Organismes génétiquement modifiés (Urgence  -  Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés.

Discussion des articles (Suite)

Article 2 bis (suite)

M. le président.  - J'informe le Sénat que notre collègue Jean-François Le Grand a retiré ses amendements. Nous en sommes parvenus, au sein de l'article 2, à l'amendement n°13 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission.

Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-4 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. 531-4-1. - Le comité scientifique est composé de personnalités désignées en raison de leur compétence scientifique et technique reconnue par leurs pairs, dans les domaines se rapportant au génie génétique, à la protection de la santé publique, aux sciences agronomiques, aux sciences appliquées à l'environnement, au droit, à l'économie et à la sociologie.

« Le comité de la société civile est composé de représentants d'associations, de représentants d'organisations professionnelles, d'un membre du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, d'un député et d'un sénateur membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, et de représentants des associations de collectivités territoriales.

M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Il convient de préciser la composition respective des deux comités constituant le Haut conseil des biotechnologies afin de lever la confusion entre deux principes de légitimité distincts : d'un côté la légitimité scientifique des chercheurs, qu'il est d'usage de sélectionner par appel à candidatures et, de l'autre, la légitimité élective de représentants de la société civile désignés par le vote.

J'ai rectifié cet amendement afin de tenir compte de la proposition judicieuse de M. Le Grand d'ajouter des représentants des collectivités territoriales.

M. le président.  - Sous-amendement n°239 à l'amendement n° 13 rectifié de M. Bizet au nom de la commission, présenté par le Gouvernement.

I. - Au deuxième alinéa de l'amendement n° 13, après les mots :

se rapportant

insérer le mot :

notamment

II. - Au troisième alinéa du même amendement, après le mot :

composé

insérer le mot :

notamment

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Le Gouvernement est favorable à la liste de personnalités prévue par la commission mais il souhaite qu'elle ne soit pas limitative. La représentation des collectivités territoriales me semble judicieuse.

Le sous-amendement n°239, accepté par la commission, est adopté.

M. Jean Desessard.  - Nous ne sommes pas opposés par principe à l'amendement n°13 rectifié mais comme nous contestons l'architecture générale du projet de loi, nous nous abstiendrons.

L'amendement n°13 rectifié, sous-amendé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°108, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

I. - Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-4 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Le Parlement vote le budget alloué à la Haute autorité. Il est notamment financé par la taxe prévue à l'article L. 535-4.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes pour l'État résultant du financement de la Haute Autorité par la taxe prévue à l'article L. 535-4 du code de l'environnement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jacques Muller.  - Pour que la Haute autorité puisse travailler dans de bonnes conditions, il faut qu'elle dispose d'un budget financé en partie par la taxe prévue à l'article 9 qui ne doit pas être plafonnée.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Défavorable. Le principe d'universalité budgétaire commande de ne pas affecter cette taxe. Évitons d'en faire une variable d'ajustement du fonctionnement du Haut conseil, au risque de décourager le dépôt des demandes d'autorisation. On ne peut pas, d'un côté, prévoir une dotation de 45 millions et, de l'autre, décourager les porteurs de projets.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Cet amendement pose un problème de principe : le Haut conseil n'étant pas doté de la personnalité juridique, son budget doit être voté en loi de finances et ajusté en fonction des besoins réels. Défavorable.

L'amendement n°108 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par M. Bizet au nom de la commission.

Avant le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-5 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Afin de garantir l'indépendance et la dignité de leurs fonctions, et pendant la durée de celles-ci, les membres du Haut conseil des biotechnologies ne prennent, à titre personnel, aucune position publique sur des questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet d'une décision de la part du Haut conseil sans en avoir préalablement informé son président.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Afin d'assurer tout à la fois l'indépendance et la dignité des fonctions de membre du Haut conseil, nous proposons, sans aller jusqu'à leur interdire, comme cela est le cas pour les membres du Conseil constitutionnel, toute expression publique, qu'il leur soit fait obligation d'informer le président, dont le rôle de coordination en sera d'autant mieux assis, avant toute prise de parole publique. Le Haut conseil doit tenir un langage clair, qui mette enfin un terme à la cacophonie qui prévaut depuis trop longtemps sur ce dossier.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Nous partageons votre souci de ne pas voir les positions publiques des membres du Haut conseil nuire au crédit de cette instance. Mais cette disposition, exorbitante du droit commun, risque d'être sanctionnée par le Conseil constitutionnel, si ce n'est déclassée, car elle relève clairement du domaine réglementaire et trouverait mieux sa place dans le règlement intérieur du Haut conseil. Retrait ?

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Nous n'entendons pas interdire aux membres du Haut conseil toute expression publique. Demander que le président soit informé n'est pas exorbitant. Je maintiens l'amendement, considérant, encore une fois, que les prises de position sur le sujet des OGM doivent être claires.

M. Jean Desessard.  - Le rapporteur n'interdit pas aux membres du Haut conseil de s'exprimer, ce qui témoigne d'un souci de transparence que je salue. S'il ne s'agit que d'avertir par courtoisie le président du Haut conseil, pourquoi pas, mais une telle disposition relève en effet du règlement intérieur.

