Communication audiovisuelle
Claude BELOT
Table des matières
- I. LES DONNÉES BUDGÉTAIRES ET FINANCIÈRES
- II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
- FRANCE 2
- FRANCE 3
- LA 5E
I. LES DONNÉES BUDGÉTAIRES ET FINANCIÈRES
Le
budget du secteur public de la communication audiovisuelle pour 2002, tel qu'il
est retracé dans le fascicule jaune « secteur public de la
communication audiovisuelle », s'élève à
3241,53 M€ (
21263,04 MF)
contre
3141,07 M€
(20.604,07 MF)
en 2001
, ce qui fait
apparaître
un taux de croissance de + 3,20 %
par rapport
à la précédente loi de finances initiale.
Cette
progression globale de 100,46 M€
(658,97 MF) fait suite
à la forte hausse de 180,36 M€ (1183,1 MF), prévue
l'année dernière. Elle est la résultante :
• d'une
hausse de 80,7 M€
(529,36 MF)
des
ressources publiques
(+ 3,35 %), qui doivent se monter à
2488,56 M€ ;
• et une
hausse de 19,72 M€
(+2,69 %),
(129,38 MF),
des ressources propres des organismes
, qui doivent
atteindre
752,97 M€,
à comparer à la baisse de
38,92 M€
(255,3 MF), prévue au projet de loi de
finances initiale pour 2001.
Le
partage entre ressources publiques et ressources propres
doit
s'effectuer en 2002 sur la base d'un rapport
76,8 % / 23,2 %,
contre 76,7 % / 23,3 % en 2001, 73,3 % / 26,7 %,
en 2000 et 69,4 et 30,6 % en 1999.
Cette politique délibérée de réduction du poids des
ressources propres va sans doute être moins voulue que subie avec la
contraction annoncée du marché publicitaire
.
A. L'EFFORT PUBLIC DANS LE SECTEUR AUDIOVISUEL
La croissance des dotations prévues au présent budget reste soutenue, prolongeant les engagements pris par l'État dans le cadre de la loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 sur la communication audiovisuelle.
1. Les crédits budgétaires
Les crédits budgétaires diminuent de + 1,63 % par rapport à la li de finances initiale . Ce chiffre recouvre deux évolutions inverses :
-
•
augmentation de 0,1 % au niveau de 69,67 M€
(457 MF)
des dotations inscrites au budget du ministère des
affaires étrangères
(chapitre 42/14) ;
• recul de 1,92 % des crédits inscrits aux services généraux du Premier Ministre (Chapitre 46-01), qui passent TTC de 413,78 M€ (2714,2 MF) à 409,97 M€ (2689,25 MF). Ce tassement de 3,8 M€, soit 25 MF, s'explique en raison de la diminution du nombre de comptes effectivement exonérés par rapport à ce qui avait été anticipé .
2. La redevance
Dans le
projet de loi de finances déposé par le Gouvernement sur le
bureau de l'Assemblée nationale, les recettes hors taxes de redevance
augmentent de 83,68 M€ pour atteindre 2017,36 M€ (H.T). Cette
augmentation de 3,33 %
est à comparer à la
croissance de 2,94 %
constatée en 2000
.
Après être passée de 700 à 735 francs de 1997
à 1998 et à 744 francs en 1999, à 751 francs en 2000
et 2001, soit 114,49 €, la redevance pour l'usage d'un
téléviseur couleur a été portée à
116,5 €,
soit une augmentation de
+ 1,76 %.
On note que, contrairement à l'exercice 2001, il est prévu de
distribuer une partie des excédents de collecte de l'année 2000
pour un montant de 13,72 M€ soit 90 MF.
Le
ralentissement de l'expansion de l'assiette
- on a enregistré
au premier semestre 2001, 204 000 comptes couleur supplémentaires,
contre 340 500 au premier semestre 2000 et 387 500 pour la même
période de 1999 - pourrait, si la tendance se poursuit, se
révéler préoccupant, même s'il faut sans doute y
voir la
conséquence des nouvelles mesures d'exonération
.
On rappelle, également, que les coûts directs du service de la
redevance, qui s'élèvent à 73,54 M€ (482,4 MF)
comme pour les années 2000 et 2001, font désormais l'objet d'un
versement direct au budget général et non d'un rattachement par
voie de fonds de concours pour satisfaire à la jurisprudence du Conseil
constitutionnel, telle qu'elle résulte de sa décision
n°94-351 du 29 décembre 1994.
Enfin, il faut noter que les crédits de remboursement de redevance
inscrits sur le chapitre 46-01 sont versés tous les deux mois, ce qui a
fait craindre à certains qu'ils puissent faire l'objet d'annulation
avant leur virement sur le compte d'affectations spéciales.
B. L'ÉVOLUTION DES RESSOURCES COMMERCIALES
Les
recettes du secteur public sont la résultante de facteurs
multiples : nouvelles limitations introduites par la dernière loi
audiovisuelle, concurrence accrue, également, des chaînes
privées qui n'ont jamais été aussi dynamiques au niveau
publicitaire, crise probable, enfin, du marché par suite du
ralentissement de l'activité économique et de l'incertitude
résultant des évènements tragiques du 11 septembre dernier.
En dépit du nouveau mode de mesure de l'audience, qui permet de prendre
en compte la part des chaînes thématiques, ce qui diminue
mécaniquement leur part d'audience, les chaînes hertziennes
continuent de capter l'essentiel de la manne publicitaire.
En effet, les revenus publicitaires des chaînes thématiques
restent marginaux, nettement en deçà du poids que celles-ci
représentent dans l'audience. En 2000, alors que l'ensemble des
chaînes de complément représentait environ 8 % de
l'audience totale de la télévision, on évalue à
environ 5 % le poids des investissements publicitaires sur ces
chaînes.
Les quatre cinquièmes des recettes se sont concentrées sur moins
de 20 chaînes et seules 11 chaînes ont reçu plus de 50 MF
bruts en 2000.
1. Les recettes publicitaires des chaînes publiques en 2001 et perspectives pour 2002
Compte
tenu des restrictions imposées à France 2 et à
France 3 en matière publicitaire, il a été
prévu dans le présent projet de loi de finances pour 2002 que les
ressources propres du secteur public audiovisuel
atteindront
752,97
M€
(4939 MF), soit un niveau supérieur de quelque
130 MF à celui annoncé en loi de finances initiale pour 2001.
Cette progression de
+ 2,7 %
des ressources propres est
à remettre dans le contexte de l'évolution des
recettes de
publicité et de parrainage
. Les objectifs prévisionnels du
groupe France télévision s'établissent en 2001 à
3756,2 MF contre 4037,4MF dans le projet de loi de finances pour 2000, ce
qui représente un recul de 281 MF. La régression est encore plus
nette par rapport aux objectifs 1999, qui avec 4587 MF se situaient à un
niveau supérieur de 433 MF aux perspectives actuelles pour 2002.
Il y a là la conséquence des contraintes imposées à
France 2 et France 3 en application de la loi du 1
er
août
2000, que le gouvernement avait déjà anticipé en
décidant
d'abaisser à partir du 1
er
janvier 2000 de
10 à 12 minutes de la durée moyenne des écrans
publicitaires en heure glissante, durée qui a été
diminuée à 8 minutes en 2001.
Au début de l'année, France Télévision estimait que
le marché publicitaire de télévision pourrait
croître d'environ 5 % en 2001, soit un rythme inférieur aux 6,1 %
enregistrés en 2000.
De telles perspectives ont peu de chances de se réaliser, sachant que
les annonceurs ont diminué de 2 % leurs investissements en campagnes
publicitaires à la télévision au cours du premier
trimestre 2001 par rapport à la même période de 2000, selon
le dernier rapport de TNS Secodip. Celui-ci constatait, avant même les
événements du 11 septembre, que le marché est - sauf
pour la radio sur laquelle les investissements publicitaires se sont accrus de
16 % au cours de la même période - particulièrement mou
après deux années de forte croissance,
caractérisées par des progressions de 12 % en 1999 et de 10 % en
2000.
En 2000, des prévisions, particulièrement prudentes ont permis
aux chaînes publiques de dépasser les objectifs qu'elles
s'étaient fixés. Mais ceci est aussi dû à des
performances commerciales honorables. Les résultats obtenus en 2000 par
France Télévision Distribution restent dans ce contexte de
réduction de 2 minutes par heure glissante avec un plafonnement à
4 minutes de chaque écran, satisfaisants, puisqu'alors que le potentiel
diffusable a baissé de 18 % par rapport à 1999, le chiffre
d'affaires ne régresse que de 4,7%.
Source France télévision chiffres hors fais de régie
Source Sécodip
S'agissant de données relatives à l'ensemble de la
journée, le tableau ci-dessus montre qu'entre le premier semestre 2001
et le premier semestre 2000, la durée des spots a fléchi de
près de 8 % sur France 2 et de 4 % sur France 3, tandis que le
nombre d'écrans diminuent corrélativement de 3,8 % et
5,3 %. La régression des spots est encore plus nette en prenant
pour base le premier semestre 1999 : depuis cette période, la
durée de la publicité a diminué de 31% sur France 2 et 23%
sur France 3 la diminution corrélative étant
particulièrement nette pour le nombre de spots qui recule respectivement
de 28 % et 21 %.
