Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Seconde partie (Suite)

OUTRE-MER

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission Outre-mer - 2,49 milliards en autorisation d'engagement et 2,57 milliards en crédits de paiement - correspondent à la diversité des 11 territoires auxquels ils sont destinés et présentent une diversité d'objectifs.

Satisfaire une telle diversité d'attentes dans un budget ne va pas de soi.

La stabilité budgétaire se confirme, malgré la forte hausse des crédits de 20,5 % en crédits de paiement et 22,5 % en autorisations d'engagement. Cette hausse correspond en fait à trois mesures de périmètre : la suppression de la TVA non perçue récupérable (TVA NPR), la réforme de l'impôt sur le revenu et l'exonération de charges spécifiques à l'outre-mer, en même temps que la réforme du CICE.

En l'absence de ces mesures de périmètre, les crédits sont quasiment stables.

Les crédits de la mission ne représentent que 15 % des crédits transversaux, répartis dans 31 missions en 88 actions, pour 18,7 milliards d'euros. Il faut ajouter les dépenses fiscales pour un total d'intervention de l'État de 23 milliards d'euros en augmentation de 4 % par rapport à 2018.

Des motifs d'inquiétude subsistent. La principale mesure de périmètre a pour objectif de stimuler la dynamique du territoire et renforcer le fonds d'investissement. Il est urgent d'initier des projets essentiels de transformation. Une évaluation objective des dépenses budgétaires est toujours nécessaire compte tenu de l'impact qu'elles auront sur le chômage.

Les financements au titre de la politique contractuelle de l'État représentent 23 millions d'euros en autorisations d'engagement et 15 millions en crédits de paiement. Ils devront impérativement monter en charge. Il conviendra d'être particulièrement vigilant sur le respect des engagements de l'État, car dans le passé on a constaté l'insuffisance des crédits inscrits.

On peut noter un maintien des moyens budgétaires en matière de formation.

On peut se satisfaire des crédits de la mission représentant 0,54 % du budget de l'État en 2019 contre 0,48 % en 2018.

Certaines collectivités connaissent des taux de chômage entre 25 et 30 % avec une part de la population éligible au logement social atteignant 60 %.

Avec ce budget, les crédits résultant de la mise en oeuvre de la loi sur l'égalité réelle commenceront à être mis en oeuvre.

Malgré les efforts qui restent à fournir pour que les outre-mer rattrapent leur retard sur la métropole, je vous propose de voter les crédits de la mission. (Applaudissements)

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Hors mesure de périmètre, les crédits de la mission stagnent à 0 % en autorisations d'engagement et 0,1 % en crédits de paiement. L'effort total à destination des outre-mer représente 23 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 22 milliards en crédits de paiement. La mission Outre-mer semble à première vue respecter la programmation pluriannuelle. Le maintien de cette trajectoire est regrettable car contradictoire avec les besoins de redressement des outre-mer.

Les mesures de périmètre, très décriées, obligent à la prudence. La suppression de la TVA NPR et l'abaissement de l'impôt sur le revenu n'offrent aucune garantie quant à leur réaffectation, ni à leur pérennité. Je souhaite qu'on développe le contrôle budgétaire à cet égard.

L'exonération des charges sociales outre-mer a des effets contrastés selon les territoires. Le projet initial du Gouvernement a été corrigé pour éviter que le dispositif ne devienne une trappe à bas salaires. La Guyane en sort lésée, alors que le PIB par habitant est de moitié de celui de la métropole. Les espoirs des entreprises guyanaises se portent sur la promesse ministérielle d'un examen au cas par cas.

Comment sera ventilé le 1,7 milliard d'euros ne figurant pas dans les documents transversaux ? Quid des contrats de convergence ? Il faut faire vite, sachant que les territoires - on l'a vu en Guyane, à Mayotte, à La Réunion - sont en ébullition « tournante ».

Je voterai les crédits de la mission. Une extrême vigilance s'imposera.

M. Michel Magras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - Ce budget reconduit l'enveloppe de deux milliards d'euros qui se maintient à ce niveau depuis 2011, avec une difficulté récurrente d'activation de ces crédits. La situation est particulièrement alarmante en matière de logement : au fil des ans, les crédits sont stables ou affichés en hausse mais la construction ralentit, pour un certain nombre de raisons au rang desquels la complexité du parcours administratif figure en bonne place. Notre premier message est de fluidifier les procédures pour favoriser le climat de confiance avec les opérateurs et leur permettre de consacrer plus de temps à leur coeur de métier.

Le Gouvernement propose, pour 2019, de greffer sur cette reconduction, deux recyclages qui ont suscité beaucoup de réactions

Au sortir des « Assises des outre-mer », et après la publication du Livre bleu, l'État nous propose une démarche budgétaire de recentralisation consistant à prélever 170 millions d'euros de fonds immédiatement disponibles entre les mains des ménages et des entreprises puis à les redistribuer sous forme de subventions accessibles aux ultramarins après instruction par l'administration d'un dossier de demande.

Comptablement les chiffres sont à peu près équivalents, mais économiquement, les subventions sont lentes à se mettre en place et les crédits sont volatiles d'année en année tandis que les suppressions de compensations fiscales sont beaucoup plus pérennes.

Le Gouvernement doit nous donner des garanties : l'activation rapide de ces crédits et la continuité de l'effort budgétaire pour les prochaines années.

L'autre recyclage est celui du CICE en exonérations de charges, avec des problèmes d'évaluation et d'impact. D'une part, on se demande s'il ne manque pas 180 millions d'euros, peut-être parce que les calculs du Gouvernement se sont basés non pas sur le « CICE exigible » mais sur le « CICE constaté », ce qui revient à pénaliser le fait que certaines entreprises ultramarines n'ont pas exercé leur droit au crédit d'impôt.

D'autre part, la concentration au voisinage du SMIC va certainement booster l'embauche dans un premier temps. Mais pour l'avenir, on risque d'enfermer nos outre-mer dans la « smicardisation » et les productions de moyenne gamme alors qu'il faut aussi aider les entreprises à retenir les talents ultramarins pour mener l'offensive sur les activités à haute valeur ajoutée.

Le Sénat a cependant adopté des mesures de rééquilibrage en matière de réduction du coût du travail et des réaménagements fiscaux.

Sous réserve de leur prise en compte, ne nous opposons pas à l'adoption des crédits de la mission Outre-mer pour 2019.

Mme Jocelyne Guidez, en remplacement de Mme Nassimah Dindar, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - La plupart des outre-mer constituent de véritables poudrières. La Réunion s'est embrasée contre la cherté de la vie, après la Guyane et Mayotte. Comment pouvait-il en être autrement quand les logements sont insalubres et la mortalité infantile si élevée ? Il ne suffit pas de se déplacer sur le terrain, mais de prendre des mesures concrètes, madame la ministre.

Que penser du renvoi des mesures annoncées sur le logement, alors qu'elles figuraient dans le Livre bleu ?

