Financement de la sécurité sociale pour 2009 (Suite)

Mme la présidente. - Nous reprenons l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2009.

Débat thématique sur l'hôpital (Suite)

Mme la présidente.  - Nous poursuivons le débat thématique sur l'hôpital. Limitées à dix minutes par groupe, les interventions des orateurs seront suivies de la réponse du Gouvernement ; puis nous aurons une série de questions avec réponse immédiate du Gouvernement, dont la durée éventuelle sera limitée à six minutes.

M. Yves Daudigny.  - Selon le diagnostic d'un professeur de médecine, l'hôpital public est malade de ce qu'on remplace les valeurs du public par celles du privé, les biens collectifs par la marchandisation et le service public par l'intérêt privé. Pernicieuse, cette évolution avance masquée : pour mieux le diluer dans le privé, on étouffe financièrement le public, en lui refusant, sous couvert de politique de convergence, des moyens que le privé conserve. Ce constat éclaire un calendrier qui est contraire à toute logique : on débat du financement avant le projet qui modifie les structures, mais ce PLFSS préjuge de la nouvelle gouvernance avec son article 40, sur lequel vous refuserez sans doute tout amendement, ici comme à l'Assemblée, au prétexte de réserver le débat pour le prochain texte. Comprenne qui pourra... sauf à imaginer que cet imbroglio est voulu.

Des explications ont été demandées sur l'article 5 et ses trois fonds : on gèle les dotations à hauteur de 100 millions s'agissant de la modernisation, 70 millions s'agissant de la coordination des soins, 20 millions s'agissant de réponse aux urgences. Quand le déficit cumulé atteint 880 millions, il y a de quoi s'étonner de l'article 48 -et je ne dis rien de ce que coûtera le dossier médical personnalisé. Les réponses ne sont pas convaincantes. Le principe d'une répartition territorialisée peut être pertinent quand des hôpitaux ne sont pas menacés de fermeture...

Mme Annie David.  - Tout à fait !

M. Yves Daudigny.  - Les financements ne tiennent pas compte de la réalité parce que la tarification à l'activité est inadaptée et inadaptable à certaines pathologies. On a défini des codes homogènes, qui ne tiennent pas compte des plus complexes, ce qui conduit à une sous-évaluation -la ministre en a pris conscience bien tardivement pour les polypathologies.

Les cliniques externalisent les examens complémentaires et les honoraires des médecins alors que la sous-évaluation de la contractualisation accentue le déficit du secteur public. La convergence tarifaire intersectorielle est structurellement impropre à la nature spécifique de l'hôpital, qui prend en charge la précarité, assure la permanence des soins et leur accessibilité, toutes choses qu'ignore la mise en concurrence, d'autant que le financement des urgences n'est pas couvert par l'assurance maladie. Or, à défaut de financement à hauteur des besoins, elle substitue une concurrence déloyale à la complémentarité et programme la disparition de notre hôpital -par nature non rentable.

M. François Autain.  - Très bien !

M. Guy Fischer.  - C'est la vérité !

M. Yves Daudigny.  - Après l'étouffement, l'absorption par la fongibilité à travers les territoires de communautés hospitalières qui préparent des restructurations purement économiques. On a vu votre art de la cartographie pour la justice et les armées. N'aggravez pas la désertification médicale au risque d'appauvrir des territoires en les privant d'une activité. Dois-je rappeler que l'hôpital est le premier employeur de France ? L'accès aux services publics contribue deux fois plus à la réduction des inégalités que les transferts monétaires.

Quelle articulation entre les hôpitaux et les établissements médicosociaux ? Les élus locaux ne sauraient être de simples donneurs d'avis et les départements des opérateurs.

Les mots ont un sens et de l'installation de patrons, selon l'expression de M. Sarkozy, à la productivité, le vocabulaire entrepreneurial qui imprègne vos projets justifie toutes les craintes. On traite les hôpitaux comme des entreprises mais le résultat de six années de politique sociale sans visée de santé publique est que l'on réserve le bouclier fiscal et les stock-options aux uns et que l'on impose les franchises médicales aux autres. Selon le Secours populaire, deux Français sur cinq ont retardé le moment de se soigner ou ont même renoncé à le faire en raison de la hausse des coûts. Non, la santé n'est pas un bien marchand. La carte bleue ne doit pas se substituer à la carte vitale : c'est cela, sauvegarder le pacte de 1945. (Applaudissements à gauche)

Mme Anne-Marie Payet.  - L'hôpital va mal, mais ce n'est pas nouveau. Ce qui l'est, c'est la prise de conscience qui s'accompagne d'une volonté d'agir. Nous attendons avec impatience le projet « Hôpital, patients, santé, territoires. Suffira-t-il ?

L'hôpital allait déjà mal il y a quatre ans quand nous étudiions la grande réforme de l'assurance maladie et depuis, le secteur hospitalier a servi de variable d'ajustement du budget. Nous ne sommes pas opposés à la régulation budgétaire si elle est médicalisée. Or la médicalisation, c'est ce qui manque aujourd'hui, d'où une dégradation constante du contexte financier des établissements hospitaliers, dont le résultat net ne représente plus que 1,2 % des recettes totales.

On ne peut pas dire que rien n'a été fait : on est passé à la tarification à l'activité car la dotation globale figeait les situations sans rendre compte de l'activité réelle et du service rendu.

Il fallait en sortir pour mesurer l'activité réelle de l'hôpital. Ce fut la tarification à l'activité de 100 % de la médecine, la chirurgie et l'obstétrique au 1er janvier 2008. Mais a-t-on pris suffisamment en compte l'effet inflationniste ?

Le plan Hôpital 2007 a commencé à réformer la gouvernance et a relancé l'investissement hospitalier. Je me réjouis que le Gouvernement entende poursuivre le volet investissement dans un plan Hôpital 2012. Mais tout cela reste inachevé. Et où est le dessein global ? Jusqu'à présent, on s'est contenté de touches impressionnistes. Le Gouvernement a pris conscience cette année de la nécessité d'une réforme d'ampleur, je m'en réjouis. Je salue le rapport Pour une gestion responsable de l'hôpital qui a tenté de lever le voile sur les trois aspects fondamentaux, les tarifs, la situation financière et l'état des ressources humaines. Quant au rapport Larcher, nous souscrivons à ses orientations concernant la gouvernance hospitalière ou le regroupement en communautés hospitalières de territoire. A vrai dire, ce rapport constitue en quelque sorte une étude préalable au projet de loi HPST. Les perspectives sont encourageantes mais les mesures risquent de ne pas porter tous leurs fruits sans un sérieux effort de connaissance chiffrée.

Une réforme médicalisée -et non uniquement comptable- devrait s'articuler autour de trois axes, gestion financière, gouvernance et pilotage, productivité et gains dans l'emploi. Le projet de loi HPST semble procéder à une réforme profonde de la gouvernance des établissements et du pilotage du secteur, s'appuyant sur les Agences régionales de santé. Mais de la gestion financière et des gains de productivité, le projet de loi ne parle pas ! Du reste, comment réformer sans disposer d'abord de données pertinentes ? Le secteur hospitalier restera-t-il celui des tabous ? Quelles sont les charges qui pèsent vraiment sur l'hôpital ? Quelle est la situation financière réelle des établissements ? Quel est l'état de l'emploi hospitalier ? Mystère !

Déjà, les réformes entreprises se sont heurtées aux tabous. Les études de coûts comparatives ont pris du retard, figeant la convergence tarifaire. La fiabilité de l'échelle nationale des coûts est contestée par la Cour des comptes comme par l'Igas. Des écarts de plus de 30 % apparaissent entre les établissements publics, comme entre le public et le privé. Est-ce dû à la programmation des soins ? Aux urgences ? Aux soins dispensés aux plus démunis ? Il est temps d'en savoir plus. La gestion financière des hôpitaux a également été malmenée par la transition vers la T2A. Les coefficients de conversion temporaires appliqués pour opérer une certaine péréquation entre établissements « gagnants » et « perdants » du nouveau mode de financement sont-ils justes ? Ne faudrait-il pas laisser intégralement les ressources émanant de la T2A aux hôpitaux en déficit ? Ce serait le bon sens ! Il faut revoir les mécanismes de péréquation ; le personnel fait de gros efforts sans en voir de bénéfice. Voyez le nombre de jours de RTT en attente !

Les coûts du secteur privé sont toujours très mal connus, mais la Dares révèle que les cliniques dégagent un bénéfice de 13 %. Belle rentabilité, pendant que les hôpitaux publics s'enlisent. Peut-on laisser cette situation perdurer ? En matière de convergence tarifaire, le rapport remis au Parlement par le Gouvernement le 15 octobre annonce la création de l'échelle de coûts commune, très attendue, et des progrès en matière de permanence des soins -cela revalorisera les missions d'intérêt général, ces Migac aux contours encore flous. Comment évaluer par exemple le coût des polypathologies ? Même si tout cela va dans le bon sens, quatre ans après la réforme de la T2A, on attend toujours les résultats des études complémentaires, indispensables. Notre commission a demandé au ministère un calendrier : nous nous joignons à elle !

A combien s'élèvent les déficits hospitaliers ? A 800 millions d'euros, soit 20 % du déficit de l'assurance maladie ? Ces sommes, inscrites dans les comptes des établissements, ne sont pas retracées par l'Ondam hospitalier, qui n'est pas dépassé. On le paiera tôt ou tard ! Or on ne mettra pas les établissements en faillite : comment l'État envisage-t-il de faire face à ce problème ?

Pour briser tous ces tabous, nous demandons depuis longtemps un grand audit du secteur hospitalier, sur les aspects financiers bien sûr, mais aussi sur la qualité. Des audits ponctuels existent : pourquoi n'en avons-nous pas la synthèse ? Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie l'a réclamée, de concert avec la Cour des comptes. Pour l'heure, rien...

Nous attendons donc une réponse à ces questions. Il faut réformer l'hôpital. Nous nous réjouissons que le Gouvernement en ait pris conscience. Nous saluons aussi le volontarisme politique qui semble l'animer. (Applaudissements au centre et à droite)

M. François Autain.  - J'ai écouté la ministre ce matin ; je suis resté sur ma faim. J'attendais un bilan de son action en matière hospitalière : nous avons eu un plaidoyer pour son nouveau projet de loi. Cela me semble prématuré.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Aujourd'hui, c'est un galop d'essai !

M. François Autain.  - Je ne comprends pas pourquoi l'hôpital public continue d'être le mal-aimé du Gouvernement, l'objet de critiques excessives, voire infondées, comme s'il était le seul responsable du déficit de l'assurance maladie. Des dysfonctionnements existent, mais ils ne sont ni plus nombreux ni plus graves que dans d'autres secteurs de la santé. Sur le scandale des dépassements d'honoraires, le Gouvernement se montre bien timide. La dérive des dépenses de médicaments n'empêche pas une réduction de 40 % l'an prochain de la taxe sur le chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique. En revanche, quelle rigueur à l'égard de l'hôpital public, pourtant plébiscité par nos concitoyens ! Il est le seul à accueillir tous les patients sans discrimination, il pallie les carences de la médecine de ville, ses services d'urgence sont des centres de soins primaires gratuits ouverts 24 heures sur 24.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Cela coûte cher !

