EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La démocratie française traverse une crise de confiance profonde. Les récents scrutins législatifs ont mis en lumière les limites du système actuel, marqué par des alliances de circonstance, des désistements stratégiques et une opacité qui nourrit la défiance des citoyens envers leurs représentants.
Face à cette situation, il est impératif de s'interroger sur une réforme en profondeur du mode de scrutin des élections législatives pour restaurer la clarté, la sincérité et l'efficacité de la vie politique.
En effet, force est de constater que le mode de scrutin à deux tours, tel qu'il existe aujourd'hui, favorise les accords d'appareil et les désistements de dernière minute qui renforce l'aversion des Français pour la vie politique. Ces pratiques, loin de servir la démocratie, la fragilisent : elles brouillent le message envoyé par les électeurs, détournent le résultat du scrutin de la volonté populaire et alimentent le sentiment d'être dépossédé de son choix. Très récemment, les accords d'entre-deux tours ont donné (dans le cadre des élections législatives de 2024) suffisamment matière à la critique : souvent négociés dans l'ombre, ils ont abouti à des combines d'appareil qui ne reflétaient pas la volonté du peuple ; nous en subissons encore au quotidien les conséquences néfastes sur l'action gouvernementale et la vie parlementaire.
De surcroît, ces manoeuvres renforcent l'abstention. Les plus de 12,5 % des électeurs qui auraient choisi de voter au premier tour pour un candidat, de sorte qu'il accède au second tour, n'ont pas systématiquement envie de suivre les décisions prises unilatéralement par les appareils politiques consistant à pousser certains de leurs candidats à abandonner la course. En résulte inévitablement un affaiblissement de la légitimité du scrutin et, par voie de conséquence, de la force de la démocratie.
Dans une démocratie saine, les accords entre différents partis ou mouvances politiques devraient être présentés aux électeurs en amont des échéances électorales, ce que le scrutin propositionnel en débat actuellement ne favorise pas. D'ailleurs, les élections européennes illustrent cette tendance, inhérente au mode de scrutin proportionnel, à pousser à la division, même des mouvements politiques les plus proches idéologiquement -laissant aux accords post-électoraux le soin de dégager, sans certitude, une majorité de gouvernement qui ne pourra jamais se reposer sur la légitimité du vote démocratique. La proportionnelle est à cet égard tout le contraire de l'esprit d'une Ve République fondée contre le régime des partis de la IVème République. Elle nous ferait retomber assurément dans l'instabilité gouvernementale.
Ainsi, la présente proposition de loi prévoit en conséquence d'instaurer un mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour pour les élections des députés. Adopter ce scrutin à un seul tour, c'est faire le choix de la transparence et de la responsabilité. Ce système, éprouvé dans d'autres grandes démocraties comme le Royaume-Uni, présente plusieurs atouts majeurs :
- Clarté du choix : chaque électeur sait que son vote comptera pleinement et qu'il ne sera pas déformé par des accords de second tour. Le candidat arrivé en tête l'emporte : c'est simple, lisible, et compréhensible par tous.
- Fin des magouilles d'appareil : les partis sont incités à présenter des alliances claires avant le scrutin, soumises à l'approbation des électeurs, et non plus à les négocier après coup dans le dos des citoyens.
- Stabilité gouvernementale : ce mode de scrutin permet de dégager des majorités nettes, condition indispensable à la stabilité et à l'efficacité de l'action publique.
- Responsabilisation des acteurs politiques : chaque formation doit assumer devant les Français ses choix d'alliance et son programme, ce qui favorise la cohérence et la lisibilité de l'offre politique.
- Sincérité du scrutin : l'électeur n'a plus à voter « contre » un candidat ou à choisir par défaut, mais peut exprimer un choix positif en faveur du projet qu'il soutient.
Le scrutin uninominal majoritaire à un tour est l'une des réponses à la crise démocratique que traverse notre pays. Il mettra fin aux petits arrangements, restaurera la sincérité du suffrage et permettra à la France de retrouver une vie politique apaisée, stable et lisible. Cette réforme n'est pas pensée pour avantager telle ou telle famille politique. Elle vise à restaurer la confiance entre les citoyens et leurs représentants, à redonner du sens au vote et à renforcer la légitimité de l'Assemblée nationale. Elle s'inscrit dans l'esprit de la Ve République : un régime stable, efficace, fondé sur la clarté des choix et la responsabilité des élus. En définitif, ce mode de scrutin entraînera inexorablement avec lui un phénomène de polarisation qui devrait nous ramener au tant regretté clivage droite/gauche.