L'amendement n°14 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°109, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-5 du code de l'environnement par les mots :

et du Comité de biovigilance

M. Jacques Muller.  - Cohérence avec les dispositions adoptées mardi.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Nous n'avons pas la même appréciation de la cohérence. Défavorable.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°109 n'est pas adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°80, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le rapport d'évaluation transmis par l'État à la Commission européenne, lors de demande d'autorisation, contient les lignes directrices énumérées à l'annexe VI de la directive 2001/18/CE et est accessible au public.

M. Gérard Le Cam.  - Je voudrais tout d'abord dire combien j'ai été étonné d'entendre le ministre d'État déclarer à l'antenne, au sujet de la discussion de ce texte : « Tout va bien au Sénat ». Car tout ne va pas bien. M. Le Grand, dont les positions se situent clairement dans le prolongement du Grenelle, vient de jeter l'éponge, découragé par le rouleau compresseur que lui oppose la majorité dont il fait pourtant partie. (M. Pastor renchérit)Lle Gouvernement est désavoué par sa majorité qui vient d'adopter un amendement auquel le ministre était défavorable : la confusion est à son comble. (Protestations sur les bancs UMP)

M. Jean-Marc Pastor.  - C'est la grande dérive !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques.  - Permettez-moi de répondre à M. Le Cam. Nous sommes une assemblée indépendante. Le groupe UMP se prononce en toute liberté : il arrive que certains de nos collègues ne votent pas les amendements du rapporteur... Les rouleaux compresseurs, monsieur Le Cam, ont existé en d'autres temps, dans d'autres pays, mais pas en France !

M. Gérard Le Cam.  - Notre amendement n°80 tend à prévoir que les informations prévues à l'annexe 6 de la directive, qui doivent figurer au rapport d'évaluation transmis à la Commission et conditionneront la décision d'autorisation, soient accessibles au public.

Je rappelle que ces informations portent sur l'identification des caractéristiques de l'organisme récepteur pertinentes pour l'évaluation du ou des OGM concernés ; l'identification de tout risque connu que la dissémination dans l'environnement de l'organisme récepteur non modifié comporte pour la santé humaine et l'environnement ; une description du résultat de la modification génétique dans l'organisme modifié ; une évaluation indiquant si la modification génétique a été suffisamment caractérisée pour qu'il soit possible d'évaluer les risques qu'elle comporte pour la santé humaine et l'environnement ; l'identification, fondée sur l'évaluation des risques pour l'environnement menée conformément à l'annexe II, de tout nouveau risque pour la santé humaine et l'environnement qui peut résulter de la dissémination du ou des OGM en question par rapport à la dissémination du ou des organismes non modifiés correspondants ; une conclusion, enfin, sur les questions suivantes : le ou les OGM concernés doivent-ils être mis sur le marché en tant que produits ou éléments de produits et dans quelles conditions ? Le ou les OGM doivent-ils ne pas être mis sur le marché ? Convient-il de demander sur des points spécifiques de l'évaluation du risque pour l'environnement l'avis d'autres autorités compétentes et de la Commission ?

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Défavorable. Les rapports d'évaluation seront naturellement établis conformément à l'annexe 6, mais en autoriser la publication intégrale serait contraire à l'article 25 de la directive, qui reconnaît des motifs légitimes de confidentialité tenant au secret industriel et à la sécurité de l'État. On ne peut pas, d'un côté, encourager la recherche en lui accordant 45 millions, comme vient de le faire le Gouvernement, et, d'un autre côté, faire peur aux chercheurs et aux industriels en livrant leurs secrets.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Défavorable. Ces dispositions, de nature réglementaire, sont déjà inscrites à l'article R. 533-30 du code de l'environnement.

M. Jean Desessard.  - Le président Émorine a renvoyé un peu brutalement nos camarades communistes dans les cordes. Votre vision du communisme, monsieur le président, me semble quelque peu datée, et vous feriez bien de l'actualiser. (Protestations sur les bancs UMP)

M. Le Cam a raison : le Gouvernement est désavoué par sa majorité ; M. Le Grand est marginalisé, alors que son souci de tenir compte du Grenelle de l'environnement était louable... Regrettable, et vous allez vous en apercevoir rapidement aux élections municipales.

Mme Bernadette Dupont.  - Chantage !

M. Jean Desessard.  - Non, lucidité. Vos promesses sur le pouvoir d'achat ? Non tenues.

M. Gérard César.  - Rien à voir !

M. Jean Desessard.  - Vos promesses sur le Grenelle ? Non tenues, et celles-là, pourtant, vous pouviez les tenir ! Non, monsieur le ministre d'État, tout ne va pas si bien au Sénat !

M. le président.  - Le Sénat, parfaitement éclairé par ces explications de vote, va pouvoir se prononcer sur l'amendement.

L'amendement n°80 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par M. Bizet au nom de la commission.

Compléter l'intitulé de ce chapitre par les mots :

et coexistence entre cultures

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Cette formulation clarifie l'intitulé du chapitre.

L'amendement n°15, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°193, présenté par M. Pastor et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Avant l'article 3, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

Dispositions relatives aux plantes génétiquement modifiées (PGM)

M. Daniel Raoul.  - Comme je l'ai déjà souligné, l'essentiel du projet de loi porte sur les plantes génétiquement modifiées (PGM) ; l'expression de « coexistence entre cultures » est ambiguë puisqu'il ne s'agit nullement ici de cultures en laboratoire, mais bien de plantes génétiquement modifiées cultivées en plein champ.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Je comprends votre souci de mieux distinguer les OGM et les PGM, mais votre proposition ne rend pas le texte plus clair pour autant : Avis défavorable.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Daniel Raoul.  - C'est succinct.