M. François Autain.  - Les dépenses en volume augmentent moins que les dépenses de la médecine de ville. L'hôpital respecte mieux son Ondam...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Évidemment, puisqu'il transfère à la ville nombre de dépenses !

M. François Autain.  - L'objectif fixé à l'hôpital est plus strict que celui assigné à la médecine de ville. Or, en 2007, la médecine de ville dépassait de 3,1 % son objectif alors que l'hôpital se trouvait en deçà du sien. Ce résultat est d'autant plus remarquable, même si le président de la commission le conteste...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Vous savez bien ce qu'il en est !

M. François Autain.  - ...que le contexte budgétaire était très défavorable. L'Ondam des hôpitaux oscille entre 3 et 3,8 % par an, alors que les dépenses incompressibles s'accroissent de 4 %. Aucune entreprise du secteur marchand ne résisterait longtemps à un tel régime -et l'hôpital public n'est pas une entreprise comme les autres ! Le déficit de 800 millions d'euros est la conséquence directe du plan Hôpital 2007. Vous postulez que les moyens de l'hôpital sont suffisants. Dès lors, les mauvais résultats ne peuvent être dus qu'à une mauvaise gestion.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Absolument.

M. François Autain.  - C'est jeter le discrédit sur les équipes déjà fragilisées par une tâche énorme : 235 directeurs d'hôpital seraient-ils incompétents ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est l'organisation de la gouvernance, non leur compétence, qui est en cause.

M. François Autain.  - L'hypothèse d'un sous-financement est plus probable ! Et la substitution de la T2A au système forfaitaire n'a fait qu'aggraver les choses. Le nouveau mode de rémunération n'a pas fait la preuve de son efficience...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il commence !

M. François Autain.  - Il repose lui aussi sur des hypothèses erronées et ne prend pas en compte les spécificités locales, comme le taux de morbidité. Certains établissements sont condamnés à des plans de licenciements, comme au Havre (800 personnes) ou à Nantes (200 personnes). Avec des effets négatifs sur la qualité des soins.

Le pire, ce serait d'aller au bout de cette idéologie de la convergence intersectorielle...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Commençons par l'intra, on verra après !

M. François Autain.  - La prise en charge des patients perdrait en qualité, ce serait tout simplement la fin de l'hôpital public, mais aussi le début d'une ère nouvelle pour les investisseurs privés !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il faudra qu'une Haute autorité veille au grain !

M. François Autain.  - L'ouverture à la concurrence est quasi-chose faite, puisque votre loi « hôpital, patient, santé et territoires » prévoit des délégations de service public à des entreprises privées pour gérer l'hôpital public, qui n'aura alors plus de public que le nom... Les Britanniques, qui nous ont précédés sur cette voie de la privatisation, viennent d'y renoncer : nous ferions bien de méditer leur exemple !

La loi « hôpital, patient, santé et territoires » est une véritable machine de guerre contre l'hôpital public et contre le statut de la fonction publique hospitalière. La réforme accentue la division du travail entre le public et le privé, lequel exploite quelques « niches » très lucratives au point que les cliniques ont enregistré en 2005 une croissance à deux chiffres...

M. Nicolas About, président de la commission.  - 13 %.

M. François Autain.  - « Chapeau ! » dirait M. Marini. Les fonds spéculatifs ne s'y sont pas trompés, ils n'attendent que de pouvoir intervenir davantage. Depuis 2002, le plan Hôpital 2002 a investi 2 milliards dans le secteur hospitalier privé, sans aucune contrepartie, le plan Hôpital 2012 prévoit d'y ajouter encore 750 millions : l'État finance l'hôpital privé au seul bénéfice des fonds spéculatifs ! Nous n'acceptons pas cette façon de socialiser les pertes et de privatiser les profits, méthode qu'a utilisée M. Sarkozy pour sauver quelques banques de la faillite !

Le Comité consultatif national d'éthique a dénoncé une telle politique, en soulignant, dans son avis du 28 juin 2007, que la rentabilité ne saurait être la même à l'hôpital que pour une activité commerciale ordinaire. Le président du conseil de l'ordre national des médecins et quatre syndicats de médecins libéraux en appellent à protéger la santé face aux appétits financiers.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il faut y veiller...

M. François Autain.  - Dans un autre communiqué intitulé « La santé aux enchères », l'intersyndicale des biologistes s'alerte de ce qu'après avoir ruiné les banques, les spéculateurs lorgnent désormais sur la santé. Les médecins ne veulent pas devenir les jouets des grands groupes financiers, les pharmaciens ne vont pas tarder à les rejoindre, lorsque le capital de leur officine sera ouvert aux capitaux spéculatifs. Le Gouvernement ferait bien de prêter oreille à toutes ces inquiétudes et revendications, qui n'émanent pas de personnalités gauchistes ni révolutionnaires !

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

M. François Autain.  - La santé n'est pas un bien comme les autres, elle ne doit pas dépendre de mécanismes marchands !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Belle conclusion, merci !

M. François Autain.  - L'hôpital public est le seul garant de l'égal accès à la santé. Le Gouvernement choisit une autre voie, je crains que les difficultés ne s'aggravent avec la loi « hôpital, patient, santé et territoires ». D'ores et déjà, nous voterons contre ce PLFSS ! (Applaudissements à gauche)

M. Alain Milon.  - Le 17 avril, le Président de la République a tracé les grandes lignes de la réforme qu'il souhaitait pour l'hôpital. Cette réforme, attendue par beaucoup, devait reprendre nombre de propositions de la commission Larcher et de la concertation organisée jusqu'à l'été dernier. Le plan Hôpital 2012 mobilisera près de 10 milliards d'investissements et se caractérisera par des objectifs clairs pour une meilleure performance économique des établissements de santé. Cette nouvelle culture de l'hôpital répond à des enjeux de modernisation et aux exigences de nos concitoyens, qui demandent un hôpital de qualité et plus sûr.

Le Président de la République a fixé trois grandes orientations : la modernisation de l'hôpital, la création des agences régionales de santé et l'amélioration de l'accès aux soins. La loi « hôpital, patient, santé, territoires », apporte des réponses concrètes : son chapitre sur la modernisation des établissements de santé reprendra les conclusions du rapport Larcher ; son chapitre sur l'accès aux soins s'inspire des états généraux de l'organisation de santé, pour une médecine générale de premier recours, la réforme de la formation continue et le développement de nouvelles modalités d'accès aux soins ; le chapitre sur la prévention et la santé publique apportera des réponses très concrètes de santé publique ; enfin, le chapitre créant les agences régionales de santé opèrera le choix stratégique d'un pilotage territorial de la santé pour répondre à la demande de la population et mettre fin aux « déserts médicaux » dans certaines banlieues et en milieu rural.

Pour la première fois, tous les sujets seront abordés ensemble, avec l'objectif central de mieux répondre à la demande de nos concitoyens : il s'agit rien moins que d'insuffler une nouvelle dynamique à l'hôpital public.

Quelle politique de santé voulons-nous ? Notre but commun est bien celui de services de qualité, en constante adaptation pour répondre aux attentes de nos concitoyens. La coexistence de deux modes d'évaluation du financement, entre le public et le privé, est une source de difficulté et un frein pour toute comparaison de l'efficacité des établissements. Le principal levier pour la maîtrise des dépenses hospitalière est donc la convergence tarifaire. Nous savons qu'elle est difficile à atteindre, mais cela ne doit pas nous décourager.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - C'est vrai !

M. Alain Milon.  - La tarification à l'activité est un outil très souhaitable pour harmoniser l'allocation des ressources en la fondant sur un lien plus directe entre activité et financement. Elle est source de comportement vertueux de gestion, en poussant les établissements à s'interroger sur leurs coûts.

Tout le monde a son mot à dire sur la T2A, mais sans toujours savoir ce qu'elle recouvre...

M. François Autain.  - Ah bon !

M. Alain Milon.  - ...ni son champ d'application : médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie, y compris les alternatives à la dialyse en centre et l'hospitalisation à domicile, quel que soit le statut de l'établissement, public ou privé. Seuls les hôpitaux locaux, les établissements dispensant des soins aux personnes incarcérées et les établissements de Saint-Pierre et Miquelon, Mayotte ou de la Guyane restent en dehors de ce champ et reçoivent une dotation annuelle de financement. Le passage à la T2A des établissements du service de santé des armées à la tarification à l'activité est en cours.

Le système de tarification et de régulation des établissements privés anciennement sous objectif quantifié national ne s'applique qu'aux activités précitées. Pour les activités de soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie des établissements anciennement sous dotation globale, le financement par dotations annuelles est pour partie maintenu, sous forme toutefois d'une dotation de recettes, sans lien automatique avec les dépenses.

Le financement à l'activité des activités de médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) des établissements publics et privés de santé est lié aux tarifs par séjour, par prestations et aux paiements supplémentaires.

La mise en oeuvre d'une telle réforme constitue une évolution profonde, impliquant d'importants aménagements et susceptible de donner lieu à des effets de revenus importants. D'où une série de dispositions transitoires caractérisées par une phase d'adaptation technique ainsi que par une phase de convergence tarifaire, étalée jusqu'en 2012. Depuis le 1er janvier 2008, le mécanisme de transition a été modifié par le passage à la T2A à 100 % des établissements du secteur public financés en totalité à l'activité pour leur activité MCO. Pour les établissements privés, le dispositif de convergence intrasectorielle s'appuie sur un mécanisme de coefficients correcteurs, tandis qu'une seconde phase, intersectorielle, doit rapprocher les tarifs nationaux des établissements des secteurs publics et privés.

M. François Autain.  - Un mirage.

M. Alain Milon.  - Pour réussir la convergence public-privé, il conviendra de prendre en compte les spécificités de l'hôpital public et leur impact sur les coûts -gestion de la précarité ; organisation de la permanence des soins ; gestion des spécialités coûteuses.

Le Gouvernement a remis au Parlement, il y a quinze jours, un rapport faisant le point sur ces travaux et sur les mesures qui seront prises en 2009 dans le cadre de la prochaine campagne tarifaire. De nombreuses questions restent encore en suspens, si bien que quatre ans après le démarrage de la réforme, on accuse parfois la T2A d'avoir mis en difficulté certains établissements. Pouvez-vous, madame la ministre, nous rassurer et dresser un bilan de cette réforme ?

De même, si le principe de convergence des tarifs entre le secteur public et le secteur privé d'ici à 2012 est inscrit dans cette loi de financement, certains acteurs se plaignent que ce dossier, qui devrait se traduire par des réorganisations médicalement utile et non par la recherche de simples économies à court terme, n'avance pas suffisamment vite : quelles sont, madame la ministre, les intentions du Gouvernement sur ce dossier ? (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Intervenant quelques semaines avant l'examen du projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoire », ce débat nous donne l'occasion de passer en revue les grands problèmes de l'hôpital public et de l'hospitalisation. Je m'en réjouis car les dépenses hospitalières, qui représentent pourtant près de 52 % des dépenses de santé, semblaient frappées d'une omerta. Le « Touche pas à mon hôpital » faisant consensus, l'opacité financière a longtemps été de rigueur, la connivence employeur-employés de règle, d'autant que la note était payée par la sécurité sociale et les déficits comblés par une rallonge de l'État en fin d'année.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - C'est vrai !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Tout se passe comme si la maîtrise médicalisée et les bonnes pratiques, telles qu'on les diffuse dans le secteur ambulatoire, n'avaient pas encore trouvé toute leur place à l'hôpital.

