M. Michel Charasse

LES OBSERVATIONS SUR LE COMPTE

- L a justification au premier euro des prévisions de recettes sur les trois programmes demeure insuffisante. Celle des dépenses est inégale, et évasive s'agissant du programme 852 « Prêts à des Etats étrangers pour consolidation de dettes envers la France », les prévisions d'accord en Club de Paris ayant une incidence diplomatique. Les réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial apportent un complément insuffisant. De fait, les prévisions de décaissements de prêts sur le programme 852 sont largement tributaires des incertitudes entourant la situation politique de la Côte d'Ivoire ou de la République démocratique du Congo (RDC).

- Les prêts de la Réserve pays émergents (programme 851) contribuent formellement à l'APD, les 18 pays éligibles étant inscrits sur la liste du CAD, mais leurs caractéristiques (aide liée en faveur de pays à revenu intermédiaire) en font un instrument qui ne répond pas aux priorités de l'aide et en particulier des OMD.

- La pertinence de l'indicateur du programme 851 (prêts de la Réserve pays émergents) doit être relativisée, tant en raison de ses résultats erratiques et de l'aléa inhérent à ces prêts que de la base relativement restreinte de calcul. La cible de 65 % de protocoles de prêts signés et imputés, initialement fixée pour 2009, a été décalée à 2012, et les résultats ont culminé à 80 % en 2006. En outre, l'indicateur du programme 852 ne constitue que la reprise d'un objectif international relatif à une initiative PPTE en fin de cycle, et n'informe guère le citoyen sur la plus-value réellement apportée par la France dans ce dispositif , pas plus que sur l'impact de celui-ci sur le développement des pays considérés.

- L'initiative PPTE, complétée par l'Initiative d'annulation de la dette multilatérale (IADM), a un coût élevé pour les bailleurs. Elle n'est pas une panacée et ses résultats, bien que tangibles, peuvent être hypothéqués par un réendettement excessif des pays bénéficiaires, en particulier auprès de pays émergents qui ne participent pas à l'initiative (Chine) et sont susceptibles d'octroyer de nouveaux prêts à des conditions onéreuses. Il importe donc de se montrer très vigilant sur le maintien de la soutenabilité de l'endettement.

- Les trois-quarts du montant prévisionnel d'annulations de créances portées par la Coface pour 2008 concernent trois pays (Egypte, Irak et RDC). Votre rapporteur spécial s'interroge néanmoins sur l'imputation en APD d'annulations de créances sur la Pologne (25,6 millions d'euros), et constate que les prévisions transmises par le MINEFE (951 millions d'euros en 2008) diffèrent de celles inscrites dans le DPT (655 millions d'euros).

- Le nouvel instrument de l'AFD qu'est le prêt très concessionnel contracyclique (PTCC), qui s'inscrit dans la nouvelle doctrine de l'Agence sur la reprise des prêts aux pays « post PPTE » et exerce un impact sur les crédits du programme 853, est bien conçu et répond à une approche prudente. La faculté de suspension du versement des annuités en cas de détérioration réelle de la solvabilité doit néanmoins être suffisamment encadrée.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA MISSION

A. TROIS PROGRAMMES QUI ONT SUCCÉDÉ À D'ANCIENS COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

La compte de concours financiers « Prêts à des Etats étrangers » est doté de crédits évaluatifs en application de l'article 24 de la LOLF, et composé de trois sections présentées sous forme de programmes :

- le programme 851 « Prêts à des Etats étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructure » ;

- le programme 852 « Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France », qui représente près de 90 % des crédits de paiement de la mission ;

- et le programme 853 « Prêts à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des Etats étrangers ».

Les dotations sur ces trois programmes permettent l'octroi de prêts à des Etats étrangers directement - s'agissant de la Réserve pays émergents (RPE) sur le programme 851 ou des prêts accordés en application d'accords de consolidation sur le programme 852 - ou indirectement pour le programme 853, au travers du financement de l'activité de prêts très concessionnels de l'AFD et de la couverture du risque pays sur les contreparties non souveraines.

Le responsable de ces trois programmes est le directeur général du Trésor et de la Politique économique (DGTPE) du MINEFE, qui assure la présidence et le secrétariat du Club de Paris et qui négocie pour la France les accords bilatéraux de traitement de la dette.

Conformément à sa nature, cette mission ne comporte que des dépenses d'opérations financières relevant du titre 7. Par rapport à la loi de finances initiale pour 2007, les AE et les CP font plus que doubler.

Montant et évolution des AE et CP demandés pour 2008

(en millions d'euros)

Programme

AE 2007

AE 2008

Evolution 2007/2008

CP 2007

CP 2008

Evolution 2007/2008

Part des CP de la mission en 2008

851 - Prêts à des Etats étrangers, de la RPE, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructures

300

350

16,7 %

150

120

- 20 %

5,8 %

852 - Prêts à des Etats étrangers pour consolidation de dettes envers la France

731,25

1.822,3

149,2 %

731,25

1.822,3

149,2 %

%

853 - Prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement économique et social dans des Etats étrangers

163

269

65 %

115,2

124

7,6 %

6 %

Total

1.194,25

2.441,3

104,4 %

996,45

2.066,3

107,4 %

100 %

Source : projet annuel de performances sur les comptes spéciaux annexé au projet de loi de finances pour 2008

En tant que compte de concours financiers, il est structuré en dépenses et recettes (essentiellement des remboursements du capital des prêts consentis), dont la nature et les justifications sont détaillées infra pour chaque programme. Le compte devrait être fortement déficitaire en 2008 , de plus d'un milliard d'euros, en raison de la forte hausse des opérations de refinancement de prêts du programme 852 :

Equilibre du compte « Prêts à des Etats étrangers » pour 2008

(en millions d'euros)

Section

Recettes

Crédits

Solde

Section 1 - Prêts à des Etats étrangers, de la RPE, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructures

457

120

337

Section 2 - Prêts à des Etats étrangers pour consolidation de dettes envers la France

533,78

1.822,3

-1.288,6

Section 3 - Prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement économique et social dans des Etats étrangers

68,3

124

-55,7

Total

1.059,08

2.066,3

-1.007,22

Source : projet annuel de performances sur les comptes spéciaux annexé au projet de loi de finances pour 2008

B. UN COMPTE DANS LE PÉRIMÈTRE DE L'AIDE AU DÉVELOPPEMENT

1. La comptabilisation des annulations en APD

Ce compte concourt à l'aide publique au développement (APD) de la France et est donc intégrée dans le document de politique transversale « Politique française en faveur du développement » (cf. supra ).