L'amendement n°193 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Bizet au nom de la commission.

I. Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre II du titre VI du livre VI du code rural, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre II bis

« La culture des plantes génétiquement modifiées

« Art. L. 662-4.- Est obligatoire l'étiquetage des semences dans lesquelles la présence d'organismes génétiquement modifiés est supérieure à un seuil défini par décret après avis du comité scientifique du Haut conseil institué par l'article L. 531-3 du code de l'environnement. »

II. En conséquence, remplacer respectivement dans l'ensemble du texte les références :

L. 663-8, L. 663-9, L. 663-10 et L. 663-11

par les références :

L. 662-5, L. 662-6, L. 662-7 et L. 662-8.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Pour plus de transparence, nous souhaitons rendre obligatoire l'étiquetage de la présence d'OGM dans les semences.

M. le président.  - Amendement n°127, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural est complété par un article ainsi rédigé :

« Art. .... - Pour les semences et plantes génétiquement modifiées, toute mention d'une variété génétiquement modifiée, quel que soit son support (catalogues, étiquettes, publicités, bons de commande, bons de livraison, factures, etc.), doit indiquer clairement que la variété est génétiquement modifiée. »

M. Jacques Muller.  - La directive communautaire relative au catalogue commun des variétés exige que toute variété génétiquement modifiée soit indiquée comme telle dans ce catalogue. Cette disposition, cependant, n'a pas été transcrite en droit interne. Les catalogues vantent les mérites de semences sans indiquer que la variété est OGM et ce n'est qu'au moment de la réception de leur lot de semences, que les agriculteurs peuvent constater que la variété est un OGM. Nous souhaitons donc une meilleure information des agriculteurs.

M. le président.  - Amendement n°218 rectifié, présenté par M. Pastor et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les semences et plantes génétiquement modifiées, toute mention d'une variété génétiquement modifiée, quel que soit son support (catalogues, étiquettes, publicités, bons de commande, bons de livraison, factures) doit indiquer clairement que la variété est génétiquement modifiée.

M. Jean-Marc Pastor.  - Nous souhaitons également un étiquetage complet.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Les amendements n°s127 et 218 rectifié ne font pas mention du seuil ; de plus, ils sont satisfaits par l'amendement de la commission.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - La question du seuil est centrale, mais elle est de compétence communautaire. La Commission européenne doit statuer, mais elle n'a pas encore tranché. En attendant, il est possible de fixer ces seuils par voie réglementaire, mais nous préférons laisser les instances communautaires parvenir au terme de leur réflexion : Retrait, sinon rejet de l'amendement n°16. Avis défavorable à l'amendement n°127, ainsi qu'à l'amendement n°218 rectifié.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Soit, mais serait-il possible de rectifier l'amendement en retirant le paragraphe relatif à l'étiquetage ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Le retrait est plus clair.

L'amendement n°16 est retiré.

L'amendement n°127 n'est pas adopté.

M. Daniel Raoul.  - Le rapporteur nous a dit que notre amendement était satisfait par le sien... mais il vient de le retirer ! Notre amendement est meilleur que celui de la commission, puisqu'il ne fait pas référence à un seuil : nous mentionnons seulement l'étiquetage ; c'est un gage de la transparence que vous prétendez souhaiter !

M. Jean-Marc Pastor.  - Nous comprenons parfaitement que le seuil doive être défini par les instances communautaires, mais cela n'interdit en rien que l'étiquetage soit précisé sur le plan national.

Mme Évelyne Didier.  - C'est à travers ce genre de signes que les citoyens évalueront ce texte. Les seuils sont définis par la Commission européenne, d'accord, mais nos concitoyens attendent que nous garantissions leur information sur la présence d'OGM, ce qui passe par l'étiquetage. Agir autrement serait se moquer d'eux.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - La matière est communautaire : nous ne pouvons pas faire semblant d'être seuls ! Nous voulons tous un étiquetage précis et complet, laissons les instances communautaires poursuivre leur réflexion, engagée depuis plusieurs années, car le problème n'est pas simple.

M. le président.  - Vous avez déjà expliqué votre vote, monsieur Pastor, mais à titre exceptionnel, je veux bien vous redonner la parole.

M. Jean-Marc Pastor.  - Merci, monsieur le président, d'accepter que ce débat se développe : nous n'obtenons pas satisfaction sur tous nos amendements mais, au moins, la parole a droit de cité dans notre hémicycle ! Je comprends mieux que M. Borloo dise que tout se passe bien au Sénat. (Sourires) M. le rapporteur, avec son amendement, proposait un étiquetage et, maintenant qu'on lui dit que les seuils sont communautaires, il ne veut plus d'aucun étiquetage, même sans précision de seuil : je ne comprends plus !

M. Daniel Raoul.  - Pour éviter toute ambiguïté, je propose de rectifier l'amendement pour faire référence aux semences et plantes « reconnues » génétiquement modifiées.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Cela reste peu clair : reconnu par qui, comment ? Fait-on référence à la directive ? (M. Raoul le confirme) Il serait préférable de réfléchir encore à la question, quitte à y revenir lors d'une prochaine lecture.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - La réflexion est en cours au sein de la Commission européenne. Nous sommes dans un environnement communautaire ; prendre aujourd'hui position au niveau national compliquerait les choses et n'apporterait aucune lisibilité. L'avis reste défavorable.

