De gauche à droite : MM. Mickaël Vallet, Jean-Michel Houllegatte,
Dominique de Legge et Mme Marie Mercier

Le mardi 16 mai 2023, le groupe d’amitié France-Saint-Siège, présidé par M. Dominique de LEGGE (Les Républicains Ille-et-Vilaine), président, a reçu SER Mgr le cardinal Jean-Marc AVELINE, archevêque de Marseille.

Étaient également présents  M. Jérôme BASCHER (LR - Oise), Mme Valérie BOYER (LR – Bouches-du-Rhône), MM. Christian CAMBON (LR – Val-de-Marne) et Emmanuel CAPUS (Les Indépendants - République et Territoires – Maine-et-Loire), Mme Marie-Arlette CARLOTTI (Socialiste Écologiste et Républicain – Bouches-du-Rhône), M. Pierre CUYPERS (LR – Seine-et-Marne), Mme Brigitte DEVESA (Union Centriste – Bouches-du-Rhône), MM. Bernard FOURNIER (LR – Loire), Jean-Noël GUÉRINI (Rassemblement démocratique social et européen – Bouches-du-Rhône), Loïc HERVÉ (UC – Haute-Savoie) et Jean-Michel HOULLEGATTE (SER – Manche), Mme Marie MERCIER (LR – Saône-et-Loire) et MM. Laurent SOMON (LR – Somme), Mickaël VALLET (SER – Charente-Maritime) et André VALLINI (SER – Isère).

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M. Dominique de LEGGE, président, après avoir rappelé le parcours de Mgr AVELINE, l’a interrogé sur sa vision des migrations sous leurs différents aspects et enjeux, allant de l’accueil du plus faible à la démographie en passant par les dimensions économiques, sociales et politiques, et sur l’organisation de la visite du pape François à Marseille, le 23 septembre prochain, qui ne sera pas une visite d’État dans notre pays.

Tout en remerciant les sénateurs de leur accueil, le cardinal a tout d’abord évoqué le souvenir de Jean-Claude Gaudin, ancien président du groupe d’amitié et figure de Marseille. Abordant ensuite la préparation de la visite du Pape, il a rappelé qu’elle prenait place après l’initiative de la conférence épiscopale italienne de réunir, à Bari en 2020, 40 évêques de la Méditerranée. Cela avait été réédité en 2022 à Florence et le maire de la ville avait également invité d’autres édiles. 60 évêques et 60 maires étaient présents. Marseille prend donc la suite car ces rencontres sont très riches. La Méditerranée concentre en effet un grand nombre d’enjeux mondiaux en matière d’environnement, de disparités socio-économiques, de migrations ou de tensions politiques et religieuses. Plus de 60 évêques vont donc échanger du mercredi au dimanche 24 septembre. Mais, dès le 17 septembre, des jeunes de tout le pourtour méditerranéen engagés dans des défis communs vont se retrouver pour travailler ensemble, puis avec les évêques. Le Pape viendra, le samedi 23 septembre, pour clôturer ces travaux, mais aussi prier à Notre-Dame de la Garde, avoir un moment de recueillement interreligieux pour les migrants disparus en mer, puis rencontrer l’Église de France à travers les évêques et les fidèles à l’occasion d’une messe au stade Vélodrome qui réunira plus de 55 000 personnes. Il était bien sûr important que les Français puissent avoir ce moment de prière avec le Pape, quel que soit le statut diplomatique de la visite, qui a suscité un grand élan populaire.

De gauche à droite : Mme Marie-Arlette Carlotti, M. Christian Cambon, Mgr Jean-Marc Aveline, MM. André Vallini et Jean-Noël Guérini et Mme Brigitte Devesa.

Si la question des migrations est importante, ce n’est évidemment pas la seule que le Pape abordera à Marseille. Ce sujet est d’ailleurs beaucoup sensible dans d’autres pays méditerranéens, au Nord comme au Sud. Seront également invités des évêques sub-sahariens qui n’ont en revanche pas la même vision des choses. Il faut également noter que dans le message du Pape à l’occasion de la journée internationale du migrant[1], le 24 septembre, il relève tout autant le droit de migrer que le droit de rester dans son pays et souhaite défendre la dignité humaine face aux causes de ces mouvements que sont notamment la guerre et la misère.

Abordant ensuite la situation de l’Église de France, l’archevêque de Marseille a appelé à regarder ce qui fait la mission de l’Église. Si bien entendu le sujet des abus doit être traité comme il convient, l’Église ayant un devoir d’exemplarité, cette responsabilité ne doit pas éteindre le zèle missionnaire et la possibilité de proposer la foi. Il a donné l’exemple de près de 200 jeunes en mission contre la pauvreté dans les quartiers Nord de Marseille. C’est un phénomène nouveau porteur d’évolutions positives. Leurs idées sur l’islam changent à travers les rencontres qu’ils réalisent. C’est en se mettant au service des pauvres qu’ils ont l’opportunité de donner un sens à leur vie, et souvent de s’inscrire dans les pas du Christ. Ils forment une nouvelle génération prometteuse qui résiste au rouleau compresseur de la sécularisation et de la consommation.