Rappelons que les annulations de dettes ne sont pas intégralement comptabilisées dans l'APD . Seule l'annulation de créances civiles consenties à des conditions commerciales peut donner lieu à déclaration en APD, ce qui exclut donc toutes les dépenses militaires. Lorsqu'une annulation concerne un prêt initialement consenti aux conditions de l'APD, le montant de l'annulation n'est pas totalement intégré à l'effort d'aide. En effet, le principal du prêt (issu du principal et des intérêts de l'ancien prêt) a déjà été déclaré en APD au moment de son déboursement ; son annulation ne s'impute donc pas en APD pour éviter une double comptabilisation, et seule la part en intérêts ressortit à l'APD .

De même, les annulations de dette comptabilisées en APD ne se traduisent que pour une part minoritaire par une dépense budgétaire . La comptabilisation des annulations repose sur la valeur nominale de la créance originelle , plutôt que sur sa valeur de marché, car elle est perçue comme correspondant à l'impact réel en termes de développement de l'annulation de dette pour le pays débiteur et au coût pour le créancier.

2. L'impact très variable des prêts

L'impact sur l'APD des cinq catégories de prêts (RPE, prêts pour refinancement de dettes, prêts de « premier guichet » et prêts d'aide à l'ajustement structurel de l'AFD, facilités du FMI) octroyés par la France est également très variable, selon les flux nets de remboursements, et très différent de l'imputation budgétaire. L'impact en APD de ces prêts pourrait ainsi devenir fortement positif en 2008 après avoir été faible en 2007 , selon un écart de près de 620 millions d'euros.

Récapitulatif de l'impact des prêts sur les dépenses budgétaires et sur la comptabilisation en APD en 2007 et 2008

(en millions d'euros)

Missions

Programmes

Objet

LFI 2007

Estimation de l'impact APD

PLF 2008

Estimation de l'impact APD

Prêts à des Etats étrangers

851 - Prêts à des Etats étrangers de la RPE

Réalisation de projets d'infrastructures

150

-362

120

-340

852 - Prêts de consolidation de dettes envers la France

Refinancements de dettes d'Etats étrangers

731

22

1.822

1.389

853 - Prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement

- Adossement des prêts PPTE

- Couverture du risque commercial sur les prêts non souverains

115

444

124

-346

Aide publique au développement

110 - Aide économique et financière au développement

Crédits de bonification AFD pour les Etats étrangers et l'outre-mer

50

50,4

FRPC du FMI

18,1

N.D.

13,7

N.D.

Prêts d'aide à l'ajustement structurel de l'AFD (hors missions)

-

-80

-

-60

Total (hors FRPC)

1.064,1

24

2.130,1

643

Source : document de politique transversale « Politique française en faveur du développement »

II. LE PROGRAMME 851 « PRÊTS À DES ETATS ÉTRANGERS, DE LA RÉSERVE PAYS ÉMERGENTS, EN VUE DE FACILITER LA RÉALISATION DE PROJETS D'INFRASTRUCTURES »

A. OBJET ET ÉQUILIBRE FINANCIER DU PROGRAMME

1. Nature des prêts financés sur ce programme

Le programme 851 a pour finalité la mise en oeuvre d'une aide économique et financière dans les pays émergents , via des prêts concessionnels destinés à financer des projets participant au développement économique des pays emprunteurs et dont la réalisation fait appel à des biens et services français . Ces financements contribuent ainsi à soutenir l'expansion internationale des entreprises françaises.

Ces financements sont tous comptabilisés dans l'APD bilatérale française et se veulent cohérents avec les stratégies et les interventions des banques de développement multilatérales, comme avec les huit objectifs du millénaire adoptés par les Nations Unies. Votre rapporteur spécial constate toutefois, comme les années précédentes, une comptabilisation de ces crédits dans l'APD , malgré leur caractère d'aide liée et le niveau de développement des pays récipiendaires.

La RPE, créée en 1998, privilégie une logique d'aide-projet plutôt que d'enveloppe par pays. La mise en place d'une aide au titre de la RPE se traduit par la signature d'un protocole intergouvernemental avec les autorités du pays bénéficiaire, pour un projet précis, après évaluation de ce projet par un expert indépendant et approbation par un comité interministériel 1 ( * ) présidé par la DGTPE. Les accords intergouvernementaux sont ensuite mis en oeuvre, dans le cadre d'une convention avec l'emprunteur, par la direction des activités institutionnelles de la société Natixis , agissant au nom et pour le compte de l'Etat français.

Le montant global des financements octroyés depuis la création de la RPE s'élève à plus de 1,8 milliard d'euros .

Les prêts doivent en outre respecter les règles relatives à l'aide liée (dites « règles d'Helsinki ») de l'Arrangement sur les crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien public, appliquées depuis le 15 février 1992 sous l'égide de l'OCDE et qui ont été révisées en avril 2005. Ces règles fixent notamment les niveaux minima de concessionnalité des financements.

La ventilation sectorielle des projets financés témoigne de l'importance accordée à l'objectif de développement durable : le secteur des transports représente ainsi la moitié des prêts consentis et tend à mieux prendre en compte les objectifs de réduction de la pollution et des gaz à effet de serre ; l'eau et l'environnement représentent plus d'un tiers des concours.

Quatorze pays sont aujourd'hui éligibles à ces financements à titre exclusif (Algérie, Azerbaïdjan, Chine, Egypte, Indonésie, Kazakhstan, Maroc, Monténégro, Pakistan, Philippines, Sri Lanka, Serbie, Tunisie et Vietnam), et six autres de préférence en cas de cofinancement (Bolivie, Colombie, Guatemala, Ouzbékistan, Pérou et Salvador). Quatre autres pays sont enfin considérés comme éligibles à titre expérimental : Albanie, Arménie, Mongolie et Thaïlande.

Parmi les accords de financement signés et les décisions prises en 2006 et au premier semestre 2007, on peut relever les exemples significatifs suivants :

Exemples de protocoles de prêts signés et de décisions de financement prises
au titre de la RPE en 2006 et 2007

(en millions d'euros)

Pays bénéficiaire

Intitulé du projet

Montant

Protocoles signés en 2006

Chine

Fourniture de véhicules de secours et de lutte contre les incendies pour la province du Sichuan

9,4

Vietnam

Métro de Hanoi (financement complémentaire)

200

Total (tous protocoles signés)

227,2

Protocoles signés au premier semestre 2007

Egypte

Fourniture de matériel roulant pour le métro du Caire

280

Vietnam

Mise à niveau de la liaison ferroviaire Yen Vien - Lao Cai

31

Sri Lanka

Référentiel de données spatiales (post-tsunami)

6,5

Total

317,5

Décisions de financement RPE en 2006

Egypte

Phase 1 de la ligne n° 3 du métro du Caire

170

Vietnam

Métro de Hanoi (financement complémentaire)

35

Vietnam

Mise à niveau de la liaison ferroviaire Yen Vien - Lao Cai

31

Total (toutes décisions de financement)

265,9

Décisions de financement RPE au premier semestre 2007

Maroc

Fourniture de tramway pour le réseau Rabat-Salé

150

Arménie

Systèmes de distribution d'eau potable et d'assainissement à Erevan

249

Tunisie

Signalisation des lignes Tunis-Gabès et Tunis-Ghardimaou

24

Egypte

Complément à la ligne n° 3 du métro du Caire

280

Tunisie

Projet de fourniture de 9 rames pour le métro léger de Tunis

23,7

Total (toutes décisions de financement RPE)

726,7

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'emploi

Le programme 851, comme tous ceux de cette mission, ne comporte qu'une seule action dont l'intitulé est identique.

