Financement de la sécurité sociale pour 2009 (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

Discussion des articles (Suite)

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ANNÉE 2008

Section 1

Dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre financier de la sécurité sociale

Article 3

Au titre de l'année 2008, sont rectifiés, conformément aux tableaux qui suivent :

1° Les prévisions de recettes et le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

175,4

179,4

-3,9

Vieillesse

175,7

181,2

-5,6

Famille

57,3

56,9

0,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,6

12,2

0,4

Toutes branches (hors transferts entre branches)

415,6

424,3

-8,7

2° Les prévisions de recettes et le tableau d'équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

151,0

155,0

-4,0

Vieillesse

89,8

95,6

-5,7

Famille

56,9

56,4

0,4

Accidents du travail et maladies professionnelles

11,0

10,6

0,4

Toutes branches (hors transferts entre branches)

303,4

312,3

-8,9

3° Les prévisions de recettes et le tableau d'équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

15,3

14,4

0,9

Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles

14,4

17,0

-2,6

Mme Isabelle Pasquet.  - On pourrait presque se réjouir que les déficits pour 2008 aient été maintenus et que les prévisions de recettes correspondent à peu près à celles qui furent votées l'an dernier. Mais les branches vieillesse, maladie, accidents du travail et maladies professionnelles sont dans le rouge. Deux de ces trois branches ont connu une progression de dépenses supérieure aux prévisions. Je ne doute pas que votre gouvernement, poursuivant sa logique de maîtrise des dépenses, s'y attaquera !

Mais vous n'envisagez que les mesures qui pèsent sur les dépenses, sans vous soucier des recettes. Preuve en est votre entêtement à refuser d'assujettir l'ensemble des revenus du travail à la CSG et à la CRDS. Déjà l'année dernière, la seule solution que vous avez trouvée, c'est l'instauration des franchises médicales. Elles étaient censées, dans un premier temps, financer le plan Alzheimer, voulu par le Président de la République. Face à la contestation de ceux qui soulignaient qu'un plan de cette envergure ne pouvait pas être uniquement financé par ces franchises, votre gouvernement a changé son fusil d'épaule. Les franchises sont alors devenues un outil de responsabilisation des malades accusés de piller par leur surconsommation les comptes de la sécurité sociale. Bref un instrument servant non pas à faire entrer de nouvelles ressources mais à limiter certaines dépenses. En ce sens, vous avez partiellement réussi : avec ces franchises médicales, ajoutées aux déremboursements qui se sont multipliés, vous avez habitué les Français à puiser dans leur budget.

On voit aujourd'hui que cela ne suffira pas à sauver notre système. Vos mesures ne sont qu'emplâtres sur jambe de bois. Si vous poursuivez cette politique, les déficits ne cesseront de croître pour, selon l'Insee, atteindre 15 milliard en 2015. Et vous ne faites rien, vous laissez les ressources s'amoindrir, vous laissez filer les déficits afin de mieux dénoncer notre système et de lui substituer des assurances privées. Voilà vos véritables projets ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. le président.  - Amendement n°491, présenté par le Gouvernement.

I. - Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa du 1° de cet article :

(en milliards d'euros)

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

175,2

179,4

-4,1

Vieillesse

175,6

181,2

-5,6

Famille

57,2

56,9

0,3

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,6

12,2

0,4

Toutes branches (hors transferts entre branches)

415,2

424,3

-9,0

II. - Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa du 2° de cet article :

(en milliards d'euros)

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

150,8

155,0

-4,2

Vieillesse

89,8

95,6

-5,8

Famille

56,7

56,4

0,3

Accidents du travail et maladies professionnelles

10,9

10,6

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

303,0

312,3

-9,3

III. - Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa du 3° de cet article :

(en milliards d'euros)

Prévisions de recettes

Prévisions de dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

15,3

14,5

0,8

Fonds de financement des prestations sociales des non salariés agricoles (FFIPSA)

14,4

17,0

-2,6

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - L'impact exceptionnel de la crise financière et économique que nous traversons a conduit le Gouvernement, à modifier un certain nombre d'hypothèses macro-économiques qui influent sur l'évolution future des différents comptes publics.

La prévision de croissance est ramenée de 1 % à 0,5 % et celle d'inflation de 2 % à 1,5 %. En cohérence, le Gouvernement dépose une série d'amendements portant sur les années 2008, 2009 et les prévisions pluriannuelles. Sur chaque article présentant des tableaux d'équilibre, des objectifs de dépenses et des prévisions de recettes, vous serez donc amenés à vous prononcer sur de tels amendements.

La masse salariale est revue à la baisse en 2008 de 4,5 % à 4,25 %, et, pour 2009, de 3,5 % à 2,75 %. Cela a des conséquences à la fois sur les cotisations et sur la « CSG activité » pour 500 millions en 2008 et 1,5 milliard en 2009 sur le régime général.

Le rendement de la taxe sur les salaires acquittée par les banques et assurances est révisé à la baisse pour 200 millions en 2008 et 400 millions en 2009. Compte tenu de la situation des marchés financiers, le rendement de la « CSG capital » diminuerait de 200 millions en 2009 par rapport à la prévision initiale.

Sous réserve de l'application de l'indexation sur l'inflation prévisionnelle conformément à la loi, le Gouvernement propose de maintenir les objectifs de dépenses, en particulier l'Ondam. La révision des prévisions de chômage incite à augmenter les charges du FSV au titre de la prise en charge des cotisations chômage.

Ces révisions conduisent à revoir à la hausse le déficit du régime général, de 400 millions en 2008 et de 1,9 milliard en 2009. Le déficit 2008 serait alors de 9,3 milliards : 4,2 pour la Cnam et 5,8 pour la Cnav.

En 2009, le déficit du régime général s'établira à 10,5 milliards, dont 4,6 pour l'assurance maladie et 5,3 milliards pour branche vieillesse. Les prévisions de recettes sont révisées à hauteur de 500 millions d'euros et les soldes bruts revus à la baisse dans la même proportion, ce qui est parfaitement cohérent avec les explications que M. Woerth a données hier.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Nous ne pouvons que saluer la volonté de sincérité du Gouvernement.

M. Bernard Cazeau.  - Un peu tard !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Avis favorable.

M. Guy Fischer.  - Nous enregistrons les rectifications qu'opère le Gouvernement en nous demandant si elles sont bien conformes à la réalité. A lire les économistes, tout le monde pense que l'année 2009 sera très difficile, la plus difficile même depuis 1945.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Nous sommes en 2008 !

M. Guy Fischer.  - Mais la ministre a parlé de 2009. La croissance n'est-elle pas surestimée ? Certains disent qu'elle sera négative. Quelles seront les conséquences de l'explosion du chômage ? Sa violence est telle qu'on parle de 180 000 à 200 000 suppressions d'emplois. Je ne veux pas jouer les oiseaux de mauvais augure mais je sais les craintes des salariés les plus pauvres et des plus démunis.

M. Bernard Cazeau.  - Nous prenons acte de la rectification que M. Woerth avait annoncée hier. Il est bien dommage qu'elle n'ait pas été opérée plus tôt car les chiffres annoncés lors de son audition étaient irréalistes : le FMI, toujours très modéré évoque une croissance de - 0,5 %. Cette rectification n'est que partielle et le Gouvernement la révisera sans doute. Nous découvrons la crise dans nos départements et, alors que les réponses du Gouvernement tardent à se mettre en place, les licenciements touchent les grandes entreprises comme les petites. Sans accuser le Gouvernement, j'émets donc beaucoup de réserves.

