Mercredi 5 novembre 2025

Cadre financier pluriannuel 2028-2034 - Audition de M. Michael Wimmer, directeur en charge de la simplification, de la mise en oeuvre et de l'application au sein du Secrétariat général de la Commission européenne

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

Jeudi 6 novembre 2025

Désignations de rapporteurs et questions diverses

M. Jean-François Rapin, président. - Nous devons procéder à deux nominations de rapporteurs.

En effet, j'ai déposé, avec les présidents Cédric Perrin et Dominique Estrosi Sassone, une proposition de résolution européenne visant à demander au Gouvernement français de saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour empêcher la ratification de l'accord avec le Mercosur.

Le groupe Les Républicains en a demandé l'inscription à l'ordre du jour de la séance publique, ce qui a été validé hier par la Conférence des Présidents, la date de l'examen en séance étant fixée au mardi 16 décembre après-midi. Je précise que la soirée du mardi 16 décembre sera consacrée au débat préalable au Conseil européen.

Nous examinerons le texte en commission des affaires européennes le jeudi 20 novembre. En application de l'article 73 quinquies C du Règlement, le délai limite pour le dépôt des amendements, via Ameli, est fixé au lundi 17 novembre à 12 heures. Je vous propose que soient désignés rapporteurs de cette proposition de résolution européenne nos collègues Daniel Gremillet et Didier Marie.

Il en est ainsi décidé

M. Jean-François Rapin, président. - Par ailleurs, notre collègue Jean-Michel Arnaud m'avait saisi à propos des propositions de la Commission européenne concernant le secteur de la chimie. Le Conseil vient d'arrêter hier son mandat de négociation sur l'omnibus de simplification de certaines exigences et procédures applicables aux produits chimiques. Le Conseil européen a par ailleurs demandé à la Commission de réexaminer le règlement REACH afin de stimuler la compétitivité du secteur de la chimie. Je vous propose que Jean-Michel Arnaud soit rapporteur de ce dossier avec notre collègue Karine Daniel.

Enfin, je vous informe que notre collègue Vanina Paoli-Gagin a déposé une proposition de résolution européenne visant à ériger l'alignement des intelligences artificielles en objectif stratégique pour l'Europe. Je vous propose de réévoquer ce dossier ultérieurement.

Proposition de règlement relatif au mécanisme de protection civile de l'Union et au soutien de l'Union en matière de préparation et de réaction aux situations d'urgence sanitaire, et abrogeant la décision nº 1313/2013/UE (mécanisme de protection civile de l'Union européenne) - COM(2025) 548 final - Examen de la proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité

M. Jean-François Rapin, président. - Nous examinons la proposition de règlement relatif au mécanisme de protection civile de l'Union et au soutien de l'Union en matière de préparation et de réaction aux situations d'urgence sanitaire. Le groupe de travail sur la subsidiarité avait décidé de se saisir de ce texte qui semblait soulever des difficultés au regard du respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

L'analyse de notre rapporteur, Cyril Pellevat, le confirme. Je lui laisse donc le soin de nous présenter ses observations et la proposition d'avis motivé qu'il nous soumet.

Je signale qu'à la suite de la réunion qui s'est tenue au Sénat avec nos collègues italiens, la commission des politiques de l'Union européenne du Sénat italien examine à son tour ce dossier. Son instruction a été confiée au sénateur Rosso, qui était présent à Paris.

M. Cyril Pellevat, rapporteur. - J'ai été chargé par notre commission d'examiner, au titre du contrôle de subsidiarité, la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au mécanisme de protection civile de l'Union en matière de préparation et de réaction aux situations d'urgence sanitaire, et abrogeant la décision n°1313/2013/UE (COM(2025) 548 final).

Ce travail fait suite à la résolution européenne n°147 (2023-2024) sur le mécanisme européen de protection civile, qui avait été adoptée par le Sénat sur ce mécanisme, à mon initiative et sur mon rapport conjoint avec ma collègue Gisèle Jourda.

