COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Mardi 8 avril 2025

- Présidence de Mme Aurélie Trouvé, présidente -

La réunion est ouverte à 16 h 30.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire (CMP) chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire s'est réunie à l'Assemblée nationale le mardi 8 avril 2025.

Elle a procédé à la désignation de son bureau, qui a été ainsi constitué :

- Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente ;

- Mme Dominique Estrosi Sassone, sénatrice, vice-présidente.

Elle a également désigné :

- M. Stéphane Travert, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

- M. Daniel Gremillet, sénateur, rapporteur pour le Sénat ;

- Mme Anne-Catherine Loisier, sénatrice, rapporteure pour le Sénat ;

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. - La proposition de loi qui nous est soumise a été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 17 mars dernier et par le Sénat le 1er avril.

Même si la procédure des CMP nous est familière, je tiens à en rappeler les règles. Une CMP ne constitue pas une seconde lecture, mais une parenthèse dans la navette parlementaire. Elle a pour base de discussion le texte adopté par l'Assemblée et celui voté par le Sénat, considérés de façon égale. Un tableau comparatif des textes adoptés par chaque assemblée vous a été transmis. Une CMP examine les seules dispositions restant en discussion après lecture du texte dans chaque assemblée.

Lors de son dépôt à l'Assemblée nationale par ses auteurs, MM. Stéphane Travert et Julien Dive, la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire comportait un article unique. Lors de son examen, l'Assemblée a adopté trois articles additionnels, les articles 1er bis, 2 et 3, portant à quatre le nombre d'articles. Le Sénat en a adopté un conforme, l'article 3, qui se trouve ainsi exclu du champ de la présente CMP.

Aucun accord partiel n'est envisageable. La CMP a pour objet de parvenir à une rédaction conforme des articles restant en discussion. L'élaboration d'un texte par la CMP n'a de sens que s'il est susceptible d'être adopté par les deux assemblées. Si des scrutins sont organisés pendant notre réunion, en cas de divergences insurmontables, les suppléants ne pourront y prendre part. En cas d'égalité des voix, la proposition de rédaction est rejetée.

Dans le tableau comparatif, les articles que les rapporteurs des deux assemblées proposent conjointement d'adopter sont surlignés. Pour certains articles, nous serons amenés à examiner des propositions de rédaction concurrentes, transmises par les membres de la CMP. En cas de propositions de rédaction globales concurrentes sur certains articles, celles-ci feront l'objet d'une discussion commune, la proposition des rapporteurs étant présentée en premier.

La proposition de loi traite de l'encadrement des promotions et des pratiques commerciales, notamment dans le domaine alimentaire, et vise à éviter qu'elles ne soient trop agressives, en tenant compte des intérêts des fournisseurs, des producteurs et des consommateurs. L'article 1er vise à prolonger le relèvement du seuil de revente à perte et l'encadrement des promotions. L'article 1er bis, introduit par l'Assemblée et supprimé par le Sénat, vise à encadrer les marges des acteurs de la chaîne agroalimentaire en appliquant le principe du coefficient multiplicateur. L'article 2 prévoit que l'interdiction de revente à perte s'applique également aux produits vendus sous marque de distributeur (MDD).

Mme Dominique Estrosi Sassone, sénatrice, vice-présidente. - La proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire a été adoptée il y a exactement une semaine par le Sénat, par 246 voix pour et aucune voix contre. Dans la continuité des lois Égalim du 30 octobre 2018, du 18 octobre 2021 et du 30 mars 2023, tandis que perdure la guerre des prix dans la filière agroalimentaire au détriment de nos producteurs, elle vise à offrir aux acteurs de la filière un cadre aussi stable que possible, ce qui plaide en faveur du maintien du relèvement du seuil de revente à perte de 10 %, dit « SRP + 10 », et de l'encadrement des promotions.

Si la commission des affaires économiques du Sénat soutient celui-ci, elle demeure réservée sur celui-là. Toutefois, son abandon serait un très mauvais signal, qui aggraverait la guerre des prix. Surtout, nous devons légiférer en urgence. Le SRP + 10 arrive à échéance le 15 avril 2025, ce qui plaide pour l'adoption immédiate d'un vecteur législatif permettant de le prolonger. La poursuite de l'expérimentation introduite par la loi Égalim 1 fait consensus, dont nous avons la responsabilité de tenir compte. Il importe que notre CMP aboutisse à une proposition de loi garantissant sa prorogation effective.

Je remercie les rapporteurs de leur travail, réalisé dans des délais très contraints, notamment ceux du Sénat, Mme Anne-Catherine Loisier et M. Daniel Gremillet, qui travaillent sur ces sujets depuis de très nombreuses années. Ils ont notamment créé un groupe de suivi des lois Égalim, qui leur permet d'étoffer leurs travaux. Ils sont parvenus, me semble-t-il, à recentrer la proposition de loi sur la prolongation du SRP + 10 et à harmoniser les durées d'expérimentation des dispositions concernées jusqu'au 15 avril 2028.

Ils n'ont pas ménagé leurs efforts pour parvenir à un texte consensuel, répondant vraiment à l'enjeu de l'urgence de la prolongation du SRP + 10. Par ailleurs, ils ont obtenu, lors de l'examen du texte en séance publique, l'engagement du gouvernement de travailler avec les distributeurs à l'élaboration d'une méthodologie en vue de clarifier les informations, exigées des entreprises, relatives à leurs usages des surplus de marges dues à l'application du SRP + 10. J'espère que cet esprit constructif présidera aux travaux de la CMP. Je ne doute pas que, sur les dispositions restant en discussion, nous parviendrons, avec sagesse, à un accord raisonnable, afin que le texte puisse entrer en vigueur dans les prochains jours.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Notre collègue député Julien Dive et moi-même avions, en déposant la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire, une préoccupation de court terme : le renouvellement du SRP + 10 sur les produits alimentaires, qui arrive à échéance le 15 avril 2025 (c'est-à-dire dans une semaine), conformément aux dispositions de la loi Égalim 1, que j'ai eu l'honneur de défendre en 2018 en tant que ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Une disposition complémentaire du SRP + 10, l'encadrement des promotions en valeur et en volume, arrive à échéance un an plus tard, le 15 avril 2026.

Dans sa rédaction initiale, la proposition de loi prévoyait de prolonger le SRP + 10 et l'encadrement des promotions sur les seuls produits alimentaires jusqu'au 15 avril 2028. L'élargissement de l'encadrement des promotions aux produits de droguerie, parfumerie et hygiène (DPH), entré en vigueur le 1er mars 2024 en application de la loi dite « Descrozailles », aurait donc été abandonné. Lors de l'examen du texte par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, le maintien de l'encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu'au 15 avril 2026 a été adopté à mon initiative, au nom de la stabilité des règles.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale a renversé ce calendrier, limitant au 15 avril 2026 la prolongation du SRP + 10 et prolongeant jusqu'au 15 avril 2028 l'encadrement des promotions sur les seuls produits DPH. Le Sénat a remis de l'ordre dans ce calendrier, en fixant au 15 avril 2028 l'échéance du SRP + 10 et de l'encadrement des promotions pour tous les produits de grande consommation. Il me semble que, sur ce point, le texte du Sénat doit être retenu.

J'aurais préféré, à titre personnel, que l'encadrement des promotions sur les seuls produits DPH ne soit pas prolongé avant d'en dresser un premier bilan. Toutefois, tant l'Assemblée nationale que le Sénat se sont prononcés en faveur de l'échéance de 2028. Quant au maintien du SRP + 10 et à l'encadrement des promotions sur les produits alimentaires, il ne faut pas se mettre en situation de devoir à nouveau légiférer dans quelques mois ou au printemps 2027, ce qui serait impossible. Il est donc logiquement proposé une date commune d'échéance au 15 avril 2028 pour tous les produits visés par les dispositions de l'article 125 de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi « Asap ».

S'agissant des promotions sur les produits DPH, le taux maximal de 40 % pour les promotions envisagé à l'Assemblée nationale peut se lire comme un compromis vis-à-vis du consommateur, visant à rendre plus acceptable la prolongation du dispositif. Toutefois, il est vrai que le taux de 34 % obéit à une logique commerciale, celle du « deux achetés, un gratuit », et que l'argument de la stabilité des règles joue en faveur de son maintien.

Les députés ont exprimé leur insatisfaction concernant l'évaluation du SRP + 10 menée jusqu'à ce jour. Cette insatisfaction est venue de tous les bords, notamment lors de l'examen du texte en commission, laquelle a donc adopté plusieurs amendements permettant de renforcer l'évaluation du SRP + 10 et de l'encadrement des promotions avec la création d'une sanction.

En cas d'absence de transmission par les distributeurs des documents permettant de mesurer les effets de ces mesures, une sanction de 75 000 euros pour les personnes physiques et de 375 000 euros pour les personnes morales a été créée. Il s'agit du niveau de sanction prévu à l'article 125 de la loi Asap en cas de non-respect de l'encadrement des promotions. Ce niveau de sanction a été largement relevé en séance publique, à un montant maximum de 1 % du chiffre d'affaires annuel pour les PME et de 4 % du chiffre d'affaires annuel pour les grandes entreprises.

Par ailleurs, l'obligation de remettre des éléments chiffrés permettant de mesurer les effets du SRP + 10 a été étendue, avec les mêmes sanctions, aux industriels, à l'exclusion des PME. Le Sénat n'a pas retenu cette disposition, conservant la sanction pour absence de transparence uniquement pour les distributeurs, à la même hauteur que celle prévue pour le non-respect de l'interdiction de la revente à perte, soit 100 000 euros pour les personnes physiques et 500 000 euros pour les personnes morales. La rédaction adoptée par le Sénat, sans préjudice d'un débat sur le niveau de la sanction, me semble constituer un compromis acceptable entre celles respectivement retenues, à l'Assemblée, en commission et dans l'hémicycle.

Quant à l'obligation de transparence mise à la charge du fournisseur par l'Assemblée nationale, les sénateurs l'ont jugé peu opérante. Il est vrai que le fournisseur ne fixe pas le prix de vente au consommateur et peut donc difficilement faire la lumière sur l'utilisation de la « manne » générée par le dispositif SRP + 10. Si un pas devait être fait en direction de l'Assemblée nationale, il pourrait l'être dans le domaine de la transparence sur la sanctuarisation de la matière première agricole par les fournisseurs.

Par ailleurs, les députés ont voté de nombreuses dispositions éloignées du coeur du texte pour envisager la transparence sur les marges de façon générale et même, à l'article 1er bis, l'encadrement des marges. Il n'est pas proposé de reprendre ces dispositions, que le Sénat a supprimées et qui le demeurent donc dans le texte de compromis. La recherche d'un compromis suppose en effet de s'en tenir au périmètre strictement limité du SRP + 10 et de l'encadrement des promotions.

En revanche, un ajout au texte voté en commission et maintenu en séance publique à l'Assemblée nationale n'a pas été repris par le Sénat, alors même qu'il est au coeur du sujet : expliciter l'applicabilité de l'interdiction de la revente à perte aux produits vendus sous MDD en l'état au consommateur. Il vous appartiendra de vous exprimer sur votre souhait de faire figurer ce point dans le texte final.

En conclusion, le texte voté par le Sénat permet d'atteindre l'objectif principal, qu'il faut d'autant moins perdre de vue qu'il est attendu par la très grande majorité des acteurs économiques, notamment les agriculteurs : reconduire le SRP + 10, qui arrive à échéance le 15 avril prochain. Ce texte permet d'harmoniser les calendriers du SRP + 10 et de l'encadrement des promotions sur les produits alimentaires et sur les produits DPH, en prévoyant une échéance commune au 15 avril 2026.

Cette échéance permettra au gouvernement de réaliser un travail d'évaluation plus complet que celui livré jusqu'à ce jour. L'objectif est d'avoir une vision aussi précise que possible de l'utilisation du surplus de marge obtenu sur certains produits grâce au SRP + 10. Il s'agit de déterminer dans quelle mesure ces dispositifs permettent de défendre la valeur de nos productions agricoles et alimentaires et, in fine, d'améliorer le revenu de nos agriculteurs.

Pour ce faire, le texte offre des garanties supplémentaires en faveur de la transparence sur les effets des dispositions que doivent prendre les acteurs économiques. L'administration, quant à elle, devra se saisir des dispositions nouvelles pour accompagner ces derniers dans la mise en conformité avec ces exigences de transparence et, s'ils font preuve de mauvaise volonté, pour les sanctionner.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire a fait l'objet d'échanges nourris entre Anne-Catherine Loisier, qui présentera le détail de nos travaux, Stéphane Travert et moi-même.