M. Daniel Raoul.  - Vous n'êtes pas breton...

M. Jacques Muller.  - Voter cet amendement d'appel constituerait un signal positif pour la suite.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Je vous propose de retirer l'amendement au bénéfice d'un travail plus approfondi sur la question qui pourrait aboutir lors de la prochaine lecture.

L'amendement n°218 rectifié bis n'est pas adopté.

Article 3

Dans le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural sont insérés les articles L. 663-8 et L. 663-9 ainsi rédigés :

« Art. L. 663-8. - La mise en culture des végétaux autorisés au titre de l'article L. 533-5 du code de l'environnement ou en vertu de la réglementation communautaire est soumise au respect de conditions techniques relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement, visant à éviter la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions.

« Ces conditions techniques sont fixées par l'autorité administrative, selon des modalités définies par décret.

« Art. L. 663-9. - Le respect des prescriptions prévues à l'article L. 663-8 est contrôlé par les agents mentionnés au I de l'article L. 251-18. Ces agents sont habilités à procéder ou ordonner, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, tous prélèvements et analyses nécessaires à l'exercice de cette mission.

« Les sanctions que l'autorité administrative peut prononcer comprennent la destruction totale ou partielle des cultures.

« Les frais entraînés par ces sanctions sont à la charge de l'exploitant. »

M. Jacques Muller.  - Même s'il n'incombe pas au législateur de fixer le périmètre d'isolement des cultures, cela reste une question essentielle, stratégique pour la protection des cultures et la diffusion des OGM dans l'environnement.

En tant qu'ingénieur agronome, le chiffre de 50 mètres, martelé par l'association générale des producteurs de maïs (AGPM), qui figure dans les arrêtés pris en 2006, me laisse perplexe. Chez nos voisins européens, le périmètre moyen se situe entre 200 et 300 mètres : avec 50 mètres, la France est le pays le plus laxiste de toute l'Union, après la Hollande ! Pour les essais en plein champ de nouvelles variétés de maïs OGM, le périmètre est fixé à 400 mètres. Pour une culture commerciale, il passerait à 50 mètres ? C'est incohérent. Les études internationales sont beaucoup plus prudentes : selon l'unité de recherche de Worcester, le pollen de maïs se propage bien au-delà d'un périmètre de 200 mètres. Enfin, les semenciers s'imposent déjà un périmètre prudentiel de 300 à 400 mètres. Ayons un minimum de cohérence !

Sur la méthode, les auditions de scientifiques de l'Inra que j'avais demandées ont été refusées. Compte tenu de l'incohérence des chiffres en cause, il aurait pourtant été utile de bénéficier d'un éclairage scientifique. Or le rapporteur, M. Bizet, a répondu qu'il était hors de question d'envisager un périmètre supérieur à 50 mètres au motif que les structures agricoles françaises étaient trop petites : on empêcherait la diffusion souhaitée des OGM ! Le périmètre est pourtant là pour protéger les structures qui ne souhaitent pas d'OGM dans leur production !

La question de la distance de sécurité doit être abordée par le Haut conseil. Il est hors de question de définir les périmètres en catimini, par arrêté ministériel ou par décret. (M. Desessard applaudit longuement)

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Par cohérence avec le retrait de notre amendement n°16, l'amendement n°17 est retiré.

Nous reviendrons sur la question des périmètres lors de la discussion des amendements. Au cours de la dernière saison céréalière, sur 22 000 hectares, il n'a été fait état d'aucun problème spécifique. Les scientifiques préconisaient 25 mètres : par souci de sécurité, M. Bussereau a opté pour 50 mètres.

Il faut distinguer la distance parcourue par le pollen et son pouvoir de germination. La durée de vie d'un pollen de maïs est de deux heures. Des études contradictoires menées dans le sud-ouest démontrent qu'au-delà de douze rangs, soit 10 mètres, la présence fortuite d'OGM est de 0,3 %.

En Angleterre, le périmètre est de 25 mètres, contre 700 à 800 mètres dans certains pays d'Europe centrale et orientale, car les structures parcellaires sont différentes ! Nous n'avons pas à réserver cette technologie novatrice aux seuls agriculteurs qui disposent d'une grande surface.

M. Muller a assisté au colloque que j'ai coprésidé avec notre collègue de l'Assemblée nationale et a entendu l'ensemble des scientifiques : tous ont insisté sur la dimension spatio-temporelle du transport du pollen.

L'amendement n°17 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°110, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Remplacer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural par trois alinéas ainsi rédigés :

« La mise en culture des végétaux autorisés au titre de l'article L. 533-5 du code de l'environnement ou en vertu de la réglementation communautaire, ainsi que les opérations d'obtention des semences, d'importation, de récolte, de stockage, de transport, de conditionnement, de transformation et de distribution sont soumises au respect de conditions techniques, destinées à éviter la présence d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions.

« Les personnes impliquées dans le processus de culture, d'importation, de transport, de stockage, de transformation et de distribution des organismes génétiquement modifiés doivent attester d'un certificat obtenu à l'issue d'une formation permettant d'obtenir les connaissances, les compétences et l'équipement nécessaire pour prendre les mesures adéquates destinées à prévenir les disséminations fortuites d'organismes génétiquement modifiés.