L'amendement n°491 est adopté ainsi que l'article 3, modifié.

Article 4

I. - Au titre de l'année 2008, l'objectif d'amortissement rectifié de la dette sociale par la Caisse d'amortissement de la dette sociale est fixé à 2,8 milliards d'euros.

II. - Au titre de l'année 2008, les prévisions rectifiées des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites sont fixées à 1,9 milliard d'euros.

M. Guy Fischer.  - Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites (FRR) devraient dépasser les prévisions initiales. Or, Le Canard enchaîné, qui ne commet pas beaucoup d'erreurs...

M. Alain Gournac.  - Mais pas L'Humanité !

M. Guy Fischer.  - ...a dévoilé une information importante et inquiétante : le FRR aurait perdu 3,1 milliards d'euros. J'ai équilibré mes sources en consultant Les Échos et Le Figaro de M. Dassault -la voix du Gouvernement : on veut présenter un texte, on va chez M. Dassault ! J'ai lu que le rendement avait baissé de 14 %. J'ai poursuivi mes recherches sur le site internet du Fonds et j'ai constaté qu'il comportait des placements français et américains. Aussi parle-t-on de 200 millions de pertes rien que pour le change. Le Fonds est investi à 30 % en obligations et 70 % en actions, dont 30,9 % dans le domaine financier et 11,3 % dans les biens et services, c'est-à-dire les secteurs les plus touchés par la crise qui ébranle le monde. Comment, alors, les rendements seraient-ils à la hauteur des enjeux à venir ? Cette situation confirme ce que nous redoutions et dénoncions lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Mme Beaudeau décrivait alors un cheval de Troie de la capitalisation, un fonds de pension collectif au coeur de notre système par répartition. Le FRR devait être abondé avec le produit des privatisations, mais elles ont servi au désendettement de l'État, avec l'attribution d'une quatrième licence UMTS, mais elle est toujours en suspens, et avec une taxe sur les transactions boursières, mais elle est notoirement insuffisante. Résultat, le fonds, qui devait atteindre 150 millions d'euros en 2020, n'en compte que 33 aujourd'hui, ce qui est très en deçà des objectifs initiaux, surtout avec une décote de 4,5 milliards.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Les chiffres sont connus et point n'est besoin d'aller les chercher dans un journal satirique paraissant le mercredi. Au 30 septembre 2008, les actifs du FRR s'élevaient à 30 milliards contre 34,5 milliards le 31 décembre dernier. Leur valorisation avait donc baissé de 4,5 milliards sous l'effet de la crise. Cependant, quand l'horizon est 2020, les plus ou moins-values restent latentes, contrairement à celles que l'on constate lors de la vente des actifs. La performance annuelle actuelle s'établissait à moins 14,5 % au 30 septembre, alors que le marché des actions a chuté de 24 %. Cependant, dans la mesure où il s'agit d'investissements à long terme, il faut apprécier les performances du fonds depuis sa création : elle s'élève alors à 3,4 % et restera positive sur 2008. Le FRR est légitimement fondé à placer la majeure partie de ses actifs en actions afin de bénéficier d'une plus forte dynamique sur une longue période. Cependant, il a pris la précaution de diversifier ses placements à hauteur de la moitié de ses actifs et veille à ne pas s'exposer à des défaillances en ne dépassant pas 5 % en titres d'un même émetteur.

De plus, les 281 millions que le Fonds de réserve des retraites a confiés à Lehman Brothers sont sécurisés en ce qu'ils ont été ségrégés des actifs des autres gérants et de leurs fonds propres. Enfin, le Fonds dispose d'une réserve sûre et pérenne de 1,7 milliard au titre des 2 % sur le capital. Monsieur Fischer, voilà les précisions que je voulais vous apporter.

M. Guy Fischer.  - Merci !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Sans revenir sur les explications données par Mme la ministre, je veux, en tant que représentant du Sénat au Fonds, rassurer mon excellent collègue M. Fischer...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Et lui épargner certaines lectures sulfureuses...

M. Nicolas About, président de la commission.  - ...telles que le Canard « déchaîné »... (Sourires)

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Le placement d'actifs chez Lehman Brothers n'aura pas d'incidence sur le Fonds. Au reste, je suis surpris que vous ayez besoin de lire le journal pour être informé quand il vous suffirait de vous adresser à un certain représentant d'une organisation syndicale, si proche de vous... (Sourires) La gestion du Fonds fait l'objet d'un consensus réitéré avec les partenaires sociaux, malgré les crises subies. Le pourcentage de pertes doit être relativisé, le Fonds étant un investisseur de long terme. Plus prosaïquement, on pourrait dire qu'il n'a rien perdu tant qu'il n'a rien vendu. Certes, pour l'heure, il est amputé de 4,5 milliards, mais sa situation est moins mauvaise que d'autres car la Caisse des dépôts, qui le gère, a montré une certaine clairvoyance. En revanche, comme je l'ai dit hier, nous devrons veiller à ce qu'il ait les moyens de participer au service de la retraite quand s'en fera sentir le besoin, soit vers 2025.

M. Guy Fischer.  - Vive la méthode Coué !

L'article 4 est adopté.

Article additionnel

M. le président. - Amendement n°427, présenté par M. Dassault.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 124-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Les cotisations et les taxes liées au financement de la sécurité sociale pour les branches maladie et allocations familiales sont remplacées, à due concurrence, par une contribution dénommée « Coefficient d'Activité » dont l'assiette est déterminée par la différence entre le montant du chiffre d'affaires et le montant de la masse salariale augmentée des charges salariales afférentes. Le taux de cette contribution sera déterminé annuellement par voie réglementaire favorisant le financement de la sécurité sociale. Les sommes correspondantes seront versées par les entreprises à une caisse unique qui sera chargée de la répartition. »

M. Serge Dassault.  - Pour moi, il est indispensable de supprimer les charges sur les salaires qui ne concernent pas l'entreprise, soit celles liées à la famille et à la maladie, parce qu'elles pèsent sur le coût de production et, donc, la compétitivité. Par parenthèse, cela permettrait également que le salaire corresponde enfin au net.

Ensuite, pour gager ces 110 milliards de pertes sans grever le budget de l'État, je propose de modifier l'assiette de la taxation des entreprises en prenant pour référence le chiffre d'affaires et non les salaires. De fait, charger les salaires -je le répète-, c'est freiner les emplois et la croissance et se condamner au chômage pour l'éternité. Avec des coûts de production moins élevés, le chiffre d'affaires des entreprises augmenterait, ce qui apporterait autant de ressources supplémentaires pour la sécurité sociale. Pourquoi retenir un coefficient d'activité égal au chiffre d'affaires moins les salaires ? Parce que cela favoriserait les entreprises de main-d'oeuvre et participerait à la lutte contre les délocalisations. Certes, j'aurais pu proposer que ces charges soient financées par une augmentation des prélèvements -la CSG ou la TVA- ou encore imputées au budget de l'État -cette solution est impossible dans la situation actuelle. Mais cela est l'affaire du Gouvernement.

