Travaux de la commission des affaires économiques



Mercredi 22 juin 2005

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -

Code du tourisme - Examen du rapport

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de Mme Bariza Khiari sur le projet de loi n° 354 (2004-2005) ratifiant l'ordonnance n° 2004-1391 du 20 décembre 2004 relative à la partie législative du code du tourisme.

Après avoir fait part de sa fierté et de sa satisfaction à rapporter ce texte, Mme Bariza Khiari, rapporteur, a souligné que cette ratification d'ordonnance créant un code du tourisme représentait un événement significatif pour ce secteur, pour deux raisons :

- parce que la création de ce code consacre la reconnaissance du secteur touristique, qui représente 6,7 % du PIB (et même 10 % en Ile-de-France), un chiffre d'affaires annuel de plus de 100 milliards d'euros, près de 200.000 entreprises, 2 millions d'emplois directs et indirects, et un solde positif de la balance des paiements avoisinant les 12 milliards d'euros. Elle a insisté sur le potentiel de création nette d'emplois que recelait ce secteur à l'échelle mondiale, appelant la France à y prendre toute sa part, d'autant plus qu'il s'agit d'emplois non délocalisables ;

- ensuite, parce que l'élaboration de ce code a pour objet de faciliter la vie des acteurs du tourisme, dont la forte « transversalité » rend difficile l'accès à des normes juridiques aujourd'hui particulièrement dispersées. Faisant observer que rassembler et organiser ces règles de droit était particulièrement utile pour les plus petits des professionnels, elle a indiqué que c'était avec l'idée de leur rendre service qu'il convenait d'examiner la partie législative du projet de code, annexée à l'ordonnance du 20 décembre 2004.

Puis Mme Bariza Khiari, rapporteur, a rappelé que cette ordonnance avait été adoptée sur le fondement de la loi du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, dont l'article 33 avait notamment autorisé le Gouvernement à adopter par ordonnance la partie législative du code du tourisme, « à droit constant », ce qui signifiait que les dispositions codifiées devaient être celles en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance et que seules étaient autorisées les modifications nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, et harmoniser l'état du droit.

Elle a jugé que le Gouvernement avait fait bon usage de cette loi d'habilitation :

- formellement, d'abord, l'ordonnance ayant été adoptée dans les délais impartis par la loi, puis déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale dans les trois mois suivant sa publication, conformément à la Constitution ;

- sur le fond, le Gouvernement ayant respecté son mandat, la partie législative du code reprenant les dispositions d'ordre législatif attendues, organisées en quatre livres, présentant la dimension institutionnelle du tourisme, les règles applicables aux professions du tourisme, la dimension d'aménagement et d'équipement des activités touristiques et enfin, les aspects fiscaux et sociaux de ces activités.

En outre, a-t-elle noté, le Gouvernement a fidèlement respecté le principe du droit constant, ne procédant qu'aux ajustements qu'imposaient l'actualisation et la bonne coordination des textes, ainsi que le respect de la hiérarchie des normes juridiques.

Elle a toutefois relevé le caractère fortement « suiveur » de ce code du tourisme, regrettant que près du tiers des dispositions y figurant soient issues d'autres codes, selon deux procédures : soit par renvoi simple à d'autres dispositions de codes pilotes, soit par reproduction intégrale d'articles de codes pilotes.

Elle a expliqué que les dispositions qui présentaient un intérêt au regard des activités ou équipements touristiques, mais qui n'étaient pas pour autant spécifiques au secteur du tourisme, étaient signalées sous forme de renvoi simple, de manière à assurer la meilleure accessibilité au droit, alors que les dispositions suiveuses retenues étaient celles qui comportaient une véritable spécificité touristique. Elle a justifié le fait que leur reprise dans le code du tourisme ne s'accompagnait pas nécessairement de leur abrogation dans le code pilote, pour conserver aux grands codes leur intégrité.

S'interrogeant sur le fait de savoir si le code du tourisme aurait pu être moins suiveur, elle a répondu par la négative, d'une part, en raison de transversalité de la matière traitée, au carrefour de multiples domaines, d'autre part, du fait que le code du tourisme arrivait après tous les codes, nés de la vague de codification initiée en 1989. Elle a fait observer que, seules, les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux stations classées et aux offices de tourisme avaient pu être reprises en position pilote dans le code du tourisme et être aussi abrogées dans le code général des collectivités territoriales.

