Dialogue social et continuité du service public de transport (Urgence - Suite)

Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion en urgence du projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

Discussion des articles

Article premier

M. Jacques Gillot. - On comprend l'intention du rapporteur d'inscrire les transports scolaires parmi les dessertes prioritaires mais, dans les zones rurales, chaque desserte est prioritaire. Ce sont les mêmes entreprises qui, outre-mer, assurent le transport de voyageurs et le transport scolaire. En Guadeloupe, il y a 221 circuits de ramassage pour 16 300 élèves. Un enfant pourra-t-il aller au collège alors que son aîné ne pourrait aller au lycée ? A suivre la commission, c'est l'ensemble du réseau qui devient prioritaire. Mieux vaut tenir compte des contraintes de ces zones, d'ailleurs peu touchées par les grèves. Il n'y a donc pas lieu d'appliquer le présent dispositif au transport scolaire dans les zones rurales et outre-mer.

M. Nicolas Alfonsi. - Si je ne suis pas intervenu dans la discussion générale, c'est parce qu'après des années de cohabitation, de ni-ni et d'immobilisme, ce texte, bien dans l'air du temps, ne me choquait pas. Cependant, avec une grande habileté dialectique, le gouvernement a traité des transports scolaires dans l'article premier. N'aurait-il pas mieux valu commencer par s'interroger sur l'existence d'un service public, puis s'assurer qu'on est bien en présence d'une entreprise et d'une collectivité organisatrice ? Depuis quand les transports maritimes ou aériens ne sont-ils pas des transports réguliers ? Aussi bien est-il tentant d'étendre ces dispositions, comme le rapport le suggère, non sans hypocrisie, au service postal, à l'éducation nationale... Il y a là une erreur de conception !

L'Alsace, l'Ile-de-France ont été évoquées hier ; permettez-moi de parler de la Corse. La SNCM n'assure-t-elle pas après appel d'offres un service public ? Or, si vous n'y prenez garde, le texte ne s'appliquera qu'à la ligne Ajaccio-Bastia que vous n'avez jamais empruntée quand vous êtes venus en Corse.

Vous avez déclaré que ce texte n'était pas seulement fait pour la SNCF mais pour tout le monde et qu'il fallait respecter les engagements pris pendant la campagne électorale. A Porto-Vecchio, lors d'une visite du Président de la République à laquelle vous assistiez, monsieur le ministre, quelques naïfs ont cru que ce texte les concernerait mais, hélas, ce n'est pas le cas, et les mesures que vous proposez s'arrêteront à Marseille...

M. Retailleau vous parlera sans doute de l'Ile d'Yeu et de Belle-Ile-en-Mer. J'estime, quant à moi, que les liaisons maritimes avec la Corse, financées de façon d'ailleurs assez scandaleuse par la collectivité nationale, doivent assurer un service minimum. Tout doit être fait pour éviter ce que nous avons connu l'an dernier quand un bateau a été arraisonné dans les conditions que l'on sait !

Si nous votons cet article conforme, le principe d'égalité entre les usagers sera rompu au motif que certains prennent le métro tous les jours alors que les autres prennent le bateau une fois par semaine.

M. Jean-Luc Mélenchon. - M. le président de la commission a rappelé que les usagers attachaient une grande importance à la continuité du service public. Mais il faut prendre en compte toutes les perturbations qui affectent la continuité du réseau ferroviaire et pas seulement les grèves qui ne représentent que 3 % des cas. Les autres perturbations sont dues aux intempéries, aux signaux d'alarme intempestifs, aux suicides, à l'usure du matériel, et j'en passe. Si vous étiez soucieux de la continuité, vous traiteriez de tous ces problèmes, mais vous ne vous en prenez qu'à la grève !

Et puis, pourquoi ne viser que les transports terrestres de voyageurs ? Pourquoi pas le service postal ? Parce que l'UMP a voté sa dérégulation totale ! (Exclamations à droite)

M. Josselin de Rohan. - C'est Jospin qui l'a voulu !

M. Jean-Luc Mélenchon. - En définitive, vous stigmatisez la grève dans les transports ferroviaires. Heureusement que les parlementaires de gauche ne sont pas là que pour faire de la figuration et qu'ils se veulent une puissance de contrôle : quand le Premier ministre annonce que cette loi est tellement bonne qu'elle pourra être étendue à l'éducation nationale, nous disons non ! Pourquoi l'éducation nationale ? Parce que c'est une des administrations les plus emblématiques et les mieux organisées de ce pays ! Croyez-vous sérieusement que la question de l'accueil des enfants soit à ce point insurmontable qu'il faille remettre en cause le droit de grève de ces personnels ? Localement on règle les problèmes par des moyens moins brutaux.

Vous dites, monsieur le ministre, qu'il faut avoir le courage de poser les questions légitimes. Soit ! Mais pourquoi prévoir qu'au bout de huit jours de grève les travailleurs des services publics devront se prononcer par bulletin secret sur la poursuite de la grève ? Sont-ils, à eux seuls, les dépositaires de l'intérêt général ? Non, c'est la Nation toute entière ! Et pourquoi ne pas prévoir de les faire se prononcer sur leur patron, surtout lorsqu'il devient évident qu'il envoie l'entreprise dans le mur, qu'il souhaite la délocaliser ou qu'il prépare un plan social ? Leur demande-t-on leur avis ? Que nenni ! On veut simplement qu'ils votent contre leurs collègues ! (Exclamations à droite)

Notre but est de réconcilier les Français avec la politique, dites-vous. C'est vrai, et tous les benêts qui ne s'y sont pas intéressés jusqu'à présent vont rapidement se rendre compte que la politique, elle, à l'intention de s'intéresser à eux ! (Applaudissements à gauche)

Mme la présidente. - Amendement n°62 rectifié, présenté par MM. Retailleau et Darniche.

