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Table des matières



Ouverture de la troisième session extraordinaire

Accord en CMP

Hommage à Lucette Michaux-Chevry

Réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

M. Guy Benarroche

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Maryse Carrère

Mme Cécile Cukierman

M. Arnaud de Belenet

M. Jérôme Durain

M. Alain Marc

M. Serge Babary

M. Édouard Courtial

M. Marc Laménie

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2

Oeuvres culturelles à l'ère numérique (Conclusions des CMP)

Discussion générale commune

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture

M. Julien Bargeton

M. Bernard Fialaire

Mme Céline Brulin

Mme Catherine Morin-Desailly

M. David Assouline

M. Jean-Pierre Decool

Mme Monique de Marco

Mme Toine Bourrat

Discussion du texte élaboré par la CMP

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 18

Adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports (Conclusions de la CMP)

M. Cyril Pellevat, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

M. Jean-Pierre Corbisez

Mme Marie-Claude Varaillas

M. Jean-François Longeot

M. Gilbert-Luc Devinaz

M. Pierre Médevielle

M. Guillaume Gontard

Mme Nadège Havet

M. Guillaume Chevrollier

M. Hervé Maurey

Protéger la rémunération des agriculteurs (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure de la commission des affaires économiques

M. Fabien Gay

M. Franck Montaugé

M. Stéphane Ravier

M. Daniel Gremillet

M. Franck Menonville

M. Joël Labbé

Mme Patricia Schillinger

M. Henri Cabanel

M. Pierre Louault

M. Serge Mérillou

M. Laurent Duplomb

M. Jean-Marc Boyer

M. Jean Bacci

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

ARTICLE PREMIER

Mme Laurence Muller-Bronn

M. Fabien Gay

M. Guillaume Chevrollier

Mme Cécile Cukierman

Conférence des présidents

Protéger la rémunération des agriculteurs (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE PREMIER (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE PREMIER TER

ARTICLE 2

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure

Mme Patricia Schillinger

M. Laurent Duplomb

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2

ARTICLE 2 BIS B

ARTICLE 2 BIS C

ARTICLE 2 BIS D

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 2 bis D

ARTICLE 2 BIS E

Ordre du jour du mercredi 22 septembre 2021




SÉANCE

du mardi 21 septembre 2021

1ère séance de la troisième session extraordinaire 2020-2021

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

Secrétaires : Mme Esther Benbassa, Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Ouverture de la troisième session extraordinaire

M. le président.  - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date du 1er septembre 2021 portant convocation du Parlement en session extraordinaire à compter du 20 septembre 2021.

Acte est donné de cette communication. Ce décret a été publié sur le site internet du Sénat.

En conséquence, je constate que la troisième session extraordinaire de 2020-2021 est ouverte.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Hommage à Lucette Michaux-Chevry

M. le président.  - C'est avec émotion que nous avons appris le décès jeudi 9 septembre dernier de notre ancienne collègue Lucette Michaux-Chevry, vaincue par la maladie contre laquelle elle luttait avec le courage et la détermination qui la caractérisaient.

Figure majeure de la vie politique guadeloupéenne depuis 1959, date de sa première élection comme conseiller municipal de Saint-Claude, elle assumera ensuite tous les mandats qui ponctuent le cursus honorum d'un élu de terrain.

Élue conseillère générale en 1976, elle devient présidente de l'assemblée départementale en 1982.

En 1987, elle se présente aux élections municipales dans la commune de Gourbeyre dont elle devient maire. Elle le restera jusqu'en 1995. À cette date, elle part à la conquête de la ville de Basse-Terre, chef-lieu de la Guadeloupe. Elle l'emporte et en devient le premier magistrat. Elle le restera jusqu'en 2001, puis le redeviendra de 2008 à 2014.

En 1992 elle remporte l'élection régionale et prend en main les destinées du conseil régional, poste qu'elle conservera jusqu'en 2004.

C'est dire la place importante qu'occupait notre ancienne collègue auprès de ses concitoyens.

Mais son rayonnement dépassait largement les limites de l'archipel guadeloupéen.

Elle poursuit son engagement politique à l'Assemblée nationale où elle est élue députée en 1986, puis de 1988 à 1993. En 1995, elle entre au Sénat. Elle siègera au sein de cet hémicycle jusqu'en 2011. Ceux qui l'ont côtoyée se souviennent de sa maîtrise de l'art oratoire, de sa force de persuasion, de ses convictions fortes. Ils se souviennent notamment de son intervention lors de l'hommage solennel à Victor Schoelcher où elle rappela que la France ne pouvait se contenter d'un devoir de mémoire mais se devait d'impulser à son espace géographique historique sa vraie dimension, sans persister dans une vision restrictive limitée à l'Hexagone. Pour elle, la France c'était beaucoup plus !

Parallèlement, Lucette Michaux-Chevry défend, bien avant que cela soit un sujet d'actualité, la différenciation territoriale comme moyen de levier de développement des outre-mer. La déclaration de Basse-Terre qu'elle cosigna avec les présidents d'exécutifs de Martinique et de Guyane en a lancé les bases.

Ce parcours exceptionnel d'une femme engagée n'aurait pas été complet si elle n'avait pas exercé par deux fois des fonctions ministérielles : de 1986 à 1988 comme secrétaire d'État à la francophonie, puis de 1993 à 1995 comme ministre déléguée chargée de l'action humanitaire et des droits de l'Homme.

Au nom du Président du Sénat et du Sénat tout entier, je souhaite exprimer notre sympathie et notre profonde compassion à sa famille et à ses proches.

Réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce. La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois .  - Nous savons, pour le déplorer, que nous légiférons souvent dans la précipitation. Ce fut le cas de la loi Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises) et de ses 221 articles.

Ce texte vient corriger une malfaçon, qui s'est révélée dirimante, sur le corps électoral des tribunaux de commerce, modifié à compter de 2022. Désormais, les juges ne seront plus élus par des délégués consulaires, mais par les membres des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et des chambres des métiers et de l'artisanat (CMA).

Par mégarde, les conditions relatives à l'éligibilité des juges consulaires ont également été réformées, conduisant ces derniers et les anciens membres du tribunal et des tribunaux limitrophes à ne pouvoir être réélus. Sur 793 juges dont le mandat arrive à expiration, entre 450 et 500 sont concernés.

Cela aurait de graves répercussions, d'autant que sont concernés les magistrats les plus expérimentés, dont de nombreux présidents de tribunal de commerce.

C'est pourquoi notre collègue Nathalie Goulet a déposé cette proposition de loi, modifiée puis votée à l'unanimité par notre commission des lois.

Nous avons rétabli l'éligibilité des anciens juges - sachant qu'une cinquantaine d'entre eux avaient été candidats lors des précédentes élections - et l'inéligibilité liée à certaines condamnations pénales et civiles, malencontreusement perdue en chemin ; nous avons limité à cinq le nombre maximum de mandats, successifs ou non, dans un même tribunal, conformément à l'intention du législateur lors des lois Pacte et Justice du XXIe siècle, alors que le Conseil d'État en avait rendu une interprétation contestable ; nous avons précisé la composition du corps électoral des juges consulaires, car les principes d'organisation d'un ordre juridictionnel sont du domaine de la loi. Enfin, la commission a prorogé jusqu'au 31 décembre 2021 le mandat des délégués consulaires élus en 2016. Je vous proposerai aussi trois amendements de coordination ou de précision.

Je remercie Nathalie Goulet de son initiative opportune pour le service public de la justice commerciale. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; MMThani Mohamed Soilihi et Guy Benarroche applaudissent également.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Je suis très heureux d'être de retour au Sénat pour débattre d'un sujet crucial pour notre économie : la justice commerciale, héritière de cinq siècles d'histoire.

Elle a fait la démonstration de son efficacité et de son adaptabilité.

Lors de la crise sanitaire, les tribunaux de commerce ont répondu présents pour accompagner les entreprises en difficulté.

Si le « quoi qu'il en coûte » a préservé l'économie, il faut désormais préparer l'après, alors que les aides exceptionnelles vont progressivement décroître, et éviter les faillites en intervenant au plus tôt auprès des entreprises.

Les tribunaux de commerce doivent donc avoir les moyens de remplir leurs missions. Les juges sont bénévoles, ils sont proches géographiquement et sociologiquement des entreprises : c'est une vraie justice de proximité.

Le Gouvernement soutient pleinement ce texte qui permet aux juges sortants et anciens juges -  les plus expérimentés - de se présenter aux élections consulaires. C'est primordial pour le fonctionnement des tribunaux de commerce, au moment où ils sont particulièrement sollicités.

Les 134 tribunaux de commerce et 31 cours d'appel comptent 3 357 juges, dont 23 % doivent être renouvelés cette année. Tous les tribunaux sont concernés, d'Alençon à Villefranche et Saint-Pierre de la Réunion, en passant par Paris, Aix-en-Provence, Créteil...

La fonction de juge consulaire demande une implication forte et un engagement chronophage. La réforme conduirait 14 % des juges à ne pas se représenter, dont beaucoup de présidents, entraînant une perte de compétence et de savoir-faire.

Il est donc urgent d'adopter cette proposition de loi, avant les élections, reportées entre le 23 novembre et le 5 décembre.

Je salue le travail de la commission des lois, qui a utilement complété le texte par des mesures que soutiennent le Conseil national des tribunaux de commerce, la Conférence générale des juges consulaires de France et la Chancellerie, notamment sur la déontologie et le statut des juges consulaires.

Je vous appelle à voter ce texte, au-delà de tout clivage partisan.

Les juges consulaires, acteurs indispensables auprès de nos entreprises, méritent tout notre soutien. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe UC ; M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

M. Guy Benarroche .  - La situation des tribunaux de commerce pose question. Outre les difficultés financières et de recrutement, ils ont connu de nombreuses réformes ces dernières années, notamment à l'occasion de la loi Pacte qui a étendu leurs compétences aux litiges entre artisans et modifié les conditions d'élection des juges, excluant les anciens juges et les juges sortants. Quelque 60 % ne seraient plus éligibles. Même si le renouvellement est un marqueur du mandat présidentiel actuel, nous priver de l'expérience est parfois regrettable - nous l'avons vu avec les tribulations de l'Assemblée nationale... Ce texte corrige cette erreur, dans la lignée du rapport sénatorial Le droit des entreprises en difficulté à l'épreuve de la crise, et les élections consulaires ont été reportées.

La valorisation de l'expérience est équilibrée par l'article 2, qui limite à cinq le nombre maximum de mandats dans un même tribunal pour éviter une excessive professionnalisation et s'assurer que les juges restent impliqués dans le monde économique.

Nous avons également prévu des incompatibilités et des conditions d'inéligibilité en cas de condamnation pénale ou civile, afin de renforcer la confiance en l'institution judiciaire. Il serait incongru qu'une personne ayant l'interdiction de diriger une entreprise puisse être juge consulaire.

Ces différents pendants semblent équilibrés, nécessaires et logiques. Le GEST votera ce texte.

Par ailleurs, monsieur le garde des Sceaux, une refonte des fonctions d'administrateur et de mandataire judiciaire nous paraît indispensable. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Cette proposition de loi, qui corrige des malfaçons de la loi Pacte, est bienvenue.

Depuis le décret d'août 1961, les juges consulaires sont élus par un collège électoral - délégués consulaires, juges en poste et anciens membres du tribunal inscrits sur la liste électorale. Au nombre de 3 331, ils sont répartis dans 134 tribunaux de commerce, sans compter les tribunaux mixtes d'Alsace-Moselle et d'outre-mer. Ils sont tous issus du monde de l'entreprise et s'impliquent bénévolement pour statuer sur les contestations relatives aux engagements entre commerçants, sociétés commerciales, aux actes de commerce, billets à ordre, mandats ad hoc, aux procédures de conciliation, sauvegarde, redressement, liquidation judiciaire et rétablissement personnel.

Agents bénévoles de la justice commerciale, ils décident du sort de milliers d'entreprises en difficulté et de centaines de milliers d'emplois. Leur légitimité naît de leur élection, encadrée par le code de commerce.

Le collège électoral comprenait, initialement, les délégués consulaires et les membres actuels et anciens du tribunal de commerce. L'article 40 de la loi Pacte a remplacé les délégués par les membres élus des CCI et CMA, mais a écarté les anciens juges et les juges sortants, rendant près de 500 juges inéligibles sur les 793 dont le mandat arrive à expiration en 2021!

L'article premier y remédie et rétablit l'inéligibilité des personnes condamnées pénalement.

L'article 2 limite à cinq le nombre de mandats, successifs ou non, pouvant être exercés dans un même tribunal de commerce, suivant une préconisation du rapport que j'ai rendu avec François Bonhomme.

L'article 3 précise le collège électoral et l'article 4 tire les conséquences du report des élections et de leur articulation avec les élections consulaires en prorogeant jusqu'au 31 décembre 2021 le mandat des délégués consulaires élus en 2016.

La commission des lois a apporté des précisions bienvenues aux conditions d'inéligibilité.

Le groupe RDPI votera ce texte ainsi modifié. L'immense travail de modernisation de la juridiction commerciale passera également par le renforcement des garanties entourant le statut des juges consulaires et par le parachèvement de la spécialisation de certains tribunaux de commerce. Nous aurons à en débattre. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Viviane Artigalas applaudit également.) Ce serait une erreur de voir dans texte une loi purement technique. Comme l'écrivait le philosophe Gilbert Simondon, les objets techniques ne doivent nullement être dévalués : ils sont la condition du bon fonctionnement d'un système entier en ce qu'ils permettent son accomplissement cohérent. Cette proposition de loi vise à améliorer la cohérence de notre législation sur un point qui n'est pas mineur.

La malfaçon involontaire de la loi Pacte empêcherait entre 450 et 500 juges sur 793 de se représenter dans leur tribunal, alors qu'ils pourraient le faire dans un tribunal de commerce non limitrophe.

Ces juridictions sont pourtant ancrées dans leur particularisme historique. Il est impératif de ne pas nuire à leur bon fonctionnement.

La proposition de loi opère la correction nécessaire. La commission des lois a été au-delà en rendant éligibles les anciens juges.

Certaines dispositions sont aussi complétées et ajustées à l'occasion de ce texte, comme le délai de viduité.

La limitation à cinq mandats continus, telle que l'interprète le Conseil d'État, risque d'être inefficace pour prévenir la professionnalisation des juges consulaires ; nous souhaiterions cinq mandats en tout.

Notre groupe votera unanimement cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Guy Benarroche et Mme Viviane Artigalas applaudissent également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Cette proposition de loi répare une erreur légistique qui aboutit à priver 60 % des juges en exercice d'un nouveau mandat. Il était nécessaire de sécuriser les tribunaux de commerce, dont l'activité est soutenue dans la crise actuelle.

Après moult rapports divers et variés sur la transformation de la justice commerciale, il est temps de repenser cette institution pluricentenaire pour la renforcer.

L'accumulation de textes pléthoriques, qui grossissent comme la grenouille de La Fontaine, dans des calendriers serrés, entraîne des erreurs légistiques dont les justiciables sont les premiers à pâtir. Nous devons y réfléchir. En attendant un débat de fond sur cette institution unique en Europe, nous voterons ce texte technique.

M. Arnaud de Belenet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) En mission à l'étranger, Mme Nathalie Goulet me charge de vous remercier pour le sort que vous réservez à son excellente initiative.

Depuis l'adoption de la loi Pacte, il est nécessaire de modifier les règles d'éligibilité des juges consulaires, du fait d'une erreur qui conduit à exclure plus de 500 bénévoles expérimentés. Le texte de Mme Nathalie Goulet corrige cette défectuosité.

La commission des lois a parfait l'oeuvre en adoptant plusieurs mesures largement consensuelles. Reste à savoir s'il faut viser cinq mandats « successifs ou non ».

Nous nous félicitions de l'unanimité autour de ce texte et remercions Mme Nathalie Goulet pour sa sagacité. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Alain Marc applaudit également.)

M. Jérôme Durain .  - Sur le terrain, les chefs d'entreprise nous font part de leurs inquiétudes et de leurs interrogations. La défaillance guette de nombreuses entreprises viables tandis que des entreprises zombies, non rentables, risquent de se multiplier.

La justice commerciale compte parmi nos atouts.

Ce texte fait écho à l'excellent rapport d'information de MM. Bonhomme et Mohamed Soilihi. Il s'agit de corriger une erreur commise dans la loi Pacte.

Aujourd'hui, plusieurs centaines de juges en exercice et anciens juges ne sont plus rééligibles. Cela représente 450 juges consulaires et donc une justice commerciale moins efficace. Cette proposition de loi mettra fin au tarissement du vivier des candidats, pour une remontada des effectifs.

M. François Bonhomme, rapporteur.  - Il y a un message caché ! (Sourires)

M. Jérôme Durain.  - Durcir la règle d'inéligibilité et limiter la professionnalisation par la limitation à cinq mandats sont également des bons objectifs. Notre groupe apporte son plein et entier soutien à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Alain Marc .  - Ce texte utile remédie aux manquements de la loi Pacte. Héritiers d'une longue tradition, les  juridictions consulaires ont été créées par un édit de 1563 du roi Charles IX, à l'initiative de son chancelier Michel de L'Hospital dont la statue orne cet hémicycle. En 1673, Colbert les a généralisées à la France entière. En 1721, il en existait déjà 73.

La Révolution française a conservé ces juridictions en leur donnant leur nom actuel par la loi des 16 et 24 août 1790. C'est une des rares institutions à avoir traversé tous les régimes... À partir de 1961 a été créé un collège électoral pour élire ces juges, puis la loi Pacte a prévu son remplacement par les membres des CCI et des CMA, oubliant les juges et anciens juges.

L'initiative de notre collègue, utilement enrichie par la commission, est bienvenue. Je salue le travail de qualité de notre rapporteur, notamment sur les conditions d'inéligibilité, le nombre maximal de mandats, la composition du corps électoral et la prorogation du mandat des juges élus en 2016. Le groupe INDEP votera à l'unanimité cette mesure opportune pour éviter un tarissement du vivier des juges.

M. Serge Babary .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La loi Pacte a modifié le mode d'élection des juges commerciaux, en commettant une erreur qui pourrait entraîner l'éviction de 450 à 500 juges sortants. En Indre-et-Loire, sur 25 juges au tribunal de commerce de Tours, 11 sont renouvelables, dont le président, les présidents des deux chambres de procédures collectives et le président de l'une des trois chambres de contentieux ...

Il est urgent d'agir pour conserver l'expérience et la compétence nécessaires à l'exercice de ces fonctions, sachant qu'il faut deux ans pour former un juge.

Je salue les apports de la commission des lois, notamment sur l'inéligibilité. Le groupe Les Républicains votera ce texte essentiel pour le bon fonctionnement de nos tribunaux de commerce. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Édouard Courtial .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La loi a parfois des effets indésirables...

Environ 450 juges sortants sont concernés sur les 793 dont le mandat arrive à échéance. Je rends hommage à l'engagement bénévole de ces juges. Cette proposition de loi rétablit leur éligibilité. Il serait extrêmement dommageable pour ces juridictions de devoir se passer des services de juges souvent expérimentés.

La commission des lois a introduit plusieurs améliorations, sur les conditions d'inéligibilité, la limitation du nombre de mandats ou encore la composition du corps électoral. Elle impose notamment aux anciens juges d'avoir été en fonctions au moins six ans, non démissionnaires, et non inéligibles.

Ce texte s'inscrit dans la lignée de la mission d'information sénatoriale sur le traitement juridique des difficultés des entreprises. Il renforce les garanties relatives au statut de juge consulaire. Il est impératif de l'adopter avant le 22 octobre, afin de lutter contre le tarissement du vivier des juges. La procédure accélérée est justifiée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Marc Laménie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) À mon tour, je salue l'initiative de Mme Goulet. Justice de proximité et bénévolat sont deux caractéristiques de la justice commerciale. L'engagement des juges doit être salué. Ils jouent un rôle important et connaissent bien le monde économique.

La loi Pacte a entraîné une malfaçon qu'il faut réparer.

Dans les Ardennes, l'audience solennelle d'intégration des nouveaux magistrats s'est tenue hier.

Sans ce texte, 60 % des juges en service, parmi les plus expérimentés, ne seraient pas éligibles - ce qui serait hautement regrettable.

La commission l'a ainsi corrigé, et a apporté diverses améliorations au régime électoral aux articles premier, 2 et 3. L'article 4 proroge le mandat des délégués consulaires élus en 2016 jusqu'au 31 décembre 2021, afin que les élections de novembre et décembre 2021 puissent se tenir selon les anciennes règles.

Nous voterons ce texte de grande qualité, nécessaire à notre monde économique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

lorsqu'elles entraînent ou portent interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale

M. François Bonhomme, rapporteur.  - Amendement de précision.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°3 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au 5° , après la référence : « L. 713-3 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

M. François Bonhomme, rapporteur.  - Coordination légistique.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°4 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Au 1° de l'article 776 du code de procédure pénale, après le mot : « saisis », sont insérés les mots : « de candidatures aux fonctions de juge d'un tribunal de commerce, ».

M. François Bonhomme, rapporteur.  - Cet amendement permet aux préfectures d'avoir accès au bulletin n°2 du casier judiciaire afin de contrôler l'absence de condamnation pénale.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°5 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, M. L. Hervé, Mme Vérien, M. Delcros, Mmes Férat et Guidez, MM. Kern, Le Nay et Levi, Mme Létard, MM. Moga et Canévet, Mme de La Provôté, M. P. Martin, Mme Morin-Desailly, M. Longeot, Mmes Loisier et Devésa, M. Prince, Mmes Dindar et Jacquemet, MM. Bonneau et Lafon, Mme Sollogoub, M. Henno, Mmes Gatel et Vermeillet, M. Laugier et Mme Billon.

Remplacer les mots :

remplacé par les mots : « , successifs ou non, »

par le mot :

supprimé

M. Michel Canévet.  - Nous supprimons la mention de « mandats successifs ».

M. François Bonhomme, rapporteur.  - Je ne suis pas certain qu'il y ait ambiguïté ; mais, eu égard à la sagacité de Mme Goulet, sagesse.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Sagesse.

L'amendement n°2 rectifié est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Les articles 3 et 4 sont adoptés.

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

M. le président.  - Belle unanimité !

La séance est suspendue quelques instants.

Oeuvres culturelles à l'ère numérique (Conclusions des CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles à l'ère numérique et des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique modifiant la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Discussion générale commune

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires .  - Le projet de loi relatif aux oeuvres culturelles à l'ère numérique a fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire le 1er juillet dernier. Malgré quelques avancées, il demeure très éloigné de nos attentes et ne permettra pas au secteur audiovisuel de s'adapter au monde nouveau des plateformes. C'est une occasion manquée, tout comme la réforme de la contribution à l'audiovisuel public que nous attendons toujours. C'est dommage, car le projet de loi de Franck Riester, examiné par l'Assemblée nationale en mars 2020, constituait une bonne base de départ.

Depuis 2015, le Sénat propose de rationaliser l'audiovisuel public en rassemblant ses moyens pour être plus fort sur le numérique. Mais c'est le secteur privé qui suit cette voie avec le projet de fusion TF1-M6-RTL et le rapprochement Vivendi-Lagardère. Que de temps perdu pour l'audiovisuel public !

Ce texte constitue néanmoins une étape utile. La lutte contre le piratage à l'article premier constitue le coeur du projet de loi. L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) sera pleinement investie et compétente et bénéficiera de l'expertise des agents de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi).

Je regrette toutefois l'abandon de la transaction pénale, outil efficace et moderne qui faisait l'unanimité dans la profession : attention à ne pas affaiblir le nouveau régulateur dès sa création !

Notre commission s'était fortement mobilisée contre le piratage des retransmissions sportives : l'article 3 constitue une avancée décisive.

À l'article 5, relatif à la composition du collège de l'Arcom, l'influence du Parlement et la présence de deux magistrats ont été préservées.

Le projet de loi organique, mesure de coordination nécessaire compte tenu du remplacement du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) par l'Arcom, a également fait l'objet d'un accord en CMP.

Parmi les autres avancées de ce projet de loi, je salue, à l'article 10 bis A, la prise en compte des coûts d'investissement des chaînes historiques à l'occasion du renouvellement de leur autorisation d'émettre, la reprise du signal local de France 3 à l'article 10 quater, ou encore la possibilité d'obtenir des données sur la consommation des programmes à l'article 10 quinquies.

À l'article 17 relatif à la réglementation de la production, la CMP a adopté une rédaction ouverte qui permettra de raisonnables assouplissements. Nous nous sommes également accordés sur le seuil de concentration des chaînes locales de l'article 10 septies, fixé à 19 millions d'habitants.

Mais il y a aussi des déceptions et des sacrifices...

Si nous avons pu intégrer l'expérimentation sur la télévision à ultra-haute définition (TVUHD), nous regrettons l'absence de progrès sur l'interactivité et la norme HbbTV (Hybrid Broadcast TV).

Nous regrettons également le maintien d'une disposition de 2016 qui pénalise les opérations industrielles au même titre que les opérations spéculatives.

La sanction prévue à l'article 13 nous semble manifestement disproportionnée au regard des faits reprochés.