2. Equilibre financier et justification des recettes

Le programme 851 est débité annuellement du montant des prêts consentis à des Etats étrangers, dans le cadre de la RPE, et crédité des remboursements en capital sur les prêts ainsi octroyés, dont les conditions sont précisées par chaque protocole financier. Pour chaque prêt utilisé, le montant et le calendrier des échéances sont précisément connus en fonction des tirages effectués.

L'ensemble de ces échéanciers détermine le profil de remboursement annuel de la dette des État étrangers à l'égard de la France au titre de cette section. C'est à partir du suivi de ces échéanciers que sont établies les prévisions de recettes, qui prennent également en compte les remboursements anticipés et les accords de consolidation ou d'annulation qui sont connus à la date d'établissement des prévisions.

La justification des recettes de ce programme, telle qu'elle figure dans le PAP, est claire dans son principe mais obscure dans ses déterminants fondamentaux . Selon les prévisions, les recettes devraient poursuivre leur progression et la section devrait être plus créditrice en 2008 qu'en 2007 , à hauteur de 337 millions d'euros (contre 312 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2007).

Evolution de l'équilibre du compte de 2005 à 2008

(en millions d'euros)

Recettes

Dépenses

Solde

2005

375,8

70,9

304,9

LFI 2006

427

150

277

LFI 2007

462

150

312

2008

457

120

337

Source : projet annuel de performances sur les comptes spéciaux annexé au projet de loi de finances pour 2008

B. OBJECTIF ET INDICATEUR

Le programme 851 ne comporte qu'un seul objectif, qui traduit directement la vocation des financements RPE puisqu'il s'intitule « Permettre la réalisation de projets de développement durable dans les pays émergents, faisant appel au savoir-faire français ».

Il est assorti d'un indicateur de performance, qui rend compte de la mobilisation effective des fonds en mesurant la part des protocoles de prêts signés au cours de l'année ayant donné lieu à l'imputation (qui matérialise l'accord intervenu entre la France et le pays bénéficiaire) d'un contrat dans les deux ans après la signature . Cette période de deux ans a été choisie en référence au délai de validité des offres de financements concessionnels retenu par l'OCDE. Le PAP précise néanmoins que des facteurs exogènes (évolution de la conjoncture économique, concurrence internationale, délais de passation des marchés...) sont susceptibles d'interférer dans la concrétisation des décisions, notamment en termes de délais.

La pertinence de cet indicateur doit être relativisée , tant en raison de ses résultats erratiques et de l'aléa inhérent à ces prêts que de la base relativement restreinte de calcul. Votre rapporteur spécial relève ainsi que la cible de 65 % de protocoles de prêts signés et imputés, initialement fixée pour 2009, a été décalée à 2012. Les prévisions pour 2007 et 2008 portent sur, respectivement, 60 % et 62 %, après que la réalisation effective en 2006 eût culminée à 80 %.

Le nombre de protocoles de prêts pris en compte est également assez réduit (8 en 2005, 5 en 2006 et 9 en 2007), ce qui réduit la portée des pourcentages constatés. C'est donc davantage la stabilité et la pérennité des résultats que leur niveau une année donnée qu'il convient de prendre en considération.

C. JUSTIFICATION DES CRÉDITS AU PREMIER EURO

L'évolution des dotations du programme 851 depuis 2005 est la suivante (en millions d'euros) :

2005

2006

2007

2008

Evolution 2008/2007

AE

90

300

300

350

-16,7 %

CP

71

150

150

120

-20 %

1. Les autorisations d'engagement

Après avoir été stables en 2007, les AE demandées pour 2008 sont en diminution et tiennent compte des éléments suivants, identiques aux raisons avancées pour 2007 :

- la montée en puissance des besoins de financement de projets d'infrastructure dans un grand nombre de pays émergents, tendance constatée depuis 2004 ;

- les accords-cadres signés au niveau ministériel, en 2004, avec des pays d'Asie et du Maghreb, qui devraient se traduire par de nouveaux engagements sur de grands projets ;

- les perspectives de cofinancements parallèles avec des banques multilatérales, notamment en Asie, dans les secteurs des transports, de l'énergie et de l'environnement ;

- les engagements officiels de la France au titre de la facilité pour les opérations de reconstruction « post-tsunami » en Asie du sud-est (enveloppe de 300 millions d'euros de crédits très concessionnels sur trois ans, dont 100 millions d'euros au titre de la RPE pour l'Indonésie et le Sri Lanka) ;

- enfin les mesures décidées fin 2005 au bénéfice du Pakistan à la suite du tremblement de terre, qui se traduisent par une enveloppe globale de 80 millions d'euros de prêts , dont 30 millions d'euros au titre de la RPE financée sur ce programme, et un million d'euros de dons au titre du FASEP-Etudes financé sur le programme 110 « Aide économique et financière au développement ».

2. Les crédits de paiement

Le montant de CP de 120 millions d'euros est fondé sur les estimations de tirages de Natixis . Le principe d'un versement progressif en fonction des besoins de paiements induits par la réalisation des projets engendre mécaniquement un délai entre les engagements et les paiements qui s'effectuent sur une base pluriannuelle. Les demandes de CP pour 2008 reposent donc sur des estimations des tirages effectués au titre des protocoles déjà signés, dont les projets sont en cours de réalisation ou vont entrer en vigueur en 2008, ou des protocoles dont la signature est escomptée au second semestre de 2007.

Votre rapporteur spécial déplore le manque de précision du PAP sur les projets spécifiques qui fondent les estimations de tirages de Natixis.

III. LE PROGRAMME 852 « PRÊTS À DES ETATS ÉTRANGERS POUR CONSOLIDATION DE DETTES ENVERS LA FRANCE »

A. OBJET ET ÉQUILIBRE FINANCIER DU PROGRAMME

1. Un programme dédié aux allègements de dette

Ce programme participe à la politique transversale de l'APD ; il est planifié et mis en oeuvre par le service des affaires multilatérales et du développement du MINEFI. La Banque de France contribue également à sa mise en oeuvre , puisqu'elle est chargée de l'application des accords de rééchelonnement et gère le recouvrement des prêts de consolidation.

