B. LA PERSISTANCE D'UNE ANOMALIE BUDGÉTAIRE DE MOINS EN MOINS ACCEPTÉE : LE PAIEMENT À L'ÉTAT DE LA TAXE PROFESSIONNELLE DE LA POSTE ET DE FRANCE TÉLÉCOM
La loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des Télécommunications prévoit l'assujettissement de La Poste et de France Télécom, à compter du 1 er janvier 1994, à une fiscalité de droit commun, tant pour la fiscalité d'État que pour la fiscalité locale.
En ce qui concerne la taxe professionnelle de La Poste, l'assiette en est déterminée selon le droit commun. Elle porte sur trois éléments :
- les valeurs locatives des immobilisations passibles d'une taxe foncière que La Poste utilise en tant que propriétaire ou locataire ;
- un pourcentage (16 %) de la valeur brute au bilan des autres immobilisations corporelles :
- un pourcentage de la masse salariale (18 %).
Cependant, les modalités de déclaration et de paiement des impôts locaux sont, sur plusieurs points, dérogatoires au droit commun :
- pour La Poste, les bases d'imposition de la fiscalité locale font l'objet d'un abattement de 85 % de leur montant, en raison des contraintes de desserte de l'ensemble du territoire national et de la participation à l'aménagement du territoire 20 ( * ) (article 21 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des Télécommunications) ;
- le taux applicable est un taux moyen pondéré national et non le taux applicable dans chacune des collectivités locales disposant d'un local appartenant ou loué à La Poste :
- surtout. La Poste et France Télécom paient leur taxe professionnelle au niveau national et non pas directement au niveau local comme les autres entreprises.
Le Gouvernement justifie ce que votre rapporteur considère comme une anomalie s'agissant d'un impôt local par le fait que « historiquement, le réseau des bureaux de poste s'est tissé, afin que La Poste puisse exercer ses missions de service public sur l'ensemble du territoire national. Contrairement aux autres entreprises, elle ne choisit donc pas le lieu de ses implantations en fonction d'avantages liés à la fiscalité locale. » 21 ( * )
Les sommes correspondantes sont perçues depuis 1994 par l'État qui contribue, en contrepartie, au financement de la dotation de compensation de la taxe professionnelle instituée par l'article 6 de la loi du 30 décembre 1986 portant loi de finances pour 1987.
Depuis 1995, lorsque le montant des impositions dues est supérieur en francs constants à celui perçu en 1994, le surplus est versé au budget des communes à faible potentiel fiscal par le biais du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP). Environ 300 millions de francs ont ainsi été reversés en 1995.
L'affectation à l'État et non aux collectivités locales des recettes de la taxe professionnelle versée par France Télécom et La Poste représente, pour ce dernier, un apport de 4.7 milliards de francs.
Votre rapporteur pour avis, comme il a déjà eu l'occasion de le faire lors de la discussion de son amendement à la loi de réglementation des télécommunications, amendement qui avait reçu un avis favorable de votre Commission des Affaires économiques, visant à restituer cette recette aux collectivités locales, insiste sur la nécessité de « rendre à César ce qui est à César » .
S'agissant d'un impôt local, il apparaît de bon sens que le budget des collectivités locales soit directement destinataire du produit de la taxe professionnelle de La Poste et de France Télécom.
D'ailleurs, suite à l'intervention de votre rapporteur pour avis, M. le ministre François Fillon, lors des débats en séance publique au Sénat le 6 juin 1996, a lui-même affirmé :
« Il est incontestable que la transformation de France Télécom en entreprise, projet dont nous allons débattre la semaine prochaine, posera, à terme, un problème de taxe professionnelle.
M. le Premier ministre vient d'annoncer que le Gouvernement s'engageait dans une vaste réforme fiscale. Il a indiqué que la taxe professionnelle ferait, à cette occasion, l'objet d'une réforme. Je puis vous indiquer ce soir que la question soulevée par l'amendement de M. Hérisson sera examinée dans le cadre de la réforme fiscale d'ensemble qui sera très bientôt soumise au Parlement ».
Votre rapporteur pour avis demande donc instamment au Gouvernement de respecter les engagements pris en juin 1996 devant notre Haute Assemblée.
* 20 La loi du 2 juillet 1990 prévoit que le Gouvernement remettra un rapport au Parlement retraçant les contraintes de desserte de l'ensemble du territoire et de participation à l'aménagement du territoire et les charges qui en résultent pou La Poste et France Télécom.
* 21 Réponse de M. le ministre délégué à La Poste, aux télécommunications et à l'Espace à M. le sénateur Vinçon, Journal officiel du 29 août 1996, page 2247.