I.- Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :

transport terrestre régulier

insérer les mots :

et maritime

II.- Après les mots :

transport terrestre régulier

procéder à la même insertion dans le troisième alinéa (1°) et dans le dernier alinéa (2°) de cet article.

M. Bruno Retailleau. - Je ne vous apprendrai rien en vous disant que la France possède des îles et qu'elle s'est engagée à assurer la continuité territoriale. On a souvent l'impression qu'il ne s'agit que de destinations touristiques mais c'est oublier que des milliers de personnes y vivent toute l'année. Il ne s'agit pas ici d'un texte de revanche sociale mais de faire en sorte que ces personnes, souvent les plus fragiles, soient protégées. Pour elles, le bateau est souvent le seul lien avec le continent et il leur permet d'assurer des besoins essentiels. Et dans ces îles ce n'est pas comme en Corse, il n'y a ni hôpital, ni spécialistes, ni enseignement secondaire ou supérieur. De même, pour les démarches administratives, il faut prendre le bateau pour se rendre à la préfecture.

Or, avec ce texte qui va globalement dans le bon sens, on risque une rupture d'égalité des usagers devant les services publics. Faudra-t-il créer une citoyenneté de deuxième zone pour les insulaires ou prendra-t-on en compte leurs besoins spécifiques ?

Un rapport sera publié en octobre afin de préciser le champ d'application de la loi et les extensions possibles, mais je crains qu'il ne permette pas d'inverser la tendance. Nous devons prendre en compte le cri de ces insulaires qui ont pour seul défaut d'être bien loin de l'Ile-de-France mais pour qui les liens avec les services fondamentaux passent par le bateau. (Applaudissements à gauche et au centre)

Mme la présidente. - Amendement n°64 rectifié, présenté par M. Alfonsi.

I. - Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

transport terrestre régulier

par les mots :

transports terrestre et maritime réguliers

II. - Procéder à la même substitution dans le troisième alinéa (1°) et dans le dernier alinéa (2°) de cet article.

III. - Procéder à la même substitution dans l'intitulé du projet de loi.

M. Nicolas Alfonsi. - En 1975, le président Valéry Giscard d'Estaing et son Premier ministre, Jacques Chirac, voulurent que le principe de la continuité territoriale devienne réalité. Les trains devaient arriver à Marseille et les bateaux assurer la liaison avec la Corse. Pour ce faire, des subventions furent allouées. Aujourd'hui, elles se montent à 170 millions, ce qui est considérable : deux tiers sont consacrés à l'aérien et le tiers restant au maritime. Si la cour des comptes contrôlait le bon usage de cette manne publique, je ne m'en plaindrais pas !

Loin d'adopter une position maximaliste, je demande simplement que les Corses soient considérés comme tout le monde. Si le service minimum n'est pas appliqué à la Corse, au moins pourra-t-on dire qu'il existe. Personne ne conteste qu'il revient à l'autorité organisatrice des transports de définir le nombre de lignes, la fréquence et l'amplitude horaire. Je me demande bien au nom de quoi on pourrait repousser cet amendement de bon sens. J'attends avec impatience votre réponse, Monsieur le ministre !

Certes, j'ai souvent été bien seul lorsque j'ai exposé mes opinions, et je vous rappelle qu'à l'occasion des accords de Matignon, nous n'avions été que deux à voter contre. Le référendum, voulu par l'actuel Président de la République, a eu lieu et vous connaissez la suite. Je souhaite donc que vous preniez en compte mes arguments, ce qui permettra de vous éviter des déboires ultérieurs. (Applaudissements au centre. M. Retailleau applaudit aussi)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Nous nous sommes penchés avec attention sur ces deux amendements car il est vrai que les iliens ont besoin d'une liaison régulière avec le continent.

Certes, il existe des difficultés en Corse. Mais ce projet de loi vise les transports quotidiens réguliers, qui plus est terrestres, auxquels on ne peut pas assimiler les liaisons maritimes entre l'île et le continent. Pour autant, la commission a pris en compte le problème en déposant l'amendement n°15 rectifié. Celui-ci vise à ce que le gouvernement présente un bilan d'évaluation de ce texte avant le 1er octobre 2008. Si l'expérience est positive dans le secteur des transports terrestres, on pourra étendre le service minimum à d'autres secteurs du transport.

Pour l'heure, la commission est défavorable à ces amendements.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Avis également défavorable. J'ai rappelé à plusieurs reprises l'objet de ce texte : pour répondre aux besoins essentiels des Français, nous devons en priorité nous attaquer aux transports terrestres. Si nous étendons le service minimum aux transports maritimes, il faudra également l'élargir aux transports aériens.

La question du service minimum doit être envisagée sous l'aspect politique -comment tenir nos promesses ?-, l'aspect juridique -que peut-on faire ?-, et enfin, l'aspect pratique -que sait-on faire ? Or, au plan pratique, la SNCF et la RATP ont déjà adopté des procédures de dialogue social, ce qui rend possible l'instauration du service minimum. Rien de tel n'a été expérimenté par les entreprises de transports maritimes. De plus, le gouvernement n'a pas engagé la concertation avec les entreprises de transports maritimes, leurs autorités organisatrices et les partenaires sociaux. Si les entreprises de transport maritimes veulent avancer, le gouvernement est prêt à les accompagner. Mais, pour l'heure, tenons-nous en au secteur terrestre. De toute façon, ce texte bénéficiera à tous !

M. Jean Desessard. - Ah, la mer ! On s'y perdrait ! (Rires à gauche)

M. Xavier Bertrand, ministre. - Je n'ai pas coulé... (Sourires à droite)

Mme Gisèle Printz. - Pas encore !