Depuis l'adoption des lois Égalim en 2018, 2021 et 2023, tandis que perdure la guerre des prix dans la filière agroalimentaire au détriment des producteurs, les dispositions que nous avons votées demeurent peu appliquées, voire contournées. Mieux vaut en renforcer l'application et en améliorer l'évaluation qu'en modifier chaque année la teneur et les périmètres.

Tel est l'enseignement qu'Anne-Catherine Loisier et moi-même retirons des travaux du groupe de suivi des lois Égalim. Nous avons constaté que les acteurs font preuve d'une capacité d'adaptation. Nous sommes plus souvent en retard qu'en avance sur les pratiques du secteur. Les lois Égalim ont apporté de la stabilité aux consommateurs - elles n'ont pas eu d'effet inflationniste - et de la sécurité aux acteurs de la chaîne agroalimentaire par rapport à leurs concurrents européens.

L'expérimentation du SRP + 10, qui prévoit des conditions de négociation plus favorables aux fournisseurs, arrive à échéance le 15 avril prochain. À l'exception d'un groupe, tous les acteurs soulignent la nécessité de le prolonger, car sa disparition conduirait à relancer la guerre des prix.

Lors de l'examen du texte, notre fil rouge fut l'efficacité dans un contexte d'urgence et la volonté de parvenir à une rédaction consensuelle. Dans un avenir proche, nous travaillerons de nouveau sur ces sujets à l'occasion de l'examen d'un projet de loi « Égalim 4 », en cours de préparation par le gouvernement.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. - Nous avons essayé avec Daniel Gremillet et mes collègues sénateurs de travailler ensemble en vue de recentrer la proposition de loi sur son objectif initial, à savoir prolonger le SRP + 10, dispositif français inédit, tout en évitant de complexifier les dispositions, dans un contexte d'instabilité des marchés.

À cet égard, nous avons veillé à harmoniser les durées d'expérimentation des dispositifs existants afin de maintenir l'équilibre global des lois égalim. Nous proposons donc de prolonger la durée d'expérimentation des dispositifs jusqu'en 2028 afin d'éviter une instabilité dommageable à l'ensemble des acteurs économiques.

Dans un esprit constructif, nous devons essayer de trouver une solution afin d'éviter que ce dispositif s'arrête la semaine prochaine. Mme la ministre déléguée s'est engagée à définir, avec l'ensemble des parlementaires, les contours et le cahier des charges du rapport sur les marges que remettra l'Inspection générale des finances (IGF), afin d'améliorer la transparence. Ce rapport alimentera le débat sur cette question qui fut riche à l'Assemblée nationale.

Nous proposons le maintien de l'ensemble des dispositifs existants - SRP + 10, encadrement des promotions sur les produits alimentaires et DPH. L'encadrement des produits DPH est absolument essentiel pour protéger le tissu des ETI - entreprises de taille intermédiaire - et des PME - petites et moyennes entreprises -, très nombreuses dans ce secteur. On constate non pas une inflation, mais une baisse des prix de l'ordre de 2 % entre les mois de mars et de novembre 2024 et l'effondrement des volumes parfois évoqué existe depuis dix ans, soit bien avant l'instauration du dispositif d'encadrement il y a un an.

Il est essentiel de maintenir l'ensemble de ces dispositifs qui constituent l'armature d'Égalim et garantissent son équilibre global. Remettre en cause le taux s'appliquant aux promotions sur les produits DPH reviendrait à faire un nouveau cadeau aux distributeurs sans que les consommateurs n'en tirent le moindre bénéfice.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

Article 1er

Propositions de rédaction n° 1A de M. Robert Le Bourgeois et de Mme Hélène Laporte, n° 1 de Mme Mathilde Hignet, n° 2 de M. Julien Dive et n° 3 de Mme Mélanie Thomin et de M. Dominique Potier

M. Robert Le Bourgeois, député. - Le SRP + 10 n'a pas d'effet bénéfique ; il aurait même un effet inflationniste. L'harmonisation des durées d'expérimentation des différents dispositifs et l'existence d'une échéance au 15 avril sont des arguments légers.

Compte tenu de la conjoncture, nous ne souhaitons pas relancer une guerre des prix. Nous attendons donc le dépôt du projet de loi Égalim 4 qui, annoncé pour le mois de juin par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, permettra à la fois de valoriser la matière première alimentaire et d'augmenter le revenu des agriculteurs.

Nous proposons donc de mettre un terme en 2026 au SRP + 10 et à l'encadrement des promotions sur les produits DPH.

Mme Mathilde Hignet, députée. - La proposition de rédaction vise à faire coïncider la fin de l'expérimentation sur l'encadrement des promotions sur les produits DPH avec la fin de l'expérimentation relative au SRP + 10. Elle tend aussi à rétablir dans la rédaction de l'Assemblée nationale les dispositions relatives au taux de marge brute des produits bio ; à la publication des documents transmis par les distributeurs et les industriels ; à la sanction des acteurs économiques, fixée de manière progressive en fonction de leur chiffre d'affaires, qui n'auraient pas communiqué les éléments permettant d'apprécier la pertinence des mesures prises.

Avec le groupe LFI-NFP, nous avions voté en faveur du texte à l'Assemblée nationale, car il nous semblait plus ambitieux.

M. Julien Dive, député. - Le rapporteur Stéphane Travert et moi-même sommes à l'initiative de cette proposition de loi qui a un double objet : prolonger l'expérimentation du SRP + 10 et supprimer, dès 2026, l'encadrement des promotions sur les produits DPH afin d'améliorer le pouvoir d'achat de nos compatriotes.

Or ce texte n'est plus conforme à l'esprit de proposition de loi initiale ; je ne m'y retrouve pas. C'est la raison pour laquelle, en commission et en séance, j'avais déposé un amendement, qui fut d'ailleurs adopté, visant à supprimer le dispositif relatif aux produits DPH en 2028 et prévoyant, en contrepartie, d'augmenter le seuil d'encadrement à 40 %. Vu la fin de non-recevoir que m'ont opposée nos collègues sénateurs, je propose que ce dispositif soit maintenu jusqu'en 2026 et que le seuil soit rehaussé à 50 % de 2026 à 2028.

Mme Mélanie Thomin, députée. - Nous souhaitons que le dialogue soit le plus fructueux possible. L'objet de ce texte, qui encadre le seuil de revente à perte, est de défendre le revenu agricole. Cette proposition de loi suscite beaucoup d'attentes dans le monde agricole ; nous sommes réunis ici pour le servir.

Le texte adopté à l'Assemblée nationale le 17 mars comporte des avancées. Nous avons exigé davantage de transparence concernant l'encadrement des marges dans la grande distribution. Dans un même souci de transparence, l'Inspection générale des finances remettra chaque année un rapport sur les marges brutes réelles des distributeurs.

La proposition de rédaction vise à fixer le montant de la sanction à hauteur de 0,4 % du chiffre d'affaires annuel des acteurs de la grande distribution, dans l'esprit du texte adopté par l'Assemblée nationale, qui prévoyait un plafond de 1 %.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Avis défavorable sur la proposition de rédaction de M. Le Bourgeois et de Mme Laporte. Nous souhaitons aligner les durées d'expérimentation des dispositifs SRP + 10 et DPH, qui arriveraient à échéance au mois d'avril 2028, afin de disposer de données.

Avis défavorable également sur la proposition de rédaction de Mme Hignet. Le plafonnement des promotions sur les produits DPH à 34 % jusqu'en 2028 est déjà satisfait dans la rédaction du Sénat. La proposition relative aux marges sur les produits bio réalisées par les distributeurs nous éloigne de l'objet de ce texte, sur lequel nous devons nous concentrer si nous voulons trouver un compromis. Enfin, s'il est indispensable que le rapport établi à partir des documents remis par les distributeurs soit rendu public, la publicité desdits documents porterait atteinte au secret des affaires.

Avis défavorable, enfin, sur la proposition de rédaction de M. Dive. Cela étant, je comprends sa position car, dans le texte initial, nous avions choisi d'exclure le dispositif DPH. Toutefois, les auditions m'ont fait cheminer sur ce sujet. Force est de constater que l'Assemblée nationale comme le Sénat ont voté pour le maintien de l'encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu'en 2028. Je propose d'en rester là.

J'émettrais en revanche un avis favorable sur la proposition de Mme Thomin et de M. Potier, ce qui nous conduirait à adapter sur ce point le texte du Sénat que nous propositions initialement de retenir pour cet article. Il est nécessaire de renforcer les sanctions en cas de non-respect du dispositif SRP + 10 et en l'absence de publication des documents demandés. Le plafond de 0,4 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes, pourcentage qui peut être modulé en fonction du manquement, est raisonnable et il permet de renforcer la pression sur la grande distribution.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. - Si nous nous interrogeons tous sur les effets positifs du SRP + 10, nous avons tous identifié l'effet négatif de sa disparition. Si les distributeurs ne bénéficient plus de cette manne, ils la récupéreront en amont, sur les transformateurs ou les producteurs. Il n'est pas souhaitable de mettre un terme aussi rapidement à un dispositif aussi important. Avis défavorable donc sur la proposition de rédaction de M. Le Bourgeois et de Mme Laporte.

Nous sommes en revanche d'accord avec l'idée que le rapport soit rendu public.

Nous sommes défavorables à la proposition de M. Dive, qui est contraire à l'équilibre global des lois Égalim. Dissocier le dispositif de promotion sur les produits alimentaires de celui sur les produits DPH bénéficierait également aux distributeurs.

Enfin, nous demandons une suspension pour examiner la proposition de rédaction de Mme Thomin et de M. Potier.

La réunion est suspendue de dix-sept heures dix à dix-sept heures quarante.

Proposition commune de rédaction n° 3 bis des rapporteurs

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. - Au terme de nos échanges, nous avançons une proposition qui se décompose en quatre points. Le premier porte sur les sanctions, que pour notre part nous souhaitons ne pas revaloriser au-delà de de 0,1 % du chiffre d'affaires. Le second concerne les rapports, dont nous souhaitons préciser qu'ils « peuvent être rendus publics ».

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. - Le troisième a trait aux MDD, qui pourront être concernées par le SRP + 10, et le quatrième porte sur les promotions applicables au secteur du DPH, qui pourront atteindre 40 % du prix, et ce jusqu'en 2028. Cette échéance sera un gage de stabilité et nous donnera surtout le temps nécessaire pour travailler à un nouveau texte : nous ne pouvons pas continuer à légiférer sans cesse dans l'urgence.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. - Je rappelle que le troisième point ne concernant pas l'article 1er, il ne pourra être abordé que dans le cadre de l'article 2. Il fera donc l'objet d'une proposition de rédaction spécifique.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je remercie les rapporteurs du Sénat pour cette proposition. S'agissant de la revalorisation des sanctions encourues en cas de non-respect de l'obligation de publication des informations et de manquement à l'utilisation du SRP, je suggère de prévoir qu'elles pourront atteindre 0,4 % du chiffre d'affaires.

Je soutiens en revanche les propositions relatives à la publication des rapports et à l'intégration des MDD dans le dispositif du SRP + 10. Dans un esprit de compromis, je suis également favorable à ce que nous ramenions le taux de promotion maximal pour les produits du DPH à 40 % (contre 50 % dans la proposition de M. Dive), jusqu'en 2028.

M. Julien Dive, député. - La version issue des travaux de l'Assemblée nationale prévoyait bien un encadrement des promotions sur le DPH prorogé jusqu'en 2028, avec un niveau maximal de 40 %. Il s'agissait là d'une avancée destinée à préserver les entreprises tout en redonnant du pouvoir d'achat à nos concitoyens. Il fallait répondre à cette aspiration de nos compatriotes, mais aussi tirer les conséquences du fait que l'encadrement des promotions a permis à des enseignes et à des centrales d'achat étrangères de tirer leur épingle du jeu en contournant le dispositif.

Dans sa version initiale, la proposition de loi prévoyait la fin pure et simple de l'encadrement des promotions sur le DPH. Chacun a donc fait un pas vers l'autre. Je soutiens la rédaction de compromis présentée par les rapporteurs du Sénat.

M. Boris Tavernier, député. - Quel serait le niveau minimal des sanctions et comment seront-elles appréciées ?

Je regrette que nous ne progressions pas davantage en matière de transparence, alors même que cette exigence nous est fréquemment rappelée. En ce sens, peut-être aurait-il été judicieux de retenir la proposition de rédaction présentée par Mme Hignet.

Mme Mélanie Thomin, députée. - Nous nous réjouissons des avancées proposées. Le groupe Socialistes et apparentés est particulièrement attaché à ce que le montant des sanctions puisse atteindre 0,4 % du chiffre d'affaires annuel, afin d'imposer réellement à la grande distribution le respect de la publication des marges liées au SRP + 10.

Nous devons également trouver un compromis entre l'intérêt des consommateurs et la défense de nos PME et de notre industrie. L'encadrement des promotions à hauteur de 40 % pour le secteur du DPH nous semble de nature à assurer cet équilibre tout en réintroduisant un peu de justice dans notre droit.