Le programme 852 reprend depuis 2006 l'intégralité de l'ancien CST n° 903-17 portant le même intitulé. Il ne comporte qu'une seule action , identique au programme. Il contribue à la politique française d'annulation et de traitement de la dette des pays les moins avancés et des pays à revenu intermédiaire, dans le cadre de programmes décidés via les procédures multilatérales et bilatérales du Club de Paris , groupe informel de créanciers publics dont la présidence et le secrétariat sont assurés par la France. Ces traitements contribuent à rendre soutenable la dette extérieure de ces pays ou à leur permettre de faire face à des crises temporaires de liquidité extérieure.

Ainsi que le précise le DPT, outre le programme 852, les prêts concourant à l'APD française exercent également un impact sur le programme 114 « Appels en garantie de l'Etat » de la mission du budget général « Engagements financiers de l'Etat » , qui comme le présent programme est rattaché au DPT.

Les appels en garantie de l'Etat imputés sur cette action ne sont pas comptabilisables en APD , à l'exception des dépenses liées à l'indemnisation de Natixis en cas d'annulation en Club de Paris de certaines de ses créances garanties par l'Etat (cf. infra ).

2. L'initiative PPTE et l'approche d'Evian : un coût élevé mais des résultats non négligeables

a) L'initiative PPTE et son prolongement l'IADM

Les annulations de dettes consenties par la France s'inscrivent en particulier dans le cadre de l'initiative PPTE, dont la France est le premier contributeur , et de l'« approche d'Evian » décidée en juin 2003. L'initiative PPTE, lancée en 1996 puis renforcée en juin 1999, a pour objectif de restaurer durablement la solvabilité des pays bénéficiaires en annulant la part de leur dette extérieure dépassant un niveau considéré comme « soutenable » au vu de leurs perspectives de croissance économique.

Le dispositif PPTE, conçu comme une démarche ciblée et temporaire, prévoyait initialement une clause d'extinction sunset clause »), repoussée à trois reprises en 2000, 2002 et 2004, compte tenu de la situation des pays n'ayant pas encore atteint le point de décision. Une réforme a cependant été adoptée en septembre 2006 , permettant à tous les pays répondant aux critères d'endettement et de revenu à la fin 2004 de bénéficier de l'initiative.

Cette initiative concerne désormais 32 pays sur 41 potentiellement éligibles , pour la plupart membres de la ZSP, dont 10 2 ( * ) sont encore au stade du « point de décision » 3 ( * ) , qui marque l'entrée dans le processus et permet un allègement de dette intérimaire, et 22 4 ( * ) ont atteint le « point d'achèvement » (Sao Tome étant le dernier pays à avoir franchi cette étape en mars 2007, après la Sierra Leone en janvier 2007), qui constitue la sortie du processus et permet un traitement du stock de la dette.

Les 9 pays qui n'ont pas encore atteint le point de décision sont ou ont pour la plupart été récemment en situation de crise politique ou militaire (Côte d'Ivoire, Erythrée, Libéria, Soudan, Somalie). Le FMI prévoit que cette étape sera atteinte en 2008 par la Côte d'Ivoire, les Comores et le Togo.

Le coût des allégements de dette, indépendamment des annulations complémentaires bilatérales consenties par les membres du Club de Paris, atteint pour l'heure près de 33 milliards de dollars (en valeur actuelle nette de 2006) pour les 22 pays qui ont franchi le point d'achèvement - dont 17,8 milliards de dollars de créances multilatérales - et 46 milliards de dollars pour les 32 pays actuellement concernés par l'Initiative. Au terme du processus pour les 41 pays, le coût total est estimé à 67,7 milliards de dollars , ainsi réparti : 48,4 % pour les créanciers publics bilatéraux, 45,8 % pour les créanciers multilatéraux et 5,8 % pour les créanciers privés.

Les pays PPTE ayant franchi le point d'achèvement sont également éligibles à l'Initiative d'annulation de la dette multilatérale (IADM), décidée en 2005 et qui vise l'annulation de la totalité des créances admissibles détenues par la Banque mondiale, la Banque interaméricaine de développement, le FMI et le Fonds africain de développement, pour un coût de 41,7 milliards de dollars (en valeur nominale). Deux pays « non PPTE » , le Cambodge et le Tadjikistan, bénéficient également de cette initiative, en tant que PMA ayant des arriérés de longue date à l'égard du FMI.

Les Etats qui devraient bénéficier des montants les plus élevés d'annulations de dette au titre de cette initiative (en valeur nominale) sont la République démocratique du Congo (10,4 milliards de dollars), le Cameroun (4,92 milliards de dollars), le Nicaragua (4,5 milliards de dollars), le Mozambique (4,3 milliards de dollars), la Zambie (3,9 milliards de dollars), le Ghana (3,5 milliards de dollars) et l'Ethiopie (3,28 milliards de dollars).

b) L' « approche d'Evian » pour les pays non PPTE

L' « approche d'Evian » , approuvée lors du sommet du G7 en juin 2003 à Evian, est une approche du traitement de la dette des pays qui ne répondent pas aux critères PPTE mais sont néanmoins confrontés à une dette insoutenable. Elle vise à définir une réponse « sur mesure » et adaptée à la situation de chaque pays, et non plus à reposer sur des termes standards comme dans la pratique passée du Club de Paris. Elle est mise en oeuvre par étapes et prévoit un renforcement de la coordination avec les créanciers privés.

Les créanciers du Club de Paris ont procédé en 2004 et 2005 aux premiers traitements de dette dans le cadre de l'approche d'Evian (Kenya, République dominicaine, Gabon et Géorgie). L'Irak et la République kirghize ont été les premiers pays à faire l'objet d'un traitement global de la dette dans le cadre de cette approche.

c) Des résultats tangibles mais qui ne doivent pas occulter la nécessaire promotion d'un cadre d'endettement soutenable sur le long terme

L'évolution positive de la structure des budgets des pays éligibles à l'initiative PPTE se poursuit à mesure que les marges de manoeuvre libérées au niveau du service de la dette sont consacrées à l'augmentation des dépenses de santé et d'éducation, conformément à l'orientation décidée lors du passage de l'initiative PPTE originelle à l'initiative dite renforcée.

Au total, le service de la dette des 31 pays ayant franchi le point de décision rapporté aux exportations et aux revenus fiscaux a été réduit de 16,6 % de la valeur des exportations en moyenne avant le point de décision à 5 % en moyenne en 2007.

L'augmentation des dépenses sociales a été plus que proportionnelle à la réduction du service de la dette . Les dépenses sociales sont passées de 6,8 % du PIB en 2000 à 9,4 % en 2007 (soit plus de 20 milliards de dollars). Au total, les dépenses de réduction de la pauvreté représentent en 2007 53 % des recettes publiques dans les 31 pays ayant franchi le point de décision, contre 37,8 % en 2000.

Néanmoins, ainsi que le rappelle le FMI sur son site Internet, « l'initiative PPTE, même complétée par l'IADM, n'est pas la panacée . Même si la dette extérieure de ces pays était entièrement effacée, la plupart d'entre eux auraient encore besoin d'une aide extérieure concessionnelle importante puisque, depuis plusieurs années, l'aide qu'ils reçoivent est largement supérieure aux paiements effectués au titre du service de leur dette ».