Prenant acte de cet état de fait, elle en a tiré deux conclusions.

Après avoir constaté que l'essentiel des règles utiles aux opérateurs du tourisme étaient d'ordre réglementaire, elle a insisté sur l'importance de la partie réglementaire du code du tourisme, bientôt soumise à la commission supérieure de codification. Evoquant le possible reclassement en décrets, à cette occasion, des arrêtés de classement, notamment relatifs aux hébergements, très importants pour les professionnels du tourisme, elle a aussi annoncé qu'elle plaiderait, auprès du ministre délégué au tourisme, pour compléter cette partie réglementaire par une partie « Arrêtés » afin de mettre également à disposition des acteurs du tourisme toutes les règles répondant à leurs besoins immédiats (règles d'hygiène et de sécurité pour les restaurants, règles pour l'accessibilité des personnes à mobilité réduite, fiscalité sociale...).

En venant à sa deuxième observation, elle a expliqué que ce travail de compilation étendue nécessitait de consolider la cellule juridique du ministère du tourisme, à qui reviendrait en effet d'actualiser ces normes réglementaires multiples en exerçant une veille tous azimuts et d'assurer un travail de maintenance sur les dispositions législatives du code reproduites en position suiveuse, sous peine de voir le code du tourisme devenir rapidement obsolète et perdre sa valeur.

Mme Bariza Khiari, rapporteur, a ensuite présenté grossièrement les amendements qu'elle allait soumettre à la commission :

- d'abord, des amendements d'amélioration rédactionnelle ou de rectification d'erreurs matérielles ;

- ensuite, pour économiser du temps parlementaire, un amendement proposant la ratification d'une ordonnance tout juste déposée par le Gouvernement sur le Bureau de l'Assemblée nationale, réformant le régime juridique de la vente de séjours et de voyages et prise en février 2005, en application de la loi de décembre 2004 autorisant le Gouvernement à simplifier le droit ; ratification, sous réserve toutefois qu'une correction y soit apportée afin d'éviter que les agents de voyages détenteurs d'une licence ne subissent une concurrence déloyale ;

- enfin, quelques amendements pour consolider l'Agence nationale pour les chèques vacances. Après s'être félicitée de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale en première lecture confirmant le monopole de cette agence sur l'émission des chèques-vacances, elle a souhaité que soit explorée la possibilité de profiter, mais pour la diffusion de ces chèques et non leur émission, de l'efficacité avérée de certains groupes privés afin de permettre aux salariés des PME de bénéficier des chèques vacances, autant que des chèques déjeuners ou titres restaurants.

Elle a aussi annoncé deux amendements :

- le premier pour rétablir une disposition établissant la double tutelle de l'ANCV et soumettant l'agence au contrôle économique et financier de l'Etat, disposition figurant déjà dans l'ordonnance de 1982 portant création des chèques-vacances ici codifiée ;

- le second afin de prévenir tout conflit d'intérêt au sein de l'ANCV, entre ceux qui attribuent les excédents de l'agence et ceux qui bénéficient de ses subventions, et de garantir que les 5,7 millions d'euros d'excédents de l'ANCV soient attribués aux organismes qui en ont le plus besoin.

Pour conclure, elle a invité ses collègues à donner un avis favorable à ce projet de loi ainsi amendé.

M. Adrien Giraud, en tant que professionnel du tourisme, a remercié Mme Bariza Khiari pour son excellent rapport. Il a ensuite évoqué le combat mené par le Gouvernement français au sein de l'Union européenne pour obtenir l'application d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à plusieurs activités relevant du tourisme. Conscient de l'incertitude quant à l'issue de ce combat, il a imaginé de remplacer cette baisse de la TVA par la création d'une prime aux hôteliers les incitant à embaucher.

Mme Bariza Khiari, rapporteur, est convenue que la réduction du taux de TVA, notamment sur l'hébergement et la restauration, était un serpent de mer et que certains pays européens y étaient aujourd'hui opposés. Elle a rappelé que le Gouvernement avait déjà octroyé à ces professionnels un certain allégement de charges sociales, contrepartie de l'engagement de ces derniers à diminuer la pénibilité du travail dans leur secteur. Considérant donc que l'effort avait été déjà fait en partie, elle a indiqué à son collègue qu'il lui revenait toutefois d'interpeller le Gouvernement sur ce point s'il le souhaitait.