« Cette formation, dont les coûts sont pris en charge par les opérateurs concernés, est valable 5 ans.

M. Jacques Muller.  - Le champ d'application des mesures destinées à éviter une contamination ne doit pas être limité aux contaminations issues de cultures.

Il existe d'autres sources de contamination possible : les négligences humaines, dans le stockage, le transport, la transformation, le conditionnement ou la distribution ne peuvent être laissées de côté. Du reste, la plupart des États européens mettent en place de telles mesures et obligent toute personne intervenant dans la filière des productions génétiquement modifiées à posséder une formation et un certificat : c'est le cas en Allemagne, en Hongrie, au Danemark...

M. le président.  - Amendement n°53 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC-UDF.

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, après les mots :

La mise en culture

insérer les mots :

, la récolte, le stockage, le transport, la transformation, le conditionnement et la distribution

M. Daniel Soulage.  - Les contaminations issues de cultures ne sont pas seules en cause, comme vient de le souligner notre collègue. Des mesures concrètes comme le nettoyage des machines utilisées pour la récolte sont efficaces ; il serait bon de les généraliser afin de réduire les risques.

M. le président.   - Sous-amendement n°241 à l'amendement n° 53 rectifié de M. Soulage et les membres du groupe UC-UDF, présenté par le Gouvernement.

Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 53 rectifié, supprimer les mots :

, la transformation, le conditionnement et la distribution

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Je suis favorable à un élargissement des compétences réglementaires pour les activités de l'amont où sont manipulés et transportés des produits issus d'OGM. Mais il faut rester dans les limites du raisonnable et exclure les secteurs de la transformation, du conditionnement et de la distribution.

M. le président.  - Amendement n°194 rectifié, présenté par M. Pastor et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, remplacer les mots :

est soumise

par les mots :

, ainsi que les opérations d'obtention des semences, d'importation, de récolte, de stockage, de transport, de conditionnement, de transformation et de distribution sont soumises

M. Jean-Marc Pastor.  - Il n'y a pas seulement la culture au champ, mais le transport, le stockage, l'arrivée dans les ports de produits importés, etc. Et la réponse de l'OMC n'a rien pour rassurer nos concitoyens. Les oléagineux importés, soja en particulier, doivent être soumis au même régime que les produits français. Le contraire serait une aberration !

M. le président.  - Amendement n°192, présenté par M. Pastor et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, après les mots :

conditions techniques

insérer le mot :

notamment

M. Jean-Marc Pastor.  - Il est exposé.

M. le président.  - Amendement n°76, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC.

I. -  Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, supprimer les mots :

relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement

II. - Compléter ce même alinéa par les mots :

et dans l'environnement en général

M. Gérard Le Cam.  - Amendement de repli. Nous voulons étendre les conditions techniques requises pour les cultures en plein champ à d'autres critères que la seule distance de recul. Mais nous demeurons fondamentalement sceptiques à l'égard de ces mesures.

M. le président.  - Amendement n°111, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, supprimer le mot :

accidentelle

M. Jacques Muller.  - Le caractère prévisible des contaminations a été admis par le Gouvernement puisque celui-ci nous présente des mesures de « protection » des cultures conventionnelles contre une « contamination » par les OGM. La recherche scientifique a du reste prouvé que la contamination n'est pas accidentelle mais inévitable.

M. le président.  - Amendement n°59, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC.

Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural par deux phrases ainsi rédigées :

Le respect de la distance de recul incombe aux parcelles d'organismes génétiquement modifiés. Le respect de l'existant, ruchers, propriétés privées est toujours prioritaire.

Mme Évelyne Didier.  - C'est à celui qui cultive des OGM de prendre des dispositions pour l'isolement, non à ses voisins ! On demande pourtant à certains apiculteurs de déplacer leurs ruches. Le respect de l'existant, dans la faune comme dans la flore, est toujours prioritaire. Les gênés s'en vont, les gênants restent ? Eh bien non !

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Défavorable au n°110, satisfait partiellement par le n°53 rectifié. Favorable à ce dernier, s'il est assorti du sous-amendement n°241. Défavorable au n°194 rectifié, mais favorable au 192, défavorable au n°76, comme au 111 -la contamination est nécessairement fortuite. Quant au n°59, il est satisfait mais je me réjouis que le groupe CRC soit soucieux du respect de la propriété privée ! (Rires à droite ; sourires sur certains bancs socialistes)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement n°110. J'accepte un élargissement du domaine réglementaire mais uniquement aux activités d'amont : tel est le sens de mon sous-amendement n°241. Je préfère ma rédaction à celle de l'amendement n°194 rectifié.

Favorable à l'amendement n°192 ; il faudra modifier en conséquence l'article L. 671-14 du code, pour préciser quelles infractions ont le caractère de délit. Ce sera l'objet d'un amendement à l'article 4. L'amendement n°76 est incompatible avec l'amendement n°192 : défavorable. La directive européenne traite bien des contaminations accidentelles : il est difficile de supprimer ce terme ; avis défavorable à l'amendement n°111.

Sur le principe, nous serions favorables à l'amendement n°59, mais à l'évidence, le respect de la distance de recul incombe à celui qui cultive des OGM, non à ses voisins ; la jurisprudence est sans équivoque. La précision est par conséquent inutile.