M. Josselin de Rohan. - En tant qu'ancien responsable de la direction générale des transports maritimes ....

M. Jean-Luc Mélenchon. - Vous étiez déjà réac !

M. Josselin de Rohan. - ...et élu local, je mesure les problèmes posés par l'insularité. Les problèmes soulevés par MM. Alfonsi et Retailleau sont réels mais différents. En Corse, les grèves organisées par les salariés de la SNCM, souvent ciblées durant les vacances, désorganisent le trafic maritime. Mais la SNCM ne détient pas le monopole des transports. Les voyageurs peuvent emprunter Corsica Ferries et les autres compagnies...

M. Robert Bret. - Ou prendre l'avion !

M. Josselin de Rohan. - Dans les petites îles, la situation est différente. Ce sont des compagnies privées qui assurent la desserte et les conflits sociaux sont peu nombreux...

M. Robert Bret. - Surtout en Vendée ! (Sourires à gauche)

M. Josselin de Rohan. - L'État, et donc le contribuable, ont consenti beaucoup d'effort pour remettre à flot la SNCM. En contrepartie de cet effort, l'entreprise doit respecter davantage les usagers et adopter de nouvelles règles. Certes, le gouvernement ne peut pas régler tous les problèmes à la fois, mais il devra, tôt ou tard, ouvrir ce dossier avec les syndicats et la direction de la compagnie. On ne peut pas négliger la question du transport maritime, car elle est essentielle pour le développement des liens économiques entre la Corse et le continent ! (Vifs applaudissements à droite et au centre)

M. Philippe Nogrix. - Après la Corse et la Vendée, parlons de Bretagne. Dans ma région, les liaisons maritimes sont quotidiennes, il n'y a pas d'alternative à la mer. Monsieur le ministre, vous nous expliquez que l'on ne peut pas adopter ces amendements parce que le gouvernement n'a pas engagé la concertation avec les entreprises de transport maritime. Eh bien, c'est une erreur ! En Bretagne, on ne prend pas le bateau pour partir en vacances. On embarque pour aller travailler, se rendre au collège et au lycée et se faire soigner à l'hôpital.

Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager à rencontrer les acteurs du transport maritime dès la semaine prochaine ? En Bretagne, nous avons besoin du bateau et de la mer, comme les Franciliens du métro et du RER ! Si vous voulez véritablement assurer la continuité territoriale, il ne faut pas vous limiter aux transports terrestres et à l'Ile-de-France.

M. Bruno Retailleau. - En déposant cet amendement, je ne défends pas seulement la Vendée : il y a les îles normandes, méditerranéennes... et pas seulement l'Ile-de-France.

Les compagnies privées assurent les liaisons entre la terre et les petites îles durant l'été, mais non hors des saisons touristiques où seule la société publique travaille. Or, comme l'a bien montré M. Nogrix, les insulaires doivent continuer de pouvoir se rendre à l'hôpital, au travail, au collège et au lycée.

Monsieur le ministre, si vous prenez l'engagement loyal et définitif -pour peu que cela existe encore !- de traiter ce problème rapidement, je suis prêt à retirer mon amendement. Mais je maintiens que la question de l'insularité avait toute sa place dans un texte qui vise à mieux protéger les usagers. Il en va de l'universalité du service public et de la continuité territoriale !

M. Nicolas Alfonsi. - Visiblement, le gouvernement et la commission spéciale ont des difficultés à reconnaître l'insularité de la Corse. C'est pourtant un fait géographique, matérialisé par des liaisons maritimes quotidiennes. Le transport maritime ne serait pas un transport public régulier ? Mais de qui se moque-t-on ! C'est pourtant la collectivité territoriale qui définit les horaires et jours de circulation et accorde des subventions.

Attendre le bilan d'évaluation pour agir ? Ce n'est pas raisonnable. En vérité, le problème est politique. La Corse compte certains éléments, comme l'on dit pudiquement, qu'il faut tenir à l'écart. (Vives protestations à droite) C'est pour vous permettre de me démentir que je maintiens mon amendement. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit)

M. Xavier Bertrand, ministre. - Monsieur Alfonsi, si j'étais timoré, je ne défendrais pas devant le Sénat le service minimum dans les transports, dont on parle depuis vingt ans. Je crois au volontarisme politique et la question du transport maritime ne se réduit pas à la Corse, à la Vendée ou à la Bretagne.

J'ai entendu le message que m'ont adressé les auteurs des amendements et M. de Rohan cinq sur cinq. Je vous certifie que l'État accompagnera la concertation que mèneront les autorités organisatrices avec les entreprises de transport maritime. Sur le reste, je ne peux prendre d'engagement à la place de M. Bussereau.

Monsieur Alfonsi, la question n'est pas d'ordre politique, elle est d'ordre pratique !

L'amendement n°62 rectifié est retiré.

L'amendement n°64 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°65, présenté par MM. Krattinger et Gillot.

Compléter le premier alinéa de cet article par deux phrases ainsi rédigées :

Pour les transports scolaires, les dispositions de la présente loi ne s'appliquent qu'aux agglomérations de plus de 100 000 habitants. Ces dispositions ne s'appliquent pas dans les départements d'outre-mer.

M. Yves Krattinger. - Nous proposons pour notre part de réduire le périmètre de la loi. En milieu rural et dans les territoires d'outre-mer, les grèves dans les transports scolaires sont quasi inexistantes. Les organisateurs de ces transports -à commencer par l'Association des Départements de France- craignent que ce texte, en perturbant l'ordre établi, n'entraîne demain des tensions et des conflits. Le transport scolaire est par définition un service adapté, presque un service minimum : il n'est pas question de choisir quels élèves seront transportés ! Ce sont souvent de petites entreprises, qui assurent peu de lignes : comment le président du conseil général choisira-t-il le circuit qui sera desservi ? (M. Desessard applaudit)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Avis défavorable. Monsieur Gillot, pourquoi les usagers ultramarins n'auraient-ils pas les mêmes droits que ceux de métropole, en matière d'information, de régularité, de dialogue social ? Idem pour les habitants d'agglomérations de moins de 100 000 habitants : cet amendement est contraire au principe d'égalité des citoyens devant la loi. S'agissant du transport scolaire, la commission a entendu les préoccupations des autorités organisatrices. Mais on ne peut pas dire aux parents que leurs enfants ne bénéficieront pas des dispositions de la loi !