Je regrette simplement que nous manquions de temps et de stabilité pour pouvoir cheminer collectivement sur cette question. En tout état de cause, l'Assemblée nationale et le groupe Socialistes et apparentés ont fait plusieurs efforts pour rejoindre les positions du Sénat, en renonçant à la transparence des fournisseurs et en acceptant de proroger le dispositif jusqu'en 2028.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Quel que soit le plafond retenu, il reviendra à l'administration de déterminer le seuil de la sanction infligée, en fonction de la gravité de la faute et de l'importance du distributeur concerné - d'où ma volonté de porter le niveau maximal à 0,4 %.

Quant à la proposition de Mme Hignet, j'y vois un certain intérêt, mais nous devons avancer. D'autres outils nous permettront d'obtenir les éléments dont nous avons besoin, notamment à travers le rapport qui sera demandé par la ministre déléguée.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. - Nous acceptons que l'amende puisse atteindre jusqu'à 0,4 % du chiffre d'affaires, à condition que les trois autres points présentés précédemment soient adoptés également.

M. Boris Tavernier, député. - Peut-on imaginer prévoir un régime de sanctions compris entre 0,1 % et 0,4 % du chiffre d'affaires, pour s'assurer qu'un niveau plancher suffisamment élevé s'applique ?

Mme Mélanie Thomin, députée. - Le rapport que la ministre Véronique Louwagie s'est engagée à demander à l'Inspection générale des finances est le fruit d'une proposition de mon collègue Dominique Potier, formulée lorsque le groupe socialiste s'est interrogé sur la meilleure construction possible du SRP + 10. Dans l'attente de la future loi Égalim 4, la ministre déléguée s'est par ailleurs engagée à ce que soit produit un rapport intermédiaire qui nous permettra de faire un point d'étape sur le respect du dispositif par la distribution et les industriels.

M. Robert Le Bourgeois, député. - Pourquoi étendre l'application du SRP + 10 aux MDD ? Je n'en vois pas l'intérêt.

Mme Mathilde Hignet, députée. - Je rejoins mon collègue Boris Tavernier sur la nécessité de fixer un niveau minimal de sanctions. Le terme « jusqu'à » est en effet tout à fait libre d'interprétation, tout comme l'alinéa disposant que les rapports « peuvent être » rendus publics : si des données peuvent être publiées, elles peuvent aussi ne pas l'être.

Les deux autres points ne me posent aucune difficulté.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. - L'application du SRP + 10 aux MDD, qui revient aux dispositions adoptées à l'Assemblée nationale, est une concession de notre part.

Nous tenons à prévoir que les sanctions pourront atteindre 0,4 % du chiffre d'affaires au maximum, car il sera de la responsabilité du juge de pondérer la sanction en fonction des cas de figure.

De la même façon, la publication des données sera laissée à l'appréciation du ministre, qui s'assurera par exemple qu'elle ne remet pas en cause le secret des affaires. L'objectif est que nous puissions avancer dans notre réflexion et aboutir à une meilleure répartition des valeurs ajoutées sans pour autant dévoiler des informations qu'il ne serait pas forcément souhaitable de divulguer sur la place publique.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et le ministère peuvent demander que certaines informations soient rendues publiques, dans le respect du secret des affaires : en la matière, il faut faire preuve de discernement.

Quant au niveau de la sanction et même si nous ne fixons pas de plancher, par définition, dès lors qu'une sanction est prononcée, elle ne saurait être nulle. Il reviendra au juge d'en déterminer le niveau en fonction de l'infraction commise. Je remercie les sénateurs d'avoir accepté de porter le niveau maximal à 0,4 %. Chacun a fait des concessions et nous aurons l'occasion d'avancer ensemble en vue d'une loi Égalim 4.

J'entends la remarque de M. Le Bourgeois. Dès lors que le Rassemblement national est opposé au principe même du SRP, elle n'a rien de surprenant.

La proposition de rédaction n° 3 bis est adoptée, les autres propositions de rédaction tombent et l'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 1er bis

Proposition commune des rapporteurs tendant à la suppression de l'article, proposition de rédaction n° 4 de Mme Mathilde Hignet.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Mme Hignet souhaite revenir à la rédaction de l'Assemblée nationale, issue d'un amendement qui, voté en séance publique à l'initiative de notre ancien collègue André Chassaigne, concerne l'encadrement des marges. Nous proposons de retenir plutôt la suppression de cet article en suivant ici la position du Sénat.

Mme Mathilde Hignet, députée. - L'amendement que l'Assemblée avait adopté était important, car il garantissait un prix rémunérateur au producteur et, ainsi, une cohérence à la chaîne de production. Il était cher au coeur de notre ancien collègue.

Comme l'explosion des marges n'a pas bénéficié aux producteurs, il est opportun de déployer des coefficients multiplicateurs, instrument à même d'accroître leur rémunération.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons déjà exprimé notre opposition à cette mesure.

M. Julien Brugerolles, député. - Je vais bien entendu défendre la proposition de rédaction de Mme Hignet. L'adoption de l'amendement d'André Chassaigne correspondait à l'accomplissement d'un pas de géant. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) se bat depuis 1986, date de la suppression du coefficient multiplicateur, pour la réintroduction de ce mécanisme. Le simple approfondissement du droit commercial ne réglera pas la question de la répartition de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de production. Les dispositions dont nous débattons aujourd'hui, comme le SRP + 10, sont très limitées.

Les objections aux coefficients multiplicateurs sont toujours les mêmes : cette mesure serait complexe et relèverait de l'économie administrée. Néanmoins, si nous voulons faire évoluer la répartition de la valeur ajoutée au bénéfice des producteurs, il est indispensable de déployer des instruments coercitifs et puissants.

La proposition commune des rapporteurs tendant à supprimer l'article 1er bis est adoptée.

En conséquence, l'article 1er bis est supprimé.

Article 2

Proposition commune de rédaction n° 6 des rapporteurs, proposition de rédaction n° 5 de Mme Mélanie Thomin et de M. Dominique Potier

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Notre proposition de rédaction concerne l'intégration des MDD dans le dispositif du SRP + 10 et la sanction encourue par un distributeur qui ne respecterait pas l'obligation de remettre, chaque année, un document décrivant l'utilisation qu'il a faite du surplus de marge ainsi généré. Nous souhaitons que l'amende frappant le distributeur s'établisse à 0,4 % de son chiffre d'affaires annuel hors taxes, afin d'aligner l'ensemble des sanctions sur ce taux.

Mme Mélanie Thomin, députée. - Notre proposition de rédaction vise à établir le montant des sanctions frappant les distributeurs ne jouant pas le jeu du dispositif à 0,6 % du chiffre d'affaires annuel, mais je rejoins le souhait exprimé par les rapporteurs d'aligner l'ensemble des sanctions sur le taux de 0,4 %. Je retire donc notre proposition de rédaction au profit de celle des rapporteurs.

La proposition de rédaction n° 5 est retirée.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Mme Mathilde Hignet, députée. - Le groupe La France insoumise ne soutiendra pas le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Nous tenions aux coefficients multiplicateurs et à l'encadrement des marges. La version de l'Assemblée nationale était plus ambitieuse. Notre objectif étant de garantir aux producteurs des prix rémunérateurs, la suppression du rétablissement des coefficients multiplicateurs est à nos yeux une ligne rouge. Enfin, la transmission des données et les sanctions nous posent question.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour le Sénat. - Si nos deux assemblées adoptent le texte sur lequel nous venons de nous mettre d'accord, nous gagnerons de la stabilité et nous pourrons travailler sereinement à l'élaboration du projet de loi Égalim 4. L'expérience nous enseigne qu'il est nécessaire de consacrer du temps à ces sujets complexes.

N'oublions pas que le cadre législatif des lois Égalim s'inscrit dans un contexte européen : nous devons veiller à ne pas fragiliser nos agriculteurs par rapport à leurs concurrents du continent. L'Allemagne ne s'est pas dotée d'un dispositif comparable à Égalim et le prix moyen des 1 000 litres de lait y est supérieur au prix français de près de 50 euros.

Je me réjouis que nous ayons choisi la lisibilité au détriment des rendez-vous annuels, pratique en vogue mais éloignée de tout travail sérieux. L'accord auquel nous sommes parvenus n'était pas écrit d'avance et nous avons tous cheminé pour atteindre stabilité et lisibilité. C'était essentiel pour le monde économique, les consommateurs et les agriculteurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat. - Je salue la recherche d'équilibre qui nous a animés. L'ensemble des acteurs et des filières pourront se projeter dans la durée. Les lois Égalim forment le point d'arrivée d'un long parcours semé d'obstacles : nous y revenons régulièrement, dans le souci de parfaire les dispositifs tout en conservant leur simplicité et leur adaptabilité, triple objectif qu'il n'est pas toujours aisé d'atteindre.

Le prochain rendez-vous sera l'établissement du cahier des charges en vue du rapport pour lequel Mme la ministre déléguée s'est engagée à nous solliciter. Égalim est un grand Meccano qui nous oblige à toujours penser aux conséquences qu'une mesure pour l'aval aura sur l'amont et réciproquement. Le texte porte sur l'aval, mais nous devons toujours réfléchir à la complémentarité des dispositifs si nous voulons en assurer l'efficacité.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je ne suis pas un adepte des consensus « mous », parce qu'ils n'apportent rien. Nous avons besoin de dispositifs vertébrés et nous sommes parvenus, grâce à l'action de tous, à un compromis de bonne facture.

Je m'engage à saisir la ministre déléguée pour obtenir le maximum d'informations utiles à l'élaboration d'un Égalim 4. Nous avons besoin de temps : je travaille sur ces sujets depuis 2016 et la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « Sapin 2 », dont on a beaucoup entendu parler dernièrement... Fixer le délai à 2028 nous permettra de réfléchir de manière approfondie aux dispositifs à déployer : il est nécessaire de travailler pour l'amont tout en contrôlant l'aval. L'objectif d'Égalim était bien la répartition de la valeur tout au long de la chaîne.

N'oublions pas que, derrière les fonctions de production, de transformation et de distribution, il y a des emplois. Ceux-ci contribuent à l'aménagement du territoire et à la compétitivité de l'économie. La compétitivité n'est pas un « gros mot » pour les territoires dans lesquels nous sommes élus et nous vivons.

J'espère que la stabilité promue par ce texte recueillera l'agrément de l'Assemblée nationale et du Sénat, afin que nous puissions avoir du temps pour avancer sur les sujets relatifs aux filières. La filière laitière peut s'enorgueillir de bénéficier du dispositif Égalim : il me semble que d'autres filières devraient y entrer à leur tour. Nous devons nous pencher sur l'agriculture biologique, qui traverse une crise sans précédent : dans cette optique, il existe des outils que nous pouvons actionner. Il est nécessaire de contraindre davantage les distributeurs sur les données qu'ils doivent transmettre : les marges doivent être contrôlées et le régime de sanctions appliqué.

En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

La réunion est close à 18 h 15.

Jeudi 10 avril 2025

- Présidence de M. Florent Boudié, président -

La réunion est ouverte à 10 h 02.

Commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic et de la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande du Premier ministre, des commissions mixtes paritaires (CMP) chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic et de la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée se sont réunies à l'Assemblée nationale le jeudi 10 avril 2025.

Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de M. Florent Boudié, député, président, de M. Christophe-André Frassa, sénateur, vice-président, de MM. Vincent Caure et Roger Vicot, députés, rapporteurs pour l'Assemblée nationale et de Mme Muriel Jourda et M. Jérôme Durain, rapporteurs pour le Sénat.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

M. Florent Boudié, député, président. - Nous allons procéder à une discussion générale commune pour ces deux textes. La proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic a été déposée sur le bureau du Sénat le 12 juillet 2024. La proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée a été déposée sur le bureau du Sénat le 10 décembre 2024.

Les auteurs de la proposition de loi ordinaire, MM. Étienne Blanc et Jérôme Durain, ont travaillé dans un esprit transpartisan, dans lequel j'espère que les travaux de la présente CMP s'inscriront. Les propositions de loi ont été adoptées par le Sénat le 4 février 2025 et par l'Assemblée nationale le 1er avril.

La proposition de loi ordinaire comptait initialement vingt-quatre articles. Le texte adopté par le Sénat en comptait quarante-neuf ; celui adopté par l'Assemblée nationale en comptait soixante-et-onze, dont six supprimés. Sept articles ont été adoptés ou supprimés conformes. Soixante-quatre articles restent donc en discussion.

La proposition de loi organique, qui comportait un article unique lors de son adoption par le Sénat, en comptait trois lors de son adoption par l'Assemblée nationale ; tous restent en discussion.