Le tableau ci-dessus démontre que les évolutions soulignées pour l'ensemble de la journée, sont encore plus nettes sur la tranche 19-22 heures : la durée des écrans diminue respectivement de 35 % et 39 % sur France 2 et France 3 depuis le premier semestre 1999 et de 7,6 % et 8,6 % depuis le premier semestre 2000.
Le tableau ci-dessus indique que c'est France 2 qui, avec une perte de part de marché de 1,7 %, paie le prix le plus élevé par suite des nouvelles contraintes publicitaires.
2. La place du secteur public sur le marché publicitaire
La publicité télévisée, qui absorbait en 1987 moins de 25 % des recettes publicitaires des grands médias, en mobilise aujourd'hui plus de 30 %, en dépit des multiples contraintes réglementaires.
Source
IREP
(1) y.c. petites annonces (2) y.c. chaînes thématiques (3)
affichage sous toutes ses formes
La part du marché publicitaire de la télévision
occupée par France Télévision en 2000, ne s'est
montée qu'à 23,3 % contre 53 % pour TF1 et 21,1 % pour M6,
alors qu'elle était de 31,30 % en 1997. Mais c'était avant la
diminution de la durée de la publicité...
Le
tableau ci-dessus montre que les chaînes privées ont, avec des
taux de croissance en 2000 de 17,66 % pour TFI et de 23,51 % pour M6,
su profiter à la fois de l'excellente conjoncture et de la diminution de
la durée des écrans.
Toutefois, l'effet « Loft Story » ne semble pas avoir eu
selon les analyses de France Télévision d'effet durable sur le
marché publicitaire, comme le montre le tableau ci-après.
Le tableau permet de remarquer que France télévision a plus
pâti de l'effet « Loft Story », puisque la part de
marché - brut Secodip - a baissé pour passer en dessous de la
barre des 18 %, ce qui est un point bas historique.
3. L'évolution de l'audience de France télévision
En principe, à règles du jeu constantes, les recettes publicitaires dépendent de l'audience. De ce point de vue, les données récentes relatives à l'audience de France Télévision, font apparaître un certain tassement, même si les derniers chiffres connus semblent marquer une amélioration.
France 2 est tombée de 20,6 % en janvier 2001 à 20 % de part de marché en août dernier. Mais il faut relever quelques signes encourageants avec les bonnes performances du journal du soir qui a atteint 24,6 % d'audience en septembre, suite au choix d'un nouveau présentateur du soir, alors qu'elle plafonnait à 22 % entre janvier et juin 2001. En revanche, France 3 aurait connu, semble-t-il, quelques déboires le jour du 11septembre, faute d'avoir suivi les évènements de New-York en direct.
C. LES RÉSULTATS FINANCIERS
Tandis
que la situation des sociétés du groupe France
télévision s'améliore sensiblement tout comme celle de
RFI, en revanche on peut avoir quelques inquiétudes en ce qui concerne
RFO.
Les dérapages en matière de coût des grilles que l'on a
remarqués dans un certain nombre de sociétés, sont,
à certains égards, la conséquence de la priorité
accordée par le présent gouvernement aux programmes, qui avec
presque 40 M€ absorbent 42,25 % des
93,4 M€ de mesures
nouvelles prévues au titres du budget pour 2002
.
Ainsi, il faut souligner que de 1998 à 2001, les budgets de programmes
de France télévision et d'Arte ont cru de 5 % en moyenne sur
l'ensemble de la période.
1. Les sociétés du groupe France télévision
L'année 2000 a été marquée par le
changement d'actionnaires des trois chaînes nationales, qui ont vu France
télévision se substituer à l'État dans leur
capital. La réorganisation du groupe a conduit les trois chaînes
à transférer la quasi totalité de leurs participations
à leur société mère, dans le cadre d'un
arrêté du 29 décembre 2000.
Par rapport à 1999, le nouveau groupe peut faire état de bons
résultats financiers : Avec 13,8 Mds de francs, le chiffre
d'affaires du nouvel ensemble est en croissance de plus de 10 %, tandis
que les résultats nets consolidés se sont montés à
255 MF, faisant apparaître une croissance de 219 %.
Ces bons résultats sont la résultante de l'amélioration de
la situation des trois composantes d'un groupe dont les
effectifs
sont
de
6.278 personnes
.
a) France 2
Le
résultat net comptable fait apparaître un
bénéfice de
+
61,3 MF
à comparer aux
quelque -249,9 MF de déficit de l'exercice 1999, qui a
succédé aux faibles excédents de 3,7 et 58,5 MF
enregistrés en 1998 et 1997. Ce résultat est d'autant plus
remarquable qu'il intègre, en raison du
changement du mode
comptabilisation des amortissements dérogatoires,
une charge de
-181,3 MF.
Le résultat d'exploitation s'établit à 206,8 MF,
niveau retraçant le relativement bon comportement du groupe en
matière de recettes publicitaires.
On peut toutefois noter les points suivants plus préoccupants :
-
•
les effectifs moyens permanents continuent d'augmenter :
+ 209 emplois depuis 1997 pour un effectif total fin 1999 de
1 541, 1 582 fin 2000, ce qui marque la poursuite de la tendance
à l'alourdissement des charges de personnels par suite, notamment, de la
réduction du temps de travail ;
• le coût de la grille reprend sa progression avec une croissance de + 9 %, notamment par suite de l'inflation des droits sportifs, ce qui ne laisse pas d'inquiéter si la tendance se confirmait.
En 2000,
le
résultat d'exploitation
reste
négatif
avec
-
36,3 MF
contre -152,9 MF en 1999, amélioration
relative qui tient à la bonne tenue des recettes publicitaires de la
chaîne
.
La situation financière fait apparaître un résultat positif
avec un excédent de 23,8 MF
à comparer au 32,1 MF
dégagés l'année précédente.
Comme pour France 2, on relève une
nette croissance du coût de
la grille,
qui, avec 4,1 MdsF est en croissance de 4,9 %, par suite
des frais de retransmissions sportives. Il faut noter que, dans les
193,5 MdsF d'augmentation globale, le coût des grilles
régionales compte pour 134 MF à rapporter à un
montant global de 1,8 MdsF. France 3 paye ainsi les conséquences
des accords passées à la suite des mouvements sociaux de 1999,
qui se sont traduits par de nouveaux objectifs de diffusion, ainsi que par
l'augmentation des frais de personnels liés à la réduction
du temps de travail, à l'accord sur les intermittents techniques et
à la poursuite du rattrapage salarial vis à vis de France 2.
c) La cinquième
La chaîne, qui a dû restructurer ses services après l'abandon du processus de fusion avec Arte et solder les litiges l'opposant à ses prestataires pour la Banque de programme et de services, a vu ses comptes rester positifs : le résultat d'exploitation s'établit à + 26,7 MF en 2000 . Ces résultats méritent les commentaires suivants :
-
• Avec 441,3 MF,
le coût de la grille est en nette progression
de +4,8 %
;
• Les dépenses de personnel paraissent maîtrisées , mais on remarque que ce résultat est obtenu malgré une augmentation de plus de 20 unités des effectifs qui passent de 173 à 194.
A l'exception de RFO et de la SFP que votre rapporteur spécial évoquera « pour mémoire », les organismes de l'audiovisuel public dégagent des résultats positifs.
a) L'Institut national de l'audiovisuel
Au delà du résultat comptable positif de 7,8 MF contre 5,2 MF l'année dernière , il faut noter que cet organisme qui est le seul organisme de l'audiovisuel public à avoir signé un contrat d'objectifs et de moyens, peut faire état d'évolutions positives :
-
• La maîtrise des charges d'exploitation stabilisées au
niveau de 621,5 MF.
• La bonne tenue des ressources propres qui se situent à un niveau supérieur de 20MF à celui fixé dans le contrat d'objectifs et de moyens et à 2,7 MF au dessus de la performance réalisée en 1999.
• La poursuite de la régression des effectifs qui passent de 1064 à 1026 de 199 à 2000.
Le
résultat budgétaire
est positif avec
+2,6 MF
en
2000 contre 2,1 MF en 1999. Il en est de même du résultat
comptable qui s'établit à 6,1 MF contre 11,3 MF
l'année précédente.
On note les points suivants :
-
• Le souhait d'Arte d'abandonner sa participation dans la chaîne
musicale Mezzo et, corrélativement, de ne pas souscrire à la
prochaine avance en compte courant, dont la chaîne thématique a
besoin en raison de sa mauvaise santé financière ;
• La poursuite de la diminution des charges de personnel de 3,7MF en dépit de l'augmentation de 20 unités de l'effectif moyen pondéré de la chaîne, dû à des décalages d'embauches, dont les effets se feront sentir sur les comptes de 2001
Le
résultat comptable
s'établit à
+1,7 MF
contre -39 MF en 1999 ; ce rétablissement tient, pour une part,
à
la diminution des dotations pour provisions
, que la
société avait dû constituer pour la poursuite de son plan
de modernisation.
