Séance du 10 juin 1998







M. le président. « Art. 5 bis . - Les personnes bénéficiaires du revenu minimum d'insertion prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée ou de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L. 351-10 du code du travail ou de l'allocation de parent isolé prévue à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale peuvent cumuler cette allocation avec les revenus tirés d'une activité professionnelle dans les conditions suivantes.
« I. - L'article L. 351-20 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 351-20 . - Les allocations du présent chapitre peuvent se cumuler avec les revenus tirés d'une activité occasionnelle ou réduite, ainsi qu'avec les prestations de sécurité sociale ou d'aide sociale dans les conditions et limites fixées, pour l'allocation d'assurance prévue au 1° de l'article L. 351-2, par l'accord prévu à l'article L. 351-8, et, pour les allocations de solidarité mentionnées au 2° du même article L. 351-2, par décret en Conseil d'Etat. »
« II. - Il est inséré, avant le dernier alinéa de l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de l'allocation peuvent, selon des modalités fixées par voie réglementaire, être exclues, en tout ou partie, du montant des ressources servant au calcul de l'allocation. »
« III. - 1. Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 9 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée, les mots : "et les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de l'allocation" sont supprimés.
« 2. Il est inséré, après l'article 9 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée, un article 9-1 ainsi rédigé :
« Art. 9-1 . - Les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de l'allocation peuvent, selon des modalités fixées par voie réglementaire, être exclues, en tout ou partie, du montant des ressources servant au calcul de l'allocation. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet article 5 bis du projet de loi constitue, parmi les dispositions qui ont amélioré le texte initial, une avancée significative, engendrée de notre point de vue non seulement par l'expérience de près de dix ans de politique d'insertion, mais aussi par les revendications portées par le mouvement social.
Lors de l'instauration du revenu minimum d'insertion, nous avions déjà eu l'occasion de souligner les limites mêmes du dispositif mis en place. Le caractère différentiel de l'allocation en limitait la portée et posait une question de caractère systémique : le fait de disposer d'autres revenus ou d'autres allocations ne risquait-il pas de décourager tout effort d'insertion des allocataires et de limiter, par conséquent, la nouvelle allocation à n'être qu'un « filet de sécurité » destiné à un public donné ?
Reconnaissons que le RMI nous a permis d'appréhender le développement de la précarité et de la pauvreté dans notre pays, développement d'autant plus profond que le nombre des allocataires n'a cessé de croître, dépassant désormais le million et représentant plus de 30 milliards de francs de dépenses.
Force est toutefois de constater que le développement du RMI est et a été d'autant plus fort que les autres dispositifs existants, destinés à prendre en compte, pour la solidarité nationale, les besoins des plus démunis et des personnes privées d'emploi ont, dans la même période, été progressivement mis en question. Ainsi en est-il, par exemple, des allocations chômage.
La détérioration du niveau de l'emploi dans notre pays a, on le sait, conduit à l'accroissement du nombre des chômeurs, des privés du droit au travail et, par voie de conséquence, conduit à la détérioration des comptes de l'assurance chômage.
On sait quelles dispositions ont été prises pour remédier à ce déséquilibre comptable !
Après un nouveau profilage des allocations, fondé sur une prise en compte de la durée moyenne d'acquisition des droits, après l'intervention directe de l'Etat dans le redressement des comptes de l'UNEDIC, est venu le temps de l'allocation unique dégressive, allocation qui applique aux droits des chômeurs le principe du sablier, c'est-à-dire un épuisement d'autant plus accéléré que se prolongerait la durée d'indemnisation.
La réalité est qu'aujourd'hui la majorité des sans-emploi est privée d'une allocation UNEDIC et est « mécaniquement » placée sous le régime des minima sociaux.
Par ce processus, le RMI est donc devenu comme une sorte d'ultime échappatoire à l'absence totale de ressources issues d'une activité professionnelle.
L'insertion, mission dont on sait qu'elle a été singulièrement dévolue aux collectivités locales, est d'ailleurs passée au second plan. C'est cette problématique d'insertion que porte d'ailleurs l'article 55 bis.
