, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans l'antépénultième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer le mot : "régulièrement" par le mot : "habituellement". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Homothétique !

M. le président. L'amendement n° 171, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Après les mots : "d'un enfant français mineur", supprimer la fin de l'antépénultième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Homothétique !

M. le président. L'amendement n° 173, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans l'antépénultième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après les mots : "contribuer effectivement à l'entretien" remplacer le mot : "et" par le mot : "ou". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Homothétique !

M. le président. L'amendement n° 174, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans l'antépénultième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après les mots : "prévues par l'article 371-2 du code civil", insérer les mots : "sauf dans le cas où il est dans l'impossibilité de travailler". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Homothétique !

M. le président. L'amendement n° 115, présenté par MM. Béteille, Gélard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Après les mots : "code civil", rédiger comme suit la fin du cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« Lorsque la qualité de père ou de mère d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à sa naissance, la condition de contribution à son entretien et à son éducation doit être satisfaite depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an. »

La parole est à M. Patrice Gélard.

M. Patrice Gélard. L'article 24 du projet de loi vise à instaurer et à définir les catégories d'étrangers qui bénéficieront d'une protection absolue contre des mesures d'expulsion et, pour certains, contre des mesures de reconduite à la frontière.

De la même manière qu'y procède l'amendement précédent, il s'agit de préciser que la condition de contribution effective à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, et ce depuis la naissance de l'enfant ou depuis un an, n'est requise que lorsque l'enfant a été reconnu postérieurement à sa naissance. Lorsque l'enfant a été reconnu dès sa naissance, il ne sera pas nécessaire d'établir la contribution à son entretien et à son éducation depuis son enfance ou depuis un an.

Cet amendement vise donc à une simplification.

M. le président. L'amendement n° 116, présenté par MM. Gélard, Béteille et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Après le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions prévues aux 3° et 4° ne sont toutefois pas applicables lorsque les faits à l'origine de la mesure d'expulsion ont été commis à l'encontre du conjoint ou des enfants de l'étranger. »

La parole est à M. Patrice Gélard.

M. Patrice Gélard. L'article 24 du projet de loi prévoit certaines exceptions à la protection absolue dont bénéficieront plusieurs catégories d'étrangers contre des mesures d'expulsion. Ces exceptions sont justifiées par la nature même de certains comportements des étrangers particulièrement graves au regard de la sûreté de l'Etat et du respect de l'ordre public, comportements remettant également en cause la sincérité de leur attachement à la France et aux valeurs essentielles de la République.

Ainsi la protection absolue dont bénéficient certains étrangers peut-elle être écartée lorsque leurs comportements sont de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, sont liés à des activités à caractère terroriste ou constituent des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion des personnes.

Pour autant, il convient d'apporter une exception supplémentaire à cette protection. Si celle-ci demeure, au regard de la hiérarchie des peines, une infraction moins grave que les précédentes, elle trouve ici sa place en raison de sa nature même. En effet, lorsque les faits à l'origine de la mesure d'expulsion ont été commis à l'encontre du conjoint ou des enfants de l'étranger, il convient de permettre cette expulsion dans le but de protéger les victimes elles-mêmes ; seule l'interdiction du territoire français, permettrait alors de garantir leur protection.

Il s'agit donc de protéger le conjoint et les enfants de l'étranger quand ils sont victimes des agissements de celui-ci.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Très juste ! Heureusement qu'il y a des juristes.

M. le président. L'amendement n° 267, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Après le cinquième alinéa (4°) du I du texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° _ L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Je tiens à présenter cet amendement qui a déjà fait l'objet d'une discussion en commission, à l'issue de laquelle nous avions accepté de remplacer l'expression « pays dont il est originaire » par celle de « pays de renvoi ». Je souhaite tout de même expliquer pour quelles raisons nous avions envisagé cette rédaction.

Par cet amendement, nous vous proposons de protéger contre une mesure d'expulsion une personne en raison de son état de santé. Je sais, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que je ne suis pas la seule à avoir le souci d'éviter des situations inhumaines, telles que le renvoi de personnes gravement malades au péril de leur vie. On peut s'accorder sur cette disposition.

La rédaction peut effectivement poser problème, mais dans la mesure où nous avons voulu, dans le présent amendement et dans celui protégeant ces personnes contre une interdiction du territoire français, viser non pas le pays de renvoi, mais le pays d'origine, j'aimerais expliquer les raisons pour lesquelles nous avions retenu cette rédaction.

La gestion de l'immigration se fait, comme on le sait, par le biais d'accords de réadmission. Or cette pratique n'est pas sans poser problème dans la mesure où, comme je l'ai dit à maintes reprises, elle aboutit à faire peser sur d'autres pays la gestion d'un phénomène que la France, et a fortiori les pays tiers, comme le Sénégal et le Maroc, ne sont pas toujours capables de régler.

Par ailleurs, il serait indispensable de s'assurer des conditions dans lesquelles les personnes peuvent être prises en charge dans le pays de renvoi, sur le plan aussi bien médical que financier. J'aimerais connaître le sentiment du Gouvernement sur ce sujet. En tout état de cause, il est possible de revoir la rédaction de l'amendement...

M. le président. L'amendement n° 318, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Dans le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après la référence : "1°" insérer la référence "et du 5°". »

La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Cet amendement de coordination, conformément à l'engagement que j'ai pris devant M. Bret et à ce que j'ai indiqué à MM. Dreyfus-Schmidt et Mahéas lors de l'examen de l'article 22, vise à faire bénéficier les étrangers les plus malades d'une protection absolue contre les mesures de reconduite à la frontière.

M. le président. L'amendement n° 305, présenté par M. Othily, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas au département de la Guyane. »

La parole est à M. Georges Othily.

M. Georges Othily. Compte tenu de ce qui a été précisé lors de l'examen de l'article 22, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 305 est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 165 vise à supprimer l'article 24 du projet de loi, qui crée, à l'article 26 de l'ordonnance, des protections absolues contre les mesures d'expulsion de certaines catégories d'étrangers. Il est contraire à la position de la commission des lois. Celle-ci est en effet favorable à la création de ces protections absolues, car elles constituent un élément essentiel de la réforme de la « double peine ».

La commission est donc défavorable à l'amendement n° 165.

Elle est également défavorable à l'amendement n° 265.

Elle l'est aussi, pour les mêmes raisons, à l'amendement n° 166 : il ne lui semble pas utile de modifier les termes prévus par le projet de loi, lesquels laissent une certaine marge d'appréciation à l'administration.

De même, la commission est défavorable aux amendements n°s 167, 168 et 170.

En revanche, par coordination avec la position exprimée sur l'amendement n° 220, il convient d'émettre un avis favorable sur l'amendement n° 221, qui apporte une précision utile.

L'amendement n° 169 a pour objet de supprimer la condition imposant que la communauté de vie n'ait pas cessé pour qu'un étranger marié à un ressortissant français puisse bénéficier de la protection absolue contre un arrêté d'expulsion. Il n'est pas souhaitable d'effectuer une telle modification, le dispositif prévu étant cohérent.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n° 266 rectifié prévoit une nouvelle rédaction pour le 4° de l'article 26 de l'ordonnance telle que modifiée par l'article 24 du projet de loi. Il s'agit ainsi de prévoir que les étrangers parents d'enfants français n'auront pas à justifier d'une résidence régulière de dix ans et que les conditions d'entretien et d'éducation de l'enfant seront alternatives.

Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui est favorable au dispositif cohérent et équilibré mis en place dans le projet de loi.

De plus, l'amendement n° 266 rectifié s'appuie sur les conditions d'entretien et d'éducation prévues par l'article 371-2 du code civil.

En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.

L'amendement n° 172 vise à remplacer l'exigence de résidence régulière par l'exigence de résidence habituelle pour l'étranger, parent d'un enfant français mineur et souhaitant bénéficier de la protection absolue contre la mesure d'expulsion.

La position de la commission sur cet amendement est identique à celle qu'elle a exprimée sur l'amendement n° 167 présenté par les mêmes auteurs : défavorable.

L'amendement n° 171, pour les mêmes raisons, est contraire à la position de la commission, qui est favorable au dispositif cohérent et équilibré proposé en matière de réforme de la « double peine », et qui a donc exprimé un avis défavorable.

Sur l'amendement n° 173, la commission a émis le même avis défavorable que sur l'amendement n° 160.

S'agissant de l'amendement n° 174, par coordination avec la position exprimée sur l'amendement n° 142, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable.

L'amendement n° 115 ayant un objet identique à l'amendement n° 114, la commission a donc exprimé un avis favorable.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Quand un amendement durcit le texte, vous êtes d'accord !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Eh oui !

L'amendement n° 116 a pour objet de prévoir, comme pour la peine d'interdiction du territoire français à l'article 38 du projet de loi, que l'étranger ne pourra bénéficier d'une protection absolue contre un arrêté d'expulsion si les faits à l'origine de cette mesure d'expulsion ont été commis à l'encontre du conjoint ou des enfants de cet étranger, c'est-à-dire à l'encontre de ceux-là mêmes qui lui permettent de ne pas être expulsés.

La commission a, évidemment, émis un avis favorable sur cet amendement n° 116.

Elle est également favorable aux amendements n°s 267 et 318 puisqu'il s'agit d'empêcher l'expulsion des étrangers malades résidant habituellement en France lorsqu'ils ne peuvent pas être soignés dans leur pays d'origine.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 165.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 165 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 265.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 166.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 167.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 168.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 170.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 221.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169.

(L'amendement n'est pas adopté.)

(M. Adrien Gouteyron remplace M. Daniel Hoeffel au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON

vice-président

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 266 rectifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit ici des exceptions au dernier alinéa de l'article 22 du présent projet de loi, qui prévoit que, « par dérogation aux dispositions du présent article, » - l'article 25 de l'ordonnance - l'« étranger entrant dans l'un des cas énumérés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application des articles 23 et 24 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans », sous réserve des dispositions de l'article 26 de l'ordonnance, lesquelles font l'objet du présent article 24.

Il est donc évident que l'article 24 du projet de loi ne saurait être plus large que l'article 22. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas insisté pour que nos amendements, qui étaient homothétiques, soient adoptés.

En revanche, il y a au 4° du texte proposé par cet article 24 pour l'article 26 de l'ordonnance une aggravation assez extraordinaire. C'est la seule, et elle a été relevée par nos amis du groupe communiste républicain et citoyen, qui ont en conséquence déposé un amendement. Nous pensons qu'ils ont eu parfaitement raison.

De quoi s'agit-il ? D'un étranger qui, « ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant mineur résidant en France », qui établit qu'il contribue « effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant » et ce depuis la naissance de l'enfant (...) ou depuis un an en cas de reconnaissance postérieure à la naissance de l'enfant ». Parce qu'il aurait subi une condamnation au moins égale à cinq ans, il devrait, aux termes de l'article 24, remplir une condition supplémentaire, à savoir justifier d'une résidence régulière depuis plus de dix ans ? C'est rétablir la « double peine » d'une manière assez extraordinaire !

Nous insistons très vivement pour que vous preniez cette remarque en considération, monsieur le ministre, et je m'adresse à vous parce que les rapporteurs se suivent et ne se ressemblent pas...

Pour moi, le rapporteur d'une commission, c'est celui qui, d'abord, explique à ses collègues ce que contient un projet de loi, qui, ensuite, provoque une discussion sur l'ensemble des dispositions, pour, finalement, rapporter l'avis de la commission. Or ce n'est pas du tout ce qui se passe ici !

M. Jean Chérioux. Vous donnez des leçons au rapporteur ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y a des rapporteurs qui, comme M. Zocchetto sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, proposent de nombreuses modifications. Et puis il y a des rapporteurs qui acceptent le texte dans sa rédaction initiale, ne tolérant que les propositions qui tendent à le durcir. Nous sommes dans ce dernier cas. Ce n'est donc pas la peine de nous adresser à lui pour essayer de le convaincre. D'ailleurs, il nous dirait qu'il est tenu par les décisions de la commission.

M. Jean Chérioux. C'est discourtois pour M. Courtois ! (Sourires.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En revanche, M. le ministre, vous, vous pourriez être convaincu, et c'est pourquoi je me permets d'attirer votre attention... (M. Dreyfus-Schmidt s'interrompt.)

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, il faut poursuivre, les aiguilles de la montre tournent !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Eh bien, elles ont tort de tourner parce que je m'adresse au ministre et, s'il ne m'écoute pas, il ne pourra pas me répondre !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Dreyfus-Schmidt, je fais ce que font tous les ministres : ils écoutent d'une oreille le parlementaire qui les interroge et de l'autre leurs collaborateurs. Tous les ministres de la République ont fait de même !

M. Jean Chérioux. M. Dreyfus-Schmidt veut même donner des leçons au ministre !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et vous étiez justement en train de consulter vos collaborateurs...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Sur les étrangers qui ont des enfants français !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... sur l'amendement n° 266 rectifié pour savoir s'il est normal d'imposer une résidence de dix ans au père d'un enfant français qui contribue à l'éducation et à l'entretien, et qui a l'autorité parentale. Cela paraît revenir à rétablir la « double peine » au moment même où l'on prétend la supprimer !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 266 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, au nom du groupe socialiste, je demande une suspension de dix minutes !

M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur Dreyfus-Schmidt...

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Je mets aux voix l'amendement n° 172.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 171.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 115.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 267.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 318.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 24, modifié.

(L'article 24 est adopté.)

Art. 24
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Art. additionnel après l'art. 25

Article 25

L'article 26 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il en est de même lorsqu'un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, qui se trouve sur le territoire français, a fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des autres Etats membres de l'Union européenne. »

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au début du texte proposé par cet article pour compléter l'article 26 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ajouter les mots : "Conformément à la directive 2001/40/CE du Conseil du 28 mai 2001 relative à la reconnaissance mutuelle des décisions d'éloignement des ressortissants de pays tiers,". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je voudrais, au passage, remercier M. Dreyfus-Schmidt des compliments qu'il a bien voulu m'adresser et qui confirment à la Haute Assemblée que je sais au moins lire, ce qui me paraît important !

L'article 25 vise à transposer la directive 2001/40/CE du Conseil du 28 mai 2001 relative à la reconnaissance mutuelle des décisions d'éloignement des ressortissants de pays tiers. L'amendement tend à ajouter une référence explicite à cette directive et prévoit qu'un décret complétera la transposition.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour compléter l'article 26 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée par la phrase suivante :

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit de prévoir qu'un décret complétera la transposition.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 25, modifié.

(L'article 25 est adopté.)

Art. 25
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Art. 26

Article additionnel après l'article 25

M. le président. L'amendement n° 268, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Après l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« L'article 27 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est ainsi rédigé :

« Art. 27 _ Tout étranger qui se sera soustrait ou qui aura tenté de se soustraire à l'exécution d'une mesure de refus d'entrée en France ou d'une mesure de reconduite à la frontière sera puni d'une amende de 1 500 euros.

« Tout étranger qui se sera soustrait ou qui aura tenté de se soustraire à l'exécution d'un arrêté d'expulsion, ou qui, déjà condamné sur le fondement de l'alinéa premier, se sera soustrait ou aura tenté de se soustraire à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière ou qui, expulsé ou ayant fait l'objet d'une interdiction de territoire fr ançais, aura pénétré de nouveau sur le territoire national sera puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Cet amendement est la conséquence de celui que nous avions déposé avant l'article 14 bis. Il est relatif à la peine d'interdiction du territoire français.

Nous regrettons particulièrement que tant le ministre que la majorité sénatoriale aient refusé de répondre sur cette question dont l'examen, je le rappelle, trouverait pourtant parfaitement sa place dans la discussion du présent texte.

Il s'agit ici de prendre acte des recommandations de la commission d'enquête parlementaire sur les prisons. Il faudrait quand même savoir si le Parlement crée des commissions d'enquête pour le plaisir ou si l'objectif est bien de dresser un état des lieux afin de pouvoir apporter des améliorations.

Le sujet me tient à coeur, et je dois avouer ma profonde déception de voir les conclusions de la commission d'enquête totalement ignorées, y compris par ceux qui avaient participé à celle-ci. C'est là un mauvais coup porté tant aux détenus qu'aux personnels pénitentiaires, qui avaient pu fonder de réels espoirs sur ces travaux en vue d'une amélioration de la situation quotidienne dans les prisons. Nous les avons entendus, mais pas suffisamment !

Pour ce qui concerne le présent amendement, il tend à opérer une distinction entre les infractions commises.

Pour les infractions « simples » au séjour, tels le refus d'embarquer ou le refus de déférer à un arrêté de reconduite à la frontière, l'étranger ne pourrait être condamné ni à une peine de prison ni à une interdiction du territoire français, ce qui éviterait d'encombrer les prisons de gens qui n'ont rien à y faire. La peine de prison n'est pas plus dissuasive que pertinente : la menace d'incarcération n'a jamais empêché un étranger de se maintenir sur le territoire ou de refuser d'embarquer.

En revanche, en cas de récidive, et ce conformément aux recommandations du rapport Chanet, ou en cas d'infraction à un arrêté d'expulsion ou d'interdiction du territoire français, la peine de prison serait maintenue, ainsi que l'interdiction du territoire français.

Tel est l'objet de notre amendement. J'aimerais obtenir des réponses de M. le ministre et de M. le rapporteur sur le fond.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l'emprisonnement dans le cas où l'étranger se soustrait à l'exécution d'une mesure de refus d'entrée ou de reconduite à la frontière.

Or l'actuel article 27 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 prévoit une peine de six mois à trois ans d'emprisonnement pour une telle infraction. Ces peines sont rarement prononcées, sauf lorsque l'étranger refuse violemment d'être éloigné.

La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, nous vous remercions d'avoir accordé une suspension de séance, qui aura sans doute permis de régler les problèmes liés aux prochaines élections régionales... (Exclamations amusées.)

Cela étant, nous avions cru comprendre que, dans la suite du débat, nous obtiendrions des réponses à nos questions, et nous avons indiqué que, s'il ne devait pas en être ainsi, nous demanderions à chaque fois un scrutin public.

C'est pourquoi nous demandons un tel scrutin sur l'amendement n° 268.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Dreyfus-Schmidt, qui croyez-vous convaincre en agissant ainsi ? Le moins que l'on puisse dire, c'est que, depuis quarante-huit heures, nous avons un débat sérieux, passionné, parfois passionnant, au cours duquel vous vous êtes longuement exprimé. Pouvez-vous sérieusement affirmer que le Gouvernement ne vous a pas répondu et ne vous a pas accordé la considération qu'il vous doit ?

J'ai quant à moi le sentiment d'avoir dû écouter à d'innombrables reprises des discours quelque peu répétitifs ; je n'ai pas voulu imposer aux membres de la Haute Assemblée des réponses qui l'auraient été tout autant ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je demande la parole pour explication de vote.

M. le président. Vous vous êtes déjà exprimé sur l'amendement n° 268, monsieur Dreyfus-Schmidt. J'accepte cependant de vous redonner la parole, en vous priant d'être bref.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous remercie, monsieur le président.

M. le rapporteur nous a dit que le texte actuel permet déjà l'emprisonnement des personnes visées. Or M. Bret vient de rappeler que la commission d'enquête parlementaire sur les prisons avait constaté que beaucoup trop d'étrangers étaient détenus uniquement en raison de leur situation irrégulière sur le territoire français, alors qu'ils n'avaient rien à faire en prison. La commission n'a nullement tenu compte, dans son avis, de ces observations, et nous déplorons en outre que M. le ministre ne nous ait pas apporté de réponse.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Dreyfus-Schmidt, ma réponse sera très simple : si le Sénat décidait ce soir de supprimer les sanctions pénales pour les étrangers en situation irrégulière dans notre pays, nous émettrions alors un message terrible, celui que la France a décidé de baisser la garde. Or le Gouvernement se refuse à envoyer un tel message ! Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à l'amendement de M. Bret. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, le groupe socialiste maintient-il sa demande de scrutin public ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous y renonçons, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 268.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 25
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Art. 27

Article 26

I. - L'article 28 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 28 bis. - Peut également faire l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence l'étranger qui a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion non exécuté lorsque son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. Cette mesure est assortie d'une autorisation de travail. Les obligations de présentation aux services de police et aux unités de gendarmerie ainsi que les sanctions en cas de non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence prévues par l'article 28 sont applicables. »

II. - Après l'article 28 bis de la même ordonnance, il est inséré un article 28 ter ainsi rédigé :

« Art. 28 ter. - Peut également faire l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence, à titre probatoire et exceptionnel, l'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion sur le fondement du dernier alinéa de l'article 25 ou du 2° de l'article 25 bis. Cette mesure est assortie d'une autorisation de travail. Elle peut être abrogée à tout moment en cas de faits nouveaux constitutifs d'un comportement préjudiciable à l'ordre public. Les obligations de présentation aux services de police et aux unités de gendarmerie ainsi que les sanctions en cas de non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence prévues par l'article 28 sont applicables. ». - (Adopté.)

Art. 26
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Art. 28

Article 27

Après l'article 28 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 28 quater ainsi rédigé :

« Art. 28 quater. - Il ne peut être fait droit à une demande de relèvement d'une interdiction du territoire ou d'abrogation d'un arrêté d'expulsion présentée après l'expiration du délai de recours administratif que si le ressortissant étranger réside hors de France. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas :

« 1° Pour la mise en oeuvre du troisième alinéa de l'article 23 ;

« 2° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d'emprisonnement ferme ;

« 3° Lorsque l'étranger fait l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence pris en application de l'article 28, de l'article 28 bis ou de l'article 28 ter. ». - (Adopté.)

Art. 27
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 29 (début)

Article 28

L'article 29 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° A La dernière phrase du troisième alinéa (1° ) du I est ainsi rédigée :

« Les ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance augmenté d'un coefficient défini par décret prenant en compte le nombre de personnes composant le foyer ; »

1° B Après le huitième alinéa (3° ) du I, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« Un membre de la famille de plus de seize ans, né en France et l'ayant quittée sans ses parents pour résider à l'étranger, s'il n'a pas suivi une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement scolaire français dans le cadre de la scolarité obligatoire. » ;

1° Les quatre premiers alinéas du II sont ainsi rédigés :

« L'autorisation d'entrer sur le territoire dans le cadre de la procédure du regroupement familial est donnée par le représentant de l'Etat dans le département après vérification des conditions de logement et de ressources par le maire de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune où il envisage de s'établir.

« Pour procéder à la vérification des conditions de logement, le maire examine les pièces justificatives requises dont la liste est déterminée par décret. Des agents spécialement habilités des services sociaux de la commune, ou, à la demande du maire, des agents de l'Office des migrations internationales peuvent pénétrer dans le logement. Ils doivent s'assurer au préalable du consentement écrit de son occupant. En cas de refus de l'occupant, les conditions de logement permettant le regroupement familial sont réputées non remplies. Lorsque ces vérifications n'ont pas pu être effectuées parce que le demandeur ne disposait pas encore du logement nécessaire au moment de la demande, le regroupement familial peut être autorisé si les autres conditions sont remplies et après que le maire a vérifié sur pièces les caractéristiques du logement et la date à laquelle le demandeur en aura la disposition.

« A l'issue de l'instruction, le maire émet un avis motivé. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la communication du dossier par le préfet. Si cet avis est négatif, le dossier est transmis à l'Office des migrations internationales qui statue sur les conditions de ressources et de logement.

« Le représentant de l'Etat dans le département informe le maire de la décision rendue. » ;

2° Le dernier alinéa du II est complété par une phrase ainsi rédigée :

« En cas de mise en oeuvre de la procédure du sursis à l'octroi d'un visa prévue aux deux derniers alinéas de l'article 34 bis, ce délai ne court qu'à compter de la délivrance du visa. » ;

3° Le III est ainsi rédigé :

« III. - Les membres de la famille entrés régulièrement sur le territoire français au titre du regroupement familial reçoivent de plein droit une carte de séjour temporaire, dès qu'ils sont astreints à la détention d'un titre de séjour. » ;

4° Le IV est ainsi rédigé :

« IV. - En cas de rupture de la vie commune, la carte de séjour temporaire qui a été remise au conjoint d'un étranger peut, pendant les deux années suivant sa délivrance, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement. Lorsque la rupture de la vie commune est antérieure à la délivrance du titre, le préfet ou, à Paris, le préfet de police, refuse de délivrer la carte de séjour temporaire. » ;

5° Après le IV, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :

« IV bis. - Le titre de séjour d'un étranger qui n'entre pas dans les catégories visées aux 1° à 6° de l'article 25 peut faire l'objet d'un retrait lorsque son titulaire a fait venir son conjoint ou ses enfants en dehors de la procédure du regroupement familial. La décision de retrait du titre de séjour est prise après avis de la commission du titre de séjour visée à l'article 12 quater. »

M. le président. La parole est à M. Jacques Malhéas, sur l'article.

M. Jacques Mahéas. Le droit au regroupement familial est accordé à l'étranger résidant dans notre pays, afin de lui permettre d'être rejoint en France par son conjoint et ses enfants mineurs.

Il s'agit d'un droit consacré par le Conseil d'Etat, qui relève du respect du principe constitutionnel du droit à une vie familiale normale et du droit au respect de la vie privée, inscrit à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile, dite loi Chevènement, n'a pas bouleversé les règles de regroupement familial, intégrées depuis 1993 dans le texte de l'ordonnance de 1945. Cette loi a réaffirmé qu'il ne pouvait y avoir de régularisation sur place.

Par ailleurs, la loi Chevènement a assoupli les conditions du regroupement familial, afin d'alléger les contrôles et les sanctions. Elle a rétabli la règle selon laquelle le regroupement familial est ouvert aux ressortissants étrangers qui séjournent en France depuis au moins un an, et non plus depuis deux ans, comme le prévoyait la loi de 1993.

La loi Chevènement ouvre en outre plus largement le champ du regroupement familial aux enfants issus d'un premier lit et au regroupement partiel des membres de la famille. Elle a également assoupli les conditions relatives au logement : le regroupement familial pourra être refusé si « le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date de l'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France ».

Il en va de même pour les conditions de ressources. En effet, le regroupement familial ne peut être refusé que si le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille : sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint, indépendamment des prestations familiales, le regroupement familial ne pouvant être refusé pour insuffisance de ressources si celles-ci sont supérieures au SMIC.

La loi Chevènement a enfin assoupli les conditions relatives à la santé : sont désormais prises en compte les seules maladies inscrites au règlement sanitaire international.

Or le projet de loi comporte plusieurs modifications majeures relatives au droit au regroupement familial.

Ainsi, quelle que soit la nature du titre de séjour détenu par l'étranger qui sollicite le regroupement familial, les membres de la famille se verront accorder une carte de séjour temporaire. Actuellement, ils bénéficient du même titre que celui qui est détenu par l'étranger sollicitant le regroupement familial. Voilà une première difficulté !

Par ailleurs, les vérifications sur place de l'OMI deviennent facultatives. En revanche, le maire est associé à l'instruction que diligente l'OMI ; nous en avons déjà largement parlé.

Enfin, le texte précise que lorsque la rupture de la vie commune sera antérieure à la délivrance du titre de séjour, le préfet ou le préfet de police refusera la délivrance de la carte de séjour temporaire.

L'Assemblée nationale a durci encore ces dispositions. Elle est ainsi revenue aux conditions de ressources qui étaient en vigueur avant l'entrée en application de la loi de 1998. Les ressources devront atteindre un montant au moins égal au SMIC, majoré d'un coefficient défini par décret et prenant en compte le nombre de personnes composant le foyer. Une telle mesure me paraît tout à fait anticonstitutionnelle.

