SÉANCE

du jeudi 24 janvier 2008

56e séance de la session ordinaire 2007-2008

présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président

La séance est ouverte à 9 h 45.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Pouvoir d'achat (Urgence - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, pour le pouvoir d'achat.

Discussion des articles (Suite)

Article 4

I. - Les deux premières phrases du deuxième alinéa du d de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

« L'augmentation du loyer qui en résulte ne peut excéder la variation d'un indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre et qui correspond à la moyenne, sur les douze derniers mois, de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers. »

II. - Le présent article est applicable aux contrats en cours. La valeur moyenne sur quatre trimestres de l'indice de référence des loyers résultant de l'article 35 de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est remplacée par la valeur de l'indice de référence des loyers issu de la présente loi à la date de référence de ces contrats.

III. - L'indice défini au I fait l'objet d'une évaluation dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi. Cette évaluation porte notamment sur les effets de cet indice sur le marché du logement et la construction de nouveaux logements.

Mme Annie David.  - L'indexation de l'indice de révision des loyers sur les prix à la consommation, si l'on en croit le Gouvernement, renforcera le pouvoir d'achat des familles. C'était déjà le but que poursuivait M. Borloo, lorsqu'il a créé l'IRL. Cet indice, intégrant tous les coûts réels de la construction et du logement, devait créer les conditions d'une revalorisation des aides personnelles au logement et d'une meilleure fixation des loyers. Bien que cette démarche ait été cohérente, les locataires en ont pâti : en raison des tensions sur le secteur de la construction, les loyers ont progressé plus rapidement que l'inflation, en moyenne 2,78 %, contre 2 % par an.

Cet article, conforme à un souhait du Président de la République, renforcera le pouvoir d'achat des ménages de manière modeste : 2 euros d'économie pour un loyer de 1 000 euros ! Nous vous proposerons donc de l'améliorer, en utilisant notamment la possibilité, donnée à l'article 18 de la loi Mermaz-Malandrin, de bloquer ou de limiter par décret les loyers dans les zones où l'on manque de logement.

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le c) de l'article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aucune révision ne peut intervenir entre le 1er janvier et le 31 décembre 2008. »

M. Thierry Repentin.  - Nous vous proposons de bloquer les loyers durant un an pour permettra aux plus modestes de souffler après des hausses de loyer dans le secteur privé de 3 à 5 % par an et d'importantes augmentations du prix du gaz. Depuis 2000, les loyers ont augmenté deux fois plus vite que l'inflation, amputant toujours plus le pourvoir d'achat des ménages comme l'a montré une étude récente de l'association 60 millions de consommateurs. Les causes de ce phénomène sont multiples : augmentations en cours de bail ou lors de la relocation et pour 26 % -ce n'est pas rien !- des hausses décidées hors de tout cadre légal. Depuis 2005, la part du budget des ménages affectée au logement a atteint le niveau historique de 24,7 %, voire 50 % dans certains cas. La mesure que nous proposons à titre transitoire permettrait d'apaiser les tensions sur le marché locatif sans compter qu'elle freinerait la progression des charges. Au reste, il ne s'agit que de généraliser une disposition que le Gouvernement a prise en juillet 2007 pour l'Ile-de-France. Mais pourquoi seulement l'Ile-de-France ?

M. Guy Fischer.  - En effet, ce n'est pas juste !

M. Nicolas About, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Cette mesure, nous l'avons constaté, ne sert à rien puisque le retard est rattrapé au moment de la libération des loyers. Elle aggraverait la crise du logement. Défavorable.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.  - Même avis. J'ajoute qu'une telle décision - ce texte comporte déjà bien des mesures en faveur des locataires- découragerait les propriétaires de logements vacants à mettre leurs biens sur le marché, ce que le Gouvernement ne souhaite évidemment pas.

M. Guy Fischer.  - Le groupe CRC votera cet amendement. Pourquoi limiter le blocage des loyers à l'Ile-de-France ? Et les autres régions ? Les loyers dans le parc de l'Opac départemental du Rhône, dont je suis administrateur, vont augmenter de 5 % cette année : 2 % au 1er janvier et 3 % au 1er juillet. Le sénateur Mercier vous le confirmera. Cela n'est pas supportable pour des familles déjà confrontées à l'augmentation des prix de l'énergie ! A la limite, je comprendrais que l'on refuse le blocage des loyers pour inviter les propriétaires à louer, mais ces logements vacants par immeuble entiers, construits grâce aux mesures de défiscalisation de Robien et Borloo, ne trouvent pas preneurs parce que leurs loyers sont trop élevés ! Dans le département du Rhône, 50 à 60 000 demandes de logement social ont été enregistrées, un record historique que nous n'avions pas atteint depuis la Libération. Pour les plus modestes, la hausse des APL de 2,76 % au 1er janvier ne couvrira même pas l'inflation.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.  - Les conseils d'administration des organismes de l'HLM fixent l'augmentation des tarifs, dans la limite de l'indice de revalorisation des loyers (IRL).