Il porte aussi, soit dit en passant, la marque du mouvement social, notamment de celui qui a rendu aux personnes privées d'emploi, à l'automne dernier, toute leur dignité.
Prenons donc bien en compte cette relative avancée qu'il constitue, même s'il pousse vers l'exercice du pouvoir réglementaire, c'est-à-dire vers la promulgation d'un décret, ce qui aurait pu être la simple modification des lois existantes.
On aurait ainsi pu faire du RMI une allocation personnelle et non plus différentielle, inscrite alors dans la loi pour résoudre une partie des problèmes.
Pour autant, dès lors que l'exercice d'une activité professionnelle, même réduite, ne fait plus obstacle à l'attribution des allocations versées, nous nous devons d'appréhender positivement la mesure.
Nous pouvons, en effet, considérer que le processus de retour à l'emploi ou de formation ainsi enclenché participe, au-delà de toute disposition, d'un parcours individualisé d'insertion, du retour à la dignité et de la personnalisation sociale des allocataires.
Des garanties devront encore être offertes à ces personnes pour éviter, par exemple, de les installer dans une précarité relative ou de les mettre à disposition d'employeurs désireux de jouer la « déflation sociale compétitive ». Mais nous en reparlerons.
Adoptons donc cet article 5 bis !
M. le président. Par amendement n° 23, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose, dans le premier alinéa de l'article 5 bis , après les mots : « du 1er décembre 1988 précitée », d'insérer les mots : « ou de l'allocation d'insertion prévue à l'article L. 351-9 du code du travail ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à combler une lacune dans l'énumération qui figure dans l'alinéa introductif de l'article 5 bis , inséré sur l'initiative de M. Le Garrec pour clarifier le dispositif d'incitation au retour à la vie professionnelle prévu pour les titulaires de minima sociaux.
Il s'agit d'ajouter l'allocation d'insertion, destinée notamment aux détenus sortant de prison, dans la liste des minima pouvant donner lieu à un cumul temporaire avec des revenus d'activité professionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis favorable à cet amendement, et ce d'autant plus que l'article L. 351-20 du code du travail, dans sa rédaction actuelle, comme dans celle qui résultera de l'article 5 bis , vise les bénéficiaires de l'allocation d'insertion. Cela est donc déjà prévu dans le texte par des renvois. Mais peut-être convient-il de l'expliciter plus clairement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 24, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - Dans le premier alinéa de l'article 5 bis , après les mots : « L. 351-10 du code du travail », d'insérer les mots : « ou de l'allocation de veuvage prévue à l'article L. 356-1 du code de la sécurité sociale » ;
B. - En conséquence, dans le même alinéa, de remplacer les mots : « du code de la sécurité sociale », par les mots : « dudit code ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise, c'est une novation, à ajouter le montant de l'allocation de veuvage à la liste des minima sociaux ouvrant droit à l'intéressement au retour à l'activité professionnelle.
Le montant de l'allocation de veuvage s'élève à 3 073 francs la première année, à 2 019 francs la deuxième année et à 1 537 francs la troisième année. Il est important, même si le plafond de ressources au titre de l'allocation est un peu plus élevé que celle-ci, que les personnes concernées puissent compter sur l'intégralité du montant de leur allocation lorsqu'elles reprennent une activité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je comprends tout à fait le souci de la commission. Mais, je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes en train de travailler à une réforme de l'allocation de veuvage pour qu'elle soit à la fois plus favorable et moins complexe pour les intéressées. Je préférerais donc que nous étudions le mécanisme d'intéressement dans le cadre de cette réforme.
Cela dit, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 340, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, au premier alinéa de l'article 5 bis , après les mots : « peuvent cumuler », d'insérer les mots : « durant une période d'au moins un an ».
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. L'article 5 bis , mon ami Guy Fischer l'a souligné, traduit une avancée substantielle pour les personnes disposant de revenus issus de la solidarité nationale, et singulièrement pour les allocataires du RMI.