La réponse sera apportée par l'article 4, amendé par la commission, qui donne une large capacité d'action aux autorités organisatrices de transport.

Mme Nicole Bricq. - Inapplicable !

M. Xavier Bertrand, ministre. - Défavorable : cela pose un problème juridique d'égalité devant la loi. Les examens -visés par un amendement de la commission- se déroulent aussi bien dans les petites agglomérations que dans les grandes !

M. Jacques Gillot. - Je n'ai jamais dit qu'il fallait exclure l'outre-mer du champ de la loi : mon intervention ne visait que les transports scolaires.

L'amendement n°65 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par MM. Portelli et plusieurs de ses collègues.

Après le premier alinéa de cet article, insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

Ces services sont essentiels à la population car ils permettent la mise en oeuvre des principes constitutionnels suivants :

- la liberté d'aller et venir ;

- la liberté d'accès aux services publics, notamment sanitaires, sociaux et d'enseignement ;

- la liberté du travail ;

- la liberté du commerce et de l'industrie.

M. Christian Cambon. - Amendement de clarification : le Conseil constitutionnel considère que ces principes constitutionnels limitent le droit de grève.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Avis favorable. L'article 4 reprend ces exigences.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Avis très favorable à ce texte qui mentionne la liberté d'accès.

L'amendement n°16 rectifié bis est adopté.

L'article 1er, modifié, est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente. - Amendement n°75, présenté par M. Billout et les membres du groupe CRC.

Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les dispositions de la présente loi ne peuvent faire l'objet d'utilisation comme conditions de recevabilité dans le cadre de la délégation de service public par appel d'offres.

M. Michel Billout. - La délégation d'une mission de service public donne lieu à un appel d'offre de la part de la collectivité, les offres étant librement négociées par l'autorité responsable, qui choisit le délégataire. On voit mal une entreprise organiser la consultation des représentants du personnel, prévue à l'article 4, alors qu'elle n'est pas assurée d'obtenir le marché ! Afin d'être la plus concurrentielle possible, elle risque en outre d'accepter des conditions extrêmement contraignantes pour les salariés : il y a là un réel danger de dumping social.

Les modifications par avenant des contrats en cours risquent par ailleurs d'entraîner des conflits entre l'entreprise et les autorités organisatrices de transports. La présence dans le cahier des charges des éléments relatifs au service minimum ne devrait pas constituer un critère de sélection lors de l'appel d'offre.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Avis défavorable : cet amendement empêcherait les autorités organisatrices de transport d'utiliser les dispositions de cette loi comme critère lors de l'appel d'offre.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Même avis.

L'amendement n°75 n'est pas adopté.

Article 2

I. - Dans les entreprises de transport mentionnées à l'article 1er, l'employeur et les organisations syndicales représentatives engagent des négociations en vue de la signature, avant le 1er janvier 2008, d'un accord cadre organisant une procédure de prévention des conflits et tendant à développer le dialogue social. Dans ces entreprises, le dépôt d'un préavis de grève ne peut intervenir qu'après une négociation préalable entre l'employeur et les organisations syndicales représentatives, dans les conditions prévues par l'accord cadre.

Des négociations peuvent également être engagées au niveau de la branche pour organiser une procédure de prévention des conflits et développer le dialogue social. Les accords de branche qui prévoient des règles d'organisation ou de déroulement de la négociation préalable mentionnée au premier alinéa s'appliquent dans les entreprises de transport où aucun accord cadre n'a pu être signé. L'accord cadre régulièrement négocié s'applique, dès sa signature, en lieu et place de l'accord de branche.

Un décret en Conseil d'État fixe les règles d'organisation et de déroulement de la négociation préalable mentionnée au premier alinéa dans les entreprises de transport où, à la date du 1er janvier 2008, aucun accord cadre n'a pu être signé et aucun accord de branche ne s'applique. Les règles d'organisation et de déroulement ainsi prévues respectent les conditions posées au II. L'accord de branche ou l'accord cadre régulièrement négocié après cette date s'applique, dès sa signature, en lieu et place de ce décret.

II. - L'accord cadre prévu au premier alinéa détermine notamment :

1° Les conditions dans lesquelles une organisation syndicale représentative procède à la notification, à l'employeur, des motifs pour lesquels elle envisage de déposer le préavis de grève prévu à l'article L. 521-3 du code du travail ;

2° Le délai dans lequel, à compter de cette notification, l'employeur est tenu de réunir les organisations syndicales représentatives. Ce délai ne peut dépasser trois jours ;

3° La durée dont l'employeur et les organisations syndicales représentatives disposent pour conduire la négociation préalable mentionnée au I. Cette durée ne peut excéder huit jours à compter de cette notification ;

4° Les informations qui doivent être transmises par l'employeur aux organisations syndicales représentatives, en vue de favoriser la réussite du processus de négociation, ainsi que le délai dans lequel ces informations doivent être fournies ;

5° Les conditions dans lesquelles la négociation préalable entre les organisations syndicales représentatives et l'employeur se déroule ;

6° Les modalités d'élaboration du relevé de conclusions de la négociation préalable, ainsi que les informations qui doivent y figurer ;

7° Les conditions dans lesquelles les salariés sont informés des motifs du conflit, de la position de l'employeur, de la position des organisations syndicales représentatives, ainsi que les conditions dans lesquelles ils reçoivent communication du relevé de conclusions de la négociation préalable.