La commission alerte sur les trappes à bas salaire. Elle n'est pas opposée aux mesures de périmètre, à condition qu'elles fassent l'objet d'une évaluation préalable.

Notre rapporteure s'est opposée à la mesure sur l'impôt sur le revenu. Mal évaluée, elle ne fera qu'accentuer la cherté de la vie.

Nous voterons les crédits de la mission sans enthousiasme et en attendant un sursaut.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - La hausse de 20 % des crédits de la mission est due à des mesures de périmètre : à périmètre constant, les crédits de la mission sont stables. La baisse du plafond de l'abattement fiscal a posé problème. Il n'y a rien de choquant à ce que les 4 % des foyers fiscaux les plus riches voient leur abattement fiscal reculer au profit des plus pauvres.

La commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits tout en marquant sa vigilance.

J'ai souhaité aborder au cours de mon avis la situation des établissements pénitentiaires dans les outre-mer.

En dépit d'améliorations récentes et en cours, cette situation reste déplorable et présente des spécificités qui sont insuffisamment prises en compte. Plusieurs thèmes se dégagent : la suroccupation des établissements, l'absence d'activités proposées, l'isolement des détenus, et le difficile accès aux soins. Cela a pour conséquence une grande violence, tant entre détenus qu'à l'égard des personnels pénitentiaires.

Au vu de ces difficultés, il me semble indispensable de mettre en oeuvre une politique ambitieuse, avec trois objectifs principaux.

Le premier est de mieux prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins, en transformant la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer en direction interrégionale, à l'instar des services en charge du territoire métropolitain, avec des moyens humains et financiers renforcés.

Le deuxième objectif est de réduire la surpopulation carcérale, en prévoyant la construction de nouvelles places de prison, le renforcement des alternatives à l'incarcération et le développement des conventions internationales bilatérales.

Le troisième objectif est de favoriser la réinsertion des détenus, ce qui implique un renforcement des moyens des services pénitentiaires d'insertion et de probation dans les territoires ultramarins.

Enfin, il faut nouer un dialogue avec nos compatriotes des territoires ultramarins et faire oeuvre de pédagogie pour favoriser une meilleure acceptation de la prison et lutter contre la fameuse loi d'airain dénoncée par notre ancien collègue Robert Badinter : en raison de leurs conditions de vie souvent difficiles, nombre d'entre eux éprouvent le sentiment délétère, exacerbé lorsque la population carcérale comprend un grand nombre d'étrangers, selon lequel les personnes détenues auraient un sort plus enviable que le leur. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

M. Jean-Louis Lagourgue .  - Le contexte économique et social des territoires ultramarins est très dégradé et nous devons entendre la colère des outre-mer face à l'incertitude de l'avenir et aux réactions de l'État qui ne fait que transférer les obligations vers les territoires ultramarins.

Ces territoires souffrent d'un chômage chronique. À La Réunion, madame la ministre, vous avez constaté les difficultés.

Je vous félicite pour votre courage et votre écoute, mais il faut à présent aller plus vite et plus loin.

Nos territoires d'outre-mer vivent dans la plus grande inquiétude et nos collectivités territoriales ne peuvent plus agir face à la contraction de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et à la suppression des contrats aidés.

Le programme 138 est crucial. Il prend en charge les exonérations de cotisations sociales et sera fortement impacté par le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2019 qui prévoit la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) outre-mer sauf pour Mayotte.

Pourquoi remplacer un dispositif qui fonctionne comme la TVA NPR ? Je m'interroge sur la pérennisation de la multitude de petits dispositifs, de l'émiettement des aides qui le remplace.

A-t-on mesuré l'impact sur la classe moyenne ? Ralentir leur consommation mènera à de nouvelles crises. L'État doit s'impliquer pour réduire l'écart avec la Métropole.

Nos outre-mer doivent surmonter l'éloignement géographique, l'insularité et les défis naturels.

Il n'y a aucunement lieu de remettre en cause la solidarité. Le budget n'est pas à la hauteur. Le groupe Les Indépendants s'abstiendra. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

Mme Esther Benbassa .  - Pauvreté et précarité record, criminalité en hausse, manque d'infrastructures scolaires et hospitalières. S'agit-il des banlieues ? Non, mais d'autres territoires oubliés de la République, les outre-mer, énième espace abandonné. Un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur l'effectivité des droits de l'homme dans les outre-mer fait état de l'extrême pauvreté à laquelle doit faire face un pourcentage élevé des populations ultramarines et d'un système éducatif limité dont les répercussions négatives portent sur les interactions socioprofessionnelles et le développement de ces territoires. Les infrastructures scolaires délabrées et mal réparties empêchent de fournir une éducation de qualité.

Quant au volet sanitaire, il se caractérise par le fait que le taux de mortalité maternel et infantile est largement supérieur à celui de la Métropole, alors qu'il pourrait être réduit par plus de moyens dans les établissements hospitaliers et davantage de mesures thérapeutiques.

À Mayotte et en Guyane, les spécificités climatologiques font prévaloir les maladies infectieuses et parasitaires, couplées à un déficit d'accès à l'eau potable.

L'outre-mer a trop longtemps souffert du désinvestissement de l'État.

Nous notons les hausses d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement. Mais nous vous enjoignons à examiner ce budget de plus près.

La ministre fait ce choix de doter massivement les entreprises au détriment des services publics et des collectivités territoriales.

Vous appliquez votre doxa selon laquelle la bonne santé économique passe par les entreprises et non les services publics.

Vous promettez plus d'un milliard d'euros pour la redynamisation des outre-mer mais n'accordez que 15 millions à un fonds vert.

Nous avions pourtant les moyens de devenir les champions des énergies propres.

Le 4 novembre, en Nouvelle-Calédonie, des ultramarins ont rappelé leur attachement à la France. Ne les considérons pas comme des citoyens de seconde zone.

Le groupe CRCE votera contre le budget de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Victoire Jasmin et M. Victorin Lurel applaudissent également.)

Mme Catherine Conconne .  - Madame la ministre, sentez-vous exonérée de mon plaidoyer. Je sais que vous avez été au front avec détermination et que vous avez fait tout votre possible pour obtenir le meilleur.

L'an dernier, j'avais qualifié votre budget de doliprane.

Le Livre bleu est de la même couleur que la pilule qui redonne de la motivation. (Rires) Mais le couple s'installe dans la routine...

Dans des territoires où le revenu est inférieur de 10 000 euros à celui de la métropole, où il manque des infrastructures de base élémentaire, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où l'industrie touristique est en berne et peine à faire face à la concurrence mondiale, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où plus de la moitié de la jeunesse est durablement installée dans le chômage, où en Guadeloupe et en Martinique, entre 3 000 et 5 000 jeunes quittent chaque année le pays pour ne plus y revenir, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où la confiance durable est érodée, 10 000 euros par-ci par-là ne suffisent pas et il faut sortir de la routine !