L'équilibre actuel des relations entre bailleurs et locataires est extrêmement fragile, c'est pourquoi je regrette de ne pas adresser plus de signaux positifs aux propriétaires. En effet, la pénurie actuelle impose de respecter un équilibre.

Enfin, aucune mesure particulière n'est proposée pour l'Ile-de-France, même si je souhaite organiser des conférences sur le logement dans cette région, où un dispositif encadre les loyers depuis la loi de 1989. Rien de nouveau ne vous est proposé en la matière.

M. Thierry Repentin.  - Notre rapporteur dit que la mesure préconisée pourrait aggraver la crise du logement. Si tel était le cas, le Gouvernement ne l'appliquerait pas en région parisienne.

Au demeurant, nous ne demandons pas son extension automatique, mais seulement la possibilité pour le Gouvernement de l'appliquer en cas d'augmentation excessive des loyers dans un secteur géographique donné.

Actuellement, les locataires d'Ile-de-France sont les seuls protégés.

Par ailleurs, M. About dit aussi qu'un blocage des loyers induirait un rattrapage lors du renouvellement du bail ou de la relocation.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Non !

M. Thierry Repentin.  - Or, j'ai déposé un amendement qui l'empêcherait.

M. Nicolas About, rapporteur.  - J'ai dit que le rebond interviendrait à la libération des loyers.

L'amendement n°48 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article 235 ter ZA du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - A compter du 1er janvier 2008, les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation des hydrocarbures ou de distribuer les produits issus de cette transformation sont assujetties à une contribution égale à 45 % de l'impôt sur les sociétés calculées sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés aux I et IV de l'article 219. »

Mme Odette Terrade.  - À de multiples reprises nous avons alerté le Gouvernement sur le poids excessif de la facture énergétique des ménages, au moment où les profits réalisés par les compagnies pétrolières renforcent le légitime sentiment d'injustice ressenti par nos concitoyens.

Alors que le prix du brut frôle les 100 dollars, alors que les bénéfices record du CAC 40 ont atteint 97 milliards d'euros en 2006, les factures énergétiques explosent : en trois ans, le coût supporté par les ménages à ce titre s'est accru de 7 milliards d'euros. La hausse vertigineuse des prix des carburants et du gaz, ce dernier abusivement indexé sur le cours du pétrole, handicape les secteurs en difficulté, comme la pêche ou les transports.

Les compagnies pétrolières ont largement profité de cette situation puisque leurs coûts de production stagnent alors que les prix de vente des liquides pratiqués par Total ont augmenté de 9 % en un an, avec un résultat net du groupe atteignant 9,6 milliards d'euros fin septembre 2007. Or, une large part de ses bénéfices est procurée par les ménages des grands pays consommateurs, comme la France. Afin de rééquilibrer cette situation, qui pèse sur le pouvoir d'achat des ménages, nous proposons de majorer l'impôt acquitté par les sociétés pétrolières afin qu'elles participent au redressement des comptes publics. Je rappelle que leurs bénéfices sont largement thésaurisés.

Il y a quelques semaines, le Gouvernement s'était opposé à un amendement identique, disant qu'une disposition du collectif budgétaire aurait la même finalité, sans accroître le taux d'imposition des entreprises concernées. Cet objectif au moins a été atteint puisque la mesure, par ailleurs sympathique, introduite à l'initiative de M. Lefebvre est anecdotique, puisqu'elle représente une quinzaine de millions d'euros.

Il serait anormal que les pouvoirs publics n'introduisent dans un texte sur le pouvoir d'achat aucune solution efficace pour atténuer les difficultés rencontrées par nos concitoyens pour se déplacer et se chauffer.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Ne représentant pas la commission des finances, je n'ai pas d'avis tranché sur ce sujet.

L'idée n'est pas forcément mauvaise...

Mme Odette Terrade.  - Quand même !

M. Nicolas About, rapporteur.  - ...mais que vient-elle faire dans ce texte ?

Mme Odette Terrade.  - Elle influence le pouvoir d'achat !

M. Nicolas About, rapporteur.  - Je propose qu'elle soit examinée en loi de finances.

Mme Odette Terrade.  - Et en loi de finances, on nous a demandé de trouver un autre véhicule !

M. Nicolas About, rapporteur.  - Je ne pense pas que l'on vous ait alors suggéré la loi sur le pouvoir d'achat.

Par nature, ce sujet relève de la loi de finances. Je m'en remettrai alors à l'avis de la commission des finances. Pour l'instant, celle des affaires sociales est défavorable.

M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - (Sur divers bancs, on se félicite d'entendre la commission des finances) Il n'y a pas photo ! (Rires) Il est exclu d'augmenter les contributions. Les bénéfices réalisés par les sociétés pétrolières ne légitiment pas leur surtaxation, car la recherche pétrolière coûte cher. Ces entreprises pourraient peut-être développer la participation de leur personnel (marques d'intérêt sur de nombreux bancs) mais là, vous poussez un peu. (Rires)

Avis défavorable.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Vous abordez un thème très important. D'ailleurs, les deux commissions sont sensibles à votre objectif.