III. - Les accords cadres signés les 30 mai 1996 et 23 octobre 2001 à la Régie autonome des transports parisiens et le 28 octobre 2004 à la Société nationale des chemins de fer français, ainsi que les accords relatifs à la prévention des conflits conclus dans les entreprises de transport avant le 1er juillet 2007 demeurent applicables jusqu'à la conclusion de nouveaux accords, qui seront soumis aux dispositions du présent article.

M. Robert Bret. - Il n'y a pas lieu de durcir la réglementation du droit de grève : le nombre et la durée des conflits ont largement diminué, la prévisibilité du trafic a été améliorée. Les responsables des grandes entreprises de transport public ont tous affiché leur préférence pour la voie contractuelle -voyez Mme Idrac. Quant aux exemples étrangers de service minimum, ce sont des échecs notoires.

Cet article instaure deux périodes de préavis successives : une première phase de négociation préalable, puis le délai légal de cinq jours déjà prévu par le code du travail. Cette procédure constitue un obstacle bureaucratique caractérisé au droit de grève.

Il serait plus opportun de veiller à l'application de la législation existante, notamment au respect par l'employeur de son obligation de négocier.

La combinaison des articles deux et trois aggrave la contrainte sur l'exercice du droit de grève. Vous prévoyez que l'accord-cadre précise les conditions dans lesquelles les salariés sont informés des motifs du conflit et de la position des parties : cette prérogative relève de la liberté d'expression des syndicats et de leurs délégués. Le gouvernement commet l'erreur de poser le principe d'un règlement légal sans s'interroger sur la nature des réformes souhaitables pour assurer la continuité du service public. La défense de la qualité des prestations servies aux usagers est liée aux conditions de travail des personnels et au respect des droits syndicaux.

M. Jean-Luc Mélenchon. - Que la négociation soit le meilleur moyen d'empêcher le conflit, personne ne le conteste. Mais l'idée qui sous-tend ces dispositions n'est-elle pas que les travailleurs abusent du droit de grève, qu'ils y recourent trop facilement et qu'il faudrait par conséquent les contraindre ? Or, tel n'est pas le cas. Non seulement la grève coûte, car contrairement à la légende que vous colportez, les jours de grève ne sont pas payés, mais elle est aussi source de stress. Croyez-vous qu'il soit facile, pour un cheminot, de laisser un train à quai ? (MM. Braye et Gournac marquent leur étonnement) Il n'est aucun travailleur qui ne préfère un bon accord à un conflit. Le préavis est d'ailleurs fait pour cela. Pourquoi ne fonctionne-t-il pas ? Parce que l'autre partie décide d'aller à l'épreuve de force.

Vous faites continuellement référence aux expériences étrangères. C'est un mal bien français : chaque fois que l'occasion se présente de dénigrer notre pays, on se bouscule au portillon. (M. le ministre proteste que ce n'est pas son cas)

M. Alain Gournac. - Vous vous y connaissez !

M. Jean-Luc Mélenchon. - Dans le débat de la semaine passée, je n'ai cessé d'entendre dire du mal des universités françaises !

La vérité, c'est que les expériences étrangères ne fonctionnent pas. Vous vantez l'exemple allemand ? Mais en Allemagne, le droit de grève est considérablement plus réduit qu'en France. L'une des revendications des syndicats allemands est d'ailleurs de pouvoir exercer un droit de grève à la française, c'est-à-dire pour des raisons qui ne sont pas nécessairement liées à leur entreprise. La démocratie est plus étendue en France qu'en Allemagne.

M. Alain Gournac. - C'est comme ça qu'on a hérité de Cohn-Bendit !

M. Jean-Luc Mélenchon. - Mêmes éloges sur l'Italie, sous le registre : « Si les Italiens en sont capables... ! » Mais le système italien ne fonctionne pas. Et cessons donc de parler de la grève en général, comme s'il s'agissait d'une abstraction. Attachons-nous à des cas précis. À quoi est liée une grève qui se déclenche soudainement ? À l'émotion qui suit l'agression d'un contrôleur, un accident... Aucun règlement ne l'arrêtera : le droit de grève s'apparente ici à un droit de retrait. Vous aurez beau imaginer tous les modes de préavis, aucun ne fonctionnera.

L'exemple portugais ? Il ne marche pas non plus. Les pays de forte tradition syndicale où la centrale jouerait un rôle modérateur ? Mais quand la coupe est pleine, rien n'arrête les travailleurs qui ont décidé de se mettre en grève.

Dans tous les pays où le droit de grève est réglementé, les grèves sont plus sauvages et plus dures, parce que quand la loi est à ce point contraire aux libertés fondamentales, la liberté reste la plus forte.

Si donc l'article part d'une bonne intention, je crains qu'il ne se traduise par une aggravation de la situation. La loi ne sera pas respectée. (Applaudissements à gauche.)

Mme la présidente. - Amendement n°37, présenté par M. Krattinger et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la deuxième phrase de cet article, remplacer les mots :

sont concernés par les motifs mentionnés dans le préavis

par les mots :

ont été consultés sur leur intention de participer à la grève

M. Yves Krattinger. - Nous proposons une réécriture complète du premier paragraphe. Le souhait du gouvernement et de sa majorité d'aller vite, conformément au voeu du Président de la République, pourrait conduire, en l'espèce, à entraver le dialogue social. La date butoir du 1er janvier 2008 est impossible à tenir. Les organisations syndicales et les représentants des employeurs que nous avons entendus en commission s'accordent tous sur ce point. Dans les entreprises ou des accords ont été conclus, il a fallu entre un an et dix-huit mois, parfois plus, pour parvenir à régler tous les problèmes techniques. Et vous voulez contraindre toutes les entreprises à conclure un accord en six mois ? Mais peut-être, sous couvert de favoriser le dialogue social, avez-vous décidé que les règles de la négociation préalable seraient fixées par un décret en conseil d'État ? C'est un point à éclaircir, monsieur le ministre.