Dans des territoires où les classes moyennes ont déjà dépensé leur reste à vivre, on tente encore de le leur supprimer, dans des territoires où le logement insalubre fait florès et où la mortalité infantile est trois fois supérieure à la métropole, il faut sortir de la routine !

J'aurai fait le job sans espoir, car j'entends déjà un énième « nous gardons le cap », cette formule qui traîne des milliers de Français dans la rue.

Dans nos territoires habitués à la résignation, la saine résignation, dans nos pays habitués à la résilience, la saine résilience, nous savons résister à la fatalité de la misère, celle qui nous attache les mains avec des bouts de ficelles, des copeaux de bois, les morceaux les plus bas, comme écrivait le poète. Nos pays ont besoin d'un big bang !

Le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission.

On nous promet des hausses de budget, mais ce sont les budgets de la défense, de l'administration territoriale qui augmentent. What else ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. Guillaume Arnell .  - De prime abord, le budget apparaît en légère hausse avec +20 ,5 % en crédits de paiement et +22,5 % en autorisations d'engagement. Mais lorsqu'on retire les mesures de périmètre, on s'aperçoit que le budget est stable.

Une augmentation des crédits aurait montré que le Gouvernement avait pris la mesure des besoins. Nous devons nous battre avec acharnement pour simplement conserver l'existant.

Le Gouvernement s'attache à des mesures injustes sans études d'impact. C'est le cas contre le rhum. Il y a empressement à taxer d'un côté mais l'on tarde à mettre en place des mesures nécessaires de l'autre.

Madame la ministre, entendez mon message : donnez les moyens à Saint-Martin de se relever et aux territoires d'outre-mer de faire face aux défis.

Notre objectif est de défendre nos territoires, à vos côtés et non contre vous.

Les outre-mer ne doivent plus être considérés comme une charge mais comme une chance. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE, SOCR et RDSE)

M. Gérard Poadja .  - Je salue le travail des rapporteurs, en particulier Mme Dindar et M. Laurey. Il est difficile de se positionner sur une mission aussi vaste. Elle ne représente qu'un dixième des efforts, de 24 milliards d'euros au total dans 88 programmes.

La lisibilité du budget devrait être améliorée. Sur le fond, les défis sont nombreux.

Le taux de pauvreté et de chômage, la cherté de la vie à La Réunion qui ont donné une tournure violente aux manifestations, mettent en lumière les difficultés de l'outre-mer.

À première vue, la mission connaît une hausse exceptionnelle : +20,5 % en crédits de paiement et +22,5 % en autorisations d'engagement. Mais cette hausse n'est qu'apparente.

Il y a eu la transformation du CICE en exonération de charge, la suppression de la TVA NPR et les mesures sur l'impôt sur le revenu.

En réalité, les crédits sont stables et inférieurs aux besoins exprimés.

L'État doit apporter un soutien plus actif aux territoires éloignés, par exemple en matière de logement. Les coûts de construction sont plus élevés que dans l'Hexagone.

Il faudra prendre en compte l'impact de la baisse de l'impôt sur les sociétés en Nouvelle-Calédonie.

Je salue toutefois le volontarisme du budget. Le groupe UC votera ces crédits.

Les Néo-Calédoniens ont choisi souverainement leur destin. Je salue les moyens de l'État qui ont permis un déroulement pacifique. Il faut maintenant construire un avenir commun.

M. Michel Magras .  - La trajectoire de politique économique pour les outre-mer a suscité des inquiétudes d'une rare intensité. Une vision de long terme est nécessaire.

L'allègement des charges patronales ne se comprend pas sur le long terme car il enferme les marchés ultramarins dans la basse et la moyenne gamme.

Je salue l'effort sur la formation, mais il est vain tant que les salaires trop bas poussent les jeunes à quitter les territoires d'outre-mer.

Les outre-mer sont pionniers avec un service militaire adapté qui démontre son efficacité année après année.

Les travaux du Sénat ont permis de relever les seuils d'exonération ; sans répondre pleinement à la demande des socioprofessionnels, c'est une amélioration par rapport au texte initial.

Saint-Barthélemy n'était pas concerné par la transformation du CICE en baisse de charges. Je vous remercie madame la ministre de l'avoir quand même intégré au dispositif.

Nous comprenons, madame la ministre, les contraintes budgétaires qui obligent à des choix douloureux. Cependant, je regrette la hausse de fiscalité qui restreindra le comportement des acteurs économiques. Je regrette que les effets collatéraux des mesures budgétaires ne soient pas pris en compte. Ainsi, les augmentations fiscales, résultat de la réduction de l'abattement sur l'impôt sur le revenu, auront un effet déstabilisateur, tout comme la suppression de la TVA NPR, qui constitue un élément de la trésorerie des entreprises ; une augmentation des prix pour combler le manque à gagner favorisera l'inflation.

À la dépense fiscale faisant appel au libre arbitre des agents économiques, vous préférez la recentralisation des crédits et l'étatisation de la dépense, avec un risque récessif à la clé.

Il nous faudrait des garanties sur la célérité du traitement administratif des demandes de financement. L'annuité budgétaire se traduit trop souvent par des crédits non consommés.

Les outre-mer ont besoin d'un cadre fiscal et économique stable. Chaque Gouvernement se fait fort de présenter sa réforme avant que celle de ses prédécesseurs n'ait porté ses fruits. Ce stop and go conduit les investisseurs à se réfugier dans l'attentisme.

Fiscalement, il n'est pas certain que les réductions de charges ne soient pas atténuées par des augmentations d'impôt.

S'agissant des zones franches d'activité nouvelle génération, il faudra veiller aux effets d'éviction et au risque de trous dans la raquette.

Je ne m'opposerai pas à l'adoption des crédits de cette mission. Cependant, derrière les chiffres, il y a des choix politiques forts de votre Gouvernement, surprenants pour ne pas dire inquiétants.

C'est dans les territoires que se prennent les décisions les plus efficaces. Pourquoi ne pas leur redonner les moyens et la liberté d'agir ?

M. Abdallah Hassani .  - La mission Outre-mer s'inscrit dans un contexte de maîtrise de la dépense publique. Pour autant chaque territoire doit pouvoir être soutenu de manière pragmatique et durable. Le Livre bleu des outre-mer constitue la feuille de route. Après un budget 2018 de transition, ce budget 2019 est de transformation et de responsabilisation. Il s'agit de dépenser mieux pour plus d'efficacité avec des objectifs prioritaires comme le développement des infrastructures, la construction et la rénovation de logements et la formation des jeunes.

La mission ne couvre qu'un dixième de l'effort financier de l'État à destination des outre-mer. Celui-ci s'élève à 23,02 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 22,17 milliards d'euros en crédits de paiement, soit des hausses respectives de 7,6 % et 4,6 %. La mission, de 2,57 milliards d'euros en AE et de 2,49 milliards en CP, représente 0,54 % du budget général de l'État contre 0,48 % en 2018 et 0,40 % en 2017. Les crédits spécifiquement affectés à l'outre-mer sont préservés.