La transposition par ordonnance de la directive Services de médias audiovisuels (SMA) se heurte à la question toujours épineuse de la chronologie des médias. Il faut trancher et que chacun accepte de faire un pas. Sachez madame la ministre, que nous suivons de près ce dossier essentiel, sur lequel Catherine Morin-Desailly et Jean-Pierre Leleux se sont particulièrement investis.

Les avancées l'emportant sur les déceptions, je vous propose d'adopter les conclusions de deux commissions mixtes paritaires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur le banc de la commission)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture .  - Les secteurs audiovisuel et cinématographique connaissent de profondes mutations : multiplication des canaux de diffusion, offres disponibles partout et en continu, nouveaux acteurs géants installés hors de notre territoire. C'est une opportunité pour la création française, mais il nous faut de nouvelles règles adaptées à cette économie plus ouverte et compétitive.

Nous devons renforcer notre création et maintenir notre ambition industrielle et culturelle. À cette fin, j'ai engagé une réforme en profondeur du financement de la création. Avec le présent projet de loi, j'ai également souhaité réguler et protéger les oeuvres et l'accès à ces dernières. La perte de valeur due au piratage est de 1,3 milliard d'euros par an. Après une baisse pendant deux ans, le nombre de pirates a crû avec les confinements - comme on pouvait s'y attendre. La liste noire prévue par le projet de loi tarira les sources de revenus des sites pirates. Le texte lutte aussi contre les sites miroirs. Il modernise notre régulation grâce à la fusion du CSA et de la Hadopi dans l'Arcom. Il garantit l'accès du public aux oeuvres françaises, même en cas de cession à un acheteur établi à l'étranger.

Ce texte a été enrichi par le Sénat et l'Assemblée nationale, sur la TNT, la production indépendante ou les règles anti-concentration des réseaux de télévision et de radio locales.

L'examen de ce texte s'est déroulé dans un climat apaisé, marqué par d'intéressants débats et un travail de qualité. Que le président Laurent Lafon et le rapporteur Jean-Raymond Hugonet en soient chaleureusement remerciés. Mon état d'esprit est toujours de travailler avec chacune et chacun d'entre vous, au-delà des clivages partisans.

Grâce à vous, la loi fondatrice de 1986 est une nouvelle fois adaptée, afin de répondre aux trois enjeux majeurs de la protection des droits d'auteur, de la modernisation de notre régulation et de la défense de l'accès du public aux oeuvres.

Vous avez fait du bon travail, je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du RDPI, des groupes UC et Les Républicains et sur le banc de la commission)

M. Julien Bargeton .  - La crise sanitaire a conduit à un usage massif du numérique, notamment du streaming, avec une hausse inédite du piratage. Ce texte est donc de bon aloi.

Sans création, pas de diffusion. C'est pourquoi il faut la protéger.

Ce texte respecte les apports du Sénat, notamment sur la composition du collège de l'Arcom.

Nous avons aussi avancé sur d'autres sujets, comme la transaction pénale ou la régulation des sites miroirs. Il est agréable de constater que, même en cette période où le débat politique se tend un peu, le travail parlementaire porte ses fruits.

Le RDPI soutiendra ces textes. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Bernard Fialaire .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur, applaudit également.) L'ère numérique a profondément transformé le paysage audiovisuel. Il faut protéger la création, réguler le secteur et garantir l'accès du public aux oeuvres. Pour ce faire, nous devons agir sur plusieurs fronts.

Félicitons-nous que le Sénat et l'Assemblée nationale se soient largement accordés sur la lutte contre le piratage.

Si le projet de loi peut paraître d'une envergure limitée, n'oublions pas nos engagements européens, qui nous conduisent à transposer des directives importantes, comme celles sur le droit d'auteur et les droits voisins. L'article 8 bis A permettra en outre à l'Arcom de défendre les positions françaises au niveau international. La création de cette nouvelle autorité est consensuelle et nous l'avions soutenue en première lecture.

Je regrette que certains articles, notamment sur l'accès du public aux rediffusions sportives, aient fait les frais de la navette. Nous sommes favorables aux dispositions sur les seuils anti-concentration. Il était temps de rénover la loi de 1986. C'est pourquoi le RDSE votera ces textes, qui consolideront la création française, gage de notre souveraineté culturelle. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur, applaudit également.)

Mme Céline Brulin .  - Nous voici au terme du processus législatif. Nous sommes passés d'une grande réforme de l'audiovisuel public à un texte sur la protection et l'accès aux oeuvres à l'ère numérique... Or la télévision traditionnelle voit chaque jour de nouveaux concurrents apparaître, bien décidés à capter les revenus publicitaires.

Il était urgent d'agir. Nous saluons les mesures sur les télévisions locales, la diversité des pratiques sportives, la lutte contre le piratage et l'inscription, à notre initiative, de tous les participants à une oeuvre au générique.

Nous sommes plus mesurés sur la protection de la production. Il est regrettable que le Conseil d'État ne nous permette pas d'aller plus loin en matière d'autorisation préalable d'une vente et que des structures de préservation comme l'Institut national de l'audiovisuel (INA) soient trop affaiblies pour préempter.

En matière de piratage, il faut bien distinguer les piratages individuels des processus industrialisés. Le caractère payant des contenus sportifs encourage le piratage et conduit au rabougrissement du nombre de disciplines diffusées. Or ce texte s'attaque au piratage sans se poser la question de l'accès au contenu.

La concentration dans les médias, avec la création d'empires à la ligne éditoriale unique, nuit à la diversité et au pluralisme des idées.

Face aux géants du numérique, dans ce combat du pot de terre contre le pot de fer, de nombreux leviers doivent être activés, dont l'exception française que le monde nous envie.

Vous l'aurez compris, le groupe CRCE s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST)

Mme Catherine Morin-Desailly .  - Je ne m'étendrai pas sur la déception du recentrage post-Covid qu'a subi ce texte...

Le texte final n'a pas l'ambition du texte initial, mais il demeure utile pour la régulation et la protection de l'accès aux oeuvres et il a été enrichi par le Sénat ; grâces en soient rendues à Jean-Raymond Hugonet.

Parmi les avancées reprises par la CMP ou objets d'un compromis, la lutte contre le piratage, la composition de l'Arcom qui ne dessaisit pas le Parlement, le seuil de concentration des chaînes locales, ou la modernisation de la télévision numérique terrestre (TNT).

Même si l'insertion de l'article 2 A a accéléré la signature d'un accord entre les artistes graphiques et Google, rien ne vaut le marbre de la loi.

Nous avons heureusement été entendus sur le maintien de France 4, ainsi que sur la prise en compte par l'Arcom des investissements des chaînes lors du renouvellement de leur autorisation d'émettre.

Je regrette la disparition de la référence à la norme HbbTV - un standard de diffusion interactif à la demande qui aurait permis de rééquilibrer la concurrence entre chaînes et plateformes telles que Netflix, Disney+ ou Amazon Prime. Je déplore que les députés aient fait marche arrière, car la situation actuelle est anticoncurrentielle et nuit à notre souveraineté culturelle. Cette norme est pourtant largement répandue dans l'Union européenne ; la pression vient donc des opérateurs, soucieux de continuer à vendre des boxes. En outre, le CSA a autorisé Arte à utiliser cette norme : ne le mettons pas en porte-à-faux.

Manque également à ce texte la réforme de la contribution à l'audiovisuel public et celle de la chronologie des médias.

Alors que des candidats à l'élection présidentielle proposent sa suppression, il aurait fallu engager un large débat sur le rôle de l'audiovisuel public, son financement et ses missions.

Ce texte n'a pas l'ambition d'une réforme systémique annoncée par Franck Riester. Il comporte néanmoins des avancées ponctuelles : le groupe UC votera ces deux textes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur le banc de la commission)

M. David Assouline .  - L'époque appelait un grand débat national, une loi redéfinissant l'audiovisuel public, sa régulation, les rapports public-privé... Depuis la loi de 1986, l'écosystème a été bouleversé et nous n'avons apposé que des pansements dans l'urgence, sans repenser globalement le système. Alors qu'un objectif avait été fixé par le Président de la République, ce texte est une occasion ratée.

L'État doit avoir une vision claire de ce que doit être l'audiovisuel public. Or ce texte ne pérennise même pas son financement. C'est pourtant un impératif absolu avec le développement des nouveaux usages. Les autres pays ont réagi ; nous continuons à faire comme si.

Rapprochement annoncé entre TF1 et M6, ambitions de Vincent Bolloré sur le groupe Lagardère : les acteurs privés avancent, ils recomposent le paysage audiovisuel et nous dictent leur rythme. Même chose pour les plateformes : pour voir le championnat français de football, il faut être abonné à Amazon, plateforme américaine payante, qui diffuse 80 % des matchs de la Ligue 1.

La fusion entre la Hadopi et le CSA était une évidence à l'heure du numérique, les contenus audiovisuels étant de plus en plus regardés ailleurs qu'à la télévision. C'est donc une bonne chose.

Autre élément positif de ce projet de loi : la protection des auteurs. La directive SMA a constitué une étape importante. Aujourd'hui, les nouveaux acteurs de la vidéo à la demande bousculent le marché. Heureusement que le Gouvernement et l'Assemblée nationale n'ont pas suivi le Sénat sur la libéralisation complète des relations entre éditeurs et producteurs ! La rédaction proposée devrait permettre à la négociation d'atteindre un juste équilibre.

Deux grandes avancées ont été réalisées en dehors de la loi : la décision historique de l'Autorité de la concurrence validant mon texte sur les droits voisins et la pérennisation de France 4.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. David Assouline.  - Avancées, déception : abstention du groupe socialiste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Jean-Pierre Decool .  - Nous avons fait le deuil d'une réforme de l'audiovisuel public digne de ce nom, mais saluons néanmoins les avancées de ce texte au périmètre resserré : création d'une nouvelle instance de régulation, lutte contre le piratage et accès à l'information et à la culture.

L'Arcom, autorité aux pouvoirs renforcés, pourra constituer une liste noire de sites et bloquer les sites miroirs.

Le piratage des rencontres sportives -  auquel près de 20 % des Français ont eu recours en 2019  - sera combattu : les droits télévisés constituent en effet une source de revenus essentielle pour le sport.

La transaction pénale proposée par le Sénat pour les droits d'auteur n'a pas été retenue par la CMP ; c'est dommage, car la profession y est favorable.

En première lecture, j'avais attiré l'attention du gouvernement sur les pratiques frauduleuses sur les plateformes musicales : ces manipulations d'écoute relèvent de l'escroquerie. L'Arcom devra s'en saisir.

La déclaration préalable à la vente d'un catalogue d'oeuvres permettra à l'administration de s'assurer de l'accessibilité des oeuvres cinématographiques françaises détenues à l'étranger.

Nous nous réjouissons aussi la pérennisation de France 4, dont la qualité des programmes doit être saluée.

Les Indépendants voteront ce texte.

Mme Monique de Marco .  - Que se passe-t-il dans le paysage audiovisuel français ? Le groupe Bolloré lance une offre publique d'achat (OPA) sur Lagardère ; Europe 1 devient le CNews de la radio ; quelque 70 % des recettes publicitaires de la télévision risquent d'être captées par un seul groupe issu de la fusion TFI-M6 ; les plans sociaux se multiplient dans les rédactions ; les journalistes sont remplacés par des éditorialistes... La concentration des médias entre quelques mains est un danger pour la démocratie.

Cette loi aurait pu - aurait dû - mieux répondre à ces enjeux.

Le cadre législatif des médias date de 1944, la dernière grande loi de 1986. Nous avons certes réussi à conserver France 4 et Culturebox ; mais sinon, rien. Grâce à l'article 17, des chaînes d'information continue pourront ouvrir des antennes dites locales, mais qui couvriront plus d'un quart de la France... Ce texte manque sa cible et ne nous propose que quelques ajustements techniques.

La fusion du CSA et de la Hadopi a du sens ; mais l'Arcom sera-t-elle plus efficace ? Aura-t-elle les moyens de mener à bien ses missions ?

Il est illusoire de croire que ces mesures mettront fin au streaming et aux téléchargements illégaux. L'amende pour piratage proposée par le Sénat a heureusement été retirée du texte : elle aurait été injuste et inégalitaire. Les millions de courriers de la Hadopi sont inefficaces : cette autorité ne fonctionne pas et ses règles sont si faciles à contourner !

Enfin, comme le soulignait Laure Darcos, le délai de six mois prévu à l'article 17 pour les ventes de catalogues est irréaliste.

Le GEST s'abstiendra à nouveau sur ce texte. Notre assemblée doit porter des propositions dignes de ce nom pour répondre à la concentration des médias : il y a urgence !

Mme Toine Bourrat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous aboutissons enfin à l'adoption de ce texte, après un retard dû à la crise sanitaire, mais aussi aux atermoiements du Gouvernement. Ces demi-réformes sonnent comme autant de renoncements.

Ce texte est une occasion manquée de desserrer le cadre réglementaire qui contraint les acteurs français, face à leurs concurrents, et de répondre aux enjeux de notre société de l'écran.

Le projet de loi initial s'inspirait pourtant du rapport sénatorial Leleux -Gattolin de 2015, mais le texte actuel manque du même souffle réformateur et d'une ambition structurelle.

Je me réjouis que la CMP ait conservé les apports du Sénat, adoptés à l'initiative de notre excellent rapporteur Jean-Raymond Hugonet, dont je salue la finesse du travail, la détermination courtoise et la préciosité de l'écoute.

M. Julien Bargeton.  - N'en jetez plus !

Mme Toine Bourrat.  - En matière de lutte contre le piratage, le Sénat a renforcé l'efficacité des actions en justice et étendu le champ d'intervention de l'Arcom. Plusieurs améliorations ont été apportées au dispositif de blocage ou de déréférencement des sites miroirs, ainsi qu'aux mécanismes permettant de lutter contre les sites de streaming sportif. Il est regrettable que l'Assemblée nationale ait refusé le dispositif de transaction pénale que nous proposions pour remplacer la riposte graduée dont nous connaissons les limites. En 2020, le piratage a coûté plus d'un milliard d'euros ! Il faudra donner à l'Arcom les moyens de ses ambitions. La composition de son collège permet de conserver l'influence du Parlement et la présence de magistrats.

Je salue l'amélioration de l'accessibilité de l'offre de proximité de France 3, car il est fondamental que la télévision publique accompagne la vitalité des territoires.

C'est également grâce au Sénat que France 4 a été maintenue. (Mme la ministre le conteste.) Autrement, quelque 20 % des foyers auraient été privés de programmes éducatifs, faute d'accès à l'internet haut débit.

Concernant la production, le compromis trouvé préserve la négociation professionnelle, afin de garantir l'équité de traitement entre chaînes historiques et plateformes numériques.

Notre chambre a également adopté des dispositions relatives aux autorisations d'émettre des chaînes hertziennes et aux concentrations afin de permettre le développement du secteur.

Enfin, nous avons obtenu que l'Arcom prenne en compte les coûts d'investissement des chaînes historiques lors du renouvellement de leur autorisation d'émission.

C'est donc un texte nettement plus ambitieux qui nous est désormais soumis.

Je regrette néanmoins le caractère disproportionné des sanctions prévues à l'encontre des éditeurs, l'absence d'assouplissement du dispositif de lutte contre la spéculation qui revient à pénaliser toute opération industrielle et l'absence d'avancées sur la norme HbbTV.

Le groupe Les Républicains votera toutefois le texte : il est attendu par les acteurs et contribuera au maintien de l'exception culturelle française. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur le banc de la commission)

La discussion générale est close.

Discussion du texte élaboré par la CMP

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 142

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

29° ter Au premier alinéa de l'article L. 335-7-1, les mots : « la commission de protection des droits, en application de l'article L. 331-25 » sont remplacés par les mots : « l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, en application de l'article L. 331-19 » ;

Mme Roselyne Bachelot, ministre.  - Cet amendement, comme le suivant, est de coordination.

ARTICLE 18

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 2

Après la référence :

61

insérer les mots :

, de la première phrase des premier et deuxième alinéas du I, du premier alinéa du II, du premier alinéa et de la première phrase de l'avant-dernier alinéa du III de l'article 62

II.  -  Alinéa 3

Après la référence :

60,

insérer les mots :

à la première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 62,

III.  -  Alinéa 7

Après la référence :

34

insérer les mots :

, de la troisième phrase du deuxième alinéa du I de l'article 62

IV.  -  Alinéa 12

Après la référence :

59

insérer les mots :

, de la seconde phrase du premier alinéa et des deux derniers alinéas du I ainsi que des deuxième et dernière phrases de l'avant-dernier alinéa du III de l'article 62

V.  -  Alinéa 13

Après la référence :

61

insérer les mots :

, à la dernière phrase du deuxième alinéa du I ainsi qu'au premier alinéa, deux fois, et aux première et dernière phrases de l'avant-dernier alinéa du III de l'article 62

VI.  -  Après l'alinéa 79

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

6° À la seconde phrase du premier alinéa et au troisième alinéa du I bis ainsi qu'au dernier alinéa du II du même article L. 43, les mots : « le Conseil supérieur de l'audiovisuel » sont remplacés par les mots : « l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ».

VII.  -  Après l'alinéa 90

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

D bis.  -  La loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique est ainsi modifiée :

1° À la première phrase du troisième alinéa de l'article 6-1, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, les mots : « le Conseil supérieur de l'audiovisuel » sont remplacés par les mots : « l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique » et, à la fin, les mots : « du conseil » sont remplacés par les mots : « de l'autorité » ;

2° L'article 6-4 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du 2°, au 4° et au second alinéa du 6° du I et au 3° du II, les mots : « le Conseil supérieur de l'audiovisuel » sont remplacés par les mots : « l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique » ;

b) Au III, les mots : « au Conseil supérieur de l'audiovisuel » sont remplacés par les mots « à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ».

VIII.  -  Après l'alinéa 101

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L.  -  À la première phrase de l'article 15 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, les mots : « le Conseil supérieur de l'audiovisuel » sont remplacés par les mots : « l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ».

Mme Roselyne Bachelot, ministre.  - Défendu.

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur.  - Avis favorable, à titre personnel, à ces deux amendements que la commission n'a pas eu le temps d'examiner.

M. Jean Louis Masson.  - Je voterai contre ce texte, car je suis opposé à la Hadopi.

Je trouve regrettable que le Gouvernement nous propose ainsi, en dernière minute, un paquet d'amendements. Les gouvernements, quels qu'ils soient, devraient profiter des navettes entre le Sénat et l'Assemblée nationale pour apporter ce type de coordinations.

Il est désagréable que la commission n'ait même pas le temps de les examiner. Quoi qu'il en soit, je ne siège pas à la commission des affaires culturelles, car cette appartenance m'a été imposée en tant que non-inscrit... (remontrances amusées), mais qu'importe !

Mme Roselyne Bachelot, ministre.  - Deux amendements rédactionnels, cela ne fait pas un paquet ; tout au plus, une lettre au format tarif réduit ! (Sourires) En outre, ils sont relatifs à des textes promulgués depuis la première lecture au Sénat.

Loin de mépriser le Sénat, je le respecte.

M. David Assouline.  - M. Masson, qui ne vient pas en commission, n'a pas dû voir la différence... Reste qu'il eût été souhaitable que la commission pût émettre un avis sur ces amendements, autre qu'un simple avis personnel du rapporteur.

Le formalisme a un sens symbolique fort, surtout sous ce quinquennat où le Parlement est si peu respecté.

L'amendement n°1 est adopté, de même que l'amendement n°2.

Le projet de loi, modifié, est adopté.

Le projet de loi organique est mis aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°171 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l'adoption 331
Contre     1

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite et au centre)

La séance est suspendue quelques instants.

Adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances

M. Cyril Pellevat, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Ce texte est le fruit d'une navette constructive et d'une CMP réussie, preuve, une fois de plus, de l'intérêt de la co-construction législative.

Il transpose douze directives et quinze règlements européens et a mobilisé trois commissions permanentes - je remercie Hervé Maurey et François Bonneau pour leur travail au nom de leurs commissions respectives.

À la veille de la présidence française de l'Union européenne, il fallait garantir l'exemplarité de la France. Les implications de ces mesures, certes techniques, sur la vie de nos concitoyens sont considérables, notamment dans les domaines des transports et de l'environnement.

Il s'agit de prendre en compte les conséquences du Brexit, de la crise sanitaire et de mieux protéger l'environnement. Un exemple : la limitation de la teneur en soufre des combustibles marins empêchera un cargo de polluer autant que les 38 millions de voitures du parc français.

De nombreux apports du Sénat en première lecture ont été conservés, sur la confidentialité des tests d'alcoolémie pour le personnel navigant des aéronefs, la lutte contre les scrubbers, source de pollution marine, ou les jeunes marins effectuant un stage à bord.

Plusieurs amendements rédactionnels ont amélioré l'intelligibilité de la loi en supprimant redondances et renvois. L'Assemblée nationale a également adopté un amendement du Gouvernement afin de prendre en compte au titre des cotisations vieillesse les périodes d'activité partielle des marins dès janvier 2021, plutôt que mai -  l'article 40 me l'avait interdit. Je regrette que le Gouvernement ne soit pas allé plus loin en neutralisant totalement les effets de crise sanitaire pour les marins concernés.

Nous avons trouvé un compromis sur l'Autorité de régulation des transports (ART), dont le Sénat souhaitait renforcer la transparence et les prérogatives. Afin d'assurer le succès de la CMP, nous avons cédé sur le sujet sensible du calcul des redevances aéroportuaires, sachant que le secteur aérien investit massivement pour la décarbonation.

À l'article 13, relatif aux autoroutes, nous nous sommes conformés à la législation européenne tout en sécurisant le champ d'intervention du régulateur. Les articles 15 et 15 bis consolident les pouvoirs de l'ART en matière de transmission et de collecte d'informations.

L'Assemblée nationale a globalement validé le travail engagé par le Sénat. Au total, nous sommes parvenus à un texte d'équilibre avant la présidence française de l'Union européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Hervé Maurey applaudit également.)

M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports .  - L'Europe peut être pour la France un amplificateur de puissance. Elle a vocation à nous protéger, nous rendre plus forts.

Régulièrement, la législation européenne enrichit notre droit.

Dans le domaine des transports, ce texte protège d'abord nos professionnels des transports. Des dispositions très attendues intègrent le droit français. Nous protégeons nos routiers des accidents en interdisant que la rémunération soit fonction de la rapidité de la livraison ; nous les protégeons de la fatigue en sanctionnant les entreprises qui ne respecteraient pas le droit au repos ; nous les protégeons de la concurrence déloyale en limitant le cabotage par les transporteurs étrangers.

Ce texte protège également nos marins, s'agissant de leur formation, de leur temps de travail et de leurs droits à pension.

Il protège davantage les personnels navigants des passagers indisciplinés.

La planète, aussi, sera mieux protégée : moindre teneur en soufre des carburants marins, harmonisation du télépéage pour fluidifier le trafic, contrôle renforcé des normes environnementales des produits.

Enfin, ce texte accompagne nos collectivités territoriales en assouplissant les règles de financement participatif de leurs projets.

L'accord trouvé en CMP est équilibré.

Le Sénat s'était inquiété des aménagements liés au Brexit aux abords du tunnel sous la Manche. Ce texte régularise la situation mais la dérogation à la loi Littoral et au code de l'urbanisme ne sera pas pérenne, et ne grèvera pas la capacité de développement de Calais.

Le rôle de l'ART dans l'encadrement des aéroports est précisé, et elle se voit confier une compétence de suivi économique qui participera à la reprise du secteur aérien.

D'aucuns reprochent à l'Europe d'être trop abstraite. Avec ce texte, ils verront son impact concret.

Lors de la présidence française de l'Union européenne, nous ferons des propositions fortes dans le domaine du transport, sur le droit social, le fret, les biocarburants... Nous devons penser et agir en Européens pour être efficaces.

Ce texte est une pierre dans la construction de l'Europe que nous voulons, une Europe qui protège et qui renforce. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-Pierre Corbisez .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Bien que dénué de colonne vertébrale, cet exercice de transposition est indispensable avant la présidence française, qui débutera dans un contexte marqué par le Brexit, la crise sanitaire et l'urgence environnementale.

Ce texte certes technique comporte plusieurs avancées, comme l'amélioration des conditions de travail des routiers et la prise en compte des périodes d'activité partielle pour la validation des droits à pension des marins - même si le Gouvernement aurait pu aller plus loin pour atténuer les effets de la crise sanitaire.

La possibilité pour les collectivités territoriales d'obtenir une délégation pour l'organisation des lignes d'aménagement du territoire en direction d'autres États membres était attendue.

Le Sénat a fait oeuvre utile sur la confidentialité des tests d'alcoolémie et de substances illicites du personnel navigant ou sur l'accès au financement participatif pour les collectivités territoriales.

Je regrette que la législation en matière d'évaluation environnementale n'ait pas évolué, alors que la France a été mise en demeure pour non-respect de la directive. On note une tendance à la régression du droit de l'environnement, illustrée par l'abaissement, dans le décret d'application de la loi ASAP, des seuils de saisine de la Commission nationale du débat public ou du délai dont dispose l'autorité environnementale pour rendre son avis.

Alors que la présidence française de l'Union devra mettre en oeuvre le Green Deal, la conformité de notre législation environnementale est primordiale.