En revanche, le résultat d'exploitation reste déficitaire avec
-30,5 MF contre -73,7 MF en 1999. Il faut souligner à cet
égard que les
dérapages en matière de dépenses
de personnel,
déjà remarqués, l'année
dernière, continuent : ces dépenses ont augmenté de
119,1 MF, ce qui marque une accélération de leur croissance
qui atteint +7,5 % contre + 4,4 % l'année
précédente. Cette évolution, plutôt
préoccupante, se retrouve lorsque l'on considère les effectifs,
qui augmentent de 333 unités pour atteindre 3.571 personnes.
d) RFO Réseau France Outre-mer
La société a dégagé un déficit comptable de 41,58 MF très voisin de celui de 45,9 MF, constaté en 1999. On note les éléments suivants :
-
• Par rapport à l'exécution 1999, les
charges de
personnel
progressent de 61 MF, faisant apparaître une croissance de
+8,2 %,
évolution qui reflète l'augmentation de 35
unités des effectifs entre 199 et 2000 ;
• L'augmentation de certains postes de charges, diffusion TDF et satellite, provisions pour congés payés,
• La dégradation de la situation financière qui, par suite de l'accumulation des déficits, se traduit par un solde de trésorerie qui passe de -21,7 MF à -112,6 MF .
L'excédent comptable
se monte en 1999 à
+36,5 MF en 2000 contre +0,3 MF
en 1999 et un déficit
de 8,4 MF en 1998, ce qui traduit l'amélioration continue de la
situation de la société.
On peut noter que les moyens supplémentaires alloués dans le
cadre de la loi de finances rectificative pour 37,9 MF et par
redéploiement interne au ministère des Affaires
étrangères pour 4,5MF, ont été reportés sur
l'exercice 2001 et affectés à des charges de personnels
liées notamment à la réduction du temps de travail. Ces
ressources ainsi dégagées, ont permis le financement de la
première tranche de la licence de diffusion depuis Chypre des programmes
de RMC-MO.
f) Société française de production
P.m.,
votre rapporteur ne peut pas ne pas évoquer, au moment où le
rideau tombe, la triste histoire de la Société Française
de production, qui apparaît rétrospectivement la victime de
l'aveuglement des acteurs de cette tragédie humaine, commerciale et
financière annoncée.
Illusion des concepteurs qui ont cru que ce mastodonte issu de l'ex-ORTF,
pourrait s'adapter et ne serait pas victime des tentations
d'indépendance, que celles-ci aient pris la forme de sous-traitance
à des sociétés privées ou du rapatriement de
certaines productions en interne ; illusion encore des personnels qui,
fiers de leur savoir-faire, n'ont pas vu que le marché de la production
audiovisuelle leur échappait ; aveuglement enfin des gouvernements
qui ont injecté des sommes considérables dans une entreprise qui
ne voulait ou ne pouvait pas s'adapter aux nouvelles formes de concurrence.
Après plusieurs tentatives avortées, le Gouvernement est enfin
parvenu à privatiser ce qui reste d'une société qui
après avoir compté plus de 3000 personnes à sa
création et encore près de 1500 employés en 1991, en a
à peine 580 aujourd'hui. Le 8 octobre dernier, la décision a
été prise : le gouvernement a choisi d'attribuer pour
30 MF la Société française de production (SFP)
à Euromédia, et à M.Vincent Bolloré, au
détriment du projet de Roland Fiszel, PDG de l'entreprise.
Pour ce dernier, la SFP valait au moins 450 MF (68,60 M€) dans la mesure
où elle détient un certain nombre d'actifs dont la valeur
pourrait être non négligeable : les studios de Bry-sur-Marne
(120 MF, 18,29 M€), les studios de Boulogne (80 MF, 12,20 M€), le
site des Essarts-le-Roi (15 MF, 2,29 M€), le catalogue des productions
audiovisuelles (15 MF, 2,29 M€), ou encore les matériels techniques
- cars, régies mobiles, caméras - (60 MF, 9,15 M€), et
une trésorerie nette de 160 MF (24,39 M€). La privatisation de
cette société très déficitaire, s'accompagnera d'un
plan social qui devrait coûter au minimum 48 M€ à
l'État et 4,57 M€ à Euromédia.
En vingt-sept ans, la SFP a perdu 2 870 salariés, reçu
plus de
4,5 milliards de francs (0,69 mds€) d'aides diverses
, tandis
qu'elle perd 10 MF de francs par mois. Ces évolutions sont
retracées depuis 10 ans dans les tableaux ci-dessous.
Les deux repreneurs Le groupe Bolloré et Euromédia ont
fondé une structure commune, SFP holding qui détiendra la
société de production. SFP holding sera détenue à
70 % par Euromédia et 30 % par Vincent Bolloré. Celui-ci a pris
également 20 % d'Euromédia.
S'agit-il d'une opération financière ou la reprise s'inscrit-elle
dans le cadre d'un projet industriel ? M.Vincent Bolloré, a
réussi au moyen d'un investissement limité de quelque 20 MF,
à mettre un pied dans le secteur audiovisuel, après les fructueux
échecs des opérations Bouygues et Pathé. Ce qui est
certain, c'est que, sans doute dans la perspective de l'arrivée du
numérique de terre, on voit arriver un nouveau joueur de poids dans le
secteur de la communication.
II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
Le
présent budget, en dépit de dotations apparemment flatteuses,
surtout lorsqu'on les rapporte à celles de 1997, ne donne pas aux
sociétés nationales de programmes des moyens à la mesure
des ambitions audiovisuelles qu'on leur assigne.
Il s'inscrit dans une politique qui, en particulier en matière de
numérique terrestre, ne prend pas assez en compte les impératifs
économiques, même si votre rapporteur spécial estime qu'il
faut être attentif à ce que le numérique n'aboutisse pas
à la dissolution de notre identité culturelle.
1. Le numérique terrestre sans perspectives immédiates
A peine
adoptée, la nouvelle loi audiovisuelle apparaît
dépassée. Tout se passe comme si, malgré les
avertissements du Sénat, le Gouvernement avait du mal à tenir
compte des réalités économiques.
La conjoncture ambiante a profondément changé. La bulle Internet
et l'économie virtuelle ont éclaté ; le marché
publicitaire régresse après des années d'expansion
exceptionnelle et n'est plus forcément cette manne qui allait permettre
de financer sans efforts tous les nouveaux développements
numériques ; les valeurs TMT résistent, mais perdent,
elles-aussi du terrain dans le climat d'incertitude, qui a suivi les attentats
du 11 septembre.
Bref, la télévision numérique n'est plus ce nouvel
Eldorado de l'audiovisuel, propice à toutes les initiatives et de nature
à supporter les contraintes de service public ou de mise en concurrence
systématique que le législateur emporté par l'ivresse
nouvelles technologies avait voulu imposer.
L'affaire des « 49 % » est tout à fait
significative du temps mis à se rendre à l'évidence :
il était illusoire de croire que les actionnaires de certaines
chaînes thématiques allaient renoncer au contrôle des
chaînes qu'ils avaient créées sur le câble ou le
satellite pour venir sur le numérique terrestre.
Le changement de climat est tel que l'on voit les opérateurs historiques
du satellite envisager de « réduire la voilure » et
ne pas refuser d'évoquer un rapprochement voire une fusion des bouquets
hier encore impensable tant la concurrence était vive entre les deux
« frères ennemis ».
En dépit de la sérénité affichée des
pouvoirs publics, les hésitations des opérateurs privés se
font de plus en plus manifestes au point d'alimenter un climat
d'attentisme.
Tous les éléments recueillis par votre rapporteur spécial
viennent à l'appui de ce qui semble une décision de prudence,
voire de bon sens : quand le marché hésite, quand les
opérateurs historiques privés traînent les pieds pour
alimenter une offre adaptée, quand le service public n'a pas les moyens
de se déployer et d'occuper sa place sur ce nouveau créneau,
quand les industriels, enfin, tardent à se mettre d'accord sur un
standard commun, on ne peut qu'en tirer les conséquences et
réexaminer le processus de mise en oeuvre de la télévision
numérique de terre.
A la
question fondamentale
:
qui a intérêt au
numérique de terre ?
La réponse est simple : le
secteur public, c'est-à-dire France Télévision et TDF.
Mais est-ce suffisant pour garantir la réussite d'un projet qui suppose
l'adhésion de tous les acteurs de cette aventure technologique et
économique ? Méconnaître cette évidence, et en
l'occurrence, « aller plus vite que la musique », c'est non
seulement risquer de gaspiller l'argent public mais encore faire perdre
à l'économie nationale le bénéfice d'un pari sur
l'avenir comme cela déjà été le cas par le
passé avec les expériences malheureuses du plan câble ou
des satellites de télédiffusion directe.