Partageant votre souhait, le Gouvernement a accepté en première lecture du collectif budgétaire un amendement présenté par M. Lefebvre instituant une contribution exceptionnelle, assise sur les provisions pour hausse inscrite au bilan des sociétés pétrolières. Le Gouvernement l'a complété en créant un fonds social pour le chauffage, financé par les entreprises pétrolières. Les sommes ainsi collectées soutiennent le pouvoir d'achat des ménages les plus modestes.

Aujourd'hui, je demande le retrait ou le rejet de l'amendement.

M. Robert del Picchia.  - Hier, le baril de pétrole coûtait 87 dollars ; il atteint 87,2 dollars ce matin. Nous sommes loin des 100 dollars !

Mme Odette Terrade.  - Vous suivez de près les cours boursiers...

M. Robert del Picchia.  - Le prix du pétrole est un sujet important.

L'amendement n°84 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°85, présenté par M. Billout et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 462-3 du code de commerce, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L.... - Le Conseil de la concurrence est obligatoirement consulté par les collectivités de plus de 10 000 habitants sur tout renouvellement de contrat de délégation de service public et la passation des appels d'offres définis par décret relatifs à la distribution et l'assainissement de l'eau. Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Lors du débat sur le projet de loi devant favoriser la concurrence, nous avions dénoncé son insuffisance dans le secteur de l'eau et de l'assainissement. Le Gouvernement n'avait alors pas vu les rapports entre le prix de l'eau et le texte examiné. Aujourd'hui, ce rapport est patent puisque les charges correspondantes augmentent sans que les rémunérations ne suivent.

Les associations de consommateurs dénoncent depuis des années les rentes de situation constituée par les grands groupes du secteur, devenu un marché au lieu de rester à service public.

Ainsi, Veolia -anciennement Générale des eaux, qui existait depuis 150 ans- réalise sur l'eau et l'assainissement des profits qui irriguent de nouveaux champs d'activité. Suez-environnement -autrefois Lyonnaise des eaux-...

M. Guy Fischer.  - Des mafieux !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - ...vient de recevoir, avec la privatisation d'EDF, un soutien considérable pour ses stratégies futures.

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - De façon plus marginale, subsiste la Saur, filiale du groupe Bouygues, qui souhaite se recentrer sur le bâtiment pour la trésorerie et sur l'audiovisuel pour les bénéfices.

Enfin, quelques collectivités territoriales ont maintenu la gestion en régie directe. Sans surprise, le prix moyen est alors inférieur à celui payé lorsqu'une concession existe au profit -c'est le terme- d'un opérateur privé.

La qualité des prestations a suscité de nombreux conflits ces dernières années. Ainsi, les usagers de Castres ont fait condamner la collectivité concédante et la compagnie bénéficiaire. De même, les Stéphanois ont obtenu une minoration sensible des tarifs de l'eau. Pour des raisons analogues, la ville de Paris a repris en 2005 le service public de l'eau. Dans le cadre d'une démocratie participative, elle met en place une régie directe pour assurer un service de qualité au plus grand nombre.

Eu égard aux sommes en jeu, toute concession de service public venant à terme devrait être soumise, dans les communes les plus importantes, à l'avis éclairé du Conseil de la concurrence quant à la qualité des prestations servies. Loin de restreindre la portée du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, notre amendement donne les armes aux communes pour pouvoir exercer cette liberté en toute connaissance de cause.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Ce dispositif est lourd (exclamations sur les bancs CRC) et il infantilise les collectivités territoriales, qui ont déjà toute possibilité de recueillir les informations utiles.

Mme Christine Boutin, ministre.  - A cette objection, j'ajouterai qu'existe une jurisprudence clairement établie depuis la loi Sapin de 1993, qui encadre strictement la procédure de passation des délégations de service public et a d'ores et déjà imposé le respect des principes de transparence et de mise en concurrence. Tout recours à une délégation de service public doit faire l'objet d'une délibération de principe de l'assemblée délibérante de la collectivité concernée.

J'ajoute que, depuis la loi du 27 février 2002 sur la démocratie de proximité, les communes de plus de 10 000 habitants ont l'obligation de soumettre pour avis tout projet de délégation de service public à la commission consultative des services publics locaux à laquelle sont notamment associés des représentants d'associations locales.

L'amendement n°85 n'est pas adopté.

M. le Président.  - Amendement n°86, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - La commission des Affaires économiques du Sénat réalise avant le 31 janvier 2008 un rapport examinant le respect par les sociétés délégataires du service public de l'eau de leurs obligations, notamment en matière de rémunération du service. A cette fin, seront notamment étudiés la réalité des montants des profits réalisés par ces entreprises, en charge d'un service public ; les bilans comptables de ces entreprises, notamment au regard des critiques formulées dans les lettres d'observation et rapports de la Cour des Comptes ; l'effectivité du contrôle par les autorités délégantes du respect par les sociétés délégataires de leurs obligations légales et contractuelles ; la capacité réelle des élus, au vu de la grande technicité de cette question, de garder la maîtrise de la politique de l'eau conduite sur leur territoire de compétence ; les moyens nécessaires pour redonner aux élus la maîtrise de la distribution et de la répartition des usages de l'eau sur ce territoire.