La solution que j'ai proposée est critiquable, elle peut être modifiée par le Gouvernement. L'essentiel est que l'on adopte le principe de la suppression des charges en se donnant un délai de réflexion pour trouver un système qui agrée à tous.

Mme Patricia Schillinger.  - Quelles seront les répercussions sur les salaires ?

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Monsieur Dassault, vous défendez avec constance cette idée de modifier l'assiette des cotisations sociales. De nombreux experts, à la demande de M. Chirac, alors Président de la République, s'étaient penchés sur le principe d'un coefficient d'activité pour conclure qu'il fallait approfondir la réflexion avant de se lancer dans une telle réforme. La commission, considérant qu'il s'agit d'un amendement d'appel, entendait solliciter l'avis du Gouvernement, ce qui équivaut à un avis de sagesse. Toutefois, je m'interroge. Ne pensez-vous pas qu'il serait opportun de créer un groupe de travail spécifique réunissant les commissions des affaires sociales et des finances afin de mesurer les éventuels effets pervers...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Très bien !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - ...de l'application d'un coefficient d'activité unique à toutes les entreprises, des plus petites aux plus grandes, des artisans aux commerçants. En outre, aborder cette question est bienvenu au moment où le Président de la République nous demande de réfléchir à la façon dont on pourrait extraire la masse salariale et l'investissement de la taxe professionnelle afin de relancer l'emploi. Peut-être existe-t-il une solution miraculeuse pour maintenir une bonne compétitivité des entreprises et conserver à la sécurité sociale des ressources dynamiques qui couvriraient les besoins ? En effet, avec les nouvelles technologies de soins, les nouvelles molécules, il serait illusoire de penser que nous pourrons réduire les dépenses de santé. Au mieux, nous les contiendrons. Bref, sous réserve que le Gouvernement accepte également de travailler votre proposition, je vous invite à retirer votre amendement.

M. Paul Blanc.  - Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ce n'est pas une petite réforme ! Elle ne saurait donc intervenir au détour d'un simple amendement. Sur le fond, les études menées sur le sujet depuis 2006 ne concluent pas à un effet favorable. Le groupe de travail sur l'élargissement de l'assiette des cotisations indique, dans son rapport public, le résultat des simulations : une baisse de 4 points de cotisation au profit du prélèvement proposé coûterait à long terme 1,2 point de PIB et 32 000 emplois ; il susciterait des transferts de charges entre les entreprises et déstabiliserait des pans entiers de l'économie, automobile et commerce par exemple. Le Conseil d'analyse économique a exprimé son scepticisme et le Conseil d'orientation pour l'emploi estime que le coefficient emploi activité (CEA) comporte de graves inconvénients, absence de justification économique au prélèvement, taxations en cascade -ce que la création de la TVA avait précisément pour but d'éviter. Le Gouvernement, en l'état actuel des travaux menés, est défavorable à l'amendement mais reste disponible pour participer à une réflexion et des analyses complémentaires.

Mme Annie David.  - M. Leclerc a rappelé que la protection sociale doit être basée sur la solidarité nationale. M. le rapporteur, Mme la ministre, comme M. Fischer et Mme Le Texier ont souligné que notre système était très envié et considéré comme le meilleur au monde. Nous regrettons qu'il se dégrade mais, s'il demeure de grande qualité, c'est qu'il a été fondé, en 1945, sur la solidarité nationale. Quelle protection sociale voulons-nous ? Préférons-nous un système dans lequel tous nos concitoyens peuvent se soigner, quels que soient leurs revenus, ou souhaitons-nous des cotisations sociales moindres, avec pour contrepartie une limitation de l'accès aux soins pour une partie de la population ? Nous ne voterons pas l'amendement de M. Dassault.

M. Serge Dassault.  - Vous avez mal compris ! Je ne veux pas réduire la protection sociale, mais changer la façon dont les entreprises la financent. Si nous nous cramponnons aux modalités actuelles, nous en subirons les conséquences. La protection sociale doit être financée par les entreprises -mais pas par les salaires, car ce sont alors l'activité économique et l'emploi qui en font les frais.

Ne m'opposez pas l'avis de commissions qui refusent la nouveauté sous de mauvais prétextes. Pour le plus grand nombre des entreprises, cela ne change rien. Et que les entreprises employant beaucoup de personnes paient moins, que celles qui importent paient plus, ce n'est pas forcément stupide ! Je regrette que l'on s'en remette à l'opinion de comités Théodule dont les membres ne sont pas au courant des réalités. Si l'on continue à faire supporter la protection sociale par les salaires, les entreprises ne vendront plus rien, elles délocaliseront en Roumanie ou en Inde, elles feront faillite. Faisons étudier ma proposition par des gens qui connaissent le fonctionnement de l'économie. Trouvons ensemble une méthode pour financer autrement notre système. Une réflexion en commission, c'est un début. Les simulations sont simples à effectuer ! Je maintiens la moitié de mon amendement.

M. le président.  - Laquelle ? Je n'ai pas été saisi d'une version rectifiée.

M. Serge Dassault.  - Je souhaiterais une suspension de séance pour revoir la rédaction.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Non ! Je demande le retrait ou le rejet de cet amendement sans portée normative et traitant d'un sujet complexe. Ce ne sont pas cinq minutes de suspension qui règleront le problème.

M. Serge Dassault.  - Sous ces pressions amicales, je retire l'amendement. Mais je souhaite sa mise en application. Je compte sur votre engagement, monsieur le président de la commission, pour trouver une solution de remplacement. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°427 est retiré.

Article 5

La loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008 est ainsi modifiée :

1° Au II de l'article 60, le montant : « 301 millions d'euros » est remplacé par le montant : « 201 millions d'euros » ;

2° A la première phrase de l'article 74, le montant : « 301 millions d'euros » est remplacé par le montant : « 231 millions d'euros » ;

3° A l'article 78, le montant : « 75 millions d'euros » est remplacé par le montant : « 55 millions d'euros ».

M. le président.  - Amendement n°94, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

M. Guy Fischer.  - Cet article réduit les ressources du Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins (Fiqcs), du Fonds pour la modernisation des établissements de santé et de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus). Placé devant l'urgente nécessité de trouver de nouvelles ressources, le Gouvernement, au lieu de rechercher des solutions pérennes, se contente une nouvelle fois de racler les fonds de tiroir... Ce sont près de 200 millions que vous gelez, au seul motif que les crédits n'auraient pas été utilisés dans leur intégralité. Nous aurions souhaité, pour le moins, disposer d'une information préalable sur l'utilisation des fonds, la destination des sommes engagées, la nature des sommes non utilisées et les causes de cette sous-consommation. Elle aurait permis un échange de vues sur les missions assignées à ces fonds. La représentation aurait pu envisager une affectation des sommes en jeu au financement d'une partie au moins du coût du dossier médical partagé, cette éternelle arlésienne... La situation excédentaire de ces fonds n'est-elle pas la preuve que le Gouvernement a échoué à régler les problèmes, comme à développer un exercice pluridisciplinaire en maison de santé ?