(a) L'ébauche du paysage de la télévision numérique de terre par le CSA
Conformément aux dispositions de l'article 30-1 de la
loi du
30 septembre 1986 modifiée, le Conseil supérieur de
l'audiovisuel a conduit en septembre 2000 une large concertation avec
l'ensemble des acteurs publics et privés concernés sur
l'aménagement du spectre hertzien dans la perspective d'un
développement optimal de la télévision numérique de
terre et a publié les résultats de cette concertation à la
fin du mois d'octobre 2000. Le Conseil s'est largement appuyé sur les
résultats de cette consultation dans ses travaux de planification des
fréquences. A la
fin du premier semestre 2001
, le Conseil,
conformément aux dispositions de l'article 53 de la loi n° 2000-719
du 1
er
août 2000, a publié une
première liste
de fréquences disponibles
pour les services de
télévision à vocation nationale et à vocation
locale diffusés par voie hertzienne terrestre.
Par ailleurs, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a
procédé à la rédaction du texte de l'appel aux
candidatures pour la diffusion de services de télévision à
vocation nationale. Afin de donner la plus large lisibilité à la
procédure engagée, le projet d'appel aux candidatures a
été mis en ligne, au printemps 2001, sur le site Internet du
Conseil de façon à permettre à tous les acteurs
intéressés de faire parvenir leurs observations à
l'instance de régulation. Le texte définitif a tenu compte des
différentes contributions et été approuvé par
l'assemblée plénière du Conseil lors de sa réunion
du
24 juillet 2001, date officielle du lancement de l'appel aux
candidatures.
Le Conseil avait fixé au 29 novembre 2001 la date
limite à laquelle les dossiers de candidature doivent être remis .
Mais avec le report de la parution des décrets
« production » tout est reporté, à commencer
par cette date limite, qui pourrait se trouver fixée à la fin
janvier. Le démarrage des émissions de la
télévision numérique de terre pourra-t-il bien commencer
comme prévu à la fin de l'année prochaine ? La
question peut être posée.
Une préoccupation essentielle du Conseil supérieur de
l'audiovisuel a été de déterminer le
nombre de
services
susceptibles d'être présents sur chaque multiplex. II
convient en effet de tenir compte du besoin en bande passante pour la diffusion
de chaque service et de la nécessité de veiller à une
qualité suffisante du signal. Dans l'appel lancé le 24 juillet
dernier, le Conseil a retenu le principe de la diffusion de
trente-trois
services de télévision
répartis sur les
six
multiplex
prévus par site de diffusion. Cela signifie donc que
trois multiplex pourront contenir six services
chacun alors que les
trois autres multiplex ne comprendront que cinq services à la
fois
. Le Conseil a en effet souhaité faire preuve de prudence et a
voulu tenir compte du fait que certains services, en raison de leur format,
seront appelés à utiliser davantage de bande passante pour
assurer convenablement la diffusion de leurs émissions.
L'interopérabilité des systèmes
de réception
représente également un enjeu important pour la réussite
de la télévision numérique de terre. Le niveau
d'interopérabilité doit être fixé, aux termes de la
loi, par des arrêtés interministériels. Dans son avis du 24
juillet 2001, le Conseil a pris acte de la portée limitée des
projets dans la mesure où ils ne permettent qu'une
interopérabilité réduite des signaux émis et des
terminaux de réception des services diffusés.
Le Conseil
considère, dès lors, qu'il faudra poursuivre avec les
différents acteurs la recherche de moyens de nature à assurer une
interopérabilité optimale
. II convient, à cet
égard, de rappeler que l'article 30-3 de la loi du 30 septembre 1986
modifiée impose aux éditeurs autorisés pour l'exploitation
de services faisant appel à une rémunération de la part
des usagers de conclure les accords permettant l'interopérabilité
de leurs systèmes d'accès conditionnel et de leurs moteurs
d'interactivité. Ces accords devront intervenir dans les deux mois
suivant la délivrance par le Conseil supérieur de l'audiovisuel
de leurs autorisations aux distributeurs commerciaux.
Au delà des aspects techniques, il est évident que le
succès de la télévision numérique de terre
dépendra largement de l'équilibre économique de cette
nouvelle télévision et en particulier celui des
dix-huit
nouveaux services privés de télévision.
Afin d'analyser les
facteurs de cet équilibre économique
,
certains experts et en particulier ceux de la Direction du développement
des médias, ont avancé un certain nombre d'hypothèses
qu'il convient préalablement de présenter.
Les coûts de diffusion sont estimés entre 20 et 25 MF pour 80 % de
couverture. En revanche, pour passer de 80 % à 85 %, le nombre
d'émetteurs devra augmenter substantiellement et le coût pour la
couverture de la quasi-totalité du territoire avoisinerait, dans ces
hypothèses, les 50 MF par an.
Le coût de grille moyen retenu pour les nouvelles chaînes, qu'elles
soient publiques ou privées, en clair ou payantes, est de 100 MF, tout
au moins les premières années. Cette hypothèse est un
minimum au regard du niveau de qualité attendu pour la
télévision numérique de terre et semble cohérent
avec ce qui se pratique pour les chaînes thématiques actuelles.
L'équilibre économique des télévisions associatives
sera, quant à lui, à rechercher en référence
à un coût de grille unitaire nettement inférieur.
(b) Les hésitations des opérateurs historiques privés
En
dépit de leurs différends en ce qui concerne l'émission
Loft Story, les deux grands opérateurs historiques se rejoignent pour
critiquer la façon dont est conduit le lancement du numérique de
terre.
Ainsi, M. Patrick Le Lay, président-directeur général de
TF1, a-t-il fait savoir dans le quotidien La Tribune qu'il espérait que
le gouvernement allait « renoncer » au numérique
terrestre. Les formules employées sont particulièrement
fortes ;
« Il n'est pas interdit, quand on est responsable,
d'arrêter une catastrophe
», a-t-il déclaré,
dénonçant «
l'écart entre les discours
politiques et la réalité évidente du
marché ».
Son analyse économique est non moins radicale :
« Sur
les cinq dernières années, quelque 80 chaînes
thématiques ont été créées en France. Il y
en a 60 de trop
». Pour lui,
«il ne faut pas se voiler la face,
la télévision payante perd de l'argent
». «
On
peut chiffrer à 26 milliards d'euros les pertes des chaînes du
satellite et du câble, dans l'ensemble des pays
européens ».
De son côté, M. Nicolas de Tavernost a développé des
positions analogues dans des termes tout aussi directs.
« Nous allons vers de graves déceptions. Il faut confier
cette technologie aux opérateurs existants. Pas pour protéger
leur monopole, mais pour que le numérique terrestre, le câble et
le satellite soient complémentaires (...) Ce n'est pas la peine
d'autoriser tout un tas de chaînes si elles ne correspondent pas à
un marché. Avant d'autoriser, le CSA doit regarder la composition de
l'offre
». Il conclut :
« le marché
publicitaire a changé et ça s'est accéléré
avec les événements aux États
-
Unis. La sagesse
serait de réfléchir aux conséquences de l'arrivée
de la TNT sur les autres supports avant le lancement
».
Certes, les thèses développées ont tendance à
faire coïncider l'intérêt collectif avec les
intérêts acquis. Mais la question de l'équilibre
économique de la télévision numérique de terre
mérite bien d'être posée.
De fait, les
« nouveaux entrants
»,
c'est-à-dire les opérateurs qui ne sont pas aujourd'hui
présents dans la télévision hertzienne nationale, n'ont
pas la même analyse :
« Ce serait un sacrilège de ne
pas présenter un certain nombre de dossiers
», a
déclaré de son côté, Arnaud Lagardère, PDG de
Lagardère Média : «
Qu'il y ait ce lobbying des
grandes chaînes hertziennes contre le numérique terrestre est
plutôt encourageant pour certains entrants »
, même
s'il a clairement signifié «
qu'il n'acceptera pas «de
perdre beaucoup d'argent sur la TNT
».
La France a besoin d'entreprises privées fortes sur leur
marché national. Elle doit leur offrir un cadre législatif stable
et de nature à assurer la rentabilité de leurs investissements.
Une telle préoccupation doit être présente à
l'esprit des pouvoirs publics au moment où l'on voit se poursuivre des
grandes manoeuvres audiovisuelles à l'échelle mondiale,
même s'il convient de les apprécier au regard des exigences du
service public et du maintien d'une nécessaire concurrence.
Les opérateurs privés (TF1, Canal, M6 et les autres),
réticents à se lancer dans cette aventure qu'ils jugent sinon
hasardeuse du moins pas vraiment lucrative, souhaitent s'allier pour
contrôler la distribution des 18 chaînes qui leur sont
dévolues sur les 33 actuellement prévues.
Dans le cas particulier, la ministre de la culture et de la communication, a
déclaré «
s'agissant du développement d'un
nouveau marché, la question est ouverte
». Elle a ainsi
demandé à M. Laurent Fabius, ministre de l'Économie, des
Finances et de l'Industrie, de faire examiner ce projet par la Direction
générale de la concurrence les conditions «pour respecter
à la fois les règles de la concurrence et celles du pluralisme,
sans compromettre la viabilité économique du projet».