Le RMI, comme d'ailleurs les autres revenus concernés par les dispositions de l'article, doit effectivement sortir du rôle qu'il a pu remplir dans les faits, celui d'être une étape non d'un parcours d'insertion, mais plutôt d'un parcours d'exclusion.
Le retour à la vie active, qui, au-delà des moyens financiers qu'il permet de dégager, constitue pour les allocataires le retour à leur dignité et leur reconnaissance sociale, doit être facilité par tous les moyens.
La raison d'être ou, en tout cas, la finalité même des revenus visés par l'article, est en fait de disparaître.
Dans un certain sens, nous pourrions même considérer avoir atteint les objectifs fixés par ce projet de loi de lutte contre les exclusions le jour où le revenu minimum d'insertion aura disparu, où nous ne serons plus contraints d'aider les primo-demandeurs d'emploi, au travers de l'allocation d'insertion, à mettre en oeuvre une démarche de recherche d'activité.
Notre amendement tend en fait à inscrire le processus de retour à la vie active sur des bases précises, permettant à chaque allocataire de gérer, au plus près de son propre parcours, sa démarche de retour à l'emploi ou de formation.
Complétant le dispositif que prévoit l'article 5 bis, il dispose en effet que le cumul entre allocation et activité professionnelle réduite, ou formation, soit possible sur une durée au moins égale à un an, délai que chaque allocataire pourra utiliser pour déterminer, notamment avec les travailleurs sociaux qui le suivent, les phases de son propre parcours.
Attendu que le rythme de chaque parcours individuel doit être respecté et pris en compte, nous devons retenir ce principe de cumul minimal d'un an.
On doit, par exemple, apprécier le fait que, dans une démarche de formation, c'est parfois dix-huit ou vingt-quatre mois qui sont nécessaires pour parvenir au terme d'un processus.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La précision que proposent les auteurs de cet amendement, si elle relève du domaine réglementaire, n'en est pas moins intéressante. Un cumul d'un an minimum pour l'intéressement semble correspondre au souhait du Gouvernement annoncé dans le programme du 4 mars.
Dans ces conditions, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis quelque peu ennuyée par cet amendement, d'abord parce qu'il correspond à un engagement du Gouvernement, ensuite parce que des décrets permettront effectivement un cumul pendant une durée d'un an du revenu minimum d'insertion et d'une autre rémunération, mais sous conditions de ressources. En effet, une personne au chômage qui, subitement, retrouvera un emploi payé 40 000 francs par mois ne pourra pas bénéficier du cumul. On ne peut donc pas écrire que tout RMIste pourra cumuler pendant un an.
Par ailleurs, la période fixée est bien d'un an pour la plupart des minima, en commençant à 100 % pendant trois mois, puis selon une dégressivité.
Ce sera le cas pour l'allocation de solidarité spécifique, l'ASS, et pour l'allocation de parent isolé, l'API. Ce sera exactement un an dès lors qu'on reste en dessous des conditions de ressources.
Mais, pour le RMI, cela risque effectivement de dépasser un an puisque c'est une gestion trimestrielle : si le trimestre commence juste avant la fin de la période d'un an, on remplit encore les conditions : on touchera l'allocation jusqu'à la fin du trimestre.
Tout cela pour dire qu'il est extrêmement compliqué de résumer toutes ces situations en une phrase. En effet, l'expression « au moins un an » généralisée à tous les cas est fausse si le bénéficiaire repasse au-dessus du plafond de ressources et vraie pour les allocataires du RMI, mais non de l'ASS et de l'API, pour lesquels ce sera douze mois en tout état de cause.
Je vous confirme de nouveau que les décrets prévoiront le cumul pendant un an de toutes les allocations dès lors que l'intéressé reste en dessous du plafond de ressources, en commençant par trois mois à 100 %, puis de façon dégressive jusqu'au terme de cette période de douze mois.
Nous sommes donc d'accord sur l'objectif. Mais il est un peu compliqué de le traduire en une formule aussi simple, alors qu'il nous faut donner des barèmes.
