Mardi 27 mai 2025

Action de sécurité pour l'Europe (SAFE) - Communication

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

L'aide alimentaire et le Fonds social européen + (FSE+) dans la perspective du prochain cadre financier pluriannuel - Audition de MM. Jean-Benoît Dujol, directeur général de la cohésion sociale (DGCS), Patrice Douret, président des Restos du Coeur, Louis Cantuel, responsable du pôle institutionnel et stratégique des Restos du Coeur, Mme Barbara Mauvilain, responsable du pôle des relations institutionnelles de la Fédération française des banques alimentaires, M. Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française, Mmes Charlotte Guiffard, directrice de l'inclusion de la Croix-Rouge française, Joëlle Bottalico, secrétaire générale adjointe du Secours populaire français, et Mathilde Courcy, responsable du service « financements et dotations publiques » du Secours populaire français

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

Mercredi 28 mai 2025

- Présidence de M. Claude Kern, vice-président -

La réunion est ouverte à 14 h 00.

Plan européen pour vaincre le cancer - Examen du rapport d'information et de la proposition d'avis politique

M. Claude Kern, président. - Mes chers collègues, je vous prie d'excuser l'absence du président Jean-François Rapin et vous indique, qu'en raison des nombreux déplacements prévus, notre commission ne se réunira pas la semaine prochaine.

Nous nous réunissons cet après-midi pour examiner le projet de rapport d'information de nos collègues Pascale Gruny, Bernard Jomier et Cathy Apourceau-Poly, ainsi que leur proposition d'avis politique sur le plan européen pour vaincre le cancer.

Ce plan, présenté en février 2021, répond à un engagement fort et sans précédent de la Commission européenne sur cette thématique à forts enjeux, le cancer étant la deuxième cause de mortalité en Europe.

Alors que la Commission européenne va bientôt présenter sa proposition de maquette pour le prochain cadre financier pluriannuel, il est important de dresser un bilan des actions menées et de la valeur ajoutée de l'Union européenne.

Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - La Commission européenne a présenté en février 2021 le plan européen pour vaincre le cancer, ou « plan cancer ».

Conçu pour être mis en oeuvre entre 2021 et 2027, ce plan aborde tous les axes de la lutte contre le cancer, à savoir la recherche, la prévention, le dépistage et les soins, ainsi que la qualité de vie des patients et des survivants du cancer. Il vise à favoriser l'utilisation des nouvelles technologies du numérique et à lutter contre les inégalités face à cette maladie, tout en accordant une attention particulière aux cancers pédiatriques.

À cette fin, le plan cancer doit permettre le lancement de plusieurs initiatives, législatives ou non, dont dix initiatives phares.

Ces initiatives se déclinent en projets dont la réalisation associe l'Union européenne et, selon leur volonté, les États membres, des associations ou des centres de soins ou de recherche. L'Union européenne finance généralement 60 à 80 % du projet, le reste étant à la charge des autres participants.

À ce jour, toutes les initiatives phares prévues ont été lancées, ce dont on peut se féliciter.

Ce plan traduit une mobilisation sans précédent de la Commission européenne pour lutter contre le cancer. L'engagement financier est également significatif : le budget potentiel pour la mise en oeuvre des initiatives du plan s'élève à quatre milliards d'euros, provenant essentiellement du programme « L'UE pour la santé » et du programme-cadre « Horizon Europe ».

Cette mobilisation contre le cancer est complétée par la création d'une « mission cancer » au sein de la direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI). Cette mission doit permettre d'atteindre les objectifs et de déployer les initiatives du plan cancer.

Dans le domaine de la recherche, l'Union européenne dispose d'une compétence étendue, affirmée par les articles 179 et 180 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Les différents piliers du programme-cadre « Horizon Europe » financeront la recherche contre le cancer à hauteur de deux milliards d'euros.

Si ce montant potentiel est particulièrement important, nous souhaitons que les plus petites structures puissent également bénéficier de ces fonds. Dès lors, une simplification des démarches administratives nécessaires devrait être engagée.

Par ailleurs, certains projets de recherche, visant notamment à suivre les séquelles de survivants du cancer, doivent être menés sur le long terme. De ce fait, ils nécessitent un engagement financier sur plusieurs années. Il nous paraît donc essentiel d'adapter la durée du financement au projet financé.

