2. Le Parlement : un élément moteur de la démocratisation
Le Burundi est désormais engagé dans une phase de consolidation , durant laquelle les institutions - et particulièrement le Parlement -, auront un rôle crucial à jouer, ainsi que le prévoit la Constitution du 18 mars 2005.
Tenant compte de la nature du conflit burundais tel que l'a qualifié l'accord d'Arusha, « un conflit fondamentalement politique avec des dimensions ethniques extrêmement importantes » , la nouvelle Constitution exprime tout d'abord le souci d'une représentation équilibrée des ethnies, des forces politiques et des sexes , opérée selon une clé de répartition contraignante. Ce principe s'applique au Parlement, comme au pouvoir judiciaire, à l'administration, aux corps de défense et de sécurité et aux conseils municipaux.
Dans la continuité des principes de l'accord d'Arusha du 28 août 2000 et de la Constitution de transition du 28 octobre 2001, le texte du 18 mars 2005 confirme également la mise en oeuvre d'une organisation bicamérale , alors que la Constitution du 13 mars 1992 et puis le décret-loi du 13 septembre 1996 portant sur l'organisation du système institutionnel de transition, devenu acte constitutionnel de transition le 6 juin 1998, confient le pouvoir législatif à une assemblée unique.
Un nombre important de dispositions constitutionnelles est commun aux deux assemblées et à leurs membres. C'est le cas pour le régime des éligibilités et des immunités, l'exercice du mandat parlementaire, le pouvoir de contrôle des assemblées et le droit d'initiative législative, même si les propositions sénatoriales sont soumises en première lecture à l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale se distingue du Sénat en ce qu'elle est composée d'au moins cent députés, à raison de 60 % de Hutus et de 40 % de Tutsis, y compris un minimum de 30 % de femmes, pondération identique à celle du Gouvernement mais différente de celle du Sénat qui doit comprendre un nombre identique de sénateurs Hutus et de sénateurs Tutsis. Son régime électoral varie également : alors que les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect, les députés sont élus au suffrage universel direct, au scrutin de listes bloquées et à la représentation proportionnelle.
Avec l'instauration d'un bicamérisme différencié, le Sénat burundais, pour sa part, se voit confier, outre des compétences législatives importantes, la mission générale de « contrôler l'application des dispositions constitutionnelles exigeant la représentativité ethnique et de genre et l'équilibre dans toutes les structures et les institutions de l'Etat, notamment l'administration publique et les corps de défense et de sécurité » . Sa mission de contrôle et de régulation le place donc au coeur du processus de restauration de la démocratie. Ainsi, il est seul à :
- être saisi du rapport de l'ombudsman sur tout aspect de l'administration publique ;
- pouvoir mener des enquêtes dans l'administration publique et, le cas échéant, faire des recommandations pour s'assurer qu'aucune région ou aucun groupe n'est exclu du bénéfice des services publics ;
- être chargé de contrôler l'application des dispositions constitutionnelles exigeant la représentativité ethnique et de genre et l'équilibre dans toutes les structures et institutions de l'Etat, notamment l'administration publique et les corps de défense et de sécurité ;
- approuver les nominations aux emplois supérieurs civils et militaires proposées par le Président de la République.
Il est composé de :
- deux délégués de chaque province, élus par un collège électoral composé de membres des conseils communaux, provenant de communautés ethniques différentes et élus par des scrutins distincts. C'est donc la double règle de l'égalité des provinces et de la parité ethnique qui fonde l'élection de cette première catégorie. Le mode de scrutin est original puisqu'il s'agit d'un scrutin uninominal à trois tours ;
- trois sénateurs issus de l'ethnie Twa, la Constitution ne précisant pas leur mode de désignation ;
- des anciens chefs d'Etat, nommés sénateurs à vie de plein droit dès la cessation de leurs fonctions présidentielles.
Le Sénat du Burundi est donc une institution manifestement originale , dotée de véritables pouvoirs, mais dont le rôle et l'influence au sein des institutions seront largement conditionnés par l'usage qu'il en fera pour le service de son pays et la défense de la démocratie.