La Délégation sénatoriale à l’outre-mer s’est réunie le 10 décembre pour examiner la proposition de résolution européenne présentée par Mme Gisèle JOURDA (Socialiste – Aude) et M. Michel MAGRAS (Les Républicains - Saint-Barthélemy) tendant à corriger la politique commerciale européenne afin de sauvegarder la filière de la canne à sucre des régions ultrapériphériques (RUP).

Alertés par les professionnels du sucre de La Réunion de la tournure prise par les négociations de l’accord de libre-échange avec le Vietnam, la Délégation sonne l’alarme contre la menace de plus en plus pressante que fait peser la politique commerciale européenne sur la filière canne. Ce secteur économique, qui représente quelque 40 000 emplois directs et indirects, est vital pour la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion, territoires frappés par des taux de chômage record. Or, différentiels de compétitivité avec les pays à bas coûts et à faibles exigences sanitaires et environnementales, fin des quotas sucriers en 2017 et accumulation des accords commerciaux ouvrant sans limite le marché européen mettent la filière canne en grave danger.

En particulier, le segment des sucres roux non destinés au raffinage, dits « sucres spéciaux », constitue un marché de niche haut de gamme, stratégique pour les régions ultrapériphériques (RUP). Grâce à ses départements d’outre-mer, la France est le seul producteur de sucres spéciaux en Europe, à hauteur d’environ 120 000 tonnes par an, mais la survie de la filière dépend du maintien de protections douanières adéquates. Alors que se profilent des négociations avec le Brésil, le Mexique, les États-Unis, la Thaïlande et les Philippines, tous gros producteurs de sucre de canne, il est désormais impératif de prendre en compte leurs potentielles répercussions catastrophiques sur les économies ultramarines. Les sucres spéciaux doivent être explicitement exclus de l’ouverture du marché européen.

La proposition de résolution européenne élaborée par la Délégation sénatoriale appelle, d’une part, la Commission européenne à mettre en cohérence sa politique commerciale avec les politiques agricole et régionale de l’Union européenne et, d’autre part, le Gouvernement à exercer une vigilance accrue sur le déroulement des négociations. Les RUP qui dans la Caraïbe, en Amérique du Sud et dans l’océan Indien portent les valeurs de l’Union européenne en matière de droit du travail et de respect de l’environnement, ne peuvent plus être traitées comme une variable d’ajustement sacrifiée sur l’autel du libre-échange.

Maria PIGHINI
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