Constat sévère ? Vision partiale ? C'est pourtant celle de l'un de nos collègues du RDSE, qui a exercé pendant près de quarante ans dans les hôpitaux publics et que nombre de témoignages viennent corroborer.

Une réforme de l'hôpital est urgente, nécessaire, réclamée, pour stopper la dégradation sournoise d'un système qui fut parmi les meilleurs. Il vous faudra, madame la ministre, courage et ténacité pour lutter contre les lourdeurs et les inerties.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Mme Bachelot n'en manque pas.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Les problèmes à résoudre sont nombreux : organisation interne, restructuration de la carte hospitalière, personnel médical, question financière.

Le témoignage du professeur Laurent Sedel dans son livre Chirurgien au bord de la crise de nerfs est éclairant : incohérences, erreurs d'organisation aux conséquences dispendieuses, protocoles absurdes, règles incompréhensibles, lois inapplicables...

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Condamnation sans appel.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Comment en est-on arrivé là ? C'est que la mainmise technocratique sur l'organisation hospitalière, depuis la réforme de 1970, a fait passer au second plan sa finalité primordiale, la qualité des soins dispensés aux malades. Croulant sous une avalanche de textes, les hôpitaux ont vu proliférer les postes administratifs dans des proportions qu'il serait d'ailleurs intéressant de connaître pour la prochaine discussion.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Tout à fait.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - La paperasserie a fleuri, du bureau des entrées à celui du directeur, de la salle de soins au bloc opératoire, de la pharmacie à la lingerie.

Le personnel soignant, les médecins passent une grande partie de leur temps à remplir formulaires et statistiques, au détriment de l'accompagnement du malade.

Les lois sur le travail, notamment les 35 heures, le principe de précaution, l'organisation informatisée, les droits acquis ont finalement démantelé un système qui était peut être obsolète mais avait le mérite d'avoir longtemps porté l'hôpital public au sommet. En sont résultées démotivation du personnel et philosophie du chacun pour soi. Les « staffs » ne discutent que « relations corporate ».

Si Mai 68 a fait disparaître le mandarinat, il est hélas réapparu sous des formes plus pernicieuses.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - La dualité de pilotage entre président du conseil d'administration et direction tourne souvent à la déresponsabilisation de l'un et de l'autre. La réforme prévue sera, de ce point de vue, intéressante à suivre.

Il est urgent de rendre une âme, une finalité à la vie de service.

Deuxième sujet de préoccupation : les restructurations hospitalières. Définie en 1996, cette politique, qui a d'abord mobilisé les agences régionales d'hospitalisation, a vu sa dynamique ralentie, voire interrompue. Dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, la Cour des comptes s'est montrée pour le moins critique, sinon sévère. Manque de pédagogie et de constance, signaux contradictoires de l'administration centrale, absence d'outil d'évaluation ont été autant de freins, comme la distribution d'enveloppes exceptionnelles en contrepartie d'engagements, non respectés, ou souci parfois contraire à la sécurité sanitaire de maintenir des structures ou services peu performants.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Bon diagnostic.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Certaines agences n'ont pas su convaincre les établissements d'abandonner leur activité lorsque celle-ci n'était plus viable ; elles n'ont pas toujours pu résister aux pressions locales des associations et des élus.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Eh oui !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Pourtant, les réorganisations sont souvent justifiées. Le défaut de taille critique, tant en chirurgie qu'en obstétrique, est à la fois dangereux pour les patients et coûteux. (M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis, applaudit)

L'avènement des nanotechnologies, la performance des appareillages informatisés, les nouveaux matériaux ont véritablement transformé l'exercice de la chirurgie et éclaté celle-ci en de multiples spécialités, nécessitant une formation continue des praticiens. Ces avancées, qui offrent au patient une qualité de soins toujours meilleure, supposent une optimisation des équipes et des équipements. Un chirurgien isolé dans un petit hôpital ne peut prendre en charge que certains patients. N'instaurons pas, sous prétexte d'aménagement du territoire, une chirurgie à deux vitesses !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Très bien !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'effort de restructuration doit être repris mais ne saurait se limiter à des regroupements administratifs : il doit se fonder sur un projet médical de territoire.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Très juste !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Voir le rapport Larcher.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'entrée de grands groupes financiers dans le capital des établissements s'est souvent traduite par une recherche de la rentabilité financière, passée avant l'offre équitable de soins.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Très juste !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'intervention de financements publics doit être subordonnée à une exigence de permanence des soins.

Quant au statut des médecins hospitaliers, il doit être entièrement réformé, sous peine de voir l'hôpital perdre son rang d'excellence. La concurrence avec le privé est nécessaire. Reste qu'aujourd'hui, hormis quelques grands services, la distorsion financière vient à bout des meilleurs serviteurs de l'hôpital public. Le système du secteur privé dans les murs est de gestion difficile, menant à des abus manifestes que la presse à sensation a vite fait d'exploiter.

M'accusera-t-on d'un pessimisme teinté de nostalgie ? Pourtant, le mal est là.

Renforcer le pilotage, améliorer la pertinence du recours à l'hôpital, structurer l'offre territoriale de soins, rendre les carrières plus attractives et dynamiser la recherche : tels doivent être les axes d'une future réforme hospitalière.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Beau programme.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Vous avez le courage de vous atteler à cette tâche immense. Agissez avec la fermeté et le bon sens qu'on vous connaît, sans jamais oublier que malgré, ses progrès techniques, la médecine n'est pas une science, mais reste un art ! (Vifs applaudissements au centre et à droite)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Comme à l'accoutumée, je n'ai pas été déçue par le débat sénatorial, extrêmement riche en propos permettant d'améliorer l'accès à des soins de qualité dans notre pays.

MM. Vasselle et Jégou m'ont posé des questions très précises sur de nombreux points. Je répondrai à chacune.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce sera long !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Vous attendez sans doute une réponse précise. (M. Nicolas About, président de la commission, le confirme)

Pierre angulaire de la réforme entamée en 2004, la gestion des risques doit améliorer les pratiques professionnelles. Les résultats encourageants obtenus en ville conduisent le Gouvernement à étendre cette réforme à l'hôpital, afin d'améliorer son efficience. Les CPAM pourront donc élargir leur action à l'hôpital.

M. Guy Fischer.  - Ça va saigner !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Il s'agit d'améliorer la qualité des soins ! Vous n'y êtes pas opposé ?

Mais l'activité hospitalière repose avant tout sur les moyens humains. La gestion prévisionnelle des métiers est donc déterminante. C'est pourquoi un Observatoire des métiers de la fonction publique hospitalière a été créé en 2002. Il a élaboré un répertoire des professions, dont la version 2, bientôt disponible, apportera une aide précieuse en vue d'une fonction publique de métiers. L'année suivante, l'Observatoire de la démographie des professions de santé a été créé afin de rassembler les informations disponibles sur ce sujet.

S'agissant des départs à la retraite, il est indispensable de collecter les informations indispensables à la continuité des soins. Les sessions de travail conduites avec la CNRACL et l'Ircantec permettent de fonder solidement le recrutement dans les écoles paramédicales, ainsi que le numerus clausus médical.

Ces outils de pilotage sont perfectibles, j'en conviens. En outre, les facteurs humains rendent parfois incompatibles le lieu d'études et celui de l'exercice professionnel. C'est pourquoi la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) devra infléchir les pratiques actuelles. Certains établissements ont déjà engagé une démarche exemplaire : l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a établi une cartographie par métier, couplée avec son fichier de ressources humaines, qui sera refondé au 1er janvier 2009 ; le Groupement de coopération sanitaire-système d'information de santé de Champagne-Ardenne (GCS-SISCA) a élaboré un outil de gestion par métier et compétence, mis au service des 51 établissements publics ou privés de cette région. Je demanderai aux directeurs des agences régionales d'hospitalisation de mobiliser les établissements via les contrats d'objectifs et de moyens.

Avec la tarification à l'activité et la réforme budgétaire et comptable, la comptabilité analytique est devenue un outil indispensable d'aide à la décision. Son premier niveau répartit les charges hospitalières entre les activités. Et je ne peux m'empêcher de mentionner la base de comptabilité analytique gérée par le CHU d'Angers, pilotée par le Groupe pour l'amélioration de la comptabilité analytique hospitalière (Gacah) : elle associe 130 hôpitaux et permet de comparer l'ensemble des établissements.

J'en viens à l'étude nationale des coûts.

La Mission nationale d'expertise et d'audit hospitalier (MNEAH) a développé et diffusé en ligne des outils remarquables permettant de comparer les coûts des pôles d'activité. Pour améliorer les systèmes d'information, le Groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier (GMSIH) a publié sur son site Internet un « kit de base des tableaux de bord pour les établissements de santé ». La réunion de ces deux structures au sein de la future Agence nationale d'appui à la performance (Anap), si vous voulez bien l'adopter dans le cadre du PLFSS, permettra d'amplifier le développement des outils d'aide à la gestion hospitalière.

Enfin, la fiabilité des comptes des établissements publics de santé a franchi une première étape avec la réforme budgétaire et comptable de 2006, qui responsabilise les gestionnaires hospitaliers. C'était indispensable mais insuffisant. C'est pourquoi, conformément aux observations formulées par la Cour des comptes, les services de mon ministère travaillent avec le budget en vue de parvenir à la certification mentionnée à l'article 40 bis. Nous retrouverons ce sujet avec le projet de loi « hôpital, santé, patients, territoire ».

M. Vasselle m'a interrogée sur le retard dans le suivi des prescriptions hospitalières exécutées en ville.

La dernière loi de financement a permis certaines avancées. Ainsi, au 1er janvier 2009, les professionnels de santé seront, pour la plupart, dotés d'un numéro personnel du Répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS) ; les textes juridiques auront été publiés au Journal officiel. Au 1er mars 2009, la majeure partie des systèmes d'information d'assurance maladie pourront traiter les données assorties d'un numéro RPPS, les logiciels des professionnels de santé libéraux seront prêts pour le déploiement. Les applications des transporteurs devront être opérationnelles fin 2009. Entre juillet et décembre 2009, les systèmes d'information des établissements de santé pourront traiter les données identifiées par un numéro RPPS. La principale difficulté sera de convaincre les professions libérales d'adopter la version 1.4 de Sesam Vitale : alors que 25 % des prescriptions exécutées par les pharmacies d'officine sont d'origine hospitalière, seules 3 % d'entre elles sont équipées.

Le suivi ne pourra donc être lancé de manière fiable qu'au 1er janvier 2010 pour la majeure partie des établissements de santé et 40 % à 80 % des professionnels libéraux selon les métiers

En 2009, l'assurance maladie produira un premier bilan permettant de mettre en place un dispositif de sanctions effectif au 1er janvier 2010. L'année prochaine sera donc riche et utile.