L'Union européenne devrait prioritairement soutenir des projets qui ne présentent pas d'intérêt pour le secteur privé : c'est le cas de la recherche sur les cancers rares, notamment les cancers pédiatriques, mais aussi de la désescalade thérapeutique, qui permettrait de réduire les effets toxiques des traitements sur les malades pour un bénéfice médical égal.

De même, il serait intéressant de comprendre la hausse du nombre de cas de cancers chez les jeunes adultes afin de mettre en oeuvre des actions de prévention et de dépistage spécifiques.

En outre, conformément au plan cancer et en s'appuyant sur la « mission cancer », la Commission européenne a lancé plusieurs initiatives visant à créer des structures et des outils permettant de soutenir la recherche.

Le centre de connaissances sur le cancer a ainsi été créé le 30 juin 2021 afin de fournir les données scientifiques nécessaires pour mieux lutter contre cette maladie. Il se chargera notamment du registre des inégalités face au cancer, qui vise à recenser les disparités entre les États membres et en leur sein face au cancer. La Commission a confié à l'OCDE la collecte des données, et des rapports sont publiés tous les deux ans pour chaque État membre.

Pour soutenir les activités du centre de connaissances sur le cancer, il est nécessaire que chaque État membre dispose d'un registre du cancer permettant la collecte et l'analyse de données relatives à la maladie et aux soins. Il est donc important que la Commission européenne continue de soutenir les États membres dans la production de données. Or, contrairement à 22 États membres de l'Union européenne, la France ne dispose toujours pas d'un registre du cancer, malgré une proposition de loi adoptée par notre assemblée en 2024.

La Commission européenne développe également différents outils pour stimuler la recherche. C'est le cas de l'initiative UNCAN.eu (UNderstand CANcer), dont le but est de créer une plateforme européenne de données des recherches sur le cancer afin de mieux comprendre les mécanismes de la maladie et de repérer les personnes à risque.

De même, le futur atlas européen des images liées au cancer doit permettre le déploiement d'une infrastructure européenne pour héberger ces images.

Nous soutenons particulièrement ces initiatives. En conséquence, nous demandons à la Commission européenne de s'assurer que les deux bases de données créées soient complémentaires et interopérables, de manière à pouvoir croiser ces données.

Enfin, la Commission européenne soutient le repositionnement de médicaments déjà sur le marché. Il s'agit là d'une piste prometteuse pour développer de nouvelles thérapies.

Lors de nos auditions, notre attention a été appelée sur les difficultés de mise en oeuvre du règlement relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Ce cadre complique particulièrement les démarches administratives pour la réalisation d'essais cliniques incluant à la fois ces dispositifs et des médicaments.

En outre, le système de certification retenu est actuellement sous-dimensionné et engendre des risques de pénuries.

Le Parlement européen a adopté, le 23 octobre dernier, une résolution appelant la Commission européenne à réviser rapidement ce règlement. Nous soutenons tout spécialement cette initiative, afin que la recherche puisse se développer sur le territoire de l'Union européenne.

À présent, Bernard Jomier va aborder les questions liées à la prévention et au dépistage précoce.

M. Bernard Jomier, rapporteur. - La prévention doit être, selon nous, un axe essentiel du plan pour vaincre le cancer. Au sein de l'Union européenne, 40 % des cancers pourraient être évités, raison pour laquelle nous souhaitons voir cet axe renforcé.

Certes, des progrès ont été accomplis. La Commission européenne a proposé diverses initiatives législatives pour réduire la pollution de l'environnement et l'exposition des travailleurs aux substances cancérigènes. Elle a ainsi présenté, en octobre 2022, un paquet intitulé « zéro pollution » comprenant trois textes qui visent à garantir un environnement exempt de polluants nocifs d'ici à 2050. Deux de ces textes ont été adoptés : une directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines et une directive traitant de la qualité de l'air ambiant. Le troisième texte est toujours en discussion : il s'agit d'une proposition de directive portant sur la qualité de l'eau. Nous appelons le Parlement européen et le Conseil à s'accorder pour adopter ce texte.

La directive visant à limiter les émissions industrielles a été révisée. Le but était d'élargir son champ d'application aux activités d'extraction minière et à un plus grand nombre d'exploitations porcines et avicoles. L'adoption de nouvelles normes de performance en matière d'émissions de dioxyde de carbone pour les véhicules à moteur aura également un impact certain sur la qualité de l'air.