La ponction que vous opérez ici contribuera encore, d'après nous, à aggraver les dépenses de l'hôpital, car les malades, sans autre solution, se dirigeront vers lui et, en particulier, vers les services d'urgence. Vous auriez pu améliorer les conditions de travail des personnels, l'accès aux soins, mais non ! Si nous vous interpellons ici, madame la ministre, c'est que nous craignons que les salariés les plus fragiles fassent les frais de cette rigueur budgétaire.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - M. Fischer s'étonnera d'autant moins de l'avis défavorable de la commission qu'il sait qu'elle souhaite aller plus loin encore que ce que propose le Gouvernement et a déposé sur cette question un amendement qui sera examiné en son temps.

M. Guy Fischer.  - Parti pris !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je vous ferai, monsieur le sénateur, une réponse complète. Ce gel de crédit ne fait que prendre acte d'un état de consommation et d'un calendrier. Il n'aura pas d'incidence sur les recettes des organismes concernés et ne met pas en cause le dossier médical partagé, auquel je suis très attachée. Il ne s'agit là que d'un acte de bonne gestion des fonds publics, avec lequel vous ne sauriez être en désaccord.

La dotation du Fiqcs a été fixée, en 2008, à 301 millions, auxquels se sont ajoutés 55 millions de reports de crédits. Sur ces 356 millions, 82 ont été provisionnés pour le financement du dossier médical partagé, dont la montée en charge a été ralentie par la révision stratégique opérée cette année. Je rappelle que ce fonds avait été créé en 2007 pour regrouper les financements accordés aux projets nationaux et locaux visant à une meilleure organisation des soins et simplifier les formalités pour les porteurs de projets. Le bilan de l'activité 2007 a déjà fait apparaître une augmentation du nombre de projets financés, tant dans le cadre de la permanence des soins que des maisons de santé pluridisciplinaires : 1 025 projets ont ainsi été financés, dont 1 019 projets régionaux pour la mise en place de réseaux de santé, l'évaluation des pratiques professionnelles, l'aide à l'installation, le développement des systèmes d'information...

La loi de financement pour 2008 a permis d'aider au financement de 100 maisons de santé pluridisciplinaires. Nous avons aidé tous les projets arrivés à maturité, sans en écarter aucun. Si de nouveaux projets arrivaient en 2009, il est clair que nous abonderions le Fiqcs.

Pour ce qui concerne le Fonds de modernisation des établissements de santé, les délais d'utilisation des crédits sont, pour des raisons multiples, importants. Fin 2007, son solde cumulé s'élevait à 552,1 millions. C'est considérable. En 2008, il a été doté de 301 millions, auxquels il convient d'ajouter 72 millions de reports de crédits. Le rythme de consommation constaté sur les derniers exercices nous engage à moduler les crédits en fonction de la consommation. Ce n'est là rien d'autre, encore une fois, que la mise en application d'un principe de bonne gestion.

Quant à l'Eprus, si ses engagements sont importants en raison de la montée en charge de la constitution de stocks de masques et de la mise à niveau des produits de santé destinés à faire face à une épidémie de grippe aviaire ou aux menaces du bioterrorisme, l'ensemble de ses crédits de paiement n'est pas utilisé : il était légitime de procéder à un calibrage.

L'amendement n°94 n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

Article 6

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans leur rédaction antérieure à la présente loi, les pensions mentionnées à ces articles, liquidées avec entrée en jouissance antérieure au 1er septembre 2008, les cotisations et salaires relevant de l'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale ayant donné lieu à un versement de cotisations jusqu'au 31 août 2008 qui servent de base au calcul des pensions dont l'entrée en jouissance est postérieure à cette même date, ainsi que les prestations dont les règles de revalorisation en vigueur au 1er septembre 2008 sont identiques, sont revalorisés au 1er septembre 2008 du coefficient de 1,008. Ce coefficient ne se substitue pas au coefficient de 1,011 appliqué au 1er janvier 2008.

Pour l'application, au titre de l'année 2008, de l'ajustement prévu au deuxième alinéa de l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la présente loi, l'évolution des prix à la consommation hors tabac initialement prévue pour l'année 2008 et ayant servi de base pour la détermination de la revalorisation effectuée au 1er janvier 2008 est majorée de 0,6 point.

Mme Patricia Schillinger.  - Après la revalorisation de 1,1 % prévue par la dernière loi de financement, le Gouvernement a annoncé un coup de pouce supplémentaire de 0,8 % aux retraites à compter du 1er septembre 2008. Avec cela, estime-t-il, les retraités peuvent s'estimer satisfaits. Mais le 16 octobre dernier, les intéressés lui ont fait savoir que tel n'était pas le cas et qu'ils estimaient l'effort insuffisant. De fait, il ne permet pas même de couvrir une inflation à 2,2 % et ne comble pas leur perte de pouvoir d'achat. Pourquoi une revalorisation au 1er septembre, qui ne rattrape rien des huit premiers mois de l'année ? Pour assurer un réel rattrapage, il aurait fallu 1,3 % sur l'ensemble de l'année. A partir de l'an prochain, rassure-t-on, le calcul se fera au 1er avril : mais quid des trois premiers mois ? J'ajoute que sur les 0,8 % annoncés, 0,6 % sont accordés par anticipation sur 2009.

Cette anticipation doit être complétée par un rattrapage dès le 1er janvier.

Depuis 2002, la revalorisation ne compense pas l'inflation : tandis que l'indice général des prix progressait de 12,2 %, les retraites n'augmentaient que de 10,8 %. J'ajoute que l'indice minimise le renchérissement des produits de première nécessité, les prix de l'alimentation ayant augmenté de 4,7 % de septembre 2007 à septembre 2008, ceux de l'énergie s'accroissant de 14,2 % pendant cette période.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Actuellement, ils baissent !

Mme Patricia Schillinger.  - Selon certains syndicats, seule une hausse de 3,7 % maintiendraient le pouvoir d'achat des retraités en 2009. On en est loin, le PLFSS négligeant la crise économique.

M. le président.  - Je mets aux voix l'article 6.

Mme Annie David.  - La revalorisation proposée ne compense pas l'inflation, notamment celle qui touche les produits de première nécessité. Subissant de plein fouet la baisse du pouvoir d'achat, les retraités ont tenté de se faire entendre le 16 octobre. Hélas, ils ne vous sont pas convaincus, si bien que la revalorisation proposée reste inférieure à l'inflation estimée, soit 2,9 %.

En 2003, votre majorité avait indexé les pensions de retraite sur les prix, alors que le groupe CRC voulait maintenir l'alignement sur les salaires. Le Gouvernement avait alors promis une revalorisation fidèle, mais la réalité est tout autre, puisque la hausse de septembre comble à peine les écarts de 2007. D'ailleurs, la réévaluation de 0,8 % est constituée pour les trois quarts d'anticipations portant sur l'année 2009.

Votre volonté de réaliser des économies sur la branche vieillesse sera lourde de conséquences pour les retraités, qui se privent de soins, qui économisent sur leurs loisirs et leur alimentation.

Le Secours catholique vient de publier un rapport où il affirme que la proportion des personnes secourues augmente au-delà de 55 ans. Plus de la moitié des retraités vivent avec moins de 1 300 euros par mois, les femmes étant nombreuses à percevoir 700 euros mensuels, soit moins que le seuil de pauvreté.