M. Michel Bécot, après avoir salué le travail du rapporteur, a déploré l'obsolescence des règles relatives au classement des hébergements, regrettant notamment que l'octroi de trois étoiles fût conditionné à la présence de baignoire dans chaque chambre, alors même que les étrangers préféraient les douches.

Mme Bariza Khiari, rapporteur, a abondé en ce sens, confirmant que la vision du confort avait évolué depuis cinquante ans. Elle a exprimé le souhait que les arrêtés de classement fassent rapidement l'objet d'un « toilettage », suggérant par exemple que la possibilité d'un accès à l'internet soit prise en considération dans le classement des hébergements.

M. Dominique Mortemousque a confirmé que le tourisme constituait, à ses yeux, un sujet fondamental pour l'avenir du pays et que ce gisement important était toutefois fragile et exposé à la concurrence d'autres destinations. Il a ensuite évoqué les difficultés attachées à l'emploi dans ce secteur, appelant de ses voeux une plus grande souplesse en réponse à la saisonnalité de l'activité.

Mme Bariza Khiari, rapporteur,a fait observer que la position de la France, première destination touristique au monde, était difficile à tenir, et qu'elle ne pouvait encourir comme risque qu'une rétrogradation. Elle a fait valoir le travail remarquable réalisé par Maison de la France, tout en déplorant que cette institution manque de moyens par rapport à ses concurrents pour promouvoir notre pays comme destination touristique. Elle a jugé qu'il convenait d'en reparler lors du débat budgétaire. S'agissant de la problématique de l'emploi dans le secteur touristique, elle a rappelé le travail effectué par sa collègue, Mme Michelle Demessine, ancienne ministre du tourisme, sur le statut des saisonniers et a estimé qu'il serait intéressant d'interroger le ministre sur la mise en oeuvre de ce statut.

M. Jean-Marc Pastor, après avoir remercié le rapporteur pour son travail, a fait observer que l'installation dans le métier de restaurateur n'était soumise à aucune exigence en matière de formation de base. Il a imaginé un schéma inspiré d'une démarche de filière, comme celle existant dans le secteur agricole, qui partirait de la formation et accompagnerait les jeunes jusqu'à leur installation et qui permettrait à ces jeunes d'aller « jusqu'au bout de leurs rêves ».

Mme Bariza Khiari, rapporteur, a confirmé qu'aucune réglementation ne s'appliquait aux assiettes servies par les restaurants, alors même que la santé des consommateurs était en jeu. Elle a convenu qu'ouvrir un restaurant pouvait effectivement être un rêve, mais que c'était aussi une entreprise soumise à des règles de gestion. Rappelant qu'une modification de la réglementation applicable aux restaurateurs suscitait la crainte des professionnels déjà installés, elle a considéré que pourrait être proposée la mise en place d'un certificat d'aptitude professionnelle à une échéance assez éloignée pour ne pas déstabiliser les restaurateurs en place.

M. Charles Revet a relevé que la difficulté soulevée par M. Michel Bécot était d'ordre réglementaire et a insisté sur la nécessité d'attirer l'attention du ministre sur l'importance de ces « détails » d'application de la loi qui échappent au Parlement.

M. Jean-Paul Emorine, président, a rappelé que le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises (PME), qui avait été récemment soumis à l'examen de la commission, visait à autoriser les apprentis à travailler le samedi et le dimanche et qu'une telle souplesse pourrait être précieuse pour le secteur du tourisme.

M. Gérard Bailly, rebondissant sur la suggestion faite par son collègue Jean-Marc Pastor, a également insisté sur la nécessité d'exiger la présence, dans les établissements de tourisme, de personnes qualifiées afin de garantir un certain niveau de qualité et de sécurité. Revenant sur les difficultés de recrutement rencontrées par le secteur touristique, il a estimé qu'elles tenaient surtout aux contraintes horaires qui étaient attachées à cette activité. Au sujet des critères de classement des hébergements, il a considéré que le plus important était d'informer le consommateur en amont, notamment sur l'équipement en douches ou baignoires, et non d'encourager l'un ou l'autre des équipements. Il s'est enfin interrogé sur la lisibilité des compétences dans le champ institutionnel touristique, s'enquérant en particulier du fonctionnement des schémas régionaux du tourisme.