Les études semblent indiquer que la hausse du nombre de cancers chez les jeunes adultes, tendance on ne peut plus préoccupante, est liée à des facteurs environnementaux. Une actualisation du plan cancer devrait permettre l'application de mesures de prévention adaptées pour enrayer cette hausse.

S'agissant de l'exposition aux substances cancérogènes au travail, une directive a été adoptée pour réduire la concentration maximale d'amiante en suspension dans l'air à laquelle un travailleur peut être exposé. Les limites d'exposition professionnelle ont également été réduites pour trois substances - l'acrylonitrile, les composés du nickel et le benzène.

Bien sûr, nous soutenons ces mesures annoncées dans le cadre du plan cancer. Toutefois, d'autres initiatives n'ont pas pu être mises en oeuvre. Elles concernent le tabac, l'alcool et la lutte contre l'obésité.

Le Conseil a adopté une recommandation appelant les États membres à définir de nouveaux espaces sans tabac. De son côté, la Commission a adopté une directive déléguée afin d'étendre aux produits à base de tabac chauffé l'interdiction de mise sur le marché de produits contenant des arômes. L'effort demeure néanmoins insuffisant.

Le plan cancer devait assurer la révision de la législation relative au tabac et une révision des législations relatives à la taxation du tabac et de l'alcool, mais aucune proposition n'a été faite en ce sens, ce que nous regrettons particulièrement. Nous invitons la Commission européenne à présenter rapidement des initiatives législatives pour réduire la consommation de tabac et d'alcool et réguler les nouveaux produits à base de tabac et d'alcool mis sur le marché, notamment à destination des plus jeunes.

La lutte contre l'obésité est également essentielle pour lutter contre le cancer. Avec sa stratégie « De la ferme à la table », la Commission européenne entendait proposer une initiative législative imposant un étiquetage nutritionnel harmonisé, sur le modèle du Nutri-Score français, ainsi qu'une révision de la politique de promotion des produits agricoles.

Ces annonces ont été reprises dans le plan cancer mais elles n'ont pas été suivies d'effets. La Commission européenne indique ne pas avoir proposé d'initiatives en raison de désaccords persistants entre les États membres. Sur ce sujet également, nous l'encourageons, ainsi que les États membres, à continuer de rechercher un compromis.

Un autre sujet demeure préoccupant pour nous : l'exposition aux rayonnements ultraviolets émis par les bancs solaires. En 2009, le rayonnement ultraviolet a été classé comme cancérigène par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Aussi, nous demandons à la Commission européenne de proposer une réglementation plus stricte pour l'utilisation des bancs solaires à des fins cosmétiques.

Par ailleurs, la Commission européenne a lancé, sur les recommandations du Conseil, un vaste programme de vaccination contre le papillomavirus humain et contre le virus de l'hépatite B, afin de réduire le nombre de cancers causés par ces infections. Il s'agit là d'une initiative essentielle pour lutter contre le cancer du col de l'utérus et le cancer du foie.

Enfin, la détection précoce du cancer augmente considérablement les chances de survie. Elle permet le recours à des traitements moins invasifs et moins toxiques pour les patients. Il était donc essentiel que le Conseil adopte une recommandation sur ce sujet en vue d'actualiser ses recommandations de 2003. Celle-ci a été adoptée le 9 décembre 2022. Son champ d'application a été étendu aux cancers du poumon, de la prostate et de l'estomac, en supplément du cancer du sein, du cancer du col de l'utérus et du cancer colorectal.

Pour permettre la mise en oeuvre de cette recommandation, la Commission européenne a lancé l'action commune EUcanScreen, dotée d'un budget de 31 millions d'euros. Elle vise à renforcer les capacités des États membres en matière de dépistage du cancer et à garantir l'égalité d'accès des citoyens européens éligibles aux programmes de dépistage.

Considérant que les politiques de détection précoce du cancer sont essentielles pour réduire la mortalité, nous appelons la Commission européenne à promouvoir, au sein de chaque État membre, des politiques ciblées vers les publics concernés, afin de réduire les inégalités en la matière.

Nous souhaitons également que ces politiques prennent en compte le caractère héréditaire de certains cancers et que le dépistage concerne davantage de personnes âgées, avec une politique adaptée et des personnels mieux formés à l'oncologie gériatrique.