M. Christophe-André Frassa, sénateur, vice-président. -  Je forme le voeu que la présente CMP constitue l'heureux épilogue du travail engagé par le Sénat il y a près de dix-huit mois avec la création, à la demande du groupe Les Républicains, de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France, dont le rapporteur était Étienne Blanc et le président Jérôme Durain.

Ses riches propositions ont inspiré les deux propositions de loi qui font l'objet de la présente CMP. Adoptées à l'unanimité par le Sénat, elles ont été modifiées par l'Assemblée nationale. Il nous appartient désormais d'examiner le texte issu des nombreux et fructueux échanges entre les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - La présente CMP est l'aboutissement d'un long travail entamé en novembre 2023, lors de la création, par le Sénat, de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France. Ce travail a jeté une lumière crue sur la réalité de la menace que le narcotrafic fait peser sur notre pays. Cette commission a fait date ; la qualité de son rapport, dont les recommandations ont été unanimement saluées, également.

Tout le monde s'accorde désormais à dire que la lutte contre le narcotrafic doit être érigée en priorité nationale. C'est le premier acquis du travail que nous avons mené. Aucun territoire de l'Hexagone ni d'outre-mer n'est épargné par ce phénomène délétère. Les chiffres sont édifiants. Mis en valeur par la commission d'enquête, ils ont peut-être encore évolué depuis lors. Les revenus issus du narcotrafic sont compris entre 3,5 et 6 milliards ; en 2023, il a fait quatre-vingt-cinq victimes.

Malheureusement, le narcotrafic ne cesse de gagner du terrain, en dépit de l'investissement remarquable des acteurs engagés dans la lutte contre lui - police, gendarmerie, douanes, renseignement, établissements pénitentiaires, juridictions. Quant aux élus locaux, auxquels le Sénat ne peut pas ne pas rendre hommage, ils sont - les maires en particulier - en première ligne pour faire face aux conséquences du narcotrafic sur nos concitoyens. La lutte n'est pas livrée à armes égales. L'État souffre d'un manque de moyens organisationnels, juridiques et humains - la commission d'enquête a dressé ce constat.

Le second apport essentiel de la commission d'enquête réside dans les recommandations concrètes qu'elle a formulées pour donner à l'État les moyens de lutter contre le fléau qu'est le narcotrafic. Si les deux textes ont été - c'est l'intérêt du bicamérisme - considérablement enrichis au cours de la navette parlementaire, ils demeurent la traduction directe des préconisations de la commission d'enquête. J'y vois le signe de la pertinence des travaux de contrôle que nous menons dans nos chambres respectives et, plus généralement, de la vitalité du parlementarisme, qui nous fait honneur à tous.

Sur les deux propositions de loi qui nous sont soumises, les rapporteurs du Sénat et de l'Assemblée nationale sont parvenus à un accord. À vrai dire, la distance à franchir n'était pas grande, tant nous sommes tous convaincus que réarmer l'État dans la lutte contre le narcotrafic est une impérieuse nécessité.

Le premier défi relevé par la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic est d'adopter une organisation plus adaptée à la lutte contre la criminalité organisée, dans laquelle s'inscrit le narcotrafic. S'agissant des services chargés de sa répression, l'article 1er prévoit la désignation d'un nouveau service chef de file en matière de lutte contre la criminalité organisée.

S'agissant des juridictions, l'article 2 porte création d'un parquet national de lutte contre la criminalité organisée (Pnaco), compétent pour traiter les affaires du haut du spectre. Nous avons veillé à le doter de moyens juridiques à la hauteur de nos ambitions. La riposte judiciaire devrait être à la hauteur de la menace à laquelle nous sommes confrontés. Elle bénéficiera - la lutte contre le terrorisme illustre à quel point cela compte - d'un véritable chef d'orchestre donnant l'impulsion nécessaire.

Le deuxième défi est la lutte contre le blanchiment des revenus issus du narcotrafic. On a coutume de dire que l'argent est le nerf de la guerre ; pour les narcotrafiquants, il en est le but. Aucun résultat ne sera obtenu si nous ne nous donnons pas les moyens de frapper assez durement les narcotrafiquants au portefeuille. Le titre II de la proposition de loi dote l'État d'une nouvelle palette d'outils particulièrement intéressants à cet égard. J'en citerai deux.

Le premier est la possibilité offerte au préfet de procéder à la fermeture administrative des commerces en lien avec le narcotrafic. Nous voyons tous, dans nos départements, fleurir des magasins qui n'ont pas beaucoup de choses à vendre, ni beaucoup de clients pour les acheter, et dont la longévité commerciale ne laisse de surprendre. Grâce aux dispositions de l'article 3, nous donnons à l'État les moyens de mettre un terme à des activités illicites d'autant plus insupportables qu'elles sont menées au vu et au su de nos concitoyens, qui savent tout à fait de quoi il retourne et éprouvent un sentiment d'impuissance.

Le second outil est le gel administratif des avoirs prévu à l'article 5 bis. Ce levier sera efficace pour entraver les capacités financières d'action des narcotrafiquants qui, s'ils vivent le plus souvent à l'étranger, possèdent des biens en France. Nous souhaitions lui adjoindre un mécanisme supplémentaire de gel judiciaire ; tel ne sera pas le cas. Il n'en sera pas moins un outil redoutable pour frapper directement les revenus du narcotrafic.

Le titre III vise à muscler nos capacités en matière de renseignement. L'extension du dispositif de transmission d'informations par les juridictions aux services de renseignement et l'expérimentation du recours au renseignement algorithmique en matière de criminalité organisée seront des outils précieux pour nos services de renseignement. Nous sommes convenus de ne pas retenir l'article 8 ter relatif à l'accès aux messageries cryptées, mais l'Assemblée nationale a émis le souhait d'y travailler, ce à quoi nous sommes disposés.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - L'article 9 de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic a animé de longues discussions dans nos assemblées. Il vise l'objectif partagé de créer dans notre droit une infraction nouvelle de concours à une organisation criminelle. Il s'agit d'une recommandation forte de la commission d'enquête du Sénat.

Cette nouvelle infraction permettra d'appréhender plus finement la réalité contemporaine de la criminalité organisée, à laquelle concourent des individus parvenant habilement à se tenir éloignés des risques de mise en cause judiciaire. Il s'agit d'une innovation pénale importante. Les dispositions adoptées par le Sénat comportaient certaines fragilités, dont nous avions conscience. Nous ne pouvons que remercier les députés des améliorations qu'ils ont apportées, à l'initiative d'Éric Pauget, à l'article 9. Ce travail s'est poursuivi lors de l'élaboration du texte de compromis ; je crois pouvoir dire que nous sommes parvenus à un dispositif juridiquement robuste et équilibré, complémentaire de l'infraction de participation à une association de malfaiteurs, dans le cadre d'un continuum désormais clarifié entre les deux infractions.

Par ailleurs, le texte adopté par l'Assemblée nationale comporte plusieurs mesures nouvelles en matière pénale, ayant toutes pour objet d'alourdir la répression des infractions liées au narcotrafic. Nous en avons conservé la plupart, sous réserve de quelques ajustements. Celles qui n'ont pas été retenues soulèvent des difficultés juridiques importantes, sur lesquelles nous pourrons revenir lors de nos discussions.

Les mesures prévues pour relever notre procédure pénale au niveau requis par la menace constituent un volet essentiel du texte. Elles ont suscité de riches débats. Tel est notamment le cas de l'article 14, qui renforce significativement le régime des repentis, dont nous savons qu'il ne fonctionnait qu'à moitié, et de l'article 19, qui crée un statut d'infiltré civil. Ces dispositifs ont fait la preuve de leur efficacité dans d'autres pays. Ils constitueront des instruments décisifs de notre riposte répressive et judiciaire.

Je remercie les rapporteurs de l'Assemblée nationale de la qualité de nos échanges, qui ont permis de garantir leur robustesse. Nous avons notamment entretenu un dialogue nourri sur l'article 19, ce qui a permis d'écarter tout risque de manipulation des forces de l'ordre par les infiltrés civils et d'adopter des garde-fous précieux pour éviter tout dévoiement.

L'article 16, relatif au procès-verbal distinct, constitue à n'en pas douter l'un des sujets les plus sensibles du texte. Les débats ont été à la hauteur du défi formulé avec force par la commission d'enquête : la nécessité de trouver un juste équilibre entre les droits de la défense et le besoin opérationnel impérieux de garantir l'efficacité des techniques spéciales d'enquête (TSE) pour lutter contre la criminalité organisée. Les travaux des deux assemblées, enrichis par ceux du Conseil d'État, ont permis d'aboutir au dispositif que nous vous proposons ; il répond pleinement à ce double impératif.

Ce même souci d'équilibre et d'efficacité a animé nos travaux sur le régime des nullités de procédure, en vue de traiter un problème bien identifié par la commission d'enquête. Les dispositions du titre VI de la proposition de loi participent au combat de longue haleine contre le pouvoir contaminant du narcotrafic et de la criminalité organisée sur la société et sur les institutions. Les articles 22 et 22 bis nous donnent des moyens nouveaux pour renforcer la lutte contre la corruption et pour protéger plus efficacement nos ports de l'emprise du narcotrafic.

L'article 23 protégera les juridictions des stratégies de guérilla juridique utilisées par certains avocats en matière de demande de mise en liberté. Les délais auxquels les magistrats sont astreints pour son examen seront augmentés. Elles ne pourront plus être déposées par simple courrier, ce mode de transmission étant propice au mieux à des envois en masse noyant les juridictions, au pire à des envois délibérément mal adressés afin d'induire celles-ci en erreur.

Concernant les prisons, l'article 23 quinquies, annoncé avec force par le garde des sceaux, porte création de quartiers de lutte contre la criminalité organisée. Le sujet est délicat dans la mesure où cette innovation n'a pas été proposée par la commission d'enquête et où, introduite par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, elle n'a pas été débattue au Sénat. Si nous souscrivons à l'objectif visé, nous avons souhaité améliorer la proportionnalité du dispositif. Le texte de compromis que nous vous proposons prévoit donc de limiter à un an la durée de validité de la décision d'affectation dans ces quartiers, sans préjudice de son renouvellement.

Les articles 24 et 25 visent à lutter contre l'emprise du narcotrafic sur le territoire. Ils permettent respectivement d'édicter des interdictions de paraître sur les « points de deal » et d'expulser plus facilement de son logement une personne responsable de troubles à l'ordre public dans le quartier en lien avec le trafic de stupéfiants.

Toutes ces mesures ont, pour l'essentiel, fait largement consensus. J'y vois un signe très positif de la volonté de tous les groupes des deux assemblées de se donner enfin les moyens de lutter à armes égales contre le fléau du narcotrafic.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je me réjouis de l'esprit de compromis qui a présidé aux négociations préalables à la réunion de la présente CMP. Cela n'avait rien d'évident s'agissant d'un texte technique modifiant de nombreux pans de notre droit. La difficulté fut à la hauteur de l'ambition : doter notre pays de moyens nouveaux, parfois inédits, pour lutter contre le fléau de la criminalité organisée.

Je tiens à remercier mes collègues rapporteurs, MM. Éric Pauget et Roger Vicot, ainsi que le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui m'ont accompagné lors de l'examen des textes, et les rapporteurs du Sénat, Mme Muriel Jourda et M. Jérôme Durain, avec lesquels j'ai eu des échanges de qualité.

Je me félicite que nous soyons parvenus à une rédaction de compromis de toutes les dispositions restant en discussion, ce qui représentait un défi d'autant plus grand que le texte a été enrichi au cours des débats, notamment lors de son examen par l'Assemblée nationale. Nos apports sont conformes à l'ambition nourrie par la chambre haute, ce qui nous a permis de construire des points de convergence.

S'agissant de l'article 2, nous sommes parvenus à une rédaction préservant le rôle central du Pnaco. Il pourra être destinataire d'informations transmises par les services de renseignement et sera systématiquement informé des dossiers pris par les juridictions interrégionales spécialisées (Jirs). Il conserve la compétence matérielle dans une version proche de celle votée par l'Assemblée, ce qui lui permet de se saisir des dossiers du haut du spectre.

S'agissant de l'article 16, relatif au procès-verbal distinct, la rédaction proposée est proche de celle adoptée en séance publique par l'Assemblée nationale, qui tient compte de l'avis rendu par le Conseil d'État. Nous conservons la structure adoptée par le Sénat tout en limitant encore les finalités pour garantir constitutionnellement le dispositif.

Nous avons conservé l'encadrement des techniques spéciales d'enquête issu des débats à l'Assemblée nationale. Nous avons notamment maintenu le renforcement des garanties afférentes à l'activation à distance des appareils électroniques figurant aux articles 15 ter et 15 quater, introduits par le Sénat.