Interrogé par Mme Brigitte DEVESA sur la manière dont on devait comprendre le fait que le Pape se rende uniquement à Marseille, Mgr AVELINE a expliqué que si le Pape songeait à aller à Strasbourg, il ne rendait pas visite à une institution mais une communauté vivante. Marie-Arlette CARLOTTI a pour sa part estimé que Marseille était une ville particulièrement cosmopolite et ouverte sur le monde et que cela donnait naturellement une dimension internationale à cette visite.

M. Christian CAMBON ayant évoqué l’avenir des chrétiens d’Orient et la manière de les aider ainsi que la vision de la France par le Pape, le cardinal a appelé à faire tout ce qui était possible pour aider ces communautés et favoriser l’exercice de leurs responsabilités dans le respect du libre choix de leur avenir. Il a également indiqué que François était attiré par la France car elle était, selon le mot du cardinal Suhard, tout autant un pays de mission, en avance sur le reste de l’Église par rapport à la sécularisation, qu’un pays de missionnaires et de grands saints, comme sainte Thérèse de Lisieux, à laquelle il est particulièrement attaché.

De gauche à droite : Mgr Jean-Marc Aveline, MM. André Vallini et Jean-Noël Guérini.

Répondant ensuite à MM. Pierre CUYPERS et Jean-Noël GUéRINI, Mgr AVELINE a regretté que sur la question syrienne, comme dans d’autres zones du monde, la diplomatie occidentale soit quasiment paralysée. On ne se saisit pas vraiment du sujet et les populations en payent le prix fort, a-t-il estimé. Concernant le rôle du Vatican dans le conflit entre l’Ukraine et la Russie, évoqué par M. Jean-Michel HOULLEGATTE, il a indiqué que le Saint-Siège désignait clairement l’agresseur et l’agressé mais souhaitait maintenir la possibilité in fine de s’asseoir autour d’une table pour donner une chance à la paix.

Interrogé par Mme Valérie BOYER sur l’ouverture d’une ambassade de l’Azerbaïdjan près le Saint-Siège alors que la guerre se poursuit avec l’Arménie, sur la situation des convertis de l’islam au christianisme et sur le risque de sécularisation des jeunes générations, il a souligné tout d’abord que la transmission de la foi était l’affaire de tous les fidèles, qui devaient être des témoins. Rien ne remplace le disciple, selon Mgr AVELINE, qui a donné de nouveau l’exemple du service des pauvres et de l’engagement de jeunes dans son diocèse. Concernant les conversions, il a relevé une forte croissance, de l’ordre de 30 %, des baptêmes et confirmations d’adultes. 10 % de ces convertis viennent de l’islam. Il faut que l’Église de France offre une proposition appropriée d’accompagnement pour passer de la découverte du Christ à l’implication dans les communautés locales. Enfin, concernant le Caucase, il a estimé qu’entretenir des liens diplomatiques était un pas pour espérer ensuite construire la paix, qui ne peut se faire sans rencontre et sans dialogue.

À l’invitation de M. Dominique de LEGGE, président, le cardinal a ensuite évoqué le processus synodal. Il a insisté sur la nécessité de travailler au niveau paroissial et de façon concrète, chacun exerçant les responsabilités qui sont les siennes. Cela demande une conversion car le « cléricalisme » peut résulter tout autant de l’attitude du clergé que des fidèles. Il a également partagé deux craintes : d’une part, le fait qu’à trop s’intéresser au fonctionnement interne, on s’éloigne de la mission prioritaire d’annonce de l’Évangile, et d’autre part le fait que les jeunes y ont très peu contribué. En France, cela a pu apparaître comme un instrument de réponse au rapport de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église, alors que ce n’était pas son objet.

Mgr AVELINE a ensuite précisé la situation dans le diocèse de Fréjus-Toulon à la demande de M. Emmanuel CAPUS. Il a rappelé qu’il y avait accompli une visite fraternelle en 2020 en tant qu’évêque métropolitain auprès de Mgr Rey, dont il était proche. Cela avait conduit à l’élaboration d’une charte en vue d’aider au discernement des vocations et à l’implantation de communautés nouvelles. Puis, en 2022, face aux interrogations persistantes de plusieurs dicastères, la décision a été prise de suspendre les ordinations et la congrégation pour les évêques a pris en charge une visite apostolique qui a duré trois semaines, dont le rapport est attendu prochainement. Cette procédure, qui résulte d’une décision collective, doit permettre de mieux distinguer et pérenniser ce qui s’est fait de positif dans ce diocèse.

Interrogé par Mme Marie MERCIER et M. Christian CAMBON sur la situation du Pape et les tensions au sein de la Curie, le cardinal n’a pas caché la lourdeur de la tâche au regard de la santé du Souverain pontife. Il a enfin regretté tout ce qui éloigne de la communion dans l’Église, qui n’est d’ailleurs pas synonyme d’uniformité.


[1]

https://www.humandevelopment.va/content/dam/sviluppoumano/news/2023-news/messaggio-mggr-2023/MESSAGE-DU-PAPE-FRANCOIS.pdf

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