Dès lors, la question du réendettement des pays bénéficiaires PPTE est fréquemment évoquée depuis quelques années. En outre, le FMI, la Banque mondiale soulignent régulièrement que tous les créanciers ne font pas les efforts financiers attendus d'eux, en particulier les créanciers privés et les créanciers bilatéraux non-membres du Club de Paris.

Ces derniers, susceptibles d'octroyer des financements à des conditions plus onéreuses mais reposant sur des conditionnalités réduites, font en effet parfois figure de « passagers clandestins » bénéficiant de l'effort collectif d'annulation de la dette sans y avoir eux-mêmes participé.

Selon le MINEFE, le réendettement des pays récemment désendettés ne constitue pas en soi un problème : le développement économique et l'atteinte des ODM supposent des flux de financement importants vers les pays à faible revenu 5 ( * ) . De plus, un prêt, même très concessionnel, constitue un effort financier plus limité pour le pays émetteur qu'un don de même montant. Il peut donc, du fait de cet effet de levier, mobiliser des ressources totales plus importantes pour le même coût budgétaire. Enfin les financements par prêts demeurent économiquement plus adaptés que des dons dès lors que le taux d'intérêt requis demeure inférieur au taux de croissance moyen sur la période.

L'expérience des années 1980 et 1990 conduit les pays concernés et la communauté internationale à la prudence pour éviter une nouvelle crise de la dette. Pour y contribuer, les institutions internationales ont créé, en avril 2005, un référentiel d'analyse : le Cadre de soutenabilité de la dette (CSD) des pays à faible revenu 6 ( * ) . La France considère que le CSD doit maintenant devenir la référence pour l'ensemble des bailleurs des pays à faible revenu. La promotion de ce cadre implique cependant de convaincre les bailleurs émergents, en particulier la Chine , dont la politique de dons et prêts peut apparaître en marge de celle des bailleurs internationaux.

Par ailleurs, la Banque mondiale a adopté en juillet 2006 des sanctions pour les pays « AID seulement » ayant recours à un endettement non concessionnel. Ces sanctions consistent en une réduction des volumes alloués aux pays éligibles aux dons et en un durcissement des termes des prêts de l'AID aux pays dits « prêts seulement », ainsi qu'aux pays bénéficiant d'un financement mixte. Des exceptions sont prévues pour des projets dont la rentabilité économique semble assurée et pour lesquels aucune ressource moins coûteuse n'a pu être mobilisée, mais elles sont strictement encadrées.

3. Equilibre financier et justification des recettes

La section constitutive du programme 852 est débitée du montant des versements de nouveaux prêts réalisés par la France en application des accords de consolidation de dette conclus dans le cadre du Club de Paris : les refinancements se traduisent en effet par le remboursement de prêts anciens via l'octroi de prêts nouveaux négociés aux nouvelles conditions d'échéancier ou de taux du Club de Paris. Les créances susceptibles d'être refinancées sont celles portées par l'AFD et celles figurant à l'actif du compte constituant la mission « Prêts à des Etats étrangers ».

La section est également créditée des remboursements en principal effectués par les Etats bénéficiaires, que ce soit à bonne date, de manière anticipée, par refinancement 7 ( * ) (en fonction des prévisions sur les accords en Club de Paris susceptibles d'être conclus au cours des années à venir) ou dans le cadre d'opérations de conversions de créances. Les paiements d'intérêts (à bonne date ou par refinancement d'échéances) étant pour leur part crédités sur le compte n° 762-41 (spécifications 2409-11 et 2409-18) du budget de l'Etat, qui a succédé au compte n° 901-540.

Les recettes effectives du programme en 2006 devraient ainsi s'élever à 533,78 millions d'euros , soit une hausse de 10,6 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2007, mais de 35,8 % par rapport au montant prévisionnel de recettes effectives en 2007 (392,97 millions d'euros).

Compte tenu de l'important écart constaté en 2007 entre prévision en LFI et exécution probable, votre rapporteur spécial s'interroge sur la sincérité du montant des recettes attendues en 2008 (cf. tableau infra ). Les prévisions pour 2008 portent sur un solde largement débiteur de près de 1,3 milliard d'euros , compte tenu de la forte augmentation des AE et CP, après avoir été créditeur de 432,4 millions d'euros en 2006 et une prévision de débit de 338,3 millions d'euros en 2007 (soit un montant escompté de recettes de 393 millions d'euros, inférieur aux 483 millions d'euros de la LFI). Ces prévisions sont toutefois aléatoires et donnent une tendance.

Evolution du solde du programme 852 et des recettes du compte n° 762-41
en prévision et en exécution

(en millions d'euros)

2006

2007

2008

LFI

Recettes

459,2

482,7

533,8

Dépenses

314,1

731,3

1.822,3

Solde

145,1

-248,6

1.288,5

Exécution

Recettes

521,7

12,5 (au 30 juin)

N.S.

Dépenses

89,3

87,8 (au 30 juin)

Solde

432,4

-75,3

Recettes du compte n° 762-41

N.D.

69,8 (prévision)

398,1

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'emploi

B. L'IMPACT FINANCIER DES ANNULATIONS ET CONSOLIDATIONS DE DETTE

1. Des mécanismes variés et complexes d'imputation

Outre les refinancements opérés via le programme 852, cinq mécanismes ou imputations budgétaires peuvent supporter des annulations de dette décidées en Club de Paris et considérées comme participant à l'APD. Quatre organismes peuvent porter la créance : l'Etat via le Trésor, la Coface (assureur-crédit), Natixis et l'AFD.

La mise en oeuvre des annulations de dette requiert toujours, lors de chaque accord introduisant de nouvelles modalités d'annulation (Toronto, Dakar, Libreville, Yaoundé), une autorisation dans un article spécifique de la loi de finances , qui fixe un plafond valable pour plusieurs années, puis régulièrement révisé en loi de finances. Le dernier relèvement a ainsi été autorisé par l'article 98 de la loi de finances pour 2007, qui a porté le plafond de remise de dette des pays les plus pauvres de 11,1 milliards d'euros à 14,6 milliards d'euros.

L'imputation globale et l'incidence budgétaire éventuelle des annulations de dette dans les comptes de l'Etat sont ainsi les suivantes :

- l'indemnisation de Natixis , via l'action n° 5 « Autres garanties » du programme 114 « Appels en garantie de l'Etat » de la mission du budget général « Engagements financiers de l'Etat », en cas d'annulation en Club de Paris de certaines créances de cet organisme garanties par l'Etat. Cette imputation, qui est comptabilisée en APD et a succédé au chapitre 14-01 des charges communes, a trait à une procédure éteinte, et devrait donc porter sur des montants très réduits en 2008 (20.000 euros prévus) ;

- les bonifications d'intérêt du MINEFE , comptabilisées dans l'action n° 3 « Traitement de la dette des pays pauvres » du programme 110 « Aide économique et financière au développement » de la mission « Aide publique au développement », ont trait à l'indemnisation des annulations supportées par l'AFD (en particulier dans le cadre des dispositifs « Dakar »). Le montant inscrit au titre de 2008 s'élève à 152,62 millions d'euros . Seule l'annulation des intérêts est comptabilisée en APD , tandis que le coût budgétaire comprend l'annulation du principal et des intérêts.