Mme Odette Terrade.  - Une certaine tension existe dans notre pays sur le coût des services publics de l'eau et de l'assainissement, une tension largement entretenue par les pratiques assez peu transparentes des compagnies fermières, lesquelles appartiennent à des groupes intégrés. Cette tension est développée par la colère grandissante des usagers et des associations de défense des consommateurs.

L'une d'entre elles, UFC-Que Choisir, publie régulièrement des études sur le prix de l'eau, études fondées sur des paramètres objectifs. J'ajoute que la Cour des comptes a produit de multiples rapports sur les nombreux travers constatés dans la gestion du service public local de l'eau et de l'assainissement. Près de 1 500 rapports sont accessibles sur le site de la Cour sur cette question ! Le rapport de 2003 intitulé La gestion du service public local d'eau et d'assainissement comportait de nombreuses observations et recommandations précises qu'il conviendrait de traduire dans les faits. La Cour indique entre autres que certaines collectivités ont pu, dès lors qu'elles en avaient la volonté, conclure avantageusement l'accord de délégation. Elle cite un certain nombre de cas de baisse sensible des tarifs à la suite d'une remise en concurrence du contrat. Elle relève qu'un nombre important de communes n'ont toujours pas institué de périmètres réglementaires de protection autour des points de prélèvement. Et la Cour des Comptes de s'appuyer sur les travaux de la fédération nationale des collectivités concédantes quant aux objectifs de qualité de service.

C'est donc pour y voir clair et permettre une plus grande transparence du service public de l'eau que nous vous soumettons cet amendement.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Cet amendement est vraiment très original : voici que le Sénat fixerait dans la loi son ordre du jour ! Sans doute faudrait-il prévoir des sanctions pour le cas où la commission des affaires économiques ne tiendrait pas le délai ?

Nous vous suggérons plutôt de transmettre une simple demande au président Émorine.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Cet amendement est redondant par rapport aux dispositifs existants.

En effet, des mesures tendant à améliorer les modalités d'information existantes et à renforcer la transparence dans la gestion des services, ont d'ores et déjà été prises. En outre, l'article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales précise que le maire est tenu de présenter annuellement un rapport sur le prix et la qualité du service d'eau potable, destiné notamment à l'information des usagers. Ce rapport intègre désormais les indicateurs de performance et les éléments à fournir en fonction de la taille des services. En application du décret du 2 mai 2007 pris pour l'application de cet article, des indicateurs de performance ont été mis en place en vue d'améliorer l'accès des usagers à l'information et de contribuer à faire progresser la qualité des services d'eau et d'assainissement. Ils permettent également aux services qui le souhaitent de s'inscrire dans une stratégie de développement durable ou encore aux collectivités locales, organisatrices des services, de justifier la réalisation de certains investissements au regard des engagements européens pris par la France, par exemple, dans la protection des captages et l'épuration des eaux usées.

Enfin, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema), créé par décret en date du 25 mars 2007 et qui compte, parmi les trente-deux membres de son conseil d'administration, six membres du collège des collectivités territoriales du Comité national de l'eau représentant au moins quatre comités de bassin, a pour mission de définir et de mettre en oeuvre un système d'information sur le prix de l'eau qui est facturé aux usagers et sur la qualité des services publics de distribution d'eau et d'assainissement, en application des articles L. 213-1 et L. 213-2 du code de l'environnement. Reposant essentiellement sur les données du rapport du maire ainsi que sur le suivi de l'organisation territoriale des services d'eau et d'assainissement, ce système doit contribuer à améliorer la gouvernance de ces services publics et à fournir des moyens d'évaluation aux collectivités, aux gestionnaires des services ainsi qu'au public.

Votre légitime préoccupation est donc déjà satisfaite.

M. Nicolas About, rapporteur.  - J'ai oublié de dire tout à l'heure que cette loi ne sera pas adoptée définitivement avant le 31 janvier ; une journée, cela fait un peu court pour produire un rapport ! Évitons le ridicule !

Mme Odette Terrade.  - Je regrette que vous traitiez par l'ironie...

M. Nicolas About, rapporteur.  - J'en appelle à la cohérence !

Mme Odette Terrade.  - ...un problème aussi grave.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Je le reconnais.

Mme Odette Terrade.  - Les 1 500 rapports de la Cour des comptes montrent la réalité du problème.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Mettez au moins 2009.

M. Guy Fischer.  - Nous n'allons pas nous laisser ridiculiser. Regardez le fond du problème !

Le montant des loyers est déjà source de vives préoccupations, il y a aussi le problème, explosif, de l'énergie. Dans ma ville, nous avons, grâce à M. Mercier que je remercie, réalisé une gigantesque chaudière à bois, la plus grande d'Europe...