Malgré cette réserve, le groupe RDSE votera ce projet de loi. (Applaudissements sur le banc de la commission)

Mme Marie-Claude Varaillas .  - Nous abordons la fin du parcours législatif de ce projet de loi qui comporte 49 articles à la portée aléatoire. Plus d'un tiers avait été voté conformes par l'Assemblée nationale. Il restait donc peu de points de friction en CMP.

De fait, ce texte avait surtout pour objectif de faire de la France le bon élève de l'Europe en matière de transposition à la veille de la présidence française de l'Union. Pour nous, il faut aller plus loin en matière de transports et surtout revenir sur le dogme de la concurrence qui menace nos services publics...

Nous regrettons le trop grand nombre d'habilitations et l'absence de concertation sur certains sujets, soulignée par le Conseil d'État.

Sur le fond, la période de repos des jeunes marins est rabotée et l'activité partielle est mal prise en compte dans le calcul du droit à la retraite des marins.

Nous regrettons le passage à un régime déclaratoire pour les activités aériennes.

Certaines dispositions sécuritaires zélées nous paraissent en outre motivées par la volonté de pénaliser les actions citoyennes. Vous n'obtiendrez pas l'adhésion à vos politiques en muselant la parole ! L'article 10, qui ne relève en rien d'une obligation communautaire, a suscité l'opposition légitime des associations de défense de l'environnement, dont Extinction Rébellion et Greenpeace. En première lecture, nous étions les seuls à demander sa suppression.

Sur le détachement et le cabotage, les mesures prises sont beaucoup trop faibles pour permettre un rééquilibrage modal.

Pour toutes ces raisons, nous confirmons notre abstention sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Jean-François Longeot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur le banc de la commission) Le groupe UC se félicite de l'accord trouvé sur ce texte d'équilibre. Nous saluons l'expertise complémentaire des trois commissions saisies.

Ce projet de loi transpose douze directives européennes et met notre droit en conformité avec quinze règlements. L'Assemblée nationale a conservé la plupart des apports du Sénat.

À la veille de la présidence française de l'Union européenne, nous avions un devoir d'exemplarité. Lanterne rouge de la transposition il y a vingt ans, la France est devenue championne d'Europe en la matière, mais il faut trouver un équilibre entre sous-transposition et surtransposition, notamment en limitant les habilitations.

Alors que le coût, humain et financier, de la pollution de l'air est établi, je regrette les lacunes de transposition de la directive de 2016 relative à la réduction des émissions nationales. La France a été condamnée en 2019 pour non-respect de cette directive et en août dernier, le Conseil d'État a condamné l'État à une amende de 10 millions d'euros pour son inaction en la matière. Nous devons progresser sur ce point dans les prochains mois.

Sous cette réserve, nous voterons les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur le banc de la commission)

M. Gilbert-Luc Devinaz .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La crise sanitaire illustre le besoin d'Europe, d'une union solidaire qui tire vers le haut les acquis sociaux. L'Union européenne a bien réagi à la crise, gelant les règles budgétaires et annonçant un plan de relance.

La relance européenne est une chance pour consolider l'Union, sortir plus forts de la pandémie, transformer nos sociétés et répondre aux impératifs environnementaux.

Ce texte marque de réelles avancées en matière d'harmonisation, clé de voûte de la performance.

Dans le domaine des transports, la sécurité du transport de marchandises dangereuses est améliorée, les systèmes de télépéages sont harmonisés.

Sur le plan environnemental, la réglementation sera mieux appliquée en matière d'hydrofluorocarbures, de contrôle des eaux usées ou d'information du public.

La législation sur les minerais de conflits est transposée, le travail détaché des conducteurs routiers est mieux encadré.

Nous déplorons toutefois certains manques, comme l'accès des partenaires sociaux aux données relatives au détachement. Construire une Europe solidaire, socialement inclusive est pourtant nécessaire pour obtenir l'adhésion des citoyens.

Le calendrier prévu pour le calcul de la retraite des marins qui ont été au chômage partiel dès le début de la pandémie ne nous paraît pas juste. Nous aurions voulu que la mesure s'applique au 1er mars 2020. Le Gouvernement aurait pu faire un effort sur ce point.

Dans le domaine aérien, plusieurs amendements du Sénat renforçant les compétences de l'ART n'ont pas été maintenus. Dans ces conditions, l'ART pourra difficilement juger de la pertinence des redevances qui lui sont proposées. Cela pourrait se traduire par des rentes de monopoles... Après le référendum d'initiative populaire, la relance de la privatisation d'ADP serait-elle sur les rails ?

De même, la possibilité pour l'ART de collecter des données économiques a été écartée. Le Gouvernement a mis son véto à tout renforcement significatif de l'ART.

Nous nous abstiendrons sur ce texte.

M. Pierre Médevielle .  - Le succès de la CMP illustre la capacité des deux chambres à travailler en bonne intelligence. Le groupe Les Indépendants se réjouit de l'accord trouvé en CMP et salue les apports importants issus du Sénat.

En vue de la présidence française de l'Union européenne, nous devions adapter notre droit interne au droit européen, ce qui est une prérogative importante du Parlement. Il faut des priorités claires pour permettre à une Europe souveraine et protectrice de gagner en puissance dans le concert mondial.

L'environnement, en particulier, est un sujet essentiel, tout comme les transports et l'économie, sans oublier l'agriculture, l'alimentation et la politique commerciale.

Il faut trouver le chemin de crête entre sous-transposition et surtransposition -  éviter, aussi, les erreurs de transposition.

Le Brexit n'est pas la seule évolution à prendre en compte. Adapter notre droit, c'est créer des effets positifs pour nos concitoyens.

Nous confirmons notre soutien à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur le banc de la commission ; M. François Patriat applaudit également.)

M. Guillaume Gontard .  - L'accord en CMP, obtenu en vue de la présidence française de l'Union européenne, nous permet de rattraper notre retard de transposition -  sauf en matière de droit de l'environnement, éternelle cinquième roue du carrosse de la transposition. En témoigne le sort de la directive Oiseaux, l'hypocrisie sans limite du président Macron sur les cruelles chasses traditionnelles, au mépris du droit, de l'écologie, et des promesses faites au Congrès de l'UICN... (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) Il piétine au passage une récente décision du Conseil d'État qui annulait les autorisations de chasser les alouettes des champs, les vanneaux huppés, et autres espèces menacées.

Mais revenons au texte, dont certaines dispositions sont bienvenues.

Le renforcement des prérogatives de l'ART, la prise en compte du temps de repos des routiers, l'harmonisation des régimes de responsabilité des transporteurs aériens sont autant de bonnes mesures. Nous saluons l'article 12 sur les habitats naturels de la faune et de la flore sauvage. Il était temps car la France avait été mise en demeure par la Commission européenne.

Sur la procédure, notons que l'étude d'impact a été menée très tardivement, ce qui a compliqué le travail du Conseil d'État.

Sur le fond, les mesures sur le repos obligatoire des jeunes marins sont une régression, tout comme l'allègement des informations lors de la création d'instruments financiers.

S'il fallait légiférer sur les minerais de conflit, les avancées sont néanmoins trop timides au vu de la puissance des entreprises visées, soumises uniquement à un devoir de diligence.

La sanction des intrusions sur les pistes est renforcée de manière outrancière -  jusqu'à six mois de prison et 7 500 euros d'amende. C'est une réponse disproportionnée aux actions des manifestants écologistes, alors que le délit d'entrave à la circulation aérienne existe déjà !

Prendre le chemin de la transition écologique serait une bien meilleure idée...

Nous nous abstiendrons pour ne pas faire obstacle aux avancées réelles de ce texte.

Mme Nadège Havet .  - La présidence française de l'Union européenne sera une période clé pour l'avenir du continent. L'objectif d'aucun déficit de transposition est normal. Après avoir été longtemps lanterne rouge, nous sommes aujourd'hui parmi les champions européens en la matière.

Ce texte est utile pour nous mettre en conformité avec le droit européen dans des domaines variés. La CMP a été conclusive, c'est une bonne nouvelle.

Puisse cet état d'esprit constructif irriguer toute notre présidence au premier semestre 2022. Je salue les cinq rapporteurs des deux assemblées.

J'insisterai sur une mesure en particulier : la possibilité pour les collectivités territoriales d'émettre des obligations pour leurs projets de financement participatif. Le financement participatif, s'il est en expansion, reste peu développé par les collectivités, compte tenu des limites réglementaires. Désormais, les collectivités territoriales auront accès, à titre expérimental, aux emprunts obligataires participatifs.

La sécurisation juridique de ce mécanisme était une demande de la Cour des comptes. C'est là une avancée majeure qui permettra de fédérer la population autour de projets locaux d'intérêt général.

M. Guillaume Chevrollier .  - L'examen de ce texte aura été rapide, compte tenu des écueils qui tiennent à sa nature. Nos rapporteurs ont su en identifier les enjeux cardinaux et trouver des réponses appropriées.

S'agissant des intrusions sur les pistes, notre droit sera plus dissuasif ; l'article 10 est conforme à la position du Sénat à cet égard.

L'article 20 marque une avancée sur le repos obligatoire des jeunes marins. Notre commission l'a précisé à l'initiative de Cyril Pellevat, en introduisant un temps de pause -  malencontreusement abrogé par ordonnance en 2010. Nous avons obtenu gain de cause sur ce point aussi.

En ce qui concerne l'ART, note commission s'est montrée favorable à la consolidation de ses compétences, en vue d'une meilleure efficacité.

Nous regrettons que certaines précisions apportées par le Sénat n'aient pas été conservées, par exemple la possibilité pour l'ART de collecter des données économiques et financières ou de rendre un avis sur les projets de textes réglementaires, comme le proposait Didier Mandelli.

La Haute Assemblée a été écoutée, en revanche, sur la possibilité pour l'ART d'effectuer un suivi économique et financier des aérodromes.

Le Sénat était opposé à ce que l'ART soit chargée de l'enregistrement des prestataires du service européen de télépéage, qui ne relève pas de ses missions, mais nous n'avons pas voulu sacrifier l'accord en CMP sur ce point.

Le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Hervé Maurey .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le dernier chapitre du projet de loi, qui comportait dix articles, a été délégué à la commission des finances.

À l'initiative du Sénat, ce texte améliore considérablement l'accès des collectivités territoriales au financement participatif, aujourd'hui limité aux services culturels, éducatifs, sociaux ou solidaires. Elles pourront désormais y recourir pour tous projets hormis les missions de police ou de respect de l'ordre public.

Les personnes morales seront par ailleurs en mesure d'accorder des prêts aux collectivités locales, dans la limite d'un prêt par projet de financement participatif.

La CMP est parvenue à un compromis : une expérimentation de trois ans. Je remercie à ce titre la rapporteure de l'Assemblée nationale Aude Bono-Vandorme, pour son ouverture d'esprit.

Des collectivités volontaires pourront se porter candidates auprès des ministères des collectivités locales et des comptes publics. Les critères de sélection tiendront à la nature du projet, à son montant, à son coût de financement et à son impact environnemental. On pourra ainsi mesurer l'intérêt des collectivités pour ce mode de financement et évaluer ses risques, le Gouvernement et les députés ayant quelques craintes à ce sujet.

On voit là tout l'intérêt du travail parlementaire pour enrichir les projets de loi, y compris les plus techniques. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

La discussion générale est close.

Le projet de loi est adopté.

La séance est suspendue quelques instants.

Protéger la rémunération des agriculteurs (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, visant à protéger la rémunération des agriculteurs.

Discussion générale

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Ce sujet est crucial pour l'identité de la France. Il n'y a pas de nation forte sans une agriculture forte.

L'indépendance alimentaire, l'avenir de nos territoires ruraux, notre mode de vie dépendent de la capacité des agriculteurs à dégager des revenus.

La moitié d'entre eux partira à la retraite dans les dix ans qui viennent. La relève a besoin de savoir à quoi s'en tenir. L'agriculture n'a jamais eu à affronter autant de défis à la fois : gestion de la ressource, changement climatique, réponses aux attentes parfois contradictoires d'acheteurs citoyens le matin et consommateurs l'après-midi, le tout dans un monde ouvert où des modèles agricoles concurrents rivalisent et parfois s'opposent.

Les transitions, nécessaires, ont un coût. La valeur doit être mieux répartie au profit des agriculteurs.

Le modèle français est fondé sur la qualité. Or elle a un coût. Redonnons à l'alimentation sa valeur nutritionnelle, environnementale et économique. Ce sujet était au coeur des états généraux de l'alimentation et de la loi EGalim. Cette loi, qui était nécessaire -  personne ne demande aujourd'hui son abrogation  - n'était pas suffisante et nous devons remettre l'ouvrage sur le métier, car la rémunération des agriculteurs est la mère des batailles.

La loi EGalim n'est pourtant pas revenue sur la loi de modernisation de l'économie (LME) de 2008 qui était un texte de dérégulation de la chaîne agro-alimentaire. Cette loi confondait d'ailleurs politique sociale de pouvoir d'achat et politique économique agricole.

Les politiques sociales sont éminemment importantes mais jamais sur le dos du compte de résultat des agriculteurs. Il faut passer de la guerre des prix à la transparence des marges. Il faut sortir de ce jeu de dupes de la relation à trois dans la chaîne agro-alimentaire, à savoir agriculteurs, industriels et distributeurs. Il nous faut donc réguler avec ce texte. Certains se plaignent qu'il soit complexe. C'est normal pour une loi de régulation qui revient sur la LME.

Aujourd'hui, l'ensemble de la chaîne alimentaire creuse sa tombe ; avec la guerre des prix, les marges des industriels et de la grande distribution ne font que diminuer. Toute la chaîne agroalimentaire doit recréer de la valeur et mieux la répartir, sinon les importations ne cesseront d'augmenter.

L'État n'a d'autre choix que d'entrer dans les rapports de force. EGalim II les rééquilibre en forçant les acteurs à sortir de ce jeu de dupes.

Face à cela, cette proposition de loi prévoit des dispositifs forts de transparence et de régulation : contractualisation, non-négociabilité de la matière première, non-discrimination du tarif, détail du ligne à ligne pratiqué par la grande distribution.

Régulation ne veut pas dire administration du commerce. Il faut conforter une concurrence saine.

Le texte a été voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale. Je sais pouvoir compter sur la sagesse du Sénat quand il y va de l'avenir de notre agriculture.

Ne rognons pas sur la transparence, même s'il est difficile de changer d'habitudes. Il faut passer de la défiance à la confiance, de l'opposition à la collaboration.

En commission, vous avez proposé des mesures sur les marques de distributeurs (MDD). C'est nécessaire, et je vous en remercie. Mais il faut trouver un juste milieu entre faire cesser certains travers et trop entraver.

Ayons le courage de dénoncer les pratiques inadmissibles. Le consommateur veut savoir d'où provient son alimentation et il en a le droit.

Je compte, mesdames et messieurs les sénateurs, sur votre engagement, au bénéfice de nos agriculteurs, pour que cette loi soit opérationnelle dès les prochaines négociations commerciales.

Je sais combien l'agriculture est importante dans cet hémicycle. C'est pourquoi je ne doute pas de la qualité des débats que nous aurons ici, comme ce fut le cas en commission. Je les aborde dans un esprit très constructif (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe UC)

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure de la commission des affaires économiques   - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) La juste rémunération des agriculteurs et un sujet essentiel. Les agriculteurs nous nourrissent. Il n'est pas concevable que certains, de plus en plus nombreux, ne puissent se verser l'équivalent d'un smic. Les entrepreneurs du vivant, pour reprendre vos termes, monsieur le ministre, travaillent plus de douze heures par jour, sept jours sur sept. Beaucoup sont dans une telle précarité qu'ils vont jusqu'à l'acte ultime, comme en témoigne le rapport de nos collègues Françoise Férat et Henri Cabanel.

Les initiatives de ces dernières années ont échoué à inverser la tendance. Le texte de l'Assemblée nationale n'échappe pas à ce constat et ne corrige que partiellement les défauts de la loi EGalim I. Le ruissellement attendu n'a pas été au rendez-vous. Les acteurs de l'aval n'ont pas reversé les gains issus du seuil de revente à perte (SRP).

Venons-en à ce texte : la vente de produits agricoles devra désormais passer par des contrats écrits dont le prix sera déterminé en tenant compte d'indicateurs de référence. Il pourra fluctuer selon une clause de révision automatique du prix.

L'industriel devra afficher la part des matières premières agricoles dans le prix lorsqu'elles représentent plus de 25 % du volume du produit.

Cette proposition de loi sanctuarise la matière première agricole tout au long de la chaîne de valeur. En contrepartie de l'effort de transparence demandé aux transformateurs, aucune baisse de tarif ne pourra être exigée par la distribution sans proposer en échange des services avérés.

Mais cette proposition de loi présente des faiblesses. Elle ne vise que 20 % du revenu agricole et elle exclut les MDD. En outre, elle ne traite pas des charges croissantes qui impactent le revenu des agriculteurs. Elle propose un schéma d'une grande complexité. Elle fragilise le maillon transformateur industriel, contraint à dévoiler toute sa marge à la grande distribution. Enfin, elle porte préjudice à la médiation à l'amiable.

Notre commission a simplifié le mécanisme de transparence pour le rendre plus lisible pour le consommateur et plus impactant sur le revenu des agriculteurs. Elle a rééquilibré le rapport de force entre acteurs des négociations commerciales, encadré les MDD, précisé les pénalités logistiques et renforcé le rôle du médiateur.

Nous avons simplifié les dispositifs de transparence et élargi le périmètre à toutes les matières premières agricoles.

Ainsi, dans un yaourt à la fraise à 1 euro, il faudra afficher les matières premières agricoles à 80 centimes et la négociation ne pourra pas porter sur ce montant.

Nous avons écarté l'accès à la comptabilité de l'industriel tout comme le seuil des 25 %, inéquitable et préjudiciable à l'objectif de meilleure rémunération des agriculteurs.

La commission a adopté un encadrement des produits vendus sous MDD, qui étaient exemptés jusqu'à aujourd'hui d'indicateurs et de clauses automatiques de révision des prix. Nous avons renforcé les pouvoirs du médiateur agricole qui pourra être arbitre si les deux parties en conviennent.

La commission a souhaité que le Gouvernement puisse faire la transparence totale sur le montant et l'usage fait par les distributeurs de la cagnotte issue du relèvement du seuil de revente à perte, encaissé depuis février 2019.

Sur l'affichage de l'origine des denrées, la commission privilégie l'efficacité aux déclarations d'intention. Le Sénat ne doit pas voter de dispositions clairement contraires au droit européen, comme l'article 3 bis de la proposition de loi. Afin d'être concret et rapide dans la réponse aux abus d'étiquetage, la commission privilégie la transcription du droit européen.

L'origine du porc espagnol transformé en France devra être affichée. Toutefois, le Parlement européen devra revenir sur ce dossier pour répondre aux attentes des consommateurs.

Nous espérons redonner de la valeur au produit et une rémunération plus juste à l'agriculteur. Le sujet n'est pas épuisé et cette proposition de loi ne constitue qu'une étape dans la nécessaire régulation des relations commerciales. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Fabien Gay .  - L'agriculture répond au besoin essentiel de se nourrir mais elle est aussi une activité fondatrice de la vie humaine en société. C'est pourquoi le choix a longtemps été fait de fixer des prix minimaux pour protéger les producteurs et des prix maximaux pour protéger les consommateurs. La spécificité de l'agriculture était à cette époque reconnue.

Depuis la libéralisation de ce secteur, la crise agricole est devenue structurelle.

On nous avait promis pour les agriculteurs de bonnes rémunérations sans mécanisme de stabilisation du marché, mais c'est tout le contraire qui s'est produit ! Une grande partie des agriculteurs ne parvient pas à vivre de son travail.

La grande distribution et l'industrie agroalimentaire se sont organisées en véritable cartel. La crise est la résultante de la liberté de fixation des prix accordée à une poignée de centrales d'achats et d'enseignes de la grande distribution.

Cette dernière est la seule à avoir profité des centaines de millions d'euros de la loi EGalim I. Vous le reconnaissez vous-même, monsieur le ministre. (M. le ministre opine du chef.)

Les filières agricoles sont devenues des « chaînes de subordination » dans lesquelles l'exploitant agricole n'est plus qu'un « sous-traitant », pour reprendre les mots de Fernand Braudel.

Dès 2009, nous avions déposé une proposition de loi pour un droit au revenu des agriculteurs. Cela fait des années que nous demandons des indicateurs de prix publics et contraignants. Il faut également des prix planchers. Nous avions dit dès EGalim I que ce texte ne produirait pas les effets escomptés, car il restait enfermé dans la doxa de la LME.

Le constat est implacable : les coûts de production augmentent, mais les prix payés aux producteurs diminuent et le revenu paysan continue de se dégrader au profit des grands groupes de l'agro-industrie et de la distribution.

Ce texte n'y changera rien, même si nous pouvons nous réjouir de la création d'un comité de règlement des différends commerciaux agricoles et de la sortie du prix des matières premières agricoles du cadre de la négociation tarifaire entre industriels et distributeurs, mais ce n'est pas suffisant.

Il faut s'attaquer à la concentration toujours plus importante de la grande distribution et de l'industrie agro-alimentaire.

Il faut surtout renoncer aux traités de libre-échange internationaux, compte tenu de la spécificité du secteur agricole.

La rupture avec la logique libérale est urgente. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Franck Montaugé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous avions dit lors du débat d'EGalim I que ce texte ne résoudrait rien. Pire encore, certaines filières, comme la filière gras, en ont souffert. Il n'y a eu aucun ruissellement de valeur de l'aval vers l'amont. C'est un échec total.

Avec ce nouveau texte, le problème reste entier. Notre respect pour les agriculteurs nous oblige à leur dire la vérité : malgré l'extension du dispositif aux MDD, l'article premier ne concerne qu'une petite part de la production française et n'augmentera pas la rémunération des exploitants.

On pourrait même penser que l'objectif premier de ce texte est d'enjamber la période électorale à venir. Que de désillusions en perspective !

Depuis la LME de 2008, qui pose le principe de la libre négociation des prix, la grande distribution est sortie gagnante de ce rapport de force.

Un grand texte qui rende notre agriculture plus forte, plus résiliente et plus souveraine est nécessaire et urgent. Les importations augmentent, les exportations hors vins et spiritueux s'affaissent. Où va-t-on ? Quelle est notre ambition en matière de souveraineté alimentaire et de reconnaissance des producteurs français ?

Peut-on en rester là, à laisser faire des mécanismes darwiniens de sélection, qui ne prévoient pour les petits que de passer la main ?

Malgré les apports du Sénat, les effets d'EGalim II ne seront pas à la hauteur des enjeux pour beaucoup trop d'agriculteurs. Qu'envisagez-vous de faire pour soutenir le revenu agricole ? Le Gouvernement envisage-t-il une LME agricole ?

On ne peut pas ne pas citer la PAC dont l'impact sur notre agriculture est majeur. Le 4 mai dernier, les sénateurs socialistes vous demandaient des détails sur le Plan stratégique national (PSN) en cours de rédaction.

Nous disions la nécessité d'une PAC plus verte, plus juste, plus résiliente, malgré son recul en euros constants. Tous les leviers doivent être activés pour répondre aux attentes des agriculteurs. C'est à l'aune de l'efficacité que nous pourrons juger de cette loi bien trop modeste.

Nous avons toutefois joué le jeu, et j'espère que nos propositions constructives seront entendues. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Stéphane Ravier .  - Un tiers des agriculteurs français gagne 350 euros par mois ; c'est la moitié de l'allocation pour demandeur d'asile, le tiers du RSA. On déplore un suicide par jour. Au rythme des départs à la retraite, les champs français seront bientôt silencieux.

La loi EGalim de 2018 n'a pas enrayé la baisse des rémunérations malgré une augmentation constante des prix en supermarché. Comment, dès lors, donner envie à notre jeunesse de reprendre une ferme ?

Depuis des décennies, l'agriculture familiale a été sacrifiée au profit des industriels. Nous devons pourtant protéger ceux qui nous nourrissent. Je voterai donc ce texte, quel que soit son format.

Je soutiens la nécessité d'inscrire l'origine des produits et même d'aller plus loin en sanctionnant l'usage abusif du drapeau français sur les produits non-nationaux. Ce serait contraire au droit européen en matière d'étiquetage, dit M. le ministre ? En préférant vos utopies européistes, vous détruisez la réalité de la paysannerie française !

Nous avons beau légiférer ici, il n'y a aujourd'hui qu'une seule politique agricole, c'est la PAAC, la politique anti-agricole commune qui perfuse nos paysans devenus dépendants de leurs bourreaux ! Ils font le maximum pour proposer des produits de qualité, mais la concurrence déloyale des maxi-élevages néerlandais, allemands ou polonais ne peut être combattue.

Je vous soutiens, Monsieur le ministre, dans votre combat contre l'écologie de l'injonction qui fait des agriculteurs des pollueurs.

La dernière étude du Centre commun de recherche de la Commission européenne prévoit des conséquences catastrophiques au Pacte vert européen : diminution de la production, augmentation des prix, baisse des revenus, perte de souveraineté alimentaire. Ce pacte, voulu par des talibans verdoyants, met à mal toutes les avancées de ce texte. (Protestations)

N'oublions pas qu'il ne saurait y avoir de pays sans paysans, et que de l'avenir de la paysannerie française dépend l'avenir de la France.