Nous avons également précisé les nouvelles procédures d'anonymisation, notamment celles applicables aux agents de l'administration pénitentiaire et aux travailleurs sociaux, introduites par l'Assemblée en sus de celles prévues par le Sénat pour garantir l'anonymat des enquêteurs. Toutes visent à améliorer la protection, à tous les stades de la chaîne pénale, des acteurs investis dans la lutte contre la délinquance et la criminalité organisées.

Dans le même esprit de compromis, nous avons cherché à parvenir à une rédaction équilibrée du long mais fort utile article 22, qui comporte diverses mesures visant à améliorer la lutte contre la corruption. Nous avons supprimé le point de contact unique, redondant avec des procédures et des dispositifs en vigueur, notamment celle du lanceur d'alerte prévu par la loi dite Sapin 2.

Nous avons conservé plusieurs avancées majeures en matière de formation au risque de corruption, d'obligation de cartographie des risques pour les administrations et pour les services de l'État et de renforcement des enquêtes administratives de sécurité, dont la rédaction que nous vous proposons rétablit le renouvellement annuel pour les agents portuaires intervenant dans les zones les plus sensibles des emprises.

Les articles 23 à 23 quinquies, qui nous ont occupés de longues heures à l'Assemblée nationale, ont fait l'objet de modifications limitées. S'agissant des quartiers de lutte contre la criminalité organisée, j'ai bien conscience que le Sénat n'a pu en débattre dès lors qu'ils ont été introduits dans le texte par voie d'amendement lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale. Je tiens à saluer l'esprit constructif de nos discussions sur ce sujet, qui nous permet de proposer une rédaction de compromis. Nous nous sommes notamment mis d'accord avec nos collègues sénateurs pour réduire à un an la durée d'affectation dans ces quartiers.

Notre collègue rapporteur Éric Pauget, qui ne peut malheureusement être à nos côtés, est satisfait des avancées obtenues sur le titre II, relatif au blanchiment. Il salue en outre le compromis accepté par les sénateurs sur l'article 14 concernant le statut des repentis. Si nous supprimons l'immunité, qui a fait débat à l'Assemblée nationale, nous nous sommes accordés pour améliorer encore l'attractivité du dispositif, notamment grâce à une réduction de la peine encourue pouvant aller jusqu'à deux tiers du quantum et à un assouplissement des conditions d'octroi de l'exemption. Éric Pauget se réjouit également de l'accord conclu avec les sénateurs sur le titre IV, relatif au renforcement de la répression pénale du narcotrafic, prévoyant notamment la création de l'infraction de concours à une organisation criminelle.

Plusieurs articles additionnels adoptés par l'Assemblée nationale ont été retenus lors des discussions préalables à la présente CMP. Certains seront particulièrement utiles pour agir sur le terrain, par exemple pour mieux lutter contre l'usage des armes et l'exploitation des mineurs par les narcotrafiquants. Ces avancées en matière pénale nous permettent assurément de mieux lutter contre les réseaux organisés de la criminalité.

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La complexité de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic a parfois fait de son examen, émaillé de rebondissements et de difficultés, une véritable aventure.

Les dispositions relatives au renseignement sont particulièrement ambitieuses. Nous vous proposons de maintenir la suppression de l'article 8 ter, qui a concentré de grandes inquiétudes et sur lequel les rapporteurs du Sénat ont émis des doutes en séance publique. Relatif au déchiffrement des messageries, il ne rassurait ni les opérateurs ni les parlementaires. Des études complémentaires, menées par exemple dans le cadre d'un groupe de travail, s'imposent.

Nous avons restreint l'extension du renseignement algorithmique au seul haut du spectre, en préservant l'information du Parlement sur cette technique, qui suscite de nombreuses interrogations.

Avec les rapporteurs du Sénat, nous nous sommes accordés pour réintroduire à l'article 19, sous certaines conditions, l'infiltration civile supprimée par l'Assemblée nationale. Nous l'avons assortie de solides garanties pour faire en sorte qu'elle oriente les infiltrés vers un parcours de sortie de délinquance, en introduisant le principe de l'évaluation des risques de l'opération par le service dédié du ministère de l'intérieur, en restreignant le champ des infractions que l'informateur peut être autorisé à commettre et en prévoyant une longue période d'une décennie suivant la fin de l'opération, afin de s'assurer que l'informateur est engagé dans un parcours de sortie de délinquance solide et pérenne.

Nous sommes parvenus à un compromis sur l'article 20, relatif aux nullités de procédure, afin de sécuriser certaines procédures susceptibles de faire l'objet de détournements ou d'en fragiliser d'autres.

Le texte que nous vous présentons exclut - ce point a fait l'objet d'un débat nourri - l'extension à la matière criminelle de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), sorte de plaider-coupable à la française.

Il exclut également l'extension des perquisitions de nuit, outil particulièrement intrusif et attentatoire aux libertés.

À l'article 21 quinquies, nous avons proposé des coordinations solides en matière douanière.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Nous avons vécu, au Sénat, un processus de fabrication de la loi très particulier.

La commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France, présidée par Jérôme Durain, membre du groupe Socialiste, écologiste et républicain, et rapportée par Étienne Blanc, membre du groupe Les Républicains, a produit un travail remarquable, qui, s'ajoutant aux faits divers, a permis de prendre conscience du fait que la lutte contre le narcotrafic est une politique publique qui doit être menée avec détermination.

Il a favorisé l'inscription à l'ordre du jour du Parlement des deux propositions de loi qui nous sont soumises, certes aidé par un contexte dans lequel les propositions de loi sont - c'est un euphémisme - bienvenues. Les deux rapporteurs étant de bords politiques opposés, le travail mené au Sénat a été particulièrement intéressant, et le débat en séance publique de grande qualité, avec des clivages moins tranchés qu'à l'accoutumée.

Notre groupe n'en nourrit pas moins plusieurs regrets, au demeurant exprimés dès les travaux de la commission d'enquête. D'abord, le champ de la prévention, du côté de la consommation, n'est nullement traité. Manifestement, le trafic donnait assez de grain à moudre. Ensuite, la question des moyens, certes hors du champ des textes mais impossible à écarter, n'est pas davantage abordée.

Toujours est-il que les travaux du Sénat ont amélioré la robustesse du texte initial. La compétence du parquet national antistupéfiants a ainsi été étendue à la criminalité organisée.

Nous sommes restés tout au long des débats très vigilants quant au nécessaire équilibre entre la recherche du résultat et les moyens juridiques que nous étions prêts à y consacrer. Autrement dit, dans quelle mesure acceptions-nous de transiger sur certaines libertés publiques ou individuelles ? Et comment éviter l'effet cliquet que nous avons observé en matière de terrorisme, c'est-à-dire le risque que des mesures présentées comme réservées à la lutte contre le narcotrafic entrent dans le droit commun dans quelques années ? Une grande prudence reste de mise.

Parmi les points positifs, je citerai la création du Pnaco, la refonte du régime des repentis, qui ne fonctionnait pas, les dispositifs pour lutter contre la corruption, ainsi que les mesures pour appréhender de manière plus précise les organisations criminelles.

D'autres sujets sont plus sensibles, comme les moyens consacrés au renseignement. À ce propos, il ne suffit pas d'écrire quelque chose dans un texte pour que cela se réalise... et nos moyens de contrôle sont proches de zéro. Nous devrons donc veiller au respect des limites que nous avons posées.

Le fameux « dossier coffre », devenu procès-verbal distinct, a fait l'objet de discussions très complexes au Sénat. Le ministre de l'intérieur était très allant, mais l'outil pose des problèmes de principe. In fine, il nous a semblé que la restriction du périmètre et le contrôle obligatoire exercé par le juge permettaient d'être rassurés.

Nous sommes satisfaits que ce que l'on a appelé les portes dérobées disparaisse du texte. J'entends que les députés veulent y travailler : bonne chance ! Une porte dérobée existe ou n'existe pas.

Quant aux nullités de procédure, il me semble dangereux de s'appuyer sur les faits d'armes d'avocats malins pour supprimer certains droits de la défense au motif qu'ils peuvent être détournés. Ce n'est certes pas ce qui a été fait, mais il faut rester vigilant. Les avocats ne font qu'appliquer le droit existant.

Il est regrettable que le régime pénitentiaire spécifique n'ait pas été débattu au Sénat, car il pose un grand nombre de problèmes. J'ai compris que les rapporteurs avaient décidé d'abaisser encore la durée maximale de détention - initialement fixée à quatre ans, pourquoi donc ? C'est une bonne chose. Ce régime n'en demeure pas moins extraordinairement limitatif des droits - on ne sait pas si, à terme, il ne pourrait pas être considéré comme inhumain. Je n'ai pas très bien compris en quoi il se différencie du régime des détenus particulièrement signalés. En outre, pourquoi recourir à la loi alors que le régime pénitentiaire est habituellement régi par des décrets ou circulaires ?

Notre avis sur l'ensemble du texte est globalement positif. Nous espérons qu'il portera les fruits escomptés. Forts de l'expérience de la législation antiterroriste, nous resterons vigilants quant à tout ce qui serait susceptible de réduire les droits.

M. Antoine Léaument, député. - Je suis le seul aujourd'hui à être opposé au texte, pour la raison qu'a évoquée Mme de La Gontrie : la limitation des droits.

Le texte vise à « sortir la France du piège du narcotrafic ». Instruit par le rapport que mon collègue Ludovic Mendes et moi-même avons rédigé, je ne pense pas qu'il y parviendra. Je suis convaincu que l'objectif est partagé par tous les groupes : personne ne considère comme normale la présence de narcotrafiquants, dont les moyens peuvent concurrencer ceux de l'État jusqu'à lui contester le monopole de la violence physique légitime.

Le Parlement devra faire des propositions en matière de prévention. Tout le monde s'accorde à dire que si on ne réussit pas à faire baisser la consommation, on ne sortira pas la France du piège du narcotrafic. Il faut donc empêcher les gens d'entrer dans la consommation, inciter ceux qui y sont déjà à la diminuer et aider ceux qui sont dépendants à décrocher, en s'inspirant de ce qui a été fait pour le tabac ou l'alcool. Il faudra aussi, à un moment, se poser la question de la légalisation du cannabis. C'est la solution la plus efficace pour prévenir et faire baisser la consommation ; voyez l'exemple du Portugal.

S'agissant du texte lui-même, je regrette que l'Assemblée ait passé plus de temps à parler des prisons de haute sécurité que du narcotrafic à cause de l'amendement présenté par le ministre de la justice, sans réfléchir à ses effets de bord.

Au nom de la lutte contre la corruption à l'intérieur de la prison, vous mettez en danger les agents pénitentiaires. Que se passe-t-il quand ils rentrent chez eux ? Comment les protège-t-on ? Comment ne pas les mettre en péril alors que vous concentrez les capacités corruptives en un même lieu ? Cette question a été largement absente des débats et je n'ai pas obtenu de réponse satisfaisante de la part du ministère de la justice. Vous êtes en train de créer un dispositif dangereux.

Ensuite, en qui concerne mon cheval de bataille - les logiciels de la police -, j'espère que l'article 1er bis a été conservé même s'il ne s'agit que d'une demande de rapport. Il faut se réveiller ! On peut aider les forces de police par des mesures simples, comme leur fournir des logiciels qui fonctionnent. Si nous étions directement concernés, le problème serait déjà résolu.

Enfin, concernant le régime des repentis, quelle est la réduction de peine finalement retenue ? Ce sujet a donné lieu à une discussion assez nourrie et à une large négociation - pour ne pas employer un autre terme - avec le ministre de la justice au moment de la séance. J'espère que le dispositif reste ambitieux, sans quoi il risque malheureusement d'être inefficace.

M. Jocelyn Dessigny, député. - Le texte apportera évidemment des armes supplémentaires à nos policiers et magistrats pour lutter contre le narcotrafic. Mais pour le faire efficacement, il faut appréhender le phénomène dans toute son ampleur et partir du principe qu'il s'agit d'un business.

On peut parler de narcocapitalisme, et c'est précisément en ces termes qu'il faut traiter le problème. Comme chacun sait, le capitalisme obéit à la loi de l'offre et de la demande. Par le texte, on s'attaque à l'offre et on va mettre un grand coup d'arrêt au trafic ou, à tout le moins, embêter au maximum les narcotrafiquants ; on va les empêcher de proposer leurs produits en toute liberté comme ils peuvent parfois le faire aujourd'hui. Mais la demande ? Le texte est muet sur la prévention comme sur le curatif.

Contrairement à Antoine Léaument, je reste intimement persuadé que la légalisation n'est pas la solution. Partout où elle a été instaurée, elle a échoué à faire baisser la consommation, y compris au Portugal. Les narcotrafiquants s'adaptent et diversifient leur offre en proposant d'autres produits beaucoup plus dangereux.