M. Nicolas About, rapporteur.  - On revient à Zola !

M. Guy Fischer.  - ...pour laquelle nous récupérons le bois des forêts du Lyonnais.

Sur le prix de l'eau, nous avons constaté qu'il y avait un scandale. Veolia et Suez ont confisqué des sommes considérables à cause de quoi le prix de l'eau est très supérieur à ce qu'il devrait être. Dans le grand-Lyon, nous avons obtenu une baisse de 16 % du prix du mètre cube d'eau (M. Renar se montre admiratif), sur la base d'un compromis. Mais cette baisse aurait dû être beaucoup plus importante.

Il faut vraiment faire le ménage !

L'amendement n°86 n'est pas adopté.

M. le Président.  - Amendement n°87, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article 4 de la loi n° 90-449 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Toute coupure de fourniture d'eau, d'énergie et de fourniture de services téléphoniques est interdite. Le fournisseur ou le distributeur est tenu de saisir, à compter de deux échéances impayées, le fonds de solidarité au logement, prévu par l'article 6, qui statue sur les demandes d'aide. Le fournisseur qui procède de sa propre initiative à une coupure engage sa responsabilité pénale. »

Mme Annie David.  - Lors de l'examen du projet de loi relatif au développement de la concurrence, nous avions déjà alerté le Gouvernement sur le coût de l'énergie qui pèse sur les familles les plus démunies ; l'amendement que nous avions alors déposé avait été lapidairement rejeté par la commission au motif qu'il était sans rapport avec le texte. Il a aujourd'hui toute sa pertinence.

Le Président de la République, en ouvrant le capital de GDF, a accéléré le désengagement de l'État au profit des actionnaires et au détriment du service public de l'énergie. Du fait de l'explosion des prix de celle-ci, les coupures se multiplient, alors que l'électricité est la condition de l'accès à la santé, à l'hygiène, à un confort décent. Sa fourniture est un service d'intérêt général qui justifie l'existence d'un service public national ; qu'elle soit assurée à un tarif acceptable participe du droit au logement affirmé par l'article 10 du préambule de la Constitution de 1946 et l'article 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. En outre, les coupures d'électricité, près de 600 000 chaque année, imposent le recours à des moyens de remplacement, tels les bougies, qui comportent des risques d'incendie.

Alors que des millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, qu'un quart des ménages est endetté auprès d'EDF ou de GDF, l'État doit prendre ses responsabilités. C'est le sens de notre amendement.

J'ajoute que la jurisprudence sur les arrêtés anti-coupures évolue ; celui de la ville de Champigny-sur-Marne a ainsi été jugé légal par le tribunal administratif de Melun le 16 mai 2007. Le législateur doit s'inspirer de cette décision courageuse et progressiste -et je ne parle pas du désengagement de l'État du Fonds de solidarité pour le logement (FSL).

La loi portant Engagement national pour le logement ouvre à toute personne en difficulté le droit à une aide de la collectivité. Jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa demande, un service minimum de fourniture d'eau, d'énergie et de téléphone lui est assuré. Mais ce n'est pas suffisant. Il faut encore revoir le périmètre du FSL et renforcer la responsabilité des distributeurs.

M. Nicolas About, rapporteur.  - S'il faut mieux accompagner les personnes en difficulté de paiement, les procédures existantes paraissent suffisantes. L'amendement radical de nos collègues est inopportun.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Selon la loi Dalo, toute personne en difficulté particulière au regard de son patrimoine, de l'insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d'existence a droit à une aide de la collectivité pour la fourniture d'eau, d'énergie et de services téléphoniques ; un service restreint lui est assuré jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa demande. Du 1er novembre au 15 mars, les fournisseurs d'électricité, de chaleur et de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l'interruption, pour non-paiement des factures, de leurs services aux personnes ou familles mentionnées au premier alinéa de l'article L 115-3 et bénéficiant ou ayant bénéficié, dans les douze derniers mois, d'une décision favorable d'attribution d'une aide du FSL. Ces dispositions s'appliquent aux distributeurs d'eau tout au long de l'année.

Un décret est en outre au Conseil d'État, aux termes duquel, dès la première facture impayée, et non après deux échéances comme le propose l'amendement, un traitement différencié sera mis en place, avec une alerte à deux niveaux, permettant de cibler les aides du FSL sur les ménages en difficulté sociale. Le décret du 10 août 2005, qui n'a pas permis de distinguer ces ménages des autres, sera donc abrogé.

L'amendement, dont je partage les objectifs, n'apporte rien au dispositif existant. Retrait, sinon rejet.

M. Guy Fischer.  - Je ne conteste pas les propos de Mme la ministre, mais la réalité est bien celle que nous décrivons. Conseiller général des Minguettes, j'y suis, comme M. Gérin, député-maire de Vénissieux, fréquemment confronté, notamment dans les grands ensembles de la commune, gérés par onze offices HLM différents, où la fourniture de services n'est pas toujours aussi transparente qu'on le voudrait.