Mme Cécile Cukierman.  - Eh bien...

M. Daniel Gremillet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre, vous avez raison de rappeler que 50 % des agriculteurs partiront à la retraite d'ici dix ans.

Le BA-BA de l'économie m'a été inculqué dans mon lycée agricole public : le revenu, c'est la différence entre la colonne recettes et la colonne dépenses. Or ce texte ne s'attache qu'à la première, alors qu'il faut agir sur les deux. Cela m'attriste.

Les indicateurs de prix ne sont que le reflet du passé. Pour le lait, ils sont en complète déconnexion avec la réalité, en raison d'une hausse des coûts -  8 %  - plus forte que celle des recettes -  4,2 %  - depuis le début de l'année 2021.

Il y a quelques années, un syndicat agricole a été condamné à verser des millions car il avait osé prétendre qu'une vache ne saurait être vendue en dessous d'une certaine somme.

Je suis triste que nous ne puissions légiférer sur la deuxième colonne -  ce n'est pas faute d'avoir fait des propositions en matière de financements ou d'allègement des charges.

En 2016, nous avons voté ici la loi EGalim et installé un comité de suivi, dont je salue le travail.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Daniel Gremillet.  - Je souhaite vivement me tromper dans l'analyse que je porte sur ce texte.

Je veux surtout que nous gardions nos parts de marché car 30 % des achats alimentaires des Français proviennent déjà de l'étranger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Les effets espérés de la loi EGalim se font attendre : l'équilibre des relations commerciales n'est pas atteint, mais la déflation se poursuit et le revenu agricole avant impôt a baissé de 2,5 % depuis 2019.

Le renouvellement des générations doit nous mobiliser. La crise nous rappelle le caractère fondamental de notre souveraineté alimentaire et le rôle de chacun des maillons de la chaîne agroalimentaire.

Rémunérer notre agriculture, c'est préserver notre souveraineté alimentaire et garantir notre indépendance.

Il n'y a pas que la loi EGalim : nous devrions aussi nous attacher à corriger la LME qui a déstabilisé le secteur agricole au profit de la grande distribution.

Ce texte comporte des avancées : je pense notamment au format écrit du contrat de vente, à la pluri-annualité du contrat et aux clauses de révision. Cela devrait apporter plus de lisibilité et de transparence. L'encadrement des MDD est aussi une bonne chose.

La non-négociabilité des matières premières agricoles doit être assortie d'une garantie pour que les industries agro-alimentaires et les transformateurs ne soient pas une nouvelle variable d'ajustement.

Nous avons déposé un amendement à l'article 2 pour cibler les produits alimentaires et prévoir une renégociation en fonction de l'évolution des coûts.

À l'article 3 bis, nous apportons plus de souplesse à la sanction contre l'affichage frauduleux, concernant les fabrications ne pouvant avoir lieu en France. Cette nouvelle rédaction nous semble nécessaire et équilibrée.

Le revenu agricole ne dépend pas que du prix de vente, mais aussi de la PAC et des charges, que les lois EGalim et Énergie-Climat ont accrues.

Le groupe INDEP souhaite l'adoption de ce texte, pour les entrepreneurs du vivant. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Joël Labbé .  - Comment accepter que celles et ceux qui nous nourrissent perçoivent un revenu qui ne couvre même pas leurs coûts de production ?

C'est toute notre agriculture qui est menacée. Comment espérer un renouvellement des générations, mettre en oeuvre la nécessaire transition agro-écologique, sans revenus ?

La viabilité et la durabilité de notre agriculture est liée au revenu agricole.

L'alerte a été lancée il y a longtemps : nous vous avions prévenu de l'échec probable d'EGalim I, compte tenu de son caractère trop peu contraignant -  que tout le monde reconnaît désormais.

Ce texte n'aura pas plus de succès, malgré des avancées, comme la non-négociabilité des prix agricoles, l'expérimentation d'un tunnel de prix ou la création d'un rémunérascore.

Le texte comporte aussi des reculs, notamment sur l'affichage de l'origine des produits. Certes le droit européen nous contraint, mais nous devons trouver des moyens de garantir la transparence pour le consommateur. Tant que les grandes surfaces pourront se servir à l'étranger, elles garderont la main.

L'urgence est à la relocalisation et à la régulation. Nous serons attentifs à la question des clauses miroirs que vous avez promis de porter, Monsieur le ministre.

L'alimentation de qualité doit être accessible à toutes et tous. Cela passe par une rémunération des services environnementaux rendus par l'agriculture -  hélas absente du PSN.

Il faut mettre fin à la surmarge de la grande distribution sur les produits bio, dénoncée par UFC-Que choisir.

Nous devons également mettre en oeuvre rapidement le chèque alimentaire durable avant une véritable sécurité sociale alimentaire qui garantisse aussi des revenus décents aux agriculteurs.

Le groupe GEST votera ce texte, mais avec beaucoup de réserves. (Mme Sophie Primas, présidente de la commission, s'amuse)

Mme Patricia Schillinger .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ce texte est très attendu par le monde agricole ; il va dans le sens de l'objectif fixé par le Président de la République : permettre à chacun de vivre de son travail. Or, le revenu des agriculteurs ne reflète souvent pas les efforts et le travail qu'ils fournissent au quotidien. Il faut donc leur garantir un revenu décent.

Au cours des négociations commerciales, les agriculteurs sont trop souvent le maillon faible de la chaîne.

La loi EGalim aurait fourni des outils efficaces s'ils avaient été utilisés. Il faut désormais aller plus loin.

Cette proposition de loi sanctuarise les coûts de production afin de garantir un prix rémunérateur aux agriculteurs.

Les débats en commission ont donné lieu à quelques crispations, car l'équilibre trouvé à l'Assemblée nationale nous semble avoir été rompu.

La suppression du seuil de 25 % par la commission, à l'article 2, est regrettable. Il permettait de donner la priorité aux produits agricoles face à des produits transformés. Nous défendrons ce seuil.

L'article 3 a substitué le recours du comité de règlement des différends commerciaux à la saisine du juge. Cela pose un problème de lisibilité du droit.

La commission est revenue sur l'interdiction des pratiques trompeuses en matière d'indication du pays d'origine sur les produits alimentaires, malgré la demande des agriculteurs. Certes, il ne faut pas pénaliser les fabricants qui recourent parfois à des produits agricoles qu'on ne trouve qu'à l'étranger. Précisons les exceptions à l'interdiction plutôt que de la supprimer.

Ce texte mérite d'être modifié en séance. Les agriculteurs comptent sur notre esprit de conciliation et sur notre pragmatisme. L'Assemblée nationale a adopté cette proposition de loi à l'unanimité. Nous espérons que le texte évoluera pour être tourné vers nos agriculteurs. Faute d'évolution notable en séance, le groupe RDPI s'abstiendra. (Mme Marie Evrard applaudit.)

M. Henri Cabanel .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) « Notre travail n'est pas rémunéré à sa juste valeur. Comment en serait-il autrement quand les prix stagnent depuis trente ans, alors que les charges s'envolent ? La plupart d'entre nous vendent à perte. » Ainsi s'exprimait un éleveur courageux devant la mission que j'ai menée avec Françoise Férat sur la détresse agricole.

Les agriculteurs demandent un partage décent de la valeur. Hélas, malgré EGalim, le compte n'y est pas : 20 % des agriculteurs n'ont aucun revenu. J'ai cru à l'objectif des États généraux de l'alimentation (EGA) de partage des revenus et à la méthode consistant à mettre tout le monde autour de la table, et je regrette son abandon. Il aurait fallu maintenir une relation entre toutes les parties prenantes. Ainsi, nous aurions su qui ne respecte pas ses engagements.

Les agriculteurs producteurs sont les seuls, dans un marché libéral, à ne pas fixer leurs prix. La faute à la grande distribution. Quand les matières premières augmentent de 30 %, les victimes sont les agriculteurs, otages des centrales d'achat.

Ils sont également les victimes des catastrophes naturelles. Lors de la gelée noire du 8 avril, le paysan a pleuré deux fois : en avril, mais aussi au moment de la récolte.

Beaucoup pensent : toute cette peine pour rien... Et nous cherchons encore quelle loi leur permettrait de vivre mieux. Nous avons besoin de vraies mesures coercitives.

La LME a lancé la guerre des prix, a permis la concentration des coopératives d'achat et resserré l'étau autour des agriculteurs. Il est temps d'en mesurer les conséquences. Alors que la moyenne d'âge des agriculteurs est de 55 ans, comment leur donner envie de s'installer sans vision partagée?

Ce texte comporte des avancées comme la non-négociation des matières premières, mais elles seront insuffisantes faute de révision de la LME, à l'heure où se développe le e-commerce. La part de marché d'Amazon atteint 8 % et ne cesse d'augmenter. N'avons-nous pas un train de retard ?

Le RDSE votera ce texte, même si nous craignons des difficultés d'application. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC)

M. Pierre Louault .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) L'agriculture française connaît une situation alarmante, alors que 20 % des agriculteurs enregistrent un déficit d'exploitation. Il nous faut réagir.

Les raisons de cette situation sont multiples, notamment la pression à la baisse sur les prix, avec répercussions en chaîne. À cela s'ajoute une conjoncture mondiale ; Chicago fait la pluie et le beau temps, sans tenir compte de la qualité des produits. La France a fait le choix de la qualité, mais celle-ci a son prix.

Les négociations commerciales se font au détriment des agriculteurs, preneurs de prix, jusqu'à peser sur leur viabilité économique et leur moral. Qui voudrait être paysan, alors qu'ils n'arrivent plus à vivre et sont critiqués ?

La loi EGalim n'a hélas pas fonctionné, d'où ce nouveau texte pour tenter de renouer le lien de confiance entre producteurs, consommateurs et distributeurs, même si les règlements européens nous empêchent d'aller aussi loin que nous le souhaiterions.

Cette proposition de loi reprend plusieurs propositions du rapport de Serge Papin au ministre l'agriculture sur les relations commerciales et de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, notamment sur la pluriannualité des contrats et le règlement des différends commerciaux.

L'article premier rend obligatoires les contrats pluriannuels. C'est une bonne chose, mais certains critères préexistants dans certaines filières, comme la pomme de terre, ne sont pas retenus, ce qui inquiète les producteurs.

L'article 2 impose un mécanisme de transparence à l'ensemble des matières premières agricoles. L'article 2 bis, relatif à l'affichage, informera le consommateur sur le coût des matières premières, depuis trop longtemps tiré à la baisse.

L'article 3 devra être précisé. N'est-il pas préférable d'encadrer l'utilisation du drapeau français plutôt que de la limiter ?

Une partie de la production - majoritaire - ne sera pas concernée par le texte. Je pense notamment à la restauration hors foyer, où le prix des matières premières d'un repas est inférieur à deux euros. Souvent, les produits français ne sont pas compétitifs en raison du faible coût des matières premières venues de l'étranger.

L'agriculture française fonctionne à deux vitesses. Celle qui est performante sur les prix est moins vertueuse car elle utilise des matières premières provenant d'autres pays.

Il faut répondre à la baisse de compétitivité et à l'effondrement de la balance commerciale ; payer les produits agricoles à leur juste valeur et accepter de régler le prix de la qualité. (M. le ministre approuve.) Les consommateurs français y sont-ils prêts ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP)

M. Serge Mérillou .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Presque trois ans après l'adoption de la loi EGalim, le constat est partagé et clair : les objectifs ne sont pas atteints pour les 400 000 agriculteurs français qui travaillent au quotidien pour garantir notre autonomie alimentaire et produire des denrées de qualité qui font la fierté de nos territoires. La France demeure le premier producteur agricole en Europe. La moitié de l'Hexagone est couverte de surfaces agricoles. C'est un enjeu économique et d'aménagement du territoire.

Pourtant, l'heure est grave : la concurrence et la guerre des prix font la loi, au détriment des agriculteurs, dont le nombre baisse.

Ce texte, adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale, va dans le bon sens, mais suffira-t-il pour répondre aux enjeux ? Ou restera-t-il sans lendemain, une fois la période électorale passée ?

Malgré la contractualisation obligatoire, les prix de la viande bovine Label rouge sont inférieurs aux indicateurs de coûts de production calculés par l'interprofession. Nous proposerons de mieux prendre en compte les coûts de production et celui de la main-d'oeuvre.

Nous devons protéger les agriculteurs, et plafonner le taux de services pour correspondre à la réalité de ceux-ci. Il faut résoudre le problème des pénalités imposées pour la grande distribution comme celui de l'affichage trompeur. La transparence doit être une priorité.

Nous voulons rétablir l'esprit de l'article 3 bis, et refuser les pratiques commerciales trompeuses sur l'origine des denrées alimentaires.

La politique des petits pas a assez duré. L'heure est venue d'une réforme d'ampleur pour préserver notre agriculture et notre souveraineté alimentaire.

Vos objectifs sur le partage de la valeur sont louables, monsieur le ministre, mais ce texte n'est pas à la hauteur de votre ambition. Il faut défendre notre souveraineté alimentaire et prendre en compte les nouvelles réalités. Nous craignons que ce texte ne soit un coup pour - presque - rien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Laurent Duplomb .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La rémunération des agriculteurs est un vaste sujet. Pourquoi une loi EGalim II ? Parce que EGalim I n'a pas fonctionné, malgré la revalorisation de 10 % du SRP. Le ruissellement n'est jamais arrivé jusqu'aux revenus des agriculteurs... Voilà la vérité !

Vos prédécesseurs auraient dû écouter le Sénat. Où sont passés les 2 milliards d'euros liés à la revalorisation du SRP -  2 % du chiffre d'affaires de l'alimentation selon l'Insee  - et à la baisse de 0,3 % du prix des produits ? Dans la poche de la grande distribution, parfois un peu redistribués aux consommateurs ! Il nous faudra les récupérer.

Le revenu, c'est le produit moins les charges. Or la loi Egalim n'en prend en compte qu'une partie. Rien sur les marques de distributeurs, la restauration hors foyer, les exportations, les charges - la main-d'oeuvre coûte une fois et demi plus chère en France qu'en Allemagne, et EGalim I a interdit les remises, rabais et ristournes sur les produits phytosanitaires -  rien sur la séparation du conseil et de la vente... Nous rajoutons sans cesse normes et réglementations.

Ce texte est insuffisant, mais nous allons vous aider...

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Laurent Duplomb.  - Certaines filières, comme les fruits et légumes frais et les bananes, ne doivent plus appliquer l'augmentation de 10 % du SRP. Pour améliorer le revenu, il faut lutter contre les pratiques malsaines de la grande distribution.

Monsieur le ministre, nous allons vous aider, car nous y croyons encore. Mais à force de toujours y croire, on finit par perdre véritablement le sens de la boussole. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques travées des groupes UC et INDEP)

M. Jean-Marc Boyer .  - On parle beaucoup de maltraitance animale, mais quid de la maltraitance de nos agriculteurs ? (M. Rémy Pointereau et Mme Brigitte Micouleau acquiescent.) Nous ne devons pas nous payer de mots, mais leur offrir les moyens de vivre dans la dignité.

Dans le Massif central, qui concentre 56 % de notre production bovine, de grande qualité, les revenus sont inférieurs au smic, soit moins de 14 600 euros annuels. En lait AOP, un tiers des producteurs n'atteignent pas le smic ; le prix du lait a baissé de 20 % en dix ans, tandis que les charges augmentent.

Ne passons pas de l'effet ciseau à l'étau. Dans ces conditions, comment motiver des vocations ?

Bien sûr, ce texte tente de sécuriser la part agricole dans le tarif du fournisseur et d'améliorer le revenu des agriculteurs en rééquilibrant le rapport de force à leur profit. La commission des affaires économiques l'a amélioré, mais les difficultés persistent. Évaluer le coût des matières premières agricoles ne permet pas de maîtriser les charges et les dépenses. Ces dispositions ne vont-elles pas également entraîner une augmentation du prix du produit, qui sera répercutée sur le consommateur ?

Les aléas climatiques ne sont pas pris en compte, non plus que la multiplication des normes, à l'instar du Nutri-Score, qui ne tient aucun compte des indications géographiques : A pour un Coca light, D pour un Saint-Nectaire ! Revoyons sa méthodologie. N'abandonnons pas nos agriculteurs ; nous ne pouvons plus nous permettre de les décevoir.

Comme disait Franklin Roosevelt, « les gagnants trouvent des moyens, les perdants des excuses ». Ne faisons pas un mauvais remake d'EGalim I ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean Bacci .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est indispensable de corriger les incomplétudes d'EGalim, en particulier pour formaliser les contrats -  qui sont des combats, les agriculteurs nous le disent.

Il serait naïf de croire que les contrats pluriannuels sont suffisants. Il faut accompagner les agriculteurs dans ces négociations de David contre Goliath ; le diable se cache dans les détails. Nous devons légiférer pour aboutir à un outil normalisé associant souplesse de la négociation et composantes obligatoires. Le comité de règlement des différends doit être doté d'un arsenal de sanctions suffisamment solides.

La médiation résout rarement les problèmes. Il faut instaurer la transparence et mettre fin à des pratiques obsolètes. L'affichage doit être plus lisible et la tromperie du consommateur ne doit plus être tolérée. L'introduction de 2 % d'huile de lin dans l'alimentation porcine ne fait pas de la charcuterie un produit riche en oméga 3, et afficher un drapeau bleu-blanc-rouge ne certifie pas l'origine française !

Changeons de regard, et permettons aux Français de faire des choix éclairés. Les loups de la grande distribution doivent entrer dans une dynamique vertueuse, et il faut mettre fin au subterfuge des marques de distributeurs.

Informons les consommateurs sur l'origine des produits. Si les agneaux néo-zélandais partent en croisière, l'agneau local n'est parfois que de passage dans nos pâturages et prend le camion... Les consommateurs sont capables de faire le choix de la proximité et de la qualité, contribuant ainsi à notre souveraineté alimentaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Julien Denormandie, ministre.  - La LME de 2008 était, elle, un objet politique. Elle visait ouvertement à déréguler le secteur, au nom du pouvoir d'achat. Cela s'est fait sur le dos des agriculteurs et l'on voit désormais les conséquences de cette terrible erreur.

Nous avons fait une loi anti-LME à cet égard. La loi LME avait balayé la loi Galland de 1996, fondatrice pour la régulation, et qui évitait, comme dans la théorie des jeux, de négocier à la baisse. L'article 3 de la loi EGalim II a rétabli la non-discrimination des tarifs.

La LME a aussi permis à la grande distribution d'imposer des réductions sans justification, sous prétexte de services - ou « marges arrières ». Le ligne à ligne que nous avons introduit a rétabli une régulation salutaire.

Ne racontons pas de carabistouilles au monde agricole, qui en a horreur. La loi EGalim II ne pourra pas tout. Il existe des charges inhérentes, sur les intrants ou le droit du travail. Ayons une vision « compte de résultats », y compris lorsque nous instaurons de nouvelles normes. (On en doute à gauche.) Oui, les normes induisent des charges ; il faut avoir le courage de le dire.

Sur les coûts de personnel ou les intrants, la concurrence déloyale est réelle. C'est pourquoi nous avons obtenu que la PAC ait un volet social -  malheureusement, il n'entrera en vigueur qu'en 2023.

Président du conseil des ministres de l'agriculture de l'Union à partir de janvier 2022, je n'aurai qu'une priorité : la réciprocité. Il faut des clauses miroirs.

L'avantage comparatif ricardien, qui prévaut depuis 1945, a oublié qu'il ne fallait pas détruire l'environnement !

M. Fabien Gay.  - C'est tout le libéralisme qu'il faut remettre en cause.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Non. Le donneur d'ordres, c'est le consommateur. Parfois, on est citoyen de bon matin, mais consommateur passé le quart d'heure, qui compare les prix de tel ou tel produit...

Personne ne le dit : on ne paie pas l'alimentation assez cher.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques.  - Si !

M. Julien Denormandie, ministre.  - Il faut assumer qu'une alimentation de qualité a un coût -  nutritionnel, environnemental et économique. Les grands donneurs d'ordres publics, comme l'administration ou les collectivités, doivent changer. Ce sont des choix politiques. Dans certains territoires d'élevage, la viande distribuée dans les cantines scolaires provient à 50 % de l'étranger...

On ne devrait pas non plus parler de repas à un euro mais de repas dont le reste à charge est à un euro. C'est très différent. (Mme Françoise Gatel et M. Fabien Gay approuvent.)

Je continuerai à me battre, dans un état d'esprit loi Galland et surtout pas LME. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes RDSE et UC)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l'opportunité de mener une réforme d'ampleur de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie au regard de l'impérieuse nécessité de redonner aux agriculteurs un cadre législatif leur permettant de pouvoir vivre dignement de leur métier. Ce rapport analyse les principaux freins s'imposant au monde agricole et découlant de cette loi cadre dont l'orientation a profondément déséquilibré les rapports de force entre les différents acteurs de la chaine de production, de transformation et de distribution.

M. Franck Montaugé.  - La loi EGalim I n'a pas eu les effets escomptés. Le temps des demi-mesures est révolu. Il faut inverser les rapports de force dans les relations commerciales agricoles.

Depuis 2008, des aménagements ont certes été opérés, avec la loi relative à la consommation, la loi d'avenir pour l'agriculture ou encore les deux lois EGalim. Mais la logique libérale qui a guidé la loi LME demeure prépondérante.

Cet amendement d'appel demande un rapport pour identifier les freins qui s'imposent au secteur agricole et déterminer les enjeux de la réforme d'ampleur dont nous avons besoin.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Je comprends votre souci d'analyser les blocages dans les relations commerciales. La proposition de loi met fin à la libre négociation des tarifs prévue par la LME - il faudra des contreparties réelles aux demandes de réduction de prix. Sagesse.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Les enjeux sont bien connus. Retrait ou avis défavorable.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°23, mis aux voix par assis et levé, est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE)

ARTICLE PREMIER

Mme Laurence Muller-Bronn .  - Je salue cette opportunité de renforcer EGalim pour assurer des prix plus justes. Jusqu'ici, la juste répartition de la valeur était un voeu pieux.

La place de nos PME transformatrices dans la chaîne de valeur est essentielle. Les PME représentent 98 % des entreprises agroalimentaires et privilégient les circuits courts.

Je me félicite que la commission ait adopté ma proposition de simplification de la facturation des fournisseurs. Toutefois, une inquiétude demeure sur la répercussion par les distributeurs du coût de transformation des produits sur les tarifs de vente. Les PME craignent d'être prises en étau, avec la non-négociabilité du prix des matières premières. Or il est essentiel que nos PME restent compétitives. Leurs produits ne doivent pas disparaître des linéaires au profit de ceux des multinationales.

C'est pourquoi j'ai redéposé un amendement à l'article 2 bis D afin d'intégrer durablement les transformateurs de l'agroalimentaire dans les négociations, comme nous le faisons avec les producteurs agricoles.

M. Fabien Gay .  - Nous avions proposé une exception agricole, sur le modèle de l'exception culturelle, mais notre amendement a été déclaré irrecevable.

Il n'y aura pas de revenu décent tant que l'agriculture sera banalisée. Les nouveaux traités bilatéraux font courir des risques sociaux et environnementaux. L'alimentation est un besoin humain, et notre souveraineté alimentaire ne doit pas être une monnaie d'échange. Nous attendons toujours la date de ratification du CETA, monsieur le ministre... Dans le Mercosur, tout le bétail est nourri aux OGM et le glyphosate est autorisé ! On pourrait parler aussi de l'accord avec la Nouvelle-Zélande et l'Australie. Notre rapporteure avait regretté, lors de la loi Egalim I, que l'agriculture soit une variable d'ajustement. Le ministre de l'époque avait répondu comme vous en évoquant les clauses miroirs... Instaurons une exception agricole en faveur d'une agriculture paysanne de qualité !

M. Guillaume Chevrollier .  - Nos filières agricoles doivent redevenir une force économique. En 2017, les États généraux de l'alimentation ont créé l'espoir d'une rémunération plus juste. La loi EGalim n'a pas apporté de résultats concluants. Les agriculteurs attendent des solutions concrètes et pérennes. Ce texte est l'occasion de progresser vers des prix plus justes, grâce à une contractualisation obligatoire et pluriannuelle.

Nous serons vigilants sur son application. Il faut faire confiance aux agriculteurs et préserver la diversité des agricultures.

Mme Cécile Cukierman .  - Dans son discours de Rungis, il y a quatre ans, le Président de la République avait posé la question de la formation des prix et de la protection sanitaire. Nous débattons aujourd'hui de la loi EGalim II, parce que la réflexion n'est jamais allée à son terme.

Nous devons construire des prix réellement protecteurs en évitant une fracture sociale alimentaire. Il ne faut pas compter sur la main invisible - elle ne protège jamais les plus faibles, producteurs ou consommateurs !

Répondons à cette question en toute transparence pour que nos agriculteurs aient la maîtrise de leurs prix et un travail rémunérateur. Ce n'est pas qu'une question de publicité dans les supermarchés.

