Séance du 17 juin 1998







M. le président. Par amendement n° 9 rectifié, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 41-3 du code de procédure pénale, de remplacer les mots : « compensation judiciaire », par les mots : « composition pénale ».
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, cet amendement doit être réservé, comme l'amendement n° 1, parce qu'il porte sur une expression qui figure dans l'intitulé du chapitre.
M. le président. Le Sénat a déjà adopté deux amendements comportant cette expression !
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le rapporteur va s'expliquer et, pour une fois, je serai d'accord avec lui !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. L'amendement n° 1, qui portait sur l'intitulé du chapitre Ier et qui, le premier, comportait le terme de « composition », a été réservé.
Ensuite, ont été examinés des amendements de la commission qui, dans notre logique, retenaient la dénomination qu'elle suggérait. M. Pagès ou M. Dreyfus-Schmidt m'ont fait remarquer que, s'il était entendu que l'on votait ces amendements, ce vote ne préjugeait pas ce que l'on déciderait concernant la dénomination.
Il est vrai que, formellement, nous avons voté une rédaction comportant une dénomination. Mais c'est vrai aussi que nous avons passé en gentleman agreement qui doit être respecté !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Une transaction !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Vous qui aimez les Anglo-Saxons, cette expression devrait vous faire plaisir !
Nous avons admis, ce faisant, que la question de la dénomination restait en suspens.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. C'est donc le moment ou jamais de trancher cette question avec cet amendement !
Nous nous sommes déjà expliqués sur la composition à l'occasion de l'examen de l'amendement n° 3. C'est la même idée.
Le projet comporte le terme de « compensation ». D'une manière générale, on peut dire qu'une faute commise est « compensée » par des actes de réparation. Mais une telle formulation me paraît un peu éloignée de la procédure que nous voulons élaborer.
Le terme « composer » est plus approprié. Ne dit-on pas dans la vie qu'il faut savoir composer ? En fait, c'est un terme qui est utilisé dans la langue française et que tout le monde comprend ou à peu près. Le principe est d'ailleurs de proposer une mesure qui sera acceptée par une deuxième personne, et même par une troisième, la victime. Nous sommes donc bien en présence de personnes qui « composent ».
Mais encore faut-il préciser qu'il ne s'agit pas d'une composition à l'occasion d'un examen ou d'une composition musicale. Aussi est-il bon d'ajouter le qualificatif « pénale » afin que l'on sache bien que nous sommes dans le domaine du droit pénal.
Cette formule est d'un meilleur français et traduit bien le contenu de la procédure. Or nous devons précisément chercher les formules qui permettent, à la seule lecture, de comprendre de quoi il est question.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que vous avez voté les amendements n°s 3 et 7, qui portaient sur le même sujet !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'amendement n° 1 tendait à remplacer dans l'intitulé les mots « compensation judiciaire » par ceux de « composition pénale ». Vous avez vous-même, monsieur le président, proposé que cet amendement soit réservé.
Lorsque nous avons ensuite examiné l'amendement n° 3 de la commission, qui tend également à la même substitution, j'ai fait observer qu'on allait trancher la question qui était en suspens du fait de la réserve.
M. le rapporteur a bien voulu me dire, avec l'approbation générale,...
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je le confirme !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous en remercie !
... que cela ne préjugeait en rien le choix qui serait retenu. En effet, si l'on conservait par la suite l'appellation figurant dans le projet, il suffirait de modifier en ce sens tous les amendements examinés précédemment.
Tel est le contrat de confiance, en quelque sorte, qui a été passé entre les uns et les autres, en particulier entre la majorité et l'opposition. Mais ne nous opposez pas maintenant la lettre qui tue alors que seul l'esprit vivifie, monsieur le président ! (Exclamations.) M. le président. Je n'ai rien interdit ! J'ai simplement tenu à préciser que les amendements n°s 3 et 7 avaient été adoptés !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bien évidemment, M. le rapporteur n'en tire pas la conséquence, à savoir une rectification qui prendrait deux minutes ! Il suffirait en effet de dire que les mots « composition pénale » seront remplacés, dans le texte, par les mots : « compensation judiciaire ».