Je suis étonnée de ce qui a été dit à l'Assemblée nationale : à en croire son rapporteur, M. Jacquat, les retraités n'auraient pas subi de perte du pouvoir d'achat, puisque « pour un indice 100 hors tabac en 1990, l'évolution des prix a atteint 135,6 en 2008, contre 136,4 pour la revalorisation des pensions de vieillesse du régime général. » Les retraités qui sollicitent leurs enfants pour boucler leurs fins de mois et se restreignent en tout seront heureux d'apprendre qu'ils fantasment sur leurs difficultés !

Vous avez beau jeu de proposer un recul -volontaire, comme toujours au début- du départ à la retraite, alors que seuls 25 % des salariés âgés de plus de 60 ans sont aujourd'hui en activité. Pour l'immense majorité de nos concitoyens, allonger la durée de cotisation à 41 ans sans avoir diminué radicalement le chômage après 60 ans signifie juste qu'il manquera une année de cotisation, qui réduira de 10 % les pensions perçues.

Cette baisse programmée sera d'autant plus ample que vous avez imposé à la majorité des organisations syndicales une réforme de l'Ircantec entérinant une baisse de 30 % pour les versements à venir, accompagnée d'une hausse des cotisations.

Vous faites donc passer aux salariés le message suivant : travailler et cotiser plus et plus longtemps pour percevoir la retraite pendant moins de temps. Telle est votre conception du progrès !

Nous voterons contre cet article. (Applaudissements à gauche)

L'article 6 est adopté.

Les articles 7 et 8 sont adoptés.

M. le président.  - Je mets aux voix la deuxième partie du projet de loi.

M. Bernard Cazeau.  - Avec un déficit prévu avoisinant 9,3 milliards d'euros, l'année 2008 confirme l'exercice antérieur et préfigure sans doute 2009.

L'assurance maladie continue à déraper, le déficit cumulé en six ans atteignant 46,5 milliards d'euros.

Alors que la branche vieillesse tenait déjà la corde du déficit en 2007, celui-ci atteint presque 6 milliards d'euros en 2008 contre 1,9 en 2006. Cette phénoménale accélération signe l'échec de la réforme Fillon de 2003, qui n'était pas financée. Nous ne pouvons que voter contre.

L'ensemble de la deuxième partie est adopté.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je veux préciser à Mme David que, selon les projections financières du Conseil d'orientation des retraites, l'Ircantec, qui couvre 15 millions d'affiliés dans les trois fonctions publiques, subira d'importantes détériorations de son ratio démographique, un déficit technique dès l'année 2015 consommant les réserves en une dizaine d'années, si bien qu'en absence de réformes, une cessation des paiements interviendrait en 2025.

Alors que la plupart des cotisants restent affiliés environ neuf ans, les praticiens hospitaliers le sont pendant plus de trente ans. Globalement, 24 % des cotisations sont versés par 17 % des cotisants. Vu l'incidence que la réforme du régime aurait pour ces affiliés, les discussions suspendues en décembre 2005 ont été reprises avec leurs quatre intersyndicales.

Il y a trois semaines, le conseil d'administration de l'Ircantec a voté une modification des paramètres destinée à maintenir la viabilité de ce régime, que l'immobilisme condamnerait à disparaître. La baisse du rendement des points le rendrait viable jusqu'en 2040.

Une dernière réunion avec les représentants des praticiens hospitaliers a eu lieu en octobre. Il a été décidé que les points de retraite acquis en 2009 restaient inchangés. En outre, 180 millions d'euros compenseront la baisse du rendement des points subis par ces praticiens.

La réduction du niveau des pensions ne devrait pas excéder 8 % en 2040, le rendement des points sera fixé à 7,5 % en 2017, soit plus que les 5,75 % actuels des régimes Agirc-Arrco.

Débat thématique sur l'hôpital

M. le président.  - Sur proposition de la commission des affaires sociales, la Conférence des Présidents a décidé d'organiser un débat thématique sur l'hôpital avant d'aborder la troisième partie du projet de loi.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Le moment est venu de réformer l'hôpital pour préserver un système de santé dont les Français sont fiers à juste titre. Pour conserver notre modèle hospitalier, nous devons changer l'hôpital, en évitant deux écueils, le premier consistant à estimer que tout a été fait, le second, que tout reste à faire.

Comme tous les organismes vivants, nos établissements de santé doivent poursuivre leur transformation dans la durée.

Ces dernières années, le financement a progressivement basculé vers la tarification à l'activité, qui en assure désormais 100 %. Je mentionnerai aussi la réforme de la gouvernance hospitalière.

Nous devons aller plus loin. Nous ne pouvons pas faire payer aux générations futures les conséquences de notre inertie et une dette impossible à régler. Nous devons leur transmettre un hôpital fort et performant.

La réforme est nécessaire et elle va se faire. Elle ne réussira que si nous parvenons à en faire celle de tous les personnels de l'hôpital. C'est pour cela que je me suis efforcée de mener un dialogue social exemplaire ; cette démarche prend du temps, mais il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Pour moi, réformer dans le dialogue n'est pas un slogan mais un impératif. J'ai visité beaucoup d'établissements, de tout statut, j'ai pu constater ce qu'étaient l'engagement des personnels et leur volonté unanime de préserver le pacte que nous ont laissé nos pères de la Résistance.

La seule finalité de la réforme sera de moderniser l'hôpital afin de garantir à tous, sur l'ensemble du territoire, un accès à des soins de qualité, ce qui implique de susciter la responsabilité de chacun. Cette politique répond à trois exigences : égalité, responsabilité individuelle et responsabilité collective -c'est-à-dire solidarité.

Nous ne pourrons améliorer concrètement les conditions d'accès aux soins de tous qu'en tirant les conséquences de la gradation des besoins de santé, celle-ci appelant une gradation des soins et une gradation des structures. Il importe ainsi de redéfinir les conditions d'une plus juste répartition des structures de soin sur le territoire. On ne fait pas appel au même hôpital pour des soins de suite ou une prothèse de hanche. Chacun doit pouvoir recourir au bon niveau de soins en fonction de ses besoins, hôpital de proximité, centre hospitalier équipé de plateaux techniques et d'équipes spécialisées, centre hospitalier universitaire ou centre de référence pour les pathologies les plus graves. La proximité sans la qualité renforce les inégalités, ceux qui savent iront toujours se faire soigner dans un établissement de qualité. En revanche, dans l'urgence, chacun, quels que soient ses revenus et son niveau d'information, est à égalité. C'est pourquoi j'ai souhaité renforcer le maillage des services d'urgence ; les Smur héliportés et les outils de télésanté devront y être intégrés. La télésanté permet de suivre des malades chroniques, d'établir des diagnostics à distance. Elle permet au professionnel de santé isolé de bénéficier de l'avis des experts, elle facilite le maintien à domicile des patients.

Il est aujourd'hui illusoire de penser qu'un établissement peut tout faire tout seul ; en chirurgie comme dans d'autres disciplines, on ne fait bien que ce que l'on fait souvent et en équipe. C'est pour cela que je souhaite développer la complémentarité entre les établissements, qui vaut toujours mieux que l'exhaustivité. Il faut que chaque établissement développe des pôles d'excellence. Il n'est pas question de faire disparaître les petits établissements mais de leur permettre de travailler ensemble pour proposer une réponse graduée à la population. C'est le sens des « communautés hospitalières de territoire » ; dans ce cadre, je donnerai financièrement la priorité aux établissements qui s'inscrivent dans une démarche partenariale.

