Extrait de la note du Président Jeanneney aux Questeurs

(22 février 1941)

« Certains paraissent croire que le transfert du Sénat de Paris à Vichy a dédoublé les administrations et les pouvoirs.

« L'erreur serait certaine.

« Constitutionnellement, le siège du Sénat est celui des Pouvoirs publics. Il y est présentement à Vichy, où le Président a l'obligation de se tenir, où le Bureau et les Secrétaires Généraux sont à ses côtés.

« En juin, lorsque l'injonction fut faite au Président et aux Services de quitter Paris, c'est une simple mission, qui a été laissée au Luxembourg. Elle avait pour objet essentiel de sauvegarder le Palais, ses richesses et ses traditions, en prenant éventuellement contact avec l'ennemi. M. HARDY lui avait été donné primitivement pour chef. M. HAMELIN, Questeur, a réclamé très noblement l'honneur d'être mis à sa tête. Nous l'en avons remercié hautement. Le caractère de la mission n'a pas changé pour cela.

« Les circonstances en ont pu accroître notablement le rôle. L'armistice se prolongeant, le nombre des Sénateurs résidant ou de passage en zone occupée, et qui y ont donc occasion ou besoins fréquents de contact avec l'administration du Sénat, s'est beaucoup augmenté. Nombre de fonctionnaires ou agents ont eux-mêmes reflué à Paris.

La situation de droit n'en a pourtant été modifiée aucunement. Les pouvoirs respectifs du Bureau, de son Président, des Questeurs, des Chefs de services sont restés tels que le Règlement en vigueur les fixe : la division de ces services en « législatifs » et « administratifs » reste elle-même intacte.

« Si le retour à Paris des Pouvoirs publics devait être différé longtemps encore, il y aurait probablement avantage à envisager la délégation de certains pouvoirs par Vichy à Paris, pour assouplir le fonctionnement des services. Cette mesure n'a point encore été envisagée par les Services de la Présidence. Je n'ai pas souvenir qu'il en ait été consenti aucune explicitement. On peut admettre à la rigueur qu'il puisse y en avoir d'implicites, mais elles ne se conçoivent en toute matière importante, que pour les cas exigeant une intervention urgente, et pour des mesures très provisoires, la décision définitive ne cessant pas d'appartenir à l'autorité normale.

« Ce sont là principes à ne point perdre de vue. »