La modification du design initial des réacteurs 900 MWe et la limitation du pourcentage d'assemblages Mox à 30 % du total

La limitation à 12 % de la teneur en plutonium du Mox n'est pas la seule contrainte portant sur le recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau pressurisée. En réalité, l'utilisation du Mox impose des modifications de la conception et des investissements complémentaires sur les REP des tranches CP1-CP2. Ainsi que l'a indiqué Framatome à vos Rapporteurs, ces modifications sont d'ampleur limitée mais incontournables 34( * ) .

Du fait de la présence de plutonium fissile dans le combustible, des neutrons à haute énergie non ralentis provoquent un nombre de fissions plus important que dans le combustible classique. La première conséquence en est que les moyens de contrôle de la réactivité qui agissent principalement sur les neutrons lents sont moins efficaces. Il faut donc les renforcer. Des grappes de contrôle supplémentaires sont donc installées dans ce but sur les réacteurs et les teneurs en bore sont augmentées. Dans le cas particulier des réacteurs 900 MWe, ce sont quatre grappes noires supplémentaires qui ont été rajoutées.

Par ailleurs, les réacteurs " moxés " se caractérisent par une diminution des contre-réactions de vide et l'on peut atteindre avec des quantités moindres, en dehors de la présence d'eau, la criticité. En outre, un nombre plus réduit de neutrons retardés étant émis après une fission, le combustible est plus sensible à des variations rapides de réactivité. Ces phénomènes sont prévenus par des exigences précises sur la maîtrise de certains transitoire et par un renforcement des capacités de refroidissement à long terme. C'est ainsi que, sur les réacteurs 900 MWe, la concentration en bore et les volumes disponibles des réservoirs d'appoint en bore sont augmentés, de même que la concentration du réservoir de stockage de la piscine.

Une fois effectués ces changements mineurs d'équipement et de modes de conduite, le réacteur présente des caractéristiques intéressantes pour l'exploitation, comme une perte de réactivité moindre qu'avec le combustible classique.

Dans tous les cas, la pratique actuelle française est que les assemblages combustibles confectionnés avec du Mox ne représentent que 30 % du total. Par ailleurs, des contraintes de gestion particulières sont assignées au combustible Mox qui ne peut séjourner aussi longtemps en réacteur que le combustible à l'oxyde d'uranium. Un réacteur 900 MWe fonctionnant au combustible standard à l'oxyde d'uranium est rechargé par quart de coeur, avec une longueur de campagne de 12 mois, c'est-à-dire tous les ans. Un réacteur " moxé " continue d'être rechargé par quart de coeur pour le combustible UO2, mais est rechargé par tiers de coeur avec du combustible Mox, la durée de la campagne restant de 12 mois .

Tableau 15 : caractéristiques actuelles d'exploitation du Mox dans les réacteurs 900 MWe 35( * )

caractéristiques

assemblages Mox

assemblages UO2

nombre d'assemblages en % du total

30 %

70 %

teneur en plutonium

5,3 %

-

équivalent enrichissement en U 235

-

3,25 %

épuisement maximal de décharge autorisé

39 000 MWj/t

48 000 MWj/t

nombre de cycles en réacteur

3

4

La montée des taux de combustion des combustibles à l'uranium que l'exploitant appelle de ses voeux pour augmenter la rentabilité, induit une nouvelle contrainte en aval. En effet, le combustible ultérieurement retraité comporte du plutonium de qualité dégradée, ainsi qu'on l'a vu plus haut. En termes techniques, on parle d'une dégradation du vecteur isotopique du plutonium, ce qui veut dire que le plutonium retraité comporte une proportion accrue d'isotopes pairs. En conséquence, il est nécessaire d'augmenter la teneur en plutonium du Mox.

Un dossier en cours d'instruction par les autorités de sûreté depuis 1996 sollicite en conséquence l'augmentation de la teneur en plutonium. Le tableau suivant présente les caractéristiques de la gestion projetée si les autorisations demandées sont accordées.

Tableau 16 : gestion du Mox fabriqué avec du plutonium provenant des combustibles fortement irradiés 36( * )
 

assemblages Mox

assemblages UO2

nombre d'assemblages en % du total

30 %

70 %

teneur en plutonium

7,08 %

-

nombre de cycles en réacteur

3

4

Par ailleurs, la gestion séparée des assemblages Mox - 3 cycles - et des assemblages standards - 4 cycles - complique l'exploitation pour EDF. En conséquence, un projet a été lancé par EDF, intitulé " Parité Mox " , pour s'affranchir de cette contrainte. Le tableau suivant indique quelles pourraient alors être les caractéristiques d'exploitation des réacteurs ainsi moxés.

Tableau 17 : objectifs du projet " Parité Mox " à horizon 2002 37( * )

caractéristiques

assemblages Mox

assemblages UO2

nombre d'assemblages en % du total

30 %

70 %

teneur en plutonium

8,65 %

-

nombre de cycles en réacteur

4

4

L'étude de faisabilité a récemment conclu que la teneur en plutonium du Mox doit être de 8,65 % et que quatre grappes d'arrêt supplémentaires sont nécessaires ainsi qu'une augmentation du réservoir de stockage de la piscine. Compte tenu des rapports de sûreté à élaborer et des modifications à réaliser sur les tranches, cette gestion pourrait être mise en service à la fin de l'année 2002.

Quant aux perspectives d'augmenter le pourcentage d'assemblages de Mox, elles sont peu encourageantes. Framatome écrit 38( * ) : " pour utiliser le Mox à des taux supérieurs à 30 %, des modifications devront être faites, dont la mise en oeuvre sur les tranches existantes sera coûteuse avec des délais d'intervention importants. En tout état de cause, un taux de recyclage supérieur à 40 % n'est pas envisageable sans une refonte complète de ces tranches et une nette remise en cause de leur capacité de suivi du réseau " .