Service des Commissions

M. HUBERT VEDRINE EVOQUE DEVANT LES SENATEURS LE DEROULEMENT DES NEGOCIATIONS DE RAMBOUILLET SUR LE KOSOVO

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, présidée par M. Xavier de Villepin, président, a entendu le jeudi 11 février 1999, M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine a tout d’abord souligné la grande complexité et la difficulté de la négociation sur le Kosovo engagée depuis quelques jours à Rambouillet. Il a souligné que, depuis mars 1998, le groupe de contact avait su maintenir une ligne commune et cohérente, grâce notamment aux efforts des quatre pays européens pour rapprocher les points de vue russe et américain. L’enjeu restait l’acceptation par les deux parties d’une autonomie substantielle pour le Kosovo.

Le ministre des affaires étrangères a relevé avec intérêt la convergence des pressions exercées par la communauté internationale au travers de l’Union européenne, du groupe de contact, de l’OSCE, de l’OTAN et du Conseil de sécurité, et surtout l’acceptation par les deux parties de leur participation à la réunion de Rambouillet.

Le ministre des affaires étrangères a considéré que l’issue de la négociation reposait sur la capacité des Albanais à admettre une solution autre que l’indépendance et sur celle des autorités yougoslaves d’accepter l’idée d’autonomie substantielle du Kosovo.

A l’issue de l’exposé du ministre, MM. Christian de La Malène et Emmanuel Hamel se sont interrogés sur les moyens de pression exercés par la communauté internationale pour amener les parties en présence à dégager un accord.

M. Michel Caldaguès, rappelant la menace de frappes aériennes à l’encontre de la Serbie, a demandé quels types de pressions pouvaient être exercées sur la partie albanaise pour l’amener à accepter un accord. Il a en particulier évoqué la possibilité de peser sur les approvisionnements et la logistique de l’armée de libération du Kosovo.

M. André Boyer a souhaité savoir si les différentes délégations représentant la partie albanaise partageaient une même unité de vues.

M. Xavier de Villepin, président, a interrogé le ministre sur l’idée, évoquée dans la presse américaine, d’un échange de territoires au profit de la Serbie en Bosnie Herzégovine, en contrepartie de l’acceptation d’un accord sur le Kosovo.

M. Hubert Védrine a tout d’abord confirmé que certains analystes avaient bien évoqué une possibilité de rattachement de la République serbe de Bosnie à la Yougoslavie si cette dernière devait abandonner son contrôle sur le Kosovo, mais il a souligné qu’aucune proposition de ce genre n’avait jamais été formulée ni même évoquée par les gouvernements du groupe de contact ou par les négociateurs.

Le ministre des affaires étrangères a ensuite précisé que certains représentants des Albanais du Kosovo, sans renoncer à leur aspiration à l’indépendance, étaient disposées à accepter l’idée d’une autonomie substantielle, alors que d’autres rejetaient toute solution politique et tout règlement qui ne déboucherait pas sur l’indépendance.

S’agissant des moyens de pression sur chacune des deux parties, il a souligné l’évolution notable des réflexions au sein du groupe de contact, ce dernier étant désormais conscient que les pressions ne pouvaient uniquement s’exercer sur la partie serbe. A ce titre, a-t-il ajouté, le groupe de contact s’est penché sur la façon dont l’UCK était armée et financée.

M. Hubert Védrine a conclu en appelant à une grande prudence sur l’issue de la négociation de Rambouillet. Rappelant les résultats obtenus grâce au rapprochement des vues européennes, américaines et russes, il a estimé que, pour l’heure, tout devait être mis en œuvre pour résoudre la crise actuelle qui constituait une tragédie pour l’Europe.

*Au cours de la même réunion, les commissaires ont évoqué avec M. Hubert Védrine la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale relative au génocide arménien.

M. Xavier de Villepin, président, a interrogé le ministre sur les implications, en particulier au plan diplomatique, d’un éventuel vote par le Sénat de cette proposition de loi. Un échange de vues s’est établi avec le ministre, au cours duquel se sont également exprimés MM. Christan de La Malène, Emmanuel Hamel, Michel Caldaguès, Bertrand Delanoë et Pierre Mauroy.