(c) La sérénité des pouvoirs publics en dépit des observations du CSA
Les
pouvoirs publics affichent une confiance sans faille dans le caractère
équilibré du processus programmé, dans lequel les enjeux
économiques restent subordonnés aux enjeux culturels.
Mme Catherine Tasca s'est élevée contre les critiques reprochant
au Gouvernement le caractère « trop volontariste »
de sa politique en matière de numérique de terre. Pour elle, le
Ministère de la Culture et de la Communication «
a toujours
avancé, à chaque étape de ce projet, avec
pragmatisme et réalisme et su adapter les règles aux
nécessités économiques. Mais, il est clair ... qu'elles ne
sauraient occulter les enjeux de la création »
: [...] de
fait,
« l'intérêt de la TNT est évidemment
qu'elle contribue à la pluralité de la diffusion des oeuvres et
à l'accroissement des sources de financement vers la
création
».
Cette confiance dans la politique actuelle repose sur une analyse du
marché exposée à plusieurs reprises par M. Marc
Tessier
1(
*
)
. Estimant que « la France
est le pays qui a le moins de chaînes de télévision
généralistes », il considère que la
télévision numérique terrestre constitue
«
l'opportunité de sortir de cet engrenage pour le moins
malthusien qui limite dans notre pays l'offre de télévision et
ralentit l'essor de chaînes thématiques
». Pour lui,
l'offre nouvelle de chaînes thématiques est avant tout payante,
chère, et donc limitée à une part très minoritaire
de la population française. Par manque d'oxygène, ces
chaînes thématiques ont une rentabilité précaire :
l'assiette de leur diffusion est trop étroite et leurs ressources sont
trop dépendantes des choix d'un petit nombre d'opérateurs
commerciaux, CanalSatellite, TPS, les câblo-opérateurs,
eux-mêmes liés aux groupes télévisuels historiques
privés comme publics.
Pour les partisans de la procédure actuelle, c'est clairement le public
qui est au coeur du projet de numérique terrestre. Celui-ci doit
permettre
« aux chaînes thématiques qui le
souhaiteront d'étendre leurs zones de diffusion, donc leurs ressources,
et par voie de conséquence améliorera la qualité des
programmes pour les téléspectateurs... L'essentiel sera le
doublement de l'offre de télévision en clair et la
création pour la première fois dans notre pays de chaînes
locales et régionales de plein exercice... A terme, c'est bien la fin du
mode analogique qui est visée. Le saut qualitatif pour le
téléspectateur sera décisif
. »
Bref, qu'apporte en définitive, la télévision
numérique de terre ?
« Tout simplement l'opportunité
de sortir de cet engrenage pour le moins malthusien qui limite dans notre pays
l'offre de télévision et ralentit l'essor des chaînes
thématiques. Ce résultat, elle l'atteint non pas en concurrence,
mais en complémentarité avec les programmes proposés sur
le câble et le satellite, ainsi qu'avec les télévisions
hertziennes existantes.
».
C'est autour de cette idée de complémentarité et
d'articulation des offres entre télévision hertzienne en clair,
numérique terrestre - qu'il soit gratuit ou payant - et câble et
satellite, qu'il faut chercher à définir la politique du
numérique terrestre.
L'avis du CSA sur le projet de décret relatif à la production qui
fixera les obligations des futures chaînes de la TNT, rendu public au
début du mois d'octobre dernier, peut ainsi être
interprété comme demandant plus de souplesse, de
simplicité et de flexibilité afin d'assurer « la
viabilité économique » du numérique terrestre.
Et lui permettre de trouver sa place à côté du câble
et du satellite.
En premier lieu, le CSA préconise la possibilité pour les
chaînes du numérique terrestre de diffuser de la publicité
toute la journée, contrairement à ce qui avait été
prévu dans le projet de décret, qui ne la prévoyait comme
c'est le cas de Canal+, que six heures par jour au maximum sur des programmes
en clair. On note que se pose la question de l'ouverture de la publicité
des secteurs jusqu'ici interdits (distribution, cinéma, presse et
édition). Le CSA estime également qu'il faut plus de souplesse
dans les quotas de production.
A la différence du projet de décret qui prévoit que la
production d'oeuvres françaises doit atteindre, au bout de cinq ans, 16
% du chiffre d'affaire des chaînes, l'instance de régulation est
favorable à la fixation d'une durée de sept ans, souhaitant
à ce sujet des modifications du texte sur la définition de la
production indépendante ou sur les quotas de diffusion d'oeuvres
européenne ou d'expression originale française.
(d) Des inconnues économiques et juridiques
L'équilibre économique du paysage audiovisuel
reste
incertain. Indépendamment des inconnues techniques
2(
*
)
, il faut tenir compte des coûts et de recettes
dont il faut admettre qu'elles sont problématiques ; qu'il s'agisse
des péages ou de la ressource publicitaire, voire des incertitudes
juridiques issues du projet de certains opérateurs de joindre leurs
forces pour la commercialisation de la télévision
numérique de terre. En tout état de cause, il est évident
le succès de l'opération dépend en grande partie de
l'engagement des opérateurs commerciaux, qu'il s'agisse des
constructeurs d'appareils ou gestionnaires de bouquets
3(
*
)
.
D'une façon générale, les experts semblent s'accorder pour
considérer que le numérique terrestre a un potentiel de
marché. Avec moins d'un foyer sur trois abonné à au moins
une offre de télévision payante (7 millions de foyers souscrivent
aujourd'hui 9 millions d'abonnements), la France reste loin de la plupart de
ses voisins européens à haut revenu, notamment lorsqu'ils
disposent historiquement d'une forte implantation des réseaux
câblés (Allemagne, Benelux, Suisse, Europe du Nord).
Avec un prix adapté de l'ordre de 100 Francs par mois hors location de
décodeur, les experts du ministère estiment que près de la
moitié des foyers pourraient être abonnée à la
télévisions numérique de terre à horizon 2012, pour
un accès à une quinzaine de chaînes payantes - de type
« best of » des chaînes thématiques du
câble, hors cinéma-sport -, et, bien sûr, à la
quinzaine de chaînes gratuites y compris les chaînes historiques
actuelles.
Les nouvelles chaînes en clair de la télévision
numérique de terre, publiques et privées, s'inscriront dans un
schéma économique fondé sur la ressource publicitaire,
dont l'élasticité par rapport à la croissance globale
peut-être estimé à long terme à 1,5%. Mais à
court terme, en période d'incertitude, on peut craindre que les recettes
de publicité ne soient pas au rendez-vous, surtout que le fonctionnement
du marché publicitaire qui privilégiant les audiences de masse
est plus favorable aux grosses chaînes qu'aux petites.
Enfin, il convient de sécuriser l'environnement juridique des
opérateurs notamment en ce qui concerne la distribution. Peut-il y avoir
ou pas un seul opérateur de la future télévision de terre
ou bien, le droit de la concurrence oblige-t-il de garantir plusieurs
opérateurs ? Face à l'initiative des opérateurs, le
Gouvernement semble hésiter, non sans raisons, tant la matière
est délicate.
D'un côté, il convient d'évoquer le contexte politique et
administratif de cette affaire, dans la mesure où nombre d'observateurs
ont vu dans cette initiative la volonté de M.Laurent Fabius, de se poser
en interlocuteur. Aucun texte législatif ou réglementaire ne
prévoyant de règles en la matière, cette liberté a
priori pourrait se révéler un handicap, en inhibant les
opérateurs peu enclins à prendre le risque d'une remise en cause
de leurs accords ou de contentieux interminables entre opérateurs
eux-mêmes.
La Direction générale de la concurrence de la consommation et de
la répression des fraudes s'est ainsi vu confier «
une
mission d'analyse et de concertation
». Pour déterminer si
«
l'éventualité d'un seul opérateur
commercial est pertinente et compatible avec les règles du droit de la
concurrence français, voire européen »
,
étant entendu qu'il est a priori peu probable que même si la
DGCCRF concluait à la possibilité d'un opérateur unique,
il est probable qu'elle assortirait son aval d'un certain nombre d'exigences et
de contreparties.
Bref, que le numérique de terre soit une nécessité,
personne n'en doute. Mais, faut-il dans la conjoncture actuelle, y aller
à marche forcée, toute la question est là.
2. Le secteur public sans marge de manoeuvre
Sans
moyens adaptés aux objectifs multiples qu'on lui assigne, sans
véritable doctrine, l'audiovisuel public est devenu avec la
réforme de 2000, une sorte de colosse aux pieds d'argile. Il souffre de
handicaps inutiles et d'un sous financement chronique, se voit saper les
ressources qui lui sont affectée, et n'est pas incité à
entreprendre les réformes de structures à défaut
desquelles l'ensemble nouvellement créé ne trouvera les
capacités réactives nécessaires dans un contexte
concurrentiel.
La formule de Greg Dyke, directeur général de la BBC, selon
laquelle «
il faut choisir entre le changement et la mort
lente
, » vaut également pour France
Télévision.