M. Pierre André, après avoir remercié le rapporteur, a insisté sur le caractère interministériel du secteur touristique. Revenant sur les questions de qualification professionnelle, il a fait observer qu'elles ne devaient pas faire obstacle à la liberté d'entreprendre, citant l'exemple de l'artisanat, où l'installation n'était soumise à aucune exigence de qualification mais où était requise une formation de chef d'entreprise pour l'autoriser à faire de l'apprentissage. Au sujet de Maison de la France, il a jugé que c'était surtout la présence économique de la France à l'étranger qui manquait de moyens, invitant à mobiliser en direction de la promotion de notre pays les moyens aujourd'hui consacrés à la présence diplomatique (conseillers économiques en ambassades, réseau d'expansion économique...). Evoquant les aides à l'hôtellerie et à la restauration, il a déploré que celles accordées par le Gouvernement n'aient pas bénéficié aux consommateurs et a rappelé qu'il n'était pas dans le rôle de l'Etat de donner de plus grandes marges bénéficiaires aux hôtels-restaurants. Il a appelé à une grande vigilance sur les mesures susceptibles d'être proposées, rappelant que la France restait une destination touristique attractive en matière de prix, pour une qualité de prestation relativement élevée.

M. Daniel Raoul, réagissant aux propos tenus par M. Gérard Bailly, est revenu sur la discussion du projet de loi en faveur des PME. Il a regretté l'issue du débat sur l'apprentissage : convenant que l'amendement présenté par son collègue M. Jean-Pierre Godefroy, soumettant à un accord collectif l'autorisation de faire travailler les 16-18 ans huit dimanches par an, était particulièrement exigeant, il a déploré que la majorité ait refusé l'amendement présenté Mme Catherine Procaccia, rapporteur au nom de la commission des affaires sociales, qui soumettait l'autorisation de faire travailler les apprentis le dimanche à une double condition : établissement par décret d'une liste des secteurs concernés et exigence d'un accord collectif. Il a jugé que cet amendement aurait représenté un bon compromis, regrettant que la majorité n'en ait retenu le dispositif que pour les jours fériés et ait choisi, pour le dimanche, de libéraliser le travail des apprentis, dans les secteurs déjà visés par le décret existant, au motif qu'il ne fallait pas retarder l'embauche d'apprentis mineurs dès septembre prochain, surtout dans les métiers de bouche.

Mme Bariza Khiari, rapporteur, a relevé que le tourisme entraînait toujours des discussions transversales. Elle a reconnu que le secteur rencontrait des difficultés de recrutement qu'elle a attribuées à l'image des métiers du tourisme, métiers auxquels les jeunes préféraient renoncer dès qu'une amélioration conjoncturelle le leur permettait. Elle a donc jugé nécessaire de promouvoir ces métiers et de les valoriser aussi bien que l'avait fait, pour ses propres métiers, le secteur du bâtiment et des travaux publics. Concernant les schémas régionaux touristiques, elle a invité ses collègues à user des services de conseil en ingénierie touristique proposés par l'organisme « Observation, développement et ingénierie touristiques » (ODIT) présidé par son collègue M. Michel Bécot. Evoquant à nouveau Maison de la France, elle a reconnu que le manque de moyens était en effet surtout problématique pour les services à l'étranger. Revenant sur les aides aux restaurateurs, elle a rappelé que la baisse de la TVA, promesse électorale transformée en baisse de charges sociales, aurait dû se retrouver sous forme de recrutement, de baisse des prix et de moindre pénibilité du travail.

M. Dominique Mortemousque, sans méconnaître les insuffisances budgétaires, a souhaité insister sur l'efficacité que les opérateurs privés pourraient dégager en unissant leurs investissements, comme cela se faisait en matière agricole. Il a également convenu qu'il était difficile de s'improviser restaurateur et que la mise en place d'une démarche de filière préviendrait bien des mirages.

M. Adrien Giraud a suggéré que les jeunes sortant de lycées professionnels bénéficient d'aide durant leurs deux premières années d'activité, ce qui permettrait de mettre fin à la « prime » actuelle au chômage.