Nous proposons que la date butoir soit reportée au 1er janvier 2009, et surtout que la procédure de prévention des conflits soit d'abord négociée au niveau de la branche. Le souci des usagers exige, au-delà de l'injonction, que la négociation ait lieu. La RATP, la SNCF et les grosses régies d'agglomération ne sont pas seules concernées. Le transport terrestre régulier de voyageurs est le fait d'une multitude de petites sociétés, voire, dans le secteur rural, de micro-entreprises, souvent dépourvues de représentants du personnel. Elles ne seront pas en mesure de négocier un accord-cadre. Prétendre les y contraindre, c'est s'en remettre, de fait, au décret. Depuis la loi Fillon de 2004, déjà consacrée au « dialogue social », vous êtes revenus, à la demande du MEDEF, sur le principe de faveur. Jusqu'alors, un accord d'entreprise ne pouvait déroger à un accord de branche qu'en vertu de dispositions plus favorables. Il représentait donc une garantie pour les salariés de la branche et une source de sécurité juridique. Ce bouclier ayant sauté, vous proposez que l'accord de branche devienne subsidiaire à l'accord d'entreprise. Nous y sommes d'autant plus opposés que la validité d'un accord d'entreprise n'est subordonnée qu'à l'absence d'opposition d'un ou de syndicats non signataires. Ils doivent certes être représentatifs dans l'entreprise, c'est-à-dire avoir recueilli au moins la moitié des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles à condition, conformément à l'arrêt de la cour de cassation du 20 décembre 2006, que le quorum ait été atteint, reste que la prééminence des accords de branche est un principe essentiel du droit du travail. C'est pourquoi nous rappelons, dans le dernier alinéa, que les accords de branches qui prévoiront des modalités d'organisation et de déroulement de la négociation préalable ont vocation à s'appliquer de manière automatique dans toutes les petites entreprises.

Pas d'incitation réelle à l'accord de branche, des accords d'entreprise difficiles à négocier et à mettre en oeuvre : seul compte, dans votre esprit, le décret en conseil d'État. Le dialogue social est un rideau de fumée. Afin de lui rendre un peu de vigueur, nous proposons donc que, dans les entreprises où il pourra aboutir, l'accord-cadre fasse l'objet d'une majorité d'engagement, c'est-à-dire qu'il soit signé par une ou des organisations majoritaires. La précaution n'est pas superflue.

La procédure restrictive que vous mettez en place pour le dépôt du préavis de grève ne peut s'appliquer que si les motifs du préavis sont liés au fonctionnement de l'entreprise. Si tel n'était pas le cas, quel pourra être le contenu de la négociation entre représentants des salariés et employeurs ? Le constat d'échec sera inévitable. Et si le motif du préavis n'est pas lié à l'entreprise, il n'y a pas lieu d'empêcher les salariés d'exercer sans délai leur droit de grève individuel. À moins que votre intention ne soit de rendre illégale une grève interprofessionnelle dans les entreprises de transport. Compte tenu des intentions que l'on pressent dans les rangs de votre majorité, la question mérite d'être posée et appelle, monsieur le ministre, une réponse claire.

Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission.

Dans la seconde phrase du premier alinéa du I de cet article, après les mots :

et les organisations syndicales représentatives

insérer les mots :

qui envisagent de déposer le préavis

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Il s'agit de prendre acte de la pratique existant dans les entreprises de transport : avant le dépôt du préavis, la négociation n'a lieu qu'entre l'employeur et le ou les syndicats représentatifs envisageant de déposer le préavis, à l'exclusion des autres. Cette pratique allège la procédure de négociation, et évite de débattre avec des syndicats qui ne seraient pas concernés.

Sans cette précision, les représentants des conducteurs pourraient négocier les conditions de travail des commerciaux.

Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission.

Rédiger comme suit la première phrase du deuxième alinéa du I de cet article :

Des négociations sont également engagées au niveau de la branche en vue de la signature, avant le 1er janvier 2008, d'un accord organisant une procédure de prévention des conflits et tendant à développer le dialogue social.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Comme le souhaite le groupe socialiste, un accord de branche signé avant le 1er janvier 2008 évitera le recours au décret en conseil d'État pour les petites entreprises dépourvues de structures de négociation.

Mme la présidente. - Amendement n°68, présenté par M. Billout et les membres du groupe CRC.

Supprimer le troisième alinéa du I de cet article.

M. Guy Fischer. - Il n'appartient pas au pouvoir réglementaire de fixer les conditions de la négociation préalable mentionnée au premier alinéa.

Dans sa décision du 22 juillet 1980, le Conseil constitutionnel a rappelé que le législateur devait déterminer les limites du droit de grève, sans aucune délégation au profit du gouvernement ni de l'exploitant du service. Une intervention législative est donc indispensable pour aménager l'exercice du droit de grève, comme le prévoient l'alinéa 7 du Préambule de 1946 et l'article 34 de la Constitution, qui réserve à la loi le soin de déterminer les principes fondamentaux du droit du travail et du droit syndical ainsi que les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice de leurs libertés publiques.

En renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin d'organiser la négociation préalable, l'article 2 confie au pouvoir réglementaire un élément substantiel des modalités d'exercice du droit de grève. Se déclarant incompétent au profit du pouvoir réglementaire, le législateur violerait l'article 34 de la Constitution.

Enfin, il serait pertinent d'éviter les dispositions unilatérales opposables -voire s'opposant- aux partenaires sociaux !

Mme la présidente. - Amendement n°17 rectifié, présenté par MM. Portelli et plusieurs de ses collègues.