Enfin, notre commission a récemment adopté une proposition de résolution européenne visant à promouvoir la recherche fondamentale et l'innovation de rupture dans le domaine des ARN extracellulaires et des vésicules extracellulaires. Il s'agit là de biomarqueurs qui pourraient être utilisés pour développer des méthodes de dépistage non invasives du cancer. Nous appelons la Commission européenne à soutenir la recherche dans ce domaine.

Je cède maintenant la parole à Pascale Gruny, qui évoquera l'offre de soins et les suites de ce plan.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - S'agissant de l'offre de soins, la Commission européenne dispose d'une compétence moindre : en vertu du TFUE, la fourniture de soins de santé relève des États membres.

La Commission européenne s'efforce toutefois de développer des infrastructures de soins en favorisant la coopération et la coordination entre les structures nationales. Ainsi, elle a établi des standards pour la création de centres de cancérologie intégrés au sein de chaque État membre, et elle organise actuellement ces centres en réseau, conformément au plan cancer. En parallèle, des réseaux d'expertise permettent de développer les connaissances et les innovations sur des thématiques considérées comme critiques par la communauté européenne du cancer.

Des réseaux de référence permettent, quant à eux, de proposer un diagnostic ou un traitement pour un cas clinique particulier. L'initiative « Venir en aide aux enfants atteints d'un cancer », lancée dans le cadre du plan cancer, repose sur ces différents réseaux.

Pour financer les infrastructures de soins, les États membres peuvent recourir aux fonds de cohésion. Ces crédits permettent également de financer des équipements de pointe facilitant le dépistage du cancer. Il est donc nécessaire de conserver une enveloppe ambitieuse pour ces fonds dans le prochain cadre financier pluriannuel.

La Commission européenne tente également de développer l'accès aux traitements. Ainsi, le plan d'action SAMIRA doit garantir l'approvisionnement en radio-isotopes médicaux. L'initiative « Diagnostic et traitement du cancer pour tous » vise, pour sa part, à développer l'utilisation de la technologie du séquençage de nouvelle génération pour établir des profils génétiques des cellules tumorales. Le partage de ces profils permettra aux centres de cancérologie de recourir aux mêmes approches diagnostiques et thérapeutiques pour les patients présentant des profils comparables.

Disposant de compétences pour organiser le marché unique, la Commission européenne souhaite favoriser l'accès aux médicaments innovants et limiter les risques de pénurie. À cette fin, elle a proposé plusieurs initiatives législatives, dont le paquet pharmaceutique et une proposition de règlement pour garantir l'approvisionnement en médicaments critiques. Ces textes sont en cours d'examen.

Enfin, pour améliorer la qualité des soins, la Commission a, conformément au plan cancer, établi un programme de formation visant à favoriser la coopération entre les différents spécialistes dans le traitement du cancer.

Toutefois, la principale difficulté à laquelle sont confrontés les États membres reste le manque d'oncologues. La Commission européenne a ainsi lancé une première initiative intitulée eCAN afin de fournir un cadre de recommandations pour l'intégration de la télémédecine et de la télésurveillance dans les systèmes de soins de santé. Nous jugeons nécessaire de favoriser davantage le recours à ces pratiques, faute de mieux. Le développement de l'intelligence artificielle permettra également, à terme, de faire face au manque de radiologues.

Par ailleurs, le plan cancer détaille diverses initiatives pour améliorer la qualité de vie des patients et des survivants du cancer, avec des projets spécifiques et adaptés pour les enfants. Une carte à puce où seront stockées les informations relatives aux antécédents des survivants du cancer et les résultats de leurs examens est en cours d'élaboration. Elle permettra d'éviter la duplication inutile d'examens et de concentrer sur un seul support les informations relatives au parcours de soins.

La Commission a également créé un réseau permettant de mettre en relation des jeunes ayant survécu au cancer et leurs proches. Enfin, des discussions avec les représentants des banques et des assurances ont été engagées pour établir un code de bonne conduite visant à faciliter l'accès aux services financiers pour les survivants du cancer.

Pour notre part, nous souhaiterions que la Commission européenne aille plus loin en proposant un véritable droit à l'oubli : passé un certain délai, les survivants du cancer ne seraient plus obligés de mentionner leur maladie pour obtenir un prêt ou une assurance. En France, ce droit à l'oubli existe déjà : il s'applique après une période de cinq ans suivant la fin du traitement.