L'Assemblée nationale a également ajouté un motif de refus du regroupement familial pour les enfants nés en France mais ayant quitté notre pays sans leurs parents, avant de tenter d'y revenir par la voie du regroupement familial. Elle a confié aux services sociaux communaux la charge de procéder à la vérification des conditions de logement et de ressources requises dans le cadre du regroupement familial. Ce n'est qu'en cas d'avis négatif motivé du maire que le dossier sera transmis à l'OMI, qui statuera.

L'Assemblée nationale a en outre porté de un an à deux ans le délai pendant lequel la carte de séjour temporaire remise au conjoint d'un étranger peut être retirée et non renouvelée en cas de rupture de la vie commune.

Elle a enfin prévu de retirer son titre de séjour à l'étranger qui aura fait venir son conjoint ou ses enfants en dehors de la procédure du regroupement familial.

Nous pensons que la coupe est largement pleine ! C'est pourquoi nous soutiendrons plusieurs amendements, l'un de suppression de l'article, les autres de repli, tendant à améliorer le dispositif présenté.

M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Cependant, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 176 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 269 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 176.

M. Jacques Mahéas. Comme je viens de l'indiquer, l'article 28 est important en ce qu'il compte plusieurs modifications majeures de la procédure de regroupement familial.

Tout d'abord, quelle que soit la nature du titre de séjour détenu par l'étranger qui sollicite un regroupement familial, les membres de sa famille se verront délivrer une carte de séjour temporaire. Cette modification aura pour effet de rendre plus précaire le séjour des étrangers ayant vocation à rester en France et de créer des disparités au sein du couple. C'est sans doute ce que l'on appelle « faciliter l'intégration »...

Par ailleurs, le texte prévoit que, en cas de rupture de la vie commune, la carte de séjour temporaire qui aura été remise au conjoint de l'étranger pourra, pendant les deux années suivant sa délivrance, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement. En liant à ce point vie commune et séjour régulier, vous allez aggraver les situations de précarité vécues par les femmes et empêcher un peu plus leur émancipation.

S'agissant des conditions de ressources et de logement requises, leur durcissement aura pour conséquence de rendre très difficile, voire impossible, le regroupement familial, et ce en parfaite contradiction avec le principe constitutionnel du droit à une vie familiale normale et avec le droit à la vie privée inscrit à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Enfin, les pouvoirs conférés aux maires en matière de vérification des conditions de logement créeront des disparités entre les différentes communes, selon la politique d'immigration retenue par les élus.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 28 et le maintien du dispositif en vigueur.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 269.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, vous avez dit votre attachement au regroupement familial et souligné qu'il s'agit d'un droit qu'il ne faut pas remettre en cause.

Or, à la lecture de cet article 28, on peut douter que l'exercice de ce droit reste effectif, spécialement après le passage du texte à l'Assemblée nationale.

Tout est fait désormais pour rendre le regroupement familial difficile. Les conditions exigées deviennent démesurées ou discriminantes. L'étranger devra avoir un salaire supérieur au SMIC pour faire venir sa famille, ce qui, évidemment, est assez absurde quant on connaît le montant du salaire moyen en France et celui des étrangers, qui est en général inférieur.

On s'aperçoit également que la minorité de l'enfant étranger s'arrête à seize ans. En effet, dès lors que l'enfant de plus de seize ans n'aura pas suivi une scolarité dans un lycée français depuis plus de cinq ans, il sera exclu du bénéfice du regroupement familial.

Evidemment, le maire veille, pour empêcher toute fraude, en donnant un avis sur l'opportunité du regroupement familial.

Pire que tout, nous assistons à la précarisation du statut de certains membres de la famille. Alors que, jusqu'à présent, le conjoint et les enfants d'un étranger recevaient un titre de séjour de même qualité - nous avons déjà eu ce débat -, ils n'auront plus vocation qu'à recevoir un titre de séjour temporaire. C'est une profonde régression de la vie familiale normale, qui est protégée par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Le texte amorce cette régression en faisant coexister au sein d'une même famille des statuts différents.

La régression est accentuée par le fait que les conjoints pourraient se voir retirer leur titre de séjour dans les deux ans qui suivent la délivrance du titre, et non plus un an, si la communauté de vie a cessé.

Cette disposition, combinée avec celle du cinquièmement de l'article qui prévoit le retrait du titre de séjour en cas de venue en dehors de la procédure de regroupement familial, risque en outre de mettre les femmes turques, qui vous tiennent tant à coeur, monsieur le ministre, ...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Pas d'ironie, elles méritent mieux !

Mme Nicole Borvo. ... à la merci de leur conjoint, qui pourra désormais exercer un chantage au titre de séjour.

Les associations de femmes ont également attiré notre attention - nous avons peut-être rencontré les mêmes, monsieur le ministre - sur cette disposition, que nous proposerons de modifier par voie d'amendement.

En réalité, la logique qui sous-tend cet article est aux antipodes d'une bonne politique d'intégration et confirme le fait - je l'ai déjà dit plusieurs fois, mais peu importe - que, selon vous, l'intégration est une condition préalable à l'obtention d'un statut, alors que rien n'est mis en place pour faciliter cette intégration. Il s'agit donc d'un cercle vicieux.

En revanche, la directive européenne en préparation, telle qu'elle ressort des travaux - je tiens à votre disposition le document en date du 24 juillet - fait du statut de résident un instrument d'intégration dans la société. D'après cette directive, « l'intégration des ressortissants des pays tiers qui sont installés durablement dans les Etats membres est un élément clef pour promouvoir la cohésion économique et sociale ».

Votre texte ne participe donc pas de la logique de l'Union européenne ! Quelquefois, on se réfère à l'Union, mais, sur ce sujet, on ne s'y réfère pas parce qu'on fait pire.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 177 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 270 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le 1° A de cet article. »

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour défendre l'amendement n° 177.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. C'est un amendement de repli. C'est la même chose !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est différent !

M. Jacques Mahéas. Il est difficile de convaincre, ce soir ! Pourtant, ce texte comporte une grande anomalie que nous vous proposons de corriger par l'amendement n° 177.

L'article 29 de l'ordonnance de 1945, issu de la loi du 11 mai 1998, précise que le regroupement peut être refusé si « le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ».

Le décret du 6 juillet 1999 pris en application de cet article prévoit que sont acceptés au titre de ressources stables qui alimenteront le budget de la famille les revenus provenant des salaires du conjoint et les revenus de remplacement.

Ce même décret prévoit également que « les ressources du demandeur sont appréciées par référence à la moyenne du salaire minimum de croissance sur une durée de douze mois ».

Le paragraphe 1° A de l'article 28, paragraphe introduit par l'Assemblée nationale, a pour objet de modifier cette condition de ressources en indiquant que, désormais, ces dernières devront « atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance augmenté d'un coefficient défini par décret prenant en compte le nombre de personnes composant le foyer ».

Notre amendement vise donc bien évidemment à supprimer ce paragraphe 1° A afin que soit maintenue la condition de ressources actuelle.

En effet, si vous êtes français de souche, on considère que le SMIC - avec lequel, hélas ! vivent beaucoup de familles, même si, bien évidemment, elles vivent mal - vous assure un niveau de vie suffisant, et pour une famille étrangère, qui ne doit pas être, c'est la loi, traitée d'autre façon, on considérera qu'il faut le SMIC augmenté d'un coefficient qui tienne compte du nombre de personnes composant le foyer ! C'est tout à fait anormal, c'est tout à fait injuste.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 270.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Il a été défendu !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais non, il y a un papier, il faut le lire !

Mme Nicole Borvo. Le paragraphe 1° A a été introduit par l'Assemblée nationale. Nous ne sommes donc pas obligés de suivre !

En adoptant ce dispositif, les députés de la majorité conviennent qu'une famille ne peut pas vivre en France avec le SMIC.

M. Robert Bret. C'est un progrès !

Mme Nicole Borvo. C'est un grand progrès, car voilà bien longtemps que d'aucuns le disent.

Je vous prends à témoin : il est très difficile de vivre avec le SMIC. Les députés en ont enfin pris conscience !

En effet, pour faire venir sa famille et répondre à l'exigence de ressources suffisantes, l'étranger doit gagner un salaire supérieur au SMIC, puisque ses revenus doivent atteindre un montant au moins égal au SMIC, augmenté d'un mystérieux coefficient variant en fonction du nombre de personnes composant le foyer.

Donc le SMIC n'est pas une ressource suffisante pour vivre, à moins que ce qui est vrai pour les étrangers ne le soit pas pour les Français. Je ne sais pas !

J'encourage de ce fait le Gouvernement, conformément au voeu de sa majorité, à relever le SMIC. Ce serait normal !

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. C'est un « cavalier » !

Mme Nicole Borvo. Dans la foulée, monsieur le ministre, vous pourriez peut-être demander au patronat de relever les coefficients inférieurs au SMIC. Le Président de la République l'a d'ailleurs déjà demandé, mais apparemment sans succès pour l'instant.

Cette mesure serait opportune dans un contexte où l'on compte en France plus de 2 millions de travailleurs pauvres, c'est-à-dire des personnes qui, bien que travaillant, vivent en dessous du seuil de pauvreté, fixé à 550 euros par mois. Il est très très difficile de vivre dans de telles conditions.

Ce texte exige plus des prétendants au regroupement familial que jamais : la rédaction actuelle de l'article 28 prévoit en effet que le SMIC n'est qu'un salaire de référence, la condition de ressources étant réputée remplie dès lors que le SMIC est atteint. Quant à la loi de 1993, elle prévoyait un montant au moins égal au SMIC, mais pas de coefficient multiplicateur.

M. le rapporteur a certes essayé de « rattraper le coup », passez-moi l'expression, en supprimant la référence au coefficient d'augmentation et en maintenant l'idée de ressource active dès que ce montant minimal est acquis.

Franchement, ce paragraphe en dit long sur la façon dont la majorité envisage le droit au regroupement familial. Je vous propose donc de supprimer le 1° A de l'article 28.

M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. _ Après les mots : "salaire minimum de croissance", rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du 1° A de cet article : "mensuel. Dans ce cas, la condition de ressources est réputée acquise ;"

« II. _ En conséquence, à la fin du premier alinéa du 1° A de cet article, remplacer les mots : "ainsi rédigée" par les mots : "remplacée par deux phrases ainsi rédigées". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de prévoir que sera exigé que l'étranger atteigne un niveau de ressources d'un montant au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel, sans que ce montant soit augmenté d'un coefficient prenant en compte le nombre de personnes composant le foyer. De plus, une fois ce montant atteint, comme le prévoit déjà l'ordonnance, la condition de ressources pour bénéficier du regroupement familial sera réputée acquise.

En effet, l'exigence d'un montant au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel était déjà prévue dans l'ordonnance telle que modifiée par la loi n° 93-1027 du 24 août 1993 relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France. Dans la mesure où le montant du salaire minimum de croissance mensuel est considéré comme assurant un niveau de vie suffisant aux Français, il ne semble pas nécessaire de prévoir davantage pour les étrangers.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 36 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission.

L'amendement n° 178 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 271 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le 1° B de cet article. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 36.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à restaurer la possibilité de bénéficier du regroupement familial pour le membre de la famille d'un étranger qui, âgé de plus de seize ans, est né en France mais l'a quittée sans ses parents pour résider à l'étranger et n'a pas suivi une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement scolaire français, dans le cadre de la scolarité obligatoire.

En effet, très peu d'étrangers entrent réellement dans cette catégorie. Il ne semble donc pas nécessaire de prévoir dans l'ordonnance une telle exception au regroupement familial.

De plus, cette dernière crée une différence entre les mineurs pouvant bénéficier du regroupement familial, ce qui ne semble pas opportun.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour défendre l'amendement n° 178.

M. Jacques Mahéas. Je tiens à souligner que, pour une fois, nous sommes partiellement d'accord avec M. le rapporteur. Je le félicite d'ailleurs d'avoir souligné, en défendant l'amendement n° 36, le caractère inconstitutionnel de l'ajout proposé par l'Assemblée nationale, ce qui ne fait qu'apporter de l'eau à notre moulin !

L'amendement n° 178 nous renvoie à un amendement, introduit par l'Assemblée nationale, qui crée une nouvelle catégorie d'étrangers pouvant être exclus du regroupement familial.

Sont déjà exclus du regroupement familial : les membres de la famille dont la présence en France constituerait une menace pour l'ordre public, les membres de la famille atteints d'une maladie inscrite au règlement sanitaire international. L'Assemblée nationale y ajoute les enfants de plus de seize ans, nés en France, et l'ayant quittée sans leurs parents pour résider à l'étranger, s'ils n'ont pas suivi une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement français, dans le cadre de la scolarité obligatoire.

Le regroupement familial provoque déjà des drames importants. C'est le cas quand il s'agit de regrouper une fratrie, quand les démarches prennent plusieurs années, et que l'aîné a, par exemple, seize ans ou dix-sept ans quand on commence à penser à demander à bénéficier du regroupement familial. C'est ainsi que, dans certaines familles, des enfants devenus majeurs restent parfois dans le pays d'origine, avec leurs grands-parents, alors que leurs autres frères accompagnent leurs parents.

Cela me semble déjà très inhumain et illogique ! Pourtant, l'Assemblée nationale est allée au-delà et a adopté un texte inadmissible.

Je pense que la proposition de M. le rapporteur va être acceptée. En tout cas, pour ce qui nous concerne, nous nous félicitons de la réflexion menée tant par M. le rapporteur que par la commission.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 271.

Mme Nicole Borvo. Cet amendement est identique à l'amendement de la commission et à celui que vient de défendre mon collègue, M. Mahéas.

Sur ce sujet, la réflexion a abouti à considérer que la disposition adoptée par l'Assemblée nationale était absolument aberrante. En tout cas, c'est ainsi que je le comprends.

Le dépôt de cet amendement par la commission montre bien que la réflexion peut réfréner des tendances à l'affichage absolument anormales.

M. le président. L'amendement n° 179, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer le 1° de cet article. »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Je vais, une nouvelle fois, tenter de convaincre.

Le paragraphe 1° de l'article 28 modifie la procédure de regroupement familial concernant la vérification des conditions de logement et de ressouces des étrangers.

Aux termes de l'article 29 de l'ordonnance de 1945 tel qu'il résulte de la loi RESEDA, la procédure de vérification des conditions de ressources et de logement dans le cadre du regroupement familial est effectuée par l'Office des migrations internationales qui procède aux vérifications sur place.

L'autorisation par écrit de l'occupant est requise afin que les agents de l'OMI puissent pénétrer chez le demandeur.

Le texte précise que, si l'occupant refuse cette autorisation, les conditions de relogement permettant le regroupement familial ne sont pas remplies.

Les dispositions de l'article 29 sont précisées par le décret du 6 juillet 1999. La loi Chevènement a permis que l'étranger ne dispose pas du logement nécessaire au moment de la demande. Le maire de la commune de résidence de l'étranger ou celle dans laquelle ce dernier envisage de s'installer doit être consulté et émettre un avis motivé. Les informations recueillies par l'OMI ainsi que l'avis du maire sont transmis au préfet, qui décide.

Le projet de loi initial apportait deux modifications : que les vérifications de l'OMI soient seulement effectuées lorsqu'elles s'avèrent nécessaires et que l'avis du maire soit demandé non plus à la fin mais au cours de l'instruction de l'OMI.

L'Assemblée nationale a encore accru le rôle du maire au sein de la procédure de vérification des conditions de logement. Désormais, ce seront les services de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune dans laquelle il envisage de s'établir ou les services de l'OMI, à la demande du maire, qui effectueront les vérifications. Le maire devra émettre un avis motivé qui sera réputé favorable à l'issue d'un délai de deux mois à compter de la communication du dossier par le préfet.

Nous sommes défavorables, nous l'avons maintes fois indiqué hier, à l'augmentation des pouvoirs du maire, laquelle sera source d'arbitraire et de différence de traitement entre les communes parce que les jugements sont sans doute très différents suivant les couleurs politiques des élus.

M. le président. L'amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. - Dans la première phrase du troisième alinéa du 1° de cet article, après les mots : "conditions de logement" insérer les mots : "et de ressources".

« II. - Compléter la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du 1° de cet article par les mots : et peut demander à ses agents de procéder, s'ils ne l'ont déjà fait, à des vérifications sur place dans les conditions prévues à l'alinéa précédent.

« III. - Remplacer le dernier alinéa du 1° de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« 1° bis. L'avant-dernier alinéa du II de cet article est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il informe le maire de la décision rendue. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui, de surcroît, tend à améliorer la rédaction et l'économie du présent article.

M. le président. L'amendement n° 123 rectifié, présenté par M. Demuynck et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du 1° de cet article, remplacer les mots : "services sociaux de la commune" par les mots : "services de la commune chargés des affaires sociales ou du logement". »

La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. Cet amendement tend à permettre au maire de faire appel également aux agents municipaux des services du logement pour remplir les missions de vérification dans le cadre du regroupement.

M. le président. L'amendement n° 272, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Compléter la première phrase du second alinéa du 4° de cet article par les mots : "sauf si cette rupture de vie commune est justifiée par des violences avérées". »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Je retire cet amendement, monsieur le président, au profit du sous-amendement n° 314 que je défendrai dans un instant.

M. le président. L'amendement n° 272 est retiré.

M. le président. L'amendement n° 38, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le 4° de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger à raison des violences de nature physique qu'il a subies de la part de son conjoint, le préfet peut accorder le renouvellem ent du titre. »

Le sous-amendement n° 314, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard_ Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Dans le deuxième alinéa de l'amendement n° 38, remplacer les mots : "de nature physique" par le mot : "conjugales". »

La parole est M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 38.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement permettrait au représentant de l'Etat de prendre en compte la situation douloureuse des conjoints étrangers ayant obtenu un titre de séjour dans le cadre du regroupement familial ayant provoqué une rupture de la vie commune après avoir été victimes de violences au sein de leur foyer. Le préfet pourrait leur accorder le renouvellement de leur titre de séjour, conformément d'ailleurs aux recommandations du Haut Conseil à l'intégration.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter le sous-amendement n° 314.

Mme Nicole Borvo. Ce sous-amendement vise à limiter les conséquences de la restriction portée au droit au regroupement familial qui prévoit de retirer la carte de séjour temporaire au conjoint de l'étranger qui a sollicité le regroupement familial dans les deux ans qui suivent sa délivrance.

J'ai déjà eu l'occasion de dire que cette disposition constituait une grave régression du droit au regroupement familial.

D'abord, l'on précarise les membres de la famille en ne leur accordant plus aucun droit à la carte de résident, quand bien même leur conjoint en ont une.

Ensuite, la personne venue rejoindre son conjoint par regroupement familial a, pendant deux ans, une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête, puisque, si séparation il y a, elle se verra retirer son titre de séjour.

Peut-on un instant imaginer concrètement les effets d'une telle disposition ? Imaginez la pression formidable qui peut s'exercer sur la personne de l'étranger qui vient rejoindre son conjoint, parfois avec des enfants. Imaginez la menace qui peut s'exercer sur elle : « Si tu ne fais pas cela, je romps la vie commune et tu n'as plus de titre de séjour !. »

Une telle rédaction ne prenait nullement en compte le cas des femmes ou des hommes victimes de violences non seulement physiques mais également psychologiques : la menace est une violence, il n'y a pas que les coups !

C'est pourquoi, a minima, après avoir demandé - sans succès - la suppression de l'article, nous vous demandons, à tout le moins, de prendre en compte la situation de ces personnes.

La commission a proposé, dans le même souci, de ne pas sanctionner la personne qui rompt la communauté de vie à raison de violences physiques exercée sur elle.

Cependant, je crois qu'il faut aussi viser les violences qui ne sont pas physiques. A l'heure où nous allons parler de la maltraitance dont sont victimes les enfants et où toutes les études mettent l'accent sur les effets dévastateurs de la violence psychologique, il serait malvenu de ne pas en tenir compte.

En outre, il nous semble trop réducteur de viser les ruptures « à l'initiative de l'étranger victime ». En effet, parfois, la vie commune est rompu à l'initiative du « bourreau » ; c'est particulièrement vrai dans le cas des violences les plus graves, où les victimes ne sont plus en état de réagir.

C'est pourquoi nous accepterions de nous rallier à l'amendement de la commission à la condition, d'une part, qu'il soit fait mention des violences conjugales et, d'autre part, que soient supprimés les mots : « à l'initiative de l'étranger ».

Dans la mesure où le renouvellement du titre reste une simple faculté, eu égard à la rédaction de l'amendement de la commission, nous sommes prémunis contre le cas où ce serait le conjoint venu rejoindre l'étranger résidant en France qui serait auteur de violences et à qui on retirerait alors le titre de séjour.

M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots : "de l'article 25", insérer les mots : "et aux 1° à 4° de l'article 26". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de prévoir que les catégories d'étrangers bénéficiant d'une protection absolue contre les arrêtés d'expulsion sont exclus, comme ceux bénéficiant d'une protection relative, de la possibilité de se voir retirer leur titre de séjour lorsqu'ils ont fait venir leur conjoint ou leurs enfants en dehors de la procédure du regroupement familial.

Je souhaite toutefois apporter une rectification de forme à cet amendement, monsieur le président. Il s'agirait d'insérer les mots : « et aux 1° à 5° de l'article 26 ».

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 39 rectifié, qui est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots : "de l'article 25", insérer les mots : "et aux 1° à 5° de l'article 26". »

Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que ceux qu'elle a elle-même déposés ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les amendements n°s 176 et 269, qui tendent à supprimer l'article 28, sont contraires à la position de la commission puisque le dispositif proposé lui paraît cohérent. Nous sommes en effet favorables à l'évolution proposée par le projet de loi en matière de regroupement familial sous réserve des modifications que la commission préconise.

Les amendements n°s 177 et 270, qui tendent à supprimer le 1° A de l'article 28, sont partiellement satisfaits par l'amendement n° 35 de la commission, qui limite au SMIC l'exigence de ressources. Il convient tout de même de prévoir un seuil, et c'est pourquoi la commission ne peut accepter ces deux amendements.

L'amendement n° 179 vise à supprimer la procédure proposée à l'article 28 pour la vérification des conditions de ressources et de logement dans le cadre d'un regroupement familial. Il est contraire à la position de la commission, qui est favorable notamment, au renforcement du rôle du maire. En effet, d'emblée nous souhaitions que le maire soit au centre du dispositif.

M. Jacques Peyrat. C'est effectivement une très bonne initiative !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 123 rectifié a pour objet de reprendre la mention des « services de la commune chargés des affaires sociales ou du logement », formulation que nous avons déjà adoptée à l'article 2. Conformément au souhait de la commission, cet amendement permet donc aux maires de faire appel également aux agents municipaux des services du logement pour effectuer les vérifications sur place des conditions de logement de la personne étrangère souhaitant faire bénéficier les membres de sa famille du regroupement familial. Ainsi les maires pourront avoir un avis parfaitement circonstancié. Nous sommes, par conséquent, favorables à cet amendement.

La commission est également favorable au sous-amendement n° 314, qui apporte une précision extrêmement utile.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements de la commission et partage l'avis de celle-ci sur les autres amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 176 et 269.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 177 et 270.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons pris acte de la rectification apportée par monsieur le rapporteur. Elle a au moins l'avantage de supprimer la nécessité d'un décret. Nous nous demandions en effet quand le décret aurait été pris et donc quand le dispositif aurait été applicable.

Cela dit, je tiens tout de même à rappeler que, aux termes du texte actuellement en vigueur, « l'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont supérieures au salaire minimum de croissance ». Autrement dit, les ressources pouvaient malgré tout se situer au-dessous du SMIC ; ce ne sera plus le cas. Cela signifie bien que l'on durcit les conditions nécessaires du regroupement familial.

Nous persistons à demander que le texte demeure tel qu'il était : il ne posait pas de problèmes et il était déjà suffisamment dur, étant entendu qu'il y a malheureusement un certain nombre de familles françaises dont on considère qu'elles peuvent, elles, vivre avec un revenu inférieur au SMIC.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 177 et 270.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 36.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous voulons nous féliciter de ce que la commission propose de supprimer le paragraphe 1° B, qui a été introduit à la demande de l'un des « maximalistes », M. Léonard ; mais je pourrais également citer M. Lagarde, M. Estrosi et bien d'autres !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Comme quoi M. Jospin avait tort de vouloir supprimer le Sénat !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ah ? Vous avez entendu cela, vous ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Oui, et cela prouve que le Sénat a une utilité !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je suis obligé de dire que, là encore, M. le ministre soit est mal informé et se trompe, soit dit volontairement des choses inexactes.

M. Jospin n'a jamais demandé la suppression du Sénat. Il a seulement dit que le Sénat, compte tenu de la manière dont les sénateurs sont élus, est en effet une anomalie parce qu'il est toujours de droite, et vous le savez parfaitement ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Et, bien entendu, vous ne voulez pas changer vraiment la loi électorale !

Plusieurs sénateurs de l'UMP. Elle a été changée !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui, mais à la marge et à votre bénéfice !

Quand, de surcroît, l'Assemblée nationale est majoritairement composée de vos amis, le Sénat n'est pas tellement nécessaire puisque vous vous mettez d'accord entre vous et que, de toute façon, le Sénat ne joue même plus son rôle de chambre de réflexion.

M. le président. Le Sénat est précisément en train de démontrer le contraire !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ce n'est pas parce que nous nous sommes mis d'accord que le Sénat n'est pas utile !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En tout cas, ce paragraphe était en effet tout à fait scandaleux puisqu'il prévoyait que « ne peut bénéficier du regroupement familial un membre de la famille de plus de seize ans ... - qui peut donc être mineur -,... né en France et l'ayant quittée sans ses parents pour résider à l'étranger, s'il n'a pas suivi une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement scolaire français dans le cadre de la scolarité obligatoire ».

Autrement dit, du moment que ce mineur était parti à l'étranger, fût-ce à dix-sept ans ou à dix-sept ans et demi, il n'aurait pas eu le droit de revenir, il était définitivement coupé de ses parents.

M. Mariani, rapporteur à l'Assemblée nationale, était favorable à cette proposition de M. Léonard, tout comme M. le ministre. A M. Mamère, qui déclarait : « C'est de la provocation ! On ne peut accepter une telle atteinte au regroupement familial. Il ne s'agit plus de barrières mais de herses. On ne peut pas reprendre d'une main ce que l'on donne de l'autre avec les dispositions sur la "double peine" », M. Mariani disait : « Cela n'a rien à voir ! » et M. le ministre répondait : « Monsieur Mamère, cet amendement est raisonnable et ne remet nullement en cause le regroupement familial. Celui-ci concerne les personnes qui veulent vivre en famille. Tel n'est pas le cas lorsque l'enfant est resté éloigné de ses parents... »

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai simplement, depuis, été convaincu par le rapporteur du Sénat. Ce n'est pas un crime quand même ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le ministre disait donc...

M. Hilaire Flandre. Mais ne le dit plus !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. « Tel n'est pas le cas lorsque l'enfant est resté éloigné de ses parents jusqu'à l'âge de seize ans. » Cela n'avait évidemment rien à voir avec ce que prévoyait M. Léonard ! Je répète donc qu'il devait discuter avec un collaborateur au moment où M. Léonard avait exposé son amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je n'en veux pas à M. Dreyfus-Schmidt car, pendant toutes ces années où il a soutenu les gouvernements socialistes, il n'a jamais été entendu. Il est donc normal qu'il ne comprenne pas ce que peuvent être les rapports entre un gouvernement et une majorité !