Rédiger comme suit le dernier alinéa du I de cet article :

Un décret en Conseil d'État fixe les règles transitoires d'organisation et de déroulement de la négociation préalable mentionnée au premier alinéa dans les entreprises de transport. Il entrera en vigueur lors de la promulgation de la présente loi et s'applique à défaut d'un accord de branche ou un accord cadre régulièrement négocié.

M. Christian Cambon. - Pour que l'esprit du dialogue social entre en vigueur sans attendre le 1er janvier 2008, un décret en Conseil d'État devrait fixer les règles transitoires applicables en l'absence d'accord de branche et d'accord-cadre.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - La commission est défavorable à l'amendement n°27, qui réécrit l'article 2 -en particulier les dispositions relatives aux négociations de branche, où il impose le principe d'un accord majoritaire alors que les organisations syndicales souhaitent examiner cette question dans le cadre plus général des négociations sur le dialogue social. On ne peut en décider au détour d'un amendement. En outre, vous restreignez le champ de la négociation préalable.

Vous dites que les négociations préalables seraient sans objet lorsque le motif de conflit serait interprofessionnel ou national. Mais direction et syndicats discuteront non pas sur l'origine du conflit, mais l'entreprise pourra s'organiser et les syndicats tenir compte des réalités locales. (Murmures désapprobateurs à gauche)

L'amendement n°68 aborde un risque pratiquement écarté : le décret en Conseil d'État n'est plus qu'un filet de sécurité.

Avis défavorable à l'amendement n°17 rectifié, dont les auteurs veulent aller trop vite.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°27, car, si nous souhaitons la négociation d'accords de branche, nous comptons sur les accords d'entreprise. Je ne suis pas pessimiste quant aux résultats. Cinq mois suffiront !

Je demande le retrait de l'amendement présenté par M. Cambon. Certains jugent le délai de cinq mois insuffisant, M. Cambon le juge excessif. J'en déduis que le gouvernement a choisi la bonne solution. (Sourires)

L'amendement n°1 est ambigu, car une éventuelle négociation doit être conforme à la loi du 4 mai 2004, c'est-à-dire conduite après convocation de toutes les organisations représentatives. Le gouvernement s'en remet donc à la sagesse de la Haute assemblée.

Avis favorable à l'amendement n°2.

Enfin, je ne partage pas l'opinion de M. Fischer, car le décret en Conseil d'État ne serait pris qu'après un éventuel échec des négociations. Or, je suis persuadé que le dialogue social sortira renforcé de ce texte.

L'amendement n°27 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Je mets aux voix l'amendement n°1.

M. Michel Billout. - Limiter la négociation aux organisations syndicales représentatives ayant notifié leur intention de déposer un préavis de grève serait contraire à l'instauration d'un dialogue social plus abouti et à une meilleure prévisibilité du service.

Toutes les organisations syndicales doivent participer aux négociations ayant pour but de prévenir les conflits.

Supposons qu'une négociation préalable soit engagée avec une organisation syndicale représentative ayant notifié son intention de déposer un préavis et que les discussions aboutissent à un accord : si cela ne convient pas aux autres organisations syndicales, elles seront incitées à notifier à leur tour leur intention de déposer un préavis ! La situation serait ubuesque !

Dans le même esprit, nous proposons par ailleurs que seuls les accords majoritaires conclus dans ces conditions puissent être validés. (M. Desessard applaudit)

M. Jean-Pierre Godefroy. - Je suis tout à fait d'accord avec M. Billout.

Si vous voulez ouvrir le dialogue au sein de l'entreprise, la négociation doit impliquer l'ensemble des organisations syndicales. À défaut, un éventuel accord conclu entre la direction et une organisation syndicale ferait tomber la négociation dans le piège tendu à l'article 3 : l'interdiction de déposer un nouveau préavis sur le même sujet.

Il est donc souhaitable que tous les syndicats présents dans l'entreprise participent à la négociation, même si chacun reprend ses billes à son issue. (Applaudissements à gauche)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Cet amendement répond à une demande de la RATP et de la SNCF et permet de traiter les situations où les organisations syndicales et les métiers sont multiples. En ne visant que ceux qui « envisagent de déposer un préavis », nous laissons la porte ouverte à d'autres comme à la direction de l'entreprise.

L'amendement n° 1 est adopté, ainsi que l'amendement n°2.

Mme Annie David. - Je voterai l'amendement 68. Mme le rapporteur nous dit que le délai supplémentaire permettra aux organisations syndicales de prendre en compte la réalité du terrain ; mais c'est bien ce qu'elles font lorsqu'elles commencent une grève ! Vous nous reprochez à l'envi d'avoir des positions sectaires, voire archaïques, vis-à-vis du Medef ...

M. Dominique Braye. - C'est bien de le reconnaître !

M. Josselin de Rohan. - Quel aveu !

Mme Annie David. - Les clichés que vous nous servez sur les syndicats ne sont plus de mise !

L'amendement n° 68 n'est pas adopté.

M. Christian Cambon. - Je profite de l'absence de M. Portelli pour retirer l'amendement 17 rectifié (sourires), qui était le fruit de notre enthousiasme pour le projet de loi.

L'amendement n° 17 rectifié est retiré.

Mme la présidente. - Amendement n°3, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission.

I. Au troisième alinéa (2°) du II de cet article, après les mots :

les organisations syndicales représentatives

insérer les mots :

qui ont procédé à la notification

II. Après les mots :

les organisations syndicales représentatives

procéder à la même insertion au quatrième alinéa (3°), au cinquième alinéa (4°), au sixième alinéa (5°) et au huitième alinéa (7°) du II de cet article.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Amendement de coordination avec l'amendement 1.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Sagesse, par coordination.