M. le président.  - Amendement n°64 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Charon, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Joseph, M. Grosperrin, Mme Deromedi et MM. Bouchet et Sido.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Avant l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 631-24 A ainsi rédigé :

« Art. L. 631-24 A.  -  L'index des prix agricoles et alimentaires est publié mensuellement par l'Institut national de la statistique et des études économiques. Il tient notamment compte de l'évolution des matières premières agricoles et non agricoles, des coûts de l'énergie, des coûts salariaux et des coûts résultant de la gestion d'une situation d'urgence sanitaire ou d'une catastrophe naturelle.

« Un décret détermine les conditions d'application du présent article. » ;

II.  -  Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots et deux phrases ainsi rédigées :

, sur la base de l'index des prix agricoles et alimentaires mentionné à l'article L. 631-24 A. Une variation importante de cet index entraîne une renégociation du prix entre distributeurs et fournisseurs. Un tiers de confiance privé, désigné par les industriels et la grande distribution, s'assure que, en cas d'évolution favorable du prix entraînant une plus forte rémunération des industriels, cette évolution soit prise en compte dans les contrats de vente de produits agricoles.

M. Gilbert Bouchet.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, MM. Cuypers et D. Laurent, Mmes Noël et Ventalon, MM. Darnaud, Chatillon, Laménie et Burgoa, Mmes L. Darcos et Gruny, M. Daubresse, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bacci et Hugonet, Mme Belrhiti, MM. Guerriau et Savin, Mme Puissat, MM. E. Blanc, Vogel, J.B. Blanc, Bascher et Chaize, Mme Richer, M. Bouchet, Mmes Lassarade et Imbert, MM. Grosperrin et Charon, Mmes Dumont et Bourrat, MM. Anglars et Grand, Mmes Schalck et Deromedi, MM. Piednoir, Détraigne, Menonville, Chasseing, Hingray, Belin et Chauvet, Mme Demas, M. Babary, Mme Micouleau et MM. Sido, B. Fournier et Savary.

I.  -  Alinéa 12

Supprimer les mots :

, parmi lesquels la pondération des indicateurs mentionnés au quinzième alinéa du présent III

II.  -  Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

M. Laurent Duplomb.  - La pondération des indicateurs ne doit pas s'appliquer aux coopératives. En effet, une coopérative ne peut pas prévoir une production excédentaire, or elle a l'obligation de la collecter.

À chaque fois qu'on a eu besoin d'une ambulance pour faire face à un problème -  la disparition d'Entremont, par exemple, ou l'affaire Sud Lait  - ce sont les coopératives qui ont rempli ce rôle.

Si vous me confirmez, monsieur le ministre, que les coopératives ne sont bien réglementées que par l'ordonnance de 2019 et que l'article 1er ne s'applique pas à elles, je retire mon amendement.

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

et tenant compte du fait que ce prix ne peut pas être inférieur au coût de production. Celui-ci peut être déterminé à l'appui des indicateurs de référence de coûts pertinents de production en agriculture tels que mentionnés à l'avant-dernier alinéa du III du présent article.

Mme Florence Blatrix Contat.  - Tant que la couverture des coûts de production des agriculteurs ne sera pas garantie dans les négociations commerciales, le revenu ne pourra pas l'être non plus : c'est le principal écueil de cette proposition de loi.

Dans le secteur de la viande bovine Label rouge, par exemple, où la contractualisation a été rendue obligatoire, les prix pratiqués restent en-deçà des indicateurs de coûts de production calculés par l'interprofession.

La couverture des coûts de production est donc indispensable. Nous ne proposons pas une économie administrée, mais un dispositif plus ambitieux pour assurer l'efficacité de ce texte.

M. le président.  - Amendement n°55 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée : , tenant compte du fait que ce prix ne peut pas être inférieur au coût de production. Celui-ci peut être déterminé à l'appui des indicateurs de référence de coûts pertinents de production en agriculture tels que mentionnés au quinzième alinéa du présent III.

Mme Cécile Cukierman.  - Si l'objectif est d'augmenter le revenu des agriculteurs, il faut prendre en compte plusieurs éléments. Une politique protectionniste -  j'assume cette position  - serait un gage d'augmentation des revenus. Nous devons prendre en compte les coûts de production réels dans la construction du prix : ce n'est pas à l'industriel d'imposer, en aval, son estimation !

On ne s'en sortira qu'en partant de la base, c'est-à-dire de ceux qui savent vraiment le coût réel de production.

Quand le législateur, à tort ou à raison, impose des normes et des contraintes sanitaires qui renchérissent les coûts de production, il faut en tenir compte. L'addition des coûts est une réalité.

M. le président.  - Amendement identique n°85, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - Il s'agit de garantir que le prix fixé par le contrat couvre au moins les coûts de production de l'agriculteur, ce qui institue une forme de revenu minimal agricole, tout en préservant la liberté des deux parties à négocier le prix de contrat. Les coopératives seraient incluses.

Peut-on admettre qu'au nom de la concurrence, on paye à l'agriculteur un prix qui ne couvre pas ses coûts de production ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'amendement n°64 rectifié se réfère à l'indice des prix agricoles de l'Insee, qui n'est pas forcément adapté à la diversité des situations. En outre, la fixation d'un prix plancher est interdite. Les indicateurs pris en compte contiendront un indicateur de prix de marché. Avis défavorable.

Je comprends les craintes exprimées par M. Duplomb, mais les coopératives ne sont pas concernées, comme devrait le confirmer M. le ministre. Dès lors, retrait de l'amendement n°13 rectifié.

Les amendements nos24, 55 rectifié et 85 instaurent un prix plancher, ce qui est interdit par le droit européen, comme le Conseil d'État l'a indiqué dans son avis sur EGalim I. Il est toujours à craindre que le plancher se transforme en plafond. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°64 rectifié. Dans la logique de ce texte, les prix sont définis en s'appuyant sur les interprofessionnels ou les instituts techniques. L'Observatoire de la formation des prix et des marges joue aussi un rôle.

Je rejoins M. Duplomb : une coopérative n'est pas une entreprise privée. La rémunération des coopérateurs ne se fait pas de la même façon que dans un contrat de droit privé.

L'ordonnance de 2019 fait référence à un article de la loi EGalim I, qui précise bien que les dispositions relatives aux contrats écrits ne s'appliquent pas aux coopératives. EGalim II ne revient aucunement sur cette disposition, qui est sacralisée. Rediscutons-en si vous le souhaitez, mais je demande le retrait de l'amendement n°13 rectifié.

Avis défavorable aux amendements nos24, 55 rectifié et 85 pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure. Ne faisons pas croire aux agriculteurs que la loi peut fixer des prix administrés. Juridiquement, ce n'est pas possible, et dans la vraie vie, c'est toujours un échec -  on l'a vu, jusqu'à ce que Pisani y renonce.

La loi peut réguler les prix agricoles mais pas les administrer : la nuance est de taille. Imaginez devoir administrer le prix d'une côtelette d'agneau du Quercy, mais aussi d'Île-de-France, selon le degré de maturation ! (Protestations sur les travées du groupe CRCE)

M. Daniel Gremillet.  - Le débat sur l'amendement n°13 rectifié est important. Seule l'assemblée générale clôture les comptes et le prix dans une coopérative.

L'objet de la coopérative est la collecte, la transformation et la valorisation des produits : elle ne les achète pas.

En outre, je rappelle que jamais une coopérative ne peut rompre le contrat avec un coopérateur, sauf faute grave. Génération après génération, cela garantit la sécurité de la collecte. C'est un élément crucial ! (Mme la présidente de la commission applaudit.)

M. Laurent Duplomb.  - Je remercie le ministre. Les coopératives ne sont pas concernées, dont acte. Il est important que ces choses soient dites publiquement en séance car les juges s'appuient sur nos débats.

L'amendement n°13 rectifié est retiré.

Mme Cécile Cukierman.  - Personne ici n'a parlé de prix plancher. Tout le monde respecte le cadre de la contractualisation. Mais doit-on pour autant nier le coût réel ? Doit-on accepter qu'un produit - lait, cerises ou autre - soit vendu en-deçà de son prix de production ? On ne l'attendrait pas, hors période de solde, d'un commerçant de textile, même dans l'économie la plus libérale !

Contractualisons, négocions, en allant jusqu'au bout. Oui, le coût de production de la viande varie selon la race, l'altitude, les conditions météo... Sans démagogie, nous posons la question du revenu des agriculteurs et, plus largement, de la place de la valeur travail dans notre société. Il n'est pas question ici d'économie planifiée !

M. Julien Denormandie, ministre.  - Tout le monde s'accorde à dire que la constitution du prix doit prendre en compte les coûts de production, mais ces amendements vont plus loin. Ils supposent une granulométrie par produit, tenant compte des variations de coûts selon les saisons, les territoires... C'est ni plus ni moins un mécanisme de marché - mais avec des prix fixés par des personnes désignées par la loi ou le décret, au risque de les tirer vers le bas. Votre proposition ne marche pas. (Protestations sur les travées du groupe CRCE)

Mme Cécile Cukierman.  - Parce qu'EGalim I, ça a marché ?

M. Julien Denormandie, ministre.  - Les prix de production sont le socle de la définition du prix : voilà ce que dit Egalim II.

L'amendement n°64 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°24et les amendements identiquesn°55 rectifiés et 85

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Ce contrat s'appuie sur les indicateurs de coûts de production établis par l'Observatoire de la formation des prix et des marges, reflétant la diversité des conditions et des modes de production, intégrant une rémunération décente pour les producteurs à travers une formule de prix. Les critères et modalités de détermination du prix prennent en compte ces indicateurs pour garantir un revenu décent aux agriculteurs.

Mme Céline Brulin.  - Il faut aboutir à des prix rémunérateurs. Comment objectiver les coûts de production, les rendre aussi indiscutables que possible ? Pour nous, c'est là le rôle de l'Observatoire des prix et des marges. Sans remettre en cause la contractualisation, la puissance publique doit se doter d'outils pour intervenir dans la négociation.

Le ministre a prononcé un plaidoyer convaincant contre les effets délétères de la dérégulation entraînée par la loi LME. Il faut maintenant être concret. L'Observatoire a l'expertise nécessaire pour définir les prix en s'appuyant sur les interprofessions et les instituts techniques.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - La loi prévoit que les interprofessions élaborent et publient ces indicateurs, ce qui assure un ancrage dans les réalités de terrain.

L'Observatoire est une petite structure qui n'a pas la capacité d'établir, et d'actualiser, des indicateurs pour toutes les filières. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis pour les mêmes raisons.

L'amendement n°52 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°97 rectifié, présenté par M. Rietmann, Mmes Lassarade et Malet, M. Brisson, Mmes Joseph et Ventalon, MM. Darnaud, Grosperrin, Somon et Genet, Mme Deromedi, MM. Bascher, Joyandet et Perrin, Mme Belrhiti, MM. Guerriau, Vogel et Burgoa, Mme Demas, MM. Cuypers, Rapin, Charon et Longeot, Mme Micouleau, MM. Hingray et Tabarot et Mme Bourrat.

Alinéa 5

Après le mot :

consommateur,

insérer les mots :

ni aux ventes de produits transformés à la ferme,

M. Olivier Rietmann.  - Cet amendement étend l'exonération de contractualisation écrite à tous les produits transformés à la ferme, dont certains sont destinés à l'e-commerce ou à l'approvisionnement en circuit court de la restauration collective.

M. le président.  - Amendement identique n°116 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Chasseing, Decool et Wattebled, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

M. Franck Menonville.  - Il faut tenir compte des spécificités des produits transformés à la ferme.

M. le président.  - Amendement identique n°143, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - La diversification des productions et des débouchés, facteur de création de valeur pour les agriculteurs, implique d'élargir la notion de « vente directe » afin de lever les obstacles au développement des circuits courts.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Ces amendements entendent élargir les dérogations aux règles d'apport total, mais n'atteignent pas leur objectif. Ils excluent juste de la contractualisation écrite les produits transformés à la ferme. Or les produits vendus en circuits courts, s'ils relèvent de la vente directe aux consommateurs, sont déjà exclus.

Ce sujet a un caractère réglementaire : écoutons le ministre. Avis défavorable en attendant.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Retrait ou avis défavorable.

Beaucoup de cas exposés sont déjà couverts par la loi. Les produits fabriqués à la ferme vendus sur internet, ou sur un marché d'intérêt national, ou sur un carré de producteurs, ne sont pas concernés par l'article premier.

Il faudrait vendre en circuit court à des chaînes de restauration au-delà d'un certain chiffre d'affaire pour être concerné. À trop entrer dans le détail, on limite la portée de la loi. Retrait ou avis défavorable.

M. Laurent Duplomb.  - J'appuie l'avis de la rapporteure et du ministre. Si ce doit être une façon détournée pour permettre à un coopérateur de sortir de la coopérative de façon biaisée, je ne suis pas du tout d'accord. La coopérative n'est pas la variable d'ajustement ! Je voterai contre ces amendements.

M. Olivier Rietmann.  - Étant moi-même premier vice-président d'une coopérative agricole, je ne voudrais pas être accusé de tirer dans les pieds des coopératives. Je retire mon amendement.

L'amendement n°97 rectifié est retiré ainsi que l'amendement n°116 rectifié bis.

L'amendement n°143 n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 20 heures.

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.

Conférence des présidents

Mme le président.  - Les conclusions adoptées par la Conférence des présidents, réunie ce soir, vous ont été adressées par courriel et sont consultables sur le site du Sénat. Elles seront considérées comme adoptées en l'absence d'observation d'ici à la fin de la séance.

Protéger la rémunération des agriculteurs (Procédure accélérée - Suite)

Mme le président.  - Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, visant à protéger la rémunération des agriculteurs.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE PREMIER (Suite)

Mme le président.  - Amendement n°102, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer le mot :

seuil

par les mots :

ou plusieurs seuils

et le mot :

et

par les mots :

ou aux

Mme Patricia Schillinger.  - L'article premier vise à offrir aux agriculteurs une vision à long terme de leurs revenus. Mais la contractualisation écrite n'est pas toujours pertinente. Ce texte autorise le Gouvernement à définir par décret en Conseil d'État un seuil en deçà duquel elle n'est pas obligatoire. Nous estimons que divers seuils sont possibles, pour mieux s'adapter aux différentes situations.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis favorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis favorable. Merci pour votre amendement, Madame Schillinger. L'application de la loi sera simplifiée.

L'amendement n°102 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°51, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 6

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

« ....  -  Les organisations interprofessionnelles reconnues organisent chaque année, pour chaque production agricole, une conférence sur les prix rassemblant producteurs, fournisseurs et distributeurs ainsi que le ministère chargé de l'agriculture et de l'alimentation.

« L'ensemble des syndicats agricoles sont conviés à y participer.

« Cette conférence donne lieu à une négociation interprofessionnelle sur les prix, destinée à trouver un accord sur un niveau plancher de prix d'achat aux producteurs pour chaque production agricole, et tenant compte notamment de l'évolution des coûts de production, du système de production et des revenus agricoles sur chaque bassin de production.

« Le niveau plancher de prix d'achat se base sur les indicateurs fournis par l'Observatoire de la formation des prix et des marges.

« À l'issue des négociations, le ministère chargé de l'agriculture et de l'alimentation fixe les différents prix planchers.

« Les établissements mentionnés aux articles L. 621-1 et L. 696-1 sont, respectivement, chargés de la mise en application et du respect par l'ensemble des opérateurs, au sein de chaque filière, du prix plancher d'achat fixé annuellement. » ;

M. Fabien Gay.  - Cet amendement d'appel sur les prix plancher vise à poursuivre le débat. Nous ne sommes pas favorables à une économie réglementée, mais il faut une juste rémunération des agriculteurs. Les prix plancher font peur à tout le monde, nous l'avons bien compris, car on craint d'en arriver à une économie administrée. Mais il faut bien que la loi fixe un cadre. Pour l'instant, le compte n'y est pas - malgré les petits pas accomplis.

Cette question va de pair avec celle de la transparence : qui construit le prix ?

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Les interprofessions seront amenées à prendre en compte la réalité de terrain. Le mécanisme proposé pourrait être assimilé à une entente entre les acteurs. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Puisque nous ne pouvons pas administrer, il faut réguler, d'abord par la contractualisation pluriannuelle, sur la base des coûts de production.

Ensuite, une clause de revoyure automatique est prévue, par exemple si les coûts de production augmentent - c'est une novation d'EGalim II.

Enfin, la loi pénalise les prix abusivement bas. Une médiation est possible, mais il faut en renforcer l'efficacité. C'est ce que nous faisons avec la création du Comité du règlement des différends, que le médiateur peut solliciter. Cette régulation à trois étages est la moins mauvaise des solutions.

L'amendement n°51 est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°136 rectifié, présenté par M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Bilhac et Mmes Guillotin et N. Delattre.

Alinéa 15

Après le mot :

parties

insérer les mots :

ou de pandémie

M. Henri Cabanel.  - Je m'interroge sur la portée des aléas prévus ici. Il convient d'élargir le champ de l'article premier à l'aune de la pandémie que nous venons de vivre. Ne négligeons aucun cas de figure.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Toute pandémie ne désorganise pas forcément la production mais le cas de force majeure pourra être invoqué devant les pouvoirs publics. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis. Sur les pénalités logistiques, je salue le travail mené en commission à l'initiative du sénateur Laurent Duplomb, qui couvre une partie des situations visées.

L'amendement n°136 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par MM. Sautarel et Burgoa, Mme Dumont, M. Anglars, Mmes Deromedi, Ventalon et Gosselin, MM. Calvet, C. Vial, Charon et Lefèvre, Mmes Belrhiti et Muller-Bronn, MM. Tabarot, Bouchet, Laménie, Belin, Genet et Bonhomme, Mme Joseph et MM. Rapin et Chevrollier.

Alinéa 17, première phrase

Après les mots :

à défaut

insérer les mots :

de publication d'indicateurs de coût de production par les organisations interprofessionnelles, et dans un délai de trois mois après la demande d'un de leurs membres

M. Stéphane Sautarel.  - Les députés ont souhaité répondre au blocage de la publication d'indicateurs : en cas d'absence de publication d'un indicateur par une organisation interprofessionnelle, la mission en serait confiée à un institut technique agricole.

Cet amendement vise à clarifier et à rendre plus effectives les conditions dans lesquelles ces instituts publieraient ces indicateurs.

L'amendement identique n°14 rectifié ter n'est pas défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement est satisfait par le texte de la commission.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°4 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°54, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 23

Après les mots :

production en agriculture

insérer les mots :

en intégrant la rémunération de la main d'oeuvre agricole salariée et non salariée

Mme Marie-Claude Varaillas.  - EGalim I n'a pas permis un rééquilibrage durable de la répartition de la valeur ajoutée.

Le prix payé au producteur ne doit pas être inférieur aux coûts de production. La rémunération de la main d'oeuvre agricole salariée et non salariée doit donc être prise en compte.

Mme le président.  - Amendement n°86, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 23

Après le mot :

agriculture

insérer les mots :

, intégrant la rémunération de la main d'oeuvre agricole salariée et non salariée,

M. Joël Labbé.  - Cet amendement va dans le même sens. Le coût de la main d'oeuvre agricole salariée et non salariée doit à l'évidence être pris en compte.

Mme le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 23, seconde phrase

Après les mots :

production en agriculture

insérer les mots :

, en s'attachant à prendre en compte la rémunération de la main d'oeuvre agricole salariée et non salariée,

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Si la détermination des indicateurs à prendre en compte relève du choix des interprofessions, la loi doit imposer la prise en compte de la rémunération de la main d'oeuvre agricole, salariée et non salariée. Les agriculteurs doivent vivre dignement de leur métier.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Ces trois amendements sont partiellement satisfaits par la notion de « coûts pertinents de production en agriculture ».

Laissons les interprofessions décider. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons. La notion de « coût pertinent » sanctuarise clairement les coûts de production.

L'amendement n°54 n'est pas adopté non plus que les amendements nos86 et 25.

Mme le président.  - Amendement n°53, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 23

Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :

Les parties utilisent en priorité les indicateurs publics, construits par l'Observatoire de la formation des prix et des marges, FranceAgriMer, les instituts techniques et les interprofessions. À défaut, sauf s'ils sont publics, les indicateurs utilisés par les parties doivent préalablement être approuvés par l'autorité administrative, selon des modalités fixées par décret, après avis de l'Observatoire de la formation des prix et des marges instituées à l'article L. 682-1. Ces indicateurs reflètent la diversité des conditions et des systèmes de production en accord avec l'objectif de prise en compte des coûts de production permettant une juste rémunération du producteur.

M. Fabien Gay.  - Évitons qu'une multitude d'indicateurs soient utilisés sans cadrage. L'acheteur, en position de force, ne doit pas non plus imposer un indicateur. Une procédure de validation est nécessaire pour garantir le recours à des indicateurs équilibrés.

Il y a des rapports de force au sein des interprofessions. Ne soyons pas naïfs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Les interprofessions élaborent des indicateurs de référence, ce qui satisfait une partie de l'amendement.

L'approbation par l'administration donnerait aux pouvoirs publics la possibilité d'agir sur les prix, ce qui n'est pas autorisé.

Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°53 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°65 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Joseph, M. Grosperrin, Mme Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Après l'alinéa 25

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

- les deux dernières phrases du même avant-dernier alinéa sont ainsi rédigées : « Les indicateurs sont élaborés et publiés par les organisations interprofessionnelles, dans le cadre de leurs missions et conformément au règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 précité. À défaut, les organismes mentionnés à l'article D. 8231 ou les organisations professionnelles concernées mettent à disposition des indicateurs. » ;

Mme Catherine Belrhiti.  - Les indicateurs de coût de production, de marché et de qualité doivent provenir des organisations interprofessionnelles. La loi doit être ferme en ce sens. Il n'est pas cohérent que des opérateurs disposant d'indicateurs dans leur filière en utilisent d'autres.

Avec cet amendement, la liberté contractuelle ne serait pas entravée puisque la loi n'indique pas la manière de prendre en compte ces indicateurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Amendement satisfait par le texte de la commission. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°65 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°124 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mmes Belrhiti et Dumont, MM. Cuypers, Bonhomme, Saury, Belin et Genet et Mme Deromedi.

Alinéa 26

Apre?s le mot :

de?faut

inse?rer les mots :

de publication d'indicateurs de cou?t de production par les organisations interprofessionnelles, et dans un de?lai de trois mois apre?s la demande d'un de leurs membres

M. Laurent Somon.  - Cet amendement clarifie et rend plus effectives les conditions dans lesquelles les instituts techniques agricoles élaborent et publient les indicateurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Amendement entièrement satisfait par le texte de la commission et par l'amendement n°148 que nous allons examiner

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°124 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°148, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 26

Remplacer le mot :

douze

par le mot :

quatre

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous proposons de raccourcir à quatre mois le délai entre la promulgation de la loi et le moment à partir duquel un membre d'une interprofession qui n'aurait pas élaboré les indicateurs de référence pourrait saisir un institut technique agricole pour le faire.

Mme le président.  - Amendement n°92, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 26

Remplacer le mot :

douze

par le mot :

six

M. Joël Labbé.  - Cet amendement réduit de douze à six mois la période à partir de laquelle interviennent les instituts techniques agricoles.

Nous le retirons au profit de celui de Mme la rapporteure qui prévoit un délai de quatre mois.

L'amendement n°92 est retiré.

Mme le président.  - Amendement identique n°111 rectifié, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mmes Puissat, Thomas et Noël, MM. Daubresse, Bacci, Chaize, Decool et Burgoa, Mmes Muller-Bronn et Dumont, M. Chasseing, Mme Belrhiti, MM. H. Leroy, Pointereau, Détraigne, Bouchet, Sido, D. Laurent et Chatillon, Mme Malet, MM. Genet et Allizard, Mme Richer, M. Anglars, Mme Gruny, MM. Chauvet, B. Fournier, Rietmann, Tabarot, Hingray, Bonhomme et Sol, Mme Lassarade, MM. Belin et Savary et Mme Deromedi.

M. Laurent Duplomb.  - De même, je retire cet amendement au profit de celui de Mme la rapporteure.

L'amendement identique n°111 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement identique n°117 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Wattebled et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

M. Franck Menonville.  - Même position.

L'amendement identique n°117 rectifié bis est retiré.

Mme le président.  - Amendement identique n°130 rectifié, présenté par M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Bilhac et Mmes Guillotin et N. Delattre.

M. Henri Cabanel.  - Même remarque.

L'amendement identique n°130 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement identique n°132 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Longeot, Duffourg, Janssens et Kern, Mme Billon, MM. S. Demilly et Vanlerenberghe, Mme Jacquemet et MM. Le Nay, P. Martin et Delcros.

M. Bernard Delcros.  - Je suis le mouvement...

L'amendement identique n°132 rectifié bis est retiré.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis de sagesse sur l'amendement de Mme la rapporteure.

L'amendement n°148 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°103, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

I.  -  Alinéa 34, première phrase

Remplacer les mots :

avis des organisations interprofessionnelles compétentes

par les mots :

consultation de l'organisation interprofessionnelle concernée

II.  -  Alinéas 35 et 36

Supprimer ces alinéas.