M. Dreyfus-Schmidt, malgré son talent et sa sincérité, que l'on sait immenses, n'a jamais été entendu par les gouvernements qu'il a soutenus. Il ne peut pas concevoir qu'un ministre écoute le rapporteur à l'Assemblée nationale, puis le rapporteur au Sénat. Pour lui, c'est une étrangeté parce que, dans son esprit, un parlementaire parle pour parler, théorise et n'a aucun rapport avec la réalité puisque, de toute manière, même lorsque ce sont ses amis qui sont au gouvernement, il n'est pas entendu !

Ma propre conception des rapports entre la majorité, le Parlement dans son ensemble et le Gouvernement est tout à fait différente : je viens avec des convictions et, oui, il m'arrive d'en changer lorsque la majorité - ou l'opposition - propose une idée que je n'avais pas eue.

Je suis très heureux, monsieur Dreyfus-Schmidt, que, grâce à nous, vous puissiez comprendre ce qu'est un Parlement qui fonctionne. Allez, gardez-nous longtemps et ne revenez pas à ce que vous avez connu : cela vous a trop marqué ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 36, 178 et 271.

(Les amendements sont adoptés à l'unanimité.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 179.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous l'avions déjà dit à propos de l'article 2 : on ne voit pas du tout pourquoi ce serait le maire de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune où cet étranger envisage de s'établir qui est chargé par le préfet, lequel lui en fait la demande, de vérifier les conditions de logement. En l'état actuel des choses, l'OMI ou les services sociaux de la commune peuvent procéder aux vérifications, dans des conditions d'ailleurs assez curieuses.

Le maire a deux mois pour exprimer son avis, ce qui est un délai tout de même assez long, qui retarde d'autant, si les conditions sont réunies, le regroupement familial.

Le dossier est ensuite transmis au représentant de l'Etat, qui informe le maire de la décision rendue. Le représentant de l'Etat peut demander à ses agents de procéder, s'ils ne l'ont déjà fait, à des vérifications sur place - c'est ce que propose la commission - dans les conditions prévues à l'alinéa précédent.

Le processus est tout de même un peu long, qui est sensé permettre de vérifier des conditions qui sont plus dures qu'elles ne l'étaient précédemment.

Et, encore une fois, que vient faire le maire dans cette affaire ? C'est à l'Etat de vérifier les conditions de logement. Il n'y a aucune raison de « mouiller » les maires en leur donnant une responsabilité qui ne leur revient pas.

Il est bien évident que, tant que les étrangers n'auront pas le droit de vote, notamment aux élections municipales, puisque vous vous y refusez absolument, beaucoup de maires ne tiendront pas à ce qu'il y ait des regroupements familiaux. Au demeurant, il y a aussi des maires qui n'auront pas beaucoup de demandes parce qu'ils n'ont pas beaucoup d'étrangers sur leur territoire. Pour d'autres, bien sûr, ce sera le contraire !

Les maires n'ont donc strictement rien à faire dans cette procédure, et c'est pourquoi nous proposons, pour commencer, la suppression du 1° de cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 179.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 37 rectifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je veux seulement dire que cet amendement nous a été présenté comme un amendement de coordination, mais que ce n'est absolument pas le cas.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 314.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38, modifié.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié.

(L'article 28 est adopté.)

Art. 28
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 29 (interruption de la discussion)

Article 29

L'intitulé du chapitre VII de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est complété par les mots : « et des bénéficiaires de la protection temporaire ». - (Adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux. Nous les reprendrons à vingt et une heure quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Art. 29 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 30

4

CANDIDATURES

À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France actuellement en cours d'examen.

Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

5

MAI^TRISE DE L'IMMIGRATION

Suite de la discussion d'un projet de loi

déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 30.

Art. 29 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 31

Article 30

L'article 32 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rétabli :

« Art. 32. - L'entrée et le séjour en France des étrangers appartenant à un groupe spécifique de personnes bénéficiaires de la protection temporaire instituée en application de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les Etats membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil sont régis par les dispositions suivantes.

« I. - Le bénéfice du régime de la protection temporaire est ouvert aux étrangers selon les modalités définies par la décision du Conseil de l'Union européenne visée à l'article 5 de ladite directive, définissant les groupes spécifiques de personnes auxquelles s'applique la protection temporaire, fixant la date à laquelle la protection temporaire entrera en vigueur et contenant notamment les informations communiquées par les Etats membres de l'Union européenne concernant leurs capacités d'accueil.

« II. - L'étranger appartenant à un groupe spécifique de personnes visé par la décision du Conseil de l'Union européenne bénéficie de la protection temporaire à compter de la date mentionnée par cette décision. Il est mis en possession d'un document provisoire de séjour assorti le cas échéant d'une autorisation provisoire de travail. Ce document provisoire de séjour est renouvelé tant qu'il n'est pas mis fin à la protection temporaire.

« Le bénéfice de la protection temporaire est accordé pour une période d'un an renouvelable dans la limite maximale de trois années. Il peut être mis fin à tout moment à cette protection par décision du Conseil de l'Union européenne.

« Le document provisoire de séjour peut être refusé lorsque l'étranger est déjà autorisé à résider sous couvert d'un document de séjour au titre de la protection temporaire dans un autre Etat membre de l'Union européenne et qu'il ne peut prétendre au bénéfice de la disposition prévue au V.

« III. - Le bénéfice de la protection temporaire ne préjuge pas de la reconnaissance du statut de réfugié au titre de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés.

« Le bénéfice de la protection temporaire ne peut être cumulé avec le statut de demandeur d'asile. L'étranger qui sollicite l'asile reste soumis au régime de la protection temporaire pendant l'instruction de sa demande. Si, à l'issue de l'examen de la demande d'asile, le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire n'est pas accordé à l'étranger bénéficiaire de la protection temporaire, celui-ci conserve le bénéfice de cette protection aussi longtemps qu'elle demeure en vigueur.

« IV. - Un étranger peut être exclu du bénéfice de la protection temporaire :

« 1° S'il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'il ait pu commettre un crime contre la paix, un crime de guerre, un crime contre l'humanité ou un crime grave de droit commun commis hors du territoire français, avant d'y être admis en qualité de bénéficiaire de la protection temporaire, ou qu'il s'est rendu coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies ;

« 2° Lorsque sa présence sur le territoire constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat.

« V. - S'ils sont astreints à la détention d'un titre de séjour, les membres de la famille d'un étranger bénéficiant de la protection temporaire qui ont obtenu le droit de le rejoindre sur le fondement des dispositions de l'article 15 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 précitée reçoivent de plein droit un document provisoire de séjour de même nature que celui détenu par la personne qu'ils sont venus rejoindre, sauf si leur présence constitue une menace à l'ordre public.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.

M. Robert Bret. Cet article 30 introduit dans l'ordonnance du 2 novembre 1945 la notion de « protection temporaire » et transpose ainsi la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001.

Tout d'abord, on ne comprend pas pourquoi cette disposition, qui relève de l'asile, figure dans le présent projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France, alors qu'il existe un autre texte consacré au droit d'asile, que nous examinerons le 22 octobre prochain.

En effet, alors que l'essentiel des dispositions concernant l'asile ont été transférées dans la loi du 25 juillet 1952, la logique aurait voulu que cet article 30 relatif à la protection temporaire soit inclus dans le texte sur le droit d'asile.

De plus, on ne peut que regretter qu'il ne soit question ici que de normes minimales pour l'octroi de la protection temporaire. C'est ainsi que le texte fait référence non pas à un titre de séjour, mais à une autorisation de séjour.

Doit-on en déduire que les étrangers ne bénéficieront que d'un récépissé de six mois ?

Au lieu d'une protection temporaire, il s'agirait plutôt ici d'une protection « précaire », d'autant plus que l'autorisation de travail n'est qu'optionnelle. Or il convient que les personnes admises au titre de la protection temporaire puissent subvenir à leurs besoins et vivre décemment.

Mais j'aurai l'occasion de revenir sur cette question plus longuement lors de la présentation de notre amendement.

Par rapport à la convention de Genève, monsieur le ministre, votre texte ajoute une nouvelle clause d'exclusion, celle de « menace à l'ordre public », sans apporter plus de précision quant à la définition de cette notion.

De plus, on ne sait pas qui va examiner ces clauses d'exclusion : est-ce l'OFPRA, qui, actuellement, avec la commission des recours des réfugiés, examine de telles clauses ?

Le texte ne dit rien non plus sur le nombre de personnes déplacées à partir duquel il sera décidé qu'il y a afflux massif ou non.

Il ressort de la lecture du rapport que la protection temporaire est appréhendée uniquement sous un angle de gestion comptable : « équilibre entre les efforts consentis », ou encore « effort équitablement réparti », voire « répartition équitable des charges financières » ; on parle même de « gérer » les situations d'afflux massifs de personnes déplacées, de « capacités d'accueil »...

Les étrangers ne sont considérés que comme un coût pour la Communauté européenne.

Au-delà, le vocabulaire utilisé dans le rapport montre avec insistance combien les efforts consentis par les Etats membres pour accueillir ces populations et « supporter les conséquences de cet accueil » sont importants.

Ainsi, et pour les raisons que je viens d'évoquer, je vous annonce d'ores et déjà que nous nous prononcerons contre cet article 30.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 180, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 273, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Dans l'avant-dernière phrase du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 32 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, supprimer les mots : "le cas échéant". »

L'amendement n° 40, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 32 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un paragraphe ainsi rédigé :

« VI. - Dans les conditions fixées à l'article 7 de la directive précitée, peuvent bénéficier de la protection temporaire des catégories supplémentaires de personnes déplacées qui ne sont pas visées dans la décision du Conseil prévue à l'article 5, lorsqu'elles sont déplacées pour les mêmes raisons et à partir du même pays ou de la même région d'origine. Les dispositions des II, III, IV et V du présent article sont applicables à ces catégories supplémentaires de personnes. »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 180.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est parce que nous partageons très exactement l'analyse qui vient d'être faite par notre collègue M. Bret que non seulement nous avons décidé de voter contre cet article 30 mais qu'en outre nous avons déposé un amendement de suppression.

Nous l'avons déjà dit, à l'Assemblée nationale, les députés avaient déjà voté le texte sur le droit d'asile lorsqu'ils ont abordé la discussion du texte consacré à l'immigration. Mais ce n'est pas notre cas ! Nous allons avoir la semaine prochaine un débat - un long débat ! - sur le droit d'asile, et nous verrons alors dans quelle mesure ne sont pas contraires à la Constitution et à la convention de Genève toutes les dispositions qui nous seront proposées dans ce texte. Mais nous ne pouvons pas avoir ce débat ce soir : il aura lieu la semaine prochaine.

C'est pourquoi nous vous demandons de ne pas prendre les choses à l'envers, de ne pas parler aujourd'hui du droit d'asile alors que, je le répète, le débat n'est pas ouvert, que le rapport n'est pas déposé et que, bien évidemment, les amendements extérieurs ne le sont pas non plus.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 273.

M. Robert Bret. Après avoir dit notre opposition à cet article, nous souhaitons à présent apporter une amélioration, si minime soit-elle, à sa rédaction.

La modification que nous vous proposons tend à lier la délivrance de l'autorisation de séjour à celle de l'autorisation de travail pour les réfugiés sous protection temporaire. En effet, tel qu'il est rédigé actuellement, l'article 30 rend l'octroi d'un titre de travail optionnel. Ainsi, et compte tenu de sa situation, l'accès au travail temporaire et à l'emploi peut être refusé au réfugié, ce qui n'est pas acceptable, vous en conviendrez : comment, en effet, ces personnes admises au titre de la protection temporaire - qui, je le rappelle, peut durer jusqu'à trois ans - pourraient-elles subvenir à leurs besoins et vivre dans des conditions décentes ?

Dans l'intérêt de ces personnes et de la société qui les accueille, il est indispensable que l'autorisation de séjour et le titre de travail soient délivrés en même temps, cela me paraît être le bon sens. Ne pas le faire reviendrait à multiplier encore les statuts précaires, ce qui n'est bon pour personne.

Nous sommes, quant à nous, favorables au renforcement du statut des étrangers résidant sur notre sol. Il ne faut pas, en effet, permettre leur exploitation par des employeurs peu scrupuleux, qui n'hésitent de toute façon pas à recruter des étrangers sans titre de travail, je l'ai rappelé précédemment, notamment dans les secteurs de la restauration, du bâtiment, du nettoyage, ou encore de l'agriculture.

C'est pourquoi nous proposons de supprimer les mots « le cas échéant » dans le paragraphe II du texte proposé pour l'article 32 de l'ordonnance de 1945.

Pour toutes ces raisons, je demande à l'ensemble de nos collègues de voter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 40 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 180 et 273.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L'amendement n° 40 a pour objet de compléter la transposition de la directive européenne sur la protection temporaire. La commission ne peut donc accepter la suppression de l'article 30, puisqu'il constitue le cadre de cette transposition, à laquelle il lui paraît nécessaire de procéder. Elle a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 180.

L'amendement n° 273, présenté par M. Bret, a pour objet de rendre systématique la délivrance d'une autorisation de travail aux bénéficiaires de la protection temporaire. A notre avis, il convient de ne pas rendre cette délivrance obligatoire, afin de laisser la possibilité de s'adapter aux conditions dans lesquelles la protection temporaire est mise en oeuvre : nombre de bénéficiaires, durée de la protection, etc.

La commission a donc également émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement partage l'avis de la commission, mais je souhaite apporter quelques éléments complémentaires à M. Bret ainsi qu'au groupe socialiste.

La procédure de la protection temporaire devrait permettre à la France de faire face à un afflux massif de réfugiés pour un temps donné et limité. Je pense ainsi aux Kosovars : la France a reçu 11 000 ressortissants de cette province lors de la guerre au Kosovo. Or si cette procédure, monsieur Bret, monsieur Dreyfus-Schmidt, avait existé, elle se serait appliquée dans ce cas-là.

Ici, il ne s'agit que de transposer la directive européenne, et si 11 000 Kosovars - reprenons cet exemple - arrivaient en France en un lieu déterminé, nous ne pourrions pas tous les autoriser à travailler.

La directive prévoit cependant que leur soit octroyé soit le droit au travail, soit le droit, monsieur Bret, à une prestation sociale. En effet, si l'on peut tout à fait concevoir de donner le droit de travailler à 300 personnes, en revanche, en cas d'afflux massif, chacun comprend - même vous ! - que ce n'est pas possible. C'est la raison pour laquelle nous offrons ces deux possibilités.

Cela étant, le groupe socialiste s'interroge : pourquoi cette disposition figure-t-elle dans ce texte plutôt que dans un autre texte à venir, concernant le droit d'asile ? Nous aurions en effet pu en discuter dans le cadre de ce dernier projet de loi, je ne le conteste pas. Mais convenons que, s'agissant d'une procédure collective et non d'une procédure totalement individuelle, comme l'est le droit d'asile lui-même, il n'était pas non plus anormal qu'elle figure dans le présent projet de loi.

Une discussion a eu lieu à ce sujet entre le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'intérieur. Un arbitrage a été rendu : c'est au ministère de l'intérieur qu'il appartient de défendre cette mesure.

Telles sont les explications que je souhaitais vous fournir. Il me semble que, sur cet article, nous devrions pouvoir trouver un consensus.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 180.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je remercie M. le ministre de ses explications : il nous a tout à fait convaincus que cette disposition devait trouver sa place dans le projet de loi sur le droit d'asile...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. La prochaine fois, je me donnerai moins de mal !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... qui prévoit, nous le verrons, les cas d'afflux importants de réfugiés. Nous aurons ainsi éventuellement à parler de nouvelles mesures, en particulier de l'asile interne, par exemple. Il n'y a donc aucune raison que nous parlions aujourd'hui de ce sujet.

Je sais bien que l'on voit apparaître le ministre de l'intérieur dans le texte sur le droit d'asile puisque c'est lui qui doit désigner le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Nous nous y opposerons, d'ailleurs, je le dis d'ores et déjà.

Pour le reste, il ne faut pas mélanger les genres : le droit d'asile n'est pas du ressort du ministre de l'intérieur, et ce n'est d'ailleurs pas lui qui présentera le projet de loi, c'est le ministre des affaires étrangères.

En conséquence, je vous demande derechef de voter cet amendement, de sorte qu'il prenne sa place normale dans le texte consacré au droit d'asile.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Bien que je sois mal payé de mes efforts, je veux quand même améliorer - si possible - la compétence de M. Dreyfus-Schmidt en lui apprenant, ce qu'il ne sait visiblement pas, que dans treize pays sur quinze de la Communauté européenne les questions relatives au droit d'asile sont de la compétence du ministre de l'intérieur.

Cela ne rend pas les ministres de l'intérieur de tous les pays de la Communauté européenne, autant de démocraties qui n'ont aucune leçon à recevoir, inaptes au raisonnement démocratique ! Treize pays sur quinze !

Si vous voulez que je pousse le raisonnement, j'ajoute que la France est le seul pays où les questions d'immigration sont réparties entre trois ministères : le ministère des affaires sociales, le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'intérieur. Cela explique peut-être l'incapacité dans laquelle vous avez été - et je veux bien considérer qu'elle n'est pas simplement politique - de faire quoi que ce soit en matière de politique de l'immigration ! C'est une spécificité française, je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 180.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 273.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 30, modifié.

(L'article 30 est adopté.)

Art. 30
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Art. additionnels après l'art. 31

Article 31

L'article 32 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 32 ter. - L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé, ou l'étranger exclu du bénéfice de la protection temporaire ou qui, ayant bénéficié de cette protection, cesse d'y avoir droit, et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue à l'article 22 et, le cas échéant, des pénalités prévues à l'article 19. »

M. le président. L'amendement n° 181, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais, d'abord, répondre à M. le ministre que chaque pays a ses traditions, particulièrement en matière de droit d'asile.

Je ne citerai pas, puisque cela a déjà été fait, Aragon parlant de la France « ouverte comme une paume aux souffles de la mer pour que l'oiseau du large y vienne et s'y confie ».

On peut aussi citer la Constitution de la France, qui a été modifiée il n'y a pas si longtemps, pour dire que, s'il peut y avoir des accords européens en la matière, en tout état de cause, la France peut donner le droit d'asile à tous ceux qui souffrent et qui combattent pour la liberté.

Ce n'est pas la peine non plus de nous vanter une Europe qui serait absolument uniforme, ce que personne ne désire.

Mais, à l'article 31, il est question, non plus d'une protection temporaire, comme à l'article 30, mais d'une protection subsidiaire. Cette nouvelle notion sera largement discutée, vous le savez, monsieur le ministre, lors de l'examen du texte sur le droit d'asile. Il nous sera en effet proposé de remplacer l'asile territorial par la protection subsidiaire.

Mais nous verrons surtout qu'on nous propose de faire une loi sur la base d'une directive qui n'existe pas encore, qui est en pleine discussion, et le texte sur lequel les ministres auraient donné un accord serait déjà contraire, sur de nombreux points, à ce qui a été proposé à l'origine par la Commission !

Nous aurons à développer l'idée qu'il n'est pas possible que nous appliquions une directive qui n'est pas encore élaborée, et de le faire de la manière la plus sévère, la plus dure possible, parce que, bien évidemment, la France n'aurait plus, ensuite, son libre arbitre pour en discuter. On ne peut pas s'aligner sur un texte qui n'existe pas encore, au risque, encore une fois, de lier, pieds et poings, les représentants de la France dans les discussions qui restent à venir sur une directive elle-même à venir !

C'est pourquoi, cette fois, nous vous demandons d'admettre que cet article 31 ne peut pas prendre sa place dans ce texte-là. Il faut évidemment attendre de savoir si le Sénat acceptera ou non les propositions qui lui seront faites ou si, au contraire, sur la plupart des points, il décide qu'il y a lieu d'attendre que la directive soit applicable pour l'appliquer, mais surtout de voir ce qu'elle sera au moment où elle sera définitive.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission ne partage pas du tout ce raisonnement. En effet, elle considère, pour sa part, que l'article 31 est important en ce qu'il fait la relation entre ce texte et le projet de loi sur le droit d'asile, qui sera soumis prochainement au Sénat.

C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à l'amendement n° 181.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On ne peut pas préjuger de la loi qu'adoptera le Sénat !

M. Robert Bret. Cela ne va pas !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande un scrutin public. C'est très important !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 181.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)


M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 13 :

Nombre de votants315
Nombre de suffrages exprimés315
Majorité absolue des suffrages158
Pour115
Contre200

Je mets aux voix l'article 31.

(L'article 31 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 31

Art. 31
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Art. 32

M. le président. L'amendement n° 309, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« L'article 33 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa, les mots : "des sixième à neuvième alinéas de l'article 5" sont remplacés par les mots : "du dernier alinéa de l'article 5" ;

« 2° Dans le même alinéa, les mots : "des premier à quatrième alinéas de l'article 5" sont remplacés par les mots : "des premier à douzième alinéas de l'article 5" ;

« 3° Au quatrième alinéa, les mots : "article 31 bis" sont remplacés par les mots : "article 10 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 309.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 31.

L'amendement n° 41, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« A l'article 34 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, les mots : "code de la nationalité" sont remplacés par les mots : "code civil". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de précision.

La référence actuelle au code de la nationalité est anachronique. La loi du 22 juillet 1993 a en effet inséré les dispositions du code de la nationalité dans le titre Ier bis du code civil.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 31.

Art. additionnels après l'art. 31
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 33

Article 32

L'article 34 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Après les mots : « aux dispositions », sont insérés les mots : « du deuxième alinéa » ;

2° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les agents diplomatiques ou consulaires peuvent également, de leur propre initiative, procéder à la légalisation ou la vérification de tout acte d'état civil étranger en cas de doute sur l'authenticité de ce document, lorsqu'ils sont saisis d'une demande de visa ou d'une demande de transcription d'un acte d'état civil.

« Pour ces vérifications et par dérogation aux dispositions de l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, les autorités diplomatiques et consulaires sursoient à statuer sur la demande de visa présentée par la personne qui se prévaut de l'acte d'état civil litigieux, pendant une période maximale de quatre mois.

« Lorsque, malgré les diligences accomplies, ces vérifications n'ont pas abouti, la suspension peut être prorogée pour une durée strictement nécessaire et qui ne peut excéder quatre mois. » - (Adopté.)

Art. 32
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Art. 34 (début)

Article 33

L'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 35 bis. - I. - Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger :

« 1° Soit, devant être remis aux autorités compétentes d'un Etat de la Communauté européenne en application de l'article 33, ne peut quitter immédiatement le territoire français ;

« 2° Soit, faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion, ne peut quitter immédiatement le territoire français ;

« 3° Soit, faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application de l'article 22 et édicté moins d'un an auparavant, ne peut quitter immédiatement le territoire français ;

« 4° Soit, faisant l'objet d'un signalement ou d'une décision d'éloignement visés au deuxième ou au troisième alinéa de l'article 26 bis, ne peut quitter immédiatement le territoire français ;

« 5° Soit, ayant fait l'objet d'une décision de placement au titre de l'un des cas précédents, n'a pas déféré à la mesure d'éloignement dont il est l'objet dans un délai de sept jours suivant le terme du précédent placement ou, y ayant déféré, est revenu sur le territoire français alors que cette mesure est toujours exécutoire.

« Après l'interpellation de l'étranger et, le cas échéant, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de la période d'incarcération en cas de détention, le préfet ou, à Paris, le préfet de police décide son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée qui ne peut excéder quarante-huit heures. Le procureur de la République en est informé dans les meilleurs délais.

« L'étranger est informé, dans les meilleurs délais, que, pendant toute la période de la rétention, il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin, et communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend. Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités permettant aux étrangers de bénéficier effectivement de 1'assistance de chacun de ces intervenants.

« Quand un délai de quarante-huit heures s'est écoulé depuis la décision de placement en rétention, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention. Une copie de la saisine du juge des libertés et de la détention est remise à l'intéressé et la décision de placement en rétention lui est notifiée. L'étranger est immédiatement informé de ses droits, par l'intermédiaire d'un interprète s'il ne connaît pas la langue française. Un document précisant ces droits et leurs conditions d'exercice est remis à l'étranger. Le juge statue par ordonnance au siège du tribunal de grande instance dans le ressort duquel se situe le lieu de placement en rétention de l'étranger, après audition du représentant de l'administration, si celui-ci, dûment convoqué, est présent, et de l'intéressé en présence de son conseil, s'il en a un. Toutefois, si une salle d'audience lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée à proximité immédiate de ce lieu de rétention, il statue dans cette salle. Le juge rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention. Il l'informe des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant.

« L'ordonnance de prolongation de maintien en rétention court à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures fixé au septième alinéa. Le placement de l'étranger en rétention prend fin au plus tard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de cette ordonnance.

« A titre exceptionnel, le juge peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives, après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité, et sur lequel est portée la mention de la mesure d'éloignement en instance d'exécution. L'assignation à résidence concernant un étranger qui s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière en vigueur, d'une interdiction du territoire dont il n'a pas été relevé, ou d'une mesure d'expulsion en vigueur doit faire l'objet d'une motivation spéciale.

« L'étranger est astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par le juge et doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement. A défaut du respect des obligations d'assignation à résidence, le procureur de la République est saisi dans les meilleurs délais en application des dispositions de l'article 27.

« II. - Quand un délai de quinze jours s'est écoulé depuis l'ordonnance mentionnée au dixième alinéa du I et en cas d'urgence absolue ou d'une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, ou lorsque l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement, le juge des libertés et de la détention est à nouveau saisi. Il lui appartient de statuer par ordonnance après audition du représentant de l'administration, si celui-ci, dûment convoqué, est présent, et de l'intéressé en présence de son conseil, s'il en a un.

« Si le juge ordonne la prolongation du maintien, l'ordonnance de prolongation court à compter de l'expiration du délai de quinze jours mentionné à l'alinéa précédent, et pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.

« III. - Le juge peut également être saisi lorsque, malgré les diligences de l'administration, la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou de l'absence de moyens de transport appropriés, et qu'il est établi par le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, par le préfet de police, que l'une ou l'autre de ces circonstances doit intervenir à bref délai. Il peut également être saisi aux mêmes fins lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement, malgré les diligences de l'administration, pour pouvoir procéder à l'exécution de la mesure d'éloignement dans le délai prescrit au dixième alinéa du I.

« Le juge statue par ordonnance après audition du représentant de l'administration, si celui-ci, dûment convoqué est présent, et de l'intéressé en présence de son conseil, s'il en a un.

« Si le juge ordonne la prolongation du maintien, l'ordonnance de prolongation court à compter de l'expiration du délai de quinze jours fixé au dixième alinéa du I. La prolongation ne peut excéder une durée de cinq jours.

« IV. - Les ordonnances mentionnées au dixième alinéa du I, au deuxième alinéa du II et au troisième alinéa du III sont susceptibles d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, qui est saisi sans forme et doit statuer dans les quarante-huit heures de sa saisine ; l'appel peut être formé par l'intéressé, le ministère public et le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police ; ce recours n'est pas suspensif. Toutefois, le ministère public peut demander au premier président de la cour d'appel ou à son délégué de déclarer son recours suspensif. Dans ce cas, l'appel, accompagné de la demande, est formé sans délai et transmis au premier président de la cour d'appel ou à son délégué. Celui-ci décide, sans délai, s'il y a lieu de donner à cet appel un effet suspensif, en fonction des garanties de représentation dont dispose l'étranger, par une ordonnance motivée rendue contradictoirement qui n'est pas susceptible de recours. L'intéressé est maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce que cette ordonnance soit rendue et, si elle donne un effet suspensif à l'appel du ministère public, jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond.