Améliorer les conditions d'accès aux soins, c'est aussi assurer plus également leur permanence sur le territoire. La collaboration des systèmes ambulatoires et hospitaliers est à cet égard indispensable. Au travers de la rénovation des secteurs de permanence des soins, j'ai souhaité engager une réforme structurelle mais aussi culturelle. Tout service public est soumis à un impératif de qualité ; le projet de loi déclinera précisément ses missions et assurera leur financement de façon transparente. Chaque établissement y participant devra respecter un certain nombre d'exigences en termes d'accès aux soins, de tarifs, de qualité de service.

La qualité n'est pas une abstraction, elle est la conséquence de la pratique quotidienne des personnels et de l'organisation globale des ressources. C'est aussi pour cela que le projet de loi desserrera les contraintes pesant sur les médecins et les soignants. Parce que le soin est une « industrie de main-d'oeuvre » (M. Gilbert Barbier s'indigne), nous devons permettre à chacun d'évoluer, d'améliorer la qualité de ses pratiques, d'élargir ses compétences, de se concentrer davantage sur son coeur de métier en généralisant les délégations de tâche. C'est pourquoi nous mènerons à terme le processus européen de Bologne et le LMD, qui valoriseront les métiers et leur attractivité. Je souhaite aussi transformer l'obligation de formation médicale continue, qui est aujourd'hui une obligation de moyens, en obligation de résultat.

Ce sont les personnels qui donneront corps à la réforme. Un hôpital, c'est des équipes avant d'être des équipements. Le nécessaire renforcement des liens entre la ville et l'hôpital implique une évolution des pratiques, une plus grande porosité entre les cultures hospitalières et ambulatoires.

Plus souple, plus réactif, l'hôpital de demain devra bénéficier d'un pilotage exemplaire et fédérer toutes les énergies autour d'un projet médical bien défini. Comme l'a souhaité le Président de la République dans son discours de Bordeaux, et dans la ligne des recommandations de M. Gérard Larcher, que je remercie pour son rapport, j'entends que les directeurs d'hôpitaux disposent de tous les moyens nécessaires pour diriger une structure qui soigne des millions de patients par an et gère des centaines de personnes au quotidien. Le secteur hospitalier, c'est près de vingt millions de séjours, près d'un million de personnes y travaillent. La France y consacre chaque année 67 milliards d'euros. Nous devons être exigeants, la responsabilisation de tous est le juste corollaire de la confiance. Chaque établissement devra s'organiser en conséquence autour d'un projet médical clair dont chacun doit se sentir coresponsable. L'organisation en pôles sera poursuivie et les chefs de pôles verront leur autonomie renforcée. Ce travail en commun contribuera à renforcer l'attractivité des carrières hospitalières. L'isolement, le sentiment d'abandon sont responsables du malaise de nombreux praticiens hospitaliers.

Renforcer l'efficience de notre système hospitalier, c'est d'abord dépenser mieux, ce qui suppose des politiques de prévention mieux ciblées, une offre de soins mieux répartie, des parcours de soins plus pertinents. C'est ensuite faciliter les recompositions utiles, notamment dans le domaine hospitalier. Les agences régionales de santé devront responsabiliser les différents acteurs. C'est dans cette perspective que le champ de la gestion du risque sera élargi, à l'hôpital et dans le secteur médicosocial, afin d'accélérer la transformation de notre offre de soins.

Les gains d'efficience ne sont pas une fin en soi : notre objectif est d'assurer à tous les Français, y compris les plus démunis, la possibilité de bénéficier de soins de qualité.

L'esprit de responsabilité préside à ces réformes, comme l'exigence de transparence. On ne garantit pas la qualité et la sécurité en créant par décret des commissions : on publie par exemple les statistiques des maladies nosocomiales.

C'est aussi au nom de la responsabilité et de la justice que je vais faire évoluer la tarification à l'activité. Dès la campagne tarifaire 2009 et dans un esprit de justice, je souhaite qu'il soit mieux tenu compte de la situation sociale de certains patients et que la rémunération des prises en charge les plus lourdes soit mieux assurée. La durée de séjour des patients en situation de précarité est supérieure à la moyenne ; leur prise en charge par l'hôpital est donc plus longue et plus coûteuse. Or certains établissements en accueillent une proportion plus élevée que la moyenne ; je redéployerai des moyens à leur bénéfice. La version 11 de la tarification des prestations entrera d'autre part en vigueur pour la prochaine campagne tarifaire, qui prévoit une meilleure prise en compte des niveaux de sévérité.

La tarification à l'activité impose un effort d'adaptation des établissements. Parce que cet effort n'a pas toujours été fait à temps, certains d'entre eux sont dans une situation de déficit alarmante. Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, j'ai renforcé le cadre juridique du redressement financier des établissements, en privilégiant là encore l'esprit de responsabilité. Ce n'est qu'en cas d'échec de la procédure contractuelle de redressement que la procédure de mise sous administration provisoire pourra être envisagée. Les problèmes financiers des établissements sont le plus souvent le symptôme de difficultés sociales, organisationnelles ou de positionnement stratégique.

Les procédures de redressement sont l'occasion d'une réflexion des établissements sur leurs forces et leurs faiblesses. Le retour à l'équilibre financier des hôpitaux est nécessaire pour préserver l'excellence de nos établissements ; il est le garant de l'hôpital public dans le temps. Le Président de la République a confirmé le cap de 2012 pour le retour à l'équilibre, mais les efforts doivent commencer dès aujourd'hui ! Nos grands CHU, et notamment de l'AP-HP, des Hospices civils de Lyon et de l'AP-Hôpitaux de Marseille doivent être exemplaires. A tous les gestionnaires engagés dans ce sens, je redis ma détermination à les aider dans leurs efforts de modernisation et d'investissement. La création de l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médicosociaux, qui regroupera les trois structures intervenant actuellement sur les différents aspects de l'efficience -audit, investissement et systèmes d'information-, fournira une expertise au secteur hospitalier.

Dernier levier de mon action, l'aide à l'investissement. En consacrant une enveloppe de 5 milliards dans le cadre du plan Hôpital 2012, pour 10 milliards d'investissements, j'ai voulu accélérer la modernisation des établissements en favorisant les recompositions hospitalières, afin de disposer d'une offre adaptée pour les vingt ans à venir. Le soutien aux projets de systèmes d'information hospitaliers qui bénéficieront d'une enveloppe d'au moins 15 % du budget Hôpital 2012 est le second levier décisif de la modernisation des établissements. J'ai posé des exigences : pas de saupoudrage, des projets en adéquation avec les priorités régionales, favorisant les coopérations, et offrant un retour sur investissement satisfaisant.