La hausse de 22,5 % des autorisations d'engagement et de 20,5 % des crédits de paiement s'explique par des mesures de transfert et de périmètre, conséquence de la transformation du CICE en exonération de charges, de la suppression de la TVA NPR, de la diminution du plafond de la réduction d'impôt pour les plus hauts revenus dans les DOM.

Ces changements ont donné lieu à d'intenses débats. Certains craignent que des entreprises ne soient perdantes, que des territoires ne perdent en attractivité, que le pouvoir d'achat ne baisse.

Vous promettez un redéploiement. Ce serait un changement de paradigme. Les outre-mer s'autofinanceraient entre eux, les moins faibles aidant les plus pauvres. Pourtant, l'État consacre 17 milliards d'euros de crédits aux outre-mer alors que la fiscalité ultramarine ne rapporte que 4 milliards d'euros. Cet effort est fondé, vu la faiblesse du PIB par habitant de nos territoires.

Nous attendons que la réduction des dépenses fiscales et sociales se traduise bien en dépenses budgétaires.

J'espère que le fonds d'investissement du programme 123 ne perdra pas de sa substance, d'autant qu'il est consacré à la construction d'établissements scolaires en Guyane et à Mayotte.

Le nouveau dispositif des zones franches contribuera à la revitalisation des économies ultramarines.

Madame la ministre, vous avez modifié les paramètres d'exonération de charges pour les entreprises afin d'éviter les trappes à bas salaires et élargi les secteurs éligibles, tenant compte des particularités.

Nos territoires restent fragiles. Un développement endogène est vertueux. Veillons à ce que des outils mal ajustés ou mal compris ne nous entraînent pas vers un mal-développement endogène. La crise de Mayotte, territoire dont le PIB est 3,6 fois plus faible que le PIB national, a montré le manque criant d'infrastructures. Celle de La Réunion a témoigné du mal-être des populations. Madame la ministre, vous avez annoncé la création d'une zone franche globale à 7 % à La Réunion. S'agit-il d'un dispositif particulier ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Abdallah Hassani.  - Les besoins en logement sont considérables. Il faudrait en construire 50 000 en Guadeloupe d'ici 2030, 4 000 par an pendant vingt ans en Guyane. À Mayotte, seuls 570 logements locatifs sociaux ont été financés entre 2015 et 2017. Pourquoi la LBU stagne-t-elle ?

Les déplacements ultramarins du président de la République témoignent de l'intérêt de la Nation pour les outre-mer. Nous en attendons une traduction concrète.

Le groupe LaREM votera les crédits de cette mission. (M. Julien Bargeton applaudit.)

Mme Victoire Jasmin .  - Notre combat jusqu'ici a été de tenter un rattrapage des outre-mer vers la Métropole. Souhait utopique, constatait le député de Guadeloupe Frédéric Jalton en 1990.

Il est crucial que nos collectivités sortent de l'incompréhension qui mène au mal-développement. Après de long mois d'Assises, la déception est grande. Mes collègues ont relevé avec pertinence les aspects purement budgétaires. Je reviendrai pour ma part sur les principes de la politique économique de votre Gouvernement.

L'augmentation des crédits résulte de plusieurs ponctions fiscales. Pour la première fois, les outre-mer financeront les outre-mer. On a le sentiment amer d'un Gouvernement qui reste sourd à la vision des socio-professionnels des territoires ultramarins. Le recentrage sur les bas salaires pénalisera plus encore une jeunesse en mal de débouchés.

Le recyclage relevé par M. Magras, la rebudgétisation dénoncée par M. Lurel, marquent une rupture brutale de la solidarité nationale à l'égard des outre-mer. Faut-il maintenir un ministère spécifique des outre-mer, gage de sanctuarisation budgétaire mais aussi plafond de verre qui nous enferme ? Vous avez justifié vos choix par l'obligation de vous en tenir à l'enveloppe allouée qui stagne à 2,5 milliards d'euros depuis plusieurs années, alors que les besoins s'accroissent.

Je sais votre investissement, madame la ministre, mais ne peux approuver les orientations de ce budget ni écarter d'autres voies institutionnelles.

« La politisation des masses se propose non d'infantiliser les masses mais de les rendre adultes », disait Frantz Fanon. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Stéphane Artano .  - En 2018, j'avais apporté sans réserve mon soutien à votre budget de transition et d'amorçage, en vous donnant rendez-vous pour un budget de transformation en 2019. Sans colonne vertébrale, ce budget devient un sac d'os. La politique demande lucidité et humilité. Vous avez su revisiter les méthodes, engager une réflexion forte sur les aides économiques et arraché un arbitrage à Matignon sur certaines dispositions. Je le mets à votre crédit.

Mais si le bateau gouvernemental ne suit pas la boussole parlementaire, il risque de s'échouer sur les récifs. La lucidité, c'est aussi de s'appuyer sur les parlementaires. Madame la ministre, soyez en rupture avec la méthode du Gouvernement. Sinon, comme lui, vous irez dans le mur, entraînant les outre-mer avec vous !

L'action publique est une oeuvre collective ; à l'Assemblée nationale comme au Sénat, nos délégations souhaitent oeuvrer à vos côtés pour porter la politique des outre-mer de manière participative.

Mais cela suppose la confiance, et des preuves de confiance. Dans mon territoire, le préfet demande à la collectivité de financer un investissement portuaire dans un port d'intérêt national. Dans le document de politique transversale, les crédits baissent de 15 millions d'euros pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Je suis inquiet pour mon territoire. J'espère que vous pourrez nous rassurer et nous éclairer. En attendant vos réponses, nous sommes réservés sur les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer .  - Je reviens tout juste de La Réunion. Je suis allée au contact de la population car l'écoute et le dialogue sont la seule méthode qui a du sens pour moi.

En Guyane, à La Réunion, à Mayotte, mais aussi à Paris, notre modèle du vivre ensemble est mis à mal.

Gouverner ce n'est pas imposer d'en haut des choix déconnectés, mais agir en responsabilité, guidée par l'intérêt général, pour que chaque citoyen trouve sa place dans la société.

L'État a pris des engagements forts. Je rendrai compte de leur mise en oeuvre dans tous les territoires. J'aurais aimé que chacun joue le jeu républicain. Responsabilité et transparence sont à la base de mon action.

Ce projet de budget traduit des convictions et des choix politiques, ceux de la transformation, du refus du conservatisme, de la démocratie participative. Lors des Assises de l'outre-mer, l'expression directe des citoyens nous a dit combien l'État était attendu pour faire mieux et aller plus loin. L'État est le garant des institutions. Il se doit de protéger les plus démunis et de libérer les énergies. Sans travail, sans fierté, un territoire n'est qu'un navire à la dérive, avec un équipage perdu.