« IV bis. - A son arrivée au centre de rétention, l'étranger reçoit notification des droits qu'il est susceptible d'exercer en matière de demande d'asile. Il lui est notamment indiqué que sa demande d'asile ne sera pas recevable si elle est formulée plus de cinq jours après cette notification.

« V. - Un étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

« Si la mesure d'éloignement est annulée par le juge administratif, il est immédiatement mis fin au maintien de l'étranger en rétention et celui-ci est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas.

« VI. - L'intéressé peut bénéficier de l'aide juridictionnelle.

« Par décision du juge sur proposition du représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, du préfet de police, et avec le consentement de l'étranger, les audiences prévues aux I, II et III peuvent se dérouler avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission. Il est alors dressé, dans chacune des deux salles d'audience ouvertes au public, un procès-verbal des opérations effectuées.

« VII. - Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

« En cas de nécessité et pendant toute la durée de la rétention, après la première ordonnance de maintien, le préfet ou, à Paris, le préfet de police peut décider de déplacer l'étranger placé dans un centre de rétention dans un autre centre de rétention, sous réserve d'en informer les juges des libertés et de la détention compétents du lieu de départ et du lieu d'arrivée.

« Il est tenu, dans tous les lieux recevant des personnes maintenues au titre du présent article, un registre mentionnant l'état civil de ces personnes ainsi que les conditions de leur maintien.

« Pendant toute la durée de la rétention, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention peut se transporter sur les lieux, vérifier les conditions du maintien et se faire communiquer le registre prévu à l'alinéa précédent. Le procureur de la République visite les lieux de rétention chaque fois qu'il l'estime nécessaire et au moins une fois par an.

« VIII. - L'interdiction du territoire prononcée à titre de peine principale et assortie de l'exécution provisoire entraîne de plein droit le maintien de l'étranger dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, dans les conditions définies au présent article, pendant le temps strictement nécessaire à son départ. Quand un délai de quinze jours s'est écoulé depuis le prononcé de la peine ou la fin de la période de détention, il est fait application des dispositions des II et III.

« L'interdiction du territoire prononcée à titre de peine complémentaire peut également donner lieu au maintien de l'étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, le cas échéant à l'expiration de sa peine d'emprisonnement, dans les conditions définies aux I, II et III.

« IX. - Il est créé une commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention. Cette commission veille au respect des droits des étrangers maintenus en application du présent article et à la qualité des conditions de leur hébergement. Elle effectue des missions sur place et peut faire des recommandations au Gouvernement tendant à l'amélioration des conditions matérielles et humaines de rétention des personnes.

« La commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention comprend un membre ou ancien membre de la Cour de cassation d'un grade au moins égal à celui de conseiller, président, un député et un sénateur, un membre ou ancien membre du Conseil d'Etat, une personnalité qualifiée en matière pénitentiaire, deux représentants d'associations humanitaires et deux représentants des principales administrations concernées. Les membres de la commission sont nommés par décret. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de fonctionnement de la commission.

« X. - Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités selon lesquelles les étrangers maintenus en rétention bénéficient d'actions d'accueil, d'information et de soutien, pour permettre l'exercice effectif de leurs droits et préparer leur départ. »

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.

M. Robert Bret. Nous en arrivons à l'examen de l'article 33 du projet de loi, article important s'il en est, puisque c'est celui qui, en allongeant le délai de la rétention administrative des étrangers, modifie en profondeur le régime de cette rétention.

C'est la nature et l'idée même de la rétention - théoriquement prévue pour le temps strictement nécessaire au départ de l'étranger - qui sont modifiées jusqu'à lui conférer la valeur d'une peine privative de liberté avant l'éloignement définitif. C'est une atteinte à la liberté fondamentale d'aller et venir.

Vous le savez, nous sommes depuis longtemps fermement opposés à l'allongement de la durée de cette rétention. Mais, reconnaissons-le, nous avons échappé au pire, puisque, dans votre élan, monsieur le ministre, vous aviez été jusqu'à proposer dans votre avant-projet soixante jours de rétention !

Cette rétention, qui est actuellement de douze jours - quarante-huit heures, puis possibilité de prolonger de deux fois cinq jours avec l'autorisation du juge -, passera à vingt-six jours - quarante-huit heures, puis quinze jours et neuf jours - et même à trente-deux jours - quarante-huit heures, puis deux fois quinze jours - dans certains cas.

Plusieurs griefs peuvent être formulés à l'encontre du nouveau système que vous nous proposez ici.

En premier lieu, le placement initial dépend toujours du pouvoir préfectoral pour une durée maximale de quarante-huit heures et non du juge des libertés et de la détention.

Ce placement doit coïncider avec l'information du juge des libertés et de la détention qui doit statuer sur la légalité du maintien dans les quarante-huit heures de sa saisine.

Seule la décision de prolonger le séjour en rétention est confiée au juge des libertés et de la détention.

Ainsi, si l'ensemble du dispositif semble accorder une place prédominante à ce magistrat, il ressort en réalité que les modalités de son intervention restent strictement encadrées.

Il peut donc difficilement remplir son rôle de véritable gardien des libertés.

Vous ne donnez à votre texte qu'un vernis de respect des droits de l'homme.

Notons également la complexité du système s'agissant des possibilités de prolongation du maintien au-delà de quinze jours.

En outre, se multiplient les procédures peu lisibles renvoyant à des notions on ne peut plus floues telles que l'urgence absolue, la menace particulièrement grave pour l'ordre public, les diligences de l'administration, etc.

Tout cela nous entraîne vers la mise en place d'un dispositif très complexe, voire incompréhensible, tant pour les étrangers eux-mêmes que pour leurs conseils. Quant à l'efficacité des reconduites à la frontière que vous évoquez pour justifier une telle durée de séjour en rétention, il faut savoir que la CIMADE - présente dans ces centres - estime que le délai utile à l'administration pour mettre à exécution les mesures d'éloignement se situe entre quatre et sept jours.

S'agissant des laissez-passer, je ne vois pas en quoi l'augmentation de la durée de rétention changera quoi que ce soit.

Si les consulats ne les délivrent pas dans le délai actuel de douze jours, ils ne les délivreront pas plus demain dans un délai de trente-deux jours ! C'est une question d'ordre politique.

En outre, mais j'y reviendrai plus longuement lors de la défense d'un autre de nos amendements, les centres de rétention ne sont surtout pas faits pour accueillir des personnes aussi longtemps. D'autant que votre projet de loi entraînera une hausse du nombre de personnes ainsi retenues.

Certes, vous nous annoncez la construction de nouveaux centres de rétention.

En réalité, cet allongement permettra d'organiser des vols charters que votre projet de loi légalise du même coup.

On oublie vite, ici, qu'il s'agit d'individus et de vies humaines. Ne conviendrait-il pas de prendre le problème de façon plus globale, monsieur le ministre ? En effet, dans un monde de libre circulation des capitaux et des marchandises, il faut se poser la question de la libre circulation des hommes. De même, il faut repenser les rapports entre les nations et les peuples. Or les mesures que vous nous proposez relèvent davantage de la citadelle assiégée !

Le monde ne s'arrête pas aux frontières européennes.

Vous n'allez pas empêcher les flux migratoires qui naissent des situations de guerre, de famine ou de déséquilibre économique. A la réponse sécuritaire, il faut opposer l'homme dans toute sa dimension et non pas l'appréhender comme un individu dangereux qu'il faut à tout prix stopper aux frontières, voire traquer, emprisonner, reconduire. Vous comprendrez donc que nous sommes fermement opposés à cet article 33, sur lequel nous proposerons tout à l'heure des amendements pour en supprimer les passages les plus inacceptables.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, nous entamons l'examen de l'article 33, qui définit les règles de la rétention.

Avec mes collègues du groupe socialiste, nous avons déposé sur cet article un ensemble d'amendements tendant à préserver les droits des étrangers ainsi placés, mais nous avons surtout déposé un amendement de suppression visant à ce que ne soit pas aggravé le sort fait aux personnes placées en centres de rétention.

Mais c'est de trois choses, beaucoup plus matérielles, que je voudrais vous parler.

La première concerne les zones d'attente. Le fait que celles de Roissy soient honorables - je parle de l'intendance et non du principe - ne saurait occulter l'insuffisance d'une majorité d'entre elles en France.

La deuxième concerne les postes de police. On peut citer Roissy et ses insuffisances. Il n'est pas digne d'une démocratie de retenir plusieurs jours, dans une pièce trop petite, sans commodités, des dizaines de femmes et d'hommes, parfois avec des enfants, dans une promiscuité lamentable et sans aucune hygiène.

Monsieur le ministre, nous vous demandons de vous engager à ce que l'espace par individu, l'accès à l'eau sur place et les toilettes soient partie intégrante de ces salles initialement non prévues pour ce triste rôle, mais de fait devenues occupées, voire suroccupées.

La troisième et dernière chose concerne la nourriture fournie à ces personnes en transit, sur laquelle je voudrais vous alerter : des sachets contenant une boîte de pâté, je vous laisse imaginer tous les fantasmes de ceux qui n'ont pas forcément la même culture que nous - et un petit paquet de chips. Aucun fruit. Et, chaque jour, systématiquement le même repas.

Nous nous sommes préoccupés de l'origine de la nourriture. Les forces de police en place nous ont bien expliqué que, théoriquement, elle n'était prévue que pour un repas, les personnes concernées n'étant pas censées rester. Mais elles restent là, et même plusieurs jours ! Nous avons également appris que l'entreprise qui la fournit est la même que celle qui s'occupe de la restauration des zones d'attente. Or, là-bas, tout est correct. C'est donc une même société qui définit la qualité des produits destinés aux zones d'attente et qui fait des économies ignobles sur ce qui est servi dans les postes de police.

Je suis contente que M. Bret soit intervenu avant moi, parce qu'il a porté très haut le débat, tant sur le plan politique que sur notre attachement commun aux droits de l'homme et au respect des étrangers. Mais permettez-moi, dans cet hémicycle, où la loi est élaborée dans toute sa grandeur, de vous rappeler aussi que les droits des femmes et des hommes, c'est le quotidien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'apprécie beaucoup ce vibrant plaidoyer. Mais que n'avez-vous, madame, vous et vos amis, fait en sorte, pendant les cinq années où vous avez été aux responsabilités, de mettre, pour une fois, vos idées en conformité avec vos actes ? (Bravo, et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Madame Blandin, il est des centres qui ne correspondent nullement à l'idée que l'on peut se faire de la dignité. Et je m'engagerai, dans ce débat, à avoir un plan de rénovation de l'ensemble de ces centres, de façon à ce que personne ne puisse être considéré et traité autrement que comme un être humain. Et je suis le premier à le reconnaître, madame - je le dis aussi à M. Bret -, à partir du moment où l'on allonge la durée de séjour dans un centre, on doit réfléchir et modifier sans doute, vous avez parfaitement raison, les conditions d'hébergement et de nourriture.

Mais, madame, si la situation que j'ai trouvée en devenant ministre de l'intérieur est si dramatique, que ne l'avez-vous, vous tous, changée avant, vous qui aviez toutes les responsabilités pour le faire ? Et pourquoi déjà me faisiez-vous cette confiance, en vous disant : « Un jour il arrivera et il règlera ce que nous n'avons pas pu régler » ? (Rires.)

Alors, franchement, soit vous me faites trop confiance, soit c'est consternant ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais rappeler que la loi sur la présomption d'innocence et les droits des victimes a donné aux parlementaires le droit de visiter les prisons, les salles de garde à vue, les zones d'attente et les centres de rétention. Et nous sommes nombreux à l'avoir fait.

M. Robert Bret. Pas assez ! (Mme Nicole Borvo approuve.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous nous sommes rendu compte, non seulement de l'état de nombre de ces centres ou de ces zones, mais surtout du fait que, dépendant, certains du ministère de la justice, d'autres du ministre de l'intérieur, d'autres encore de la gendarmerie...

M. Robert Bret. De la défense nationale !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... ils n'avaient pas les crédits nécessaires pour que soient effectuées les réparations immédiates qui s'imposent.

Ainsi, dans un centre de rétention situé près de Strasbourg et dépendant du ministère de la justice, j'ai vu un malheureux gérant plein de bonne volonté qui n'avait pas les moyens de faire réparer un baby-foot cassé !

Nous avons vu, près de Roissy, dans le centre de rétention tenu par la gendarmerie, ...

M. Jean-Jacques Hyest. Au Mesnil-Amelot !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... des gendarmes qui se désespéraient parce qu'ils n'avaient pas les moyens de remplacer la vitre de la télévision qui était cassée. J'en prends à témoin ceux de nos collègues qui étaient avec nous.

Bref, il y a en effet un travail considérable à faire dont nous avons, les uns et les autres, parfaitement pris conscience grâce à la loi si décriée de Mme Guigou - et du Sénat d'ailleurs -, mais sur laquelle, à cet égard-là, nul n'est revenu, fort heureusement, loi qui nous a permis de nous rendre compte de cette situation impossible.

La première idée qui vient à l'esprit face à de telles situations serait de réduire au minimum le taux d'occupation. C'est d'ailleurs le sens d'une décision du Conseil constitutionnel à cet égard, selon laquelle les séjours doivent être les plus courts possible. Je sais bien que certains - vous nous l'avez dit - sont de six mois, d'autres sont infinis, et que vous, vous êtes très modeste en ne demandant que trente-deux jours !

Le moins que l'on puisse vous demander, si vous passez outre et si le Conseil constitutionnel devait valider, c'est au moins de ne pas multiplier les occupations avant que votre plan de rénovation ait été mis en pratique. Ce sera l'objet de l'un des nombreux amendements qui portent sur ce sujet que nous sommes un certain nombre à bien connaître.

M. le président. Je suis saisi de quarante-trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Mais, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 18 2 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 280 rectifié est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 182.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, vraiment, je pense que vous n'avez pas confiance en votre loi.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Ah bon ?

M. Jacques Mahéas. C'est assez simple à démontrer !

M. Robert-Denis Del Picchia. Ce n'est pas évident !

M. Jacques Mahéas. Nous vous donnons, d'une façon unanime, l'occasion de vérifier que l'étranger qui « débarque » vient bien de tel ou tel pays grâce à la prise des photos et des empreintes digitales. Par conséquent, l'argument selon lequel on ignore d'où vient l'étranger qui n'a pas de papiers n'a plus d'objet, ce qui vous permet de gagner un temps extrêmement précieux.

De plus, vous nous dites, monsieur le ministre, que vous dialoguez en permanence avec les pays étrangers qui nous envoient des travailleurs migrants, et que de nombreux accords ont été conclus entre votre ministère et ces pays. Le délai de rétention, qui devrait donc être réduit au minimum, apparaît comme l'une des mesures les plus spectaculaires du projet de loi.

Qu'est-ce que la rétention ? C'est une dérogation qui permet à l'administration de détenir un étranger devant être éloigné du territoire dans des locaux non pénitentiaires.

Cette entorse aux protections et aux règles fondamentales en matière de privation de la liberté existe depuis 1980. Elle a été tolérée par le Conseil constitutionnel à la double condition qu'elle soit limitée au temps strictement nécessaire à l'organisation du départ de l'étranger et qu'elle soit fortement encadrée et contrôlée par le juge judiciaire, garant des libertés individuelles.

Au fil des multiples réformes sur l'immigration, le juge constitutionnel a validé un allongement du délai, qui est passé de sept à dix jours en 1998, puis à douze jours, cette dernière prolongation n'ayant pas été soumise à la censure du Conseil constitutionnel.

Par votre projet de loi, monsieur le ministre, vous balayez toutes ces prévenances et vous instaurez un délai de rétention supérieur à trente jours : on passe de douze jours à trente-deux jours. S'agit-il d'un allongement du délai ou d'un changement de nature de la rétention ? En effet, du temps strictement nécessaire au départ, on en vient à une privation de liberté dont la durée est largement supérieure aux besoins intégrant une autre logique, celle de l'internement et de la peine.

Quelles sont les raisons pour avancer un tel basculement ? Les associations présentes dans les centres de rétention attestent que le délai utile à l'administration pour mettre à exécution les mesures d'éloignement varie de quatre à sept jours. Un délai supérieur aux douze jours actuels permettra peut-être quelques renvois supplémentaires, mais l'effet sera globalement marginal et ne justifie en rien une modification de la loi. L'harmonisation européenne ? Elle est en cours et nulle urgence ne vient expliquer cette précipitation.

Cette mesure spectaculaire, sans réel fondement, est essentiellement dirigée vers l'opinion publique pour lui prouver que le Gouvernement prend les moyens nécessaires au renvoi des clandestins. Cette logique est dangereuse. Elle fait peu de cas de l'humiliation et de la douleur des étrangers qui en subiront les conséquences, embastillés dans ces centres de rétention totalement inadaptés pour de si longs séjours. Et il est trop facile de rejeter la responsabilité systématiquement sur vos prédécesseurs. Que ne l'avez-vous pas fait, nous dites-vous ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Eh oui ! On peut se le demander !

M. Jacques Mahéas. Mais nous n'avons pas, nous, proposé d'allongement inconsidéré du délai de rétention.

Mme Nicole Borvo. Il y en avait d'autres !

M. Jacques Mahéas. Il ne faut quand même pas confondre les causes et les conséquences !

Par ailleurs, cette disposition renforce l'illusion selon laquelle les mesures policières et répressives permettraient de contrôler les mouvements migratoires et de stopper l'immigration clandestine. Nous ne sommes pas certains que l'augmentation du délai de rétention accroîtra sensiblement l'efficacité des mesures d'expulsion. Pensez-vous réellement qu'elle aura une incidence sur les décisions des consulats d'accorder les laissez-passer ? Nous ne le croyons pas. C'est pourquoi nous proposons la suppression de cette disposition liberticide et dénuée d'utilité.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 280 rectifié.

M. Robert Bret. On peut considérer qu'il est défendu.

M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le septième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« La décision de placement est prise par le préfet ou, à Paris, par le préfet de police, après l'interpellation de l'étranger et, le cas échéant, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention. Elle est écrite et motivée. Un double en est remis à l'intéressé. Le procureur de la République en est informé dans les meilleurs délais. »

Le sous-amendement n° 320, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« A la fin du texte proposé par l'amendement n° 42, remplacer les mots : "dans les meilleurs délais" par le mot : "immédiatement". »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 42.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter le sous-amendement n° 320.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'évidence, la décision de placement en rétention, qui porte atteinte à la liberté d'aller et de venir, devrait être prise par l'autorité judiciaire. Or, aux termes de l'amendement n° 42, elle est prise par le préfet - et, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le rapporteur, votre amendement n'est pas simplement rédactionnel - « après l'interpellation de l'étranger et, le cas échéant, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention. » C'est vraiment un comble, car même à l'expiration de la garde à vue, ce n'est pas le procureur qui prend la décision, mais le préfet.

Je poursuis la lecture de l'amendement : « Elle est écrite et motivée. Un double en est remis à l'intéressé. Le procureur de la République en est informé dans les meilleurs délais. » Or, il n'y a aucune raison que ce ne soit pas fait immédiatement, comme en matière de garde à vue.

Voilà quelques jours, unanimement, dans le texte qui nous venait de l'Assemblée nationale et qui prévoyait que le procureur de la République était prévenu dans les meilleurs délais, nous avons remplacé les mots « dans les meilleurs délais » par le mot « immédiatement ». Il n'y a pas de raison, je le répète, de ne pas faire ici la même chose. C'est pourquoi nous avons d'abord déposé un amendement, que nous avons ensuite transformé en sous-amendement à l'amendement n° 42.

M. le président. L'amendement n° 183, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« A la fin de la seconde phrase du septième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "dans les meilleurs délais" par le mot : "immédiatement". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le huitième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« L'étranger est informé, dans une langue qu'il comprend et dans les meilleurs délais que, pendant toute la période de la rétention, il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin, et communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix. Un décret en Conseil d'Etat précise, en tant que de besoin, les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants. »

Le sous-amendement n° 327, présenté par M. Gélard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Après la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 43 de la commission des lois, insérer deux phrases ainsi rédigées :

« Dans chaque centre de rétention, un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers retenus est prévu. Il est accessible en permanence sur demande de l'avocat. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 43.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision. En effet, le décret ne doit pas bloquer la mise en oeuvre de cet article 33, d'où la précision : « en tant que de besoin ».

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour présenter le sous-amendement n° 327.

M. Patrice Gélard. Le texte du projet de loi garantit les droits de la défense en matière de notification des droits, d'assistance d'un conseil, d'un interprète ou d'un médecin. Il apporte, en outre, de nouvelles garanties au niveau de l'interprétariat, assurant que l'ensemble de la procédure doit se faire dans une langue que comprend l'étranger.

Ce sous-amendement a pour objet de compléter ces apports notables en prévoyant que l'étranger retenu pourra bénéficier d'un espace au sein du centre de rétention lui permettant de s'entretenir librement et confidentiellement avec son conseil. En effet, seule l'existence d'un tel lieu pourra assurer à l'étranger le plein usage, dans les faits, des droits affirmés dans le texte.

M. le président. L'amendement n° 184, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du huitième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "dans les meilleurs délais" par le mot : "immédiatement". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement tend à maintenir la possibilité pour l'étranger placé en rétention administrative d'être informé « immédiatement », et non « dans les meilleurs délais », de son droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil, ainsi que d'un médecin, de communiquer avec son consulat et de contacter une personne de son choix.

M. Jean Chérioux. Quel est son consulat s'il n'a pas de papiers ?

M. Jacques Mahéas. Vous n'avez pas suivi depuis le début les histoires de visas et de photographies !

M. le président. L'amendement n° 186, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Après la deuxième phrase du huitième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer une phrase ainsi rédigée :

« L'assistance d'un conseil peut prendre la forme d'une permanence d'avocats gratuitement installée sur place à la demande de l'ordre des avocats. »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement tend à prévoir que l'assistance d'un conseil pour l'étranger placé en rétention peut prendre la forme d'une permanence d'avocats gratuitement installée sur place à la demande de l'ordre des avocats. Cela existe dans certains cas et on aimerait que cela soit généralisé.

M. le président. L'amendement n° 44, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Supprimer les deuxième, troisième et quatrième phrases du neuvième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945. »

L'amendement n° 45, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la sixième phrase du neuvième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "Toutefois, si une salle d'audience", insérer les mots : "affectée au ministère de la justice". »

L'amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le neuvième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée :

« L'intéressé est maintenu à la disposition de la justice, pendant le temps strictement nécessaire à la tenue de l'audience et au prononcé de l'ordonnance. »

L'amendement n° 47, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le dixième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« L'ordonnance de prolongation de la rétention court à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures fixé à l'alinéa précédent. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces quatre amendements.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 44 est un amendement de conséquence avec les amendements n°s 42 et 43 précédemment présentés. En effet, il tend à supprimer trois phrases dont le contenu est repris dans les deux amendements précités.

S'agissant de l'amendement n° 45, le projet de loi rend obligatoire l'utilisation de la salle d'audience spécialement aménagée à proximité d'un centre de rétention, quand elle existe. Afin de mettre fin aux polémiques sur la délocalisation de la salle d'audience, cet amendement précise qu'une telle salle doit être affectée au ministère de la justice. Cette précision, ainsi que les garanties apportées par le ministre de l'intérieur devant la commission devraient rassurer les magistrats quant au respect des principes d'indépendance et de publicité.

L'amendement n° 46 rectifié a pour objet de sécuriser juridiquement la procédure de rétention en maintenant l'étranger à la disposition de la justice le temps nécessaire au prononcé de l'ordonnance lorsque les quarante-huit premières heures de la rétention se sont écoulées.

L'amendement n° 47 est un amendement de précision, compte tenu des amendements précédents.

M. le président. L'amendement n° 274, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Dans la seconde phrase du dixième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, remplacer les mots : "quinze jours" par les mots : "sept jours". »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Par cet amendement, nous souhaitons remplacer la durée de la prolongation de la rétention fixée à quinze jours dans le texte par une durée de sept jours.

Alors que la rétention était au maximum de sept jours en 1981, de dix jours en 1993 et de douze jours en 1998, elle pourra désormais atteindre dix-sept jours, voire vingt-deux jours, et même trente-deux jours selon les situations, comme je l'ai rappelé tout à l'heure.

Alors qu'actuellement, après une période de quarante-huit heures, la première prolongation est de cinq jours, elle est ici de quinze jours. Elle est donc multipliée par trois, sans que personne n'y trouve à redire.

Non seulement nous nous interrogeons sur l'utilité et la légimité d'un tel allongement de la durée de la rétention administrative, mais, de surcroît, nous estimons que cette entorse aux règles fondamentales en matière de privation de liberté n'est absolument pas justifiée au regard de la situation réelle dans les centres de rétention.

Je rappelle que le délai utile tel qu'il est estimé par la CIMADE, présente dans ces centres et donc compétente en l'espèce, pour permettre à l'administration d'exécuter les mesures d'éloignement varie, comme je l'indiquais dans mon intervention sur l'article, entre quatre et sept jours. Cela correspond d'ailleurs plus justement à la notion de « temps strictement nécessaire » au départ de l'étranger.

On ne peut pas dire que la CIMADE exagère, puisqu'elle reconnaît elle-même, dans son rapport de 1998 portant sur la situation spécifique du centre de Marseille-Arenc, que si la durée moyenne de passage à Arenc, qui s'établissait à 2,84 jours pour l'année 1998, est plutôt positive au regard des conditions de rétention, en revanche, s'agissant de l'examen des situations individuelles et de l'exercice des recours éventuels, c'est une véritable catastrophe. Il faut effectivement permettre aux associations habilitées à apporter un soutien social et juridique aux étrangers retenus d'effectuer leur travail dans de bonnes conditions, monsieur le ministre.

Plus globalement, les étrangers rencontrés par la CIMADE dans les centres de rétention au cours de l'année 2002 ont été maintenus en moyenne pendant 5,6 jours : on le voit, nul n'est donc besoin d'en rajouter. D'autant que, compte tenu des conditions dans lesquelles sont retenues ces personnes, il vaut mieux revoir à la baisse la durée de leur enfermement, et ce malgré la création, prévue dans votre texte, d'une commission de contrôle des centres et locaux de rétention, sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir tout à l'heure.

M. le président. L'amendement n° 48, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Remplacer la seconde phrase du dernier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par deux phrases ainsi rédigées :

« En cas de défaut de respect des obligations d'assignation à résidence, les dispositions du troisième alinéa de l'article 28 de la présente ordonnance sont applicables. Le procureur de la République est saisi dans les meilleurs délais. »

L'amendement n° 49 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le I du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'une ordonnance met fin à la rétention ou assigne l'étranger à résidence, elle est immédiatement notifiée au procureur de la République. A moins que ce dernier n'en dispose autrement, l'étranger est alors maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de quatre heures à compter de l'ordonnance. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 48 est un amendement de précision qui renvoie à l'article 28 de l'ordonnance, au lieu de l'article 27, dans le cas où l'étranger ne respecte pas les obligations d'assignations à résidence. En effet, c'est le troisième alinéa de l'article 28 qui traite spécifiquement du non-respect des obligations liées à l'assignation à résidence.