Mme Bariza Khiari, rapporteur, a confirmé que l'effort budgétaire public gagnerait à bénéficier de l'effet de levier d'un effort convergent des acteurs privés, seul susceptible d'accroître sensiblement l'efficacité de la promotion touristique. Elle a conclu en affirmant que le ministre serait tenu informé de la teneur du riche débat qui venait de se tenir en commission.

Elle a ensuite présenté quinze amendements qui ont tous été adoptés par la commission :

- trois amendements portant article additionnel après l'article 1er et visant à apporter des rectifications matérielles au corps même de l'ordonnance n° 2004-1391 dont le présent texte autorise la ratification ;

-  deux amendements portant article additionnel après l'article 2 et traitant tous deux de l'agence nationale pour les chèques vacances, le premier afin de rétablir dans le texte les règles relatives à la tutelle de l'établissement et à son contrôle économique et financier, le second proposant la création d'une commission spécifique chargée de l'attribution des excédents de l'agence ;

- trois amendements à l'article 4 visant à rectifier des erreurs matérielles survenues dans la reproduction, en position suiveuse dans le code du tourisme, d'articles pilotes du code général des collectivités territoriales ;

- un amendement portant article additionnel après l'article 6 et proposant la ratification de l'ordonnance n° 2005-174 du 24 février 2005 relative à l'organisation et à la vente de voyages et de séjours, sous réserve d'une modification tendant à rétablir des conditions de concurrence loyale pour les agences de voyage ;

- un amendement de cohérence à l'article 10 ;

- un amendement portant article additionnel après l'article 10 afin de rectifier une erreur matérielle dans le code du tourisme ;

- un amendement à l'article 11 en proposant une nouvelle rédaction plus claire ;

- deux amendements portant article additionnel après l'article 11 visant à préciser l'objet de règles dont le code du tourisme renvoie la fixation au code général des impôts ;

- enfin, un amendement rédactionnel à l'article 12.

La commission a ensuite adopté, à l'unanimité, le projet de loi portant ratification de l'ordonnance relative au code du tourisme ainsi modifié.

M. Jean-Marc Pastor, relevant l'unanimité des commissaires sur la question de la formation professionnelle des restaurateurs, a exprimé le souhait que Mme Bariza Khiari, rapporteur, puisse s'en faire l'écho auprès du ministre.

Audition de M. Hervé Ladsous, directeur d'Asie et d'Océanie au ministère des affaires étrangères

La commission a procédé ensuite à l'audition de M. Hervé Ladsous, directeur d'Asie et d'Océanie au ministère des affaires étrangères.

M. Hervé Ladsous a d'abord brièvement brossé une présentation générale de la Chine en 2005.

Rappelant que l'Empire du Milieu représentait, il y a deux cents ans, près de 30 % de la création mondiale des richesses, il a relevé que l'essor constaté depuis ces vingt dernières années dans les domaines économiques, commerciaux et diplomatiques reflétait l'ambition des autorités chinoises de retrouver ce statut de puissance perdu depuis le XIXe siècle.

M. Hervé Ladsous est ensuite revenu sur certains « clichés » qualifiant la Chine de menace pour ses partenaires économiques. Il a souligné que la croissance économique chinoise, intervenue alors que le marché des hydrocarbures se trouvait déjà dans une situation de tension anormale, ne constituait en aucun cas l'unique facteur de la hausse enregistrée depuis ces derniers mois par le cours du baril de pétrole. S'agissant des pratiques commerciales de la Chine, dénoncées comme « prédatrices » dans un secteur d'exportation comme le textile, il a indiqué qu'il fallait s'attendre à l'augmentation sensible du nombre de secteurs concernés dans les années à venir du fait de l'émergence de ce pays comme « le premier atelier du monde ». La France et l'Europe, a-t-il ajouté, peuvent cependant accompagner cet essor selon des modalités moins ambiguës que l'endiguement et l'engagement, entre lesquels les Etats-Unis oscillent depuis trente ans. Se félicitant de l'évolution du rôle international de la Chine devenue, depuis ces vingt dernières années, un acteur à part entière de la communauté internationale, il a fait mention de la fréquence des rencontres tenues dans le cadre du dialogue stratégique entre Paris et Pékin sur l'ensemble des sujets de l'actualité internationale, non sans souligner les gains à retirer, pour les deux pays, de partenariats structurants dans l'ensemble des domaines économiques.