L'amendement n° 3 est adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°74, présenté par M. Billout et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Compléter le septième alinéa (6°) du II de cet article par les mots :

attendu que seuls les accords majoritaires peuvent prétendre être validés

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous souhaitons affirmer la nécessité d'un accord majoritaire et sommes par conséquent en total désaccord avec les amendements contreproductifs de la commission. Si l'on veut vraiment renforcer le dialogue social, il faut se prémunir contre toute possibilité de conflit. Nous portons ici une ancienne revendication des organisations syndicales, qui a toute sa place dans ce texte.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Avis défavorable, cet amendement est contraire à l'esprit qui anime la commission.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Outre que l'amendement contrevient à la loi de mai 2004, le groupe CRC entend redéfinir les règles de la représentativité au moment même où les partenaires sociaux en débattent.

L'amendement n° 74 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°18 rectifié, présenté par MM. Portelli et Beaumont, Mme Gousseau, MM. Garrec, Dassault et Cambon, Mme Payet, MM. Béteille, Pozzo di Borgo et Retailleau, Mme Sittler et Papon, MM. Grillot, Biwer, Milon, Seillier, Cléach et Huré, Mme Férat, Malovry et Henneron, M. Émin, Mme Mélot et M. de Richemont.

Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'accord cadre prévu au premier alinéa du I est transmis, dans un délai de 15 jours à compter de sa signature par les parties, pour avis conforme au Représentant de l'Etat afin qu'il apprécie le respect de l'intégralité des dispositions prévues par le II de l'article 2.

En cas d'avis non conforme, les parties disposent d'un délai de trois mois pour répondre aux observations du Représentant de l'Etat.

M. Christian Cambon. - Nous souhaitons donner eu représentant de l'État la possibilité de contrôler le respect des conditions fixées par la loi pour la rédaction des accords.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Retrait, sinon rejet. Une telle formalité supplémentaire risque de ralentir la procédure. Je crois à la négociation.

M. Xavier Bertrand, ministre. - J'ajoute que cet amendement revient à confier au préfet le contrôle de légalité d'accords qui sont soumis au ministre en charge du travail, celui-ci devant examiner les modalités de conclusion de ces accords, non leur contenu. Les règles actuelles s'articulent plutôt bien.

L'amendement n° 18 rectifié est retiré.

Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission.

Compléter le III de cet article par les mots :

, et, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2009

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Il faut fixer un délai rapproché à la SNCF - on ne sait à quelle date la renégociation de l'accord existant sera effective - et à la RATP, dont l'accord doit être renégocié d'ici 2011.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Je suis partagé. Si je souhaite que le dialogue social se développe partout et pour tous, je comprends l'argumentation de Mme Procaccia. Sagesse.

M. Yves Krattinger. - Cet amendement démontre qu'un report général d'un an est nécessaire. Il s'agirait d'une demande de la SNCF et de la RATP ...

M. Xavier Bertrand, ministre. - Ce n'est pas cela !

M. Yves Krattinger. - Notre demande concernant les accords de branche n'est donc pas si stupide. Est-il bien raisonnable, d'ailleurs, de tout remettre à plat dans les entreprises où existent des accords ? (Marques d'approbations à gauche)

M. Jean-Pierre Godefroy. - Je suis surpris que M. le ministre s'en remette à la sagesse.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Je lui fais confiance !

M. Jean-Pierre Godefroy. - Il m'avait pourtant affirmé, lors de son audition en commission, qu'il n'y aurait pas de délai. Veut-on casser des accords parfois conclus avec difficulté et plutôt satisfaisants ? Pourquoi prendre le risque de nouvelles perturbations en agitant ce chiffon rouge ? (Applaudissements à gauche)

M. Michel Billout. - Le texte déposé sur le bureau du Sénat avait le mérite d'avoir été corrigé par rapport au projet « virtuel », pour tenir compte des accords actuels de prévention des conflits ; mais la commission veut remettre en cause ces accords signés à la RATP et à la SNCF, au motif qu'ils ne seraient pas satisfaisants. Pourtant, syndicats comme direction reconnaissent que l'accord réduit les conflits sociaux : on se demande, madame la rapporteur, ce qu'est pour vous un accord satisfaisant. En fait, vous tournez le dos au dialogue social, tout en prétendant agir en son nom, c'est un comble !

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Nous ne remettons pas en cause des pratiques sociales, nous les mettons en conformité avec la loi. Sinon, la SNCF et la RATP fonctionneraient sans tenir compte de ce qui s'applique aux autres entreprises, ce ne serait pas satisfaisant. La présidente de la SNCF estime que les déclarations de concertation immédiate sont encore insuffisantes. Le dialogue préalable sera désormais obligatoire, c'est un progrès. Chacun sait que la concertation est également perfectible à la SNCF.

M. Dominique Braye. - Très bien !

M. Jean Desessard. - M. le ministre se réclame, comme le Président de la République, de la culture du « résultat ». A la RATP et à la SNCF, les accords en vigueur représentent bien un résultat du dialogue social, mais M. le ministre veut les changer !

M. Dominique Braye. - Pour un meilleur résultat !

M. Jean Desessard. - Pour un résultat virtuel ! Monsieur le ministre, vous êtes pris en défaut : ce que vous voulez en fait, c'est restreindre le droit de grève ! Cette loi est démagogique, inefficace, vaniteuse et hypocrite ! (Applaudissements à gauche)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Voici les chiffres de la SNCF : 84 % des préavis de grève n'ont pas été précédés d'une concertation : la procédure nouvelle devra être appliquée à la SNCF.

M. Xavier Bertrand, ministre. - Je ne souhaite pas priver le législateur de sa compétence : vous allez donner une base légale aux accords, il ne faut pas que certains s'exonèrent de leur application. Nous voulons que le dialogue social s'applique obligatoirement, c'est la bonne voie pour avancer !

Mme Nicole Bricq. - Vous n'êtes plus partagé !

L'amendement n°4 est adopté.

La séance est suspendue à 17 h 5

présidence de Mme Michèle André,vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.