Le projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires » sera le principal pilier d'une politique de santé globale, conçue comme une politique de justice et de performance. Il a donné lieu à une large concertation avec les organisations syndicales, les associations de patients, les intersyndicats de praticiens hospitaliers, les syndicats de médecins libéraux, les conférences et les fédérations hospitalières. Il faut assurer à tous des prestations -de prévention comme de soins- de la meilleure qualité, sans faire porter le poids d'une dette incontrôlée aux générations futures. Les deux lignes de force de ce projet ambitieux sont la territorialisation et la responsabilisation qu'implique l'exigence de solidarité nationale. Le plan d'actions sera décliné dans différents champs -médecine ambulatoire, hôpital, santé publique- sur la base des recommandations issues des États généraux de l'organisation de la santé, du rapport Larcher et du rapport Flajolet. La création des agences régionales de santé (ARS) répond au souci de renforcer le pilotage territorial, au plus près des besoins de la population. Ces agences réuniront les services de l'État et de l'assurance maladie dans un but de responsabilisation. La finalité de cette réforme structurelle est de renforcer l'ancrage territorial des politiques de santé et de lutter contre les déserts médicaux dans les banlieues et en milieu rural.

Parce que nos concitoyens ne sont pas non plus également armés pour affronter des parcours de soins à la cohérence incertaine, il faut battre en brèche le cloisonnement de notre système et sortir de l'hospitalocentrisme. Les ARS y contribueront en associant de nouveaux acteurs à des politiques de santé plus cohérentes et plus souples, mieux adaptées aux réalités territoriales : élus locaux, professionnels de santé, associations de malades doivent s'entendre sur les moyens d'assurer des soins de qualité à proximité. La balkanisation des structures dispersant nos moyens et dissipant nos énergies, les agences régionales permettront d'unir nos forces.

Elles veilleront, enfin, à simplifier le système de santé, actuellement éclaté entre de multiples organismes, et à offrir un interlocuteur unique aux acteurs du système et à nos concitoyens qui s'y perdent. Les principes de solidarité, de responsabilité et d'amélioration continue de la qualité en déterminent clairement l'orientation.

Vous avez souhaité un grand débat sur l'hôpital : je vous en remercie et serai attentive à vos observations qui auront un écho dans le projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires », à l'instar de votre débat sur la démographie médicale qui a servi de base à de nombreux travaux ultérieurs. Cette réflexion sur l'hôpital nous amène à réfléchir à l'ensemble du système de soins, mais cela, vous l'aviez compris. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Madame la ministre, vous nous avez mis l'eau à la bouche en dévoilant certains des aspects du futur projet de loi sur l'hôpital, notamment sur les Agences régionales de santé et la philosophie du Gouvernement quant à la place et au rôle de l'hôpital à côté des praticiens de ville. J'ai noté que vous souhaitiez la coopération de tous. Il n'y a rien de critiquable dans vos propos et votre conception de la gestion de l'hôpital devrait être approuvée sur tous les bancs.

M. François Autain.  - Il ne faut pas trop espérer !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Ce débat s'inscrit dans la continuité des travaux de notre commission et surtout de la Mecss, qui a publié un rapport et qui poursuivra ses investigations l'an prochain. L'entrée en vigueur de la tarification à l'activité, la T2A, a constitué l'argument de cette mise sous observation du système hospitalier. Et cette préoccupation n'est pas que la nôtre : au cours de ces quatre dernières années, l'hôpital a fait l'objet de nombreuses études menées par la Cour des comptes ou les corps d'inspection placés auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Les rapports qui en ont résulté se sont attachés à évaluer le fonctionnement et la gestion des établissements de santé publics. Leurs conclusions vont contribuer à nourrir notre débat, et ce d'autant plus que les constats ainsi établis sont souvent très sévères et dénoncent certaines défaillances dans la gestion de la politique hospitalière.

J'en prendrai deux exemples, puisés dans le rapport de la Cour des comptes. En 2006, la Cour a pointé les insuffisances de la gestion de l'emploi hospitalier qui représente 4,5 % de l'emploi salarié en France et près de 70 % des dépenses hospitalières. Elle a constaté que l'évolution des charges et des effectifs des établissements de santé est mal connue des autorités de tutelle car insuffisamment renseignée sur le plan statistique. C'est d'autant plus dommageable que des mutations sans précédent sont en cours dans la fonction publique hospitalière puisque, entre 2000 et 2012, près de la moitié des agents vont partir à la retraite. Or, les données relatives à l'emploi sont publiées avec retard, ce qui rend difficile l'appréhension des évolutions, et elles ne permettent pas de distinguer, dans la progression des dépenses de personnel, celles qui sont liées aux revalorisations salariales de celles entraînées par des recrutements supplémentaires. Comment conduire une réforme de l'hôpital en ignorant ces données ?

Les annexes de la loi de financement seront bientôt enrichies d'indicateurs spécifiques à ces sujets. Cette exigence, introduite cette année dans le texte par l'Assemblée nationale, répond à une demande que j'avais exprimée au printemps dernier. Il a fallu attendre la demande des députés pour que cela devienne réalité...

Chacun doit prendre ses responsabilités, tant le Gouvernement que la Fédération hospitalière de France -dont nous avons auditionné le responsable, M. Vincent- quant aux restructurations internes. Certains plateaux techniques fonctionnent avec moins de personnel : il faut en tirer les enseignements sans attendre que ce soit l'autre qui prenne la décision.

Outre les faiblesses constatées en matière de gestion des ressources humaines, la Cour des comptes a pointé des retards dans la modernisation des outils de gestion utilisés par les établissements de santé. Les conclusions de son enquête sur les systèmes d'information hospitaliers sont très sévères : la facturation directe des établissements de santé vers les caisses locales d'assurance maladie va être à nouveau reportée. La transmission des informations relatives aux malades entre le secteur des soins de ville et l'hôpital pâtit de cette situation.

Quatre ans après que la loi l'a rendue obligatoire, l'identification des médecins hospitaliers n'est toujours pas effective, ce qui empêche le suivi de leurs prescriptions et ne contribue guère au développement de la maîtrise médicalisée des dépenses hospitalières. (Nombreuses marques d'approbation) J'entends encore M. Bertrand nous promettre que ce serait fait dans l'année -c'était il y a quatre ans ! Comment voulez-vous maintenir, dans ces conditions, la mobilisation pour un comportement plus vertueux ? Il y a des « problèmes techniques » ? Cela fait quatre ans ! Je vois surtout des dysfonctionnements dans votre administration !

La Cour des comptes a également dénoncé les retards et les défaillances des établissements dans la mise en oeuvre des nouveaux outils de comptabilité analytique. On pourrait voir là un aspect moins stratégique de la politique hospitalière si la Cour ne s'était interrogée sur la fiabilité des comptes des hôpitaux et n'avait souligné la piètre connaissance des actifs immobilisés et les imprécisions sur les dettes et les créances.

Le déficit des hôpitaux s'élèverait à 800 millions, chiffre qui ne figure pas dans l'Ondam. L'hôpital d'Ajaccio a été placé sous administration provisoire, les procédures sont révisées pour faciliter l'intervention des autorités de tutelle. Mais allez-vous mener une politique systématique de redressement des hôpitaux en difficulté ? Vous pourriez commencer par les quatre CHU qui concentrent 70 % du déficit des établissements à dimension régionale ! Cela me semble indispensable, aussi bien dans la perspective de la création des communautés hospitalières de territoire que pour éviter de tomber dans la « culture du déficit » qu'a dénoncée l'Igas.