(a) La réduction de la durée de la publicité : un handicap inutile
La
cristallisation du débat sur la question des ressources publicitaires
apparaît à votre rapporteur spécial comme un débat
daté. Comment ne pas rattacher l'invention de la réduction
à huit minutes en heure glissante de la durée maximale des spots
à l'euphorie ambiante des années 1999-2000 au cours desquelles le
marché de la publicité télévisée connaissait
une croissance à deux chiffres.
Aujourd'hui, quand les temps s'annoncent sinon nécessairement plus
difficiles, du moins plus incertains notamment sur le plan budgétaire,
une telle décision teintée d'idéalisme, ne devrait pas
vraiment réduire la pression de l'audimat sur les programmes.
Au nom de l'idéal nostalgique voire régressif d'une
télévision sans publicité, le gouvernement prive le
secteur public de recettes, alors qu'il a besoin de toutes les ressources
disponibles pour faire face aux investissements qu'exigent le numérique
et la situation financière toujours fragile dans laquelle se trouvent un
certain nombre des sociétés qui composent l'audiovisuel public.
La stabilisation de l'audience ne fait qu'accroître le manque à
gagner pour le service public. Certes sur le plan de la qualité, on ne
peut que se féliciter de ce que France télévision ait
raflé 14 trophées lors des derniers 7 d'or, mais cela
suffira-t-il à relâcher la pression de l'audimat ?
(b) Des besoins de financement insatisfaits
S'il ne
veut pas être marginalisé, le secteur public doit
bénéficier de ressources courantes
- indépendamment
de ses besoins d'investissements propres pour acheter des programmes mais aussi
se placer sur le marché de l'interactivité -, dont la
croissance reste du même ordre de grandeur que celle de ses
concurrents
.
Il lui faut investir dans des programmes suffisamment attractifs qu'il s'agisse
de payer les droits de plus en plus lourds exigés pour les
retransmissions sportives ou de conserver leurs animateurs vedettes - ce qui
est un problème pas seulement pour la télévision mais
également pour la radio - ou de faire réaliser des
émissions de fiction de prestige.
Ainsi, en ce qui concerne la
Coupe du monde de football en 2002
et en
2006, dont les droits reviennent non pas à l'UER mais au groupe Kirch,
la France et l'Italie sont les seuls grands pays n'ayant pas encore acquis
leurs droits de retransmission
, estimant le prix actuel de 100 M€ trop
cher.
En outre, il faut noter qu'en vue de maîtriser
l'inflation des droits
sportifs,
la BBC, France Télévision, la RAI, RTVE et ZDF sont
parvenues à un accord dans la perspective de l'achat des droits de
retransmission du Championnat d'Europe de football en 2004 pour demander
à l'UER de réduire leur part de financement, qui atteint 80 % du
total lors des grands événements. Les grands opérateurs
publics auraient par ailleurs mis au point une répartition des charges
entre eux, tenant davantage compte de leur audience respective.
Cette montée des charges ne fait que renforcer votre rapporteur
spécial dans la conviction que France télévision ne
dispose pas des marges de manoeuvre nécessaires sur le plan
financier : il ne peut que rappeler qu'il a estimé, à la
suite des travaux du groupe de travail de la commission des finances qu'il a eu
l'honneur de présider, le besoin de financement global de France
télévision pour l'horizon 2004, à entre 5 et 600 M€
de ressources publiques courantes annuelles, auxquelles il faut ajouter entre
125 et 275 M€ de dotations en capital.
Les données à long terme du problème n'ont pas
changé : TF1 voit ses dépenses d'exploitation et
d'investissement croître de plus de 10 % par an, tandis que le
budget de France Télévision, lui, ne progresse que de la
moitié environ. Il faut rappeler qu'en 2000 TF1 et M6 ont respectivement
connu des croissances de leur chiffres d'affaires de 22,5 % et 18 %,
à comparer à une hausse des produits d'exploitation de
12,7 % des sociétés du groupe France
Télévision, année où, pourtant, les ressources de
redevance avaient crû de plus de 1,27 Mds de F. Même quand
l'État fait un effort exceptionnel, il est encore distancé par le
secteur privé qui réalise des performances commerciales encore
supérieures.
Certes le ralentissement du marché se profile avec une croissance des
ressources sans doute inférieure à 5 % en 2001. Mais
l'analyse générale reste selon votre rapporteur spécial
tout à fait valable : l'évolution du budget de l'audiovisuel
public tend à suivre celle du budget de l'État, alors que ceux de
ses concurrents privés augmentent à la vitesse d'un marché
en plein développement.
Les projets de développement de France Télévision dans le
numérique sont actuellement évalués à
580 M€ (3,8 MdsF) pour la période 2001-2006. Le
président de France Télévision avait évalué
ces besoins en capitaux à 1,5 MdF sur cinq ans. Le Gouvernement lui
en a accordé 1 milliard, soit 152,45 M€ financés sur
les ressources de privatisations.
Par ailleurs, 800 MF, soit 122 M€ devraient provenir de la cession
d'actifs non stratégiques dont la plus grande part viendrait de la vente
de la participation que le groupe détient dans le bouquet TPS. Ce
montant pourrait se révéler difficile à obtenir dès
lors que, si l'on se base sur les évaluations données par la
presse en ce qui concerne la valeur de la participation de France
Télécom, la valeur de celle de France Télévision ne
serait que de 85 M€.
En tout état de cause, ce décalage entre les besoins de
financement des nouvelles chaînes que veut créer France
Télévision dans le domaine de l'information et du sport, suppose
soit que l'Etat trouve encore des ressources complémentaires, soit qu'on
autorise France Télévision à trouver des partenaires
privés.
A l'heure actuelle, les projets des chaînes « Info »
et de chaînes « sport » en particulier,
créneau déjà occupé avec succès par le
secteur privé, sont en panne de financement, alors que la loi a
réservé au secteur public une douzaine de chaînes.
Certes, France télévision peut compter sur la réalisation
de sa participation dans TPS évaluée aux alentours d'un milliard
de francs, mais ce montant reste d'autant plus limité que des
informations de presse relatives à la cession de la participation de
France Telecom, valoriserait à 85 M€ soit 560 MF.
(c) La redevance diminuée dans son volume et affaiblie dans son principe
L'année dernière, alors que le débat sur
le
principe même de la redevance pour droit d'usage d'un appareil de
télévision continuait d'agiter les mondes de la politique comme
des médias, on a vu surgir, au cours des débats à
l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur
général du budget, un amendement prévoyant une
exonération de redevance au profit de personnes âgées de
plus de 70 ans non imposables à l'impôt sur le revenu et à
l'impôt sur la fortune.
Cette année, l'Assemblée nationale fait un pas de plus dans la
même voie en abaissant à 65 ans la limite d'âge ouvrant
droit à cette exonération.
Certes, le régime actuel des exonérations n'est pas parfaitement
satisfaisant, au regard de l'égalité entre les citoyens, mais on
peut se demander s'il est souhaitable de le modifier à la marge dans un
sens où il sera sans doute encore plus difficile voire impossible d'en
rationaliser l'assiette.
Plutôt qu'un replâtrage plus ou moins opportuniste qui pourrait
hypothéquer les chances d'une réforme à venir, votre
rapporteur spécial estime qu'il serait préférable de
revoir globalement l'assiette de la taxe et son mode de recouvrement.
Ce que l'initiative a d'inquiétant, c'est qu'elle semble constituer
l'amorce d'un processus de désagrégation de la redevance, qui ne
laissera dans l'avenir d'autre issue que sa disparition.
Pourtant le rapport de l'inspection générale des finances de
novembre 1999, intitulé
« rapport d'enquête sur le
coût, l'efficacité et les perspectives d'évolution du
service de la redevance audiovisuelle
», explorait des voies
intéressantes.
Défavorable
comme l'inspection des finances à
une
budgétisation des ressources de l'audiovisuel public
ainsi
qu'à son
financement par le produit des jeux
, dans la mesure
où il est essentiel de conserver au travers de la redevance un lien
citoyen entre les Français et leur télévision, votre
rapporteur spécial, estime que l'on pourrait effectivement
adosser la
redevance
sur la taxe d'habitation
mais
sans les
confondre
: il s'agirait d'envisager une identité du fait
générateur - disposer d'un local à usage d'habitation - et
donc de l'identifiant informatique du contribuable/redevable, tout en
distinguant les avis d'imposition et les modalités de perception de
façon à
ne pas créer de confusion des
responsabilités entre l'État et les collectivités
territoriales
.
Une telle réforme, qui passe aussi par un
renforcement des pouvoirs
juridiques des services compétents
- droit de communication
amélioré, utilisation de l'avis à tiers détenteur
-, permettrait à la fois d'augmenter substantiellement les ressources de
l'audiovisuel public et de
régler le problème des
exonérations
.