M. Hervé Ladsous a encore noté que la présence économique de la France en Chine avait connu une régression affectant avant tout les petites et moyennes entreprises, alors que leurs homologues allemandes, sur une même période, gagnaient dans ce pays des parts de marché. Il a toutefois souligné l'importance des grands contrats signés avec la Chine, en particulier dans les domaines de l'électronucléaire, où la France est présente depuis les années 70, et de l'aéronautique, dans le cadre du consortium Airbus, qui contrôle aujourd'hui 30 % de l'aviation civile chinoise, et devrait s'associer aux autorités chinoises pour le développement du nouvel Airbus A-350 et d'un nouveau modèle d'hélicoptère.

Rappelant que l'économie de la Chine reposait désormais sur l'intégration de l'ensemble des filières de production, le directeur de l'Asie et de l'Océanie a également fait valoir l'importance, pour l'avenir de notre coopération, de l'accueil d'étudiants chinois en France, dont le nombre avait progressé actuellement à 12.000 tandis qu'il atteignait, pour la seule Nouvelle-Zélande, celui de 53.000. Il s'est félicité de la constante augmentation du nombre de touristes chinois en France, qui devrait atteindre un million de personnes cette année, voire deux en 2006.

M. Hervé Ladsous a ensuite brièvement dressé le bilan de l'année de la France en Chine, qui fait suite à celle de la Chine en France et se termine en septembre prochain. Ces deux dernières années, a-t-il relevé, ont notamment été marquées par la poursuite des consultations politiques de haut niveau, qui se situent dans la continuité des relations établies depuis 1964 et augurent une coopération renforcée. Il a ajouté que l'évolution de la Chine, pour remarquable qu'elle fût dans le domaine économique, présentait de réelles faiblesses s'agissant de la protection des libertés publiques et de la démocratisation de la vie politique et que persistaient des dissonances entre les positions française et chinoise, au sujet notamment de la réforme du système onusien.

A l'issue de cette présentation, un large débat s'est engagé avec les commissaires.

M. Jean-Paul Emorine, président, s'est interrogé sur les modalités de protection du savoir-faire national, dans le contexte de transfert de technologies qui caractérisait pour partie les échanges commerciaux avec la Chine.

M. Charles Revet a souhaité connaître les conséquences, non seulement en termes d'infrastructures, mais aussi de rayonnement international, de l'organisation par Pékin des Jeux Olympiques de 2008. Il a fait part de son inquiétude quant aux risques suscités par la disparité grandissante des revenus constatée dans la société chinoise. En réaction à l'évocation de la faible insertion des PME françaises dans le marché chinois par rapport à celle de leurs concurrentes allemandes, il a demandé des précisions sur les secteurs dans lesquels nos entreprises demeuraient compétitives. Il s'est demandé si la délégation de la commission, lors de son déplacement en septembre prochain, ne risquait pas de se voir imposer des restrictions de circulation, avant de s'interroger sur les conséquences à long terme de la « politique de l'enfant unique » imposée par les autorités chinoises.

M. Roland Ries, observant que le transfert de technologies induisait le risque de voir apparaître à terme sur le marché national des produits analogues à ceux déjà fabriqués en France pour un coût beaucoup moins élevé, a souhaité obtenir des précisions sur les moyens disponibles pour protéger la propriété industrielle. Il a également fait part de son interrogation quant à l'évolution de la situation intérieure de la Chine, qui tentait de concilier le libéralisme économique avec l'autoritarisme politique.

M. Georges Ginoux s'est enquis de l'état de la production chinoise de pétrole et sur l'existence de concessions accordées par Pékin aux groupes pétroliers internationaux pour l'exploitation des gisements d'hydrocarbures.

M. Gérard Bailly a évoqué le budget militaire de la Chine et sa capacité actuelle de dissuasion. Il s'est par ailleurs interrogé sur le fonctionnement des sociétés d'économie mixte dont la création était jusqu'à présent requise pour s'implanter en Chine mais qui, à terme, pouvait se solder par l'éviction des investisseurs d'origine étrangère. Se faisant l'écho de l'émoi suscité, dans son département, par la délocalisation de l'industrie lunetière vers la Chine et par les difficultés que pourrait bientôt éprouver celle du jouet, il s'est interrogé sur l'évolution de l'opinion publique en Europe vis-à-vis de la puissance chinoise.