Mme Patricia Schillinger.  - Il convient de permettre au pouvoir règlementaire de distinguer entre producteurs et acheteurs en ce qui concerne le seuil de chiffre d'affaires en dessous duquel l'exclusion de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime s'applique.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il n'est pas pertinent de remplacer la notion d'avis par celle de consultation. L'avis de l'interprofession doit en outre être rendu public. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Depuis la préparation de la loi EGalim II, nous avons demandé aux interprofessions si elles voulaient contractualiser. Lorsqu'une interprofession n'arrive pas à se mettre d'accord, elle ne rend pas d'avis ; j'ai plusieurs cas en tête. Si nous suivions la commission, cela bloquerait toute décision. Il est donc important de remplacer l'avis par une consultation.

Ce n'est pas de la sémantique. Avis favorable à l'amendement n°103.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Si l'avis n'est pas rendu, peu importe. De plus, il est important de conserver des souplesses dans l'application de la loi.

M. Laurent Duplomb.  - Ce que dit M. le ministre n'est pas dénué de sens. Ne pourrait-on pas concilier les deux rédactions en supprimant les alinéas 35 et 36 pour conserver seulement le principe de la consultation ? Il ne faut pas que cette absence d'avis bloque la situation.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Le mot consultation est clairement préférable. L'alinéa 36 est superfétatoire : l'essence même du décret est de préciser l'application. L'essentiel est de ne pas maintenir le terme « avis ».

Mme Sophie Primas, présidente.  - Je propose de suivre l'avis de Mme la rapporteure en attendant la CMP.

L'amendement n°103 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°100, présenté par M. Cuypers.

Apre?s l'aline?a 39

Inse?rer deux aline?as ainsi re?dige?s :

...°  Le III de l'article L. 631-24-3 est comple?te? par un aline?a ainsi re?dige? :

« Toutefois, dans le cadre de leurs missions et conforme?ment au re?glement (UE) n° 1308/2013 du Parlement europe?en et du Conseil du 17 de?cembre 2013 portant organisation commune des marche?s des produits agricoles et abrogeant les re?glements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil, les organisations interprofessionnelles e?laborent et publient les indicateurs mentionne?s au quinzie?me aline?a du III de l'article L. 631-24. »

M. Pierre Cuypers.  - Depuis quatre ans, les quotas sucriers n'existent plus, les prix sont au plus bas, et c'est le sucre d'importation qui en profite.

Le prix des betteraves en France, parmi les plus bas d'Europe, est en deçà des coûts de production. Quatre usines ont récemment fermé. Sans supprimer l'exemption betteravière, il faudrait autoriser l'interprofession à définir des indicateurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement est satisfait par le droit en vigueur : si la publication d'indicateurs est obligatoire pour certaines filières, elle n'est pas interdite aux autres. Sagesse.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis favorable : l'interprofession pourrait ne pas vouloir de contractualisation tout en bénéficiant d'indicateurs.

M. Pierre Cuypers.  - Nous sommes d'accord.

L'amendement n°100 est adopté.

M. René-Paul Savary.  - Très bien !

Mme le président.  - Amendement n°149, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Après l'alinéa 44

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...°  Au septième alinéa de l'article L. 631-27, les mots : « à l'avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au quinzième » ;

...° À la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article L. 632-2-1, les mots : « à l'avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au quinzième » et le mot : « diffusent » est remplacé par le mot : « publient » ;

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Amendement rédactionnel et de coordination juridique.

L'amendement n°149, accepté par le gouvernement, est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°26, présenté par M. Pla et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Compléter cet article par quatre paragraphes ainsi rédigés :

II.  -  Après le 5° de l'article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le fait, pour les contrats mentionnés au premier alinéa de l'article L. 665-3, de ne pas inclure dans la proposition de contrat écrit une clause relative au versement d'un acompte, dans des conditions conformes aux dispositions du même alinéa ; ».

III.  -  Le II est applicable aux propositions de contrat remises après la date d'entrée en vigueur de la présente loi, nonobstant toute stipulation contraire des accords interprofessionnels étendus ou homologués dans les conditions définies aux articles L. 631-9, L. 631-10, L. 632-3 et L. 632-4 du code rural et de la pêche maritime.

IV.  -  Le deuxième alinéa de l'article L. 665-3 du même code est supprimé.

V.  -  À compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, aucun accord interprofessionnel stipulant une dérogation aux dispositions de l'article L. 665-3 du code rural et de la pêche maritime ne peut être étendu ou homologué dans les conditions définis aux articles L. 631-9, L. 631-10, L. 632-3 et L. 632-4 du même code.

Les accords professionnels étendus ou homologués en cours d'exécution qui comportent une telle dérogation sont mis en conformité avec l'article L. 665-3 du code rural et de la pêche maritime dans le délai d'un an à compter de la même date.

M. Sebastien Pla.  - M. le ministre évoquait un jeu de dupes entre intermédiaires et producteurs. Il faut aussi se préoccuper de celui entre producteurs et négociants viticoles, ces derniers annulant parfois les commandes, faisant fi des contrats initiaux.

Cet amendement étend donc, au bénéfice des viticulteurs, les dispositions prévues à l'article L. 665-3 du code rural et de la pêche maritime qui impose, dans un délai de dix jours suivant la conclusion du contrat de vente, le paiement par l'acheteur d'un acompte représentant au moins 15 % du montant de la commande.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement supprime la possibilité pour l'interprofession de décider d'autres modalités. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°26 n'est pas adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier

Mme le président.  - Amendement n°28, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au sixième alinéa de l'article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « peut saisir » sont remplacés par le mot : « saisit ».

M. Sebastien Pla.  - Cet amendement rend automatique la saisine du ministre de l'Économie par le médiateur des relations commerciales agricoles pour faire constater la nullité d'un contrat jugé illicite.

Face au caractère périssable des produits concernés par les contrats, il est impératif, comme l'atelier 7 des États Généraux de l'Alimentation l'avait proposé, que la procédure de médiation soit rapidement mise en oeuvre en cas d'échec.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il faut renforcer les pouvoirs du médiateur. La commission a ainsi prévu qu'il puisse être nommé arbitre à la demande des deux parties. Mais cette saisine obligatoire est excessive : il ne serait plus vu comme un tiers de confiance mais comme un gendarme. Sagesse.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Cela transformerait effectivement le rôle du médiateur. Ce serait le sens même de la médiation qui serait en jeu.

L'amendement n°28 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°66 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mme Belrhiti, M. Grosperrin, Mme Deromedi et MM. Bouchet et Sido.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le septième alinéa de l'article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut être saisi pour examiner la véracité de toute allégation visant à garantir la juste rémunération des agriculteurs. Pour ce faire, il peut demander toutes les données nécessaires pour juger de cette allégation, en lien avec les indicateurs précédemment cités. Il rend ses conclusions à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour d'éventuelles sanctions au titre de l'article L. 1211 du code de la consommation. »

Mme Catherine Belrhiti.  - Défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il n'entre pas dans les attributions du médiateur de juger d'une rémunération juste. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°66 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°67 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Joseph, M. Grosperrin, Mme Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le septième alinéa de l'article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut être saisi pour examiner toute allégation dévalorisant les produits agricoles et alimentaires. Pour ce faire, il peut demander toutes les données nécessaires pour juger de cette allégation, en lien avec les indicateurs précédemment cités. Il rend ses conclusions à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour d'éventuelles sanctions au titre de l'article L. 1211 du code de la consommation. »

Mme Catherine Belrhiti.  - Défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°67 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°58 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 442-7 du code de commerce est ainsi modifie? :

1° A? la première phrase, le mot : « notamment » est remplacé? par le mot : « exclusivement » ;

2° La seconde phrase est supprimée.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Cet amendement définit le prix de cession abusivement bas, en substituant à l'adverbe « notamment » - sur lequel la grande distribution peut s'appuyer - le mot « exclusivement ».

La loi EGalim a prévu un mécanisme peu utilisé, car trop flou, visant à sanctionner des prix abusivement bas. Précisons donc ce mécanisme. Cela conduirait en pratique à la définition d'un prix plancher.

Mme le président.  - Amendement identique n°83, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - Il ne s'agit pas de promouvoir une économie administrée, mais de rendre effective la loi EGalim.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Le droit en vigueur prend en compte d'autres indicateurs que ceux liés aux coûts de production. Ne contraignons pas la DGCCRF ou le juge. Si cette notion est peu utilisée, c'est sans doute par peur de représailles. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis pour les mêmes raisons.

Les amendements identiques nos58 rectifié et 83 ne sont pas adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°59 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 442-7 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les produits importés sont concernés par le présent article. Pour caractériser un prix de cession abusivement bas pour les produits importés, il est tenu compte exclusivement des indicateurs de coûts de production en France mentionnés au deuxième alinéa du présent article. »

M. Fabien Gay.  - Je suis sûr que cet amendement recueillera l'avis favorable du ministre, en pointe sur les clauses miroirs : il étend la notion de « prix abusivement bas » aux produits importés, comme le demandent la Confédération paysanne et l'UFC Que choisir.

Il serait naïf d'ignorer que certains distributeurs passent par des plateformes implantées à l'étranger pour contourner la loi EGalim. Les produits agricoles importés restent le point faible de cette loi. Un prix minimum d'entrée sur notre territoire doit donc être imposé.

Mme le président.  - Amendement identique n°84, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - Amendement identique et bien défendu par mon collègue. Monsieur le ministre, l'alimentation a un coût, surtout si nous souhaitons une alimentation de qualité et écologique. La crise de la covid a augmenté la précarité : n'encourageons pas une alimentation à deux vitesses !

Notre groupe souhaite en savoir plus sur le chèque alimentation durable.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il n'est pas possible de juger que le prix d'un produit importé soit abusivement bas, car cette notion s'apprécie au regard des conditions de production de chaque producteur. Nous savons bien que ces conditions ne sont pas les mêmes en Espagne qu'en France. La prise en compte de la rémunération pourrait être un début de réponse. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis défavorable. Vous souhaitez lutter contre le dumping social et environnemental, mais le prix n'est pas le bon levier.

M. Fabien Gay.  - Lequel proposez-vous ?

M. Julien Denormandie, ministre.  - Dans le cadre des négociations européennes, nous avons pu obtenir qu'aucun agriculteur européen ne puisse obtenir d'aide de la PAC s'il ne respecte pas le droit du travail -  je pense, par exemple, à l'absence de contrats de travail.

Sur l'utilisation de produits interdits -  comme le diméthoate sur la cerise turque  - nous devons aller plus loin, mais il faut prouver la nocivité de tels produits sur la santé des consommateurs. Il nous faut travailler à l'OMC pour l'obtenir -  y compris, si nécessaire, en changeant les règles.

C'est le combat que je livrerai dès le 1er janvier au niveau de l'Union européenne.

Les amendements identiques nos59 rectifié et 84 ne sont pas adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°27, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an après l'entrée en vigueur des articles 1er et 2 de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'adéquation des dispositifs qu'ils mettent en oeuvre avec les spécificités du modèle coopératif agricole. Il propose, le cas échéant, des pistes de réflexion permettant de mieux prendre en compte ces spécificités dans la législation nationale.

M. Franck Montaugé.  - Certains responsables de la coopération agricole nous disent que les spécificités de ce système ne sont pas prises en compte par les deux premiers articles de cette proposition de loi.

Une coopérative peut avoir des activités connexes ; or le texte est plutôt centré sur les produits agricoles...

Nous, socialistes, sommes très attachés aux valeurs de la coopération. Par cet amendement, nous demandons un rapport du Gouvernement pour garantir la prise en compte des spécificités de la coopération agricole.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - La commission partage la préoccupation des auteurs de l'amendement ; mais l'article premier ne s'applique pas aux coopératives. Sagesse.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°27 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE PREMIER BIS

Mme le président.  - Amendement n°87, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les bornes minimales ne peuvent pas être inférieures au coût de production, qui peut être déterminé à l'appui des indicateurs de référence de coûts pertinents de production en agriculture tels que mentionnés au quinzième alinéa du III du même article L. 631-24.

M. Joël Labbé.  - L'expérimentation d'un tunnel de prix prévue par l'article premier bis est intéressante. Rien ne garantit cependant que le prix payé aux producteurs dans le cadre de ce tunnel ne descende pas en dessous des coûts de production. Cet amendement précise donc que la borne minimale du tunnel de prix couvre les coûts de production, afin de garantir un revenu minimal à l'agriculteur.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Le tunnel de prix est une expérimentation. Ne rigidifions pas le système avant qu'il ait vu le jour. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°87 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLE PREMIER TER

Mme le président.  - Amendement n°68 rectifié bis, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Rédiger ainsi cet article :

Le sixième alinéa de l'article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par deux phrases ainsi rédigées : « L'observatoire propose un support synthétique et périodique reprenant l'ensemble des indicateurs mentionnés à l'avant-dernier alinéa du III de l'article L. 631-24, à l'article L. 631-24-1 et au II de l'article L. 631-24-3. Pour une filière donnée, en l'absence d'indicateur proposé par l'organisation interprofessionnelle, l'observatoire publie dans ce support les indicateurs issus de son rapport annuel. »

Mme Catherine Belrhiti.  - Défendu.

L'amendement n°68 rectifié bis,

repoussé par la commission et le Gouvernement,

n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°29, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1

Supprimer les mots :

, rendus publics, relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture

M. Christian Redon-Sarrazy.  - La commission a réduit le champ de publication des indicateurs par l'Observatoire de la formation des prix et des marges aux seuls indicateurs relatifs aux « coûts pertinents » de production en agriculture, notion subjective. Restons-en à la rédaction initiale.

Mme le président.  - Amendement identique n°144, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - Limiter la publication à certains indicateurs entraînerait une moindre efficacité de l'article.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'Office est une petite structure. Une synthèse trimestrielle de tous les indicateurs est hors de sa portée. D'autres organismes peuvent publier des indicateurs de marché. Mais tous les indicateurs seront publics. Aucun ne sera tenu secret. Avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos29 et 144 ne sont pas adoptés.

L'article premier ter est adopté.

ARTICLE 2

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure .  - L'article 2 concerne les relations entre les transformateurs industriels et la grande distribution.

Il s'agit de sanctuariser la part du coût liée à la matière première agricole.

La première option prévue par le texte initial obligeait le transformateur à publier les prix de chacune des matières premières agricoles dont le volume dépasse 25 % du total.

La deuxième option, que nous avons voulu conserver, oblige la publication du prix de toutes les matières premières agricoles agrégées. Cela permet d'assurer un niveau de transparence optimal sans rendre le rapport de force plus défavorable aux industriels.

Les industriels devront appliquer les contrats écrits formalisés avec les producteurs ainsi que la clause de révision automatique des prix, dans une optique de réciprocité.

La non-négociabilité est ainsi étendue à l'ensemble des matières premières agricoles. C'est donc une simplification de l'article 2, qui était techniquement complexe.

Mme Patricia Schillinger .  - Il n'y a pas de consensus sur cet article. Le choix des 25 % est sans doute perfectible, mais ne saurait être rayé d'un trait de plume, car il est le fruit de concertations avec les professionnels du secteur.

L'Assemblée nationale a adopté un dispositif flexible, puisque ce seuil pourrait être abaissé. Il faut se centrer sur les produits alimentaires ayant une forte proportion de matières agricoles, sinon c'est le consommateur qui supporterait les discriminations tarifaires. La suppression sèche de ce seuil par notre commission risque de favoriser les grandes firmes.

M. Laurent Duplomb .  - La rédaction du Sénat sur cet article me paraît plus posée, afin de rétablir l'équilibre entre le pot de fer -  la grande distribution  - et le pot de terre -  producteurs et transformateurs. On ne peut pas demander aux fournisseurs de se mettre tout nu et de fournir en plus la radiographie de l'intérieur... Il faut rétablir une liste agglomérée et le tiers de confiance. Évitons que la grande distribution soit tentée de négocier fortement une baisse des prix auprès de nos pépites très valorisées. Avec les 25 %, la grande distribution négociera au plus serré tout ce qui est en dessous du seuil.

La grande distribution a redistribué aux consommateurs une partie des deux milliards d'euros obtenus grâce à la loi EGalim I sous la forme de promotions sur tous les autres produits non concernés par EGalim, comme les détergents...

Mme le président.  - Amendement n°94, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéas 3 à 7

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 441-1-1.  -  I.  -  Pour les produits alimentaires, le fournisseur peut choisir, sans que l'acheteur ne puisse interférer dans ce choix, que les conditions générales de vente présentent soit :

« 1° Pour chacune des matières premières agricoles et pour chacun des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles qui entrent dans la composition du produit alimentaire, sa part dans la composition du produit, sous la forme d'un pourcentage du volume et d'un pourcentage du tarif du fournisseur ;

« 2° Uniquement la part agrégée des matières premières agricoles et produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles qui entrent dans la composition du produit alimentaire, sous la forme d'un pourcentage du volume et d'un pourcentage du tarif du fournisseur ;

« 3° Sous réserve qu'elles fassent état d'une évolution du tarif fournisseur par rapport à l'année précédente, les modalités d'intervention d'un tiers indépendant chargé d'attester la part de cette évolution qui résulte de l'évolution du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles.

II.  -  Alinéa 13

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« VI.  -  Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d'une amende administrative dans les conditions prévues au XII de l'article L. 443-8 du présent code.

« VII.  -  Les décrets mentionnés aux II et V sont pris après consultation de l'organisation interprofessionnelle concernée. » ;

M. Julien Denormandie, ministre.  - Le Gouvernement a déposé trois amendements à cet article, élément essentiel du dispositif, qui garantit la non-négociabilité de la partie agricole du produit, et donc fige le prix de la matière première agricole.

La commission des affaires économiques a supprimé une des trois options que l'Assemblée nationale avait prévues. Or cette option est très importante, notamment pour une PME, car elle dispense de recourir à un tiers de confiance.

La commission propose, en pratique, d'interdire cette option. (Mme la présidente de la commission le conteste.)

Autrement dit, ceux qui jouent la transparence totale en publiant leurs prix unitaires devront passer par un tiers de confiance. L'option 1 ne plaît pas à tout le monde... mais surtout à ceux qui répugnent à la transparence.

L'amendement n°94 vise à rétablir cette option. (M. Laurent Duplomb proteste.)

Pour définir la matière première non négociable, le seuil de 25 % est utile -  tel est l'objet de l'amendement n° 95. Sans ce seuil, l'application de la loi serait drastiquement compliquée. Oui, tout ne sera pas pris en compte. Mais est-ce grave pour le zeste de citron qui décore le cake ? Les plus gros postes -  le lait, la viande  - où il y a le plus de tensions, le seront.

J'insiste, il faut rétablir l'option supprimée par la commission et faciliter l'application de la loi avec les 25 %.

Mme le président.  - Amendement n°118 rectifié, présenté par MM. Menonville, Chasseing, Decool, Wattebled et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Soit présentent la part de chaque matière première et de chaque produit transformé, sous la forme d'un pourcentage du tarif du fournisseur ; l'acheteur peut, à ses frais, mandater un tiers indépendant pour attester l'exactitude des informations transmises ;

M. Daniel Chasseing.  - Cet amendement réintroduit de la transparence dans les conditions générales de vente pour favoriser une revalorisation des prix sur les produits à forte composante agricole. La matière agricole ne doit plus être la variable d'ajustement. Sortons des jeux d'acteurs.

Mme le président.  - Amendement identique n°135 rectifié, présenté par MM. Canévet, Longeot, Duffourg, Janssens, Hingray et Kern, Mme Billon, MM. S. Demilly et Vanlerenberghe, Mme Jacquemet et MM. Le Nay, Chauvet, P. Martin et Delcros.

Mme Annick Jacquemet.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°108 rectifié, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Cuypers, Mmes Chauvin, Puissat et Thomas, M. Daubresse, Mmes Noël et Gruny, MM. Chaize, Decool et Burgoa, Mmes Muller-Bronn et Dumont, M. Chasseing, Mme Belrhiti, MM. H. Leroy, Pointereau, Détraigne, Bouchet, Sido, D. Laurent et Chatillon, Mme Malet, MM. Genet et Allizard, Mme Richer, MM. Anglars, Grand, Chauvet, Panunzi, B. Fournier, Rietmann, Tabarot, Hingray, Bonhomme et Somon, Mme Lassarade, MM. Belin et Savary et Mme Deromedi.

I.  -  Alinéa 4, première et dernière phrases

Après le mot :

alimentaires

insérer les mots :

et des produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie 

II.  -  Alinéas 6, première phrase et 11

Après le mot :

alimentaire

insérer les mots :

ou d'un produit destiné à l'alimentation des animaux de compagnie

III.  -  Alinéa 12

Remplacer les mots :

ou catégories de denrées

par les mots :

, catégories de denrées ou produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie

IV.  -  Alinéa 15

Après le mot :

alimentaires

insérer les mots :

et les produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie 

V.  -  Alinéa 22, première phrase

Après le mot :

alimentaire

insérer les mots :

et du produit destiné à l'alimentation des animaux de compagnie 

VI.  -  Alinéa 27

Remplacer les mots :

certains produits alimentaires ou catégories de produits

par les mots :

certaines denrées alimentaires, catégories de denrées ou produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie

M. Laurent Duplomb.  - Je ne comprends pas la discussion commune, car cet amendement n'a rien à voir avec les autres.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Il a raison.

Mme le président.  - Si l'amendement n° 94 du Gouvernement est adopté, tous les autres deviendront sans objet.

Mme Sophie Primas, présidente.  - Ils portent sur les mêmes alinéas.

M. Laurent Duplomb.  - Cet amendement étend l'application de l'article 2 aux produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie, corrigeant ainsi un oubli de la loi EGalim I.

Mme le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par M. Sautarel, Mme Dumont, MM. Burgoa et Anglars, Mmes Ventalon et Gosselin, MM. Calvet, C. Vial, Charon et Kern, Mmes Belrhiti et Muller-Bronn, MM. Tabarot, Bouchet, Laménie, Belin, Genet, Bonhomme et Husson, Mme Joseph, M. Chevrollier et Mme Deromedi.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le présent article n'est pas applicable à certains produits alimentaires, catégories de produits ou d'opérateurs, dont la liste est définie par décret sur proposition des organisations interprofessionnelles, en raison des spécificités des filières de production. La publication de ce décret est précédée de l'avis favorable de l'interprofession permettant d'objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

M. Stéphane Sautarel.  - Cet amendement encadre les modalités d'adoption du décret : il doit faire l'objet en amont d'une concertation et d'un avis favorable de l'interprofession.

De nombreuses filières souhaitent être exclues du champ d'application de l'article 2. Il semble important de préciser dans la loi que l'accord de tous est requis pour qu'un produit ou un opérateur sorte du processus.

Mme le président.  - Amendement identique n°16 rectifié ter, présenté par MM. Milon et Brisson, Mme Imbert, MM. D. Laurent et Chatillon et Mme Puissat.

Mme Corinne Imbert.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°156, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 5

1° Deuxième phrase

Après le mot :

remet

insérer les mots :

sous cinq jours

2° Dernière phrase

Compléter cette phrase par les mots :

dans un délai de dix jours à compter de la réception des pièces mentionnées au présent alinéa

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement précise les délais que doit respecter l'intervention du tiers indépendant - défini par l'amendement n° 157.

Mme le président.  - Amendement n°113 rectifié quater, présenté par Mme Férat, MM. D. Laurent, Kern et Duffourg, Mme N. Delattre, MM. Le Nay, Détraigne et Pointereau, Mmes Dumont et Dumas, MM. Fialaire, Henno et J.M. Arnaud, Mme Sollogoub, M. Cabanel, Mme Joseph, M. Bouchet, Mmes Lassarade et Noël, M. Hingray, Mme Berthet, M. B. Fournier, Mme Imbert, MM. Moga, Longeot, Capo-Canellas, Chatillon, Cuypers, Burgoa, Bascher et Bonhomme, Mmes Richer et Gruny et M. Savary.

I. - Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent I n'est pas applicable aux fournisseurs de produits soumis à accises. »

II. - Alinéa 26

Compléter cet alinéa par les mots :

ni aux fournisseurs de produits soumis à accises

Mme Françoise Férat.  - Cet amendement d'appel vise à ce que l'exclusion des vins et spiritueux dans le champ d'application de l'article 2 soit confirmée.

Le secteur vitivinicole, soumis à des cycles relativement longs, fonctionne par campagnes successives. Le cours est fixé une fois par an ; les prix en amont ne fluctuent donc pas de façon hebdomadaire ou mensuelle, comme dans d'autres filières.

Certains spiritueux nécessitent un long vieillissement avant commercialisation ; une clause de révision automatique de prix pourrait avoir des effets pervers.

Monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer ce soir votre engagement pris devant l'Assemblée nationale ?

Mme le président.  - Amendement n°47 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Longeot et Janssens, Mme N. Goulet, M. Kern, Mmes Jacquemet et Billon et MM. Henno, Lafon, Le Nay, Duffourg et Hingray.

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

M. Olivier Cigolotti.  - Cet amendement supprime l'alinéa 11 qui constitue une contrainte et dont la finalité pratique n'apparaît pas clairement.

Mme le président.  - Amendement n°119 rectifié, présenté par MM. Menonville, Chasseing, Decool, Wattebled et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La publication de ce décret est précédée de l'avis de l'interprofession permettant d'objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

M. Franck Menonville.  - La publication de ce décret doit être précédée d'une concertation et d'un avis de l'interprofession.