En se désengageant du FSL, l'État fait supporter aux départements des charges chaque année plus importantes, surtout en période de crise. Les demandes auprès des services sociaux du Rhône ou des CCAS des communes explosent. Les délibérations anti-coupures des exécutifs locaux sont régulièrement traduites devant les juridictions administratives. Les charges de logement sont de plus en plus lourdes et pèsent évidemment sur le pouvoir d'achat des ménages.

L'amendement n°87 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°98, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Dans la deuxième phrase du second alinéa de l'article L. 331-2 du code de la consommation, après le mot : « scolarité », sont insérés les mots : « , le montant des prestations familiales et le nombre de personnes à charge ».

Mme Odette Terrade.  - Hier, M. le ministre nous a affirmé que ce texte était avant tout pragmatique. Nous entendons avec cet amendement d'effet immédiat répondre concrètement aux difficultés des familles. Pour déterminer la capacité de remboursement du débiteur, la commission de surendettement déduit des ressources de celui-ci la somme jugée nécessaire pour faire face aux charges de la vie courante ; c'est ce qu'on appelle le « reste à vivre », qui intègre les dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, de nourriture, de scolarité. Nous proposons de prendre en compte celles liées aux personnes à charge. Les familles, même en difficulté, sont de plus en plus souvent amenées, du fait des évolutions de la société, à aider un ascendant ou un descendant.

M. Nicolas About, rapporteur.  - L'amendement n'apporte rien à un dispositif qui n'a jamais été remis en cause par la Cour de Cassation. Nous n'avons pu retrouver l'arrêt qu'évoque l'exposé des motifs de votre amendement, tel que rédigé. Les dispositions de la loi de 2006 sont suffisamment explicites.

Mme Odette Terrade.  - Je n'ai pas, en cet instant, en tête l'arrêt de la Cour -nous vous le ferons tenir- mais je sais le cas d'une famille qui aide des neveux à la suite d'un décès et est en partie pour cela en plan de surendettement ; les personnes à charge ne sont pas prises en compte pour le calcul du « reste à vivre ».

Mme Christine Boutin, ministre.  - Je comprends votre objectif, mais le dispositif existant couvre déjà les dépenses courantes en fonction de la taille de la famille ; et les mesures de protection des emprunteurs ont pour effet pervers de restreindre leur accès au crédit.

M. Guy Fischer.  - Les éléments que nous apportons au débat sont importants, même si nous ne disposons pas des moyens de répondre sur le champ à votre requête. Tout le monde sait que faire traiter un dossier de surendettement s'apparente à une course d'obstacles et cela me préoccupe car des réponses trop tardives laissent les familles dans la détresse.

L'amendement n°98 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°124, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le a) de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1230 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« a) Le loyer :

« - des logements neufs ;

« - des logements vacants ayant fait l'objet de travaux de mise ou de remise en conformité avec les caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas de l'article 6 ;

« - des logements conformes aux normes définies par ledit décret, faisant l'objet d'une première location ou, s'ils sont vacants, ayant fait l'objet depuis mois de six mois, de travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes, d'un montant au moins égal à une année du loyer antérieur, est fixé librement entre les parties, dans les limites de quatre fois l'indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre. »

Mme Odette Terrade.  - Le dispositif qu'on nous propose est intéressant mais limité : il exclut les logements neufs mis en location pour la première fois. L'article ne concerne qu'une toute petite partie du parc privé où le taux de rotation est bien plus fort que dans le parc social : 22 % contre10 %. Le rapport de M. About souligne que l'article agit pour les augmentations de loyers en cours de bail mais pas sur les nouveaux baux, et qu'il est probable que les loyers continueront à augmenter plus vite que les prix à la consommation. Dans ces conditions, on ne peut pas parler de transfert massif de pouvoir d'achat des propriétaires vers les locataires, lesquels sont pourtant bien plus nombreux. Le nouvel indice n'étant que de référence et non de révision, quelle portée réelle aura-t-il pour les locataires ? S'il se rapproche de l'indice des prix à la consommation, lui-même très voisin avec l'ancien indice (2,6 en 2007 contre 2,76 et 2,49 aux premier et deuxième semestres de la même année), les locataires économiseront un ou deux euros sur un loyer de mille euros.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Votre rédaction n'est pas facilement applicable. Comment plafonner la révision à quatre fois la valeur d'un indice ? Avis défavorable.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Avis défavorable. Je comprends bien l'objectif mais je vois mal comment fixer une norme pour les logements neufs pour lesquels on n'a pas de référence.

Mme Odette Terrade.  - Le marché, une fois de plus...