L'amendement n° 49 rectifié tend à compléter le mécanisme similaire au référé-détention du code de procédure pénale qu'introduit le projet de loi dans la procédure de rétention. Ainsi, le procureur pourra faire appel de l'ordonnance du juge de la liberté et de la détention et en demander le caractère suspensif.

Cet amendement vise à préciser que l'étranger est « maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de quatre heures » après que le juge de la liberté et de la détention a décidé de mettre fin à la rétention. Ce délai doit permettre au procureur de la République, immédiatement informé, de demander le caractère suspensif de l'appel. A défaut, l'étranger pourrait être remis en liberté entre l'ordonnance du juge de la liberté et de la détention et la demande du procureur, privant ainsi d'effet la procédure d'appel suspensif.

M. le président. L'amendement n° 275, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer le II du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Dans le prolongement de ce que je viens d'exposer, nous proposons ici de supprimer le paragraphe II du texte présenté pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Il s'agit de la prolongation de la rétention pour une nouvelle période de quinze jours si l'éloignement de l'étranger n'a pas été exécuté du fait de son comportement : perte ou destruction des documents de voyage, dissimulation de son identité, obstruction volontaire.

Bien évidemment, pour les raisons déjà évoquées, nous sommes défavorables à cette disposition, d'autant que le doublement de la durée de cette privation de liberté n'est pas sans rappeler dans son concept la rétention judiciaire instaurée en 1993 par M. Pasqua. Cette rétention judiciaire, bien que reconnue conforme à la Constitution, a connu, on le sait, plusieurs difficultés : coût financier important, mobilisation des services de police, logistique pénitentiaire. Elle s'est heurtée, de plus, aux réticences des magistrats et aux protestations des populations où sont implantés les centres de rétention judiciaire.

Finalement, ce système a été discrètement supprimé par la loi du 11 mai 1998. L'échec de cette ancienne disposition démontre clairement que cette période de quinze jours, outre son caractère attentatoire aux libertés, est inutile, monsieur le ministre.

C'est la raison pour laquelle notre amendement vise à supprimer la prolongation de quinze jours prévue dans cet article 33.

M. le président. L'amendement n° 50 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 remplacer les mots : "l'ordonnance mentionnée au dixième alinéa du I et en cas d'urgence absolue ou d'une menace" par les mots : "l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné au neuvième alinéa du I et en cas d'urgence absolue ou de menace". »

L'amendement n° 51 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Remplacer la deuxième phrase du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par la phrase suivante :

« Le juge statue par ordonnance dans les conditions prévues au neuvième alinéa du I du présent article. »

L'amendement n° 52, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le II du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du dernier alinéa du I sont applicables. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces trois amendements.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 50 rectifié est un amendement de coordination avec les amendements précedemment examinés. Il tend à clarifier le décompte des délais de rétention.

L'amendement n° 51 rectifié vise à étendre à l'audience de seconde prolongation de la rétention la possibilité de statuer dans une salle d'audience spécialement aménagée à proximité du centre de rétention.

L'amendement n° 52 a pour objet d'étendre à l'audience de seconde prolongation de la rétention le dispositif de maintien à la disposition de la justice pendant quatre heures de l'étranger, précédemment introduit par l'amendement n° 49 rectifié pour la première audience de prolongation de la rétention. A défaut, le mécanisme d'appel suspensif prévu par le présent projet de loi perdrait tout efficacité, l'étranger pouvant partir entre l'ordonnance du juge de la liberté et de la détention et le moment où le procureur demande le caractère suspensif de son appel.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 185 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe Socialiste et apparenté.

L'amendement n° 276 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le III du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945. »

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour présenter l'amendement n° 185.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement tend, je le rappelle, à supprimer le III du texte proposé par l'article 33 du projet de loi pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Celui-ci introduit un nouveau motif de prorogation de la rétention administrative qui tient non plus au comportement de l'étranger, mais à des facteurs qui lui sont extérieurs. Les hypothèses visées sont le défaut de délivrance ou la délivrance tardive des documents de voyage par le consulat dont relève l'étranger, ainsi que l'absence de moyens de transport appropriés.

Toutefois, la prorogation ne sera accordée par le juge que si l'administration démontre avoir mis en oeuvre les diligences nécessaires et être sur le point de lever les obstacles précités à l'éloignement.

Cette prolongation, pour des raisons objectives extérieures à l'étranger, constitue une innovation dont les fondements sont particulièrement contestables.

L'administration a, dans les dix-sept jours précédents, largement le temps pour savoir si la délivrance d'un laissez-passer consulaire est possible ou non. Quant au motif invoqué - l'absence de moyens de transport adaptés - il n'est pas très sérieux. Il apparaît donc clairement que cette seconde prolongation découle de la volonté des pouvoirs publics de développer des vols groupés.

Or, indépendamment de la question de la conformité de cette méthode avec la Convention européenne des droits de l'homme, le recours à des vols groupés constitue non pas une nécessité justifiant la rétention, mais une mesure de confort choisie par les pouvoirs publics ou plutôt par le Gouvernement.

De fait, la rétention d'un étranger sera alors prolongée non pas « pour le temps strictement nécessaire à son départ », comme le rappelle le paragraphe V de l'article 33, mais pour permettre à l'administration de prendre le temps d'organiser un vol collectif avec ses partenaires européens. Cela nous paraît constituer une violation flagrante des règles que le Conseil constitutionnel a établies pour tolérer la rétention.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour défendre l'amendement n° 276.

M. Robert Bret. Cet amendement, identique à l'amendement n° 185, vise à supprimer le paragraphe III du texte proposé pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, qui prévoit une autre période de prolongation, pour des raisons différentes.

Ainsi, si l'éloignement de l'étranger n'a pu avoir lieu, la période initiale de quinze jours peut être prolongée pour une durée maximum que l'Assemblée nationale a ramenée de neuf à cinq jours. Parmi les motifs justifiant une nouvelle prolongation de la rétention, aucun n'est imputable à l'étranger. En effet, les raisons de cette prolongation sont dues, soit au défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé, soit à l'absence de moyens de transport appropriés.

Le projet de loi innove en la matière puisque les raisons ainsi évoquées sont complètement extérieures à l'étranger et donc particulièrement contestables, monsieur le ministre. Pour justifier cette prolongation, l'administration devra, certes, prouver l'imminence de l'éloignement, c'est-à-dire démontrer qu'elle est sur le point de trouver un moyen de transport approprié de recevoir du consulat le laissez-passer. Mais, pendant la première période de rétention qui dure tout de même dix-sept jours, l'administration a largement plus que le temps nécessaire pour savoir si la délivrance du document de voyage est possible ou non.

Quant à l'argument de l'absence de moyens de transport appropriés, il n'est pas sérieux. Je vois plutôt dans cette seconde prolongation la volonté du Gouvernement de développer les vols groupés, ce que l'on appelle « les charters ». D'ailleurs, la rédaction initiale du projet de loi ne faisait aucun doute là-dessus : avant que l'Assemblée nationale ne supprime la référence à la mise en oeuvre d'une procédure d'éloignement groupé, avec un ou plusieurs pays de l'Union européenne, il était bel et bien question d'introduire la notion de vols groupés dans notre législation afin de donner une base légale à des pratiques fort douteuses au regard de la jurisprudence de la Convention européenne des droits de l'homme. Mais, dans ce cas précis, le recours à un vol groupé constitue non pas une nécessité justifiant la rétention mais plutôt, serais-je tenté de dire, une mesure de confort.

La rétention de l'étranger serait ainsi prolongée non pas pour le temps strictement nécessaire à son départ mais pour permettre à l'administration de prendre le temps d'organiser avec ses partenaires européens des vols collectifs.

Certes, affréter un avion coûte cher ; on comprend donc que l'on veuille faire des économies. Dès lors, la tentation est grande de vouloir rentabiliser ces vols, y compris au niveau européen en regroupant, par exemple, les étrangers par nationalité.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas une tentation, c'est une décision !

M. Robert Bret. Vous répondrez tout à l'heure, monsieur le ministre.

Nous considérons, pour notre part, que le recours à de tels vols affrétés spécialement dans la plus grande confidentialité pour empêcher toute réaction des associations, des commandants de bord ou des passagers civils transforme de fait ces expulsions en opérations clandestines sans témoin, avec tous les dérapages que cela peut induire.

Ces refoulements expéditifs, à l'abri des regards, sont indignes d'un pays des droits de l'homme comme la France, monsieur le ministre. Ils ne peuvent qu'aviver les tensions et les violences, et ternir l'image de notre pays à l'étranger. La réaction du Sénégal nous a récemment permis de le constater.

Pour tous ces motifs, nous souhaitons que le III du texte proposé pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 soit supprimé.

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le deuxième alinéa du III du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« Le juge statue par ordonnance dans les conditions prévues au neuvième alinéa du I du présent article. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement étend à cette audience de seconde prolongation, pour les motifs prévus au III du texte proposé pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la possibilité de statuer dans une salle d'audience spécialement aménagée ainsi que le maintien à la disposition de la justice de l'étranger le temps que le juge statue.

M. le président. L'amendement n° 54, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« A la fin de la première phrase du dernier alinéa du III du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "dixième alinéa du I" par les mots : "premier alinéa du II". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président. L'amendement n° 55, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le III du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du dernier alinéa du I sont applicables. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Comme les amendements n°s 49 rectifié et 52, cet amendement n° 55 prévoit le maintien à la disposition de la justice de l'étranger pendant quatre heures à compter de l'ordonnance de seconde prolongation de la rétention prononcée pour les motifs prévus au III.

M. le président. L'amendement n° 56, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au début du premier alinéa du IV du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "Les ordonnances mentionnées au dixième alinéa du I, au deuxième alinéa du II et au troisième alinéa du III" par les mots : "Les ordonnances mentionnées au I, au II et au III du présent article". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. L'amendement n° 322, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Compléter la deuxième phrase du IV du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par les mots : "lorsqu'il lui apparaît que l'intéressé ne dispose pas de garanties de réprésentation effectives." »

La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le projet de loi donne la possibilité au parquet, en cas de remise en liberté d'un étranger par le juge des libertés et de la détention, de faire appel de cette décision et de demander que cet appel soit suspensif. Il s'agit d'une mesure dérogatoire au principe selon lequel un étranger remis en liberté par un juge du siège doit être immédiatement libéré. Mais chacun comprend que les garanties de représentation, s'agissant d'une personne qui est en situation de clandistinité, sont faibles.

Cet amendement n° 332 précise donc que le parquet ne pourra formuler une telle demande d'appel suspensif que s'il estime insuffisantes les garanties de représentation de l'étranger.

M. le président. L'amendement n° 323, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Dans la troisième phrase du IV du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "accompagné de la demande" insérer les mots : "qui se réfère à l'absence de garanties de représentation effectives". »

La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le parquet devra faire explicitement référence, dans sa demande, aux motifs susceptibles de justifier une telle dérogation, car cet appel suspensif devra être motivé.

M. le président. L'amendement n° 57, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la troisième phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "sans délai" par les mots : "dans un délai de quatre heures". »

Le sous-amendement n° 219, présenté par M. Béteille et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 57 par les mots : "à compter de l'ordonnance". »

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 57.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que le procureur de la République dispose de quatre heures pour interjeter appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et demander le caractère suspensif de cet appel au président de la cour d'appel.

Il s'agit d'une conséquence des amendements n°s 49 rectifié, 52 et 55 prévoyant le maintien à la disposition de la justice de l'étranger pendant quatre heures à compter de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention. Cette procédure est le décalque du référé détention prévu par le code de procédure pénale.

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour défendre le sous-amendement n° 219.

M. Patrice Gélard. Ce sous-amendement vise à préciser le point de départ du délai de quatre heures au cours duquel le procureur de la République peut déposer une demande de caractère suspensif de l'appel.

M. le président. L'amendement n° 279, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer la seconde phrase du IV bis du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Nous proposons la suppression de la seconde phrase du IV bis du texte présenté par l'article 33 pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Cette phrase a été adoptée par l'Assemblée nationale sur l'initiative de M. Mariani.

Cet ajout vise à raccourcir le délai pendant lequel les étrangers peuvent déposer une demande d'asile. Outre le fait que l'on touche au droit d'asile - alors même qu'un autre projet de loi sur cette question a déjà été examiné à l'Assemblée nationale et le sera dans quelques jours au Sénat -, cette phrase vise à restreindre le recours au droit d'asile.

Cette disposition est encore une fois empreinte de suspicion à l'égard des étrangers qui sont tous a priori suspectés de pratiquer des manoeuvres dilatoires consistant à déposer une demande d'asile dans les derniers jours de la rétention afin de retarder l'éloignement ou de faire tomber l'ensemble de la procédure.

Même si l'amendement de la commission des lois est positif puisqu'il précise que l'étranger recouvre le droit de déposer une demande d'asile s'il est mis fin à sa rétention, quelle qu'en soit la raison - mais n'est-ce pas la moindre des choses, monsieur le rapporteur -, la logique restrictive de l'exercice du droit d'asile demeure.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons supprimer la référence au délai de cinq jours au-delà duquel la demande d'asile n'est plus recevable.

M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au IV bis du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "ne sera pas recevable" par les mots : "ne sera plus recevable pendant la période de rétention". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que l'étranger ne peut plus déposer de demande d'asile au-delà de cinq jours depuis son arrivée au centre de rétention administrative, uniquement pendant la rétention. Si sa rétention est annulée ou s'il n'a pu être éloigné dans le délai maximum de rétention, il recouvre son droit de demander asile.

M. le président. L'amendement n° 310, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du V du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "ne peut être" insérer les mots : "placé ou". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.

M. le président. L'amendempent n° 59 rectifié bis, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le V du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée par deux alinéas ainsi rédigés :

« S'il est mis fin au maintien de l'étranger en rétention pour une raison autre que l'annulation par le juge administratif de la mesure d'éloignement, le juge des libertés et de la détention ou, le cas échéant, le chef du centre ou du local de rétention administrative rappelle à l'étranger son obligtation de quitter le territoire.

« Sauf en cas de menace à l'ordre public à l'intérieur ou à l'extérieur du lieu de rétention, ou si la personne ne paraît pas psychologiquement à même de recevoir ces informations, l'étranger est informé par le responsable du lieu de rétention de toutes les prévisions de déplacement le concernant : audiences, présentation au consulat, conditions du départ. Dans chaque lieu de rétention, un document rédigé dans les langues les plus couramment utilisées et définies par arrêté, et décrivant les droits de l'étranger au cours de la procédure d'éloignement et de rétention, ainsi que leurs conditions d'exercice, est mis à disposition des étrangers. La méconnaissance des dispositions du présent alinéa est sans conséquence sur la régularité et le bien-fondé des procédures d'éloignement et de rétention. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement contient trois dispositions.

La première prévoit que l'étranger se voit rappeler, par le juge ou le chef de centre, son obligation de quitter le territoire lorsqu'il est mis fin à la rétention pour une raison autre que l'annulation de la mesure d'éloignement.

La deuxième répond aux demandes d'associations souhaitant que les étrangers soient tenus informés autant que possible du déroulement de leur rétention afin de réduire l'état de stress. Le député Etienne Pinte avait déposé un amendement similaire à l'Assemblée nationale.

La troisième prévoit que les étrangers disposent, dans chaque lieu de rétention, d'un document récapitulant leurs droits. Ce document sera disponible dans plusieurs langues qui seront fixées par décret. Pour des raisons matérielles, il n'est pas possible que toutes les langues soient proposées. Il est d'ores et déjà prévu que ce document sera traduit dans les six langues de travail de l'ONU, soit l'anglais, le français, le russe, l'arabe, l'espagnol et le chinois. L'arrêté pourra néanmoins s'enrichir de nouvelles langues dans le temps.

M. le président. L'amendement n° 277, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Compléter le V du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'à l'issue de la période de rétention, l'éloignement de l'étranger n'a pu être réalisé pour des raisons autres que celles visées à l'article 27, il lui est délivré une autorisation de séjour lui permettant d'effectuer les démarches administratives appropriées. »

L'amendement n° 278, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer le second alinéa du VI du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. »

Le parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. L'amendement n° 277 précise que « lorsqu'à l'issue de la période de rétention, l'éloignement de l'étranger n'a pas pu être réalisé pour des raisons autres que celles visées à l'article 27, il lui est délivré une autorisation provisoire de séjour lui permettant d'effectuer les démarches administratives appropriées ». Il s'agit d'éviter la fabrication de clandestins lorsque les étrangers sont libérés à l'issue de la rétention pour des raisons indépendantes de leur volonté.

Dotés d'une autorisation provisoire de séjour, ils pourraient effectuer les démarches nécessaires à la régularisation de leur situation administrative. Il arrive, en effet, que des étrangers soient libérés après une rétention parce que l'administration n'a pu mettre en oeuvre leur éloignement. Les raisons sont ici extérieures à l'étranger.

Je rappelle, à ce titre, qu'il s'agit de ceux qui n'ont pas pu être expulsés pour des raisons administratives : soit parce que l'on n'a pas reçu des pays étrangers le droit de retour, soit parce qu'ils ont été relevés de l'interdiction du territoire français sans pour autant être assignés à résidence ni être autorisés à travailler.

Ils sont donc libérés mais ne détiennent aucun document les autorisant à séjourner sur notre sol, même provisoirement. Ils ont donc - et on le comprend aisément - les plus grandes difficultés à effectuer les démarches pour régulariser leur situation au regard du droit au séjour.

Cet amendement est, en quelque sorte, le « pendant » de l'allongement de la durée de la rétention administrative que nous avons combattu et que vous avez fait adopter pour donner à l'administration les moyens d'éloigner les intéressés. Dès lors, on comprend mal pourquoi des étrangers - libérés parce que l'administration n'a pas pu les expulser pour des raisons objectives et malgré une période pourtant allongée de rétention - ne bénéficieraient pas dans ce cas d'une autorisation provisoire de séjour. Ce serait la moindre des choses, car les étrangers ne sont pas ici responsables de leur non-éloignement. Il faut donc leur donner des papiers.

Combien sont-ils dans cette situation ubuesque à vivre sur le territoire français légalement mais sans titre de séjour, et donc sans autorisation de travail ? Comment peuvent-ils vivre dans des conditions décentes ?

Ne pas délivrer, en l'espèce, d'autorisation provisoire de séjour reviendrait à maintenir sciemment un étranger en situation irrégulière, future proie d'employeurs de travailleurs clandestins, avec tous les dangers que cela peut comporter.

Pour toutes ces raisons, nous proposons d'adopter cet amendement n° 277.

En ce qui concerne l'amendement n° 278, le paragraphe VI du texte proposé pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 autorise la tenue d'audiences avec vidéoconférence par décision du juge sur proposition du représentant de l'Etat et avec le consentement de l'étranger.

Nous nous opposons à cette possibilité de tenir des audiences relatives au placement et au maintien de l'étranger en rétention administrative en utilisant des moyens de télécommunication audiovisuelle « garantissant la confidentialité de la transmission ».

En effet, cette disposition est contraire au principe fondamental de la publicité des débats judiciaires. En l'espèce, l'accès au public doit être effectif, y compris pour des personnes non concernées par ces audiences. De plus, le lieu où est rendue la justice doit être identifiable comme tel.

Il découle de ces conditions que le lieu où se déroulent les audiences doit être normalement accessible, ce qui n'est pas le cas d'une salle d'audience située dans une zone aéroportuaire, éloignée des villes et aux conditions d'accès difficiles, ni d'une salle d'audience située à proximité d'un centre de rétention.

J'apporte cette précision, car on a beaucoup parlé de la délocalisation des audiences de maintien en rétention en ce qui concerne les zones d'attente. Nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 34. Le même dispositif a été introduit par l'Assemblée nationale pour délocaliser les audiences du juge des libertés et de la détention en matière de rétention administrative.

Nous sommes par conséquent fermement opposés à un tel dispositif, tout comme les magistrats, les avocats, ainsi que les associations de défense des droits des étrangers, qui ont également fait connaître leur opposition. D'ailleurs, vous avez dû en tenir compte, monsieur le rapporteur, puisque, pour rassurer les magistrats quant au respect des principes d'indépendance de la justice et de la publicité des débats, vous avez été amené à proposer un amendement précisant que, en l'espèce, la salle d'audience devait être affectée au ministère de la justice.

En tout état de cause et malgré les amendements proposés, nous restons hostiles à un dispositif qui contrevient aux principes fondamentaux de notre justice.

Pour toutes ces raisons, nous proposons, avec le présent amendement, la suppression de ce paragraphe VI.

M. le président. L'amendement n° 60, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du VI du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "représentant de l'Etat dans le département" par le mot : "préfet". »

L'amendement n° 61, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au début du premier alinéa du VII du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "Le représentant de l'Etat dans le département et" par les mots : "Le préfet ou". »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit de deux amendements rédactionnels.

M. le président. L'amendement n° 226, présenté par M. Gélard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le deuxième alinéa du VII du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :

« En cas de nécessité et pendant toute la durée de la rétention, le préfet ou, à Paris, le préfet de police, peut décider de déplacer l'étranger d'un lieu de rétention vers un autre lieu de rétention, sous réserve d'en informer les procureurs de la République compétents du lieu de départ et du lieu d'arrivée, ainsi que, après la première ordonnance de maintien, les juges des libertés et de la détention compétents. »

La parole est à M. Patrice Gélard.

M. Patrice Gélard. C'est un amendement de précision qui a pour objet de combler un oubli. En effet, il s'agit, par cet amendement, d'autoriser le déplacement des étrangers non plus seulement d'un centre de rétention vers un autre, mais aussi d'un lieu de rétention vers un autre.

Cela inclut donc les locaux de rétention et facilitera par là même les transferts d'un local de rétention vers un centre de rétention lors des quarante-huit premières heures de la détention.

En outre, cet amendement prévoit l'information des procureurs de la République concernés.

M. le président. L'amendement n° 311, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au troisième alinéa du VII du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "recevant des personnes" insérer les mots : "placées ou". »

L'amendement n° 62, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans les premier et deuxième alinéas du VIII du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "maintien de l'étranger dans les locaux" par les mots : "placement de l'étranger dans les lieux". »

L'amendement n° 63, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la seconde phrase du premier alinéa du VIII du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 : "Quand un délai de quarante-huit heures s'est écoulé depuis le prononcé de la peine, il est fait application des dispositions du neuvième alinéa du I, du II et du III". »

L'amendement n° 64, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Supprimer le IX du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces quatre amendements.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les amendements n°s 311 et 62 sont des amendements rédactionnels.

L'amendement n° 63 rétablit la procédure normale de rétention pour les étrangers condamnés à une interdiction du territoire à titre principal. La seule différence est que la décision de placement en rétention est prise par le juge et non par le préfet.

Dans la mesure où la commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention est étendue aux zones d'attente par un prochain amendement visant à insérer un article additionnel, l'amendement n° 64 tend à supprimer le IX du texte proposé pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945.

M. le président. L'amendement n° 187, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le X du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée : "Il précise également les normes applicables pour les lieux de rétention : hygiène, salubrité, sécurité, équipements et aménagements, alimentation et hôtellerie". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Cet amendement se justifie par son texte même.

M. le président. L'amendement n° 281, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes maintenues en rétention doivent l'être dans des conditions compatibles avec le respect de la dignité humaine auquel chacun a droit. Un décret en Conseil d'Etat précise les normes applicables en matière d'hygiène, de salubrité, de sécurité, d'équipements et aménagements, d'alimentation et restauration, d'hôtellerie et aménagements lié à l'exercice des droits. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Avec l'amendement n° 281, nous abordons la question très importante des conditions dans lesquelles les étrangers sont maintenus en rétention.

A l'évidence, les dispositions du projet de loi vont augmenter le nombre des éloignements, et donc le nombre de personnes maintenues en rétention avant d'être expulsées, qui serait ainsi multiplié par trois.

A cette situation s'ajoute l'allongement de la durée de rétention tel que vous l'avez prévu. Or les centres de rétention ne sont pas adaptés pour accueillir autant d'individus pendant une période désormais plus longue. D'autant qu'ils ne répondent pas actuellement aux normes fixées par les différents textes en vigueur - lois, décrets, arrêtés ou circulaires - comme en atteste le rapport de la CIMADE, le comité intermouvements d'aide aux déportés et évacués, publié en 2002.

Il ressort effectivement de ce rapport que ces textes ne font pas l'objet d'une application suffisante dans l'ensemble des centres de rétention, tant en ce qui concerne les conditions matérielles de rétention que les conditions d'exercice des droits des étrangers. La solution miracle proposée ici, comme pour les conditions de détention dans les prisons, est de créer, encore et encore, des places supplémentaires.

On ne peut pas continuer à enfermer des êtres humains dans des conditions aussi contraires à la dignité humaine, surtout lorsque l'on sait que la rétention pourra désormais durer trente-deux jours, contre douze jours actuellement. Votre politique de l'immigration ne fera qu'aggraver cette situation, monsieur le ministre.

Loin de consacrer l'intégration des étrangers, vous précarisez leur situation familiale, sociale et économique.

Permettez-moi de rappeler ici, sans prétention d'exhaustivité, les conditions dans lesquelles ces personnes sont, en règle générale, maintenues.

Ces centres ne disposent pas - ou peu - d'espaces distincts pour les chambres, le lieu de vie et la restauration ; leur configuration ne permet pas d'aménager une partie réservée aux femmes ; les locaux réservés aux visites de la famille ou de l'avocat sont très rares ; quant à l'accès à une promenade extérieure, soit il n'existe pas, soit il est restreint, qu'il s'agisse des horaires, des espaces disponibles ou des consignes de sécurité ; la libre circulation n'est pas garantie dans l'enceinte du centre ; les distractions sont très rares ; quant à l'hygiène générale et personnelle, l'alimentation et l'hébergement, ou encore l'entretien des locaux, c'est peu de dire que tout reste à faire.

Il va de soi que, dans le cadre d'une rétention plus longue, il est indispensable de prendre en compte tous les aspects que je viens d'évoquer brièvement.

Certes, le projet de loi prévoit la création d'une commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention dont la mission consisterait à veiller au respect des droits des étrangers maintenus et à la qualité des conditions de leur hébergement.

Toutefois, rien n'est précisé quant aux moyens et aux pouvoirs de cette commission. Aura-t-elle, par exemple, la possibilité de demander aux autorités compétentes de procéder à la fermeture des lieux de rétention qui ne respectent pas les normes établies ?

Pour toutes ces raisons, nous proposons donc d'ajouter dans le projet de loi les précisions suivantes : « Les personnes maintenues en rétention doivent l'être dans des conditions compatibles avec le respect de la dignité humaine auquel chacun a droit. Un décret en Conseil d'Etat précise les normes applicables en matière d'hygiène, de salubrité, de sécurité, d'équipements et d'aménagements, d'alimentation et restauration, d'hôtellerie et aménagements liés à l'exercice des droits. »

Tel est l'objet de notre amendement que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

M. le président. L'amendement n° 188, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le X du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée : "Les dispositions du présent article seront applicables dès lors que le Parlement aura constaté la mise en conformité des locaux de rétention". »

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. L'amendement n° 188 n'est pas identique à l'amendement n° 187 : l'un est la conséquence de l'autre.

L'amendement n° 187 vise à permettre la définition de normes applicables pour les lieux de rétention en ce qui concerne l'hygiène, la salubrité, la sécurité, les équipements, les aménagements, l'alimentation et l'hôtellerie, aspects que M. Bret a largement développés. Compte tenu de l'état actuel de nos centres de rétention - M. le ministre nous a indiqué que c'était de notre responsabilité antérieure - ...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Cela ne pouvait pas être de la mienne !