La « sécurité civile », comme on l'appelle en France, ou la « protection civile », est tout simplement la protection des populations contre les catastrophes, qu'elles soient naturelles ou d'origine humaine : inondations, feux de forêt, accidents industriels etc. Au regard des traités européens, en particulier, de l'article 4, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne, la sécurité civile est une composante de la sécurité nationale, qui demeure une compétence exclusive des États membres. Cependant, l'Union européenne dispose d'une « compétence d'appui » qui lui permet de soutenir l'action des États membres dans le domaine de la protection civile, conformément aux dispositions de l'article 196 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

En pratique, cette solidarité entre États membres s'incarne dans le mécanisme européen de protection civile, mis en place en 2001 et encadré par la décision n° 1313/2013/UE du Conseil. Ce mécanisme comprend un centre de coordination de la réaction d'urgence (ERCC), rattaché à la Commission européenne. J'ai pu le visiter à Bruxelles en juin 2024. Il sert d'interface entre les États membres qui mettent des moyens à disposition de la réserve européenne de protection civile et ceux qui demandent son intervention. En cas de crise, il assure une coordination logistique des moyens complémentaires de secours à déployer.

Le mécanisme comprend aussi deux réserves de capacités supplémentaires qui interviennent à la demande des États membres : d'abord, la réserve européenne de protection civile, qui est constituée d'équipements d'urgence mis à disposition par les États membres sur la base du volontariat, et une seconde réserve européenne, appelée RescEU, qui est dotée de capacités qui font défaut aux États membres, comme les hélicoptères bombardiers d'eau, et qui intervient en dernier ressort.

Ce mécanisme européen de protection civile est un grand succès, parce qu'il est souple et adapté aux demandes des États membres, qui gardent toujours la main sur l'opérationnel. La proposition d'avis rappelle que notre résolution européenne n°147 a souhaité un renforcement du mécanisme en matière de coordination logistique des secours et une meilleure prise en compte des régions ultra-périphériques (RUP) dans ses interventions.

Or, la proposition de règlement que nous examinons ce matin, bouleverse cet équilibre des traités. Elle prend acte du contexte de menaces multiples entourant l'Union européenne, depuis la répétition des catastrophes naturelles jusqu'aux cyberattaques et au risque d'agression militaire contre un ou plusieurs États membres. Elle prévoit, en conséquence, une sensibilisation accrue de la population aux menaces, une politique de stockage stratégique ainsi qu'un renforcement de la coopération public-privé et de la coopération civilo-militaire.

Dans ce cadre, la proposition de règlement révise le mécanisme européen de protection civile pour en faire, sous l'autorité de la Commission européenne, l'organe européen de gestion de toutes les crises, dont les urgences sanitaires, et pour le transformer en outil de coordination de coopération civilo-militaire. Simultanément, ce texte est un règlement intégré au projet de futur Cadre financier pluriannuel (CFP), qui prévoit le montant du budget du mécanisme européen pour la période 2028-2034 : ce dernier serait fixé à 10,6 milliards d'euros contre 3,3 milliards sur la période 2021-2027.

Plusieurs articles de cette proposition sont intéressants : la proposition d'avis motivé salue ainsi les dispositions qui incitent les États membres à accroître leurs efforts de préparation et leur coopération dans ce domaine. Il faut aussi mentionner les dispositions du texte qui renforceraient les modalités de remboursement des interventions des services de secours des États membres au profit du mécanisme.

Cependant, de nombreuses dispositions du texte semblent contraires au principe de subsidiarité. D'abord les articles 19, paragraphe 8, 20, paragraphe 1, 21, paragraphe 2, 25, paragraphe 3, 26, et 32, paragraphe 1, qui donnent des pouvoirs de coordination de toutes les crises à la Commission européenne, ainsi qu'au Centre de coordination de la réaction d'urgence (ERCC) et à une nouvelle plateforme de coordination des crises (le « hub »), qui lui sont rattachés. En effet, ni les traités ni les articles qui servent de base juridique au texte, ne permettent l'octroi d'un tel pouvoir à la Commission européenne.

Or, en matière de secours et de protection civile, le respect de la subsidiarité n'est pas une option mais une nécessité opérationnelle. Tous les secouristes et sapeurs-pompiers le disent : la protection civile doit être coordonnée au plus près du terrain et pas par un organe administratif éloigné.