M. Michel Billout a demandé des précisions quant à l'évolution des relations entre la Chine continentale et Taiwan.

M. Benoît Huré s'est enfin interrogé sur l'évolution des besoins alimentaires de la Chine et sur les moyens qu'elle entendait consacrer au développement de l'industrie agro-alimentaire.

En réponse à ces questions, M. Hervé Ladsous, directeur d'Asie et d'Océanie au ministère des affaires étrangères, a apporté les précisions suivantes :

- pour exporter leurs produits vers la Chine et s'implanter sur son marché intérieur, les entreprises françaises doivent d'abord conclure des partenariats industriels avec leurs homologues chinois. Alors que la recherche-développement est devenue une priorité nationale pour Pékin, il importe de maîtriser le processus de transfert de technologies en se réservant une avance stratégique pour les biens et équipements reconnus de première importance, comme ont su le faire, dès l'origine de leur coopération commerciale, les Japonais ;

- l'accueil par la Chine des Jeux Olympiques de 2008, mais également l'organisation de l'Exposition Universelle de Shanghai en 2010 et des Jeux asiatiques de 2012, induisent dès à présent des investissements massifs en matière de construction, bouleversant en profondeur l'urbanisme des zones concernées. Un tel contexte est cependant favorable à la diffusion du savoir-faire français, notamment dans le domaine de la sécurisation des sites ;

- il existe bel et bien « plusieurs Chine », qui se répartissent sur l'ensemble du territoire national en fonction du niveau de richesses des habitants : alors que la façade maritime et la Chine du Sud connaissent depuis ces dix dernières années une croissance constante, d'autres régions, comme la Mandchourie, dont les industries ont périclité depuis ces trente dernières années, ou les régions rurales de l'intérieur, connaissent des problèmes structurels qui tendent à les marginaliser. En outre, l'existence d'un flot de 100 millions de travailleurs migrants contribue à l'aggravation des disparités sociales dans les zones de prospérité économique. Afin de conjurer les risques d'explosion sociale, Pékin a mis en oeuvre une « politique d'harmonisation » des différences sociales impliquant une augmentation des subventions au secteur agricole et visant à améliorer les conditions de travail, sans pour autant remettre en cause le monopole du parti communiste sur la vie politique ;

- les facteurs expliquant la forte pénétration des PME d'origine allemande sur le marché chinois, qui est près de trois fois plus importante que celle de leurs homologues françaises, sont pour partie liés à la supériorité de leur taille critique qui les rend financièrement plus solides pour répondre aux exigences spécifiques de ce marché. C'est afin de remédier à ce handicap structurel qu'a été initié le programme « 1.000 PME françaises en Chine », qui comprend notamment un dispositif de  « portage » permettant aux entreprises de bénéficier de l'expertise et du soutien logistique de grands groupes déjà implantés en Chine ;

- la liberté de circulation est désormais, dans la Chine de 2005, sensiblement analogue à celle en vigueur en France. Le pays est ainsi plus ouvert aux étrangers, comme en témoigne l'essor de la communauté française pour la seule région de Shanghai, qui s'élevait à près de quatre cents personnes au début des années 90 et qui atteint désormais près de quatre mille ressortissants, dont la moyenne d'âge est de trente ans ;

- les effets de la politique de l'enfant unique ont été aggravés par la recherche d'une descendance uniquement masculine risquant d'accélérer, sur le long terme, le vieillissement de la population et d'empêcher tout renouvellement des générations. Le triomphe de « l'enfant prince » et ses influences sur la société chinoise ne manqueront pas d'induire, à terme, la remise en cause des valeurs du collectivisme fondatrices de la Chine populaire. En outre, la possibilité pour les ménages aisés de déroger, moyennant l'acquittement d'une amende, à la règle de l'enfant unique, constitue désormais la source d'un nouveau clivage social ;