Il faut développer le pouvoir d'achat, la qualité de vie, les crèches, le logement, les services publics. Nous devons aller vers une société moins inégalitaire, plus solidaire.

J'ai aussi pris l'engagement d'une transparence totale de l'action des pouvoirs publics. Les élus doivent être exemplaires.

Je ne promets pas une égalité réelle ni une convergence du niveau de vie vers la moyenne nationale. Chaque territoire d'outre-mer doit trouver son propre modèle de développement et l'État ne peut pas tout.

Pour enclencher ce dynamisme, le budget agit sur l'investissement public et l'appui aux entreprises.

Les crédits du fonds d'investissement public sont augmentés avec 500 millions d'euros sur cinq ans, affectés aux infrastructures essentielles. La loi relative à l'égalité réelle outre-mer a prévu la signature de nouveaux contrats qui scelleront les engagements de l'État avec les collectivités jusqu'en 2022. Mon ministère y consacrera 179 millions d'euros en 2019, une hausse de 15 %.

L'investissement public, c'est aussi la construction et la rénovation des logements. La LBU est maintenue à 225 millions d'euros, le produit de cession des parts de l'État au sein des Sidom, 19 millions d'euros, est réservé à mon ministère.

J'ai réaffirmé ces jours derniers nos engagements sur l'aide à l'accession à la propriété et à la rénovation de l'habitat privé. Ce projet de loi de finances comporte plusieurs mesures favorables à la construction : défiscalisation, hausse des quotas de PLS, allongement des délais de location, telles sont certaines des mesures que nous mettons en oeuvre.

Accroître l'investissement public est fondamental pour répondre aux besoins du quotidien.

Mon combat est aussi celui de l'emploi grâce au soutien aux entreprises et à la création de richesse, puis de son partage. Depuis décembre 2017, le Gouvernement a proposé l'évolution des aides pour l'emploi et l'activité économique en outre-mer via une politique de développement économique volontaire, pilotée et cohérente dans le temps long. Certains outils disparaissent car ils ne sont pas assez lisibles ou ne concernent que quelques-uns. Nos concitoyens demandent plus de transparence.

Quant à l'écosystème d'accompagnement des entreprises, nous créons un système pérenne et ciblé, pour faire des outre-mer des territoires de conquête économique.

La transformation du CICE en exonération de charges sociales a entraîné un bouleversement des exonérations spécifiques à l'outre-mer. Nous simplifions les barèmes et parions sur les secteurs d'avenir : économie bleue, tourisme, industrie. Les zones les plus intenses en emploi seront exonérées de charges.

En outre-mer, 53 % des salariés gagnent moins de 1,4 SMIC et 80 % des demandeurs d'emploi sont peu ou pas diplômés. Nous n'avons pas affaire à une trappe à bas salaire mais à une trappe à chômage. Les jeunes sans emploi qui manifestent demandent un avenir meilleur.

Je serai au rendez-vous. Le Gouvernement réalise un effort supplémentaire de 130 milliards d'euros pour baisser le coût du travail outre-mer. Les conséquences budgétaires sont tirées dans les amendements, c'est 65 millions d'euros au total de plus que dans le projet initial de budget. Nous collons ainsi à la réalité des besoins des territoires.

Quelque 300 millions d'euros entrent dans le périmètre, c'est purement technique. Je le dis en toute transparence.

De nouveaux outils nécessaires au démarrage des projets sont proposés dans l'action 4 du programme 138 pour un ensemble cohérent et efficace. Construire des écoles, des crèches, des infrastructures pour l'eau, c'est accroître l'activité et l'emploi sur les territoires. Quant au taux d'impôt sur les sociétés à 6 % dans les zones franches, c'est mieux que l'Irlande ! Nous démontrons que nous sommes capables de relever les défis, ensemble.

Ce projet de budget propose de transformer nos territoires pour les rendre plus attractifs, agréables à vivre et en faire des terres d'excellence et de rayonnement. Être une chance pour la France, cela ne se décrète pas, cela se construit. Ce ne sera possible que si l'ensemble des acteurs coopèrent. L'État ne peut pas tout à lui seul. Il lui faut l'aide de la classe politique des outre-mer et des acteurs de terrain.

Les Ultramarins sont exigeants, à raison. Je le suis moi-même. Soyons à la hauteur de leurs attentes, à la hauteur de la Marseillaise chantée mercredi par 2 000 manifestants à La Réunion. Nous devons être à la hauteur de nos valeurs. Fierté, unité, dignité et fraternité sont l'essence de la France et des outre-mer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

Examen des crédits et de l'article rattaché

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-642, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

65 000 000

65 000 000

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

65 000 000

65 000 000

SOLDE

+ 65 000 000

+ 65 000 000

Mme Annick Girardin, ministre.  - Dans un esprit volontariste, pour gagner la bataille de l'emploi et lutter contre les trappes à inactivité, nous faisons un effort supplémentaire de 100 millions d'euros, dont 35 millions seront financés par des redéploiements. Le travail pour tous, c'est la dignité d'un territoire.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Nous avons eu à examiner cet amendement ce matin en commission des finances avec un montant différent, de 50 millions. Il vient tout juste d'être rectifié à 65 millions d'euros. Preuve que la réforme n'est pas aboutie : il aurait fallu suivre le Sénat, qui demandait un report d'un an !

Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les dernières concertations menées avec les organisations socioprofessionnelles ? Vous avez peu concerté avec les parlementaires.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Je suis rentrée hier soir de La Réunion et n'ai pu rectifier cet amendement que tardivement.

C'est avec les professionnels que j'ai décidé de maintenir cette réforme, car la fin du CICE leur faisait perdre 500 millions d'euros ; nous en excluons les entreprises qui ne bénéficiaient pas du CICE. C'est 24 millions d'euros de plus pour les entreprises de Guadeloupe, autant de plus pour celles de Martinique, 27 millions d'euros de plus pour celles de la Guyane et 41 millions de plus pour celles de La Réunion.

Je me suis battue pour continuer le dialogue jusqu'à la dernière minute. Ma priorité a été de travailler avec les entreprises, qui sont en première ligne pour développer l'emploi.

Si le compte n'y est pas en termes d'emplois, j'opérerai les changements nécessaires.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - La commission des finances émet un avis favorable.

M. Victorin Lurel.  - Nous reconnaissons votre ténacité, madame la ministre. À la suite des travaux du Sénat, vous avez pris l'engagement de revoir votre copie. Le groupe socialiste votera cet amendement qui va dans le bon sens même s'il ne compense pas le caractère récessif du budget. Je le dis sans ambages : c'est le plus mauvais budget des outre-mer depuis une vingtaine d'années. Il n'y a pas un centime d'argent frais. On prend des mesures qui fragilisent la consommation sans penser aux conséquences macro-économiques. Or la consommation est le moteur de l'activité ! Les mesures proposées ne sont pas de nature à relancer l'emploi.