Le service de la redevance, dont votre rapporteur a pu apprécier
l'efficacité, ne serait pas supprimé mais simplement
restructuré pour ne plus avoir à traiter que l'émission
des avis d'imposition et du contentieux, déchargeant en ce qui concerne
cette dernière tâche les services de la comptabilité
publique, ce qui devrait limiter les réaffectations et donc le
coût social de la réforme.
Quant au niveau de la redevance, dont on a vu qu'il était nettement
inférieur à celui des autres grands pays européens, votre
rapporteur spécial estime que, surtout à défaut d'une
réforme d'envergure de la redevance en augmentant sensiblement le
produit, il faudrait en augmenter le montant, non seulement pour rattraper le
retard pris sur l'évolution des prix et du SMIC, mais encore pour
permettre le financement de toutes les activités qui vont aller de pair
à l'expansion des marchés de l'Internet et du numérique de
terre.
Pour sauver le modèle audiovisuel français, il faut y mettre
les moyens financiers. Le rapporteur spécial ne peut que
, surtout
à l'orée d'une nouvelle période de vaches maigres
budgétaires
, réitérer sa position de principe : il
faut non seulement conserver la redevance mais encore avoir le courage de
l'augmenter pour la mettre au niveau de celle des grands pays européens.
(d) Les questions de productivité différées avec la priorité aux mesures salariales
Productivité et responsabilité sont des
impératifs catégoriques faute desquels l'argent public que l'on
s'apprête à injecter, a toutes les chances de
s'évaporer
.
Le poids des mesures salariales, qui doivent absorber plus de la moitié
des moyens nouveaux accordés aux organismes de l'audiovisuel public
indique clairement où sont les priorités du présent budget.
(en millions d'euros)
Programmes |
39,45 |
42,25 % |
Mesures salariales |
46,94 |
50,27 % |
Diffusion |
0,53 |
0,57 % |
Impôts, taxes et prélèvements divers |
3,48 |
3,73 % |
Dotations aux amortissements |
2,84 |
3,04 % |
Autres charges |
0,13 |
0,14 % |
Total |
93,38 |
100 % |
Le tableau ci-dessus montre que sur les 47 M€ de mesures nouvelles allant aux mesures salariales, la moitié correspond en fait aux créations d'emplois rendues nécessaires dans le cadre de la réduction du temps de travail au sein du groupe France Télévision.
|
FRANCE 2 |
FRANCE 3 |
LA 5E |
Créations d'emplois prévues |
85 |
220 |
10 |
Créations d'emplois effectives au 30 juin 2001 |
70 |
218 |
10 |
Coût global du passage aux 35 heures |
5,18 M€ |
15,85 M€ |
0,3 M€ |
Il est
grand temps que l'on accorde, en toute transparence, une autonomie normale aux
entreprises publiques de communication audiovisuelle
. Celles-ci
doivent pouvoir investir et donc emprunter comme le font leurs concurrentes
du secteur privé
. Il faut espérer que les contrats
d'objectifs et de moyens - celui de France télévision devrait
être signé fin novembre - tiendront compte de cet objectif.
Il faut rappeler que, si le gouvernement de M. Blair a refusé à
la
BBC
en février 2000 une redevance spéciale pour
financer ce passage au numérique, il a accepté une hausse
progressive de la
redevance
en contrepartie d'un plan d'économies
de 2,7 mds € sur sept ans. En application de ce plan, la BBC doit
réduire ses frais de fonctionnement, de 24% de son budget en 1999/2000
à 19% en 2000/2001. L'objectif est d'arriver à un ratio de 15%
d'ici cinq ans.
1. Les télévisions locales sans horizon défini
A la
différence de toutes les grandes démocraties, la France n'est pas
parvenue à développer un réseau dynamique de
télévisions locales.
La baisse des coûts de diffusion et l'arrivée du numérique
terrestre vont-elles changer les données du problème ? On
avait pu espérer un changement de politique après la parution en
novembre 1998, du rapport de MM. Michel Francaix, député (PS) de
l'Oise, et Jacques Vistel, conseiller d'État, pour lesquels il est
« nécessaire de donner aux télévisions locales
les chances d'un nouveau départ... ». Mais quoiqu'en dise le
Gouvernement, les progrès introduits par la loi du 1er août 2000
restent limités.
Le ministère de la culture et de la Communication estime, certes, que
pour favoriser la constitution de réseaux de télévisions
locales de proximité, la loi du 1er août 2000 a d'ores et
déjà ouvert certaines possibilités en prévoyant,
notamment, que les associations puissent se porter candidates à l'usage
de fréquences et se voir délivrer par le Conseil supérieur
de l'audiovisuel une autorisation d'émettre d'une durée de dix
ans.
La loi prescrit également que le Conseil supérieur de
l'audiovisuel doit veiller, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une
part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux
services édités par une association et accomplissant une mission
de communication sociale de proximité. Le Gouvernement reconnaît
toutefois qu'alors qu'il existe près de 600 radios locales associatives
sur l'ensemble du territoire métropolitain et des départements
d'outre-mer, les télévisions de proximité à
vocation non commerciale, qu'elles soient diffusées par câble ou
par voie hertzienne, restent peu nombreuses dans notre pays et sont souvent
dans une situation financière précaire.
Pour évaluer la viabilité des projets de diffusion
télévisuelle en ligne, le gouvernement a confirmé le
prochain dépôt devant le Parlement conformément aux
dispositions de l'article 59 de la loi sur l'audiovisuel du
1
er
août 2000, d'un rapport sur le développement
des télévisions citoyennes de proximité.
Cette attitude
attentiste du Gouvernement se justifie d'autant moins que le Conseil
supérieur de l'audiovisuel à désigné des pistes
pour le développement des télévisions locales
.
Constatant que la télévision de proximité peine à
trouver sa place dans le paysage audiovisuel français, M. Dominique
Baudis, président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel a
récemment fait connaître son diagnostic. « Notre paysage
télévisuel ressemble au paysage radiophonique des années
70 : une dominante nationale et généraliste qui s'impose
à part entière, imprime sa spécificité dans notre
paysage audiovisuel et freine l'émergence d'une vraie
télévision de proximité », d'autant plus que son
développement se heurte à deux obstacles, la rareté des
fréquences hertziennes et les problèmes de financement.
Pour lui un certain nombre de pistes restent à défricher :
accès sous certaines conditions du secteur de la distribution à
la publicité pour les télévisions locales ; financement
dans un cadre contractuel par les collectivités ; création
d'un fonds de soutien pour les projets associatifs sur le modèle de ce
qui existe déjà dans le secteur radiophonique.
Votre rapporteur spécial, qui lors de la discussion du dernier projet de
loi audiovisuel était intervenu pour faciliter les initiatives des
collectivités territoriales en matière de
télévision de proximité, ne peut mieux dire. Il approuve
encore le président du CSA lorsqu'il estime que « la
numérisation de la télévision hertzienne de terre
apparaît comme une véritable chance pour la
télévision de proximité avec le soutien des
collectivités locales, qui peuvent en effet participer au succès
de la télévision numérique terrestre ».
Certes le président de l'autorité de régulation a raison
de s'interroger : «Comment en effet rendre ce développement
possible, sans créer de fracture ou d'exclusion, comment encadrer le
mode de financement des médias par les collectivités locales sans
le restreindre, comment encourager les initiatives et les innovations,
favoriser la participation citoyenne ? » Mais il ne faudrait pas
que ces questions légitimes ne retardent le processus législatif
et réglementaire d'intervention des collectivités territoriales,
auxquelles votre rapporteur spécial fait confiance pour trouver sur le
terrain les réponses adaptées.
L'attitude du CSA ne fait pas l'unanimité. Ainsi, l'Association des
villes pour le câble et le multimédia (Avicam) a regretté
que la décision de ne faire porter «les appels à
candidatures pour le local qui doivent être lancés fin novembre,
sur la moitié du multiplex de la télévision publique, soit
trois services, constitue «une division par deux des capacités
prévues il y a deux ans, et surtout une organisation non adaptée
aux spécificités de la télévision locale».
En outre, toujours selon l'Avicam, le choix du CSA implique des surcoûts
: «émetteurs plus puissants, liaisons de contributions plus
longues, standards de qualité plus élevés pour être
compatibles avec les chaînes publiques». Enfin, selon elle, elle
«favorise le développement du national, au détriment du
local, sauf dans une région ou un multiplex sera dédié :
la région parisienne». Sans entrer dans le fonds du débat,
votre rapporteur spécial estime que les spécificités des
télévisions locales doivent être prises en compte dans
l'architecture des multiplex, sans exclure que celles-ci puissent
s'intégrer dans un réseau national.
Il y a là un enjeu important pour la viabilité des
télévisons locales et notamment pour les initiatives que la
presse locale prend à ce niveau
4(
*
)
. A cet
égard, on ne peut que reprendre en première analyse, l'opinion
exprimée par M. Jean, Louis Prévost président de la voix
du Nord, président de
la PQR
, selon laquelle
le
numérique hertzien n'est pas la panacée
: « Ce
dossier arrive au contraire à un mauvais moment. La montée en
charge du numérique terrestre va être lente et coûteuse.