Madame le sénateur, après ces explications, je vous demande de bien vouloir accepter de retirer cet amendement, dont j'approuve l'esprit et, bien évidemment, l'objectif.
M. le président. Madame Terrade, l'amendement n° 340 est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen a entendu les explications de Mme le ministre : il retire son amendement.
M. le président. L'amendement n° 340 est retiré.
Par amendement n° 25, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose, après les mots : « activité professionnelle » de rédiger comme suit la fin du premier alinéa de l'article 5 bis : « salariée ou indépendante dans les conditions prévues aux I à III. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement a pour objet de garantir que les circulaires administratives qui mettront en oeuvre les dispositifs d'intéressement prendront équitablement en compte la situation des créateurs d'entreprise ou des personnes qui choisissent d'exercer une activité indépendante. Au cours de leur première année d'activité, celles-ci ont plus particulièrement besoin de la sécurité que peut offrir le maintien temporaire du minimum social auquel elles avaient droit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis favorable à cet amendement, sous réserve que le mot « indépendante » soit remplacé par l'expression « non salariée ». Cela permettrait de prendre en compte des personnes qui sont en formation professionnelle et qui ne sont pas couvertes par le terme « indépendante ».
M. le président. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier l'amendement ainsi que vous le suggère Mme le ministre ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, et tendant, après les mots : « activité professionnelle », à rédiger comme suit la fin du premier alinéa de l'article 5 bis : « salariée ou non salariée dans les conditions prévues aux I à III. »
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25 rectifié.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cette intervention se situe dans la ligne de mes interventions précédentes sur les CES.
Je ne comprends toujours pas les raisons pour lesquelles nous voulons limiter strictement dans le temps cette possibilité de cumul du RMI et des revenus d'une activité salariée.
Lors de la discussion du projet de loi sur les emplois-jeunes, le Gouvernement a lui-même souhaité jouer sur la durée pour donner aux jeunes le maximum de chances d'entrer dans la vie active.
Nous avons affaire ici à des personnes particulièrement défavorisées, qui sont dans une situation difficile, et on limite dans le temps la possibilité de cumul, diminuant d'autant leurs chances d'intégration ! Je ne comprends pas cette obstination à vouloir limiter le cumul dans le temps ! Il conviendrait d'y réfléchir.
J'espère que, au moment où le bilan sera fait, on pourra revoir les dispositions législatives actuelles pour aller beaucoup plus loin.
De surcroît, et je termine par ce point, le dispositif tel qu'il est imaginé aujourd'hui, est beaucoup moins coûteux pour la collectivité nationale que ne le sont les emplois-jeunes.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 26, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose de compléter in fine l'article 5 bis par deux paragraphes ainsi rédigés :
« IV. - Les personnes admises au bénéfice des dispositions de l'article L. 351-24 du code du travail et qui perçoivent l'allocation de revenu minimum d'insertion, l'allocation de parent isolé, l'allocation d'insertion ou l'allocation de veuvage ont droit au maintien du versement de leur allocation dans des conditions prévues par décret.
« V. - Les organisations syndicales représentatives de salariés et les organisations représentatives d'employeurs signataires de l'accord prévu à l'article L. 351-8 du code du travail sont invitées à négocier, d'ici le 31 décembre 1999, l'amélioration des conditions dans lesquelles les bénéficiaires de l'allocation d'assurance prévue au 1° de l'article L. 351 peuvent cumuler cette allocation avec les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation ou avec les revenus tirés de la création ou de la reprise d'une entreprise lorsqu'ils bénéficient des dispositions de l'article L. 351-24 du code du travail. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement comprend deux paragraphes.
Le premier prévoit que, s'agissant de la prime aux créateurs d'entreprise prévue à l'article L. 351-24 du code du travail, le montant de celle-ci n'est pas pris en compte pour le calcul du revenu ouvrant droit au RMI, à l'allocation de parent isolé ou à l'allocation de veuvage.