Une salve de questions a porté sur la convergence tarifaire.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 avait inscrit cette convergence d'ici 2012 « dans la limite des écarts justifiés par les différences dans la nature des charges couvertes par ces tarifs ». Convergence ne signifie donc pas identité.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Il faut la transparence !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - D'autre part, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 précise qu'il faut aller vers les tarifs du secteur privé. Bien entendu, les fédérations hospitalières ont été associées aux travaux préalables. J'espère que le rapport correspondant vous a été communiqué.

M. François Autain.  - Non !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Il a été envoyé à la commission.

M. Nicolas About, président de la commission.  - La commission a reçu une copie du rapport destiné au président du Sénat...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je le ferai donc parvenir à M. Autain avant la fin de la discussion. (M. François Autain, qui s'en félicite, se voit remettre un exemplaire du rapport) Je souhaite que tous les sénateurs bénéficient du même traitement de faveur ! (Sourires)

Le rapport de 2006 de l'Igas a relevé que l'écart facial moyen des tarifs, sur la base de l'activité du secteur public, était de 41 % en 2005 en défaveur de l'hospitalisation privée ; il est de 37 % en 2008 -on voit que la convergence progresse encore à petits pas. Si l'on prend comme base l'activité du privé, les écarts sont respectivement de 29 % et de 25 %. Si l'on prend enfin comme base l'activité des deux secteurs, ils sont de 36 % et 33 %.

Pour la campagne tarifaire 2009, une étude des coûts à méthodologie commune va être conduite afin d'analyser les écarts intra et intersectoriels. Ce sera un outil d'aide aux décisions de financement des établissements. Il faudra aussi quantifier les facteurs explicatifs de ces écarts -pour l'essentiel la sévérité des pathologies, la prise en charge des patients en situation de précarité et l'impact de la permanence hospitalière. Comme on le voit, l'année 2009 sera active, le travail fait est important, celui qui reste à faire l'est aussi. Je suis déterminée à avancer sur ce dossier complexe afin de rendre les financements plus objectifs et d'améliorer l'allocation des ressources -toujours pour plus de justice et d'efficience.

MM. Vasselle et Jégou m'ont interrogée sur ma détermination à assurer le redressement des établissements en difficulté, notamment des CHU.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Quatre CHU sont en difficulté.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je suis convaincue que le déficit n'est pas une fatalité.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - A structure équivalente, certains établissements sont déficitaires et d'autres ne le sont pas.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Poitiers, par exemple...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Le déficit global atteint 745 millions, dont 369 pour les CHU. On me dit que 29 CHU sur 31 sont déficitaires ; encore faut-il s'entendre sur le sens du mot. La moitié du déficit des CHU est concentré sur cinq établissements, pour un montant unitaire de 30 à 50 millions.

M. François Autain.  - Pourquoi ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Six CHU ont un déficit compris entre 10 et 20 millions, dix-sept un déficit inférieur à 10 millions, ce qui relève plus de l'écriture comptable que d'autre chose. Limoges et Poitiers sont en excédent.

Le Gouvernement est déterminé à réduire ces déficits, c'est bien pourquoi j'ai tenu à renforcer le cadre juridique des procédures de redressement à l'article 40 du projet de loi de financement pour 2009. Un groupe de travail a été constitué avec notamment la conférence des directeurs de CHU et les ARH pour étudier ce qui relève des choix de gestion et des insuffisances du modèle de financement. Il faut aider les établissements, dont l'histoire et la topologie peuvent expliquer la situation financière. Mais je n'ouvrirai pas de guichet sans contrepartie ; j'aiderai ceux des établissements qui sont décidés à retrouver le chemin de l'équilibre.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Parfait !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - S'agissant des financements par la dotation Migac, un effort de clarification a été fait, que décrit le troisième rapport annuel au Parlement. A titre d'exemple, le financement des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation a été rénové : les ressources sont désormais allouées selon des indicateurs de résultat ; le dispositif est ainsi plus incitatif.

J'ai demandé en outre que le développement des systèmes d'information à l'hôpital soit accéléré, c'est une de mes priorités ; j'ai d'ailleurs fait une communication en conseil des ministres sur le sujet. Nous y reviendrons lors de l'examen de la loi HPST. Le groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier a été recentré sur ses missions prioritaires. Sur les 10 milliards d'investissement du plan Hôpital 2012, 1,5 milliard est consacré à la création ou à l'amélioration des systèmes d'information hospitaliers.

Plusieurs orateurs m'ont interrogée sur la tarification à l'activité, dont M. Milon que je remercie pour ses propos constructifs. Quatre ans après, où en est-on ? J'entends dire ici ou là qu'elle a mis des établissements en difficulté ; je rappelle qu'il s'agit de redistribuer les crédits, l'enveloppe n'a pas diminué -et je note que ceux qui en ont bénéficié sont plus silencieux que les autres. L'objectif de la tarification à l'activité est avant tout une allocation plus juste des moyens. Le service de santé des armées y basculera au 1er janvier prochain. Des études complexes sont en cours pour l'intégration des soins de suite et de réadaptation ainsi que de la psychiatrie.

La période de transition prévue jusqu'en 2012 doit permettre aux établissements de s'adapter. Toutes choses égales par ailleurs, la réforme implique la redistribution entre 2005 et 2012 de 140 millions pour le secteur privé et de 1,3 milliard pour le secteur public, dont 540 millions sur la période 2008-2012. Aujourd'hui, le chemin de la convergence intrasectorielle est aux deux tiers parcouru.

La T2A n'est pas figée et elle sera modulée par les deux coefficients que je souhaite mettre en oeuvre. Cette tarification n'est pas une réforme isolée, elle s'inscrit dans un plan plus vaste ; c'est un levier pour augmenter l'efficacité des établissements de santé. Et surtout, elle met le malade au centre du dispositif hospitalier, contrairement à l'ancienne tarification qui interdisait de soigner un malade arrivé après épuisement de l'enveloppe globale. J'ai donc du mal à comprendre les critiques de certains...

Oui, monsieur Autain, l'hôpital est bien la clé de voûte de notre système de santé ; pour une fois, nous sommes d'accord. (Exclamations amusées à gauche) C'en est même le joyau. Vous dénoncez la possibilité de confier des missions de service public à des établissements privés. Mais il faut définir ce qu'est une mission de service public et quelles obligations y sont liées ! Ces obligations, qui s'imposent à tout établissement, public ou privé, qui remplit une telle mission, sont au nombre de trois : assurer la permanence des soins ; accueillir les malades de toute situation financière, notamment les bénéficiaires de la CMU et de l'AME ; assurer à la population un certain pourcentage -à fixer avec l'Agence nationale de l'hospitalisation- de prestations remboursées à 100 % par la sécurité sociale.

Madame Escoffier, tout le monde doit avoir accès à des soins sûrs et de qualité. Je le dis et le redis : je ne fermerai aucun hôpital ! L'hôpital de proximité est indispensable mais il doit assurer les missions qui lui sont propres. Nous devons réformer les services de chirurgie et d'obstétrique et fermer certains d'entre eux qui sont devenus dangereux par manque de pratique. Dans un centre hospitalier dont je tairai le nom, on opérait les patients pour des pathologies digestives lourdes avec un taux de mortalité de 50 %, contre 12 % au niveau national. Sur 28 patients opérés en 2006, 14 sont décédés ! J'ai le même exemple dans un hôpital du Centre où une trop faible activité a amené des erreurs à répétition, qui ont même entraîné un décès en septembre. Si le risque zéro n'existe pas, toutes les expertises montrent que, pour assurer la sécurité des patients, il faut réaliser un nombre d'actes suffisants. Même chose pour l'obstétrique : à Clamecy, il n'y avait plus de pédiatre à plein temps affecté à la maternité ! On m'a parlé d'un établissement où le chirurgien avait été de garde 200 jours d'affilée et il n'était remplacé que par des intérimaires... Comment des médecins pourraient-ils être opérationnels quand ils réalisent autant de gardes à la suite ?

M. Guy Fischer.  - Là, nous sommes tout à fait d'accord.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je note que les patients ont souvent déjà choisi et votent avec leurs pieds en allant se faire soigner ailleurs. A Pertuis, le taux de fuite pour la chirurgie était de 93 %.

Les hôpitaux de proximité sont irremplaçables pour les urgences et les soins courants. L'hôpital régional offre des plateaux techniques sophistiqués et pratique les opérations lourdes. Au niveau supérieur se trouvent les CHU et peut-être même peut-on envisager un quatrième niveau encore plus pointu.

M. Bernard Cazeau.  - Et les cliniques ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - A l'hôpital, il faut un patron, mais qui ait un projet médical. Nous voulons rendre l'hôpital attractif pour nos professionnels de santé et c'est l'objet du projet de loi que j'aurai l'honneur de vous présenter dans quelques semaines. (Applaudissements à droite, au centre et au banc de la commission)

M. Bernard Cazeau.  - On en reparlera !

Mme la présidente.  - Nous en venons aux questions-réponses. Les questions ne devront pas dépasser deux minutes et demie et, après la réponse de la ministre, chaque orateur disposera encore d'une minute pour lui répondre.

Mme Jacqueline Chevé.  - Au nom de la réduction des coûts, le Gouvernement entend regrouper certains hôpitaux de proximité pour concentrer les infrastructures hospitalières dans de gros plateaux techniques. Cela se fait au détriment de l'égal accès à des soins de qualité pour tous. Implantés dans des petites villes, souvent au centre de territoires ruraux, les hôpitaux de proximité sont progressivement écartés d'un système qui se recentre sur les capitales régionales, déjà engorgées. Élue du Centre Bretagne, je m'inquiète des conditions brutales et souvent anarchiques dans lesquelles sont conduites ces réorganisations. Je garde en mémoire la forte mobilisation de Carhaix et de Guingamp pour leur hôpital.

Ces réorganisations démotivent les médecins libéraux qui voudraient s'installer en campagne parce que la présence d'un hôpital de proximité est déterminante dans le choix du lieu d'installation des jeunes médecins. Ces hôpitaux constituent un renfort indispensable parce que les urgences et les Smur évitent de faire peser sur leurs épaules la responsabilité des situations graves. Et pour de nombreux spécialistes, l'hôpital proche est un point d'appui indispensable à une pratique médicale de qualité.

Ces réorganisations déstabilisent les territoires, elles ont des effets collatéraux dramatiques et on assiste à des délocalisations de services comme on assiste à des délocalisations d'entreprises. Pour une petite ville, la fermeture d'un hôpital, d'un service d'urgence ou d'une maternité, c'est la perte directe de dizaines, voire de centaines d'emplois. C'est aussi une perte d'attractivité surtout quand la réorganisation d'un hôpital s'accompagne de la fermeture d'une gendarmerie, d'une sous-préfecture ou d'un tribunal d'instance...