Pour une chaîne locale, commencer par le numérique hertzien serait
très dangereux, ne serait-ce que parce qu'au démarrage, dans
certaines villes, seulement la moitié des foyers pourront en effet
recevoir la nouvelle télévision. Pour notre part, nous attendons
toujours que le Conseil supérieur de l'audiovisuel prenne une
décision concernant l'attribution de nouvelles fréquences
analogiques aux télévisions locales.
La PQR n'a pas besoin de
la TNT pour développer des chaînes de
proximité
».
La PQR estime que la libéralisation des secteurs interdits de
publicité envisagée par le Gouvernement et même l'ouverture
à la grande distribution que ce dernier n'évoque d'ailleurs
qu'avec prudence, ne suffira pas à rendre la télévision
locale économiquement viable . Pour Jean-Louis Prévost,
« Toutes nos études prouvent que même avec la grande
distribution, les télévisions locales seraient
déficitaires. Plus globalement, le marché local ne finance pas ce
type de projet. Pour être rentables, nous avons besoin d'attirer les
annonceurs nationaux. Mais tant qu'on n'aura pas réuni le potentiel de
spectateurs qui les intéresse, nous n'y parviendront pas. Pour avoir
accès à la publicité nationale, nous devons avoir entre 12
et 15 télévisions de proximité qui fassent de 2 % à
3 % d'audience nationale en cumul. »
La ministre de la culture et de la communication, Madame Catherine Tasca, s'est
effectivement déclarée favorable à l'ouverture
«ciblée et progressive» à la publicité
télévisée de certains secteurs actuellement interdits et,
en premier lieu, de la presse, tout en précisant qu'en ce qui concerne
la grande distribution, également interdite de publicité à
la télé, «la réflexion devra être
poursuivie».
Tous ces éléments d'information témoignent de ce que le
Gouvernement n'est pas en mesure, indépendamment même des
incertitudes liées à la conjoncture économique
générale, d'offrir un cadre clair aux initiatives en
matière de télévisions locales.
2. L'audiovisuel extérieur sans dynamique
«Mon rôle est de faire de la politique audiovisuelle
extérieure l'une des principales priorités de notre action
extérieure», a récemment affirmé M. Hubert
Védrine
5(
*
)
, ministre des Affaires
étrangères, qui s'est déclaré convaincu que
« la place de la France dans le monde globalisé d'aujourd'hui,
et encore plus de demain, dépendra en grande partie de la force et de la
présence de ses images et de ses entreprises d'information. Au premier
chef RFI et TV5, mais également, en toute indépendance, l'AFP. Il
faut élargir les zones couvertes par TV5, notamment en favorisant le
sous-titrage sur cette chaîne, développer l'audience de RFI,
susciter le partenariat entre chaînes françaises ou francophones
et chaînes locales. »
On ne saurait mieux dire. Mais, selon votre rapporteur spécial, on
pourrait sans doute mieux faire. La stratégie paraît difficilement
contestable, tout comme les objectifs intermédiaires. Mais se donne-t-on
les moyens d'une telle politique ? Certes M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères, peut défendre son
bilan : « Avec mon soutien, Jean Stock a créé TV5
Monde et simplifié les structures de TV5. Depuis le 1er août, deux
nouveaux signaux vers les États-Unis et l'Amérique latine
s'ajoutent aux cinq existants. Maintenant, il faut poursuivre l'enrichissement
de la programmation. Des moyens importants, 25 MF, ont été
dégagés à cette fin dans le budget du ministère des
Affaires étrangères pour 2002. Pour RFI, un contrat d'objectifs
et de moyens sera prochainement signé avec l'État pour la
période 2002-2006. RFI doit réussir la numérisation et
renforcer sa présence dans des régions stratégiques, mais
poursuivre aussi ses efforts de rationalisation.
Par ailleurs, réfléchir à une télévision en
partenariat avec un pays arabe, à destination du public arabophone ou
imaginer une chaîne de divertissement d'abord destinée à la
jeunesse sont effectivement des orientations stratégiques
avancées par le ministre qui méritent d'être
étudiées.
En revanche, l'objectif affiché consistant à développer
les « synergies possibles entre les différents
opérateurs, nationaux et à vocation internationale, mettre
à profit les possibilités nouvelles des chaînes
numériques, par exemple la future chaîne d'information de France
Télévision », ne paraît guère
avancé dans la mesure ou, semble-t-il France télévision a
tendance à vouloir placer France télévision sur des
bouquets de chaînes publiques. Cette volonté n'est pas
forcément illégitime mais devrait être englobée dans
une stratégie d'ensemble.
En dernier lieu, la façon dont s'est effectué le remplacement de
Jean Stock
6(
*
)
à la tête de TV5, a
donné lieu à quelques tiraillements entre la France et ses
partenaires francophones, manifestement irrités par le fait qu'on ne
leur ait pas laissé le choix . A ces grincement externes se sont
ajoutés des frottements internes : Serge Adda de Canal + horizons,
le candidat finalement choisi n'était pas celui de France
télévision actionnaire muet de TV5 et sans doute quelque peu
frustré de ne pouvoir resserrer ses liens avec sa filiale
théorique.
Bien que sachant que BBC WorldWide bénéficie d'un budget de
760 M€ plus de trois fois supérieur à celui que la
France consacre à l'audiovisuel extérieur (234,4 M€), votre
rapporteur spécial estime qu'il conviendrait au préalable de
développer les synergies entre tous les acteurs de l'audiovisuel
extérieur, ce qui lui semble loin d'être le cas tant au niveau
national que sur le terrain à l'étranger.
1
Notamment dans Les Échos du 8
octobre
2001
2Elles ont été recensées par des experts. En premier lieu,
le rythme de déploiement technique sur des 85 % de population qu'il est
économiquement raisonnable de desservir, sera nécessairement
lent. Il est conditionné par la lourdeur des travaux de recherche et de
validation des premières fréquences numériques cohabitant
dans le spectre hertzien, de la planification décalée des
émetteurs secondaires et des réémetteurs, de l'obligation
de réarrangements partiels de fréquences analogiques,
l'approvisionnement en matériels de diffusion et leur réglage, de
la mise aux normes puis en services d'infrastructures de diffusion
préexistantes ou nouvelles. En ce qui concerne le volet réception
les incertitudes ne sont pas moins grandes : elles portent ici sur le taux
obligé d'interventions de défiltrage ou de remplacement
d'antennes de toit, sur le taux d'immeubles désormais dépourvus
d'antennes collectives du fait d'un abonnement généralisé
au service de base du câble, et enfin sur le taux de portabilité
permettant aux foyers de s'affranchir de la contrainte d'une antenne
extérieure, le bénéfice de cette portabilité
étant intimement lié à la proximité des
émetteurs, aux puissances rayonnées et aux
caractéristiques de chaque appartement. Enfin, il s'agit de permettre la
lecture des signaux numériques sur l'écran de
télévision. Trois types d'équipement domestique pourront
satisfaire cette fonction : un téléviseur numérique
intégré permettant de traiter les signaux numériques
reçus en clair mais sans fonction de décryptage des services
payants ; un boîtier démodulateur à connecter à son
téléviseur encore analogique ; ou bien, enfin, un
démodulateur-décodeur, permettant la réception des
chaînes payantes et gratuites, probablement fourni en location par le
distributeur commercial de chaînes payantes. Les premiers modèles
de téléviseurs numériques intégrés devraient
être proposés dans les magasins français à la fin de
l'année 2002, mais l'incertitude plane sur le rythme d'introduction et
l'élargissement de gamme à des prix accessibles au grand public.
3 Il est probable que l'équipement TNT des ménages
français sera en début de période majoritairement
assuré par des boîtiers décodeurs fournis en prêt ou
location par les éditeurs et distributeurs de chaînes payantes,
selon le schéma suivi depuis 15 ans par Canal Plus, le câble et
les deux plates-formes satellitaires. A cet égard la migration des
décodeurs du parc de canal+ serait un puissant levier de diffusion de la
télévision numérique de terre, si ce geste ne consistait
pas pour cette entreprise à alimenter sa propre concurrence.
4
«Ouest France», «Le Télégramme de
Brest», et «Presse Océan» (Socpresse)
réfléchissent aujourd'hui sur la possibilité de
présenter à la mi-novembre, auprès du CSA, un dossier de
candidature commun pour la création d'une télévision
locale à Nantes.
Le groupe Ouest France, via sa filiale Ouest France Multimédia, vient de
faire son entrée au sein de TVWeb Régions, réseau de
télévisions locales interactives. Au sein du conseil
d'administration de TVWeb Régions. Ouest France rejoint ainsi les cinq
autres partenaires («La Nouvelle République du Centre Ouest»,
«Sud Ouest», «La Dépêche du Midi», «Le
Télégramme de Brest», «Le Parisien») qui
détiennent à eux six 80 % du capital, les 20 % restants
appartenant à CanalWeb.net, actuellement en difficulté
5
«La Tribune» du 31 octobre 2001
6
Nommé à la Tête de l'Union européenne
de radiodiffusion