Ce texte constitue un premier pas important, mais la guerre contre les narcotrafiquants ne fait que commencer. Il faudra la mener sans relâche et s'en donner les moyens. C'est là que le bât blesse. La mise en oeuvre de la loi demande des moyens financiers et humains. Pourquoi ne pas adopter un projet de loi de finances rectificative qui permettrait de doter les forces de l'ordre et les magistrats de moyens à la hauteur de nos ambitions ?

Le président de la République a annoncé une aide à l'Ukraine de 9 milliards d'euros, qui sera prélevée sur le budget de l'État. Or, on sait que, malgré une légère augmentation, les moyens de la police et de la justice restent insuffisants pour appliquer le droit en vigueur. Avec quel argent espérez-vous financer les mesures supplémentaires contenues dans le texte ?

M. Florent Boudié, député, président. - Nous allons maintenant examiner les dispositions restant en discussion de la proposition de loi ordinaire.

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 1er bis

L'article 1er bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 2

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Voici les principales modifications apportées à cet article majeur : l'absence de mention des magistrats référents Jirs (juridiction interrégionale spécialisée) au sein du Pnaco ; l'information du Pnaco par les services de renseignement ; la définition par le Pnaco d'une doctrine de répartition des dossiers entre les Jirs et les parquets locaux ; l'information systématique du Pnaco par les Jirs, très demandée par le Sénat ; l'entrée en vigueur le 5 janvier 2026, solution de compromis entre le délai de trois mois après la promulgation, proposé par le Sénat, et la date du 1er juillet, retenue par l'Assemblée.

M. Antoine Léaument, député. - On détruit la Junalco (juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée) alors qu'elle a fait la démonstration de son efficacité. Nous sommes totalement opposés à ce truc dont le seul but est de permettre à M. Darmanin de se saisir des affaires.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3

M. Antoine Léaument, député. - Le dispositif de fermeture administrative des commerces ne sert à rien. Sans décision de justice, sur la base d'un on-dit, des commerces seront fermés. Si une personne participe effectivement au blanchiment, le narcotrafiquant pourra l'indemniser pendant la fermeture et elle reprendra son activité au terme des six mois. Si le commerce n'est pas impliqué, le gérant sera privé de sa seule source de revenus et vous aurez fermé un commerce utile.

M. Florent Boudié, député, président. - Le rôle des maires faisait l'objet d'un débat entre l'Assemblée et le Sénat. La proposition des rapporteurs de la CMP concernant les alinéas 6 et 7 du texte adopté par l'Assemblée nationale répond aux préoccupations sur le sujet. Nous étions tous d'accord pour considérer que le dispositif mettait en danger les maires, mais qu'ils devaient être informés des mesures de fermeture administrative prises sur le territoire de leur commune.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3 bis A

L'article 3 bis A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 3 bis

L'article 3 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4 bis A

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Les dispositions prévues par le code pénal permettent déjà d'atteindre le but recherché, à savoir la confiscation des biens. C'est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer la première partie de l'article.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le rapporteur Éric Pauget considère qu'il n'est pas nécessaire d'aller plus loin que l'encadrement actuel.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Mais celui-ci ne fonctionne pas. N'est-ce pas pour cette raison que l'on avait introduit la disposition en question ?

M. Florent Boudié, député, président. - La mesure proposée et l'arsenal pénal actuel se chevauchaient. Par ailleurs, l'instauration d'une disposition ne préjuge pas de son efficacité.

L'article 4 bis A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 4 bis BA

L'article 4 bis BA est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 4 bis C

L'article 4 bis C est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 5 (supprimé)

M. Florent Boudié, député, président. - Il est superfétatoire de doubler le gel administratif d'un gel judiciaire. L'angle mort qui avait été mis en évidence par les auditions est désormais bien couvert.

L'article 5 est supprimé.

Article 5 bis

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Nous avons repris presque intégralement le texte du Sénat, notamment en ce qui concerne l'information du Pnaco et la suppression de la déclaration patrimoniale. Le gel est prononcé pour une durée maximale de quatre ans.

L'article 5 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7 bis

M. Florent Boudié, député, président. - Cet article est issu d'un amendement présenté par notre collègue député Olivier Falorni.

L'article 7 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 8

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous proposons de maintenir la notion de haut du spectre, en excluant la contrebande, qui n'a pas vraiment de lien avec le narcotrafic.

M. Antoine Léaument, député. - On nous vante les mérites de la surveillance algorithmique, mais on nous ment beaucoup sur son fonctionnement. On prétend ainsi que la surveillance des URL n'implique pas celle des contenus qui sont consultés, alors que, par exemple, le titre des pétitions recensées par le site change.org apparaît dans l'URL. L'extension de la surveillance algorithmique est très problématique pour les libertés publiques. En outre, nous ne savons toujours pas en quoi elle est utile pour lutter contre le narcotrafic.

M. Florent Boudié, député, président. - L'article prévoit que des rapports évaluent l'efficacité du dispositif.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 8 ter A

L'article 8 ter A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 8 ter (supprimé)

M. Florent Boudié, député, président. - Je rappelle la création d'un groupe de travail informel associant toutes les sensibilités de l'Assemblée nationale et appelé à se coordonner avec le Sénat. Il devra se prononcer sur la faisabilité du dispositif qui était envisagé ou proposer une alternative. Ses conclusions devront être rendues dans un délai bref.

L'article 8 ter est supprimé.

Article 9

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons précisé la définition de l'organisation criminelle en nous appuyant sur des éléments déjà définis dans le code pénal et dans la jurisprudence de la Cour de cassation afin d'éviter la confusion avec l'association de malfaiteurs. Nous avons également clarifié le périmètre infractionnel en le limitant aux infractions liées à la criminalité organisée. Nous avons par ailleurs supprimé l'infraction d'apologie d'une organisation criminelle qui avait été ajoutée à l'Assemblée nationale et qui apparaissait comme non nécessaire, peu opérationnelle et présentant un risque d'inconstitutionnalité. Enfin, nous avons souhaité abaisser le quantum de la peine de dix à trois ans pour clarifier le fait que l'infraction s'inscrit dans un continuum avec la participation à une association de malfaiteurs, qui implique la préparation effective d'une infraction.

M. Antoine Léaument, député. - Je vous remercie d'avoir reconnu que l'infraction d'apologie d'une organisation criminelle posait problème du point de vue des libertés publiques.

La rédaction du texte, qui sanctionne le fait de « concourir sciemment et de façon importante au fonctionnement d'une organisation criminelle, indépendamment de la préparation d'une infraction particulière », peut laisser penser que l'achat de drogue est une forme de participation au trafic de stupéfiants. C'est, du reste, ce qu'a dit le ministre de l'intérieur. La rédaction retenue apporte des améliorations. Toutefois, elle reste assez floue : que signifie l'expression « indépendamment de la préparation d'une infraction particulière » ?

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Il ne s'agit pas de criminaliser la consommation, mais de viser les personnes qui concourent à l'organisation criminelle et que nous ne parvenons pas à toucher aujourd'hui. Ces personnes sont impliquées dans la structuration du réseau. La rédaction retenue ne vise aucunement les consommateurs.

Mme Colette Capdevielle, députée. - Je souhaite savoir qui est visé par cette infraction. Si ce n'est pas le consommateur, est-ce le vendeur ? Et que signifie pénalement l'expression « de façon fréquente ou importante » ? Est-ce à partir de deux fois ? Trois fois ?

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - La formule « [c]e concours est caractérisé par un ou plusieurs faits matériels démontrant que, directement ou indirectement, cette personne tient un rôle dans l'organisation de cette structure, fournit des prestations de toute nature au profit de ses membres, ou verse ou perçoit une rémunération à un de ses membres » n'a pas été retenue par l'Assemblée nationale. Elle me semblait pourtant plus compréhensible. Je me demande s'il ne serait pas opportun de la reprendre.

M. Antoine Léaument, député. - Quelle personne concernée par cette nouvelle infraction ne serait pas passible d'une sanction pour des faits déjà qualifiés dans le droit pénal ? Nous ne pouvons pas nous plaindre de la complexification du droit et y participer nous-mêmes.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - L'association Crim'HALT a expliqué en audition que des mesures analogues dans le droit italien ont permis de confondre certains membres d'organisations criminelles que l'on ne parvient jamais à rattacher à une infraction particulière. Son constat est congruent avec les conclusions de la commission d'enquête, qui soulignait combien il est difficile d'attraper les têtes de réseau : ils sont les comptables du crime, ils sont les acteurs principaux du trafic, mais ils ne se salissent jamais les mains. Nous devons aller chercher ceux qui se dissimulent.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - La phrase du Sénat a le mérite de citer des exemples de faits.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Cette phrase a été écartée, car une trop grande précision risque d'exclure d'autres formes de concours à l'organisation criminelle. Je propose que nous conservions la rédaction sur laquelle nous avons trouvé un accord.

L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 9 bis

L'article 9 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 9 ter (supprimé)

L'article 9 ter est supprimé.

Article 10

M. Antoine Léaument, député. - Il ne sert à rien de créer une infraction spécifique d'incitation à la vente de stupéfiants sur internet. L'incitation à la vente de stupéfiants est déjà punie en général, de même que l'incitation faite à des mineurs de participer à des actions délictuelles. Chaque fois que l'on apporte une précision dans le droit, on le rend moins pertinent : une caractérisation trop précise empêche les magistrats de sanctionner les faits qui ne seraient pas cités.

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10 bis A (supprimé)

L'article 10 bis A est supprimé.

Article 10 bis

L'article 10 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10 ter A

L'article 10 ter A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10 ter B

L'article 10 ter B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10 ter

L'article 10 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 10 quater

L'article 10 quater est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 11

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - L'article avait suscité un vif débat. Je souhaite savoir ce qui a été retenu par les rapporteurs.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'Assemblée nationale a adopté la version issue du Sénat. Rien n'a changé.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - L'Assemblée nationale a simplement scindé en deux l'article initial. La disposition issue de votre amendement adopté au Sénat est conservée, ma chère collègue : les ports sont concernés par le nouveau dispositif de peine complémentaire.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Elle figure à l'article 11 bis A.

L'article 11 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 11 bis A

L'article 11 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 11 bis (supprimé)

L'article 11 bis est supprimé.

Article 12

L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 12 bis

M. Antoine Léaument, député. - L'article est inopérant et dangereux pour les libertés publiques, puisqu'il revient à créer un grand fichier. Certains opérateurs téléphoniques ont d'ores et déjà annoncé qu'ils refuseraient de s'y plier. Il privera les personnes en situation de précarité d'accès aux communications téléphoniques et il sera sans effet dans la lutte contre le narcotrafic, car les narcotrafiquants ont la possibilité d'utiliser d'autres méthodes.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - L'article ne fait que préciser le champ d'application de dispositions existantes.

L'article 12 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 13

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 14

M. Antoine Léaument, député. - L'Assemblée s'était accordée sur une réduction des deux tiers de la peine. J'aimerais savoir si elle a été retenue.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Notre proposition prévoit la suppression de l'immunité ; une réclusion criminelle de quinze ans au lieu de vingt lorsque le repenti encourt la perpétuité ou, à défaut, la réduction des deux tiers de la peine encourue ; le maintien de l'octroi du statut de collaborateur de justice par la chambre de l'instruction, sans monopole de la cour d'appel de Paris ; l'octroi de l'identité d'emprunt par la Commission nationale de protection et de réinsertion (CNPR), et non par le président du tribunal judiciaire.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 14 bis

L'article 14 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15

L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15 bis A

L'article 15 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15 bis B

L'article 15 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15 bis C

L'article 15 bis C est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15 ter

L'article 15 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 15 quater

L'article 15 quater est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 16

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous avons cherché à nous rapprocher le plus possible de la structure et de la philosophie du texte du Sénat, tout en intégrant les éléments venus du Conseil d'État qui offraient une meilleure robustesse juridique à ce dispositif important mais sensible.

M. Antoine Léaument, député. - Pouvez-vous nous dire quels éléments figureront dans le dossier coffre ?

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Ils sont spécifiés aux alinéas 5 et 6.

M. Antoine Léaument, député. - Tout ce qui visait à garder une longueur d'avance sur les narcotrafiquants a disparu ! Il ne reste que la date, l'heure et le lieu de la mise en place des dispositifs techniques d'enquête, qui pourraient donner lieu à une contestation de la procédure - d'où l'intérêt de les dissimuler, sans doute -, et la partie avec laquelle j'étais en accord, celle qui consiste à protéger l'identité des personnes qui participent aux enquêtes.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Les fondements du texte sont la symétrie - rétablir l'égalité des armes - et la protection, en l'occurrence celle des agents ayant déployé des techniques spéciales d'enquête et qui, quand on connaît leur identité, se retrouvent avec une cible sur le corps.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Le Sénat avait prévu un mécanisme de contrôle obligatoire par la chambre de l'instruction. Pourquoi tous les alinéas concernant le contrôle a posteriori ont-ils été supprimés ? Comment ce dispositif sera-t-il contrôlé ?