Ces réorganisations désorientent enfin les patients, obligés de parcourir de longues distances avant de trouver un hôpital ou un spécialiste. Avec le vieillissement de la population dans nos campagnes, cela pose de vrais problèmes aux personnes âgées et à leurs familles, souvent éloignées. L'accès aux soins devient de plus en plus compliqué pour nos concitoyens vivant en zone rurale. Aujourd'hui, avec la désertification médicale, il faut parfois attendre plus de six mois pour pouvoir consulter un spécialiste. Je peux témoigner, pour le vivre au quotidien, qu'une réorganisation de maternité en centre de périnatalité n'apporte pas de réponse supplémentaire en termes de prévention et de suivi médical. Aujourd'hui, il faut de 7 à 8 mois pour obtenir un rendez-vous de gynécologie médicale. Est-ce tolérable ?

Est-il normal, sous couvert de rationaliser l'offre de soins, de perdre la proximité, la sécurité sanitaire pour les habitants, l'égalité de l'accès aux soins pour tous et d'accentuer encore la désertification de nos territoires ? Quel avenir est réservé à nos hôpitaux publics de proximité ? Et pour quelles activités ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je crois avoir déjà répondu. Mais je répète que je ne fermerai pas d'hôpitaux de proximité. Ils sont indispensables mais doivent être recentrés sur leurs missions.

M. Bernard Cazeau.  - Vous allez les étouffer !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ceux qui ont été restructurés voient, contrairement à ce que vous pensez, leurs emplois augmenter et des maires qui ont défilé derrière des banderoles avouent après coup que la restructuration a sauvé leur hôpital parce qu'il a retrouvé la confiance des patients.

Les urgences sont bien sûr une des missions dévolues à l'hôpital de proximité et, à Carhaix, je renforcerai ce service, notamment en modernisant l'hélistation. Quant aux services de gériatrie, ils doivent bien sûr rester dans ces hôpitaux. Mais, s'il s'agit d'opérer une hanche, il est normal de transporter le malade vers un plateau technique et des praticiens compétents et spécialisés. Le chirurgien qui opère tout n'existe plus et un accident de la route requiert l'intervention d'au moins trois d'entre eux et un plateau technique ; or un tel plateau mutualise les compétences d'une centaine de professionnels différents. Comment assurer une telle sécurité dans une ville de quelques milliers d'habitants ?

Il en est de même pour les maternités. Nous déclenchons la procédure de restructuration à 200 accouchements par an, alors que les spécialistes fixent le seuil de sécurité entre 900 et 1 200 accouchements par an. Nous sommes donc bien au-dessous.

Notre politique est d'assurer la vitalité des territoires. Votre hôpital ne sera pas fermé ; c'est si vous ne faites rien que vous verrez les patients le fuir. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Jacqueline Chevé.  - Que vaut une telle réponse ? Vous allez les étouffer petit à petit.

Mme Anne-Marie Payet.  - L'ancien mode de financement des établissements hospitaliers figeait l'activité. La T2A est donc une excellente chose. Mais le processus de convergence public-privé est un préalable essentiel. Or, par volontarisme politique, les pouvoirs publics ont mis en oeuvre la T2A en 2003 sans disposer encore d'une échelle de coûts du secteur privé. Quatre ans plus tard, faute de tels outils, la mise en place du dispositif semble compromise. Le Gouvernement, en obtenant que la loi de financement pour 2008 n'exige aucun objectif intermédiaire chiffré, donne le sentiment d'un recul. Il a ainsi précisé que la convergence se ferait en direction des tarifs les plus efficients et non des tarifs moyens.

En tout cas, l'objectif d'un achèvement de la convergence tarifaire en 2012 semble difficilement tenable. Comment comptez-vous relancer la convergence des tarifs ? Avez-vous constaté des progrès ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Convergence n'est pas identité. On m'accuse de créer un lit de Procuste pour l'hôpital public. Il va de soi que nous tenons compte des différences entre les services. On n'a encore avancé que de quelques pour cent, mais cela va quand même dans le bon sens. En 2009 sera poursuivie une analyse des écarts intra et intersectoriels qui devrait apporter une aide à la décision. Les tarifs des établissements hospitaliers en ressentiront les effets : nous devrions avoir au moins cinq points de convergence.

Le chantier que vous nous confiez est mené d'une main ferme !

Mme Anne-Marie Payet.  - Votre réponse dissipera les craintes.

M. Guy Fischer.  - Ce projet de loi comporte une innovation qui préfigure le futur paysage médical de notre pays. Il s'agit de la possibilité ouverte aux agences régionales d'hospitalisation, puis aux ARS, de placer un établissement public de santé sous administration provisoire. Vous justifiez cette mise sous tutelle par la situation de certains établissements qu'il faudrait replacer sur le bon chemin de l'efficience. Vous entendez confier cette mission au directeur de l'ARH, qui se substituerait au directeur, forcément responsable de cette situation. Cette analyse injuste tend à faire croire à nos concitoyens que la situation financière de nos hôpitaux ne résulterait que de la mauvaise gestion de leurs directeurs.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Ça peut arriver !

M. Guy Fischer.  - Certes, comme il y a de mauvais chirurgiens, on les connaît mais ils continuent d'exercer !

Le déficit des établissements publics de santé est évalué à 880 millions et nous avons du mal à croire que cette situation gravissime ne serait que la conséquence d'une mauvaise gestion. Nous considérons au contraire, que c'est la conséquence du désengagement de l'État, d'abord avec une sous-dotation criante, puis avec le double mécanisme de convergence public-privé et de tarification à l'activité, qui prive les établissements des moyens dont ils ont pourtant cruellement besoin. C'est pourquoi nous considérons que le placement sous tutelle ne sera pas suffisant.

Quels sont les effets du passage à la T2A à l'hôpital, notamment au regard de l'évolution des déficits des établissements publics de santé ?

Je suis désolé de me répéter, mais la formule y incite...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Moi aussi, je vais me répéter !

M. Guy Fischer.  - Pouvez-vous également nous dire quelle forme pourraient prendre les mesures proposées par le directeur de l'ARH, et nous dire ce qui est prévu si l'autorité de tutelle de l'établissement public de santé ne parvient pas à remettre l'établissement dans une situation financière équilibrée ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je ne me lasse jamais de vous répondre... même si vous posez toujours les mêmes questions !

Nous avons les dépenses hospitalières les plus élevées du monde, avec le maillage le plus serré du monde.

M. François Autain.  - Et l'Allemagne ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Avec ces dépenses déjà les plus élevées, avec la crise financière actuelle, nous fixons encore un Ondam hospitalier à 3,3 %, soit beaucoup plus que la croissance de la richesse nationale. On ne peut donc pas parler d'une logique de rationnement ! Telle est la vérité des chiffres.

Encore faut-il que ces sommes très importantes que la solidarité nationale consacre à l'hôpital public soient bien utilisées. La T2A répond à un souci de justice entre les établissements et aussi pour les malades. La dotation globale n'est pas diminuée ! N'est-il pas juste que les établissements qui font plus d'actes reçoivent plus d'argent que ceux qui en font moins ? La dotation globale, que tout le monde critiquait, a été remplacée par la T2A qui met les responsables des hôpitaux dans une situation de responsabilité à laquelle beaucoup trouvent leur compte.

On ne recourt à la mise sous tutelle que lorsque la situation est très dégradée, que le déficit atteint une proportion considérable par rapport au chiffre d'activité -je ne parlerai jamais d'un « chiffre d'affaires » à propos des hôpitaux. Ces établissements doivent alors être aidés et la désignation d'un administrateur provisoire est une façon de les aider. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Quatre questions rapides.

Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour mieux traiter les maladies orphelines ?

L'hôpital est au coeur d'une des plus importantes avancées thérapeutiques de ces dernières années, l'utilisation du sang de cordon ombilical. Or, paradoxalement, la France persiste à traiter le sang de cordon comme un simple déchet opératoire. Elle s'est dotée d'objectifs insuffisants en matière de stockage de greffons : elle n'est qu'au seizième rang mondial, derrière la République tchèque, en termes d'unités stockées par habitant, et s'est fixée un objectif de stockage de 1 000 unités alors que l'autosuffisance serait à 50 000 unités. Elle s'est mise dans un état de dépendance coûteuse aux importations de greffons étrangers pour soigner les malades en dépit de nos 800 000 naissances par an. Le coût de ces importations pour l'assurance maladie équivaut à la conservation de 1 700 greffons.

Avez-vous l'intention de lancer une politique et comment collecter le sang du cordon ?

Un service d'addictologie a-t-il la même noblesse qu'un service de cardiologie à l'hôpital européen Georges Pompidou et, dans l'affirmative, allez-vous, compte tenu de l'ampleur du problème, développer l'addictologie ?

Vous voulez moderniser l'hôpital mais avez-vous étudié l'impact des innovations sur l'organisation hospitalière et le rapport de Mme Polton sera-t-il traité comme un guide de la politique publique pour permettre des gains de lits et de moyens ? (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Il me faudrait vingt minutes pour répondre...

Les maladies rares touchent 3 à 4 millions de Français et 30 millions d'Européens. Le plan spécifique s'achève à la fin de l'année et, comme je reçois beaucoup de lettres à ce sujet, je voudrais de nouveau rassurer les patients et leurs familles. Le diagnostic est, pour l'essentiel, pris en charge par des structures hospitalières ; 131 centres de référence ont été labellisés et financés à hauteur de 40 millions ; les maladies orphelines se comptant par milliers, chaque centre en traite plusieurs ; 475 centres de compétence seront désignés d'ici la fin de l'année ; des équipes de recherche recevront 26 millions.

Notre organisation fait figure de modèle et j'ai mis la question à l'ordre du jour de la présidence française : vous avez assisté à une réunion d'experts et le conseil de décembre en traitera. Il reste beaucoup à faire, notamment en liaison avec les maisons du handicap. Nous allons évaluer le plan, le stabiliser en continuant les financements pour le centre Orphanet et nous mettrons en place un nouveau plan fin 2009.

Vous m'avez transmis un rapport sur la greffe de sang de cordon, dont nous allons expertiser les dix préconisations. L'intérêt thérapeutique du sang placentaire n'est plus à démontrer. La France reste au premier rang mondial en nombre de greffes de cordon réalisées et a mis en oeuvre un plan sur trois ans afin de disposer de 10 000 unités de sang placentaire. Il faudra poursuivre nos efforts pour atteindre 50 000 unités car nous importons 60 % des greffons, ce qui est très coûteux. Notre niveau d'exigence éthique est très élevé, ce qui n'est pas le cas de tous les pays, et nous n'autorisons la conservation de parties du corps humain que pour un usage thérapeutique. Nous confirmons notre refus des banques autologues car on manque de critères scientifiques et nous refusons ce qui entraînerait une rupture d'égalité.

M. François Autain.  - Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Nous saurons conjuguer solidarité et efficacité.

L'addictologie, enfin : les services recevront 33 millions d'euros. Je n'ai pas le temps d'analyser le rapport mais je puis vous assurer qu'il sera soigneusement décortiqué. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme la présidente.  - Gardienne des temps de parole, je rappelle que nos échanges doivent être limités à cinq minutes : ne compliquons pas le travail de la ministre en lui posant quatre questions en une.

M. Raymond Vall.  - Vos précédentes réponses me permettront d'élaguer ma question. Élu d'un département rural, je souscris au maintien des hôpitaux de proximité comme à vos déclarations sur la nouvelle destination que vous voulez leur donner. Mais allez-vous en conserver les lits de médecine ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je vous remercie d'avoir noté ma volonté de garantir le maillage des hôpitaux de proximité, qui assureront médecine, urgences et soins post-aigus. Je veux dire ma désolation de constater que certains considèrent que la gériatrie n'est pas valorisante.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Y compris parmi les médecins !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - L'éthique exige un changement de vision : la gériatrie est une belle spécialité.