L'amendement n°110 n'est pas adopté.

M. le président. - Je mets aux voix le sous-amendement n°241.

M. Jean-Marc Pastor. - Sans produire de maïs semence, je participe à l'organisation de cette activité dans ma commune. Les producteurs doivent respecter une distance de 50 à 400 mètres au minimum, sachant que la durée de vie du pollen de maïs est limitée à deux heures et que la phase de fécondité n'excède pas une heure et demie. La probabilité d'une véritable fécondation est donc faible si les précautions tiennent compte du vent dominant.

Or, le sous-amendement écarte du champ d'application le conditionnement, la transformation et la distribution. Le soja OGM pourra donc être importé sans aucune des conditions restrictives imposées aux agriculteurs français.

Mme Évelyne Didier.  - Très juste !

M. Jean-Marc Pastor.  - Je comprends les barrières imposées aux agriculteurs produisant des semences génétiquement modifiées mais de grâce, appliquons les mêmes restrictions aux OGM importés ! Ne commettons pas de distorsion au détriment des agriculteurs français.

Le sous-amendement n°241 est adopté.

M. Jean-Marc Pastor.  - La République est ébranlée ! Il n'y a plus d'équité !

M. le président.  - Je mets en voix l'amendement n°53 rectifié, sous-amendé.

M. Gérard Le Cam.  - Ainsi, l'intégralité du monde agricole se voit imposer des exigences dont, comme par hasard, les industriels, les transporteurs et les transformateurs seront exemptés. Ce n'est pas normal !

L'amendement n°53 rectifié, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°194 rectifié devient sans objet.

L'amendement n°92 est adopté.

L'amendement n°76 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°111.

M. le président.  - Je mets aux voix l'amendement n°59.

M. Gérard Le Cam.  - On me dit qu'il est satisfait. Pourtant, le tribunal de Marmande a condamné l'apiculteur. Cette décision a été confirmée en appel. Il a donc dû reculer ses ruches.

J'espère qu'à l'avenir la justice tiendra compte de nos débats.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La majorité de notre assemblée semble convaincue des bienfaits des OGM au point d'oublier comment elle réagit face à d'autres nuisances. Imaginez qu'une boîte de nuit bruyante vienne ouvrir à côté d'une résidence pour personnes âgées. Nul n'inviterait celles-ci à déménager pour éviter les nuisances. C'est pourtant la solution retenue en matière d'OGM.

Je confirme que le tribunal de Marmande a contraint l'agriculteur victime de nuisances à déplacer les ruches. Appliquons la même approche à tous les cas.

L'amendement n° 59 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°54 rectifié, présenté par MM. Soulage et Laffitte.

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La culture d'organismes génétiquement modifiées est interdite dans les parcs naturels nationaux et dans les parcs naturels régionaux.

M. Daniel Soulage.  - La table ronde « Préserver et gérer la biodiversité et les milieux naturels » du Grenelle de l'environnement a rappelé que la biodiversité permettait au vivant de faire face aux changements de l'environnement, si bien qu'amenuiser ce potentiel d'évolution réduirait aussi notre capacité d'adaptation : « C'est en ce sens que la biodiversité est notre assurance vie. »

Parallèlement, l'intérêt du projet de trame verte maillant l'ensemble du territoire a été affirmé avec force.

Les parcs naturels nationaux ou régionaux ont pour objet de préserver un patrimoine naturel particulièrement remarquable. Formant la base de cette trame verte, ils permettent de préserver la biodiversité sur nos territoires. Cela justifie amplement de promouvoir une agriculture durable, sans OGM, dans ces zones particulièrement sensibles.

Mme Évelyne Didier.  - Bravo !

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Si les plants génétiquement modifiés sont dangereux, il faut les interdire partout. En revanche, dès lors que le principe de précaution est respecté, on ne voit pas pourquoi les prohiber dans les parcs naturels.

Au demeurant, je ne suis pas certain qu'il y ait beaucoup de cultures agricoles dans les parcs nationaux.

Par ailleurs, la disposition serait contraire au droit européen.

Enfin, la loi institue le droit de produire et de consommer avec ou sans OGM. Pourquoi en exclure certains agriculteurs ? Je remercie M. Raffarin, alors Premier ministre, de m'avoir confié une mission de réflexion sur les produits sous signes de qualité. Ils représentent 20 % de notre production agricole. N'oublions pas les autres 80 % ! Et ne privons pas une fraction de notre territoire de ce qu'apportent les nouvelles technologies.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - Ce sujet extrêmement difficile a déjà été débattu il y a un an.

L'article 19 de la directive dispose qu'un organisme génétiquement modifié ayant reçu l'autorisation de mise sur le marché peut être utilisé sur l'ensemble du territoire de la Communauté, sous réserve des conditions spécifiques d'utilisation, d'environnement et de zones géographiques. Les parcs nationaux sont-ils concernés par cette restriction ? La deuxième partie de l'article est ambiguë, mais la première est claire.

Avis défavorable.

M. Daniel Soulage.  - C'est précisément l'absence actuelle d'agriculture intensive qui justifie l'amendement. La trame verte souhaitée par le Grenelle de l'environnement serait-elle incompatible avec le droit européen ?

L'amendement n° 54 rectifié est retiré.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je le reprends.