Au final, nous dressons, à mi-parcours, un bilan plutôt satisfaisant du plan européen pour vaincre le cancer. Toutefois, des inquiétudes demeurent pour l'après-2027, une fois que ce plan sera achevé.

En effet, de nombreuses initiatives lancées dans le cadre de ce plan devront être pérennisées. Si, pour certaines d'entre elles, des sources de financement nouvelles peuvent être espérées, d'autres continueront de dépendre des crédits européens. Les actions du réseau européen des centres nationaux de cancérologie pourraient, par exemple, être financées par ces centres. En revanche, le centre de connaissances sur le cancer et la carte à puce destinée aux survivants du cancer exigeront toujours des financements de l'Union européenne.

Or les budgets consacrés à la santé risquent de diminuer après 2027, avec l'adoption du nouveau cadre financier pluriannuel, alors que la Commission européenne prévoit un plan de lutte contre les maladies cardiovasculaires qui supposera des moyens financiers importants. C'est pourquoi nous demandons à celle-ci d'assurer la pérennité des initiatives du plan cancer au-delà de 2027, en prévoyant le financement des structures qui ont vocation à être pérennes.

Enfin, la Commission européenne est aujourd'hui particulièrement investie dans la lutte contre le cancer, au travers notamment de la direction générale de la santé et de la sécurité alimentaire et de la DGRI. Selon les services de la Commission européenne, il ne sera pas possible de maintenir un tel niveau d'engagement après 2027. Néanmoins, la lutte contre le cancer continuera d'impliquer de nombreux acteurs. Afin d'assurer la coordination des différentes actions de l'Union européenne, nous préconisons la création d'un institut européen de lutte contre le cancer.

Tel est le bilan que nous dressons de ce plan européen de lutte contre le cancer. Vous retrouverez l'ensemble des recommandations que nous venons de vous présenter dans le rapport d'information et dans l'avis politique que nous vous proposons d'adopter.

M. Claude Kern, président. - Merci pour vos excellentes présentations.

Mme Mathilde Ollivier. - L'Union européenne est l'un des continents où la consommation d'alcool est la plus importante au monde, entraînant une prévalence importante d'un certain nombre de cancers, notamment de cancers colorectaux.

Je veux rappeler l'importance d'avancer, à l'échelle européenne, notamment avec les producteurs de vins français qui se sont montrés assez rétifs à des mesures sur la taxation de l'alcool ou les avertissements sanitaires. Nous répondrions ainsi à une demande très forte des associations de médecins et des sociétés scientifiques.

En tant que Français, nous avons, sur ces questions, une position forte à tenir au niveau européen, une parole à porter. Nous ne pouvons pas seulement avoir une position de retrait et de soutien à notre industrie viticole, en dépit de son importance.

Je soutiendrai cet avis politique.

M. Bernard Jomier, rapporteur. - La position que nous défendons dans le rapport est claire : si le plan cancer est une initiative de la Commission européenne qui doit être saluée, s'il est globalement un bon plan, qui a apporté des financements importants et qui a permis d'avancer sur un certain nombre de points, il présente des faiblesses.

La prévention est la grande faiblesse de ce plan. Un certain nombre d'initiatives qui auraient dû être prises sur le tabac et l'alcool ne l'ont pas été. Nous en connaissons tous les raisons.

Effectivement, l'alcool est cancérigène, raison pour laquelle il est concerné par ce plan. Par ailleurs, l'augmentation très importante, depuis quelques années, des cancers chez les jeunes adultes, suscite une inquiétude particulière.

La responsabilité des différents facteurs n'est pas encore clairement précisée. Notre rapport cite une grande étude parue dans le BMJ (British Medical Journal) - une autre a été publiée aux États-Unis - qui pointe des facteurs environnementaux et des facteurs comportementaux, c'est-à-dire des habitudes de consommation.

Il convient de s'inquiéter du marketing qui cible les adolescents en proposant des produits qui mêlent l'alcool à des boissons sucrées ou à des arômes. Les fabricants de tabac font exactement la même chose. Il s'agit d'amener les très jeunes, qui ont une appétence pour le sucre, à une appétence pour la substance addictive, tabac ou alcool.