M. Jacky Le Menn.  - J'ai noté et approuvé votre volontarisme. Les unités de soins de longue durée accueillent des personnes âgées, aux pathologies lourdes et plus ou moins stabilisées. Les nouveaux périmètres de prise en charge vont se traduire par la fermeture de 70 % de ces lits : dans mon département, plus de 1 000 sur 1 575 seront ainsi reconvertis, ce qui va affecter l'accès des personnes dépendantes aux soins, comme la qualité de ceux-ci puisque le personnel sera moitié moins nombreux. La réforme touchera d'abord des personnes qui changeront de service administratif sans même changer de chambre, à moins qu'elles soient assez nombreuses pour reconstituer une unité de soins de longue durée : c'est Ubu roi. Si les grands établissements ont la faculté de s'auto-alimenter, qu'en sera-t-il des établissements périphériques ? Les personnes âgées dépendantes ont droit à des soins de qualité : il faut adapter les moyens aux besoins.

Il convient de suspendre cette réforme dans l'attente d'une étude exhaustive sur les établissements accueillant les personnes âgées, afin de mesurer les conséquences de chaque décision.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La question est redondante par rapport à la précédente... Je le dis une fois encore, notre objectif est de conserver une filière cohérente. Une analyse transversale sur l'ensemble des établissements montre que 35 % des patients ont besoin de soins médicaux techniques lourds ; il faut donc distinguer entre ce qui relève du médical et ce qui relève du sanitaire et social. Les personnes qui ont besoin de soins médicaux ont vocation à être prises en charge dans les USLD.

Auparavant, la dotation évoluait chaque année en fonction de l'année précédente. En 2008, nous avons instauré un financement des soins dans les Ehpad en calculant les charges médicales, traduites en points GMPS -Gir moyen pondéré soins- et les charges liées à la dépendance. Il en résulte une meilleure équité dans le financement des soins. Les disparités seront peu à peu résorbées. Le point GMPS vaut actuellement entre 7 et 30 euros. Dans le cadre du plan Solidarité grand âge, 44 millions d'euros ont été prévus afin d'assurer aux établissements qui ont effectué leur partition en 2008 un point à 12,40 euros au moins. En 2009, 47 millions seront consacrés aux établissements qui feront leur partition durant l'exercice. Les établissements surdotés conserveront dans un premier temps leur dotation. Des indicateurs sont mis en place afin d'assurer une convergence intrasectorielle. Nous avons été guidés par un souci d'équité dans la prise en charge.

Mme Françoise Henneron.  - Les Français sont attachés aux services des urgences. Lorsque l'on se rend à l'hôpital en urgence, on se trouve généralement dans un état de stress intense. Il est important d'être pris en charge rapidement. La proximité géographique est essentielle. Les communautés hospitalières du projet de loi HPST répondent parfaitement à cette exigence. Pourtant, la réorganisation territoriale est perçue comme un facteur d'éloignement par les usagers. Vous avez l'intention de resserrer le maillage des urgences. C'est une attente forte des Français, surtout ceux qui vivent loin des centres urbains. Comment les hôpitaux, en milieu rural notamment, contribueront-ils à ce maillage ? (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Les urgences sont un aspect majeur de l'organisation des soins. Les Français veulent être pris en charge près de chez eux. Les efforts ont été considérables. Aujourd'hui, 99,35 % de la population réside à moins de vingt minutes en hélicoptère d'une structure d'urgence ; et 90 %, à trente minutes ou moins par transport terrestre.

Des services d'urgence nombreux rassurent nos concitoyens. C'est le point d'entrée dans le système de soins, quand tout est fermé. Il faut donc créer des dizaines d'unités .La réorganisation des filières et des plateaux techniques est une opportunité : des ressources peuvent être réaffectées et les antennes Smur rattachées à des services de proximité.

Je ne veux pas créer des services d'urgence à deux vitesses : des qualifications en médecine d'urgence seront exigées. Le plan Hôpital 2012 accompagnera ces transformations, en commençant par la mise aux normes. Une opportunité considérable se présente pour centrer les hôpitaux de proximité sur les missions dont nos compatriotes ont besoin. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Françoise Henneron.  - Je vous remercie de ces précisions.

Mme Claire-Lise Campion.  - Lorsque des services de maternité et de chirurgie sont remis en cause, la situation financière de l'établissement en est affectée. Tel est le cas à Juvisy-sur-Orge, dans mon département. L'établissement affichait pourtant 2 000 actes chirurgicaux de qualité par an et 900 naissances. L'activité des deux services était rentable.

Une gestion plus efficiente est sans doute nécessaire dans les hôpitaux ; mais il faut aussi améliorer l'offre de soins ! Or la nouvelle tarification a des effets pervers ; elle pénalise le public par rapport au privé. Les communautés hospitalières seront peut-être une bonne chose, sauf si l'hôpital de référence vide les autres de leur activité, ne leur laissant que l'accueil des personnes âgées, comme c'est envisagé à Juvisy. Mme la ministre affirme qu'il n'y aura pas de fermetures d'hôpitaux, mais les fermetures de services, qui sont une réalité, contribuent à la désertification médicale. Les usagers n'ont pas toujours un service équivalent dans un autre établissement !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La décision, à Juvisy, ne vient pas du ministère, ni de l'administration sanitaire, ni de l'agence régionale... mais du conseil d'administration lui-même ! Il s'agit d'un choix stratégique, car le nombre d'accouchements était en effet au-dessus du seuil d'alerte pouvant amener à transformer une maternité en centre de périnatalité.

L'offre étant importante dans le territoire concerné, l'établissement a préféré se concentrer sur les soins de médecine, les soins de suite, la gériatrie. La décision ne contribue à aucune désertification, la transformation est le fruit d'une stratégie qui paraît cohérente et légitime.

Mme Claire-Lise Campion.  - Vous savez bien dans quelles conditions cette « libre décision » a été prise !

M. Bruno Gilles.  - La tarification à l'activité est une bonne réforme, mais ses modalités de calcul ne sont pas sans incidences sur certaines activités médicales. Par exemple sur la prise en charge du VIH : cette activité pluridisciplinaire est évaluée à 150 euros sur la base d'une consultation avec un acte associé, contre 457 euros dans le système antérieur, avec une hospitalisation de jour. La différence représente tout de même un million d'euros pour l'Assistance publique hôpitaux de Marseille (AP-HM).

M. Bernard Cazeau.  - Eh oui, c'est ce que nous disons !

M. Bruno Gilles.  - Ne pourrait-on envisager de « sanctuariser » la prise en charge du VIH, en appliquant les financements propres aux hôpitaux de jour et garantir ainsi la prise en charge la plus large des patients ?

Vous avez affirmé, madame la ministre, que le plan Hôpital 2012 représenterait 10 milliards, dont 93 % iraient à l'hôpital public. Comment expliquer, dès lors, qu'à Marseille, le pôle privé « Euro Méditerranée » ait reçu 54 millions et l'AP-HM seulement 9 millions ?

M. Bernard Cazeau.  - Quel déséquilibre !

M. Bruno Gilles.  - L'hôpital public à Marseille a pourtant fait les efforts qu'on lui a demandés, puisqu'il a réduit son déficit de 10 millions et que ses recettes, qui n'augmentaient que de 1,53 % il y a deux ans, ont progressé de 3 % cette année. (M. Bernard Cazeau applaudit)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je veux rassurer sur la fermeture de l'unité VIH de l'hôpital Saint-Joseph à Paris : elle est liée aux difficultés financières de l'établissement, qui donnent lieu à un plan de redressement de 20 millions, et elle est sans incidence sur le suivi des patients, puisque la file active des soins a été reprise par l'hôpital Necker.

Le VIH donne lieu à deux modalités de tarification : une prise en charge spécifique, déclinée en six tarifs d'intervention ; une prise en charge des autres pathologies, avec possibilité de majoration du fait de l'infection par le VIH. Les centres de dépistage bénéficient de 18 millions d'euros, les comités de coordination, de 11,53 millions.

Ma réponse sur les investissements à Marseille commencera par la procédure : les dossiers pour l'attribution des premiers crédits au titre du plan Hôpital 2012 ont été examinés par l'ARH, qui nous a transmis ses priorités ; la mission nationale d'appui à l'investissement hospitalier les a expertisés, de même que le groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier. Sur cette base, nous avons pris 248 décisions d'investissement, pour un montant de 1,8 milliard. Le plan Hôpital 2012 n'en n'est qu'à ses débuts, il y aura d'autres sessions ; celle-ci a consacré 93 % de ses moyens à l'hôpital public.

M. François Autain.  - 7 % au privé, c'est encore trop !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - A Marseille, l'hôpital Ambroise Paré a été soutenu à hauteur de 54 millions, pour son projet de pôle hospitalier « Euro Méditerranée » et l'AP-HM a reçu 9 millions pour son projet d'informatisation. L'AP-HP n'a pas présenté d'autres projets, j'imagine qu'elle le fera ultérieurement ; nous avons soutenu son projet d'informatisation dans des conditions tout à fait dérogatoires, portant la participation de l'État à 75 %. Nous n'avons donc pas fait de choix en défaveur de l'AP-HP, le sénateur-maire de Marseille, M. Gaudin, en a convenu. Nous avons du reste revu à la baisse le projet initial du pôle « Euro Méditerranée », pour qu'il ne pénalise pas l'AP-HM. L'établissement public prépare trois projets immobiliers, en particulier le regroupement de ses laboratoires et la création d'un nouveau pôle logistique. L'AP-HM devra assumer sa part de financement ; elle n'en n'a pas les moyens pour l'instant, ce qui suppose l'adoption d'un plan de redressement : les projets d'investissement ne pourront être pris en compte qu'après le retour à l'équilibre.

M. Bruno Gilles.  - Merci pour cette réponse ! Nous ne manquerons pas, avec M. Gaudin, de vous tenir très informée des projets pour l'hôpital public à Marseille !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - J'informe chacun d'entre vous que le rapport de convergence est à votre disposition ! (Marques d'approbations sur de nombreux bancs)

Mme la présidente.  - Nous revenons au projet de loi.

Discussion des articles (Suite)

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR 2009

Article 9

Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2009-2012), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

Mme la présidente.  - Amendement n°95, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

M. Guy Fischer.  - Nous voterons contre ces objectifs irréalistes de recettes et de dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Vous ne tenez aucun compte de la crise financière, alors même que vous avez mobilisé en un jour 360 milliards pour y faire face. Vos estimations sont plus qu'optimistes, alors que le chômage va très probablement augmenter beaucoup plus qu'attendu ! Quand on les interroge, les Français déclarent tous connaître, dans leur entourage direct, une personne au chômage ou dans la précarité, la situation ne va pas s'améliorer ! Nous voici revenu un an en arrière, quand Mme Lagarde affirmait que la croissance serait d'au moins 2 % en 2008, ce que nous contestions : on sait ce qu'il en est advenu !