Le second paragraphe invite les partenaires sociaux au sein de l'UNEDIC à ouvrir une négociation pour harmoniser les règles de versement de l'allocation unique dégressive en cas de reprise d'une activité professionnelle sur les règles mises en oeuvre pour les minima sociaux relevant de l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le paragraphe IV proposé par la commission pose quelques difficultés dans un certain nombre de cas : par exemple, pour l'ASS ou pour l'allocation de parent isolé, il est déjà possible de bénéficier d'une aide à la création d'activité et d'un cumul, en cas de reprise d'activité, en règle générale d'une durée de six mois.
En revanche, en ce qui concerne le RMI, son mode de calcul, lorsqu'on crée une activité, est tel que l'on s'adapte à la déclaration annuelle réalisée sur les revenus d'activité. Cela signifie en fait que le cumul a lieu en règle générale pendant un an.
En conséquence, le texte proposé entraînerait pour les RMistes une situation plus défavorable que celle qu'il connaissent aujourd'hui. Dans ces conditions, je ne crois pas souhaitable d'insérer dans le texte ce paragraphe IV.
S'agissant du paragraphe V, je partage complètement votre point de vue, monsieur le rapporteur, à savoir que les partenaires sociaux doivent mettre en place le cumul d'un revenu de remplacement et d'un revenu tiré d'une activité professionnelle, comme nous allons le faire dans cette loi pour l'ensemble des minima sociaux.
J'ai d'ailleurs écrit à la présidente de l'UNEDIC pour lui demander de bien vouloir travailler sur ce thème et d'essayer de trouver des règles conformes à celles que nous mettons en place pour les minima sociaux.
Je ne suis pas sûre qu'il soit souhaitable, dans une loi, d'adresser une injonction aux partenaires sociaux, même si, je le répète, je partage totalement l'objectif fixé par le paragraphe V proposé par la commission.
En conséquence, je ne suis pas favorable à l'amen-dement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Bien sûr, je voterai l'amendement n° 26. Mais je voudrais saisir cette occasion pour évoquer un amendement de M. Neuwirth qui n'a pas été soutenu et qui était relatif au cumul des revenus professionnels avec l'allocation aux adultes handicapés.
Je veux, en effet, attirer l'attention de Mme la ministre sur un problème qu'il est urgent de résoudre : du fait des progrès de la trithérapie, de plus en plus de malades atteints du sida qui perçoivent l'allocation aux adultes handicapés peuvent travailler et être réinsérés peu à peu.
Madame la ministre, vous devriez étudier dès maintenant la possibilité de permettre aux sidéens de se réinsérer par le travail et, peut-être, de cumuler un salaire et une allocation. On ne sait jamais si leur état est stabilisé. On peut donc admettre qu'ils n'abandonnent pas cette planche de sécurité. En revanche, il faudrait inciter ces hommes et ces femmes à travailler dans des conditions normales, plutôt que, comme c'est souvent le cas, « au noir ».
Mme Joëlle Dusseau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Je comprends le souci qui anime M. le rapporteur ; je serai néanmoins amenée à voter contre l'amendement qu'il vient de défendre.
S'agissant du paragraphe IV, nous devons écouter avec attention les arguments de Mme la ministre, à qui je fais totalement confiance sur le plan technique, comme nous tous sûrement. Si ce paragraphe réduit les avantages des bénéficiaires du RMI, on ne peut pas l'adopter, ce serait contraire à l'esprit qui nous anime.
En ce qui concerne le paragraphe V, il serait effectivement souhaitable de pousser les partenaires sociaux à trouver une solution. Mais, mes chers collègues, j'attire votre attention sur la difficulté d'atteindre cet objectif avec un tel libellé, qui montre à quel point l'auteur de l'amendement est circonspect.
« Les organisations syndicales... sont invitées » - on utilise dans un texte de loi le verbe « inviter » ! - « à négocier l'amélioration des conditions dans lesquelles les bénéficiaires... peuvent cumuler... » Vous voyez combien le texte est flou. Il l'est parce que ses auteurs sentent bien à quel point, si j'ose dire, ils marchent sur des oeufs.