À l'époque, quand j'étais ministre, on m'avait demandé une économie de 130 millions d'euros sur l'outre-mer. J'ai refusé, et procédé à un coup de rabot de 24 millions d'euros sur les hauts salaires, à 4,5 smic. Le plafond est beaucoup plus bas aujourd'hui.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Le groupe LaREM votera cet amendement qui va dans le bon sens et montre la volonté de la ministre de défendre nos territoires jusqu'à la dernière minute. Les difficultés ne datent pas d'aujourd'hui. Pour la première fois, ce budget porte davantage d'attention aux territoires les plus en difficulté - ce n'était pas le cas sous le précédent quinquennat.

Mme Catherine Conconne.  - Cet amendement mérite d'être voté. Il témoigne de la volonté de la ministre de remplir un panier bien vide.

M. Guillaume Arnell.  - La ministre s'était engagée à la concertation, elle a tenu parole. Je redis notre volonté de travailler ensemble, en mettant de côté nos différences.

Vous avez accepté une proposition intermédiaire sur la fin de la Lodeom à Saint-Martin. Le groupe RDSE votera cet amendement, même s'il faut éviter les à-coups et l'absence de vision.

Mme Jocelyne Guidez.  - On ne saurait être contre des financements supplémentaires. Le groupe UC votera cet amendement.

L'amendement n°II-642 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-441, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

50 000 000

50 000 000

Conditions de vie outre-mer

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement d'appel porte sur les plans de convergence. Après une longue concertation, nous avons fait la loi Égalité réelle outre-mer sous François Hollande. Sans forfanterie, je m'en sens un peu le père.

Il y a eu une accélération du mouvement pour Mayotte avec une succession rapide d'ordonnances, n'en déplaise à M. Mohamed-Soilihi. Idem pour la Guyane.

Les collectivités territoriales n'avaient que trois semaines pour préparer les plans de convergence. Cela ne tenait pas la route. Une réflexion plurisectorielle était nécessaire pour préparer la contractualisation. D'où cet amendement qui augmente les crédits de 50 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-439, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

20 000 000

9 000 000

Conditions de vie outre-mer

20 000 000

9 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

9 000 000

9 000 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Depuis deux ans, la politique de l'État outre-mer en matière de logement est durement mise à mal : la LBU aura perdu 9 % en autorisations d'engagement et 4 % en crédits de paiement.

Les crédits liés à l'accession à la propriété sont le plus lourdement touchés avec une baisse pour 2019 de 36 %. Au total, en deux ans, ces crédits auront diminué de près de 78 % ! J'espère que l'amendement porté par Serge Letchimy à l'Assemblée nationale et voté par le Sénat survivra à la deuxième lecture. Il faut faire mieux et augmenter le programme 123 de 20 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-537, présenté par Mme Jasmin.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Conditions de vie outre-mer

1 500 000

1 500 000

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

Mme Victoire Jasmin.  - Nous abondons les actions 2 et 8 du programme 123 afin d'y adjoindre un volet sur la prévention des risques naturels majeurs en outre-mer, à la suite des ouragans Irma et Maria aux Antilles. Ce plan de prévention et d'investissement permettrait des actions de sensibilisation, d'information et de mobilisation à destination des populations, des entreprises, des collectivités locales et des forces de secours ; d'acquérir des moyens de surveillance des phénomènes météorologiques et d'institutionnaliser, dans tous les territoires, une semaine des risques naturels, sur le modèle de Replik ou Sismik.

M. le président.  - Amendement n°II-440, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Conditions de vie outre-mer

1 500 000

1 500 000

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement augmente les crédits de la continuité territoriale, pour compenser un peu les ponctions fiscales sur les ménages. La mobilité est un sujet récurrent.

M. le président.  - Amendement n°II-552, présenté par M. Lurel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

300 000

300 000

Conditions de vie outre-mer

300 000

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement porte sur les Observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). La ministre m'a attaqué, disant que je n'avais rien fait - je l'entends avec détachement. (Sourires) S'il le voulait, le Gouvernement pourrait mettre des moyens pour s'assurer que les marges sont respectées et que les rentes de situation sont contrôlées.

J'en viens à l'objet de l'amendement : les OPMR doivent avoir des moyens. Cet amendement les augmente de 300 000 euros, ce n'est rien, par rapport au budget. Des concepts et des instruments d'une politique de la concurrence existent aujourd'hui, il faut les faire respecter.

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-441, compte tenu de la baisse des crédits de l'action 4, importante pour les collectivités. Avis défavorable à l'amendement n°II-439 pour les mêmes raisons. Avis favorable à l'amendement n°II-537 dont les préconisations tiennent compte des recommandations de la délégation sénatoriale à l'outre-mer sur la prévention des risques majeurs en outre-mer. Avis favorable à l'amendement n°II-440, compte tenu de la baisse significative du nombre de bénéficiaires du dispositif de continuité territoriale et avis défavorable à l'amendement n°II-552.

Mme Annick Girardin, ministre.  - L'amendement n°II-441 était d'appel. On dégage plus de 23 millions d'euros pour les contrats de convergence et de transformation, puisque l'une ne va pas sans l'autre. L'État y mettra 2,4 milliards d'euros sur quatre ans. Oui, il faut prendre le temps. L'État ne peut faire seul. Il se tient aux côtés des collectivités territoriales. Nous connaissons la divergence que nous avons sur l'adjectif « réel » dans une « égalité réelle ». Qu'est-ce à dire au juste, quand, par exemple, le taux de chômage à Saint-Barthélemy n'est que de 3 % ? La convergence signifie-t-elle que les outre-mer doivent se féliciter de se rapprocher des taux de la Métropole quand ceux-ci n'ont fait que baisser ? Je préfère le mot « équité » et j'y veillerai. Avis défavorable.

Le logement est un sujet urgent. Oui, il y a des bidonvilles à Mayotte. Ils existent aussi à La Réunion, en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane. Nous avons préservé la ligne budgétaire unique (LBU), fait en sorte que les 19 millions d'euros attendus soient bien versés au budget de l'outre-mer. Nous sommes au rendez-vous, sans doute pas aussi vite que souhaité, mais à la hauteur de ce que nous pouvons faire dans les territoires, tout simplement parce qu'à un moment donné, on ne peut construire plus vite avec les forces vives qui y sont. Avis défavorable.

Je demande le retrait de l'amendement n°II-537. Le fonds Barnier a été élargi, entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Un délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer sera nommé pour animer et coordonner toutes les politiques publiques dans ce domaine. Je veille à ce que les propositions des délégations parlementaires soient suivies. Le fonds vert est au rendez-vous et je le ferai évoluer par rapport aux demandes qui remontent du terrain.

Quant à l'amendement n°II-440, il concerne la mobilité territoriale. Il faut effectivement la prendre mieux en compte et nous nous y sommes engagés. Retrait ou avis défavorable.