M. Guy Fischer.  - Eh oui, le marché a réponse à tout mais il ne me fait pas perdre de vue ma question sur les hausses dans le logement social. A l'heure actuelle, on abuse les locataires par des doubles délibérations. Le conseil d'administration vote une hausse, que le préfet annule ; le conseil d'administration prend ensuite une seconde délibération. Mais dans le Rhône, M. Michel Mercier, président du conseil général, ne bronche pas : il dit qu'il veut une hausse des loyers de 5 %, soit deux fois l'inflation, et quand le préfet annule la délibération, non seulement il n'en tient pas compte, mais encore il n'est pas condamné. Ce n'est pas normal ! Quelle directive allez-vous donner au préfet pour atténuer l'augmentation des loyers ?

Mme Christine Boutin, ministre.  - Je suis prête à vous rencontrer pour vous expliquer en détail ce que vous savez très bien : la gouvernance des offices associe tous les acteurs à la hausse. La deuxième délibération doit respecter un plafond. Cette délibération, je vous le confie, me pose un problème mais la différence entre nous, c'est que je fais confiance aux responsables.

L'amendement n°124 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°131, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC.

Avant le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le c) de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« c) Lors du renouvellement du contrat, le loyer ne donne lieu à réévaluation que s'il est manifestement sous-évalué.

« Dans ce cas, le bailleur peut proposer au locataire, au moins six mois avant le terme du contrat et dans les conditions de forme prévues à l'article 15, un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables dans les conditions définies à l'article 19.

« Lorsque le bailleur fait application des dispositions du présent c, il ne peut donner congé au locataire pour la même échéance du contrat.

« La notification reproduit intégralement, à peine de nullité, les dispositions des alinéas du présent c et mentionne le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant servi à le déterminer.

« En cas de désaccord ou à défaut de réponse du locataire quatre mois avant le terme du contrat, l'une ou l'autre des parties saisit la commission de conciliation.

« A défaut d'accord constaté par la commission, le juge est saisi avant le terme du contrat. A défaut de saisine, le contrat est reconduit de plein droit aux conditions antérieures du loyer éventuellement révisé. Le contrat dont le loyer est fixé judiciairement est réputé renouvelé pour la durée définie à l'article 10, à compter de la date d'expiration du contrat. La décision du juge est exécutoire par provision.

« La hausse convenue entre les parties ou fixée judiciairement s'applique par tiers ou par sixième selon la durée du contrat.

« Toutefois, cette hausse s'applique par sixième annuel au contrat renouvelé, puis lors du renouvellement ultérieur, dès lors qu'elle est supérieure à 6p.00 si le premier renouvellement avait une durée inférieure à six ans.

« La révision éventuelle résultant du d ci-dessous s'applique à chaque valeur ainsi définie. »

Mme Odette Terrade.  - Nous couvrons l'ensemble des situations locatives dans l'esprit de la loi Mermaz-Malandain. En modérant la progression des loyers, nous éviterons que le parc privé fonctionne comme une machine à exclure, ce qui accentue la pression sur le parc social. Le président About ne me fera pas pleurer sur la situation des propriétaires qui bénéficient de moult dispositifs d'amortissement des travaux et peuvent imputer des déficits sur leurs revenus locatifs : le revenu foncier a augmenté de 7 % en deux ans -les salariés auraient bien aimé être logés à la même enseigne ! Enfin, l'intérêt bien compris des propriétaires n'est pas que leurs logements restent vides.

M. Nicolas About, rapporteur.  - Le plafond est déjà suffisamment bas. Avis défavorable.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Avis défavorable : on ne peut lisser l'augmentation de la sorte. Les commissions de conciliation constituent des lieux de médiation pour régler d'éventuels conflits.

L'amendement n°131 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°46 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les trois premiers alinéas du b de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Pendant une période de trois ans à compter de la promulgation de la loi n° ... du ... pour le pouvoir d'achat, le loyer des logements vacants ou faisant l'objet d'une première location qui ne sont pas visés au a ci-dessus est fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables dans les conditions définies à l'article 19, s'il est supérieur au dernier loyer exigé du précédent locataire. »

Mme Patricia Schillinger.  - Cet amendement propose de limiter durant trois ans les hausses de loyer lors de la relocation des logements vacants ou faisant l'objet d'une première location. Cette disposition compléterait les mesures proposées par le Gouvernement. Elle serait transitoire et préserverait la possibilité pour le propriétaire d'augmenter les loyers lorsque des travaux importants ont été effectués.

La reconduction les loyers à leur niveau initial au moment du changement de locataire ne concerne plus que 3 % des baux en 2006 contre 29 % en 1999, conséquence des tensions importantes sur le marché du logement locatif. Les chiffres de l'Insee illustrent le fait que, malgré une inflation plutôt faible ces dernières années, il est quasiment impossible pour le million de locataires qui déménagent chaque année de retrouver un bien comparable à celui qu'ils occupaient. Cela freine la nécessaire mobilité géographique demandée -parfois même imposée tous les trois ans- par les entreprises de réseaux du secteur tertiaire : banque, assurance, commerce, etc. Les ménages sont contraints de limiter leur surface habitable pour préserver leur pouvoir d'achat.