- les stratégies à adopter face à la concurrence industrielle de la Chine peuvent être diverses. Ainsi, dans le domaine du textile, les industriels allemands ont privilégié le développement de nouveaux articles à haute valeur ajoutée peu susceptibles d'être concurrencés, à court et moyen termes, par les produits chinois de moindre qualité. Par ailleurs, les autorités françaises et européennes encouragent Pékin à renforcer les dispositifs juridiques de protection de la propriété intellectuelle, qui permettent également de lutter plus efficacement contre la contrefaçon. Enfin, la répartition des tâches entre les entreprises françaises et chinoises dans le cadre de projets industriels communs permet de mutualiser les fruits de la croissance économique ;

- la conciliation du libéralisme économique et de l'autoritarisme politique est jusqu'à présent assurée par le parti communiste qui tire sa légitimité, depuis les événements de la Place Tien An Men, de l'élévation du niveau de vie de la population. Le développement des moyens de communication, sous le contrôle de Pékin, ouvre progressivement la voie à de nouveaux espaces de liberté qui pourraient, à terme, perturber un tel équilibre plus sûrement que les timides initiatives d'ouverture au pluralisme parfois tentées au niveau local. En outre, les autorités françaises promeuvent inlassablement le renforcement des Droits de l'homme en Chine, en soutenant les demandes de libération de dissidents politiques et en invitant le gouvernement chinois à veiller à une plus grande protection des minorités nationales, à mettre en oeuvre un moratoire sur la peine de mort et à améliorer le sort de la communauté tibétaine ;

- en raison de sa croissance économique et du peu de réserves dont elle dispose, la Chine importe désormais près de 50 % de sa consommation de pétrole. Cependant, le pays dispose de ressources abondantes en charbon, dont l'exploitation s'effectue, comme c'est le cas pour l'ensemble des ressources naturelles situées sur son territoire, sous monopole d'Etat. En outre, l'inclusion de la Chine dans le tracé du prochain gazoduc, qui devrait prochainement assurer l'acheminement du gaz naturel extrait en Asie centrale, constitue une priorité de la politique énergétique actuellement conduite par Pékin ;

- la puissance militaire chinoise recèle une dualité à travers l'armée populaire de libération, mal équipée et entraînée, qui constitue le gros des troupes de la République Populaire de Chine, mais aussi l'existence d'unités d'excellence principalement dans l'armée de l'air et dans la marine qui ont bénéficié, ces dernières années, d'investissements importants et qui ne manqueront pas de peser, à moyen terme, sur l'évolution des relations avec Taiwan et avec les Etats voisins. S'agissant de la guerre électronique, les Chinois disposent d'un savoir-faire éprouvé dans la saturation des réseaux informatiques. A l'exception de l'objectif de la réunification avec Taiwan, dont toute proclamation d'indépendance romprait le climat de relative détente tout dernièrement constaté et serait inéluctablement perçue par Pékin comme un casus belli, l'expansion territoriale ne relève nullement de la tradition militaire chinoise. Alors que la levée de l'embargo sur les livraisons à la Chine d'armes en provenance de l'Union européenne fait débat, il convient également de demeurer vigilant quant à l'évolution de la politique conduite par Pékin vis-à-vis de la Corée du nord ;

- l'évolution des sociétés mixtes (« joint-ventures ») créées entre les sociétés françaises et chinoises est suivie par les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie afin de conseiller avec efficacité les PME qui souhaitent initier une telle démarche. Il est également nécessaire d'anticiper, pour chaque secteur d'activités concerné, les conséquences de la libéralisation des échanges, en favorisant notamment le redéploiement de l'appareil productif vers des produits hauts de gamme pour faire face à la concurrence chinoise. La nouvelle donne issue de l'émergence de la Chine comme puissance économique doit être ainsi appréhendée de manière globale, étant entendu que les investissements directs que la Chine est susceptible d'injecter dans l'économie française contribueront, à leur tour, à créer des emplois ;

- en matière alimentaire, la Chine est globalement autosuffisante, mais elle importe du blé, notamment en provenance de France, et des oléagineux. Cependant, l'agriculture traditionnelle a pâti de l'urbanisation et de l'élévation des niveaux de vie qui tendent à bouleverser les habitudes alimentaires traditionnelles par l'introduction d'aliments importés comme le vin français, prisé par la nouvelle classe moyenne chinoise.