Nous devons absolument renforcer le cadre législatif. Les Parlements nationaux légifèrent, mais toujours tardivement. Il y a un défaut de législation au niveau européen.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - La prévention est la faiblesse au niveau européen, mais aussi en France.

La prévention intéresse peu en général. Pourquoi les élus, qui sont rééligibles à court terme, s'intéresseraient-ils à la prévention, qui s'inscrit sur le temps long - dix ans, quinze ans... ? Ils préfèrent des résultats concrets dont ils pourront faire état dans un document de campagne ! Or la prévention est d'autant plus nécessaire qu'elle peut permettre de réduire le déficit de la sécurité sociale.

Ce matin, l'infirmière qui participait à la table ronde sur la santé scolaire organisée par la commission des affaires sociales a dit que beaucoup d'enfants commençaient à boire de l'alcool à 11 ans. C'est assez incroyable...

Nous avons, dans l'avis politique - aux alinéas 71 et 72 -, appelé à la vigilance sur les nouveaux produits du tabac, qui, avec leurs couleurs attrayantes, constituent aujourd'hui un produit d'appel auprès des jeunes.

La Commission européenne doit être vigilante à ce que les industries mettent sur le marché, voire à ce qu'elles projettent d'y mettre, en évitant la mise sur le marché de produits nocifs.

Certes, nous avons voté, ici, un texte sur les cigarettes électroniques jetables, les « puffs », mais nous l'avons fait tardivement - et il n'y a pas eu de vote ailleurs. C'est un vrai sujet.

Les chiffres de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) montrent que, plus que celle du vin, c'est la consommation d'alcools forts et de bière qui est très importante, particulièrement chez les jeunes. Les modes de consommation changent.

Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - Je partage largement ce qu'ont dit mes collègues.

« Mieux vaut prévenir que guérir », dit le dicton. On ne peut pas dire qu'il n'y a pas de prévention dans ce pays ni dans l'Union européenne, mais je pense que la prévention n'est pas assez suivie. On envoie des courriers aux gens pour qu'ils fassent différents dépistages : ils ne les font pas. On les relance : ils ne les font toujours pas. Cela ne suffit donc pas.

On observe une augmentation des cancers chez les 15-39 ans. Elle est liée, effectivement, à l'alcool, mais aussi au tabac, à la sédentarité, à la mauvaise alimentation et à toutes les substances chimiques qui peuvent exister aujourd'hui dans l'environnement. Je pense notamment aux ouvriers exposés à l'amiante, qui peuvent attraper, très jeunes, des cancers.

Pour ma part, je pense que ce plan a le mérite d'exister et qu'il donne des moyens. Cependant, il faut un meilleur suivi.

Je regrette les difficultés rencontrées par les petites structures pour bénéficier des fonds européens. Je déplore également le principe du reste à charge pour les patients mais ceci relève de politiques nationales.

Mme Amel Gacquerre. - Merci beaucoup pour tous ces éléments.

Quid de l'inégalité entre les États membres ? Je pense aux inégalités d'accès aux oncologues, aux inégalités entre structures... Le fait que les systèmes nationaux ne soient pas identiques pose-t-il des problèmes de coordination dans la mise en oeuvre du plan ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - Je rappelle que l'Union européenne dispose uniquement d'une compétence d'appui en matière de santé.

La coordination s'est tout de même améliorée depuis le Covid-19, notamment en matière de recherche.

Le plan apporte beaucoup en termes de moyens, mais il est vrai qu'il y a des disparités dans la déclinaison au niveau des États membres - c'est vrai partout.

Par exemple, je sais que, dans un certain pays d'Europe du Nord, le dépistage du cancer du sein se fait très tôt - bien plus tôt que chez nous, où les cancers des jeunes femmes ne sont pas dépistés.

Un registre des inégalités face au cancer a justement été lancé pour les répertorier. Des fonds de cohésion sont versés afin d'apporter un soutien aux États membres en ce domaine. Au reste, les réseaux d'expertise et le réseau des centres de cancérologie sont en train de se structurer.

Je vous remercie, chère collègue, de cette question très intéressante.

Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. - Elle pourrait donner lieu à un autre rapport...

M. Claude Kern, président. - En effet.

La commission autorise la publication du rapport d'information et adopte, à l'unanimité, l'avis politique, qui sera adressé à la Commission européenne.

La réunion est close à 14 h 35.