M. le président.  - Ce sera donc l'amendement n°54 rectifié bis.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Si c'est dangereux, c'est interdit ; si ça ne l'est pas, il n'y a aucune raison pour l'interdire... La distinction du rapporteur est manichéenne : quid des territoires privilégiés pour la biodiversité que sont les parcs ? L'impact des cultures OGM ne se limite pas à la dangerosité, sans quoi nous aurions tous fait nos valises : elles affectent aussi cette biodiversité à laquelle veille la Fédération nationale des parcs. Comment valider les chartes des parcs, que devient l'engagement des conseils régionaux pour des territoires sans OGM ? Notre Constitution ne le permet pas ? Au-delà de celle que nous connaissons, coûteuse et chichement comptée, voilà une occasion de dire que nous sommes pour une véritable décentralisation.

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Il faut être très clair. L'Inra estime que la biodiversité n'est pas menacée et la proposition est anti communautaire. Quant à l'expression des régions, c'est une posture que l'Union a déjà condamnée : une posture n'est jamais très loin de l'imposture...

Mme Marie-Christine Blandin.  - Prenez un miroir !

M. Pierre Laffitte.  - Sur le plan des principes, cet amendement est parfaitement raisonnable mais, compte tenu de la position de la commission et du Gouvernement, je m'abstiendrai en souhaitant que les collectivités locales participent au comité de biovigilance comme à la Haute autorité.

M. Jean Bizet.  - Vous avez déjà été entendu : nous avons voté un amendement en ce sens ce matin.

M. Pierre Laffitte.  - Je voterai donc contre l'amendement.

M. Gérard Longuet.  - Je remercie M. Soulage d'avoir retiré son amendement, ce qui m'a dispensé de voter contre. Président de conseil régional, j'ai soutenu un parc pendant douze ans. Ce sont des espaces vivants où travaillent des agriculteurs et des artisans. Ne les démobilisons pas en accumulant des contraintes qui poussent déjà des conseils municipaux à vouloir quitter les parcs. Il faut repousser cet amendement qui est le contraire de ce que nous voulons. (« Très bien ! » à droite)

M. Jacques Gautier.  - Je suivrai l'avis défavorable de la commission. Ce sont les mêmes régions qui font des effets d'annonce et qui construisent des terminaux pour importer du soja OGM : il faut savoir ce que l'on veut !

L'amendement n°54 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°228 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC-UDF et M. Laffitte.

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Afin de prévenir la contamination des cultures non génétiquement modifiées par des essais en plein champ ou des mises en culture d'organismes génétiquement modifiés, des zones de protection peuvent être créées dans le périmètre desquelles l'autorité administrative interdit l'implantation de cultures d'organismes génétiquement modifiés.

« Ces distances de protection sont de 100 mètres pour les cultures conventionnelles et de 300 mètres pour les cultures biologiques, pour les cultures allogames. Elles s'entendent par nature de culture.

« Elles peuvent cependant être réduites en tenant compte des tailles relatives des champs émetteurs et donneurs, des caractéristiques des vents dominants, de la synchronisation des floraisons et de l'hétérogénéité spatiales (haies, relief).

« Ces distances pourront être révisées tous les deux ans, sur la base de travaux scientifiques.

M. Daniel Soulage.  - Les OGM inquiètent alors qu'ils représentent un atout pour notre agriculture. Pour permettre une coexistence des cultures, il convient de prévoir une séparation stricte grâce à des zones de protection étanches. Le décret actuellement soumis au Bundesrat prévoit déjà un intervalle de 100 à 300 mètres. Les experts estiment que cela préviendrait la pollinisation et la contamination des cultures traditionnelles par les OGM. La recommandation actuelle de la France est insuffisante car, à 50 mètres, on se situe au-delà du seuil règlementaire de 0,9 % pour l'étiquetage.

L'espacement serait calculé de parcelle à parcelle, en tenant compte de l'exploitation dans son ensemble ainsi que de l'historique des cultures afin d'éviter qu'un agriculteur plante bio par opportunisme pour empêcher son voisin de semer des OGM. La réglementation sur ces zones de protection devra en outre être régulièrement révisée à la lumière des nouvelles découvertes scientifiques. Le décret prévoirait les assouplissements opportuns. Bien sûr, les zones de protection ne valent que pour les cultures allogames, comme le maïs.

M. le président.  - Amendement n°227 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC-UDF.

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Afin de prévenir la contamination des cultures non génétiquement modifiées par des essais en plein champ ou des mises en culture d'organismes génétiquement modifiés, des zones de protection peuvent être créées dans le périmètre desquelles l'autorité administrative interdit l'implantation de cultures d'organismes génétiquement modifiés.

« Les distances de protection s'entendent par nature de culture. Elles sont fixées par le ministère en charge de l'agriculture.

« Elles sont définies comme les distances à partir desquelles la dissémination entre les cultures est inférieure au seuil réglementaire. Ces distances prennent notamment en considération les distances de pollinisation, et pourront être pondérées par les tailles relatives des champs émetteurs et donneurs, les caractéristiques des vents dominants, la synchronisation des floraisons et l'hétérogénéité spatiales (haies, relief).

« Ces distances pourront être révisées tous les deux ans, sur la base de travaux scientifiques.