M. Jacques Mahéas. ... il risque de faire un faux pas, c'est-à-dire de mettre en place un dispositif dans des conditions inacceptables.

C'est pourquoi l'amendement n° 188 vise à prévoir que les dispositions du présent article seront applicables dès lors que le Parlement - ou, si vous le souhaitez, une commission ad hoc - aura constaté la mise en conformité des locaux de rétention.

Nous craignons d'être montrés du doigt pour un accueil non conforme à la dignité humaine dans nos centres de rétention.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements autres que les siens ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les amendements n°s 182 et 280 rectifié ont pour but de supprimer l'article 33, qui fixe les conditions dans lesquelles un étranger peut être mis en rétention et allonge le délai de celle-ci. C'est donc un des articles fondamentaux du projet de loi, et la commission ne peut qu'être défavorable à sa suppression.

La commission est, en revanche, favorable au sous-amendement n° 320, qui reprend l'amendement n° 183 et prévoit que le procureur est « immédiatement » informé du placement en rétention et non « dans les meilleurs délais ». Ce sous-amendement est cohérent avec la position adoptée par la commission lors de l'examen du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions la criminalité.

L'amendement n° 183 devrait être satisfait par le sous-amendement n° 320.

Le sous-amendement n° 327 n'a pas été soumis à la commission. A titre personnel, j'y suis favorable, sous réserve de deux modifications. La première consiste à remplacer l'expression : « dans chaque centre de rétention » par l'expression : « dans chaque lieu de rétention » ; la seconde à rédiger comme suit la dernière phrase : « A cette fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat. »

M. le président. Monsieur Gélard, acceptez-vous de modifier en ce sens le sous-amendement ?

M. Patrice Gélard. Tout à fait !

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 327 rectifié, présenté par M. Gélard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, et ainsi libellé :

« Après la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 43 de la commission des lois, insérer deux phrases ainsi rédigées : "Dans chaque lieu de rétention, un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers retenus est prévu. A cette fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat". »

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 184 prévoit que l'étranger est immédiatement informé de ses droits à demander un conseil ou un médecin. Il faut, comme je l'ai dit dans un autre contexte, maintenir les mots : « dans les meilleurs délais », car des difficultés d'interprétariat peuvent apparaître, ce qui empêcherait d'informer « immédiatement » l'étranger.

L'amendement n° 186 prévoit que l'assistance d'un conseil auquel a droit l'étranger durant sa rétention peut prendre la forme d'une permanence d'avocat gratuitement installée sur place à la demande de l'ordre des avocats. Cet amendement vise à renforcer les garanties offertes aux étrangers : l'information des étrangers sur les droits serait plus complète.

On soulignera néanmoins que les étrangers en centre de rétention bénéficient déjà de l'aide juridictionnelle pour toutes les instances. En outre, au cours de mes déplacements dans les centres de rétention, j'ai constaté la présence de représentants d'associations qui fournissent déjà une assistance juridique aux étrangers.

L'honnêteté intellectuelle me conduit à dire que la commission des lois a émis un avis favorable mais, d'autres amendements ayant été déposés depuis, je souhaiterais avoir l'avis du Gouvernement avant de prendre définitivement position.

L'amendement n° 274 tend à ramener de quinze à sept jours la durée de la première prolongation de la rétention administrative.

L'objectif de la réforme de la rétention est de donner des marges de manoeuvre supplémentaires aux services. Si le passage à un délai de quinze jours représente, sur les plans qualitatif et quantitatif, un saut significatif, passer à sept jours permettrait de faire un peu mieux, mais l'avancée ne serait pas décisive en termes d'efficacité des procédures d'éloignement. Nous sommes donc défavorables à l'amendement n° 274, même si nous apprécions que le groupe CRC propose de porter à sept jours la durée actuelle de cinq jours.

L'adoption de l'amendement n° 275 aurait pour effet de supprimer la seconde prolongation de la rétention, ce qui est tout à fait contraire à l'esprit du texte. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Les amendements identiques n°s 185 et 276 ont pour objet de supprimer plusieurs motifs de seconde prolongation de la rétention.

Ces motifs sont, je le rappelle, le défaut de délivrance des laissez-passer consulaires, leur délivrance tardive ou l'absence de moyens de transport appropriés. Ils ont en commun d'être indépendants des agissements de l'étranger.

Il convient de prendre en compte ces motifs pour la prolongation de la rétention, en particulier l'absence de laissez-passer. C'est en effet la raison principale de l'échec de nombreuses procédures d'éloignement.

La commission souligne que ces cas de prolongation de la rétention sont encadrés et que la prolongation pour ces motifs n'est que de cinq jours. En outre, le représentant de l'Etat doit démontrer au juge que l'une ou l'autre de ces circonstances - délivrance du laissez-passer, moyens de transport appropriés - doit intervenir à bref délai.

En tout état de cause, l'étranger n'est maintenu en détention que le temps strictement nécessaire à son départ.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements n°s 185 et 276.

Les amendements n°s 322 et 323 du Gouvernement n'ont pas été examinés par la commission, mais je crois pouvoir dire que, s'ils l'avaient été, ils auraient obtenu un avis favorable, puisqu'il s'agit de prévoir que le ministère public peut demander le caractère suspensif de la peine lorsqu'il lui apparaît que l'intéressé ne dispose pas des garanties de représentation effectives. M. le ministre l'a dit, encore faut-il que l'on ait les moyens de garder les intéressés !

M. Hilaire Flandre. Très bien !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission émet donc un avis favorable sur les amendements n°s 322 et 323.

Le sous-amendement n° 219 à l'amendement n° 57 de la commission vise à préciser le point de départ du délai de quatre heures au cours duquel le procureur de la République peut déposer une demande de caractère suspensif de l'appel. Cette précision est très importante et nous y sommes favorables.

L'amendement n° 279 a pour objet de supprimer la disposition qui limite dans le temps le dépôt d'une demande d'asile au cours de la rétention. Ces demandes sont souvent dilatoires. En effet, les étrangers placés en rétention sont souvent en France depuis longtemps et ont donc eu tout le loisir de déposer une telle demande.

Nous émettons donc un avis défavorable sur l'amendement n° 279.

L'amendement n° 277 tend à délivrer une autorisation provisoire de séjour à un étranger qui n'a pu être éloigné dans les délais impartis. Or, cet étranger continue à faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il n'est donc pas opportun de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour. L'amendement n° 59 rectifié bis de la commission prévoit d'ailleurs que, dans un tel cas, il est rappelé à l'étranger son obligation de quitter le territoire afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur le sens de sa remise en liberté.

La commission est donc défavorable à l'amendement n° 277.

L'amendement n° 278 tend à supprimer la possibilité de tenir des audiences par vidéotransmission.

Je tiens tout d'abord à souligner que la vidéotransmission est déjà permise par l'article 706-71 du code de procédure pénale, notamment pour la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire.

En outre, le recours à la vidéotransmission est encadré. Il n'est possible que par décision du juge sur proposition du représentant de l'Etat avec le consentement de l'étranger.

La commission est donc défavorable à l'amendement n° 278.

L'amendement n° 126 vise à permettre le déplacement d'un étranger d'un lieu de rétention à un autre, notamment d'un local de rétention vers un centre de rétention où les conditions d'hébergement sont meilleures. En outre, il précise que les procureurs de la République concernés sont informés de ces déplacements.

La commission a donc émis un avis favorable sur l'amendement n° 126.

S'agissant de l'amendement n° 187, la commission a émis un avis défavorable.

Il en est de même pour l'amendement n° 281.

Je comprends toutefois la finalité de ces deux amendements, et, à titre personnel, je serais favorable à l'amendement n° 281, sous réserve d'une modification de la rédaction. Cet amendement pourrait alors se lire ainsi : « Les dispositions relatives à l'hygiène, à la salubrité, à la sécurité, à l'équipement et à l'aménagement des lieux de rétention ainsi que les normes minimales applicables au règlement intérieur de ces lieux sont fixées par décret. »

M. le président. Monsieur Bret, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?

M. Robert Bret. Je suis prêt à l'examiner, mais, ainsi rédigée, la disposition devrait prendre place dans un autre article, à savoir dans l'article additionnel que la commission nous proposera d'insérer après l'article 34 quater.

Nous tenons fortement à ces normes minimales et, avant de nous prononcer sur le sort de l'amendement n° 281, peut-être faudrait-il préciser dès maintenant la manière de l'intégrer à l'amendement n° 79 rectifié de la commission.

Je proposerai ainsi un sous-amendement à cet amendement n° 79 rectifié tendant à remplacer un « morceau » de celui-ci par le « morceau » de mon amendement n° 281 que vous avez retenu.

A la troisième ligne, au lieu de : « à la qualité des conditions de leur hébergement », on lirait ainsi : « et au respect des normes relatives à l'hygiène, à la salubrité, à la sécurité, à l'équipement et à l'aménagement des centres de rétention ».

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Monsieur Bret, je prends l'engagement devant vous, d'émettre un avis favorable lorsque ce sous-amendement viendra en discussion !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Moi aussi !

M. le président. Dans ces conditions, monsieur Bret, retirez-vous l'amendement n° 281 ?

M. Robert Bret. Je le retire pour l'intégrer plus loin, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 281 est retiré.

Quel est enfin l'avis de la commission sur l'amendement n° 188 ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement conditionne la mise en oeuvre de la rétention administrative à la mise en conformité des locaux de rétention.

S'il est souhaitable que le confort des lieux de rétention s'améliore sensiblement, cela ne doit pas retarder la mise en oeuvre du projet de loi. En outre, M. le ministre de l'intérieur a apporté un certain nombre de garanties devant la commission, notamment en vue d'améliorer le confort des centres.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. M. le rapporteur a été si remarquable que le Gouvernement émet des avis parfaitement conformes aux siens et il est par ailleurs favorable aux amendements de la commission, de même qu'à l'amendement n° 186.

M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, contre les amendements identiques n°s 182 et 280 rectifié.

M. Jean Chérioux. Je suis contre ces amendements parce que je pense que les dispositions de l'article 33 sont peut-être les plus importantes de ce texte pour éviter l'existence dans notre pays d'étrangers en situation irrégulière.

Or c'est bien là le but de l'opération ! A entendre l'opposition, on dirait que le Gouvernement, atteint par une espèce de fureur liberticide, veut coûte que coûte mettre les gens dans des camps. C'est risible, et d'autant plus ridicule que cela se pratique dans toute l'Europe. En Grande-Bretagne, M. le ministre l'a rappelé lorsque nous avons entamé ce débat, la rétention est même illimitée, et ce n'est bien sûr pas pour le plaisir d'enfermer des gens dans un camp !

Le but, c'est d'éviter que des étrangers se trouvent en difficulté dans notre pays ! Car, en définitive, laisser entrer dans notre pays des étrangers sans papiers, c'est en faire des malheureux, des exploités ! Il faut donc se donner les moyens d'éviter ces situations.

Vous êtes presque angéliques dans vos réactions !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non : diaboliques !

M. Jean Chérioux. Je vous conseille une bonne lecture, même si elle date un peu : les conclusions de la mission d'information sur les problèmes posés par l'immigration en France que je présidais et dont M. Thyraud était le rapporteur.

Nos frontières étant, hélas ! ce qu'elles sont, elles sont sans peine franchies par des malheureux poussés par la misère ou par toutes sortes de circonstances que l'on comprend, bien sûr, mais il n'en reste pas moins qu'ils entrent dans notre pays parfois avec des papiers, parfois sans aucun papier du tout. Or, il faut tout de même que nous ayons les moyens de savoir d'où ils viennent si on veut les renvoyer chez eux !

J'ai assisté, au parquet de Paris, avec M. le rapporteur, à l'interrogatoire d'étrangers en situation irrégulière qui, visiblement, se moquaient du substitut : ils disaient venir de n'importe où, et où renvoyer quelqu'un qui vient de n'importe où ?

Heureusement, monsieur le ministre, vous avez prévu des mesures, qui vont faciliter les choses. On se donne la possibilité de recueillir les empreintes digitales, de dresser un fichier, etc., mais il y a aussi ceux qui entrent sans visa, et il est beaucoup plus difficile alors de déterminer d'où ils viennent !

Ne tombons donc pas dans l'angélisme et ne jouons pas aux grands défenseurs de la liberté d'un côté contre les liberticides de l'autre. Nous avons un problème : dans notre pays, il y a des étrangers qui vivent heureux, mais bien souvent la situation est perturbée par ceux qui sont en situation irrégulière, lesquels méritent eux-même qu'on s'occupe d'eux et, surtout, qu'on leur évite de se trouver dans l'impasse à laquelle vous les condamnez. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Remarquable ! Il fallait que ce soit dit !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Je suis très étonné de ce plaidoyer.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Et pourquoi ?

M. Jacques Mahéas. Il est bon de garder son sang-froid. Tous, ou presque, nous avons été d'accord pour donner au Gouvernement les moyens de contrôler les visas. Nous avons dit oui, à condition toutefois que cela ne revienne pas à ficher tout le monde. L'objectif, ce ne sont pas ceux qui obtiennent un titre de séjour, ce sont, et vous l'avez dit très nettement, les reconduites !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Et alors ? Ce n'est pas infamant !

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, le 26 septembre dernier, lors d'une réunion de préfets place Beauvau, vous leur annonçiez : « Vous devez, sans attendre la nouvelle loi, augmenter les reconduites. Des objectifs chiffrés vous seront fixés, sachant que l'objectif national est de multiplier par deux à court terme le nombre de reconduites. »

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est un minimum !

M. Jacques Mahéas. Vous ne pouviez pas mieux dire ! D'ailleurs, lors de la dernière séance du conseil général de la Seine-Saint-Denis, le préfet a annoncé un doublement des reconduites.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est un bon préfet !

M. Jacques Mahéas. Mais dans quelles conditions ? A Roissy, terminal 2B, le jeudi 2 octobre, à neuf heures quarante-cinq, des chiens aboient, des cris, des bousculades devant les files d'attente de passagers médusés : six ou sept policiers, deux maîtres-chiens tentent d'embarquer de force un jeune couple sur le vol Air France n° 1590 à destination d'Istanbul. En vain, à cause du refus du commandant de l'avion. Je ne sais d'ailleurs pas ce que sont devenus ces gens. Y avait-il assez de policiers ? Sans doute... On n'était pas au tribunal de Bobigny, où l'on a laissé, c'est vrai, des gens disparaître dans la nature.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est vrai, et c'était scandaleux de la part du magistrat !

M. Jacques Mahéas. Vous accusez le magistrat, mais il n'empêche que le résultat est là ! Mettez-vous d'accord avec M. Perben, et dites-nous effectivement ce qu'il en est très exactement.

Le fait que le nombre des reconduites a doublé prouve en tout cas que l'on n'a pas eu besoin de mesures coercitives et d'un allongement de la durée de rétention pour atteindre l'objectif. C'est le premier point à souligner : la loi était donc déjà suffisamment dure et il suffirait d'avoir eu la volonté de l'appliquer pour augmenter le nombre des reconduites.

Avez-vous l'intention de parvenir à un nombre de reconduites tel que l'on n'arrivera pas au chiffre habituel de l'immigration légale dans notre pays, soit de 100 000 à 120 000 individus selon les années ? Nous, très logiquement, après avoir donné les moyens nécessaires au Gouvernement, et avoir approuvé certaines de ses propositions, nous estimons qu'il durcit trop, beaucoup trop les règles maintenant. Avec de telles durées, on ne peut plus parler de rétention : c'est quasiment le début d'une peine !...

Mme Nicole Borvo. D'emprisonnement !

M. Jacques Mahéas. ... et je pense que c'est inutile compte tenu des nouveaux outils qui vous ont été fournis.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'ai le souci d'éviter les inexactitudes.

M. Mahéas interroge le Gouvernement sur ses objectifs. Je répondrai deux choses.

D'abord, monsieur Mahéas, quand le gouvernement qui nous a précédé a-t-il informé les Français de sa décision de ne pas exécuter les arrêts préfectoraux de reconduite à la frontière ? Quand ? Seuls 16,7 % des APRF étaient exécutés ! Où a eu lieu le débat ? Quand les Français ont-ils été informés ?

C'est une question démocratique essentielle : les Français ont-ils été consultés ? A l'heure actuelle, seulement 16,7 % des APRF sont exécutés. C'est à cette situation que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin veut mettre un terme ! Les APRF seront exécutés ! Hélas ! monsieur Mahéas, nous n'arriverons pas à un taux d'exécution de 100 %,...

M. Jacques Mahéas. Heureusement !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. ...j'en conviens volontiers, mais mon objectif est de doubler au minimum le taux d'exécution des APRF, lequel passerait donc à 33 % environ, ce qui n'aurait rien de glorieux ! Mais avant que l'on vienne me reprocher ma volonté d'exécuter dans une plus large mesure les APRF, j'aimerais que l'on m'indique où et quand il a été donné instruction de ne plus procéder aux reconduites à la frontière. La démocratie, monsieur Mahéas, exige précisément que l'on exécute les APRF !

M. Hilaire Flandre. Bien sûr !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Si vous entendez que l'on y renonce, il convient alors d'instaurer un grand débat sur ce thème dans le pays, qui permettra à nos compatriotes d'apprendre que le parti socialiste souhaite que les APRF ne soient plus exécutés. Vous avez tout à fait le droit d'adopter une telle position, qui, après tout, est noble, mais assumez-là politiquement ! Allez donc dire, en Seine-Saint-Denis et ailleurs, que vous voulez que l'on cesse d'appliquer les APRF !

Pour ma part, en tout cas, je suis là pour mener une autre politique : les APRF seront dorénavant exécutés, ni plus ni moins ! Voilà très exactement à quoi correspond le doublement des objectifs ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 182 et 280 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 320.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 183 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 327 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements n°s 184 et 186 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 45.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais évoquer la salle d'audience qui a été réalisée à Roissy sur l'initiative de M. Vaillant, alors ministre de l'intérieur. M. le ministre a même précisé que le projet remontait au gouvernement de Pierre Bérégovoy. Tout le monde peut se tromper ! En tout cas, au moins l'erreur a-t-elle été reconnue, puisque cette salle n'a jamais servi !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils ont juste dépensé l'argent ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela peut arriver !

M. Jean Chérioux. Ils gaspillent l'argent du contribuable !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y a eu bien pire en cette matière !

M. Jacques Mahéas. Rappelez-vous La Villette !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas moi !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y a eu « le trou » de La Villette, et bien d'autres scandales encore !

Cela étant, les locaux construits peuvent servir à bien des usages, en particulier de zone d'attente ou de centre de rétention. Nous ne nous faisons aucun souci sur ce point.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils ne sont pas assez bien pour les magistrats ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous nous annoncez qu'ils relèvent non plus du ministère de l'intérieur, mais du ministère de la justice. C'est quand même la moindre des choses ! Jusqu'à présent, c'était le ministère de la justice qui était chargé d'installer des tribunaux !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il faut tout faire ! (Sourires.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sur le plan des principes, vous nous avez dit que des escortes sont nécessaires pour mener les étrangers à Bobigny, et que ces malheureux sont même obligés de partir à cinq heures du matin !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Eh oui !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. La distance entre Roissy et Bobigny n'est pourtant pas si grande !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous y êtes allé ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument, j'y suis allé !

M. Jean-Marc Todeschini. Laissez parler l'orateur, monsieur le ministre !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je lui demande une précision ! Ce n'est pas à vous que je m'adresse !

M. Jean Chérioux. De quoi je me mêle !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous venez à peine d'arriver dans cet hémicycle ! C'est notre habitude, à M. Dreyfus-Schmidt et à moi, de nous interpeller ainsi !

M. Jean-Marc Todeschini. Vous n'avez pas à interrompre un parlementaire !

M. Hilaire Flandre. Il est réveillé !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous rassure, monsieur le ministre, M. Todeschini a un titre de séjour ! (Sourires.)

Comme je l'indiquais à l'instant, il est inutile de partir à cinq heures du matin de Roissy pour assister à une audience devant se tenir à neuf heures à Bobigny.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est ce qui se passe !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Alors il faut mettre un terme à cette situation ; cela ne dépend que de vous, puisque l'escorte relève de votre autorité ! Il est absurde que les choses se passent de cette manière ! Ce n'est la faute ni de M. Bérégovoy, ni de M. Jospin, ni de M. Vaillant !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Non, ce n'est pas leur faute !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par ailleurs, l'idée même de créer des lieux de jugement là où les personnes sont retenues ou détenues n'est pas admissible. On a connu cela à une certaine époque, permettez-moi de vous le rappeler ! Les audiences doivent se tenir au palais de justice, on ne juge pas dans les prisons ! Sinon, peut-être direz-vous bientôt, monsieur le ministre, que, pour éviter le recours aux escortes, publiques ou privées, les juges devront se rendre dans les prisons ! Cela n'est absolument pas pensable, et ne croyez pas que le problème sera réglé parce que vous aurez écrit dans la loi que les locaux relèvent du ministère de la justice !

En outre, vous prétendez que les magistrats et les avocats ne veulent pas s'y rendre en raison des frais de déplacements exposés, et que vous êtes prêt à mettre des chauffeurs à leur disposition. Mais c'est insultant à leur égard ! Ce n'est pas pour des raisons matérielles qu'ils refusent de fréquenter les locaux en question, c'est parce qu'ils estiment que la justice doit être rendue au palais de justice ! Mes collègues ont d'ailleurs été jusqu'à émettre l'idée que la création d'un palais de justice à Roissy pourrait peut-être se justifier. Ce serait alors tout à fait différent, mais, pour l'heure, soyez assuré, monsieur le ministre, que ni les magistrats ni les avocats ne fréquenteront les locaux actuels !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Dreyfus-Schmidt, si le Parlement vote la loi, elle sera appliquée par les magistrats comme par les avocats, parce que la loi s'impose à tous.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Exactement !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Par conséquent, il est très intéressant de vous entendre affirmer devant la Haute Asssemblée que la loi que nous élaborons ne sera pas respectée ! Pour ma part, je ne me serais pas permis de faire une telle déclaration !

Par ailleurs, afin de couper court à toute polémique, je vous propose de m'accompagner sur le terrain pour voir comment les choses se passent.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'y suis allé avec M. Courtois !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Les étrangers devant être conduits à Bobigny sont réveillés à cinq heures du matin. En effet, il faut procéder à un appel, et les intéressés, parmi lesquels se trouvent de nombreux mineurs, y compris de jeunes enfants, hélas ! doivent réunir leurs affaires et se préparer avant de prendre place dans les cars. Or, vous le savez très bien, monsieur Dreyfus-Schmidt, pour être avocat - j'ai moi-même exercé cette profession plus longtemps que les fonctions de ministre de l'intérieur - que l'on ne sait jamais à quelle heure une affaire sera appelée. Au palais de justice, le triste sort d'un avocat est d'attendre, c'est ainsi...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Les détenus et les retenus passent en premier !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. En l'occurrence, il ne s'agit pas de détenus, monsieur Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce sont des retenus !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Quoi qu'il en soit, l'audience commence parfois, pour une raison ou pour une autre, à midi alors que la convocation était pour onze heures.

En outre, ce sont chaque jour soixante-trois policiers qui sont mobilisés pour assurer les escortes !

En tout état de cause, il n'y a pas à polémiquer, il suffit de se rendre sur place pour dresser le constat ! Au vu de ce dernier, M. Daniel Vaillant avait estimé qu'il était préférable de faire se déplacer chaque jour quelques magistrats de Bobigny à Roissy plutôt que d'imposer sous escorte le trajet inverse à des milliers de personnes en situation d'extrême faiblesse. L'idée était à la fois excellente et logique, et il n'est pas sacrilège de la prendre en considération ! La justice peut être rendue là où se trouvent des magistrats,...

M. Jean Chérioux. Même sous un chêne !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... dans des locaux décents, que nous sommes disposés à faire peindre de la couleur que l'on voudra ! Cela évitera d'abord aux étrangers retenus d'avoir à se lever à cinq heures du matin pour répondre à une convocation. Les membres du groupe socialiste, auxquels je ne fais absolument pas le procès de ne pas être sincères dans leur désir de générosité et d'humanité, s'en trouveront sans doute satisfaits, et je ne vois pas au nom de quoi des magistrats seraient disqualifiés du fait qu'ils siégeraient dans un tribunal installé à Roissy.

Ensuite, puisque la surcharge de travail est telle à Bobigny que l'on est obligé de relâcher des détenus, ce qui est un comble, la création d'un nouveau tribunal à Roissy représentera un grand progrès !

M. Jacques Mahéas. Très bien ! Voilà !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ainsi, le tribunal de Bobigny sera soulagé. C'est exactement ce que nous proposons de faire, en prévoyant de mettre en place une nouvelle salle d'audience (M. Jacques Mahéas proteste). Il n'y a vraiment pas matière à débat entre nous sur ce point. La seule chose qui compte, c'est l'intérêt général, et, pour ma part, je ne soupçonne pas le groupe socialiste de ne pas vouloir défendre l'intérêt général. Toutes autres considérations sont peut-être intéressantes, mais plus corporatistes.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Tous les membres de cette assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, sont là pour défendre l'intérêt général. C'est ailleurs que l'on défend - et ce n'est pas médiocre - des intérêts corporatistes,...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... lesquels doivent s'incliner, en principe, devant l'intérêt général.

Si vous votez une loi, mesdames, messieurs les sénateurs, il n'y aura pas d'échappatoire : la loi s'appliquera, même si elle ne plaît pas. Telle est la conception républicaine. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Vous comprendrez aisément, monsieur le ministre, que vos propos intéressent fortement l'élu de la Seine-Saint-Denis que je suis. J'ai pris bonne note de l'engagement que vous avez pris d'installer à Roissy un tribunal - je veux dire un vrai tribunal.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. C'est une salle d'audience !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il existe ! Un tribunal, ce n'est pas plusieurs salles !

M. Jacques Mahéas. Un tribunal, ce n'est pas une juridiction spécialisée,...

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Pourquoi pas ?

M. Jacques Mahéas. ... où l'on ne juge qu'un type d'affaires, c'est-à-dire en l'occurrence, celles qui impliquent des personnes en situation irrégulière dans notre pays.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit !

M. Jacques Mahéas. Ne revenez pas sur votre engagement, monsieur le ministre !

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Il ne s'est pas engagé à cela ! Il a parlé d'une salle d'audience !

M. Jacques Mahéas. De toute façon, vous savez bien que le tribunal de Bobigny est submergé de travail. Je suis désolé de lire (M. Jacques Mahéas brandit un journal) le titre suivant : « Bobigny, tribunal maudit » !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. N'importe quoi !

M. Jacques Mahéas. Je déplore que le délégué départemental du syndicat Alliance en vienne à déclarer que la situation du dépôt est à l'image de celle du reste du département et que, dans les vingt-quatre commissariats, il manque au moins 500 gardiens de la paix et 300 brigadiers.

Je regrette que le président du tribunal de grande instance de Bobigny puisse affirmer que le manque de fonctionnaires de police pour assurer les escortes est un problème récurrent depuis dix ans.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il faut donc bien des escortes !

M. Jean Chérioux. Dix ans !

M. Jacques Mahéas. Cela recouvre, effectivement, une période où, les uns après les autres, nous avons exercé les responsabilités gouvernementales. Je ne le nie pas !

Cela étant, pour quelle raison mon collègue et ami Dreyfus-Schmidt a-t-il indiqué qu'il ne pouvait s'agir, à Roissy, d'une salle d'audience spécialisée ?