Les remises d'intérêt au titre des mesures décidées lors du sommet de La Baule de juin 1990 au profit de quatre pays de la ZSP (Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire et Gabon) ne sont comptabilisées qu'en APD sans engendrer de dépense budgétaire , de même que les remises d'intérêts en faveur de l'Egypte ;

- l'action n° 3 « Politiques et stratégies sectorielles bilatérales dans les pays de la ZSP et les PMA » du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » supporte les annulations par refinancements et dons réalisées dans le cadre des C2D . Elle n'est pas dotée de crédits pour 2008 , le coût des C2D (184 millions d'euros en 2008) étant désormais autofinancé par l'AFD et les nouvelles modalités de traitement des créances, ce qui confirme la tendance initiée en 2006.

S eules les annulations en intérêts sont comptabilisées en APD , dans la mesure où les C2D concernent des dettes d'APD et non des dettes commerciales, et où la créance annulée a déjà été originellement comptabilisée comme effort d'APD au moment de l'octroi du prêt à taux bonifié ;

- les annulations réalisées par la Coface , imputées sur le résultat de cette entreprise, n'ont pas de coût budgétaire mais sont déclarées en APD. Elles ont néanmoins un coût budgétaire indirect en ce qu'elles contribuent à diminuer la capacité de prélèvement sur le compte de l'Etat lié à la Coface (cf. infra ), ces prélèvements venant s'inscrire en recettes sur le budget général ;

- les annulations portant sur des prêts du Trésor décidées en Club de Paris sont directement imputées sur les découverts du Trésor , donc hors budget, après avoir été refinancées par l'intermédiaire du programme 852 , sauf en cas d'annulation à 100 %. Les annulations de créances au titre du dispositif « Dakar » sur les prêts du Trésor sont comptabilisées dans les transports aux découverts du Trésor uniquement pour la fraction en principal de la créance, mais seule la partie en intérêts est prise en compte dans l'APD.

Ces annulations sont approuvées par le Parlement a posteriori , lors du vote de la loi de règlement . Ces modalités d'approbation tardive en loi de finances rectificative comme en loi de règlement expliquent la brièveté du débat parlementaire à ce sujet.

Au total, seulement 9,4 % des annulations de dettes feraient l'objet d'une dépense budgétaire en 2008 , et près de la moitié seraient imputées aux découverts du Trésor, pour une estimation globale de plus de 1,6 milliard d'euros, en hausse de 20,6 % par rapport à la prévision de 2007.

Au 31 décembre 2006, c'est un montant cumulé de 19,25 milliards d'euros de dettes de pays de la ZSP qui aura ainsi été annulé par la France. Les annulations les plus importantes concernent le Nigeria (2,76 milliards d'euros), la Côte d'Ivoire (2,58 milliards d'euros), le Sénégal (1,83 milliard d'euros) et le Cameroun (1,69 milliard d'euros).

Coût et imputation des annulations de dettes depuis 2000 - Prévisions pour 2007 et 2008

(en millions d'euros)

Impact budgétaire

Impact non budgétaire

TOTAL

Natixis (chapitre 14-01 art. 90 puis programme 114)

AFD (chapitre 44-97 article 50 par 30 puis programme 110)

C2D (MAEE chapitre 41-43 puis programme 209)

Transport aux découverts du Trésor (refinancements des programmes 851 et 852)

Compte de l'Etat à la Coface

2000

0,1

339,7

-

93,2

477,1

910,1

2001

-

296,7

-

85,2

50,7

432,6

2002

-

257,8

13,1

585,1

431,5

1.287,5

2003

24,7

261,9

7,8

1.048,9

1.007,8

2.351,1

2004

0,1

212,7

31,5

652,1

782,6

1.679

2005

-

235,6

36,5

593,1

2.077,9

2.943,1

2006

39,7

171,3

15

506,3

2.161,9

2.894,2

Prév. 2007

- (43)

137

15

282

917

1.351

En %

0 %

10,1 %

1,1 %

20,9 %

67,9 %

100 %

PLF 2008

0,02 (59)

153

0

821

655

1.629

En %

0 %

9,4 %

0 %

50,4 %

40,2 %

100 %

N.B : les dépenses prévisionnelles au titre des C2D en 2007 et 2008 ne prennent pas en compte la contribution extra-budgétaire de l'AFD, le besoin de financement des C2D en 2008 étant estimé à 184 millions d'euros . Il importe également de rappeler que les annulations de créances de Natixis peuvent ne pas occasionner de dépense budgétaire tout en exerçant un impact en APD (43 millions d'euros en 2007 et 59 millions d'euros en 2008).

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'emploi ; document de politique transversale

2. Une meilleure information sur les annulations réalisées via la Coface

Depuis 2006 et au prix d'une certaine insistance, votre rapporteur spécial obtient désormais davantage de précisions sur les annulations de créances portées par la Coface. Les annulations de créances se traduisent dans le résultat du compte de l'Etat à la Coface (enregistrement distinct des opérations effectuées avec la garantie de l'Etat) selon deux étapes :

- après indemnisation d'une créance auprès de l'entreprise assurée, la Coface inscrit une créance à son actif, l'indemnisation faisant naître un droit de la Coface à récupération auprès du débiteur étranger. La Coface enregistre également une dépréciation de cet actif correspondant à l'estimation de la part non récupérable de cet actif , ce qui permet de prendre en compte les perspectives d'annulation des créances. Cette dépréciation est définie pour chaque pays sur la base de la catégorie de risque OCDE et du niveau de revenu par habitant selon la classification Banque mondiale ;

- après signature d'un accord bilatéral accordant une annulation de créance, les créances abandonnées sont annulées. L'impact comptable de cette annulation sur le résultat de la Coface représente alors la différence entre l'estimation de la part non récupérable provisionnée antérieurement au bilan du compte de l'Etat à la Coface et l'annulation réalisée.