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le juge des libertés et de la détention autorise l'utilisation du dispositif. Un contrôle a posteriori est prévu lorsque la personne mise en cause conteste le recours au procès-verbal distinct. Il est décrit aux alinéas 10 à 14.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Le dispositif du Sénat prévoyait un contrôle obligatoire par la chambre de l'instruction avant le recours au procès-verbal distinct. Par ailleurs, je ne comprends pas le sens de l'alinéa 12 : comment le mis en examen peut-il avoir connaissance de la technique spéciale d'enquête si ces informations font l'objet d'un procès-verbal distinct ?

M. Florent Boudié, député, président. - Le dossier coffre ne masque pas l'existence d'une TSE. Il masque les conditions dans lesquelles elle a été déployée. Ce dispositif est robuste sur le plan du contradictoire.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Le juge des libertés et de la détention peut intervenir à tout moment. À compter de la notification, l'avocat peut déposer un recours devant la chambre de l'instruction.

M. Antoine Léaument, député. - Notre collègue sénatrice a raison. La rédaction du Sénat était celle-ci : « L'autorisation de recourir à un procès-verbal distinct est sollicitée, avant tout déploiement de la technique correspondante, par requête du procureur de la République ou du juge d'instruction auprès du juge des libertés et de la détention. » La version retenue par les rapporteurs à l'alinéa 8 est la suivante : « La décision du juge des libertés et de la détention est jointe au dossier de la procédure. » Ce n'est pas la même chose.

M. Vincent Caure, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'autorisation du recours au procès-verbal distinct par le juge des libertés et de la détention figure à l'alinéa 4.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Ce que vous appelez la notification, c'est le fait que l'information soit versée au dossier de la procédure ?

M. Florent Boudié, député, président. - Tout à fait.

M. Antoine Léaument, député. - Pardon d'insister : dans la version du Sénat, le juge des libertés et de la détention devait être sollicité avant que la technique soit déployée. On a inversé le mécanisme. Désormais, on pourra déployer la technique et, si l'on se rend compte ensuite que l'information peut mettre en danger un membre de la famille de la personne surveillée, on pourra saisir le juge des libertés et de la détention pour que l'information figure sur un procès-verbal distinct. Cela pose un problème sur le plan du droit.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Il ne faut pas confondre l'autorisation de recourir à une TSE et l'autorisation d'élaborer un procès-verbal distinct. L'autorisation de recourir à une TSE n'a jamais fait partie du texte. Votre préoccupation n'est pas justifiée par cette rédaction.

Si j'ai bien compris, le schéma final est le suivant : on souhaite que les informations concernant le déploiement de la TSE ne figurent pas au dossier ; on saisit le juge des libertés et de la détention ; il prend la décision de ne pas faire figurer le procès-verbal au dossier ; le mis en cause a connaissance de cette décision, car elle est jointe au dossier ; il peut former un recours devant la chambre de l'instruction.

M. Florent Boudié, député, président. - Des garanties ont été intégrées à l'alinéa 7 : « [La requête] comporte toute indication permettant d'apprécier le respect des principes de proportionnalité et de subsidiarité. »

L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 16 bis

L'article 16 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 17

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 17 bis A

L'article 17 bis A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 17 bis

L'article 17 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 18

L'article 18 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 19

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - L'infiltration civile a été un sujet un peu urticant à l'Assemblée nationale. Les inquiétudes étaient qu'on pousse au crime, que celui-ci paie et qu'on maintienne des individus dans la délinquance et la criminalité sans pouvoir exercer de contrôle sur eux.

Nous avons donc travaillé à une rédaction plus robuste, qui prévoit une évaluation préalable du candidat à l'infiltration par le Siat (service interministériel d'assistance technique) et la CNPR, un rapprochement avec le régime des repentis pour éviter tout risque de manipulation des policiers par l'informateur infiltré, une convention entre le Pnaco et l'infiltré qui intègre l'obligation de faire des déclarations sincères et exhaustives, l'interdiction de toute violence volontaire contre des personnes et un contrôle doublement renforcé. D'une part, le Pnaco pourra mettre fin à tout moment à l'infiltration et révoquer immédiatement l'immunité pénale de l'infiltré. Nous proposons d'autre part, comme pour les repentis, un contrôle à l'issue de l'infiltration, pendant une durée de dix ans : la commission de tout nouveau crime ou délit sera interdite, sous peine pour l'ancien infiltré d'être incarcéré dans le cadre de son reliquat de peine pour les infractions commises avant l'infiltration. Un tel dispositif me semble cohérent et très sécurisé.

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous avons abouti à une rédaction offrant toutes les garanties concernant le choix du futur infiltré, les actes qu'il pourrait commettre et le fait que l'infiltration civile s'inscrit dans un processus pérenne de sortie de la délinquance - dans la décennie suivant la fin de la mission.

M. Antoine Léaument, député. - Avez-vous prévu des mesures, associant le Siat et les services qui travaillent sur ces questions, pour protéger l'infiltré une fois qu'il est sorti de la délinquance de manière pérenne ?

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Toutes les structures concernées par le choix de l'infiltré, sa manière d'agir, de rendre compte et de sortir du dispositif seront évidemment consultées.

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Il s'agit du quatrième volet de la convention, relatif aux mesures de protection et de réinsertion dont l'informateur peut bénéficier.

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Ces mesures peuvent inclure l'usage d'une identité d'emprunt à la sortie du dispositif.

L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 20

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Je ne dirais pas que le régime des nullités peut donner lieu à diverses manipulations, car je ne veux pas faire offense à la profession d'avocat, mais il facilite grandement la vie des délinquants et assez peu celle de la justice. Nous proposons que les demandes de changement d'avocat « chef de file » fassent l'objet d'un dépôt au greffe au lieu d'être transmises par voie dématérialisée ou par courrier. En matière civile, cela ne conduit pas à tellement de contestations ou de doutes.

M. Florent Boudié, député, président. - Nous avons en effet considéré, après de longues discussions, que la dématérialisation posait d'infinies difficultés, notamment du fait des détournements possibles à des fins de nullité. Par ailleurs, contrairement à ce qui a pu être dit, le dispositif retenu n'obligera pas un avocat à parcourir 600 kilomètres pour de simples raisons de procédure. On donne généralement un mandat à un avocat rattaché au ressort concerné.

M. Antoine Léaument, député. - Pourquoi proposez-vous de supprimer la disposition, adoptée par l'Assemblée nationale, qui demande de remettre les mémoires en nullité cinq jours ouvrables avant la date prévue pour l'audience ? C'est une mesure utile pour éviter les tentatives de blocage de l'institution judiciaire.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Le Sénat a essayé de trouver un équilibre, en particulier s'agissant du respect des droits de la défense. Avoir à déposer ce mémoire cinq jours avant l'audience serait une contrainte très grande, a fortiori si elle ne s'appliquait pas aux réquisitions du parquet.

L'alinéa 13 est relatif à ce que l'on appelle le mémoire récapitulatif. Il n'y a pas de raison que ce dispositif, assez connu en matière civile, ne s'impose pas aussi en matière pénale. Le mémoire récapitulatif évite que des moyens soient oubliés en cours de route - on remet divers mémoires durant la procédure - et permet au juge de savoir exactement sur quoi il doit se prononcer. Cela facilite le travail de la justice sans porter atteinte aux droits de la défense.

M. Florent Boudié, député, président. - Monsieur Léaument, la suppression de l'alinéa 19 devrait vous satisfaire.

M. Antoine Léaument, député. - C'était au contraire une des recommandations que nous avions faites, M. Mendes et moi, même si notre rapport préconisait un délai de deux jours ouvrés et non de cinq. Nous avons appris lors des auditions que le risque principal était, du côté du tribunal, une incapacité de traiter les dossiers.

L'article 20 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 20 bis

L'article 20 bis est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 20 ter (supprimé

L'article 20 ter est supprimé.

Article 21

L'article 21 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 21 bis

L'article 21 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 21 ter

L'article 21 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 21 quater

L'article 21 quater est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 21 quinquies (pour coordination)

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Nous devons rouvrir cet article, adopté conforme, pour apporter des coordinations en matière douanière compte tenu des modifications apportées par la CMP aux articles 15 ter, 15 quater et 16.

L'article 21 quinquies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

M. Florent Boudié, député, président. - Les rapporteurs proposent l'intitulé suivant : « lutte contre la pénétration du narcotrafic et son influence délétère sur la société et les institutions ».

M. Antoine Léaument, député. - Il serait dommage de ne plus mentionner la corruption dans l'intitulé alors qu'il s'agit d'un élément central de la lutte contre le narcotrafic. Nous avons d'ailleurs proposé, à l'Assemblée nationale, de rendre obligatoires des formations en matière de corruption.

M. Florent Boudié, député, président. - Je partage votre avis. Le titre actuel est beaucoup plus clair.

M. Michaël Taverne, député. - En effet. Et la corruption n'épargne aucune profession.

M. Florent Boudié, député, président. - Je constate que nous sommes tous d'accord pour ne pas modifier l'intitulé du titre VI.

Article 22

L'article 22 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 22 bis

L'article 22 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 23

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Comme à l'article 20, nous proposons de renoncer, pour plus de sécurité juridique, à la possibilité d'une transmission dématérialisée des demandes de mise en liberté. Elles devront faire l'objet d'un dépôt au greffe.

L'article 23 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 23 bis

M. Antoine Léaument, député. - Cet article ne servira pas à grand-chose, car les actes concernés sont déjà punis, mais il conduira à un effet de bord potentiellement problématique - pénétrer dans l'enceinte d'un établissement pénitentiaire peut simplement signifier se rendre sur son parking. D'autres dispositifs, comme les filets, sont plus efficaces pour lutter contre les intrusions dans les prisons, même s'ils ont l'air rudimentaires.

L'article 23 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 23 ter A

L'article 23 ter A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 23 quater

L'article 23 quater est adopté dans la rédaction issue de l'Assemblée nationale.

Article 23 quinquies

M. Jérôme Durain, rapporteur pour le Sénat. - Un des enjeux centraux de cet article ajouté par l'Assemblée nationale est le délai de réexamen de la décision d'affectation dans un quartier de lutte contre la criminalité organisée, déjà ramené de quatre à deux ans. Nous vous proposons de le réduire à douze mois.

M. Antoine Léaument, député. - Vous proposez par ailleurs de ne plus écrire que la personne concernée doit être assistée de son avocat, mais qu'elle peut l'être. S'agissant d'un régime suffisamment dérogatoire en matière de libertés pour que certains à l'Assemblée, dont je ne fais pas partie, parlent de torture blanche, le recours à un avocat est indispensable. Il conviendrait donc de ne pas modifier l'alinéa 11.

Vous voulez également supprimer une disposition relative à l'anonymisation du personnel pénitentiaire, à des fins de protection. Sans être nécessairement en désaccord avec cette évolution, j'aimerais savoir ce qui conduit les rapporteurs à la proposer. Conformément à l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme, « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration », ce qui implique de savoir de qui il s'agit. Néanmoins, comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, la question du personnel pénitentiaire se pose dans des termes très particuliers.

Enfin, le décret en Conseil d'État relatif aux conditions d'application du dispositif ne ferait plus l'objet d'un avis du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Pourquoi ?

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - L'assistance obligatoire d'un avocat est assez rarement prévue en droit. La rédaction proposée, assez classique, correspond à ce qu'on appelle le droit à un avocat - on pourra demander à être assisté par un avocat, qu'on choisit ou qui est commis d'office - et elle implique qu'on soit informé de ce droit.

S'agissant de la préservation de l'anonymat, nous renvoyons en réalité au régime général prévu à l'article 15 bis B.

Pour ce qui est du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, il serait un peu lourd de prévoir son intervention préalable. Il pourra toujours agir en aval.

M. Florent Boudié, député, président. - L'obligation d'être assisté par un avocat pourrait conduire à des manoeuvres dilatoires visant à bloquer, en l'absence de celui-ci, l'affectation du détenu dans un quartier de lutte contre la criminalité organisée. La rédaction proposée est tout à fait conforme au droit positif, qui prévoit pour les régimes carcéraux spécifiques, comme l'isolement, le droit à un avocat.

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté intervient a posteriori pour évaluer et contrôler les politiques publiques. Elle aura tout loisir d'examiner les conditions de placement des détenus dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée, et d'ailleurs elle le fera sans doute assez vite. Je ne vois pas ce que pourrait apporter son intervention a priori, avant l'adoption du décret.

M. Antoine Léaument, député. - Selon vous - je grossis le trait à dessein -, les avocats pourraient donc se livrer à des manoeuvres dilatoires pour essayer de protéger de méchants narcotrafiquants.