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Pourquoi pas ?

M. Jacques Mahéas. S'il devait en être ainsi, on s'engagerait dans un processus anormal !

M. Jean Chérioux. Anormal par rapport à quoi ?

M. Jacques Mahéas. En revanche, M. Perben et vous-même, monsieur le ministre, pourriez décider d'examiner en détail le fonctionnement du tribunal de Bobigny. Je vous y invite d'ailleurs.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous m'y invitez ? A quel titre ?

M. Jacques Mahéas. A mon sens, cette étude doit être menée en coopération. Pour ma part, à l'occasion de l'une de mes visites à ce tribunal, j'ai pu constater que vingt-sept affaires étaient appelées au même moment ! L'organisation pourrait tout de même être améliorée, ce qui permettrait de recourir aux escortes policières dans des conditions plus rationnelles.

Quoi qu'il en soit, il y a beaucoup à faire, et si vous avez bien pris ce soir devant nous l'engagement de construire un nouveau tribunal à Roissy, monsieur le ministre, je ne peux que vous approuver pleinement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, je ne vous en veux nullement de cette petite « habileté », que je mets sur le compte d'une méconnaissance de ce que sont, par exemple, les tribunaux d'instance. De nombreux maires et élus locaux sont présents dans cet hémicycle. Ils savent que bien des mairies accueillent la salle d'audience unique d'un tribunal d'instance ! Or un tribunal d'instance, monsieur Mahéas, ce n'est pas rien ; c'est l'une des rares juridictions qui siègent en dernier ressort sur un certain nombre d'affaires. La notion de salle d'audience spécialisée ne veut donc strictement rien dire. Je pourrais également évoquer, à cet instant, les audiences foraines ou les tribunaux de simple police.

Par conséquent, puisque le tribunal de Bobigny est surchargé de travail, je confirme qu'une salle d'audience sera installée à Roissy, ce qui permettra d'éviter de traiter à Bobigny le contentieux relatif aux étrangers en situation irrégulière. Les magistrats de Bobigny s'en réjouiront, ainsi que les étrangers placés en zone d'attente, car ils seront traités avec davantage d'humanité. Les locaux prévus par Daniel Vaillant, financés par les contribuables et qui, depuis des années, ne servaient à rien permettront d'héberger dignement des magistrats qui feront, je n'en doute pas, un travail remarquable.

Enfin, les habitants de la Seine-Saint-Denis pourront profiter des services de soixante-deux policiers supplémentaires sur le terrain, qui seront quand même plus à leur affaire en assurant la sécurité dans la rue qu'en escortant, dès potron-minet, des gens qui ne demandent qu'à être jugés dans la dignité. (M. Jean Chérioux applaudit.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est vrai pour toutes les escortes en France !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 274.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Une décision du Conseil constitutionnel en date, si ma mémoire est bonne, du 3 septembre dernier précise que les étrangers doivent être renvoyés dans leur pays, lorsqu'il y a lieu, le plus rapidement possible.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est bien mon avis !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le Conseil constitutionnel évoque la notion de transport, mais non pas celle de transport approprié ! Le Sénat a décidé tout à l'heure que les employeurs d'étrangers en situation irrégulière seraient astreints à payer le billet de retour de ces derniers. Jusqu'à présent, c'est la République qui assure cette dépense, de telle manière que les personnes concernées soient rapatriées le plus vite possible ! Il n'a jamais été question d'organiser des vols charter à l'échelon européen, par exemple avec nos amis Britanniques, en retenant les étrangers le temps nécessaire à la préparation de l'opération. Constitutionnellement, cela ne résiste pas à l'examen, monsieur le ministre. Je le répète, c'est immédiatement que l'on doit renvoyer les gens dans leur pays.

M. Jean-Jacques Hyest. Il n'y a pas de moyen de transport !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Comment cela ? Les avions ne manquent pas ! Il n'est nul besoin d'attendre trente-deux jours avant qu'un avion décolle pour quelque pays que ce soit !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Et si l'on n'a pas de visa consulaire ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est un autre problème. Je me suis attaché jusqu'à présent à la question des transports. Vous avez vous-même traité des transports collectifs, monsieur le ministre ; ce sujet est même quasiment évoqué dans le texte du projet de loi.

Pour ce qui est des accords consulaires, soit il y en a, soit il n'y en a pas. Cela dit, vous négociez avec de très nombreux pays.

Vous nous avez par ailleurs expliqué, monsieur le ministre, que l'on ne savait pas d'où venaient ces immigrants. L'un de nos collègues a même dit « certains arrivent sans visa ». En fait, ils arrivent avec un visa, mais ne l'ont plus, et ils ne savent plus de quel pays ils viennent.

Ce ne sera plus possible désormais puisqu'il y aura photographie et empreintes non pas des demandeurs de visa, comme vous nous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre,...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Dreyfus-Schmidt, est-ce le terme « approprié » qui vous gêne !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout à fait ! Supprimez ce terme. Ainsi, vous ne risquerez pas la censure du Conseil constitutionnel.

M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Mais non !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui, monsieur le ministre, ce terme me gêne et je vous le demande de l'enlever.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. J'accepte de demander sa suppression.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous en remercie. Je poursuis cependant mon argumentation...

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas la peine !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... sur un autre sujet que vous m'avez vous-même rappelé il y a un instant : la nécessité d'attendre l'accord du pays où l'on renvoie l'intéressé.

Je tiens en effet à d'apporter une rectification : il y aura photographies et empreintes digitales non pas des demandeurs de visa, mais de ceux qui obtiennent un visa.

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous avez fait une intervention consistante, mais je suis au regret de vous dire que l'amendement n° 274 n'a plus d'objet puisque l'amendement n° 47 de la commission a été adopté.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Puis-je le reprendre sous la forme d'un sous-amendement ?

M. le président. Non, car l'amendement n° 47 a été voté.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le ministre pour sa part a toujours la possibilité de déposer un amendement pour supprimer le mot « approprié ».

M. le président. Certes, mais, en attendant, je poursuis les mises aux voix des amendements portant sur l'article 33.

Je mets aux voix l'amendement n° 48.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 275.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 185 et 276.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 322.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 323.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 219.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 279.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 310.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 277.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 278.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste vote pour.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 226.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 311.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'amendement n° 187.

M. Jacques Mahéas. Le Gouvernement a fait un pas. Nous avons demandé à M. Bret de nous rappeler les termes de son amendement s'agissant de l'hygiène, de la salubrité, des équipements et de l'aménagement, de l'alimentation et de l'hôtellerie. Tout étant allé un peu vite, je voudrais être certain que ni l'alimentation ni l'hôtellerie ne seront oubliés.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsier Mahéas, le groupe socialiste peut retirer cet amendement n° 187. Vous avez en effet l'engagement du rapporteur et du Gouvernement que, lors de l'examen de l'article 34 quater, nous donnerons un avis favorable sur l'amendement de M. Bret et du groupe CRC, dans lequel figurent les compléments que vous souhaitez.

M. Jacques Mahéas. Dans ces conditions, je retire l'amendement n° 187.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous ne prenez aucun risque !

M. le président. L'amendement n° 187 est retiré.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication sur l'amendement n° 188.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement nous paraît important. « Les dispositions de l'article 33 seront applicables dès lors que le Parlement aura constaté la mise en conformité des locaux de rétention. »

On ne peut pas, compte tenu de l'état actuel des centres de rétention, tout le monde en est d'accord, accepter d'y placer plus de personnes, puisque la durée de rétention sera plus longue, comme vous venez de le décider.

Puisque j'ai la parole, j'en profite pour vous demander, monsieur le ministre, si vous avez l'intention de construire des salles d'audience dans d'autres centres de rétention ou à proximité d'autres zones d'attente.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Bonne idée !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous connais et je vois bien que la salle d'audience de Roissy est, en vérité, la pointe émergée de l'iceberg.

Les escortes existent depuis toujours et elles seront encore plus nécessaires avec les tribunaux interrégionaux qui ont été créés la semaine dernière puisqu'il en faut en effet pour accompagner les juges au tribunal.

Si vous avez l'intention de faire en sorte que l'on juge tous les gens sur place, il faudrait peut-être le dire clairement de manière que l'on puisse en débattre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je veux toujours répondre aux sollicitations de M. Dreyfus-Schmidt. En toute honnêteté, je citerai l'exemple des magistrats de Calais qui ont demandé que la construction de la salle d'audience de Coquelles soit accélérée.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En chemise et la corde au cou !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils apprécieront ! On est toujours puni par là où on a péché !

M. Jacques Mahéas. Ce ne sont pas des bourgeois !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ils apprécieront vos propos, monsieur Dreyfus-Schmidt, mais nous préciserons pour le compte rendu que vous avez dit cela avec un grand sourire !

Il y a un exemple, je le répète : les magistrats de Calais préfèreraient siéger à Coquelles et ils nous ont demandé d'accélérer la construction de la nouvelle salle d'audience.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 188.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur le président, conformément à l'engagement que le Gouvernement a pris tout à l'heure, je souhaite déposer un amendement tendant, au paragraphe III du texte proposé par l'article 33 pour l'article 35 bis de l'ordonnance, à supprimer le mot « appropriés ».

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 329, présenté par le Gouvernement, qui est ainsi libellé :

« Au III du texte proposé par cet article pour l'article 35 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, supprimer le mot "appropriés". »

Cet amendement a déjà été soutenu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 329.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je trouve cet amendement tout à fait approprié ! (Sourires.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est rare !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 33, modifié.

(L'article 33 est adopté.)

Art. 33
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 34 (interruption de la discussion)

Article 34

I. - L'article 35 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, les mots : « un port ou un aéroport » sont remplacés par les mots : « un port ou à proximité du lieu de débarquement, ou dans un aéroport, » ;

bis Le deuxième alinéa du I est ainsi rédigé :

« Il est informé, dans les meilleurs délais, qu'il peut demander l'assistance d'un interprète et d'un médecin, communiquer avec un conseil ou toute personne de son choix et quitter à tout moment la zone d'attente pour toute destination située hors de France. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend. » ;

2° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La zone d'attente s'étend, sans qu'il soit besoin de prendre une décision particulière, aux lieux dans lesquels l'étranger doit se rendre soit dans le cadre de la procédure en cours, soit en cas de nécessité médicale. » ;

3° Au premier alinéa du II, les mots : « chef du service de contrôle aux frontières ou d'un fonctionnaire désigné par lui, titulaire au moins du grade d'inspecteur » sont remplacés par les mots : « chef du service de la police nationale ou des douanes, chargé du contrôle aux frontières, ou d'un fonctionnaire désigné par lui, titulaire au moins du grade de brigadier dans le premier cas et de contrôleur dans le second » ;

bis Dans l'avant-dernière phrase du même alinéa, les mots : « sans délai à la connaissance du procureur de la République » sont remplacés par les mots : « à la connaissance du procureur de la République dans les meilleurs délais » ;

4° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque la notification faite à l'étranger mentionne que le procureur de la République a été informé dans les meilleurs délais de la décision de placement en zone d'attente, cette mention fait foi, sauf preuve contraire, de l'information des date et heure de la notification. » ;

5° Le deuxième alinéa du II est supprimé ;

6° Les deux dernières phrases du premier alinéa du III sont remplacées par six phrases ainsi rédigées :

« Le juge des libertés et de la détention statue au siège du tribunal de grande instance. Toutefois, si une salle d'audience lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée sur l'emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, il statue dans cette salle. En cas de nécessité, le président du tribunal de grande instance peut décider de tenir une seconde audience au siège du tribunal de grande instance, le même jour que celle qui se tient dans la salle spécialement aménagée. Par décision du juge sur proposition du représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, du préfet de police, et avec le consentement de l'étranger, l'audience peut également se dérouler avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission. Il est alors dressé, dans chacune des deux salles d'audience ouvertes au public, un procès-verbal des opérations effectuées. Sous réserve de l'application de l'article 435 du nouveau code de procédure civile, il statue publiquement. » ;

7° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, le ministère public peut demander au premier président de la cour d'appel ou à son délégué de déclarer son recours suspensif. Dans ce cas, l'appel, accompagné de la demande, est formé sans délai et transmis au premier président de la cour d'appel ou à son délégué après le prononcé de l'ordonnance. Celui-ci décide, sans délai, s'il y a lieu, au vu des pièces du dossier, de donner à cet appel un effet suspensif. Il statue par une ordonnance motivée rendue contradictoirement qui n'est pas susceptible de recours. L'intéressé est maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce que cette ordonnance soit rendue et, si elle donne un effet suspensif à l'appel du ministère public, jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond. » ;

8° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsque l'étranger non admis à pénétrer sur le territoire français dépose une demande d'asile dans les quatre derniers jours de cette nouvelle période de maintien en zone d'attente, celle-ci est prorogée d'office de quatre jours à compter du jour de la demande, par une décision écrite du chef du service de la police nationale ou des douanes, chargé du contrôle aux frontières, ou d'un fonctionnaire désigné par lui, titulaire d'au moins un des grades mentionnés au II. Cette décision est portée sur le registre prévu au II et portée à la connaissance du procureur de la République dans les conditions prévues à ce même II. » ;

9° A la fin de la première phrase du premier alinéa du V, la référence : « II » est remplacée par la référence : « I » ;

10° A la fin de la dernière phrase du dernier alinéa du V, les mots : « au moins une fois par semestre » sont remplacés par les mots : « chaque fois qu'il l'estime nécessaire et au moins une fois par an » ;

11° Après le premier alinéa du VIII, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de nécessité, l'étranger peut également être transféré dans une zone d'attente dans laquelle les conditions requises pour son maintien dans les conditions prévues au présent article sont réunies. » ;

12° Il est complété par un X ainsi rédigé :

« X. - Sont à la charge de l'Etat et sans recours contre l'étranger, dans les conditions prévues pour les frais de justice criminelle, correctionnelle ou de police, les honoraires et indemnités des interprètes désignés pour l'assister au cours de la procédure juridictionnelle de maintien en zone d'attente prévue par le présent article. »

II. - Le I de l'article 3 de la loi n° 92-625 du 6 juillet 1992 sur la zone d'attente des ports et des aéroports et portant modification de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est abrogé.

M. le président. L'amendement n° 189, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du texte proposé par le 1° bis du I de cet article pour le deuxième alinéa du I de l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "dans les meilleurs délais" par le mot : "immédiatement". »

La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. Remplacer l'expression : « dans les meilleurs délais » par l'adverbe : « immédiatement », permet de respecter les droits de la défense. La défense a d'ailleurs fait l'objet de nombreux amendements lors de la discussion du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

L'expression : « meilleurs délais » est floue. Qu'entendez-vous exactement par « meilleurs délais », monsieur le ministre, et, surtout, croyez-vous véritablement que cette notion soit compatible avec la situation d'urgence d'une personne qui se trouve en zone d'attente ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Même avis défavorable que sur l'amendement n° 184 à l'article 33 : les contraintes de l'interprétariat requièrent que l'administration dispose d'une marge de manoeuvre. L'information de l'étranger sur ses droits, notamment sur le droit d'être assisté d'un conseil, doit se faire « dans les meilleurs délais » car il serait trop contraignant de vouloir trouver un interprète « immédiatement ».

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Au moins pourrait-on faire l'effort - s'il y avait une navette, on pourrait le faire - d'opérer une différence entre les cas où il n'y a aucune difficulté, c'est-à-dire lorsque les personnes concernées comprennent parfaitement ce qu'on leur dit, et les cas plus difficiles où il conviendrait d'avoir un interprète, encore que, le plus souvent, il y ait sur place des interprètes dans toutes les langues, des documents traduits, etc.

Sur le principe, l'information doit être délivrée immédiatement, étant évident que, si un cas de force majeure empêche que cela se produise, personne n'ira le reprocher aux autorités ! Il est en effet important de prévenir rapidement la personne qu'elle dispose de peu de temps pour demander un médecin - cela peut être très urgent -, pour communiquer avec un conseil ou toute personne de son choix.

Donc, nous insistons, mes chers collègues, pour que vous reteniez le principe de l'immédiateté. Vous pouvez ménager les cas de force majeure en précisant qu'il peut éventuellement en être autrement, mais d'autant que, je le répète, dans une telle hypothèse, personne ne vous fera de reproche.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 189.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 330, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé au 1° bis du I pour le deuxième alinéa du I de l'article 35 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée par les deux phrases suivantes : "Dans ces lieux d'hébergement, un espace permettant aux avocats de s'entretenir confidentiellement avec les étrangers est prévu. A cette fin, sauf en cas de force majeure, il est accessible en toutes circonstances sur demande de l'avocat". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec le sous-amendement n° 327 de M. Gélard à l'amendement n° 43 de la commission.

La mise à disposition d'un local pour les avocats et leurs clients dans les centres de rétention, que nous avons votée à l'article 33, doit, en toute cohérence, s'accompagner d'une mesure symétrique pour les zones d'attente, dont traite l'article 34.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable, bien sûr !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 330.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 190, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter in fine le texte proposé par le 1° bis du I de cet article pour le deuxième alinéa du I de l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée : "L'assistance d'un conseil peut prendre la forme d'une permanence d'avocats gratuitement installée sur place à la demande de l'ordre des avocats". »

La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. Cet amendement est satisfait.

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 190 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 65, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le 1° bis du I de cet article, insérer un 1° ter ainsi rédigé :

« 1° ter Au cinquième alinéa du I, après les mots : "du port ou de l'aéroport", sont insérés les mots : "ou à proximité du lieu de débarquement". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement permet d'inclure des hébergements dans les zones d'attente délimitées à proximité du lieu de débarquement, comme c'est déjà le cas pour les autres zones d'attente.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 65.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 302, présenté par M. Schosteck et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« A la fin du 3° du I de cet article, remplacer les mots : "et de contrôleur dans le second" par les mots : "et d'agent de constatation principal de deuxième classe dans le second". »

Cet amendement n'est pas soutenu.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je le reprends, au nom de la commission, monsieur le président.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 302 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision visant à aligner les grades des agents des douanes sur ceux de la police nationale autorisés à prononcer un placement en zone d'attente.

Un amendement similaire a été adopté à l'article 1er du projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 302 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 191, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer le 3° bis du I de cet article. »

La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. Le procureur est chargé de représenter les intérêts de la société et de veiller au respect de l'ordre public ainsi qu'à l'application de la loi. C'est donc à ce titre qu'il doit, sans délai, être informé du maintien en zone d'attente.

Le Conseil constitutionnel l'a affirmé dans une décision rendue en date du 5 mars 1993 : le procureur de la République est un magistrat de l'ordre judiciaire appartenant à l'autorité judiciaire gardienne de la liberté.

On ne peut que regretter que l'intervention de l'autorité judiciaire soit trop tardive puisque la mission essentielle du juge n'est pas de réparer. Cependant, il peut y avoir une intervention en cours d'opération en matière de maintien des étrangers en zone d'attente.

Le délai d'information revêt donc une importance certaine. La notion de « meilleurs délais », on l'a déjà dit, est floue. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet alinéa.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, car il s'agit d'un droit essentiel.

M. Jacques Mahéas. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 191.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. L'amendement n° 66, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le 4° du I de cet article par les mots : "au procureur de la République". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 282, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidart-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer le 5° du I de cet article. »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Nous nous en sommes déjà expliqués à propos de l'article 33, mais nous réitérons notre opposition à des dispositions qui portent atteinte aux droits de la personne et notamment au droit de demander l'assistance d'un interprète, lequel doit être physiquement présent.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Défavorable.

Cet amendement pose le problème de l'interprétariat par téléphone. C'est une nécessité pratique lorsque l'interprète ne peut se déplacer, en particulier si la langue est rare et qu'il existe peu d'interprètes.

L'article 34 bis du projet de loi encadre d'ailleurs le recours à l'interprétariat par téléphone en précisant qu'il n'est possible qu'en cas de nécessité et qu'il ne peut être fait appel qu'à un interprète agréé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 282.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 283, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer le 6° du I de cet article. »

L'amendement n° 67, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la deuxième phrase du second alinéa du 6° du I de cet article, après les mots : "Toutefois, si une salle d'audience", insérer les mots : "affectée au ministère de la justice". »

L'amendement n° 68, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« A la fin du second alinéa du 6° du I de cet article, remplacer les mots : "il statue publiquement" par les mots : "le juge des libertés et de la détention statue publiquement". »

L'amendement n° 69 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. - Compléter le second alinéa du 6° du I de cet article par deux phrases ainsi rédigées : "Si l'ordonnance met fin au maintien en zone d'attente, elle est immédiatement notifiée au procureur de la République. A moins que le procureur de la République n'en dispose autrement, l'étranger est alors maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de quatre heures à compter de l'ordonnance."

« II. - En conséquence, dans le premier alinéa du 6° du I de cet article, remplacer les mots : "six phrases" par les mots : "huit phrases". »

La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 283.

Mme Nicole Borvo. « Il est fondamental de respecter le lieu où doit s'exercer la justice. Les principes généraux du droit et du rituel judiciaire commandent la préservation et l'amélioration du système judiciaire, c'est-à-dire le maintien et le traitement de ces affaires judiciaires dans un lieu judiciaire. »

Ces propos n'émanent pas d'un magistrat qui refuse de siéger aujourd'hui à Roissy, mais de M. Jean-Marie Coulon, ancien conseiller technique d'Albin Chalandon.

Le 6° du I de l'article 34 fonde sur le plan législatif une décision que nous avons critiquée ici même, relative à la délocalisation des salles d'audience du tribunal de Bobigny dans l'enceinte aéroportuaire de Roissy.

Il faut avoir bien conscience de la gravité d'une telle décision, symptomatique du rôle que l'on souhaite voir jouer à l'institution judiciaire dans le cadre de la politique de gestion des flux migratoires. Cette institution, en l'occurrence, n'a plus pour fonction d'empêcher l'arbitraire puisqu'on en fait au contraire une machine chargée d'entériner les décisions prises par le ministère. La justice doit-elle devenir le bras armé de la police ?

Cette impression est concrètement ressentie à Roissy lorsqu'on est contraint de passer par une enceinte de police avant d'accéder à une enceinte de justice.

Sur le plan des principes généraux de notre droit pénal et du respect de nos engagements aux niveaux international et européen, la décision d'entériner la délocalisation du tribunal est également problématique. Le droit à un tribunal indépendant et impartial vacille devant les exigences induites par cette espèce de productivisme qui préside au rapatriement d'étrangers indésirables.

Monsieur le ministre, vous avez parfaitement décrit les problèmes qui se posent, et il est vrai qu'ils ne sont pas nouveaux, mais ils appellent de véritables solutions.

Alors que des voix se sont élevées pour savoir si l'on pouvait parler de tribunal impartial lorsque les audiences de détenus se déroulaient dans l'enceinte même de la prison, on est plus qu'étonnés de voir des audiences correctionnelles se tenir dans des lieux non judiciaires.

L'impression qu'ont déjà les citoyens d'une justice à plusieurs vitesses en fonction de la personne en cause risque de se voir confortée. Après l'institution de juges de second niveau, voilà les tribunaux de second niveau !

Publicité, qualité, transparence : ces trois exigences de procès raisonnables semblent d'autant moins succeptibles d'être remplies qu'est prévu le recours à des moyens de télécommunication, comme nous l'avons vu précédemment. Entrons-nous dans l'ère de la justice virtuelle ? Peut-être...

Vous allez sans nul doute rétorquer une fois de plus qu'il s'agit de ne pas gaspiller l'argent du contribuable. Mais le respect des droits et libertés fondamentales doit-il être sacrifié sur l'autel de la réduction des dépenses publiques ?

L'opposition à l'utilisation de cette salle n'est pas le fait de quelques magistrats isolés, mais de l'ensemble du monde judiciaire. Il y a des principes qui ne souffrent pas de petits aménagements et je ne crois pas que l'on puisse ramener cette opposition à une manifestation de corporatisme.

Cette décision est grave. Elle ouvre la porte à des dérives.

La commission des lois « annonce la couleur » : il ne s'agit pas uniquement de lutter contre le gaspillage de l'argent public puisqu'elle estime que, si d'autres salles que celle de Roissy venaient à être construites, le souci de différencier nettement la salle des autres constructions devrait être présent dès la conception du projet. Peut-être en viendra-t-on à délocaliser des tribunaux directement dans le pays d'origine ou le pays de renvoi !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 67, 68 et 69 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 283.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Comme pour la rétention administrative, le projet de loi rend obligatoire l'utilisation de la salle d'audience spécialement aménagée à proximité d'une zone d'attente. Afin de mettre fin aux polémiques, l'amendement n° 67 prévoit, de la même façon que l'amendement n° 45, à l'article 33, qu'une telle salle doit être affectée au ministère de la justice.

L'amendement n° 68 est un amendement rédactionnel.

S'agissant de l'amendement n° 69 rectifié, il tend à prévoir, comme pour la rétention administrative, un dispositif du type référé-détention pour le maintien en zone d'attente. L'étranger est maintenu quatre heures à la disposition de la justice en attendant que le procureur demande éventuellement le caractère suspensif de l'appel. Le procureur se voit immédiatement notifier l'ordonnance.

L'amendement n° 283 tend à supprimer la vidéo-transmission pour les audiences de maintien en zone d'attente. Pour les raisons que j'ai déjà avancées à propos de l'amendement n° 278, à l'article 33, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 283.

En revanche, il est favorable aux amendements n°s 67, 68 et 69 rectifié.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'amendement n° 283.

M. Jacques Mahéas. Nous sommes opposés à ce qu'une justice particulière puisse être ainsi rendue dans des lieux particuliers.

Mais je suis ausssi étonné qu'un ministre du Gouvernement propose de déléguer un juge pour statuer sur cinquante cas, voire plus, l'amenant à rendre inévitablement des décisions répétitives. C'est en fait l'introduction d'une notion de « justice d'abattage ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 283.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 68 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 117, présenté par MM. Karoutchi, Demuynck et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

« Après le 6° du texte proposé par le I de cet article pour modifier l'article 35 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« ...° Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du III, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "Par décision du premier président de la cour d'appel ou de son délégué, sur proposition du préfet ou, à Paris, du préfet de police, et avec le consentement de l'étranger, l'audience peut se dérouler avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle dans les conditions prévues à l'alinéa précédent." ; »

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement se justifie par son texte même.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 117.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la deuxième phrase du second alinéa du 7° du I de cet article, remplacer les mots : "est formé sans délai" par les mots : "est formé dans un délai de quatre heures". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement prévoit que le procureur de la République dispose de quatre heures pour interjeter appel de l'ordonnance du juge des libertés et demander le caractère suspensif de cet appel. Il complète le mécanisme de type référé-détention mis en place pour la procédure de maintien en zone d'attente.

Rappelons que l'amendement n° 69 rectifié prévoit que l'étranger est maintenu quatre heures à la disposition de la justice à compter de l'ordonnance du juge.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 70.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 192 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 284 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le 8 du I de cet article. »

L'amendement n° 71, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après les mots : "est prorogée d'office de quatre jours à compter du jour de la demande", supprimer la fin de la première phrase du second alinéa du 8° du I de cet article. »

L'amendement n° 72, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le second alinéa du 8° du I de cet article par une phrase ainsi rédigée : "Le juge des libertés et de la détention est informé immédiatement de cette prorogation." »

La parole est à Mme Michèle André, pour présenter l'amendement n° 192.