De nombreuses filières ou maillons de celles-ci souhaitent être exclus du champ d'application de l'article 2, or il est important que l'accord de tous soit requis pour qu'un produit ou un opérateur sorte du processus prévu par l'article.

Mme le président.  - Amendement identique n°131 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Bilhac et Mmes Guillotin et N. Delattre.

M. Henri Cabanel.  - C'est le même. L'avis de l'interprofession doit être un préalable pour justifier toute demande de dérogation.

Mme le président.  - Amendement n°157, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 13

Après le mot :

article

insérer les mots :

, notamment la définition du tiers indépendant mentionné aux I et II,

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°146 rectifié, présenté par MM. Canévet, Longeot, Janssens et Kern, Mme Billon, MM. Détraigne, S. Demilly, Hingray et Duffourg, Mme Jacquemet et MM. Le Nay, Delcros et Vanlerenberghe.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :  La publication de ce décret est précédée de l'avis de l'interprofession permettant d'objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°95, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 15 à 30

Remplacer ces alinéas par vingt-sept alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 443-8.  -  I.  -  Pour les produits alimentaires dans la composition desquels entrent des matières premières agricoles ou des produits transformés soumis aux dispositions du I de l'article L. 441-1-1, une convention écrite conclue entre le fournisseur et son acheteur mentionne les obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l'issue de la négociation commerciale, dans le respect des articles L. 442-1 à L. 442-3. Cette convention est établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre et des contrats d'application.

« La convention mentionne chacune des obligations réciproques, et leur prix unitaire, auxquelles se sont engagées les parties à l'issue de la négociation commerciale.

« Lorsqu'elle est conclue avec un distributeur, la convention est conclue dans les conditions prévues aux articles L. 441-3 et L. 441 -4, sous réserve du présent article.

« II.  -  La négociation commerciale ne porte pas sur la part agrégée, dans le tarif du fournisseur, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au II de l'article L. 441-1-1.

« III.  -  Dans l'hypothèse mentionnée au 1° du I de l'article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part du prix des matières premières agricoles et des produits transformés, tels qu'ils figurent dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d'achat dans l'élaboration du prix convenu.

« L'acheteur peut, à ses frais, demander au fournisseur de mandater un tiers indépendant pour attester l'exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente. Dans ce cas, le fournisseur remet au tiers indépendant les pièces justifiant l'exactitude de ces éléments.

« La mission du tiers indépendant consiste exclusivement, sur la base d'un contrat conclu avec le fournisseur, à :

« 1° Réceptionner les informations transmises par le fournisseur et les pièces justificatives ;

« 2° Attester l'exactitude des informations transmises, notamment la part¸ dans le tarif du fournisseur, de chaque matière première agricole et de chaque produit transformé mentionnés au II de l'article L. 441-1-1 et la conformité des modalités de révision du prix aux dispositions du VII du présent article ;

« 3° Transmettre cette attestation à l'acheteur.

« IV.  -  Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du I de l'article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part du prix agrégé des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au même I, tels qu'ils figurent dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d'achat dans l'élaboration du prix convenu.

« Le fournisseur mandate un tiers indépendant pour attester l'exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente. La mission du tiers indépendant consiste, outre les éléments mentionnés au 1° et 3° du III, à attester de la détermination du prix agrégé des matières premières agricoles et produits transformés mentionnés au II de l'article L. 441-1-1, de la part de ce prix dans le tarif du fournisseur, et de la conformité des modalités de révision du prix aux dispositions du VII du présent article.

« Le fournisseur répondant à la définition des petites et moyennes entreprises, au sens de l'article L. 123-16, peut ne pas mandater un tiers indépendant. Dans ce cas, l'acheteur peut, à ses frais, demander au fournisseur de mandater un tiers indépendant pour attester l'exactitude des éléments figurant dans les conditions générales de vente.

« V.  -  Dans l'hypothèse mentionnée au 3° du I de l'article L. 441-1-1, le fournisseur transmet à un tiers indépendant les pièces qui justifient la part de l'évolution de son tarif qui résulte de l'évolution du prix des matières premières agricoles ou des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles.

« Le tiers indépendant atteste du respect des dispositions du II et du VII, au plus tard dans le mois qui suit la conclusion du contrat. En l'absence de cette attestation, si les parties souhaitent poursuivre leur relation contractuelle, elles modifient leur contrat dans un délai de deux mois suivant la signature du contrat initial. Le tiers indépendant est saisi dans les mêmes conditions et aux mêmes fins du contrat modifié au terme de la nouvelle négociation.

« VI.  -  Le tiers indépendant mentionné aux III, IV et V est astreint au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont il a pu avoir connaissance à raison de ses fonctions.

« Le recours à un tiers indépendant ne dispense pas le fournisseur de conserver un exemplaire des pièces justificatives afin de répondre, le cas échéant, aux demandes de l'administration. 

« VII.  -  La convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût de la matière première agricole entrant dans la composition du produit alimentaire. Les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application du III de l'article L. 631-24-1 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés.

« VIII.  -  La convention mentionnée au I du présent article est conclue pour une durée d'un an, de deux ans ou de trois ans. La convention est conclue au plus tard le 1er mars et le fournisseur communique ses conditions générales de vente à l'acheteur au plus tard trois mois avant cette date ou, pour les produits soumis à un cycle de commercialisation particulier, deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation.

« Le distributeur dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception des conditions générales de vente pour soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu'il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation.

« IX.  -  Sans préjudice des articles L. 442-1 à L. 442-3, tout avenant à la convention mentionnée au I du présent article fait l'objet d'un écrit, qui mentionne l'élément nouveau le justifiant.

« X.  -  Le présent article n'est applicable ni aux contrats de vente de produits agricoles mentionnés à l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, ni aux grossistes au sens du II de l'article L. 441-4 du présent code.

« XI.  -  Le présent article n'est pas applicable à certains produits alimentaires ou catégories de produits dont la liste est définie par décret, en raison des spécificités de leur filière de production.

« XII.  -  Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. » ;

2° bis Après le mot : « pour », la fin de la seconde phrase du VI de l'article L. 441-4 est ainsi rédigée : « soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu'il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation » ;

3° Après le mot : « écrits », la fin du dernier alinéa du I de l'article L. 443-2 est ainsi rédigée : « est obligatoire en application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime. » ;

4° Au I de l'article L. 443-4, les mots : « et L. 443-2 » sont remplacés par les mots « L. 443-2 et L. 443-8 ».

M. Julien Denormandie, ministre.  - Défendu.

L'amendement n°3 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme le président.  - Amendement n°126 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mmes Belrhiti et Dumont, MM. Cuypers, Bonhomme, Saury, Belin et Genet et Mme Deromedi.

Alinéa 27

Rédiger ainsi cet alinéa :

« VI bis.  -  Le présent article n'est pas applicable à certains produits alimentaires, catégories de produits ou d'opérateurs, dont la liste est définie par décret sur proposition des organisations interprofessionnelles, en raison des spécificités des filières de production. La publication de ce décret est précédée de l'avis favorable de l'interprofession permettant d'objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs.

M. Laurent Somon.  - Il faut un avis favorable de l'interprofession pour objectiver les difficultés rencontrées par les opérateurs. L'accord de tous doit être requis.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'option 1 n'apporte rien. Rien n'empêche un industriel de mettre ce qu'il veut dans ses conditions générales de vente. Mais cette option donnera des armes à la grande distribution alors que nous cherchons à rééquilibrer le rapport de force. Le tiers de confiance deviendrait-il un surcoût ? Il n'interviendra qu'à la demande du distributeur, qui le paiera.

Quant au zeste de citron, la valeur agrégée permet justement de ne pas entrer dans les détails. (M. Laurent Duplomb acquiesce.) Ce qui compte, c'est que la partie liée aux matières premières agricoles soit non négociable.

L'industriel sera tenu par le contrat écrit le liant à l'agriculteur. S'il revalorise ses prix, ce sera uniquement par répercussion d'une revalorisation du prix payé à l'agriculteur.

Avis défavorable à l'amendement n°94, comme aux amendements identiques nos118 rectifié et 135 rectifié, qui ont le même objectif mais s'appliquent à toutes les matières premières.

Avis favorable à l'amendement n°108 rectifié sur les animaux de compagnie.

Les amendements identiques nos6 rectifié et 16 rectifié ter inverseraient la hiérarchie des normes ; avis défavorable.

Sagesse sur l'amendement n°113 rectifié quater en attendant votre avis, monsieur le ministre.

L'amendement n°47 rectifié supprime une disposition utile pour que le distributeur puisse vérifier les informations communiquées par l'industriel dans ses conditions générales de vente. Avis défavorable, ainsi qu'aux amendements identiques nos119 rectifié et 131 rectifié : il faut associer plus étroitement les interprofessions. Même avis pour l'amendement n°146 rectifié.

Avis défavorable à l'amendement n°95 qui s'oppose à la position de la commission.

Avis défavorable à l'amendement n°126 rectifié.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Oui, Madame la rapporteure, il sera toujours possible d'être transparent sur la valeur des matières premières comme dans l'option 1 -  mais il sera aussi nécessaire de remplir les obligations de l'une des deux autres. Il n'y aura donc que celle-ci qui vaudrait, alors que c'est la première option qui assure la plus grande transparence.

Mon amendement met au même niveau les trois options et introduit des sanctions contre le distributeur s'il cherche à imposer l'option 1. Il faut être le plus transparent possible.

Vous dites que l'option 1 serait un outil de pression pour la grande distribution -  mais cela ne change rien.

Concernant le zeste de citron, n'oubliez pas que le troisième étage de la fusée est la restauration de la loi Galland concernant la non-discrimination des tarifs en grande distribution.

Un industriel qui ajouterait un zeste de citron dans son eau serait éligible aux mêmes avantages que la PME.

Mme Sophie Primas, présidente.  - Et alors ?

M. Julien Denormandie, ministre.  - S'il y a bien un cas où il faut que la grande distribution ait un pouvoir de négociation, c'est avec les grandes firmes internationales, pas avec des coopératives transformant des produits locaux.

M. Laurent Duplomb.  - C'est l'inverse qui se passe : ils ne négocient déjà pas ! Nous n'avons aucun intérêt à donner des avantages aux multinationales !

M. Julien Denormandie, ministre.  - Avis défavorable aux amendements identiques nos118 rectifié et 135 rectifié.

Sagesse sur l'amendement n°108 rectifié : il faut vérifier les effets de bord potentiel, mais je partage l'esprit de cet amendement.

Avis très défavorable aux amendements identiques nos6 rectifié et 16 rectifié ter, car l'avis conforme risque de tout bloquer.

L'amendement n°156 régule trop l'action du tiers indépendant : retrait, comme pour l'amendement n°157.

Mme Férat, nous retirerons les produits soumis à des accises du champ d'application du décret : retrait de l'amendement n0113 rectifié quater, car satisfait.

Avis défavorable à l'amendement n°47 rectifié, comme aux amendements identiques nos119 rectifié et 131 rectifié.

Avis défavorable à l'amendement n°146 rectifié comme à l'amendement n°126 rectifié qui prévoit un avis conforme.

Mme Sophie Primas, président de la commission.  - Je ne partage pas votre opinion selon laquelle l'option 1 améliorerait la rémunération des agriculteurs.

Elle placerait les transformateurs en radiographie ouverte auprès de la grande distribution. Or, à terme, une industrie agroalimentaire fragilisée affaiblira les agriculteurs. Je ne comprends absolument pas vos arguments.

La transparence totale ne violerait-elle pas le secret des affaires ? Si j'achète des pizzas et que je découvre que le prix d'achat des tomates d'une PME est bien supérieur à celui des grands groupes, je mettrai la pression pour que le premier rejoigne le second...

Je ne connais aucune entreprise qui n'ait pas un contrôleur de gestion qui sache tous les coûts, y compris celui du zeste de citron. Que l'on parle d'une soupe de potirons ou d'une soupe aux neuf légumes dont le potiron, l'industriel a le même fournisseur de potirons au même prix. (M. Laurent Duplomb acquiesce.)

M. Julien Denormandie, ministre.  - Pour ma part, je ne comprends pas l'intérêt de la suppression de cette option.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Vous donnez une arme...

M. Julien Denormandie, ministre.  - ...qui existe déjà ! La grande distribution pourrait imposer un prix unitaire. L'amendement n°94 est plus protecteur. La loi prévoit une amende administrative pour le distributeur.

L'amendement n°94 n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nos118 rectifié et 135 rectifié.

L'amendement n°108 rectifié est adopté.

Les amendements identiques nos6 rectifié et 16 rectifié ter ne sont pas adoptés.

L'amendement n°156 est adopté.

Mme Françoise Férat.  - Eu égard à l'engagement clair de M. le ministre, je retire l'amendement n°113 rectifié quater.

L'amendement n°113 rectifié quater est retiré.

L'amendement n°47 rectifié n'a plus d'objet.

Les amendements identiques nos119 rectifié et 131 rectifié sont adoptés, de même que les amendements nos157 et 146 rectifié.

L'amendement n°95 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°126 rectifié.

Mme le président.  - Amendement n°93, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 8 et 9

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« II.  -  L'obligation prévue au I est applicable aux matières premières agricoles et aux produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles qui entrent dans la composition du produit alimentaire pour une part, en volume, supérieure ou égale à 25 %. Un décret peut fixer, pour certains produits ou certaines catégories de produits, un taux inférieur.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Cet amendement revient au seuil de 25 %, pour les raisons déjà exposées. Pour certains cas particuliers, cet amendement prévoit qu'un décret puisse abaisser ce seuil.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'objectif de la loi est une meilleure rémunération des agriculteurs, la sanctuarisation des matières premières agricoles et leur non négociabilité. Maintenir ce seuil, c'est exclure des matières premières de cette sanction si elles représentent moins de 25 % du produit. Avis défavorable.

L'amendement n°93 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°46 rectifié, présenté par M. Cigolotti, Mme Sollogoub, MM. Longeot et Janssens, Mme N. Goulet, M. Kern, Mmes Jacquemet et Billon, MM. Henno, Lafon, Le Nay, Duffourg, Delcros et Hingray et Mme Devésa.

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les conditions générales de vente comportent une clause détaillant les investissements en faveur de la transition écologique du développement durable et de l'économie circulaire. Elle précise la part qu'ils représentent dans le tarif. Les investissements visés par la présente clause sont définis par décret. » ;

M. Olivier Cigolotti.  - Cet amendement tient compte des nouvelles obligations qui pèsent sur les entreprises en matière de transition écologique telles que celles notamment prévues par le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, en matière de décarbonation ou d'éco-contribution.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Les conditions générales de vente sont un document privé ; il ne semble pas pertinent que l'industriel indique cet engagement en faveur de la transition écologique dans un tel document. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°46 rectifié est retiré.

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2

Mme le président.  - Amendement n°49 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Longeot et Janssens, Mme N. Goulet, M. Kern, Mmes Jacquemet et Billon et MM. Henno, Lafon, Le Nay, Duffourg et Hingray.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du commerce est ainsi modifié :

I.  -  L'article L. 441-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 441-3.  -  I.  -  Une convention écrite conclue entre le fournisseur, à l'exception des fournisseurs de produits mentionnés à l'article L. 443-2, et le distributeur ou le prestataire de services mentionne les obligations réciproques, auxquelles se sont engagées les parties à l'issue de la négociation commerciale, dans le respect des articles L. 442-1 à L. 442-3. Cette convention est établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre et des contrats d'application.

« II.  -  Sans préjudice des articles L. 442-1 à L. 442-3, tout avenant à la convention mentionnée au I fait l'objet d'un écrit qui mentionne l'élément nouveau le justifiant.

« III.  -  La convention mentionnée au I fixe, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, les obligations suivantes :

« 1° Les conditions de l'opération de vente des produits ou des prestations de services, y compris les réductions de prix, et le cas échéant les types de situation dans lesquelles et les modalités selon lesquelles des conditions dérogatoires de l'opération de vente sont susceptibles d'être appliquées ;

« 2° L'objet, la date, les modalités d'exécution, la rémunération et les produits auxquels il se rapporte de tout service ou obligation relevant d'un accord conclu avec une entité juridique située en dehors du territoire français, avec laquelle le distributeur est directement ou indirectement lié.

« IV.  -  La convention mentionnée au I fixe également les obligations suivantes :

« 1° Les services de coopération commerciale, propres à favoriser la commercialisation des produits ou services du fournisseur, que le distributeur ou le prestataire de service lui rend, ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, en précisant l'objet, la date prévue, les modalités d'exécution, la rémunération de ces services ainsi que les produits ou services auxquels ils se rapportent et la rémunération globale afférente à l'ensemble de ces obligations ;

« 2° Les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services, en précisant pour chacune l'objet, la date prévue et les modalités d'exécution, ainsi que la rémunération ou la réduction de prix globale afférente à l'ensemble de ces obligations.

« V.  -  La convention mentionnée au I est conclue pour une durée d'un an, de deux ans ou de trois ans, au plus tard le 1er mars de l'année pendant laquelle elle prend effet ou dans les deux mois suivant le point de départ de la période de commercialisation des produits ou des services soumis à un cycle de commercialisation particulier. Lorsqu'elle est conclue pour une durée de deux ou de trois ans, elle fixe les modalités selon lesquelles le prix convenu est révisé. Ces modalités peuvent prévoir la prise en compte d'un ou de plusieurs indicateurs disponibles reflétant l'évolution du prix des facteurs de production.

« VI.  -  Le fournisseur communique ses conditions générales de vente au distributeur dans un délai raisonnable avant le 1er mars ou, pour les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier, avant le point de départ de la période de commercialisation. »

2° Au deuxième alinéa du I de l'article L. 442-5, après le mot : « vendeur », sont insérés les mots : «, à l'exclusion des rémunérations perçues par le distributeur au titre des services de coopération commerciale ainsi que celles obtenues en contrepartie d'autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur, ».

M. Olivier Cigolotti.  - Afin d'améliorer la répartition de la valeur entre les agriculteurs, les transformateurs et les distributeurs, les évolutions des coûts et des matières premières doivent être prises en compte dans la construction du prix jusqu'au dernier maillon de la chaîne de valeur.

Cela ne peut s'envisager sans une révision des modalités de détermination du SRP. Cet amendement prévoit d'exclure « des autres avantages financiers consentis par le vendeur » les rémunérations perçues par le distributeur au titre des services de coopération commerciale ainsi que celles obtenues en contrepartie d'autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale.

Mme le président.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray, Rapin et Laménie, Mmes Belrhiti et Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du I de l'article L. 441-3 du code de commerce, après le mot : « mentionne », sont insérés les mots : « les conditions particulières de vente, justifiées par la spécificité des services ou des obligations rendus par le distributeur et ».

M. François Bonhomme.  - Cet amendement, travaillé avec des professionnels du monde agricole, complète le dispositif de renforcement du respect du tarif de l'industriel, qui ne peut discriminer un distributeur qu'à condition d'obtenir une contrepartie réelle et proportionnée en échange de toute réduction de prix.

Conformément à loi, les conditions générales de vente de l'industriel doivent être le socle de la négociation commerciale, ce qu'elles ne sont plus depuis longtemps. Cela améliorerait la transparence.

Mme le président.  - Amendement n°70 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray et Laménie, Mmes Belrhiti et Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre IV du code de commerce est ainsi modifiée :

1° L'article L. 441-3 est complété par un VI ainsi rédigé :

« VI.  -  Les services relevant des 2° et 3° font l'objet d'un barème de prix par service proposé. Il est communiqué dans les mêmes conditions que les conditions générales de vente mentionnées au V. » ;

2° Après la première phrase du VI de l'article L. 441-4, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le distributeur communique au fournisseur le barème de prix des services qu'il propose dans les mêmes conditions »

M. François Bonhomme.  - Il s'agit d'incorporer dans le code de commerce la proposition n°33 du rapport de la commission d'enquête parlementaire sur la situation et les pratiques de la grande distribution dans ses relations avec les fournisseurs. Celle-ci prévoyait de répertorier les services de coopération commerciale proposés aux fournisseurs par les distributeurs et à établir un barème des prix exigés pour ces services.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'amendement n°49 rectifié revient à la loi Galland. Il augmenterait fortement les prix à la consommation de tous les produits... Le SRP augmenterait massivement, les relations commerciales seraient bouleversées, sans recul sur les implications. Notre objectif est bien que les distributeurs négocient davantage les services commerciaux. Retrait ou avis défavorable.

Quant à l'amendement 69 rectifié, il vise à introduire une forme de ligne à ligne sur tous les produits. Cela poserait un problème de cohérence avec l'article 2 bis D qui prévoit le principe de non-discrimination tarifaire des seuls produits agricoles. Tenons-nous en à l'aspect agricole du texte. Retrait ou avis défavorable.

Même avis sur l'amendement n°70 rectifié.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°49 rectifié est retiré, de même que les amendementsn°69 rectifié et 70 rectifié.

L'amendement n°57 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°107 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Cuypers, Mmes Chauvin, Puissat et Thomas, MM. Daubresse, Bacci, Chaize, Decool et Burgoa, Mmes Muller-Bronn et Dumont, M. Chasseing, Mme Belrhiti, MM. H. Leroy, Pointereau, Détraigne, Bouchet, Sido, D. Laurent et Chatillon, Mmes Joseph et Malet, MM. Genet et Allizard, Mme Richer, M. Anglars, Mmes Gruny et Noël, MM. Chauvet, Rapin, Panunzi, B. Fournier, Rietmann, Tabarot, Husson, Bonhomme et Somon, Mme Lassarade, MM. Belin et Savary et Mme Deromedi.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 441-8 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « alimentaires figurant sur une liste fixée par décret » sont remplacés par les mots : « des denrées alimentaires » et les mots : « des matières premières agricoles et alimentaires et des produits agricoles et alimentaires et, le cas échéant, des coûts de l'énergie » sont remplacés par les mots : « des prix de l'énergie, du transport et des matériaux entrant dans la composition des emballages » ;

2° Au deuxième alinéa, après les mots : « de la renégociation », la fin de l'alinéa est supprimée.

II.  -  Au VI de l'article L. 521-3-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « mentionnés au premier alinéa de l'article L. 441-8 du code de commerce » sont remplacés par les mots : « agricoles et alimentaires figurant sur une liste fixée par décret ».

M. Laurent Duplomb.  - Il s'agit d'instaurer une clause générale de renégociation, activable par le fournisseur en cas d'évolution importante des intrants. Pendant la crise du Covid, les fournitures d'emballage ont vu leurs prix flamber. Sans cause de renégociation, les industriels peuvent être portés à répercuter leurs pertes sur les prix agricoles pour conserver leur marge... Ma proposition est inspirée de cette expérience. Elle permettra de protéger le revenu des agriculteurs.

Mme le président.  - Amendement identique n°114 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Wattebled, Guerriau et Verzelen, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Médevielle et Malhuret.

M. Franck Menonville.  - Cet amendement réoriente la clause de renégociation sur d'autres sources de coûts, comme l'énergie, le transport et les emballages.

Mme le président.  - Amendement identique n°159, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Ces mesures font l'objet de nombreuses demandes. Il est impérieux d'agir. Une clause de révision automatique serait difficile à mettre en oeuvre, mais nous souhaitons une clause globale de renégociation.

M. Julien Denormandie, ministre.  - L'objectif de ce texte est de changer le rapport de force pour améliorer le prix « cour de ferme ». Avis défavorable à ces amendements portent sur l'aval et non l'amont : ce serait une aubaine pour un industriel qui fabrique une boisson pétillante brune à étiquette rouge, pour augmenter ses prix.

M. Laurent Duplomb.  - Mais il le fait déjà !

M. Julien Denormandie, ministre.  - Mais nous ne sommes pas obligés de lui faciliter la tâche.

L'essentiel, c'est le coût agricole.

M. Laurent Duplomb.  - Nous prenons le problème à l'envers. Coca-Cola impose ses prix à la grande distribution car aucun magasin ne peut se permettre de ne pas vendre ses produits ; mais la petite PME qui ne peut pas négocier en pâtit, alors qu'elle ne maîtrise pas ses coûts d'emballage et de transports, car la grande distribution lui répercute ce qu'elle ne peut pas négocier avec la multinationale.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Je comprends ce que vous dites, mais le coeur du combat, c'est le retour « cour de ferme ». Il faut pour cela modifier le rapport de force, pour se fonder sur le prix agricole.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Le retour « cour de ferme », oui, mais il faut aussi veiller au maillon de transformation qui valorise les produits. Alors que les coûts de l'énergie et des emballages explosent, ces acteurs seront sous pression. Il ne s'agit pas d'une révision automatique mais d'une clause de renégociation.