Enfin, sagesse à l'amendement n°II-552. Nous disposons d'un arsenal législatif sur le prix. Qu'en a-t-on fait ? Nous nous donnerons les moyens. Les observatoires doivent être renforcés par les citoyens qui veulent de la transparence. Ainsi 50 citoyens y participeront à La Réunion. J'y ai moi-même siégé en tant que fonctionnaire puis députée et je sais que nous ne sommes pas à la hauteur. C'est pourquoi j'ai annoncé un doublement des crédits.

M. Thani Mohamed Soilihi - L'amendement n°II-537 ne fait que traduire une préconisation de la délégation sénatoriale aux outre-mer. Il n'est pas budgétivore et en cas de catastrophe naturelle les populations ont besoin d'être rassurées. Cet amendement répond à un besoin essentiel. J'exhorte ses auteurs à le maintenir.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Monsieur le sénateur, je suis d'accord avec vous. Les outre-mer sont les premières victimes du réchauffement climatique. Mais pourquoi cela concernerait-il uniquement le budget outre-mer ? C'est un problème que nous devons porter tous ensemble. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement

Mme Victoire Jasmin.  - Je souhaiterais maintenir mon amendement, car il s'agit de prendre des décisions pertinentes et cohérentes de façon urgente. Les recommandations du rapporteur de la délégation sénatoriale à l'outre-mer sont essentielles. Vos services ont dit les difficultés qu'ils avaient à mettre en oeuvre des mesures de prévention.

À voir les dysfonctionnements qui opèrent, dont nous avons eu connaissance lors de nos auditions, il est urgent d'agir. Oui, il faut faire vite pour que le personnel de la sécurité civile ait sur place les moyens de fonctionner, pour faire évacuer au plus vite les populations présentes dans les zones à risque (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Michel Magras, rapporteur pour avis.  - C'est l'essence même du travail de la délégation sénatoriale aux outre-mer, où tous les groupes sont représentés que de faire ce type de recommandation, afin qu'elles soient votées dans l'hémicycle. Nous avons peut-être perdu l'habitude d'attendre en outre-mer. Votons cet amendement quitte à abonder ce budget plus tard dans d'autres textes si le Gouvernement le souhaite.

M. Stéphane Artano.  - Je soutiendrai cet amendement, ainsi que celui de M. Lurel, n°II-552, sur l'observatoire des prix, à une précision près : les plans de convergence, prévisionnels, sont bien de convergence et non pas de transformation, terme auquel tient particulièrement le président Macron pour se démarquer de son prédécesseur. Mais à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivité relevant de l'article 74 de la Constitution, qui compte 6 300 habitants, il ne serait pas très efficace de signer un tel type de plan. Mieux vaudrait un contrat unique, intégrant les dispositions en question. Voilà une mesure technocratique qui n'a pas de sens.

M. Victorin Lurel.  - Madame la ministre, vous étiez déjà ministre avec moi, lorsque nous avons inventé le concept d'« égalité réelle ». Il s'agit d'un concept statistique, fonctionnant sur un intervalle de confiance. Ne le remettez pas en cause.

Les 16 millions en crédits de paiement et 23 millions en autorisations d'engagement que le Gouvernement dégage ne sont pas plus qu'un dispositif d'annonce.

La Société nationale immobilière (SNI) a acheté les Sem immobilières d'outre-mer (Sidom). Vous aviez déclaré que le fléchage des bénéfices figurerait dans la loi de finances. Il n'y figure pas. La LBU diminue à 225 millions d'euros. C'est organisé une déflation dans les outre-mer. Enfin, concernant la collectivité de Saint-Martin, avec la CDC et la SNI, on impose un chantage à une directrice qui a fait des efforts pour diminuer son salaire. J'espère que vous vous y opposerez.

M. Antoine Karam.  - Madame la ministre, nous avons tous salué votre courage. La Guyane avait anticipé la colère qui s'exprime en France. Je voterai l'amendement n°II-537, fruit d'un travail collégial mené dans le cadre de la délégation. Nous avons trop longtemps été des cautions exotiques de la République. Cela devient de plus en plus insupportable d'attendre. Il faut agir vite. Ce qui se passe dans l'Hexagone résulte aussi de cette culture du « on va faire ».

Mme Viviane Malet.  - Je soutiendrai aussi l'amendement n°II-537, fruit des travaux de la délégation sénatoriale.

Mme Catherine Conconne.  - Je soutiendrai tous ces amendements de bon sens. Le ministère est dans son rôle quand il défend son budget. Il a su être à l'écoute du Sénat sur les exonérations. Cependant, un tien vaut mieux que deux tu l'auras. Les risques majeurs nous menacent tous les jours. Un grand plan promis par le Gouvernement, c'est bien beau. Mais que ferons-nous quand un autre aléa nous tombera sur la tête dans les mois qui viennent ? Les élus que nous sommes ont su faire preuve de bon sens. En proposant des amendements à périmètre constant, faisant pencher la balance vers les priorités. Suivez-nous !

Mme Esther Benbassa.  - Nous voterons l'amendement n°II-537 ainsi que les autres en discussion commune.

M. Guillaume Arnell.  - Le groupe RDSE remercie Mme Jasmin d'avoir porté cet amendement. Si on acte cette mesure maintenant, vous pourrez toujours la traduire dans d'autres lois ultérieurement.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Monsieur Artano, vous avez raison. Que signifierait la convergence pour Saint-Pierre-et-Miquelon ? L'essentiel reste que chaque territoire trouve sa place dans son bassin maritime. Il ne s'agit pas de supprimer 15 millions d'euros mais d'en ajouter 2 millions pour Saint-Pierre-et-Miquelon.

Quant au dérèglement climatique - et vous savez combien je me suis engagée dans la COP21, chacun s'accorde sur le fait que le milieu insulaire en est la première victime. Avec l'amendement n°II-537, vous ouvrez une porte en laissant entendre que les territoires d'outre-mer prendront en charge eux-mêmes les effets du dérèglement climatique. Faites attention !

L'amendement n°II-441 est adopté.

L'amendement n°II-439 n'a plus d'objet.

L'amendement n°II-537 est adopté.

L'amendement n°II-440 est adopté.

L'amendement n°II-552 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-536, présenté par Mme Jasmin.

I - Créer un programme :

Fonds pour l'accès à l'eau

II - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

20 000 000

20 000 000

Fonds pour l'accès à l'eau

20 000 000

20 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Victoire Jasmin.  - Le manque d'eau, au quotidien, fait partie de la vie ordinaire de nombreux ultramarins qui sont obligés de rechercher en permanence des solutions palliatives.

Cette situation indigne pour une Nation comme la nôtre, requiert de la part de la solidarité nationale un engagement massif et urgent pour doter l'ensemble des territoires, d'infrastructures adaptées en matière d'assainissement et de distribution d'eau potable.