Mme Michèle André. L'Assemblée nationale a prévu que, lorsqu'un étranger non admis dépose une demande dans les quatre derniers jours de la durée légale de son maintien en zone d'attente, celle-ci est prorogée d'office de quatre jours à partir du dépôt de la demande d'asile par simple décision du chef de service de la police nationale ou des douanes chargé du contrôle aux frontières ou d'un fonctionnaire désigné par lui.

Ce n'est pas parce que l'on demande l'asile à la fin du maintien en zone d'attente que l'on est moins demandeur d'asile. Il n'y a donc pas lieu de prolonger le séjour en zone d'attente.

Par ailleurs, cette question nous paraît relever davantage du projet de loi relatif à l'asile, qui viendra prochainement en discussion devant notre assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 284.

Mme Nicole Borvo. Nous sommes tout à fait opposés à cet alinéa, qui sanctionne les demandeurs d'asile déposant une demande d'asile dans les derniers jours du maintien en zone d'attente. Certes, il peut y avoir manipulation de la part de gens peu scrupuleux afin de faire obstacle à des mesures d'éloignement, mais, dans ce cas, nous ne nous lasserons jamais de le répéter : il vaut mieux lutter contre les trafiquants eux-mêmes que contre ceux qui en sont les victimes.

De toute façon, les demandeurs d'asile ne sont pas tous des fraudeurs. Loin de là. Encore une fois, on stigmatise les personnes avant même de savoir si ce sont des fraudeurs. Les agents de l'OFPRA et les psychologues qui ont affaire aux réfugiés l'affirment, les personnes le plus gravement atteintes dans leur intégrité physique et mentale sont souvent celles qui ont le plus de difficulté à parler et à entreprendre les démarches nécessaires dans les délais impartis. En conséquence, ce sont elles qui déposent le plus tardivement leur demande d'asile.

C'est ainsi qu'à force de vouloir lutter contre la fraude on finit par sanctionner ceux qui ont, au contraire, le plus besoin de voir leurs droits protégés.

Cette disposition conforte l'appréhension sécuritaire de l'asile. De ce point de vue, le remplacement du directeur de l'OFPRA par un préfet est tout à fait significatif.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 71 et 72 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 192 et 284.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale prévoit que, lorsque l'étranger en zone d'attente dépose une demande d'asile dans les quatre derniers jours de la seconde prolongation, le chef du service de la police ou des douanes chargé du contrôle aux frontières peut proroger d'office le maintien en zone d'attente de quatre jours à compter de cette demande.

La prorogation étant d'office, il n'est pas nécessaire de prévoir une décision écrite du chef du service de la police aux frontières. Afin de renforcer les garanties aux maintenus en zones d'attente, l'amendement n° 72 prévoit que le juge des libertés et de la détention est immédiatement informé de cette prorogation.

Quant aux amendements n°s 192 et 284, ils ont pour effet de supprimer la prorogation d'office de quatre jours du maintien en zone d'attente en cas de dépôt d'une demande d'asile au-delà du seizième jour du maintien en zone d'attente. Ils sont contraires à l'objectif du projet de loi qui est de dissuader les manoeuvres dilatoires, telles les demandes d'asile tardives. N'oublions pas que l'étranger a déjà eu seize jours pour déposer une demande d'asile. La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements n°s 71 et 72 et défavorable aux amendements identiques n°s 192 et 284.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 192 et 284.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 71.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 193 est présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.

L'amendement n° 285 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le 10° du I de cet article. »

L'amendement n° 73, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Au 10° du I de cet article, remplacer les mots : "la dernière phrase du dernier alinéa du V" par les mots : "l'avant-dernière phrase du premier alinéa du V". »

La parole est à Mme Michèle André, pour présenter l'amendement n° 193.

Mme Michèle André. Il nous paraît important de maintenir la fréquence minimale obligatoire de visite des zones d'attente par le procureur de la République.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 285.

Mme Nicole Borvo. Le 10° du I, qui a été introduit par l'Assemblée nationale, vise à espacer la fréquence minimale des visites par le juge dans les zones d'attente.

Nous sommes d'autant plus opposés à cette modification, qui donne une fréquence annuelle à des visites qui étaient auparavant semestrielles, que la rédaction actuelle de l'article 35 quater résulte de l'un de nos amendements, adopté lors de la discussion du projet de loi relatif au renforcement de la présomption d'innocence et des droits des victimes.

Le choix de cette fréquence n'avait pas été le fruit du hasard. Nous l'avions alignée sur la fréquence des visites des locaux de garde à vue. Vous admettrez avec moi qu'il est tout aussi important d'assurer les conditions dans lesquelles sont retenus en zone d'attente des étrangers qui n'ont commis aucune infraction que celles que connaissent des personnes dont on soupçonne qu'elles ont commis des délits.

En outre, il nous faut tirer les leçons du passé, qui a vu des situations absolument inadmissibles au regard de la dignité des personnes. Je peux en témoigner personnellement pour m'être rendue en zone d'attente de Roissy.

C'est pourquoi nous vous demandons la suppression de cette disposition qui, si elle était adoptée, serait caractéristique du recul des droits de la personne et du contrôle du juge judiciaire, lequel est, selon l'article 34 de la Constitution, le gardien des libertés individuelles.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 73 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 193 et 285.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'amendement n° 73 est un amendement purement rédactionnel.

Les amendements n° 198 et 285 rétablissent à six mois la fréquence de visite des zones d'attente par les procureurs. Un an semble suffisant puisqu'ils sont libres de s'y rendre quand ils veulent.

En outre, la création, par ce projet de loi, d'une commission de contrôle des centres de rétention dont un amendement de la commission étend le champ d'intervention aux zones d'attente, complète et perfectionne le dispositif de contrôle de ces lieux.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 193 et 285, et favorable à l'amendement n° 73.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 193 et 285.

M. Jacques Mahéas. Les zones d'attente ont fait l'objet de discussions parfois vives et nous refusons, les uns et les autres - c'est un point d'accord entre nous -, d'augmenter les délais de rétention.

Si le préfet, représentant le Gouvernement dans le département, doit veiller au bon fonctionnement de ces zones et se rendre sur place, nous considérons qu'il serait « fort de café » qu'ils n'y aillent qu'une fois par an, comme cela nous est proposé. Nous estimons que, deux fois par an, c'est un minimum. Il ne s'agit ps d'y aller tous les huit jours !

La zone d'attente de Roissy se situe dans mon département, et je connais donc bien le problème !

Il ne serait pas absurde, selon moi, qu'un rapport soit présenté sur ce sujet au Parlement, mais je n'irai pas jusqu'à proposer une telle solution.

Quoi qu'il en soit, nous souhaitons la suppression de l'article 34.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 193 et 285.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 73.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 34, modifié.

(L'article 34 est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Art. 34 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
Art. 34 bis

6

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. Paul Natali une proposition de loi relative à l'élection des conseillers à l'Assemblée de Corse.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 26, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelle, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

TEXTES SOUMIS AU SÉNAT

EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4

DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1030/2003 du Conseil du 16 juin 2003 imposant certaines mesures restrictives à l'égard du Liberia.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2400 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Conseil abrogeant le règlement (CE) n° 3274/93 empêchant la fourniture de certains biens et services à la Libye.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-2401 et distribué.

8

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-René Lecerf un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile (n° 340, 2002-2003).

Le rapport sera imprimé sous le numéro 20 et distribué.

J'ai reçu de M. Gérard Larcher un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom (n° 421, 2002-2003).

Le rapport sera imprimé sous le numéro 21 et distribué.

9

DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Marcel-Pierre Cléach un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le logement locatif privé.

Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 22 et distribué.

J'ai reçu de M. Jean-François Le Grand un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 23 et distribué.

J'ai reçu de M. Paul Loridant un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le compte d'avances aux collectivités locales.

Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 24 et distribué.

J'ai reçu de M. Aymeri de Montesquiou un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur l'organisation du temps de travail et des procédures d'information des forces de sécurité intérieure.

Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 25 et distribué.

J'ai reçu de M. Joël Bourdin un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification sur les actes du colloque du 5 juin 2003 sur « les nouvelles règles pour les politiques budgétaires en Europe ».

Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 27 et distribué.

10

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 16 octobre 2002 :

A neuf heures trente :

1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 396 rectifié, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France.

Rapport (n° 1, 2003-2004) fait par M. Jean-Patrick Courtois, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

A quinze heures et le soir :

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

3. Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.

4. Discussion du projet de loi (n° 434, 2002-2003) relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance.

Rapport (n° 10, 2002-2003) de M. Jean-Louis Lorrain, fait au nom de la commission des affaires sociales.

Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Délai limite pour les inscriptions de parole

et pour le dépôt des amendements

Projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom (n° 421, 2002-2003) :

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 20 octobre 2003, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 octobre 2003, à dix-sept heures.

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile (n° 340, 2002-2003) :

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 21 octobre 2003, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 21 octobre 2003, à dix-sept heures.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 16 octobre 2003, à zéro heure vingt-cinq.)

Le Directeur

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD

NOMINATION DE RAPPORTEURS

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN

M. Philippe Arnaud a été nommé rapporteur sur la proposition de loi n° 377 rectifiée (2002-2003) portant diverses dispositions en matière de transport.

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

MM. Francis Giraud et Jean-Louis Lorrain ont été nommés rapporteurs du projet de loi n° 19 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la politique de santé publique, dont la commission est saisie au fond.

NOMINATION DE BUREAUX

COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE DE VÉRIFIER

ET D'APURER LES COMPTES

Dans sa séance du mercredi 15 octobre 2003, la commission a nommé :

Président : M. Jacques Oudin.

Vice-président : M. Joël Bourdin.

Secrétaire rapporteur : M. Marc Massion.

MISSION COMMUNE D'INFORMATION

Dans sa séance du mercredi 15 octobre 2003, la mission commune d'information « La France et les Français face à la canicule : les leçons d'une crise » a procédé à la nomination de son bureau, qui est ainsi constitué :

Président : M. Jacques Pelletier.

Vice-présidents : Mme Gisèle Gautier, M. Alain Gournac.

Secrétaires : Mme Sylvie Desmarescaux, M. François Fortassin, Mme Monique Papon.

Rapporteurs : MM. Hilaire Flandre, Serge Lepeltier, Mme Valérie Létard.

Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON

QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)

La retraite SNCF

336. - 15 octobre 2003. - M. Jean-Pierre Masseret appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la SNCF, qui considère que son statut et son règlement intérieur, notamment l'article 7 consacré aux retraites, l'autorisent à mettre d'office en retraite certains agents. Deux conditions sont cependant à respecter : vingt-cinq années de services et être âgé de cinquante-cinq ans pour les sédentaires et de cinquante ans pour les roulants. En application de ces dispositions, certains agents se retrouvent en retraite sans l'avoir décidé avec une pension représentant 36 % de leur salaire d'actif. La SNCF étant devenue un établissement public industriel et commercial (EPIC) relevant du droit commun au 1er janvier 1983, la question se pose de savoir si l'entreprise peut encore utiliser les dispositions lui permettant de mettre d'office à la retraite certains agents. Le Gouvernement peut-il indiquer si l'article L. 122-14-12 du code du travail s'applique, interdisant à la SNCF de se prévaloir de dispositions obsolètes. Dans l'affirmative, il lui demande quelles sont les mesures que le Gouvernement prendra pour que les salariés, victimes dans l'entreprise de mise d'office à la retraite, puissent disposer de ressources suffisantes pour accompagner leur retraite.

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL

de la séance

du mercredi 15 octobre 2003

SCRUTIN (n° 12)

sur le II de l'amendement n° 261, présenté par M. Robert Bret et plusieurs de ses collègues, à l'article 16 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France (délit d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour des étrangers).


Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 114
Contre : 199
Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :

Pour : 23.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (28) :

Contre : 28.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :

Pour : 8. _ MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, François Fortassin et Dominique Larifla.

Contre : 9.

GROUPE SOCIALISTE (83) :

Pour : 83.

GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (165) :

Contre : 162.

N'ont pas pris part au vote : 3. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, M. Daniel Hoeffel, qui présidait la séance, et M. Emmanuel Hamel.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :

N'ont pas pris part au vote : 5.

Ont voté pour

Nicolas Alfonsi

Michèle André

Bernard Angels

Henri d'Attilio

Bertrand Auban

François Autain

Jean-Yves Autexier

Robert Badinter

Jean-Michel Baylet

Marie-Claude Beaudeau

Marie-France Beaufils

Jean-Pierre Bel

Jacques Bellanger

Maryse Bergé-Lavigne

Jean Besson

Pierre Biarnès

Danielle Bidard-Reydet

Marie-Christine Blandin

Nicole Borvo

Didier Boulaud

André Boyer

Yolande Boyer

Robert Bret

Claire-Lise Campion

Jean-Louis Carrère

Bernard Cazeau

MoniqueCerisier-ben Guiga

Gilbert Chabroux

Michel Charasse

Yvon Collin

Gérard Collomb

Yves Coquelle

Raymond Courrière

Roland Courteau

Yves Dauge

Annie David

Marcel Debarge

Gérard Delfau

Jean-Pierre Demerliat

Michelle Demessine

Rodolphe Désiré

Evelyne Didier

Claude Domeizel

MichelDreyfus-Schmidt

Josette Durrieu

Bernard Dussaut

Claude Estier

Guy Fischer

François Fortassin

Thierry Foucaud

Jean-Claude Frécon

Bernard Frimat

Charles Gautier

Jean-Pierre Godefroy

Jean-Noël Guérini

Claude Haut

Odette Herviaux

Alain Journet

Yves Krattinger

André Labarrère

Philippe Labeyrie

Serge Lagauche

Roger Lagorsse

Dominique Larifla

Gérard Le Cam

André Lejeune

Louis Le Pensec

Claude Lise

Paul Loridant

Hélène Luc

Philippe Madrelle

Jacques Mahéas

Jean-Yves Mano

François Marc

Jean-Pierre Masseret

Marc Massion

Josiane Mathon

Pierre Mauroy

Louis Mermaz

Gérard Miquel

Michel Moreigne

Roland Muzeau

Jean-Marc Pastor

Guy Penne

Daniel Percheron

Jean-Claude Peyronnet

Jean-François Picheral

Bernard Piras

Jean-Pierre Plancade

Danièle Pourtaud

Gisèle Printz

Jack Ralite

Daniel Raoul

Paul Raoult

Daniel Reiner

Ivan Renar

Roger Rinchet

Gérard Roujas

André Rouvière

Michèle San Vicente

Claude Saunier

Michel Sergent

René-Pierre Signé

Jean-Pierre Sueur

Simon Sutour

Odette Terrade

Michel Teston

Jean-Marc Todeschini

Pierre-Yvon Tremel

André Vantomme

Paul Vergès

André Vezinhet

Marcel Vidal

Henri Weber

Ont voté contre

Nicolas About

Jean-Paul Alduy

Jean-Paul Amoudry

Pierre André

Philippe Arnaud

Jean Arthuis

Denis Badré

Gérard Bailly

José Balarello

Gilbert Barbier

Bernard Barraux

Jacques Baudot

Michel Bécot

Claude Belot

Daniel Bernardet

Roger Besse

Laurent Béteille

Joël Billard

Claude Biwer

Jean Bizet

Jacques Blanc

Paul Blanc

Maurice Blin

Annick Bocandé

Didier Borotra

Joël Bourdin

Brigitte Bout

Jean Boyer

Jean-Guy Branger

Gérard Braun

Dominique Braye

Paulette Brisepierre

Louis de Broissia

Jean-Pierre Cantegrit

Jean-Claude Carle

Ernest Cartigny

Auguste Cazalet

CharlesCeccaldi-Raynaud

Gérard César

Jacques Chaumont

Jean Chérioux

Marcel-Pierre Cleach

Jean Clouet

Christian Cointat

Gérard Cornu

Jean-Patrick Courtois

Robert Del Picchia

Fernand Demilly

Christian Demuynck

Marcel Deneux

Gérard Dériot

Yves Detraigne

Eric Doligé

Jacques Dominati

Michel Doublet

Paul Dubrule

Alain Dufaut

André Dulait

Ambroise Dupont

Jean-Léonce Dupont

Hubert Durand-Chastel

Louis Duvernois

Daniel Eckenspieller

Jean-Paul Emin

Jean-Paul Emorine

Michel Esneu

Jean-Claude Etienne

Pierre Fauchon

Jean Faure

Françoise Férat

André Ferrand

Hilaire Flandre

Gaston Flosse

Alain Fouché

Jean-Pierre Fourcade

Bernard Fournier

Serge Franchis

Philippe François

Jean François-Poncet

Yves Fréville

Yann Gaillard

René Garrec

Christian Gaudin

Jean-Claude Gaudin

Philippe de Gaulle

Gisèle Gautier

Patrice Gélard

André Geoffroy

Alain Gérard

François Gerbaud

Charles Ginésy

Francis Giraud

Paul Girod

Daniel Goulet

Jacqueline Gourault

Alain Gournac

Adrien Gouteyron

Francis Grignon

Louis Grillot

Georges Gruillot

Charles Guené

Michel Guerry

Hubert Haenel

Françoise Henneron

Marcel Henry

Pierre Hérisson

Jean-François Humbert

Jean-Jacques Hyest

Pierre Jarlier

Bernard Joly

Jean-Marc Juilhard

Roger Karoutchi

Joseph Kergueris

Christiande La Malène

Jean-Philippe Lachenaud

Pierre Laffitte

Lucien Lanier

Jacques Larché

Gérard Larcher

André Lardeux

Robert Laufoaulu

René-Georges Laurin

Jean-René Lecerf

Dominique Leclerc

Jacques Legendre

Jean-FrançoisLe Grand

Serge Lepeltier

Philippe Leroy

Marcel Lesbros

Valérie Létard

Gérard Longuet

Jean-Louis Lorrain

Simon Loueckhote

Roland du Luart

Brigitte Luypaert

Max Marest

Philippe Marini

Pierre Martin

Jean-Louis Masson

Serge Mathieu

Michel Mercier

LucetteMichaux-Chevry

Jean-Luc Miraux

Louis Moinard

René Monory

Aymeride Montesquiou

Dominique Mortemousque

Georges Mouly

Bernard Murat

Philippe Nachbar

Paul Natali

Philippe Nogrix

Nelly Olin

Joseph Ostermann

Georges Othily

Jacques Oudin

Monique Papon

Anne-Marie Payet

Michel Pelchat

Jacques Pelletier

Jean Pépin

Jacques Peyrat

Xavier Pintat

Bernard Plasait

Jean-Marie Poirier

Ladislas Poniatowski

André Pourny

Jean Puech

Henri de Raincourt

Victor Reux

Charles Revet

Henri Revol

Henri de Richemont

Philippe Richert

Yves Rispat

Josselin de Rohan

Roger Romani

Janine Rozier

Bernard Saugey

Jean-Pierre Schosteck

Bruno Sido

Daniel Soulage

Louis Souvet

Yannick Texier

Michel Thiollière

Henri Torre

René Trégouët

André Trillard

François Trucy

Maurice Ulrich

Jacques Valade

André Vallet

Jean-Marie Vanlerenberghe

Alain Vasselle

Jean-Pierre Vial

Xavier de Villepin

Serge Vinçon

Jean-Paul Virapoullé

François Zocchetto

N'ont pas pris part au vote

Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Bernard Seillier et Alex Türk.

N'ont pas pris part au vote

Christian Poncelet, président du Sénat, et Daniel Hoeffel, qui présidait la séance.

Les nombres annoncés en séance avaient été de :


Nombre de votants : 314
Nombre de suffrages exprimés : 314
Majorité absolue des suffrages exprimés: 158
Pour : 114
Contre : 200
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 13)

sur l'amendement n° 181, présenté par Mme Michèle André et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à supprimer l'article 31 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France (coordination liée à la protection temporaire).


Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 114
Contre : 199
Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :

Pour : 23.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (28) :

Contre : 28.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :

Pour : 8. _ MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, François Fortassin et Dominique Larifla.

Contre : 9.

GROUPE SOCIALISTE (83) :

Pour : 83.

GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (165) :

Contre : 162.

N'ont pas pris part au vote : 3. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, M. Adrien Gouteyron, qui présidait la séance, et M. Emmanuel Hamel.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :

N'ont pas pris part au vote : 5.

Ont voté pour

Nicolas Alfonsi

Michèle André

Bernard Angels

Henri d'Attilio

Bertrand Auban

François Autain

Jean-Yves Autexier

Robert Badinter

Jean-Michel Baylet

Marie-Claude Beaudeau

Marie-France Beaufils

Jean-Pierre Bel

Jacques Bellanger

Maryse Bergé-Lavigne

Jean Besson

Pierre Biarnès

Danielle Bidard-Reydet

Marie-Christine Blandin

Nicole Borvo

Didier Boulaud

André Boyer

Yolande Boyer

Robert Bret

Claire-Lise Campion

Jean-Louis Carrère

Bernard Cazeau

MoniqueCerisier-ben Guiga

Gilbert Chabroux

Michel Charasse

Yvon Collin

Gérard Collomb

Yves Coquelle

Raymond Courrière

Roland Courteau

Yves Dauge

Annie David

Marcel Debarge

Gérard Delfau

Jean-Pierre Demerliat

Michelle Demessine

Rodolphe Désiré

Evelyne Didier

Claude Domeizel

MichelDreyfus-Schmidt

Josette Durrieu

Bernard Dussaut

Claude Estier

Guy Fischer

François Fortassin

Thierry Foucaud

Jean-Claude Frécon

Bernard Frimat

Charles Gautier

Jean-Pierre Godefroy

Jean-Noël Guérini

Claude Haut

Odette Herviaux

Alain Journet

Yves Krattinger

André Labarrère

Philippe Labeyrie

Serge Lagauche

Roger Lagorsse

Dominique Larifla

Gérard Le Cam

André Lejeune

Louis Le Pensec

Claude Lise

Paul Loridant

Hélène Luc

Philippe Madrelle

Jacques Mahéas

Jean-Yves Mano

François Marc

Jean-Pierre Masseret

Marc Massion

Josiane Mathon

Pierre Mauroy

Louis Mermaz

Gérard Miquel

Michel Moreigne

Roland Muzeau

Jean-Marc Pastor

Guy Penne

Daniel Percheron

Jean-Claude Peyronnet

Jean-François Picheral

Bernard Piras

Jean-Pierre Plancade

Danièle Pourtaud

Gisèle Printz

Jack Ralite

Daniel Raoul

Paul Raoult

Daniel Reiner

Ivan Renar

Roger Rinchet

Gérard Roujas

André Rouvière

Michèle San Vicente

Claude Saunier

Michel Sergent

René-Pierre Signé

Jean-Pierre Sueur

Simon Sutour

Odette Terrade

Michel Teston

Jean-Marc Todeschini

Pierre-Yvon Tremel

André Vantomme

Paul Vergès

André Vezinhet

Marcel Vidal

Henri Weber

Ont voté contre

Nicolas About

Jean-Paul Alduy

Jean-Paul Amoudry

Pierre André

Philippe Arnaud

Jean Arthuis

Denis Badré

Gérard Bailly

José Balarello

Gilbert Barbier

Bernard Barraux

Jacques Baudot

Michel Bécot

Claude Belot

Daniel Bernardet

Roger Besse

Laurent Béteille

Joël Billard

Claude Biwer

Jean Bizet

Jacques Blanc

Paul Blanc

Maurice Blin

Annick Bocandé

Didier Borotra

Joël Bourdin

Brigitte Bout

Jean Boyer

Jean-Guy Branger

Gérard Braun

Dominique Braye

Paulette Brisepierre

Louis de Broissia

Jean-Pierre Cantegrit

Jean-Claude Carle

Ernest Cartigny

Auguste Cazalet

CharlesCeccaldi-Raynaud

Gérard César

Jacques Chaumont

Jean Chérioux

Marcel-Pierre Cleach

Jean Clouet

Christian Cointat

Gérard Cornu

Jean-Patrick Courtois

Robert Del Picchia

Fernand Demilly

Christian Demuynck

Marcel Deneux

Gérard Dériot

Yves Detraigne

Eric Doligé

Jacques Dominati

Michel Doublet

Paul Dubrule

Alain Dufaut

André Dulait

Ambroise Dupont

Jean-Léonce Dupont

Hubert Durand-Chastel

Louis Duvernois

Daniel Eckenspieller

Jean-Paul Emin

Jean-Paul Emorine

Michel Esneu

Jean-Claude Etienne

Pierre Fauchon

Jean Faure

Françoise Férat

André Ferrand

Hilaire Flandre

Gaston Flosse

Alain Fouché

Jean-Pierre Fourcade

Bernard Fournier

Serge Franchis

Philippe François

Jean François-Poncet

Yves Fréville

Yann Gaillard

René Garrec

Christian Gaudin

Jean-Claude Gaudin

Philippe de Gaulle

Gisèle Gautier

Patrice Gélard

André Geoffroy

Alain Gérard

François Gerbaud

Charles Ginésy

Francis Giraud

Paul Girod

Daniel Goulet

Jacqueline Gourault

Alain Gournac

Francis Grignon

Louis Grillot

Georges Gruillot

Charles Guené

Michel Guerry

Hubert Haenel

Françoise Henneron

Marcel Henry

Pierre Hérisson

Daniel Hoeffel

Jean-François Humbert

Jean-Jacques Hyest

Pierre Jarlier

Bernard Joly

Jean-Marc Juilhard

Roger Karoutchi

Joseph Kergueris

Christiande La Malène

Jean-Philippe Lachenaud

Pierre Laffitte

Lucien Lanier

Jacques Larché

Gérard Larcher

André Lardeux

Robert Laufoaulu

René-Georges Laurin

Jean-René Lecerf

Dominique Leclerc

Jacques Legendre

Jean-FrançoisLe Grand

Serge Lepeltier

Philippe Leroy

Marcel Lesbros

Valérie Létard

Gérard Longuet

Jean-Louis Lorrain

Simon Loueckhote

Roland du Luart

Brigitte Luypaert

Max Marest

Philippe Marini

Pierre Martin

Jean-Louis Masson

Serge Mathieu

Michel Mercier

LucetteMichaux-Chevry

Jean-Luc Miraux

Louis Moinard

René Monory

Aymeride Montesquiou

Dominique Mortemousque

Georges Mouly

Bernard Murat

Philippe Nachbar

Paul Natali

Philippe Nogrix

Nelly Olin

Joseph Ostermann

Georges Othily

Jacques Oudin

Monique Papon

Anne-Marie Payet

Michel Pelchat

Jacques Pelletier

Jean Pépin

Jacques Peyrat

Xavier Pintat

Bernard Plasait

Jean-Marie Poirier

Ladislas Poniatowski

André Pourny

Jean Puech

Henri de Raincourt

Victor Reux

Charles Revet

Henri Revol

Henri de Richemont

Philippe Richert

Yves Rispat

Josselin de Rohan

Roger Romani

Janine Rozier

Bernard Saugey

Jean-Pierre Schosteck

Bruno Sido

Daniel Soulage

Louis Souvet

Yannick Texier

Michel Thiollière

Henri Torre

René Trégouët

André Trillard

François Trucy

Maurice Ulrich

Jacques Valade

André Vallet

Jean-Marie Vanlerenberghe

Alain Vasselle

Jean-Pierre Vial

Xavier de Villepin

Serge Vinçon

Jean-Paul Virapoullé

François Zocchetto

N'ont pas pris part au vote

Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Bernard Seillier et Alex Türk.

N'ont pas pris part au vote

Christian Poncelet, président du Sénat, et Adrien Gouteyron, qui présidait la séance.

Les nombres annoncés en séance avaient été de :


Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Majorité absolue des suffrages exprimés : 158
Pour : 115
Contre : 200
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.