Les annulations passées en 2006 et 2007 et l'estimation de celles à venir sur les créances détenues par Coface sont nettement dominées par le traitement des dettes de l'Egypte , de l'Irak et du Nigeria . Ces montants sont en diminution tendancielle , et trois pays (Egypte, Irak et RD Congo) devraient représenter les trois-quarts des annulations de créances Coface en 2008, ainsi que le détaille le tableau ci-après :

Annulations de créances de la Coface avec la garantie de l'Etat
Réalisation en 2006 et prévisions pour 2007 et 2008

(en millions d'euros)

2006

2007

2008

Cameroun

73,9

289,7

-

Congo-Brazzaville

24,8

21,7

25

Côte d'Ivoire

0

0

58,5

Egypte

153,9

115

106,8

Guinée

-

-

97,8

Guinée Bissau

-

-

2,3

Haïti

-

0,3

0,1

Irak

625

530

446

Libéria

-

9,3

4,5

Malawi

0,2

-

-

Nigeria

1.146

-

-

Pologne

64,6

48,1

25,6

RD Congo

4,9

-

161,2

Sierra Leone

0,9

13,1

-

Tchad

-

4,2

23,2

Total

2.094

1.031

951

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'emploi

Votre rapporteur spécial s'interroge sur l'imputation des créances sur la Pologne , qui n'est pas éligible à l'APD.

C. OBJECTIF ET INDICATEUR

Ce programme est doté d'un objectif et d'un indicateur, inchangés par rapport au projet annuel de performances de 2007.

L'objectif est ainsi intitulé « Participer au rétablissement de la stabilité macro-économique et à la création de la croissance des pays en développement », ce qui constitue un des objectifs de l'initiative PPTE. L'indicateur de performance mesure la part des pays éligibles qui ont bénéficié avec succès de cette initiative, c'est-à-dire ceux qui ont franchi son point d'achèvement tout en respectant le critère de soutenabilité de la dette à la date impartie. La dette est considérée comme soutenable lorsqu'est atteint un ratio inférieur à la valeur cible retenue dans le cadre de l'initiative PPTE 8 ( * ) , augmentée d'une marge de 40 %. Depuis 2006, l'indicateur est également impacté par la mise en oeuvre de l'IADM.

L'indicateur est bien renseigné. La prévision pour 2007 a été ramenée de 100 % à 91 % des pays, pour une cible fixée à 95 % en 2009 et une prévision de 92 % en 2008.

Votre rapporteur spécial rappelle que cet indicateur, comme cela est souvent le cas en matière d'APD, ne constitue que la reprise d'un objectif international relatif à une initiative en fin de cycle, et n'informe guère le citoyen sur la plus-value réellement apportée par la France dans le dispositif PPTE, pas plus que sur l'impact de cette initiative sur le développement des pays considérés.

D. JUSTIFICATION DES CRÉDITS AU PREMIER EURO

1. Une justification toujours aussi lapidaire

Les crédits demandés sur ce programme au titre de 2008 sont évalués à 1.822,3 millions d'euros en AE comme en CP, soit une multiplication par près de 2,5 par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2007. Votre rapporteur spécial réitère ses regrets qu'aucune justification précise de ces crédits ne soit fournie , le PAP comme certaines réponses données par le MINEFI se bornant à indiquer que « les prévisions de dépenses sont établies au vu des accords susceptibles d'être conclus au cours de l'année à venir en Club de Pari s ». Les arguments de l'aléa moral et de la discrétion diplomatique ne sauraient justifier pleinement des indications aussi sibyllines.

Au 31 juillet 2007, les transports aux découverts du Trésor s'élevaient à 29 millions d'euros (dont les deux tiers au titre d'annulations en Club de Paris) et les opérations de refinancement réalisées concernaient 4 bénéficiaires (Jordanie, Kenya, Malawi, Sao Tomé) pour un montant de 12,5 millions d'euros.

2. L'impact du traitement de la dette irakienne

Le traitement de la dette irakienne en Club de Paris prévoit trois tranches d'annulation portant sur 80 % du stock de la dette irakienne. La première tranche, équivalente à une annulation de 30 % du stock de dette, a été mise en oeuvre le 1 er janvier 2005. La deuxième tranche, portant également sur un montant équivalent à 30 % du stock, a été mise en oeuvre le 26 décembre 2005. La troisième tranche, portant sur 20 % du stock, n'interviendra au mieux qu'en 2008, à l'issue de la mise en oeuvre triennale de programmes du FMI dans les tranches supérieures de crédit.

L'Irak a également signé la totalité des accords bilatéraux avec ses créanciers membres du Club de Paris, à l'exception de la Russie, et a conclu, le 18 juillet 2006, le traitement de sa dette à l'égard des créanciers privés. En revanche, les négociations avec 21 créanciers publics non-membres du Club de Paris, dont les pays du Golfe qui sont les principaux créanciers de l'Irak, sont moins avancées.

L'accord bilatéral franco-irakien a ainsi été signé le 21 décembre 2005 . Les créances traitées représentent un total d'environ 5 milliards d'euros. Au terme des trois tranches d'annulation, un montant d'environ 4 milliards d'euros (soit 80 %) aura été annulé. Les annulations de dette comptabilisées en APD s'élèveraient à 555 millions d'euros en 2007 et 570 millions d'euros en 2008 9 ( * ) .

Les annulations de dette accordées à l'Irak n'ont pas d'incidence budgétaire directe mais un impact patrimonial , puisque les créances concernées sont essentiellement des créances portées par la Coface et des créances refinancées par Natixis avec la garantie de l'Etat, et pour lesquelles la garantie a été exercée. Les premières entraînent une variation de l'actif du compte de l'Etat à la Coface, les secondes à un abandon de créances qui n'entraîne pas de dépenses budgétaires.

IV. LE PROGRAMME 853 « PRÊTS DE L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT EN VUE DE FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DANS DES ETATS ÉTRANGERS »

A. OBJET ET ÉQUILIBRE FINANCIER DU PROGRAMME

1. Objectif et nature des prêts financés sur ce programme

Ce programme, qui est symétrique à l'action n° 2 « Aide économique et financière bilatérale » du programme 110 « Aide économique et financière au développement » de la mission « Aide publique au développement », correspond à la mise à disposition de l'AFD d'une ressource octroyée à des conditions très privilégiée , puisqu'elle est étalée sur 30 ans dont 10 ans de différé et à un taux d'intérêt de 0,25 %.

L'Agence rétrocède ces prêts à des pays de son champ d'intervention s'inscrivant dans le cadre de l'initiative PPTE, et les utilise pour couvrir le risque pays sur les prêts non souverains. Les prêts de ce programme sont donc affectés à deux finalités :

- l'adossement intégral des prêts octroyés par l'AFD à des Etats ayant atteint le point d'achèvement de l'initiative PPTE ;

- la constitution par l'Agence de provisions pour risque commercial au titre des prêts concessionnels non souverains accordés au secteur privé, grâce au différentiel de taux avec les émissions obligataires de l'AFD. Les montants inscrits sur ce programme, utilisés conjointement avec ceux du programme 110, permettent de couvrir le quadruple de risque commercial , soit un « tirage » égal au quart du montant du capital du prêt. Une réflexion est néanmoins en cours sur le réexamen des modalités de couverture par l'Etat de ce risque commercial , et devrait être finalisée fin 2007, soit un report de 10 mois.