Pour faire face à l'urgence, le Gouvernement a décidé de relancer le plan « Eau-DOM », de 2016 qui vise, en partenariat avec les ministères en charge de l'environnement, des outre-mer et de la santé, de l'Agence française pour le développement (AFD), de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et avec l'Agence française pour la biodiversité (AFB), à accompagner par contractualisation, sur une durée de cinq ans, les collectivités locales compétentes dans l'amélioration du service rendu à leurs usagers en matière d'eau potable et d'assainissement.

Cet amendement permettrait de mobiliser des crédits pour permettre l'égal accès à l'eau.

M. le président.  - Amendement n°II-509, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

10 000 000

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement crée un fonds d'urgence de 10 millions d'euros supplémentaires, venant renforcer l'action 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse ».

Les outre-mer souffrent d'un sous-investissement et le décalage avec l'Hexagone se creuse.

Ce fonds serait créé par un redéploiement de crédits initialement accordés à « l'appui à l'accès aux financements bancaires » (action 09), qui ne servent qu'à payer des intérêts bancaires.

Le chômage est élevé et l'emploi, précaire dans ces territoires. Il faut contrebalancer un budget tourné vers l'investissement. Le problème de la pauvreté ne peut pas se résoudre uniquement en donnant une activité professionnelle à tous. D'autres paramètres existent. Un soutien à l'action n°04 serait salutaire. Nulle part sur le territoire, la République ne devrait abandonner ses administrés, victimes des inégalités sociales. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°II-437, présenté par Mme Conconne et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Créer un nouveau programme :

Fonds pour la mobilité retour

II.  - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

10 000 000

10 000 000

Fonds pour la mobilité retour

10 000 000

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

Mme Catherine Conconne.  - Je ne crois pas à la tutelle bienfaitrice de l'État mais à une main qui se tend et n'écrase pas et au cheminement pacifique entre les populations pour que chacun se prenne en charge.

« Gardez-vous de vous tenir les bras croisés en l'attitude terrible du spectateur » disait le poète.

La Martinique a perdu 30 000 habitants en une dizaine d'années, soit entre 3 000 et 5 000 personnes, en moins dans nos rangs chaque année, surtout des jeunes ; or ce sont eux qui assurent le repeuplement par leur fertilité. On ferme des écoles à tour de bras, puisque la démographie scolaire suit l'évolution générale. Pas moins de 14 ont fermé leurs portes à Fort-de-France, ville que je connais le mieux.

Madame la ministre, les populations partent, aidées par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (ADOM), mais ne reviennent pas. Il faut une aide de 10 millions d'euros.

Avec un groupe de jeunes Martiniquais qui sont partis, mais qui sont aussi revenus au pays, nous avons mis en place un mouvement que nous avons appelé Alé, Viré, locution créole qui veut dire « partir mais revenir ». Il va proposer prochainement ses travaux que nous avons financés par nos propres moyens, dont une étude portant sur 8 000 ressortissants de l'outre-mer qui vivent aujourd'hui en France et ailleurs dans le monde entier.

Nous avons besoin de vous, madame la ministre, le travail a été fait en amont. Nous vous demandons, symboliquement, de flécher 10 millions d'euros pour amorcer la pompe et pouvoir mettre en oeuvre nos propositions.

M. le président.  - Amendement n°II-510, présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lalande, Duran et Todeschini, Mmes Conway-Mouret et Tocqueville, M. Daudigny et Mme Monier.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Conditions de vie outre-mer

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Maurice Antiste.  - Les délais de paiement dans les anciens départements et régions d'outre-mer ont atteint des niveaux insupportables pour les entreprises et ont nettement progressé ces dernières années.

Le délai légal de paiement pour les collectivités territoriales est de 30 jours. Dans les faits, il est en moyenne de 28 jours dans la France entière. Il atteint toutefois 74 jours en Guadeloupe, 115 jours en Martinique, 86 jours en Guyane, 45 jours à La Réunion, 57 jours à Mayotte.

Dans des territoires où les marchés sont étroits et au sein desquels la commande publique dans l'économie est prépondérante, il est délicat pour les entreprises de demander aux services de l'État des mandatements d'office. Il est urgent que l'État dresse un bilan clair de l'état des retards de paiement dans ces territoires et établisse un ordre de priorité des dépenses à payer.

À plus long terme, les dispositions prévues pour éviter les retards de paiement n'ayant pas permis d'éviter les dérives actuelles, il conviendrait d'engager une réflexion plus générale sur une éventuelle refonte les concernant.

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à tous les amendements, compte tenu des réductions de crédit qui en résulteraient.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Même avis.

Nous allons renégocier le plan aux DOM. Il faut la fin des tours d'eau.

L'idée d'un fonds d'urgence n'est pas mauvaise, mais il faut être cohérent.

Madame Conconne, quand je discute avec les jeunes, par exemple récemment à La Réunion, où la démographie est, il est vrai, bien différente, mais c'est vrai dans tout l'outre-mer, ils me disent : « On manque d'air ». C'est donc sur l'attractivité qu'il faut travailler.

Il n'est pas mauvais d'aider les jeunes ultramarins à acquérir de l'expérience ailleurs. C'est pourquoi, le billet d'avion est valable cinq ans. Peut-être faudra-t-il aller plus loin.

Quant au dernier amendement sur les délais d'impayés, je dis « chiche ». Ce ne sera pas simple.

Le sujet sera abordé dans le cadre de la conférence nationale des territoires.

L'amendement n°II-563 est adopté.

L'amendement n°II-509 est adopté.

L'amendement n°II-437 n'a plus d'objet.

L'amendement n°II-510 est adopté.

M. Claude Raynal.  - Je demande une suspension de séance de trois minutes.

La séance est suspendue pour quelques instants.

Les crédits de la mission sont mis aux voix par scrutin public, à la demande du groupe Les Républicains.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°33 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 236
Pour l'adoption 216
Contre    20

Les crédits de la mission « Outre-mer » sont adoptés.

Article 77 quinquies

M. Maurice Antiste .  - Le président Macron reste sourd au désarroi des ultramarins.

Quelque 82 % de leurs habitants conseillent aux jeunes de quitter leur pays. Depuis le début de mon mandat, je répète que les territoires ultramarins sont malades : c'est le cas de 90 collectivités territoriales sur 136, soit les deux tiers.

Le chômage des jeunes y est deux fois plus important que dans l'Hexagone. Les hôpitaux sont au bord de l'implosion.

Le Gouvernement fait pourtant le choix de l'austérité. L'augmentation en trompe l'oeil de cette mission n'abuse pas les populations.

J'ai des forts doutes sur la réalité des estimations fiscales de vos mesures.

Selon le président de la République, la clé de la stratégie c'est une responsabilité partagée. Il avait omis de préciser que l'outre-mer devait s'autofinancer, afin que l'État se désengage. Ce budget de l'outre-mer est un très mauvais signal, ne règlera rien. L'exécutif ignore le cri du peuple : il faut s'attendre au pire. J'aurai prévenu.

L'article 77 quinquies est adopté.