Lundi 10 février 2025, sous la présidence de M. Cédric PERRIN (Les Républicains – Territoire de Belfort), président, le groupe d’amitié France - Suisse s’est entretenu par visio-conférence avec M. Martin KLAM, sous-directeur des affaires européennes et internationales à la direction générale des finances publiques (DGFIP), puis avec M. Christian DUPESSEY, maire d’Annemasse.

Etaient également présents : Mmes Marie-Do AESCHLIMANN (Les Républicains – Hauts-de-Seine), Martine BERTHET (LR – Savoie), Florence BLATRIX‑CONTAT (Socialiste, Écologiste et Républicain – Ain), Patricia SCHILLINGER (Rassemblement des Démocrates, Progressistes et Indépendants – Haut-Rhin). MM. Christian KLINGER (LR – Haut‑Rhin) et Stéphane PIEDNOIR (LR – Maine-et-Loire) et Mme Annick JACQUEMET (Union Centriste – Doubs) assistait également aux auditions, à l’invitation du président du groupe d’amitié.

M. Martin KLAM était accompagné de MM. Florian de FILIPPO, chef du bureau des règles de fiscalité internationale (E1) et Ardéchire KHANSARI, chef du bureau des principes généraux de l'impôt sur le revenu (C1).

Le premier point à l’ordre du jour portant sur la compensation financière genevoise, Martin KLAM a proposé de dresser un rapide historique et bilan de cette mesure. 

Il a ainsi rappelé que ce dispositif mis en place en 1973 entre le Conseil fédéral et le gouvernement français consiste en une compensation financière annuelle de 3,5 % de la masse salariale brute des frontaliers, reversée chaque année par le canton de Genève aux départements de l’Ain et de la Haute-Savoie. Ce reversement a pour objectif de participer aux charges des collectivités locales de ces deux départements dont les habitants travaillent à Genève ou son canton.

Il a émis une réserve marquée quant à une éventuelle volonté d’augmentation du pourcentage de reversement ou d’élargissement du dispositif aux autres départements proches de la Suisse, craignant une suppression pure et simple de cette compensation en cas de négociations. Il a cité, pour exemple, les pourparlers actuels difficiles avec un autre pays frontalier sur un dispositif similaire et qui, en cas d’accord aboutiraient de toute façon à un reversement à l’État et non aux collectivités locales. 

Répondant à M. Cédric PERRIN, président, sur le sentiment d’iniquité des départements du Doubs ou du Territoire de Belfort qu’alimenterait l’absence de bénéfice de cette compensation, qui s’est élevée pour 2024 à 372 millions de francs suisses, soit 387 millions d'euros, M.  Martin KLAM a rappelé que l’acceptation d’une telle mesure en 1973 par Genève était exceptionnelle. Il a renouvelé son conseil de ne pas remettre en cause ce dispositif.

Mme Florence BLATRIX‑CONTAT a approuvé les propos de M. KLAM, expliquant qu’une commune de son département, qui n’avait pas les fonds pour construire une école, s’était tournée vers la Suisse pour obtenir des crédits. Elle a ajouté que l’Ain bénéficiait de 20 % de la compensation et la Haute-Savoie de 80 %.

Mme Patricia SCHILLINGER a précisé que dans le cadre des Trois frontières, Bern finançait à hauteur de 16 millions d’euros les travaux d’infrastructures comme les autoroutes ou le tramway transfrontalier.

M. Ardéchire KHANSARI s’est ensuite exprimé sur les conséquences du vote par le parlement de l’article 3 du projet de loi de finances pour 2025 portant création d’une contribution différentielle sur les plus hauts revenus (CDHR), et plus particulièrement pour les salariés partant en 2025 à la retraite et ayant opté pour une assurance facultative privée dite « 3è pilier ».

Il a expliqué que l’article 3 prévoyait un mécanisme de prise en compte des revenus exceptionnels de nature à limiter les effets de la mise en place de la contribution pour les contribuables percevant des revenus issus du 3è pilier : lorsque ces revenus ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement et lorsque leur montant dépasse la moyenne des revenus nets d’après lesquels le contribuable a été soumis à l’impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, ces revenus sont considérés comme exceptionnels et ne sont retenus que pour le quart de leur montant dans le revenu de référence servant au calcul de la CDHR. Il s’est engagé, à la demande de M. Cédric PERRIN, président, à fournir des éléments écrits sur le traitement des revenus perçus au titre du 3è pilier dans le cadre de la CDHR.

Mme Patricia SCHILLINGER a précisé que le 3è pilier avait été instauré initialement au bénéfice des travailleurs du bâtiment pour compenser la pénibilité de leur emploi, ajoutant que toutes les branches salariales n’en bénéficiaient pas. Elle s’est émue de la complexité des démarches administratives au moment de la validation des piliers.

M. Cédric PERRIN, président, a remercié pour conclure MM.  Martin KLAM et Ardéchire KHANSARI d’avoir répondu aux questions du groupe d’amitié.

Le groupe d’amitié s’est ensuite entretenu avec M. Christian DUPESSEY, maire d’Annemasse, qui a dressé un bref aperçu historique de la compensation financière genevoise, précisant que les salariés français travaillant à Genève ou dans son canton sont imposés en Suisse et non en France. Il a donné l’exemple inverse du canton de Vaud, à qui l’État français reverse 4,5 % de la masse salariale brute des frontaliers.

Il a ensuite expliqué que le canton de Genève percevait en 2022 (dernière source disponible) près de 1,2 milliard de francs au titre de l’imposition à la source des travailleurs frontaliers et reversait aux alentours de 380 millions d’euros annuellement. 

Les fonds versés à son département (295 millions d’euros, soit 76 % de la compensation) sont répartis de la manière suivante :

  • le Conseil départemental (45 % des fonds versés) subventionne le désenclavement du chablais, des travaux d’assainissement, le déficit du Léman Express (4 millions d’euros), le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) (6 millions d’euros) et les collèges en zone frontalières (3,7 millions d’euros) ;

  • dans les 55 % restants : 10 % sont versés aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), 15 % au département et le reste aux communes ;

  • s’y ajoutent 50 millions d’euros cogérés par les collectivités et le Fonds d'aménagement de soutien aux projets innovants et structurants (FDIS). 

M. DUPESSEY a exprimé son attachement à cette compensation qui permet une gouvernance transfrontière performante, en prenant l’exemple du tramway transfrontalier pris en charge pour un tiers par les collectivités locales françaises, pour un tiers par la Suisse et pour un tiers par le FDIS.

Enfin, il a précisé qu’Annemasse, ville de 40 000 habitants dont la moitié travaille en Suisse, percevait 12 millions d’euros au titre de la compensation.

M. Cédric PERRIN, président, a remercié pour conclure M. Christian DUPESSEY pour son témoignage.

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