Cet article démontre l'échec de la gestion comptable du PLFSS, qui pèse toujours plus sur les dépenses sans avoir aucune incidence sur les recettes. Notre collègue député Mme Montchamp, rapporteur pour avis, a été claire en appelant à « freiner la dynamique des dépenses » et à « des mesures ambitieuses pour limiter les déficits ».

Les milliards d'exonérations de cotisations sont passés sous silence. L'approche comptable stigmatise les dépenses de santé, alors qu'il est utile de satisfaire les besoins sociaux.

Mme la présidente. - Amendement n°492, présenté par le Gouvernement.

Rédiger comme suit l'annexe B :

RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES PAR BRANCHE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DU RÉGIME GÉNÉRAL, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DE DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR

Hypothèses d'évolution moyenne sur la période 2009-2012

 

2009

2010

2011-2012

Produit intérieur brut en volume

0,5%

2,0%

2,5%

Masse salariale du secteur privé

2,75%

4,0%

4,6%

Objectif national de dépenses

d'assurance maladie (en valeur)

3,3%

3,3%

3,3%

Inflation (hors tabac)

1,5%

1,75%

1,75%

Dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 délibéré en conseil des ministres le 26 septembre 2008, le Gouvernement a présenté une trajectoire de retour à l'équilibre des finances sociales pour que le régime général revienne à l'équilibre en 2012. L'impact exceptionnel de la crise financière et économique conduit à modifier ce scénario comme l'a décrit le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques au Sénat le 6 novembre 2008. Le Gouvernement propose de maintenir ses objectifs de dépenses, sans adopter de mesures augmentant les prélèvements obligatoires qui pourraient handicaper davantage la situation de l'économie.

Il convient de rappeler dans ce cadre que les efforts entrepris ces dernières années, et qui ont porté leurs fruits, seront poursuivis et approfondis, afin d'adapter le système de protection sociale aux enjeux de demain.

Le scénario économique retenu dans le cadre de la programmation pluriannuelle des finances publiques repose sur une hypothèse de croissance de 0,5 % en 2009, puis 2,0% en 2010, puis 2,5 % par an à partir de 2011. Le rebond de croissance dès 2010 repose sur l'hypothèse conventionnelle d'un retour progressif de l'environnement international sur un sentier de croissance moyen, et un rattrapage partiel des retards de croissance accumulés en 2008 et 2009.

Dans ce contexte, avec une progression de la masse salariale de 2,75 % en 2009, puis 4,0% en 2010 et 4,6 % les années suivantes, la stratégie de redressement financier du régime général d'ici 2012 repose sur trois leviers principaux :

- une maîtrise constante de la dépense pour accroître encore son efficience ;

- une adaptation des ressources au sein de la protection sociale, sans hausse de prélèvement, et une sécurisation des recettes par un meilleur encadrement des « niches » sociales ;

- un assainissement de la situation des comptes en 2009 afin de démarrer la période de programmation avec une situation apurée des déficits du passé.

1. Il faut tenir une progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie qui ne peut être supérieur à 3,3 % en valeur sur la période 2009-2012. Cet effort de maîtrise des dépenses, réaliste, implique de mobiliser l'ensemble des marges d'efficience du système de santé.

Les efforts de maîtrise des dépenses devront donc porter sur plusieurs axes :

- la régulation des dépenses de soins de ville, notamment sur les postes qui connaissent une croissance forte (médicaments, dispositifs médicaux,...) avec une meilleure association des organismes complémentaires aux actions de maîtrise des dépenses ;

- la réforme de l'hôpital pour en améliorer l'efficience ;

- le renforcement de la gestion du risque dans l'ensemble des domaines, ambulatoire, hospitalier et médicosocial.

2. Compte tenu du caractère ambitieux des objectifs de maîtrise de la dépense, la trajectoire cible de redressement des finances sociales ne pourra être respectée qu'à la condition que la ressource sociale évolue au même rythme que la richesse nationale.

Cet objectif impose tout d'abord que les ressources actuelles soient réparties au mieux entre les fonctions sociales et qu'elles soient notamment redéployées en direction de l'assurance vieillesse pour faire face au vieillissement de la population. Le redressement des comptes de l'assurance vieillesse repose donc sur une prise en charge par la branche Famille de dépenses de retraites à caractère familial : les majorations de pensions pour enfants, dont 1,8 milliard d'euros sont aujourd'hui à la charge du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), seront donc intégralement prises en charge par la branche Famille d'ici 2011. Par ailleurs, comme envisagé lors des débats sur la loi du 21 août 2003, l'amélioration d'ores et déjà constatée de la situation financière de l'assurance chômage, et qui n'est pas radicalement remise en question pour l'avenir, pourrait permettre une baisse des cotisations d'assurance chômage qui viendrait neutraliser l'impact du relèvement progressif des cotisations vieillesse (0,3 point en 2009, 0,4 point en 2010 et 0,3 point en 2011).

Ces réallocations de ressources au sein de la protection sociale permettront de réduire de près de moitié le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse entre 2008 (-5,8 milliards d'euros) et 2012 (-3,1 milliards d'euros). Au-delà de l'apport de ressources nouvelles, la clef du redressement des comptes de l'assurance vieillesse repose sur l'amélioration de l'emploi des seniors : le Gouvernement propose plusieurs mesures fortes dans le cadre de la présente loi et prévoit de faire un nouveau bilan de leur efficacité et de la situation des comptes de l'assurance vieillesse en 2010.

Plus généralement, la préservation de ressources globales dynamiques pour la protection sociale, dans un contexte de stabilité des taux de prélèvement sur les salaires, exige d'éviter toute forme d'érosion de l'assiette du prélèvement, grâce à une lutte plus sévère contre la fraude, un encadrement des formes d'optimisation conduisant à des pertes de recettes trop importantes et également une meilleure maîtrise du développement des « niches » sociales. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit trois règles pour mieux encadrer les dispositifs d'exonération, de réduction ou d'abattement d'assiette : une évaluation systématique des dispositifs trois ans après leur création, un objectif annuel de coût des exonérations, réductions ou abattements d'assiette et la mise en place d'une règle de gage en cas de création ou d'augmentation d'une niche.

3. La trajectoire de retour à l'équilibre repose enfin sur un effort significatif fait dès 2009 pour assainir et clarifier les comptes.

La reprise des déficits cumulés des branches Maladie et Vieillesse du régime général, ainsi que ceux du Fonds de solidarité vieillesse par la Cades, prévue par la présente loi, permet au régime général d'économiser des charges d'intérêt à hauteur de 1,1 milliard d'euros. Afin de respecter l'objectif de stabilisation du taux de prélèvements obligatoires et de ne pas allonger la durée de vie de la Cades, celle-ci bénéficie d'une partie de la contribution sociale généralisée aujourd'hui affectée au FSV. Le FSV, qui bénéficie, dès 2009, de la reprise de sa propre dette de 3,9 milliards d'euros, connaît un déficit temporaire qui se réduit à 200 millions d'euros à l'horizon 2012.

En outre, la question du financement du régime de protection sociale des exploitants agricoles est traitée dans le cadre de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, ce qui conduit à la suppression du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles à partir de 2009. La dette accumulée par le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles sera reprise par l'État. Par ailleurs, une garantie pérenne de financement sera assurée pour les prestations maladie, grâce d'une part à un apport de ressources nouvelles en provenance de l'État (1,2 milliard d'euros) et d'autre part à l'intégration financière de cette branche au régime général. La Mutualité sociale agricole, qui assure la gestion de l'ensemble des prestations, prend en charge le financement de la branche Vieillesse dans le cadre d'une autorisation d'emprunt à court terme donnée par la loi de financement de la sécurité sociale. Un bilan sera fait en 2010 sur les moyens de rééquilibrer aussi la branche Vieillesse de la protection sociale des exploitants agricoles, qui bénéficie dès 2009 des économies de 200 millions d'euros de frais financiers liés à la reprise de dette par l'État.

Régime général

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Maladie

Recettes

144,4

150,8

156,0

162,1

169,2

176,7

Dépenses

149,0

155,0

160,6

166,3

172,4

178,7

Solde

-4,6

-4,2

-4,6

-4,2

-3,2

-2,0

AT/MP

Recettes

10,2

10,9

11,2

11,7

12,3

12,9

Dépenses

10,6

10,6

11,4

11,6

11,8

12,0

Solde

-0,5

0,3

-0,1

0,2

0,5

0,9

Famille

Recettes

54,6

56,7

58,2

60,4

62,9

65,5

Dépenses

54,5

56,4

58,7

60,8

62,8

64,4

Solde

0,2

0,3

-0,5

-0,3

0,1

1,1

Vieillesse

Recettes

85,7

89,8

94,7

100,7

107,2

111,6

Dépenses

90,3

95,6

100,0

104,9

109,7

114,6

Solde

-4,6

-5,8

-5,3

-4,2

-2,5

-3,1

Toutes branches consolidé

Recettes

290,0

303,0

314,3

328,9

345,4

360,2

Dépenses

299,5

312,3

324,9

337,4

350,4

363,4

Solde

-9,5

-9,3

-10,5

-8,6

-5,0

-3,1

Ensemble des régimes obligatoires de base

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Maladie

Recettes

167,6

175,2

181,8

188,0

195,9

204,3

Dépenses

172,7

179,4

185,6

192,1

199,0

206,2

Solde

-5,0

-4,1

-3,8

-4,1

-3,2

-1,9

AT/MP

Recettes

11,7

12,6

13,0

13,5

14,1

14,8

Dépenses

12,0

12,2

13,0

13,2

13,5

13,8

Solde

-0,4

0,4

0,0

0,3

0,6

1,0

Famille

Recettes

55,1

57,2

58,7

61,0

63,5

66,1

Dépenses

54,9

56,9

59,2

61,3

63,4

65,0

Solde

0,2

0,3

-0,5

-0,3

0,1

1,1

Vieillesse

 

 

 

 

 

 

Recettes

169,0

175,6

182,5

191,6

201,2

208,7

Dépenses

172,9

181,2

189,7

197,9

206,1

214,2

Solde

-3,9

-5,6

-7,2

-6,3

-4,9

-5,5

Toutes branches consolidé

 

 

 

 

 

Recettes

398,3

415,2

430,0

447,8

468,1

487,2

Dépenses

407,4

424,3

441,4

458,2

475,5

492,6

Solde

-9,1

-9,0

-11,4

-10,4

-7,4

-5,4

Fonds de solidarité vieillesse

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Recettes

14,5

15,3

14,0

14,2

14,7

15,2

Dépenses

14,4

14,5

15,0

15,2

15,3

15,4

Solde

0,2

0,8

-1,0

-1,0

-0,6

-0,2

Fonds de financement des prestations sociales agricoles

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

Recettes

14,3

14,4

Dépenses

16,5

17,0

Solde

-2,2

-2,6

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Cette modification tire les conséquences de nouvelles projections quadriennales.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie.  - Nous nous sommes largement exprimés au sujet de l'annexe B pendant la discussion générale et à propos des motions : la commission repousse l'amendement n°95 et accepte celui présenté par le Gouvernement.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°95.

Mme la présidente.  - Je mets aux voix l'amendement n°95.