Enfin, la coordination des crises est déjà assurée au niveau européen par le Conseil et par son dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise (IPCR). Ce pouvoir s'exerce dans le cadre du déclenchement de la clause de défense mutuelle prévue à l'article 222 du TFUE et dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Le Conseil est alors secondé par le Service européen pour l'action extérieure (SEAE). Les nouveaux pouvoirs et la nouvelle plateforme feraient donc « doublon » et sèmeraient de la confusion dans l'organisation de la réponse aux catastrophes.

La proposition d'avis motivé rappelle que, pour respecter la subsidiarité et l'efficacité, le mécanisme doit être activé exclusivement à la demande des États membres, avec des contributions volontaires, et que les opérations doivent être placées sous leur direction.

L'article 5 pose également un problème au titre de la subsidiarité, parce qu'il étend le champ de compétences du mécanisme au domaine de coopération civilo-militaire ; même chose pour les articles 19 et 20, qui permettraient à la Commission d'avoir connaissance des capacités militaires mobilisables. Or, les traités visés par la proposition ne permettent pas d'attribuer de telles fonctions au mécanisme ni à la Commission européenne. Comme le Sénat l'a rappelé dans son avis motivé n°145 sur le programme européen pour l'industrie de la défense (EDIP), adopté le 5 juin 2024 sur le rapport de nos collègues Dominique de Legge, Gisèle Jourda et François Bonneau, la défense demeure une compétence nationale et la PSDC est une politique par nature intergouvernementale.

Dans le droit actuel, la coopération civilo-militaire est intégrée dans les accords bilatéraux qui lient la France à ses partenaires, sur décision du Président de la République, chef des armées, mais aussi dans la PSDC. Dans ce cadre, c'est le Conseil qui peut mobiliser tous les moyens civils et militaires. Enfin, pour 23 des 27 États membres, dont la France, cette réflexion se déroule au sein de l'OTAN.

Ici encore, l'intervention de la Commission européenne serait donc inutile et redondante avec ces dispositifs.

Dans ce contexte, les dispositions des articles 15b, 19, paragraphe 4, 20, paragraphe 6, et 25, paragraphe 4, contredisent le principe de subsidiarité, en instituant de nouvelles procédures de transmission d'informations, y compris classifiées, et en instaurant une capacité opérationnelle et analytique pour l'ERCC.

Premièrement, si ces échanges d'information étaient cantonnés à la protection civile, ils seraient superflus, les canaux actuels étant efficaces. Mais le projet de la Commission européenne est tout autre : le champ de compétences du mécanisme étant étendu à la coopération civilo-militaire, ces articles renforceraient le partage d'informations classifiées de la part des services de renseignements des États membres, ce qui accroîtrait le risque de « fuites » et d'ingérences étrangères. Ces dispositions sont donc contraires à la sécurité et à la défense nationales. Je vous propose en conséquence que nous demandions l'insertion, dans la proposition de règlement, d'une clause de sauvegarde de la sécurité et de la défense nationales.

L'article 9, par son imprécision, remet également en cause le rôle et la spécificité des États membres, en rendant possible d'associer des pays tiers et des organisations internationales au fonctionnement du mécanisme. Cette possibilité d'association existe déjà dans le droit en vigueur mais seulement pour dix pays tiers associés, qui ont un statut à part. Dans sa rédaction actuelle, la proposition de règlement rendrait possible l'octroi de financement mais aussi la diffusion d'informations classifiées, sur un pied d'égalité avec les États membres : ce n'est pas acceptable, les États membres doivent bénéficier en priorité des capacités du mécanisme, pour des raisons d'autonomie stratégique.

En conséquence, je vous propose de constater que les dispositions que je viens d'évoquer sont contraires au principe de subsidiarité.

Enfin, permettez-moi de dire quelques mots de l'intégration du dispositif européen de réaction aux urgences sanitaires au sein du mécanisme européen de protection civile, prévu aux articles 4 et 34. Ce rapprochement reposerait sur une base juridique fiable (l'article 168 du TFUE) et ne semble pas poser de difficultés au regard du principe de subsidiarité. Il suscite en revanche trois interrogations de proportionnalité et de fond que je livre à votre réflexion.