L'information manque également pour la T2A. Le Parlement ne dispose pas d'une vision claire de la montée en charge de cette réforme. Certes, le financement des activités de médecine, chirurgie, obstétrique à 100 % dès 2008 constitue une évolution positive, mais que de retards accumulés ! J'ai évoqué la facturation directe, on peut aussi parler du nouveau mode de calcul de la participation de l'usager aux dépenses hospitalières ou de la convergence des tarifs entre les différentes catégories d'établissements publics et privés. Ce dernier point n'est pas important pour la seule convergence tarifaire, il l'est aussi pour s'assurer que l'activité des établissements est correctement rémunérée.

Un rapport nous a bien été remis le 15 octobre mais ses conclusions nous ont paru bien minces : si l'on peut se féliciter des améliorations qui seront apportées, dès l'année prochaine, aux modalités de prise en charge de la précarité et de la permanence des soins, le rapport indique aussi que des études complémentaires seront nécessaires. Je regrette que ce document ne fasse aucune référence aux seize études complémentaires suggérées par l'Igas en janvier 2006 pour évaluer les écarts liés au coût du travail ou aux surcoûts provoqués par la taille des établissements.

Nous sommes conscients de l'ampleur des études à mener, et nous savons, madame la ministre, que vous avez donné une nouvelle impulsion à ce dossier. Mais nous aimerions disposer de la liste des études que les autorités de tutelle estiment nécessaires pour établir une vision complète des écarts de coûts entre les différentes catégories d'établissements, ainsi que d'un calendrier pour leur réalisation. Je souhaite que vous puissiez nous apporter ces renseignements le plus rapidement possible.

L'an prochain, nous n'aurons plus besoin d'un tel débat puisque le projet de loi que vous avez évoqué réglera tous les problèmes : chacun n'aura plus alors qu'à se mettre au travail ! (Applaudissements à droite)

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Je me réjouis du choix du débat thématique de ce matin. En effet, au regard des masses financières en jeu et des scénarios d'évolution de dépenses retenus, l'hôpital constitue, sans aucun doute, un important gisement d'économies. En 2008, les dépenses hospitalières devraient s'élever à 67,5 milliards d'euros, soit 44 % des dépenses d'assurance maladie. Les réformes ont déjà été nombreuses mais leur bilan est mitigé, comme en témoignent les rapports récents de la Cour des comptes, de l'inspection générale des affaires sociales ou de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), présidée par notre collègue Alain Vasselle.

Les données transmises par vos services, madame la ministre, font état d'un déficit cumulé des hôpitaux de 671 millions en 2007. La Fédération de l'hospitalisation privée évoque un déficit cumulé pour 2008 de près de 800 millions. Je rappelle le constat sévère dressé récemment par l'inspection générale des affaires sociales s'agissant des contrats de retour à l'équilibre financier signés entre les agences régionales de l'hospitalisation et les établissements de santé : objectifs mal définis, prévisions de recettes irréalistes, objectifs non atteints, insuffisances de pilotage. Cette situation n'est pas tenable ! L'article 40 du PLFSS précise et clarifie les procédures de redressement des établissements en situation financière difficile. Ce n'est qu'un premier pas.

En tant que rapporteur spécial de la mission Santé, j'observe que les difficultés des établissements de santé proviennent parfois des dettes du ministère ; je pense par exemple aux 37 millions au titre du contentieux de la sectorisation psychiatrique. Que comptez-vous faire pour solder ces dettes ?

Le bilan des restructurations hospitalières est lui aussi en demi-teinte. La Cour des comptes souligne la lenteur des suppressions et des reconversions de services et structures dont le maintien ne se justifie plus. Cette situation serait due « non pas à l'insuffisance des outils mis à disposition des ARH, mais aussi et surtout à la trop grande résignation des pouvoirs publics face aux protestations locales ». J'attends vos observations sur ce sujet.

Peut-être la composition des conseils d'administration des établissements de santé n'est-elle pas totalement étrangère à certains blocages. (Mme la ministre sourit) J'estime pour ma part souhaitable que les maires ne président plus les conseils d'administration. (On s'émeut sur de nombreux bancs à gauche) Il faut avoir le courage de le dire.

M. Marc Daunis.  - Ce sera répété !

M, Jean-Jacques Jegou rapporteur pour avis.  - Les nouvelles modalités de financement des établissements de santé par la tarification à l'activité (T2A) peinent à apporter des résultats tangibles. Le passage anticipé à un financement intégral à la T2A soulève des difficultés à cause de l'impréparation des systèmes d'information, du manque de fiabilité de la comptabilité des établissements, de l'absence de connaissance fine sur les différences des coûts entre le secteur public et le secteur privé.

Il nous faudra mener une analyse des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, afin qu'elles ne faussent pas les comparaisons de coût entre le secteur public et le secteur privé. Et n'est-ce pas à l'État de prendre en charge les dépenses de recherche et d'enseignement ?

Le suivi de la mise en oeuvre de la T2A doit faire l'objet d'un contrôle très strict. En a-t-on les moyens ?

La réforme de l'hôpital ne peut se concevoir sans un développement des systèmes d'information, dans un cadre interopérable. La commission des finances ayant formulé de nombreuses propositions et appelé à une refonte du pilotage des systèmes d'information de santé, ce PLFSS lui fait écho en créant deux nouvelles structures qui se substituent à cinq organismes existants : l'Agence pour les systèmes d'information de santé partagés et l'Agence d'appui à la performance des établissements de santé et médicosociaux devraient permettre une rationalisation des dépenses hospitalières et l'émergence de systèmes d'information plus cohérents.

J'attire toutefois l'attention sur la nécessité de changer d'état d'esprit : c'est toute la conception de la circulation de l'information au sein de l'hôpital comme entre l'hôpital et la médecine de ville qui doit être repensée, et ce dès la période de formation des futurs directeurs d'hôpitaux.

Quant au DMP, qui me tient à coeur, je prends acte de votre souhait de relancer ce projet mais j'attendrai les résultats, les discours ayant eu du mal à se concrétiser. Grâce aux travaux de grande qualité réalisés tant par la mission conduite par le président Larcher, que par la Mecss, le constat est dressé.

Nous connaissons les points faibles de l'hôpital et les réformes à mener, il faut passer aux actes. Beaucoup nous est promis avec le projet sur l'hôpital dont l'examen a été reporté à plusieurs reprises. Les résultats attendus sont au coeur de la loi de programmation des dépenses publiques qui fixe un Ondam de 3,3 %. Quelles sont les économies attendues de cette réforme et à quelle échéances ?

Vous pouvez compter sur la commission des finances pour soutenir vos efforts de refonte des établissements de santé. (Applaudissements au centre)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Une information et une prière, monsieur le président. L'information, d'abord : la commission se réunira à 13 h 45 pour examiner les amendements. La prière : pour la clarté des débats et afin d'éviter de longues discussions communes, nous suggérons d'examiner séparément les amendements de suppression nos424 et 470 à l'article 13, ainsi que l'amendement n°473 à l'article 18.

M. le président.  - Cela éviterait en effet deux tunnels lors de la discussion de ces articles. (Assentiment)

Il en est ainsi décidé.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je vous prie d'excuser mon absence à la reprise des débats, le Président de la République m'ayant convoquée à une réunion urgente. Je vous rejoindrai vers 16 h 30-16 h 45. M. Karoutchi, qui sera présent, me transmettra vos questions pour que j'y réponde.

La séance est suspendue à midi cinquante.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 15 heures.