M. Florent Boudié, député, président. - Pas nécessairement. Il est question du haut du spectre : les narcotrafiquants ayant des moyens considérables, des avocats pourraient subir des pressions visant à ce qu'ils ne se présentent pas. Il me semble que la solution proposée est plus pragmatique, tout en étant respectueuse des droits de la défense.

M. Antoine Léaument, député. - Je propose une rédaction alternative à l'alinéa 11 : « la personne intéressée, après avoir été prévenue de la possibilité d'être assistée d'un avocat [...] ».

M. Florent Boudié, député, président. - Cela va de soi, cher collègue.

M. Antoine Léaument, député. - Par ailleurs, cet article crée un régime spécial d'emprisonnement. Il serait utile que la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté donne son avis avant l'adoption du décret en Conseil d'État.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice. - Cet article, dont le Sénat n'a pas eu l'occasion de débattre, tend à créer un régime de détention particulier, et très strict. Or, ce régime n'est jamais défini. Hormis les droits qui seraient supprimés ou encadrés, on ne sait pas très bien de quoi il est question, ce qui a conduit certains à évoquer un retour des quartiers de haute sécurité.

Le régime actuel des détenus particulièrement signalés ne relève pas de la loi, mais d'une circulaire ou, au mieux, d'un décret. J'imagine bien l'utilité d'une telle mesure pour le ministre de la justice, à des fins de communication, mais je vois mal son intérêt sur le plan juridique.

S'agissant du champ d'application, nous ne savons pas exactement qui sera concerné. Tout un catalogue d'infractions est envisagé à l'alinéa 10.

Prévoir que la décision d'affectation sera prise par le ministre de la justice est une folie. Ceux qui entreront dans ces quartiers n'en sortiront jamais car, si la décision est prise en son nom, aucun ministre de la justice ne voudra prendre le risque, notamment politique, d'autoriser une sortie.

Par ailleurs, j'appelle votre attention sur le fait que la mesure s'appliquera également aux prévenus. Or, sans prétendre que de simples prévenus ne sont pas dangereux, je rappelle que le « haut du spectre » concerne des gens condamnés. Selon les chiffres circulant dans la presse, deux tiers des personnes concernées seraient des prévenus. Leur affectation dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée aurait lieu après information du magistrat chargé du dossier de l'instruction. C'est une précision aimable, mais il n'y a pas de juge d'instruction dans certaines affaires délictuelles. Il faudrait au minimum que le JLD (juge des libertés et de la détention) soit informé.

L'alinéa 10 me pose également un problème : « Si la fin de la détention provisoire qui a justifié le placement de la personne détenue dans ce quartier est ordonnée alors que la personne reste détenue pour une autre cause ou si la personne détenue est jugée pour les faits ayant justifié le placement, la décision d'affectation fait l'objet d'un nouvel examen. » On peut relever du haut du spectre pour certains actes, mais être détenu pour une autre raison, par exemple parce qu'on a commis un vol avec violence quelques années plus tôt.

L'alinéa 16 comporte des dispositions visant spécifiquement les mineurs de plus de 16 ans.

S'agissant de l'avis préalable du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui n'est que consultatif, il est à cet article ce qu'est celui de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) à de nombreuses dispositions que nous adoptons. Dans la mesure où nous ignorons en quoi consiste précisément ce régime de détention, dont les modalités sont renvoyées à un décret en Conseil d'État, il serait souhaitable qu'il bénéficie au moins des observations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le dispositif s'en trouverait protégé.

M. Florent Boudié, député, président. - La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 classe le régime des fouilles parmi les dispositions législatives, ce qui est parfaitement justifié en vertu de l'article 34 de la Constitution, d'autant que la protection des droits fondamentaux relève du législateur. Il est donc légitime que nous en débattions. Par ailleurs, le garde des sceaux, ayant constaté que certaines dispositions de l'article sont susceptibles de relever du champ réglementaire, les a néanmoins soumises au débat parlementaire, nous offrant la possibilité d'un débat à leur sujet.

L'objection formulée contre l'alinéa 10 est juridiquement infondée, dans la mesure où il vise non le juge d'instruction mais le « magistrat chargé du dossier de l'instruction », soit un champ d'application bien plus large que l'information judiciaire.

S'agissant de l'alinéa 13, je rappelle qu'une décision d'affectation exige un délai de douze mois, ce qui explique le maintien en détention de la personne visée.

M. Antoine Léaument, député. - Collègues sénateurs, je tiens à vous faire part de la discussion que nous avons eue sur les personnes retenues avant d'avoir été jugées. Un soupçon pèse sur les quartiers de haute sécurité : si le régime de détention y est si dur, n'est-ce pas pour inciter les gens à demander le statut de repenti ? Faire espérer une réduction de peine à des gens qui n'ont été ni jugés ni condamnés en les plaçant dans des conditions de détention très dures offrirait de ce point de vue une efficacité supplémentaire. L'idée - certains, je le répète, ont parlé de torture blanche - est de placer les trafiquants dans des situations qu'on ne souhaiterait pas pour ses enfants, en espérant qu'ils craquent, afin d'en obtenir des informations.

Cela va au-delà de ce que fait normalement le pays des droits de l'homme et du citoyen. Le débat sur ce point à l'Assemblée a quasiment éclipsé les autres sujets, étant le seul à bénéficier de la présence au banc d'un ministre tenant à peu près la route. Le reste est passé un peu dans le décor, une fois que M. Darmanin avait fait son show.

L'article 23 quinquies est un ajout de M. Darmanin auquel je demeure fermement opposé, d'autant que j'y vois un moyen de ne pas investir dans les prisons les moyens nécessaires pour y faire respecter les règles en vigueur - disposer d'un téléphone portable n'en faisant pas partie, il est d'ores et déjà possible de couper du monde extérieur des personnes retenues ou détenues.

On vous vend des prisons où l'on fera vraiment respecter les règles ; ce qui se passera, c'est qu'on ne donnera pas aux autres prisons les moyens de le faire, ce qui éviterait peut-être des mécanismes gravement attentatoires aux libertés.

Certains disent qu'il faut jouer à armes égales avec les narcotrafiquants ; je leur réponds qu'il ne faut pas se mettre à leur niveau. Être plus fort qu'eux, c'est réussir à faire les choses en respectant le cadre de l'État de droit. Se mettre à leur niveau, c'est s'abaisser.

M. Florent Boudié, député, président. - L'article 23 quinquies a fait l'objet d'un avis du Conseil d'État.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - L'alinéa 19 prévoit que les repentis retournant dans la délinquance ne peuvent être incarcérés dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée.

M. Florent Boudié, député, président. - L'objection soulevée par Mme de La Gontrie à propos de l'alinéa 10 étant écartée, je propose néanmoins de préciser la rédaction en remplaçant, dans la dernière phrase, les mots « s'il s'agit d'une personne prévenue » par les mots « s'il s'agit d'une personne prévenue, mise en examen ou accusée », et les mots « du dossier » par les mots « de l'enquête ou ».

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Je souscris à cette rédaction. Je précise à notre collègue Marie-Pierre de La Gontrie que, contrairement à un prévenu, renvoyé devant le tribunal correctionnel, et à un accusé, renvoyé devant la cour d'assises, une personne mise en examen fait l'objet d'une information judiciaire.

Mme Colette Capdevielle, députée. - Les observations de Mme de La Gontrie le confirment, il est fort regrettable que ces dispositions n'aient pas fait l'objet d'une lecture dans les deux chambres. Le Sénat a été privé de débat. Toutes les questions que la sénatrice a posées, l'Assemblée nationale en a discuté pendant des heures.

Il est un point sur lequel nous devrions revenir en arrière. Les prévenus - des personnes qui ne sont pas condamnées et qui bénéficient de la présomption d'innocence - seront soumis à un régime de détention totalement dérogatoire - fouilles systématiques, parloirs avec les familles, etc. On peut comprendre ces conditions de détention pour un condamné, mais pour un prévenu, elles posent un problème de constitutionnalité.

M. Florent Boudié, député, président. - Je rappelle qu'il n'y a pas de fouilles systématiques à proprement parler. Les fouilles sont très encadrées - je vous renvoie aux alinéas 15 et 16 - et leur systématisation s'inscrit dans un contexte bien défini.

M. Michaël Taverne, député. - Nous sommes favorables à la réécriture proposée.

Il faut évidemment distinguer un prévenu et un condamné, mais on ne peut pas écarter d'un revers de main la dangerosité. Les personnes bénéficient toujours de la présomption d'innocence, mais les faits peuvent être caractérisés.

J'ai le souvenir de deux frères jumeaux très dangereux, qui avaient été recrutés par un réseau criminel pour commettre des assassinats. Ils m'avaient dit : « Ce n'est pas grave, en détention, on jouera à la Playstation. »

M. Antoine Léaument, député. - Je ne suis pas sûr que le fait d'enfermer de tels individus dans des prisons de haute sécurité les rendent moins dangereux ; cela les rend fous. Vous créez des usines à fous.

La disposition relative à l'avis du Contrôleur général des lieux de privation de liberté a-t-elle été proposée par le ministre ou introduite par l'Assemblée ?

Dans le souci de ne pas emboliser la justice, il serait bon de prévoir un délai un peu plus long que huit jours. Un délai de dix jours ouvrables, soit deux semaines, me semblerait plus raisonnable pour permettre aux juges de se prononcer sereinement.

Enfin, je reviens sur un sujet qui a suscité un très long débat à l'Assemblée nationale. S'agissant des parloirs avec les enfants, l'alinéa 16 prévoit un régime dérogatoire pour les mineurs de plus de seize ans. Nous avons été nombreux à le dire dans l'hémicycle, les enfants ne sont pas responsables des crimes de leurs parents. Certes, un adolescent pourrait participer à une action répréhensible, mais le fait de le priver de ses parents - dans la réalité, ce sera son père le plus souvent - n'est sans doute pas la meilleure manière de l'aider à devenir un citoyen de la République française. Je préconise la suppression de la phrase relative aux mineurs de plus de 16 ans.

Mme Muriel Jourda, rapporteure pour le Sénat. - Le régime dérogatoire pour les mineurs de plus de 16 ans ne s'applique qu'en cas de « risque d'atteinte au bon ordre de l'établissement pénitentiaire ».

S'agissant du risque de porter atteinte à la présomption d'innocence, les prévenus visés par l'article, qui, souvent, font tout pour faire durer la procédure et rester en liberté, requièrent des conditions de détention différentes du droit commun. En vertu de l'alinéa 10, lorsqu'il s'agit d'une personne condamnée, le juge de l'application des peines donne son avis sur la décision d'affectation ; lorsqu'il s'agit d'une personne prévenue, le magistrat chargé de l'instruction dispose d'un droit d'opposition. Le traitement est donc différencié selon que la personne bénéficie encore ou non de la présomption d'innocence. Alors qu'un prévenu ou un condamné peuvent présenter le même degré de dangerosité, ce qui justifie leur incarcération dans des conditions particulières, le premier est soumis à une procédure plus protectrice. Le texte me paraît donc équilibré.

M. Florent Boudié, député, président. - Je constate que la commission approuve ma proposition de rédaction.

Pour information, l'avis du Contrôleur général avait été introduit à l'initiative de Pouria Amirshahi, contre l'avis du gouvernement et du rapporteur.

L'article 23 quinquies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 24

M. Antoine Léaument, député. - L'article va punir les jeunes des quartiers populaires. Dans ma circonscription, certains gamins n'ont rien à faire ; ils ne vendent pas de stupéfiants, mais ils aiment bien s'installer au soleil sur une table de ping-pong en béton, où ils font régulièrement l'objet de contrôles de police : « Salut, Michel, donne-moi tes papiers ! » Évidemment, ils ne s'appellent pas Michel. Les policiers finissent par les laisser tranquilles, puisqu'ils ne font rien de répréhensible.

Les interdictions administratives de paraître existent déjà. J'en ai personnellement contesté quelques-unes au moment de la réforme des retraites. Cependant, dans une démocratie normale, on ne permet pas au préfet d'interdire aux gens de paraître dans l'espace public. C'est une mesure attentatoire aux libertés.

M. Roger Vicot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'interdiction de paraître ne peut être prononcée que pour les personnes ayant des activités en lien avec le trafic de stupéfiants.

M. Antoine Léaument, député. - La rupture du contrat de location des personnes en HLM est tout aussi problématique. Si l'un des enfants d'une fratrie est soupçonné - non pas condamné, mais soupçonné - de trafic de stupéfiants, alors toute la famille pourra être expulsée de son logement. C'est un régime dérogatoire inquiétant.

L'article 24 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 25

L'article 25 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 26

L'article 26 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi.

M. Florent Boudié, député, président.- Nous allons maintenant examiner la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République anti-criminalité organisée

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 2

L'article 2 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 3

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique.

La réunion est close à 12 h 35.