L'engagement juridique de l'Etat intervient lors de l'envoi annuel d'une lettre plafond, qui précise le montant maximal du coût pour l'Etat des engagements de l'AFD sur l'année considérée. Ce coût est pluriannuel , puisque les paiements à l'AFD interviennent tout au long du décaissement du prêt. La discordance entre AE et CP restitue donc le caractère pluriannuel de cet engagement.

2. Equilibre financier et justification des recettes

Le programme 853 est débité annuellement des prêts accordés par l'AFD, et crédité des remboursements sur les prêts antérieurs, réalisés à taux fixe et avec 10 ans de différé . Les recettes en 2008 correspondent donc aux échéances de remboursement des prêts octroyés durant les vingt années antérieures à 1998 , sur la base d'engagements cumulés d'environ un milliard d'euros, et sont connues 10 ans à l'avance. Leur quasi-stabilité depuis plusieurs années correspond à une stabilité similaire des octrois de prêts sur la période 1977-1997.

Un montant de 68,3 millions d'euros de recettes est ainsi escompté en 2007, soit une augmentation de 30,8 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2007, mais le compte demeure déficitaire à hauteur de 55,7 millions d'euros .

B. OBJECTIFS ET INDICATEURS

Dans la mesure où ce programme constitue le pendant, hors budget, de l'action 2 « Aide économique et financière bilatérale » du programme 110 précité, il n'est pas apparu possible ni pertinent de distinguer, au niveau des actions de l'AFD, celles menées grâce aux crédits du budget général de celle conduites sur les fonds de la présente section.

Dès lors, ce programme ne présente ni objectif ni indicateur . Sa performance ressortit à la performance globale de l'activité de prêts de l'AFD, retracée dans les deux indicateurs de l'objectif n° 3 « Assurer une gestion efficace et rigoureuse des crédits octroyés à l'aide au développement » du programme 110.

C. JUSTIFICATION DES CRÉDITS AU PREMIER EURO

Après avoir fortement diminué en 2007, le montant des autorisations d'engagement ( AE ) demandé pour 2008, avec 269 millions d'euros , est en hausse de 65 % par rapport au montant ouvert en loi de finances initiale pour 2007 , et vient compléter les 250 millions d'euros d'AE proposés au titre des bonifications d'intérêts inscrites au programme 110, soit un montant global de 519 millions d'euros de ressources octroyées par le MINEFE.

Ce montant tient compte d'une augmentation escomptée de l'activité de l'AFD en 2008, et en particulier de la montée en puissance d'un nouvel instrument , le Prêt très concessionnel contracyclique (PTCC), qui s'inscrit dans la nouvelle doctrine d'intervention de l'AFD 10 ( * ) sur la reprise des prêts aux pays ayant bénéficié de l'initiative PPTE, dans le respect du CSD (cf. supra ) de la communauté des bailleurs.

Le PTCC prévoit un taux de 1 % sur 30 ans, dont 20 annuités « normales », 5 années de différé initial et 5 années de différé dit « flottant » en cas de choc exogène. Les pays susceptibles de bénéficier de cet instrument en 2007-2008 sont le Sénégal, le Burkina Faso, le Cameroun et le Mozambique.

Votre rapporteur spécial estime que le nouveau PTCC est bien conçu et répond à une approche prudente , mais que la faculté de suspension du versement des annuités en cas de détérioration réelle de la solvabilité doit être suffisamment encadrée . Il relève également que le seuil de déclenchement déterminant cette détérioration est fondé sur le seul revenu des exportations, et ne prend donc pas en compte l'évolution des recettes fiscales .

La hausse des engagements sur ce programme depuis deux ans ne devait se traduire substantiellement en APD qu'à partir de 2008 , compte tenu du versement des concours après constatation de la réalisation des prestations, le décaissement étant étalé en moyenne sur cinq ans. Les CP demandés pour 2008 s'élèvent ainsi à 124 millions d'euros , soit une augmentation de 7,6 % par rapport au montant ouvert en loi de finances initiale pour 2007, et correspondent intégralement à des engagements déjà votés.

* 1 Présidé par la DGTPE, ce comité est composé des administrations et organismes suivants : ministère des affaires étrangères ; direction du budget du MINEFE ; ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ; ministère de l'agriculture et de la pêche ; ministère de l'écologie et du développement durable ; ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ; ministère du travail, des affaires sociales et des solidarités ; ministère de la culture et de la communication ; ministère de la défense ; ADETEF ; Natixis; AFD et Coface.

* 2 L'Afghanistan, le Burundi, le Congo, la République démocratique du Congo, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, Haïti, la République centrafricaine et le Tchad.

* 3 Certains pays ayant franchi le point de décision éprouvent des difficultés à atteindre le point d'achèvement en raison de périodes d'interruption des programmes conclus avec le FMI, ou de la finalisation plus longue qu'escomptée des cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté, demandés par la communauté des bailleurs.

* 4 Le Bénin, la Bolivie, le Burkina-Faso, le Cameroun, l'Ethiopie, Guyana, le Ghana, le Honduras,Madagascar, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Mozambique, le Nicaragua, le Niger, le Rwanda, Sao Tome, la Sierra Leone, le Sénégal, la Tanzanie, l'Ouganda et la Zambie.

* 5 Le « gap » de financement pour les PMA et les pays à faible revenu était ainsi estimé par les Nations Unies fin 2005 à 135 milliards de dollars.

* 6 Le CSD repose sur une analyse croisée de la gouvernance des pays concernés, étudiée selon la méthodologie Country policy and institutional assessment (CPIA) de la Banque mondiale, qui évalue selon un ensemble de 16 critères la gouvernance et la politique économique d'un pays, et leurs ratios d'endettement actuels et futurs, selon différents scénarios. Des plafonds d'endettement sont fixés pour chaque niveau de gouvernance. Selon le respect de ces plafonds sur la période étudiée, le CSD permet de classer les pays en trois catégories de risque : fort, moyen, ou faible risque de surendettement. La Banque mondiale module la nature de ses allocations (prêts ou dons) selon les catégories de risque.

* 7 En autres, la Côte d'Ivoire, la RDC et le Togo en 2008.

* 8 C'est-à-dire au ratio de la valeur actuelle de la dette extérieure rapportée au montant des exportations ou des dépenses publiques, ce ratio devant être inférieur à, respectivement, 150 % et 250 %.

* 9 Les données prévisionnelles pour les années 2007 et 2008 sons susceptibles de varier, notamment en fonction du taux de change.

* 10 Présentée lors du conseil d'administration du 24 mai 2007. Cette doctrine prévoit notamment l'éligibilité des seuls pays en risque faible (ou après un délai d'un an en cas de passage à l'orange), une appréciation positive de la situation macro-économique, la mise en oeuvre d'une aide-projet ou aide-programme (voire d'une aide budgétaire globale).