Tout d'abord, pourquoi cette intégration de l'Hera (Health Emergency Preparedness and Response Authority) dans le mécanisme de protection civile alors que les deux instruments donnent aujourd'hui pleinement satisfaction ? La Commission européenne n'en démontre nulle part la valeur ajoutée. Ensuite, comment les deux mécanismes vont-ils s'articuler, alors que les acteurs, la temporalité et le périmètre de ces organes sont différents ? Enfin, au nom de la rationalisation du budget pluriannuel de l'Union européenne, la Commission européenne s'abstient de préciser quelle part de l'enveloppe globale serait consacrée au mécanisme et reviendrait à l'HERA. Or, un tel « fléchage » budgétaire paraît nécessaire pour assurer la pérennité des actions efficaces de l'HERA contre les risques graves de santé publique et du mécanisme européen de protection civile contre les catastrophes.

M. Jean-François Rapin, président. - Nous nous doutions qu'il y avait un sujet de subsidiarité, notre rapporteur nous le confirme. Nous transmettrons le texte adopté à nos collègues italiens afin qu'il alimente leurs réflexions sur ce dossier.

M. Jacques Fernique. - Je rejoins le rapporteur. La subsidiarité est nécessaire à l'efficacité de la protection civile, ce n'est pas qu'une question de droit. Il faut une coopération efficace de terrain, qui évite une recentralisation et des structures redondantes, et nous devons aussi prendre garde aux questions de souveraineté, dès lors que des pays tiers sont associés aux opérations.

M. Jean-François Rapin, président. - La coopération fonctionne déjà bien, je l'ai constaté, par exemple lorsque la Slovaquie a dépêché des méga-pompes dans le Pas-de-Calais, pour nous aider à lutter contre les inondations : elles avaient été utiles pour désengorger la région de Saint Omer. En fait, la coopération fonctionne assez bien dès lors qu'on s'arrange entre États membres. Même chose pour la lutte contre les incendies de forêts, mais cela n'enlève rien à la nécessité que nous avons de renouveler notre matériel.

Mme Gisèle Jourda. - Il va falloir mettre plus de moyens dans la protection civile, surtout que les catastrophes comme les grands incendies, par exemple, se déclenchent souvent dans plusieurs pays en même temps, sollicitant partout les matériels. On a pu le constater l'été dernier lors des incendies dans l'Aude. Nous avons besoin d'une réflexion capacitaire, pour tous les sinistres, mais aussi d'une directive européenne claire, nous le savons bien - mais sa rédaction bute sur les droits différents en matière de propriété privée.

M. Jean-François Rapin, président. - Effectivement, nous avons besoin d'un cadre normatif européen clair, mais les États membres devraient aussi définir des règles nationales claires. Nous avons, fin février dernier au Sénat, adopté à l'unanimité une proposition de loi visant à soutenir les collectivités territoriales dans la prévention et la gestion des inondations, mais elle n'a toujours pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. J'ai évoqué hier ce dossier avec le ministre chargé des relations avec le Parlement. Il n'est pas normal qu'on perde autant de temps, alors que nous savons que d'autres inondations peuvent se produire. Nous avons le soutien du président Larcher sur ce dossier, il faut avancer !

Mme Christine Lavarde. - Les députés veulent fusionner notre texte avec une autre proposition de loi relative aux catastrophes naturelles.

M. Jean-François Rapin, président. - Peut-être, mais le résultat, c'est qu'on attend depuis le mois de mars...

M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Merci pour vos commentaires. Je vous confirme que les acteurs de la protection civile attendent tous un texte avec impatience. Nous devons toutefois rester vigilants sur le respect de la répartition des compétences prévue par les traités.

La commission adopte, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne, disponible en ligne sur le site du Sénat.

Proposition de règlement relatif à l'établissement d'un cadre visant à renforcer la disponibilité et la sécurité de l'approvisionnement en médicaments critiques ainsi que la disponibilité et l'accessibilité des médicaments d'intérêt commun, et modifiant le règlement (UE) 2024/795 (médicaments critiques) - COM(2025) 102 final - Examen de la proposition de résolution européenne et de l'avis politique

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

Réunion du Conseil européen du jeudi 23 octobre 2025 - Audition de M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de l'Europe

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Le compte rendu sera publié ultérieurement.