M. Daniel Soulage.  - Mon amendement rassurerait nos concitoyens ainsi que les agriculteurs biologiques. Grâce au projet Sigmea, les scientifiques ont déterminé toute une série de facteurs propres à limiter la dissémination des gènes modifiés et à rester en deçà du seuil de 0,9 %. Selon Antoine Messean, directeur de l'unité Impact écologique des innovations à l'Inra, les risques sont gradués suivant le contexte cultural et suivant les caractéristiques des OGM. Pour le maïs, il peut suffire d'organiser la récolte séparément, sinon des décalages de semis ou des distances de sécurité sont efficaces quoique pas toujours faciles à appliquer, la séparation géographique étant la solution raisonnable en cas de grande densité de maïs ou pour des espèces comme le soja. Cependant, la coexistence à l'échelle locale est techniquement impossible pour des filières, telles que l'agriculture biologique, qui revendiquent une absence totale d'OGM. Les travaux de l'Inra ayant mis en évidence les principaux facteurs de pollinisation croisée entre champs de maïs (taille des champs, distance, synchronisation des floraisons, vents), je propose que le ministre de l'agriculture, auquel je voudrais associer celui de l'écologie, définisse des distances de protection adaptée.

On constate un réel engouement pour le bio que le Grenelle de l'environnement a décidé de multiplier par trois. Si on veut y arriver, nos producteurs doivent retrouver confiance. Or certaines informations n'y contribuent pas et si la science a avancé, il faut que les vérités soient démontrées au niveau local.

Il faut faire des essais et publier les résultats sous le contrôle de l'Inra. Certes, il faut empêcher les faucheurs de détruire le travail des scientifiques, mais il faut aussi que la paix revienne et que ceux qui se consacrent à une agriculture plus respectueuse de l'environnement ne demeurent pas dans le doute. Je lis dans certains rapports que l'isolement ne pourra être organisé que par régions. Faut-il que les agriculteurs biologiques déménagent ? (Marques d'approbation sur les bancs socialistes)

M. Jean Bizet, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°227 rectifié.

J'ai déjà dit que je ne partageais pas cette approche de la contamination. Les prescriptions techniques permettent la coexistence des cultures. Cet amendement exclut les champs de culture d'OGM sans tenir compte des observations des chercheurs. L'architecture de l'ensemble du texte repose sur la coexistence des cultures OGM et non OGM.

Ensuite, le droit communautaire empêche de décréter des zones d'interdiction des OGM. L'article premier du projet de loi prévoit en conséquence la liberté de produire avec ou sans OGM, et cet amendement s'en écarte.

Je félicite le rapporteur de l'amendement pour son honnêteté intellectuelle. Il a reconnu que, si certaines cultures étaient « opportunément » localisées, cela empêcherait les cultures d'OGM. Donc, cet amendement pourrait mener à ce que celles-ci soient exclues de certaines parties du territoire. M. Longuet a fort justement expliqué que, si les parcs méritent d'être protégés, il ne faut pas en faire des sanctuaires.

M. Gérard Longuet.  - Ou des mouroirs !

M. Jean Bizet.  - Il ne faut pas les ghettoïser et que les créateurs de richesses les désertent.

M. Soulage veut que la confiance soit restaurée, et il a raison. Mais nous ne pouvons mieux faire. Monsieur Mercier, je vous regarde droit dans les yeux, la confiance a été rétablie il y a quelques années. Vous étiez présent lors de ce débat qui a abouti au vote de la charte de l'environnement, dont Mme Kosciusko-Morizet était le rapporteur à l'Assemblée nationale. Le principe de protection est là pour restaurer la confiance. C'est un principe d'action, d'anticipation et non de suspicion, comme il est, malheureusement, de plus en plus perçu par les citoyens.

Je demande à M. Soulage de faire acte de foi, car je ne peux donner qu'un avis défavorable à l'amendement n°227 rectifié.

Avis défavorable à l'amendement n°228 rectifié car il comporte en outre une disposition de nature réglementaire

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.  - L'amendement n°228 rectifié prévoit la révision des distances de protection, qui relève du domaine réglementaire en vertu de l'article L. 663-8 du code rural. Avis défavorable.

Le Gouvernement est favorable aux premier et quatrième alinéas de l'amendement n°227 rectifié. Toutefois, le troisième alinéa apporte une précision qui n'est pas du domaine législatif, et le deuxième contredit un sous-amendement présenté ultérieurement dans lequel nous demandons que ces distances soient fixées par le ministère de l'agriculture après avis du Haut conseil et du ministère chargé de l'environnement. En conséquence, avis défavorable à l'amendement.

M. Michel Mercier.  - Sauf s'il est rectifié.

M. Daniel Soulage.  - Je retire l'amendement n°228 rectifié puisque la révision des distances est de nature réglementaire. Nous sommes prêts à rectifier l'amendement n°227 rectifié en tenant compte des observations du ministre.

L'amendement n°228 rectifié est retiré.

M. Michel Mercier.  - Nous proposons de supprimer le troisième alinéa de l'amendement n°227 rectifié et de modifier le deuxième en précisant que les distances de protection sont fixées par le ministère en charge de l'agriculture après avis du ministère chargé de l'environnement.

M. Gérard César.  - Je ne sais si mes collègues s'y retrouvent, mais il serait préférable de disposer du texte exact de l'amendement. Je propose pour cela une suspension de séance pour que nous puissions réunir la commission.

La séance, suspendue à midi quarante, reprend à 15 heures.

présidence de M. Christian Poncelet