M. Bernard Cazeau.  - Nous le voterons.

Le Gouvernement devra revoir sa copie, car formuler des hypothèses sur la période 2009-2012 revient à jouer les Mme Soleil. Les prévisions sont optimistes pour 2009, celles concernant les années 2010, 2011 et 2012 relevant de la méthode Coué.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - M. Coué était pharmacien !

M. Bernard Cazeau.  - Vous fixez un taux de croissance, laissant à Mme Lagarde et à M. Woerth le soin de revoir ces prévisions à la baisse...

L'équilibre du régime général en 2012 ? MM. Douste-Blazy et Xavier Bertrand nous ont déjà fait le coup ! L'objectif est hors de portée sans réformes structurelles, que l'on ne voit nullement se dessiner.

Ce projet de loi de financement bouleversera-t-il les choses ? Changera-t-il la vie ? Vu la propension naturelle des comptes à être déficitaires depuis plusieurs années, la crise économique en cours interdit d'accepter vos hypothèses pour 2009, a fortiori pour les années suivantes.

L'amendement n°95 n'est pas adopté.

L'amendement n°492 est adopté et devient l'annexe B.

L'article 9 est adopté.

Article 10

I. - L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° A l'article 2, les références : « II et II bis » sont remplacées par les références : « II, II bis et II ter » ;

2° Après le II bis de l'article 4, il est inséré un II ter ainsi rédigé :

« II ter. - La couverture des déficits cumulés au 31 décembre 2008 des branches mentionnées aux 1° et 3° de l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l'article L. 135-1 du même code est assurée par des transferts de la Caisse d'amortissement de la dette sociale à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale effectués au cours de l'année 2009, dans la limite de 27 milliards d'euros. Ces déficits cumulés sont établis compte tenu des reprises de dette mentionnées aux I, II et II bis du présent article ainsi que des transferts résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 du code de la sécurité sociale.

« Dans le cas où le montant total des déficits cumulés mentionnés à l'alinéa précédent excède 27 milliards d'euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture des déficits les plus anciens, et, pour le dernier exercice, dans l'ordre des branches et organismes fixé à l'alinéa précédent.

« Les montants et les dates des versements correspondants ainsi que, le cas échéant, de la régularisation au vu des montants définitifs des déficits de l'exercice 2008, sont fixés par décret.

« Sont considérées comme définitives les opérations de produits et de charges enregistrées de manière réciproque entre les branches du régime général et entre ces mêmes branches et le Fonds de solidarité vieillesse au titre de l'exercice 2008 et des exercices précédents, sauf si une disposition législative dispose qu'il s'agit d'acomptes. » ;

3° L'article 6 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Est également affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale une fraction du produit des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-1, L. 136-6, L. 136-7 et L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. Cette fraction est fixée au IV de l'article L. 136-8 du même code. »

II. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au 2° du IV de l'article L. 136-8, le taux : « 1,05 % » est remplacé par le taux : « 0,85 % » et le taux : « 1,03 % » est remplacé par le taux : « 0,83 % » ;

2° Après le 4° du IV du même article, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° A la Caisse d'amortissement de la dette sociale instituée par l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, pour la part correspondant au taux de 0,2 %. » ;

3° Au 1° de l'article L. 135-3, les mots : « d'un taux de 1,05 % à l'assiette » sont remplacés par les mots : « des taux fixés au 2° du IV de l'article L. 136-8 aux assiettes ».

Mme la présidente.  - Amendement n°96, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet article qui transfère à la Cades le déficit cumulé du FSV transfère en réalité aux générations futures le coût de vos politiques inconséquentes et votre refus de trouver de nouvelles ressources pérennes. Les cadeaux pharamineux accordés aux employeurs et à quelques privilégiés représentent, au titre des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises en contrepartie d'emplois précaires, 42 milliards, soit 10 de plus que l'année précédente.

Sur le fond, cet article 10 ne change rien : restant déficitaire, le FSV ne pourra pas accomplir ses missions de solidarité envers les retraités. Un effet d'optique vous permet simplement de prétendre que vous ne creusez pas son déficit.

Le problème du financement des retraites et de la protection sociale demeure et l'article 10 ajoute de la complexité à la complexité.

Initialement, la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) devait amortir la dette accumulée pendant les années précédentes. Il faut se souvenir que lorsque la gauche était aux responsabilités...

M. Alain Gournac.  - On s'en souvient, hélas !

Mme Isabelle Pasquet.  - ...le chômage était considérablement réduit et les comptes sociaux équilibrés. La CRDS était donc affectée à la dette passée, la CSG devant financer la protection sociale.

Vous prélevez une fraction de la CSG pour financer la dette. Est-ce à dire que le fardeau légué par le passé est plus important que vous ne le prétendez ? Cela n'aurait rien de surprenant puisque la Cour des comptes a refusé pour cette raison de valider les comptes de l'Acoss... A moins que, mesurant les conséquences de votre politique pour l'avenir, vous n'estimiez déjà nécessaire de vous préparer à un accroissement de la dette.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°254, présenté par M. Cazeau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. Bernard Cazeau.  - Certes, il faut trouver une solution à la dette croissante accumulée par le FSV, mais les générations futures ne nous serons pas reconnaissantes.

La véritable question est la suivante : pourquoi ne pas agir clairement ? Vous mettez en oeuvre une tuyauterie digne du Forec, que M. Vasselle a largement critiquée en son temps, au lieu d'utiliser la formule claire et bien connue de la CRDS. M. Woerth ne voulant pas donner l'impression d'accroître les prélèvements obligatoires, vous ôtez au FSV deux dixièmes de point de CSG, dont il a pourtant besoin.

Cette tuyauterie n'est guère orthodoxe.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux et l'assurance maladie.  - Nos collègues n'ont pas totalement raison, mais pas totalement tort non plus.

Nous avons abordé le sujet lors de l'audition des ministres. La loi organique que nous avons votée impose que, lorsque la Cades prend en charge une nouvelle dette sociale, elle perçoive une nouvelle recette à due concurrence afin de ne pas prolonger l'existence de cette structure après 2021. Initialement, la limite avait été fixée à 2014. Elle a été prolongée, mais la loi organique empêche désormais de persévérer en ce sens.

L'article 10, qui n'est pas le meilleur du projet de loi, fragilisera encore plus le FSV, ce qui nous imposera ultérieurement un nouveau transfert de déficit vers la Cades.

Mais M. Cazeau a raison de dire qu'on ne peut laisser les déficits accumulés, la Caisse des dépôts et consignations ne pouvant plus assurer la trésorerie de l'Acoss. Le Gouvernement est donc au pied du mur. Nous ne contestons pas sa décision, bien que nous regrettions l'appel à la CSG actuellement perçue par le FSV. M. Cazeau n'a pas tort de mentionner la tuyauterie que j'avais dénoncée lorsque le Forec avait été créé.

Je regrette que l'on recrée une tuyauterie pour mettre à la charge de la branche famille les majorations de pensions pour enfants. C'est pourquoi je défendrai tout à l'heure un amendement tendant à établir un lien direct entre l'assurance vieillesse et les allocations familiales.

La commission est défavorable aux amendements, bien qu'elle partage une partie des préoccupations de leurs auteurs.

M. Guy Fischer.  - Le rapporteur est honnête.

M. Nicolas About, président de la commission.  - La commission des affaires sociales l'est toujours.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Mon approche est à la fois plus financière et plus politique.

Président du comité de surveillance de la Cades, j'avais considéré avec d'autres collègues que, pour faire face aux 27 milliards de dette accumulés, il fallait porter la CRDS à 0,7 %.

Cela précisé, je supporte mal d'entendre parler comme on le fait du trou de la sécurité sociale, d'entendre tenir les mêmes propos qu'on soit dans la majorité ou dans l'opposition. Moi, je suis centriste...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Personne n'est parfait ! (Sourires)

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - Le déficit de la sécurité sociale n'est ni de droite, ni de gauche ! (On estime, à gauche, qu'il est plutôt de droite) Si les comptes étaient en équilibre, en 2001, sous le gouvernement Jospin, c'est que la croissance avait créé un million d'emplois...

Tout cela pour dire que, quand on refuse de dire la vérité aux Français sur la dette, on s'expose à toutes sortes de contorsions. Il faut leur dire comment on financera le surcroît de dettes.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Comment, en effet ?

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - J'ajoute que la tuyauterie qu'on met en place va fragiliser le FSV, alors qu'il sera davantage sollicité du fait de la conjoncture. En 2012, nous aurons de nouveau 27 milliards de dettes, auxquels s'ajouteront les 2,8 milliards du FSV. Ce qui fera presque 30 milliards à rembourser. Allons-nous longtemps continuer à nous contenter d'expédients ? Notre génération ne doit pas être fière de la situation qu'elle laissera aux générations qui viennent ; savez-vous que nous remboursons aujourd'hui des feuilles de maladie émises en 1994 ? Ce système n'est pas viable. Et si un jour vous revenez au pouvoir, mes chers collègues, vous ne ferez pas mieux !

M. François Autain.  - Qu'en savez-vous ?

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - On a déjà eu beaucoup de mal à redresser le FSV, on va le faire replonger de 800 millions en 2009 ! Il faut dire la vérité aux Français ; cela nous permettrait d'éviter de mettre en place des dispositifs qui s'apparentent à un jeu de bonneteau. Pour combler la dette, il fallait passer par la CRDS.

Voilà ce que je voulais dire -tout en m'opposant aux amendements de suppression.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Avis défavorable aux amendements. Je ne peux laisser dire que la reprise du déficit par la Cades est une dissimulation, c'est même tout le contraire : le Gouvernement a pris acte de la situation du régime général et propose en toute transparence la seule mesure possible. On ne peut en même temps refuser la reprise de la dette sociale par la Cades et souhaiter qu'elle soit financée par des recettes de trésorerie non permanentes -ce que fait l'amendement du groupe CRC à l'article 30.

Quant au FSV, il faut remettre les choses dans leur contexte. Son déficit cumulé au 31 décembre 2008 atteindra 3,8 milliards ; la Cades reprenant l'intégralité de sa dette, ce déficit ne sera plus que d'un milliard au 31 décembre 2009.

M. François Autain.  - Autant dire rien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La situation devrait être proche de l'équilibre fin 2012.

M. François Autain.  - M. Jégou ne supporte pas qu'on latéralise le trou de la sécurité sociale. Mais les solutions pour le combler sont bien, elles, de droite ou de gauche ! Vous le verrez lorsque nous reviendrons au pouvoir...

M. Alain Gournac.  - On a vu !

M. François Autain.  - ...ce qui ne saurait tarder si vous continuez comme ça ! En tout cas, l'absence de solution est toujours de droite !

M. Jégou a cité des chiffres ; mais il n'a pas pris en compte les déficits 2008 et 2009.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis.  - 2008, si !

M. François Autain.  - Mais pas 2009. Et il est bien en peine de dire comment ils seront comblés. La dette ne doit pas être financée par de la trésorerie, mais par l'emprunt.

Les amendements identiques n°s96 et 254 ne sont pas adoptés.

L'article 10 est adopté.

La séance est suspendue à 19 h 25.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.