Alors, s'il vous plaît, ne cassons pas les oeufs ! Conservons le principe, mais n'introduisons pas cet élément dans le texte, et encore moins dans une rédaction floue.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je prends la parole pour souligner que cet amendement n° 26 me convient tout à fait, même s'il est peut-être possible d'en améliorer la rédaction.
De ce point de vue, Mme Dusseau a fait une remarque judicieuse en disant que nous ne sommes pas suffisamment directifs pour que cet amendement produise des effets sur le terrain.
Je reviens à ce propos à une idée qui avait été approuvée par la Haute Assemblée : la possibilité donnée aux partenaires sociaux d'autoriser ceux qui bénéficient d'indemnités versées par les ASSEDIC de cumuler celles-ci avec un revenu salarié.
A l'heure actuelle, de nombreux chômeurs renoncent à exercer une activité professionnelle parce que le montant de l'indemnité de chômage est nettement supérieur au revenu qu'ils obtiendraient en travaillant. Il faut permettre à ces personnes de retrouver le chemin de la vie active et donner la possibilité à un chômeur qui perçoit par exemple 7 000 ou 8 000 francs par mois d'indemnités de chômage d'exercer un emploi dont la rémunération mensuelle est voisine de 3 000 francs.
Aujourd'hui, cette personne préfère rester chez elle, éventuellement travailler « au noir », et conserver son allocation plutôt que d'exercer une activité professionnelle qui ne lui rapportera que 3 000 francs.
Que cette personne perçoive une indemnité différentielle de 5 000 francs pour conserver un revenu global correspondant à l'indemnité des ASSEDIC, c'est l'idée que, je pense - mais je me trompe peut-être - M. le rapporteur veut promouvoir en invitant les organisations syndicales et les partenaires sociaux à se réunir pour mettre en place un tel dispositif.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Concernant le paragraphe IV de l'amendement n° 26, il est bon en effet que les allocataires de minima sociaux puissent conserver leur allocation lorsqu'il créent leur propre entreprise, à l'instar des salariés rémunérés au SMIC.
Avec le paragraphe V, il s'agit d'inviter les partenaires sociaux à négocier. Compte tenu du fait qu'en définitive le texte n'est qu'une invitation, nous le voterions s'il y avait un vote par division.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je dois dire que j'ai été très sensible aux propos de M. Chérioux.
Une réponse immédiate est déjà fournie dans la loi, réponse qui, si elle n'est pas suffisante, a le mérite d'exister : les droits à l'allocation aux adultes handicapés sont ouverts pour une période qui va du 1er juillet au 30 juin de l'année suivante sur les revenus de l'année passée. Cela signifie que si une personne trouve un travail un mois après - comme c'est d'ailleurs le cas pour le RMI, comme je l'ai évoqué tout à l'heure - elle continue à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés.
Voilà qui répond en partie - en partie seulement, je le reconnais - à votre question, monsieur le sénateur.
Cela dit, je suis sensible à vos remarques et je pense que ce sujet mérite effectivement réflexion.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Dans le paragraphe IV, j'ai effectivement pris la précaution de prévoir que la comptabilité des allocations se ferait dans des conditions prévues par décret.
J'ai bien conscience qu'il s'agit peut-être d'un travail techniquement très compliqué. C'est pourquoi la mesure n'est pas d'application stricte, immédiate.
Avec le paragraphe V, la commission met l'accent sur un problème, puisque l'allocation unique dégressive, l'AUD, en cas de cumul, est moins intéressante, notamment pour les personnes relevant d'autres minima sociaux.
Le Parlement peut tout à fait indiquer qu'il a remarqué une anomalie et inviter avec courtoisie les partenaires sociaux à négocier. Ce n'est pas, à mes yeux, sortir de notre rôle que de procéder ainsi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Pour faire droit aux nuances qui se sont exprimées sur l'un et l'autre paragraphes de l'amendement n° 26, je vais faire procéder à un vote par division.
Je mets aux voix le paragraphe IV, repoussé par le Gouvernement.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le paragraphe V, repoussé par le Gouvernement.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5 bis, modifié.

(L'article 5 bis est adopté.)

Articles additionnels après l'article 5 bis