Cet amendement réactive un mécanisme prévu par la loi de 1989, qui a fonctionné jusqu'en 1997 et répondait à une tension sur les marchés pourtant moins forte qu'actuellement. La situation exige des mesures conservatoires et protectrices. On ne pourra pas m'opposer qu'elles seraient liberticides car ni en 1993 ni en 1995 les gouvernements de droite n'ont songé à supprimer ce mécanisme.

M. Nicolas About, rapporteur.  - La commission craint que le gel de certains loyers du parc privé durant trois ans n'aggrave les tensions sur le marché du logement. Avis défavorable.

Mme Christine Boutin, ministre.  - Je me suis déjà exprimée sur les conséquences néfastes qu'aurait un blocage des loyers. Il faut trouver un équilibre entre les intérêts des locataires et ceux des propriétaires afin d'inciter ces derniers à mettre des logements sur le marché.

M. Guy Fischer.  - Nous allons voter cet amendement.

Madame le ministre, je brûle de vous dire combien le problème de la relocation des logements est grave. Et je suis en total désaccord avec la décision du Gouvernement de jeter à bas le « sacrosaint » principe du maintien dans les lieux dans le cadre du parcours résidentiel. (Mme la ministre lève les yeux au ciel) Face à une situation figée, vous voulez agir par la force. (Mme la ministre le nie du geste) Mais un des freins à la fluidification des parcours résidentiels est que les familles qui occupent un logement trop grand hésitent à le quitter de crainte de subir une hausse importante de leur loyer.

En réduisant les crédits des offices, vous les contraignez à augmenter les loyers au prix plafond. Dans le logement social, cette hausse est insupportable. Si vous pouviez assurer aux locataires qui restent dans la même résidence ou la même ville, par mutation, qu'ils ne subiront pas une hausse excessive de leur loyer, vous feriez un grand pas en faveur de la fluidification du parcours résidentiel.

M. Thierry Repentin.  - L'article 4 limitant la hausse des loyers pour les locataires en place, les propriétaires risquent de les accroître sans contrainte en cas de relocation, d'où l'intérêt d'un dispositif transitoire pour freiner cette augmentation durant trois ans.

Les populations mobiles que sont les saisonniers, les étudiants, les intérimaires, les employés du secteur tertiaire -dont la mobilité est parfois prévue par le contrat de travail-, qui doivent signer des baux pour des périodes courtes, seraient affectées par des augmentations conséquentes. Quand un marché est dérégulé, vous n'hésitez pas à prendre des mesures au niveau national. Ainsi de la rémunération du livret A, qui aurait dû être relevée, selon le marché, à 4 %, mais vous avez estimé que c'était trop et vous êtes tombés à 3,5 %.

M. Guy Fischer.  - C'est scandaleux ! On ne donne qu'aux riches !

M. Thierry Repentin.  - Adoptez la même démarche pour les locataires confrontés à la dérégulation des loyers.

Mme Christine Boutin, ministre.  - J'apprécie la tonalité des débats au Sénat, marqués par la courtoisie même quand des propos forts sont tenus.

Monsieur Fischer, le principe du maintien dans les lieux a été érigé comme « sacrosaint » après un accord avec M. Delebarre mais le monde HLM doit rentrer dans le XXIe siècle et intégrer la notion de mobilité. On ne jettera personne dehors, vous le savez très bien. S'il n'y a plus maintien dans les lieux pour les personnes occupant un appartement qui ne correspond plus à leurs besoins, il y aura maintien dans le parc social. Ni le Sénat ni le monde HLM ne les considèrent comme des numéros statistiques ou des boîtes de conserve empilables n'importe où. Qu'il n'y ait aucune ambiguïté : la mobilité se fera sur la base du volontariat et d'un accord entre l'organisme et le locataire.

Monsieur Repentin, votre dernière observation m'a stupéfiée. En fin connaisseur du logement social, vous savez qu'il est financé par le livret A. J'aurais bien gardé une preuve écrite de vos dires, mais je vois à votre sourire que vous plaisantiez. (Mouvements divers) En revanche, vous avez raison de dire que l'évolution du travail au XXIe siècle oblige à changer plus souvent de domicile.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il y en a pourtant qui s'accrochent à leur bel appartement !

Mme Christine Boutin, ministre.  - Certaines populations concernées -étudiants, intérimaires, salariés en CDD- bénéficient désormais du système Locapass et, pour les logements financés par le 1 %, du lissage du dépôt de garantie durant la durée de location.

M. Bernard Frimat.  - Pas convaincant.

M. Guy Fischer.  - Je suis étonné par ce que vous venez de dire, madame la ministre. Vous avez omis de préciser que le maintien dans les lieux va s'accompagner d'importantes hausses de loyer. Les familles soi-disant trop riches risquent de devoir quitter leur logement. Et je suis surpris que ce soit vous qui remettiez en cause le « sacrosaint ». (Sourires entendus)

L'amendement n°46 rectifié n'est pas adopté.