Les amendements identiques nos107 rectifié bis, 114 rectifié bis et 159 sont adoptés et deviennent un article additionnel

ARTICLE 2 BIS B

Mme le président.  - Amendement n°71 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Houpert, Bonhomme, Tabarot, Hingray et Laménie, Mmes Belrhiti et Deromedi et MM. Bouchet, Charon et Sido.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 441-7 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Art. L. 441-7.  -  Le contrat conclu entre un fournisseur et un distributeur portant sur la conception et la production de produits alimentaires selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur et vendus sous marque de distributeur remplit les conditions fixées à l'article L. 441-4 et mentionne notamment :

« 1° Les conditions générales de vente ;

« 2° Le chiffre d'affaires prévisionnel, qui constitue le plan d'affaires de la relation commerciale. Lorsque sa durée est de deux ou trois ans, ce contrat fixe les modalités selon lesquelles le chiffre d'affaires prévisionnel est révisé ;

« 3° Les engagements du distributeur en matière de volume de produits alimentaires achetés ;

« 4° La prise en compte, par l'acheteur, dans la détermination du prix, des efforts d'innovation du fournisseur. »

M. François Bonhomme.  - Cet amendement reprend une proposition du rapport d'enquête de MM. Besson-Moreau et Benoît consistant à assujettir les accords relatifs à la fourniture de produits de marque distributeur au même formalisme contractuel que les produits de marque.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - L'amendement est en grande partie satisfait par le texte de la commission, qui instaure un encadrement inédit des négociations pour un rééquilibrage global. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°71 est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°104 rectifié, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

I.  -  Alinéas 2 à 9

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéas 11 à 13

Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :

« III.  -  Outre les éléments mentionnés au I, le contrat conclu entre un fabricant et un acheteur portant sur la conception et la production de produits alimentaires selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur et vendus sous marque de distributeur comporte a minima une clause relative :

« 1° Aux engagements sur les volumes prévisionnels ;

« 2° Pour les produits soumis aux dispositions du I de l'article L. 441-1-1, à la révision automatique, à la hausse ou à la baisse, de la part des prix du contrat qui résulte du coût de la matière première agricole, en fonction de la variation de ce coût. Les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application de l'article L. 631-24-1 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés ;

« 3° La durée de préavis à respecter en cas de résiliation du contrat, définie conformément aux dispositions du II de l'article L. 442-1 du présent code.

 « IV.  -  Aucune dépense liée aux opérations promotionnelles de mises en avant d'un produit vendu sous marque de distributeur ne peut être mise à la charge du fabricant.

« V.  -  L'appel d'offres portant sur la conception et la production de produits alimentaires selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur et vendus sous marque de distributeur comporte un engagement du distributeur relatif aux volumes prévisionnels qu'il souhaite faire produire.

« VI.  -  Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.

« Le maximum de l'amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

Mme Patricia Schillinger.  - Alors que des produits sous marque de distributeur (MDD) occupent une place croissante dans les rayons, il importe de s'assurer qu'ils participent à l'objectif d'une rémunération plus juste des agriculteurs.

Cet amendement prévoit que l'appel d'offres ou le contrat portant sur la conception et la production de produits alimentaires comporte un engagement sur des volumes prévisionnels.

Il fixe le préavis à respecter en cas de rupture de la relation contractuelle et interdit que les dépenses liées aux opérations promotionnelles soient mises à la charge du fabricant.

Mme le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par MM. Sautarel, Bonhomme, Laménie, Genet et Belin, Mme Gosselin, MM. Bouchet et Tabarot, Mmes Muller-Bronn et Belrhiti, MM. Lefèvre, C. Vial, Charon et Calvet, Mmes Ventalon et Deromedi, M. Anglars, Mme Dumont et M. Burgoa.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée : 

La clause de détermination du prix prend en compte des indicateurs mentionnés à l'avant-dernier alinéa du III de l'article L. 631-24, à l'article L. 631-24-1 et au II de l'article L. 631-24-3 du code rural et de la pêche maritime.

M. Stéphane Sautarel.  - La cascade des indicateurs du contrat amont vers le contrat aval n'est pas suffisamment appliquée.

Au regard de la complexité de certaines chaînes d'approvisionnement, il convient de renforcer cette cascade.

Cet amendement prévoit que pour les produits à marque de distributeur, les indicateurs soient contenus dans la clause de prix du contrat passé entre l'acheteur de produit agricole et son propre client, pour que l'amont ait un réel impact sur l'aval.

Mme le président.  - Amendement identique n°17 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Brisson, Mmes Gosselin et Imbert, MM. Laménie, D. Laurent, Chatillon et Burgoa, Mme Dumont, MM. Genet et Grosperrin, Mmes Deromedi et Puissat, M. Charon et Mme Joseph.

Mme Béatrice Gosselin.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°150, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

I.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le distributeur prend en compte, dans la détermination du prix, les efforts d'innovation du fournisseur.

II.  -  Alinéa 11, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Rédactionnel.

Mme le président.  - Amendement n°127 rectifié, présenté par MM. Somon et Burgoa, Mmes Belrhiti et Dumont, MM. Cuypers, Bonhomme, Saury, Belin et Genet et Mme Deromedi.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

La clause de détermination du prix prend en compte des indicateurs mentionnés à l'avant dernier alinéa du III de l'article L. 631-24, à l'article L. 631-24-1 et au II de l'article L. 631-24-3 du code rural et de la pêche maritime.

M. Laurent Somon.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°151, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 5

1° Première phrase

a) Supprimer les mots :

par le fournisseur

b) Après le mot :

attester

insérer les mots :

sous quinze jours

2° Deuxième phrase

Après le mot :

remet

insérer les mots :

sous cinq jours

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Une fois sollicité par le distributeur, le fabricant devra transmettre sous cinq jours au tiers indépendant les informations nécessaires, ledit tiers devant attester l'exactitude de la variation du coût de la matière première agricole sous quinze jours.

Mme le président.  - Amendement n°121 rectifié, présenté par MM. Menonville, Chasseing, Decool, Wattebled et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Malhuret et Médevielle.

I.  -  Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat comporte une clause fixant les modalités de révision du prix en cas de variation des coûts de l'énergie, du transport, des emballages, des contributions et coûts fiscaux environnementaux. » ;

II.  -  Alinéa 8

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Dès lors que l'acheteur a connaissance de faits extérieurs qui impacteront l'engagement sur les volumes, il en avertit par lettre recommandée avec accusé de réception le fabricant et mentionne précisément les éléments qui justifient du non-respect de l'engagement prévu au contrat. Cet avertissement doit intervenir dans un délai maximum de dix jours après la connaissance des faits extérieurs mentionnés à l'alinéa précédent.

III.  -  Alinéa 11, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

L'acheteur supporte l'ensemble des coûts additionnels qui ne figurent pas dans l'appel d'offres et le contrat.

IV.  -  Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Aucune information relative à l'identification des fournisseurs de matières premières et des produits transformés entrant dans la composition des produits ne peut être demandée par l'acheteur.

V.  -  Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.

« Le maximum de l'amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

M. Franck Menonville.  - Il ne peut être fixé un prix juste sans engagement sur les volumes. Un engagement prévisionnel ne saurait être suffisant.

Mme le président.  - Amendement n°139, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéas 7 et 8

Supprimer (quatre fois) le mot :

prévisionnel

M. Joël Labbé.  - Les marques de distributeurs représentent une part en augmentation du volume des produits alimentaires vendus, et font l'objet d'une guerre des prix.

La commission a effectué un pas dans la bonne direction en renforçant l'article 2 bis B.

Cependant, c'est sur des volumes et pas seulement sur des volumes prévisionnels que le contrat doit comporter un engagement, sachant que le fournisseur investit pour produire mais aussi pour concevoir ces produits.

Mme le président.  - Amendement n°152, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 8, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Le distributeur informe par écrit le fabricant, dès lors qu'il en a connaissance, de tout écart à venir entre le volume prévisionnel et le volume de produits alimentaires qu'il entend effectivement acquérir.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Le distributeur doit informer le fabricant par écrit de tout écart à venir entre le volume prévisionnel mentionné dans le contrat et le volume qu'il entend effectivement acquérir.

Mme le président.  - Amendement n°153, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 11, première phrase

Supprimer les mots :

liés à la conception et à la production du produit, y compris les coûts

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement restreint la clause de répartition des coûts aux seuls coûts additionnels survenant au cours de l'exécution du contrat.

Mme le président.  - Amendement n°154, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

« VI.  -  Tout manquement aux dispositions du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.

« Le maximum de l'amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

« VII.  -  Un décret définit les modalités d'application du présent article, notamment la définition du tiers indépendant mentionné au I. »

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement introduit un régime de sanctions : 75 000 euros pour les personnes physiques et 375 000 euros pour les personnes morales.

Mme le président.  - Sous-amendement n°160 à l'amendement n°154 de Mme Loisier, au nom de la commission, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Amendement n°154, alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Patricia Schillinger.  - Défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis défavorable à l'amendement n°104 rectifié, qui restreint le champ de la clause de révision automatique des prix.

Les amendements nos7 rectifié et 17 rectifié bis sont satisfaits, les contrats MDD doivent déjà faire référence aux indicateurs de référence. Retrait ou avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°127 rectifié.

Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°121 rectifié, partiellement satisfait par les amendements de la commission. Il faut surtout que le fabricant n'ait pas de surprise en cours d'exécution.

Avis défavorable à l'amendement n°139, qui pourrait inciter le distributeur à opter pour des contrats plus courts, préjudiciables au fournisseur.

Avis défavorable à titre personnel -  la commission n'ayant pu se réunir  - au sous-amendement n°160, qui supprime la référence à un décret pour la définition des tiers indépendants.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Je salue l'important travail de la commission sur les MDD.

Avis favorable à l'amendement n°104 rectifié, qui trouve le bon équilibre.

Même avis que la rapporteure sur les amendements nos7 rectifié et 17 rectifié bis.

Avis défavorable à l'amendement n°150, qui s'éloigne de l'objectif de la loi : agir sur les prix des matières premières agricoles.

Défavorable également à l'amendement n°127 rectifié.

Avis défavorable aux amendements nos151, 121 rectifié et 139.

Sagesse sur les amendements nos152 et 153.

Avis favorable à l'amendement n°154, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n°160 : le tiers de confiance n'a pas besoin d'être défini par décret.

L'amendement n°104 rectifié n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos7 rectifié et 17 rectifié bis sont retirés.

L'amendement n°150 est adopté.

L'amendement n°127 rectifié est retiré.

L'amendement n°151 est adopté.

L'amendement n°121 rectifié est retiré.

L'amendement n°139 n'est pas adopté.

Les amendements nos152 et 153 sont adoptés.

Le sous-amendement n°160 n'est pas adopté.

L'amendement n°154 est adopté.

L'article 2 bis B, modifié, est adopté.

ARTICLE 2 BIS C

L'amendement n°72 n'est pas défendu.

Mme le président.  - Amendement n°30, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 7, deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

qui ne peut excéder un taux de service maximum de 95%

M. Serge Mérillou.  - Cet amendement plafonne le taux maximum de service pouvant être retenu dans les contrats afin de prévoir une marge d'erreur suffisante.

Ils sont en moyenne de 98,5 % et peuvent atteindre 99,9 %, générant automatiquement l'application de pénalités.

Le taux qui sera fixé par décret devra être réaliste et adapté à la vie économique.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous avons beaucoup débattu de ce sujet. La pertinence d'un taux s'apprécie au regard du volume à livrer. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°30 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°155, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

lorsque leur quantité livrée ou leurs caractéristiques sont conformes aux dispositions du contrat

II.  -  Alinéas 14 et 16

Supprimer ces alinéas.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement restreint l'interdiction de refus ou retours de marchandises aux seuls cas où la marchandise était conforme au contrat, qualitativement et quantitativement.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°155 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 12, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

exprimé en perte de chiffre d'affaires

M. Jean-Claude Tissot.  - Les cas dans lesquels pourront être appliquées des pénalités logistiques devront être justifiés par une perte de chiffre d'affaires.

Il s'agit d'éviter les nombreux abus dont sont victimes les fournisseurs de la part de la grande distribution. Si aucune perte de chiffre d'affaires n'est enregistrée, la pénalité n'a pas lieu d'être.

Mme le président.  - Amendement n°32, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 13, seconde phrase :

Après les mots :

En cas de force majeure,

insérer les mots :

et notamment lorsqu'un état d'urgence sanitaire défini au chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique est déclaré,

M. Jean-Claude Tissot.  - Malgré le caractère exceptionnel de la crise du Covid, certaines enseignes ont infligé des pénalités logistiques sans commune mesure avec le préjudice économique subi.

Il faut préciser qu'au-delà du cas de force majeure, aucune pénalité logistique ne peut être infligée en période d'état d'urgence sanitaire.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Si un contrat est mal exécuté par un industriel, le distributeur peut subir un préjudice de notoriété ou un manque à gagner, sans parler de la désorganisation si les horaires de livraison ne sont pas respectés, par exemple... Il semble plus juste de garder toutes les possibilités ouvertes.

Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°31.

Il y a eu des abus durant le premier confinement, de la part de certains distributeurs mais aussi de certains fournisseurs. Toute pénalité logistique pendant l'état d'urgence sanitaire n'est pas forcément illégitime. Elle est en revanche interdite en cas de force majeure.

Retrait ou avis défavorable à l'amendement n° 32.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

L'amendement n°31 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°32.

L'article 2 bis C, modifié, est adopté.

ARTICLE 2 BIS D

Mme le président.  - Amendement n°109 rectifié, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Cuypers, Mmes Chauvin, Puissat et Thomas, MM. Daubresse, Bacci, Chaize, Decool et Burgoa, Mmes Muller-Bronn et Dumont, M. Chasseing, Mme Belrhiti, MM. H. Leroy, Pointereau, Détraigne, Bouchet, Sido, D. Laurent et Chatillon, Mme Malet, M. Genet, Mme Deroche, MM. Savary et Belin, Mme Lassarade, MM. Somon, Bonhomme, Hingray, Tabarot, Rietmann, B. Fournier, Panunzi, Charon et Chauvet, Mme Gruny, M. Anglars, Mme Richer et M. Allizard.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

produits alimentaires

par les mots :

denrées alimentaires et des produits destinés à l'alimentation des animaux domestiques

M. Laurent Duplomb.  - Cet amendement étend la non-négociabilité tarifaire aux produits destinés à l'alimentation des animaux domestiques, par cohérence.

Mme le président.  - Amendement n°76, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Après le mot :

alimentaires

insérer les mots :

dans la composition desquels entrent des matières premières agricoles ou des produits transformés soumis aux dispositions du I de l'article L. 441-1-1

M. Julien Denormandie, ministre.  - Il est très important de mettre en cohérence les trois étages de la fusée - non-discrimination tarifaire, non négociabilité des prix des matières premières agricoles et ligne à ligne spécifique - afin de toucher le « cour de ferme ».

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis favorable à l'amendement n°109. Défavorable à l'amendement n°76, qui restreint la mesure aux seuls produits alimentaires soumis à transparence.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Sagesse sur l'amendement n°109 rectifié. Sans l'amendement n°76, tout sera prétexte à hausse, alors que nous souhaitons cibler les matières premières agricoles. Vous allez voir apparaître des shampoings au zeste de citron...

L'amendement n°109 rectifié est adopté.

L'amendement n°76 n'a plus d'objet.

Mme le président.  - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par Mme Estrosi Sassone, M. D. Laurent, Mme Canayer, MM. Bacci et Pointereau, Mmes Deromedi et Berthet, MM. Cardoux, Burgoa, Karoutchi, Lefèvre, Savary, Chatillon, Calvet, Daubresse et Chaize, Mme Dumont, MM. Cabanel et Tabarot, Mme Richer, M. Milon, Mmes Bonfanti-Dossat et Demas, MM. Savin et Bouchet, Mme Borchio Fontimp, MM. Genet et Panunzi, Mme Joseph et MM. Cadec, Babary, Bouloux, Saury, Charon, Cuypers, Bonhomme, Rapin et Husson.

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  Le V de l'article L. 441-4 du code de commerce est abrogé.

....  -  L'article L. 442-1 du code de commerce est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« .... - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de distribution ou de services, de faire obstacle à la prise d'effets du tarif général du fournisseur à la date prévue pour son entrée en vigueur, sous réserve que ce tarif général a été communiqué trois mois avant cette date. »

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - L'application homogène du tarif général de l'industriel, sous réserve d'un préavis de trois mois, n'entame aucunement le principe de négociabilité des conditions commerciales entre fournisseur et distributeur, ni la liberté du distributeur de référencer ou non telle gamme.

L'agriculteur pourra imposer des hausses de prix, le distributeur maîtrisera ses prix au consommateur - de même, le transformateur doit pouvoir maîtriser son tarif général tout au long de l'année. C'est la condition d'une réelle répartition de la valeur de l'amont vers l'aval.

Il faut renforcer les transformateurs PME qui privilégient l'approvisionnement local et les circuits courts et rééquilibrer le rapport de force avec la grande distribution.

L'amendement n°22 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°73 rectifié bis, présenté par MM. Roux, Requier, Artano, Bilhac, Corbisez, Gold, Guérini, Guiol et Fialaire et Mmes M. Carrère et N. Delattre.

M. Jean-Yves Roux.  - La relation industriel-distributeur mérite aussi toute notre attention. Les PME agroalimentaires qui irriguent nos territoires sont sous pression des distributeurs pour baisser leurs prix.

Mme le président.  - Amendement identique n°140, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

M. Joël Labbé.  - Cet amendement garantit l'adaptabilité réelle et continue des prix pratiqués par les fournisseurs, tout au long de l'année, afin de prendre en compte les variations des coûts agricoles et de transformation.

L'application homogène du tarif général du fournisseur est le complément nécessaire de la non-négociabilité du prix des matières premières agricoles.

Sans rééquilibrage, le distributeur reste en position de force.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cela interdirait toute négociation sur le tarif fournisseur au-delà des seules matières premières agricoles. Il suffira que l'industriel exige une hausse et il l'obtiendra, charge au distributeur de la répercuter sur le client !

La commission a souhaité rééquilibrer le rapport de force, mais vous tombez dans l'excès inverse. L'industriel pourra ouvrir la négociation en cas d'évolution des coûts de transport, d'énergie et d'emballage, ce qui satisfait en partie votre amendement. Retrait ou avis défavorable.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

Les amendements identiques nos21 rectifié bis, 73 rectifié bis et 140 ne sont pas adoptés.

L'article 2 bis D, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 2 bis D

Mme le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, MM. D. Laurent, Chatillon et Darnaud, Mme Férat, MM. Pellevat, Laménie, Burgoa et Daubresse, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bacci et Hugonet, Mme Belrhiti, MM. Guerriau et Savin, Mme Puissat, MM. E. Blanc, Vogel, J.B. Blanc et Bascher, Mme Noël, MM. Chaize et Rietmann, Mme Richer, M. Bouchet, Mmes Lassarade et Imbert, M. Grosperrin, Mme L. Darcos, MM. Charon et Cuypers, Mmes Ventalon, Dumont et Bourrat, M. Anglars, Mmes Gruny, Schalck et Deromedi, MM. Piednoir, Détraigne, Menonville, Chasseing, Hingray, Belin, Chauvet et Babary, Mme Micouleau et MM. Sido, B. Fournier et Savary.

Après l'article 2 bis D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 441-10 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé : 

« Dans le cadre d'achat de produits ou de prestation de services liés à l'exécution de la convention mentionnée à l'article L. 441-4 du même code, les délais de paiement indiqués sur les factures émises par les distributeurs ne peuvent être inférieurs aux délais de paiement indiqués sur les factures émises par les fournisseurs. »

M. Laurent Duplomb.  - Nous avons réglé le problème des pénalités logistiques, du retrait-rappel, des cas de force majeure : il manque l'harmonisation de la facturation. Il n'est pas normal que les fournisseurs servent de banque aux distributeurs en étant payés à soixante jours alors qu'ils doivent payer les pénalités à trente jours. Il faut arrêter cette aspiration de la trésorerie des fournisseurs par les distributeurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis favorable à cet amendement de rééquilibrage.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Je ne comprends pas. Un distributeur qui voudrait se faire de la trésorerie sur le dos du fournisseur chercherait plutôt à lui imposer un délai de paiement supérieur. Et si ce dernier est maître du délai qu'il fixe, il peut le réduire à l'extrême...

Retrait pour y retravailler d'ici la CMP, car je ne comprends pas.

M. Laurent Duplomb.  - L'amendement prévoit une harmonisation. Le distributeur achète au fournisseur des marchandises et paye à soixante jours ; il facture au fournisseur des prestations - promotion, mise en rayon, etc - mais se fait payer à trente jours. Avec cet amendement, ce ne serait plus possible.

Mme Sophie Primas, présidente.  - Il s'agit de factures pour des services, pas pour des marchandises.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cela ne concerne pas l'amont, mais les relations entre fournisseur et distributeur. Ce dernier ne doit pas demander au fournisseur de payer plus rapidement les pénalités logistiques qui n'a lui-même payé la livraison de la marchandise !

M. Julien Denormandie, ministre.  - J'ai compris ! Reste que cet amendement ne concerne pas spécifiquement les produits agricoles, il vient réguler les relations entre distributeurs et fournisseurs, tous secteurs confondus.

M. Laurent Duplomb.  - Et si on le restreint à l'alimentation ?

M. Julien Denormandie, ministre.  - La question des délais de paiement est très importante, mais dépasse le cadre de ce texte.

L'amendement n°11 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 2 BIS E

Mme le président.  - Amendement n°45 rectifié quater, présenté par MM. Moga, Longeot, Guerriau et Duffourg, Mme Bonfanti-Dossat, MM. A. Marc, Cigolotti, Laménie et Kern, Mme Sollogoub, MM. Canévet, Détraigne, Hingray, Belin et S. Demilly, Mme Jacquemet, M. Le Nay, Mme Noël et MM. Chauvet, Bonhomme, Houpert et Levi.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

et des produits mentionnés à la partie IX et à la partie XI de l'annexe 1 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE), n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil

M. Jean-Pierre Moga.  - Le relèvement du seuil de revente à perte (SRP), introduit dans la loi EGalim, a eu des effets pervers pour certaines filières agricoles et notamment les producteurs de fruits et légumes frais.

Pour la fraise gariguette, le distributeur a maintenu son prix de vente au consommateur intégrant la revalorisation obligatoire de 10 %, conformément à la loi, tout en durcissant les négociations avec son fournisseur. Dès lors, la hausse du SRP de 10 % s'est traduite, en l'espèce, par une baisse de 10 % du prix d'achat aux producteurs.

La loi EGalim a provoqué un effet déflationniste, à rebours de son objectif. Mettons-y un terme.

Mme le président.  - Amendement identique n°110 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Cuypers, Mmes Chauvin et Puissat, MM. Daubresse, Bacchi, Decool et Burgoa, Mmes Muller-Bronn et Dumont, M. Chasseing, Mme Belrhiti, MM. H. Leroy, Pointereau, Bouchet, Sido, D. Laurent et Chatillon, Mme Malet, MM. Genet et Allizard, Mme Richer, M. Anglars, Mme Gruny, MM. B. Fournier, Rietmann, Tabarot et Somon, Mme Lassarade, M. Savary et Mme Deromedi.

M. Laurent Duplomb.  - Je ne comprendrais pas que l'on bute sur cet amendement. Si la logique de la loi EGalim II est de corriger la loi EGalim I pour améliorer le revenu des agriculteurs, il y a toute sa place.

La revalorisation de 10% du SRP s'est traduite par une baisse du revenu de 10 % pour les producteurs de fraises, mais aussi de tomates ou de concombres, en raison de la hausse des charges. On estime le coût à 20 millions d'euros pour la filière pomme, 8 millions d'euros pour la tomate grappe.

J'ai ajouté les bananes car elles ne font pas partie de la même organisation commune des marchés (OCM) que les autres fruits frais.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il faut toucher au SRP avec précaution dans l'attente du prochain rapport gouvernemental. Mais il est vrai que certaines filières, dont les fruits et légumes, ont été durement touchées lors des négociations avec les distributeurs.

Sagesse sur ces deux amendements identiques.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Nos débats, complexes, sont de grande qualité. Je remercie le Sénat pour cela.

Pourquoi les fruits et légumes et pas la viande ?

M. Laurent Duplomb.  - Car ils sont à 80 % sous contrat !

M. Julien Denormandie, ministre.  - Cela pourrait être également le cas du blé tendre, mais pas du blé dur...

Je suis convaincu que le SRP a déjà été intégré dans les prix. Allons au bout de l'expérimentation pour savoir s'il faut continuer ou non. J'avoue que l'approche sectorielle me gêne.

Retrait des amendements ?

M. Laurent Duplomb.  - Je suis déçu. Vous faites une loi EGalim II sans avoir publié de rapport et vous nous demandez de modifier EGalim I.

Pour les fruits et légumes, la revalorisation du SRP a fait baisser le prix des produits de 10 % : c'est aussi simple que cela ! Ce sont des éléments factuels. Voilà trois ans que cette filière perd de l'argent ! Ne faisons pas l'autruche ! Ou alors acceptons de ne plus manger que des pommes polonaises et des tomates espagnoles !

Les amendements identiques nos45 rectifié quater et 110 rectifié bis sont adoptés.

L'article 2 bis E, modifié, est adopté.

Mme le président.  - Nous avons examiné 95 amendements ; il en reste 51 sur ce texte.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 22 septembre 2021, à 15 heures.

La séance est levée à 00 h 40.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 22 septembre 2021

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires : M. Joël Guerriau Mme Marie Mercier

1. Questions d'actualité

À 16 h 30 et le soir

Présidence : Mme Nathalie Delattre, vice-présidente M. Roger Karoutchi, vice-président

2. Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à protéger la rémunération des agriculteurs (texte de la commission, n°829, 2020-2021)

3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels (texte de la commission, n° 787, 2020-2021)