Nous n'allons pas, encore une fois, nous arrêter à des questions de forme ou de lettres alors que nous sommes tous d'accord, dans cet hémicycle, pour dire que nous n'avons pas encore décidé de l'appellation à donner à cette procédure.
A cet égard, j'étais donc tout à fait d'accord avec l'ensemble de nos collègues, en particulier M. le rapporteur de la commission. Mais maintenant, sur le fond de la question, je ne le suis plus, et je suis navré d'avoir l'air de compliquer les choses...
N'ajoutez pas un argument à ceux du rapporteur en disant à nos collègues que, s'ils ne suivent pas la commission sur l'appellation, ils s'exposent à une seconde lecture ! Ce ne serait pas bien. Il est évident que nous avons tous la possibilité de choisir librement cette appellation.
Je ferai une autre observation.
A la demande du Sénat, nous avons jadis, naguère ou hier, été saisis d'un texte qui visait à proposer une transaction pénale.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est vrai !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La commission des lois a proposé et obtenu de remplacer ces termes par ceux de « composition pénale ».
Dans l'histoire du droit, dans l'histoire tout court, pour tous les étudiants de France et de Navarre, la composition pénale, c'est ce qui a été annulé par le Conseil constitutionnel.
Nous sommes en train de mettre en place une procédure nouvelle dans laquelle « Dieu merci, il y a un contrôle ». Il est donc normal de ne pas lui donner le même nom. On pourrait l'appeler « transaction » pénale. C'est une transaction que je vous propose parce que je suis de bonne composition (Sourires) et qui revient à reprendre les termes suggérés par M. Toubon !
M. Jean-Jacques Hyest. Ah !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il ne s'agit pas, en effet, de la composition pénale. De plus, ces termes risquent de semer la confusion entre ce qui a été annulé par le Conseil constitutionnel et la procédure qui nous est aujourd'hui proposée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié.
M. Robert Pagès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Le projet de loi fait état de « compensation judiciaire ». Si l'on anticipe sur les poursuites pénales par le biais de la compensation judiciaire, c'est bien pour éviter le recours au pénal.
Mais parler de composition pénale induit, de fait, la mise en oeuvre d'une procédure pénale, ce qui est, je crois, contraire à l'esprit même du texte. C'est pourquoi, je suis opposé à l'amendement n° 9 rectifié de notre texte.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Monsieur Pagès, nous sommes dans le domaine pénal, où il y a des peines. L'amendement de composition est une peine ; la réparation est une peine. Nous ne sortons pas du domaine pénal !
Nous proposons simplement une alternative à la poursuite pénale classique. Il y aura maintenant plusieurs façons de poursuivre. On pourra le faire par la voie classique ou par cette voie-là. Mais il s'agit toujours du domaine pénal. Il est donc normal de garder ce qualificatif afin que l'on sache bien de quoi on parle.
Enfin, il est d'autant plus important de préciser que le terme « composition » comme je le disais tout à l'heure, peut avoir plusieurs sens. Il faut que l'on sache de quelle composition, il s'agit et que nous sommes dans le domaine pénal. Nous n'en sortons pas, il n'y a aucun doute !
S'agissant de l'argument de notre amis Dreyfus-Schmidt, je vous confesse que, véritablement, je ne le comprends pas.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Comme d'habitude !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Non, vous n'êtes pas toujours incompréhensible, cher ami, n'exagérons rien ! Vous l'êtes quelquefois, mais pas toujours et pas systématiquement, du moins je l'espère.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous, vous êtes toujours modeste !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Vous avez tort parce que vous faites une erreur de mémoire.
De plus, et c'est ce qui est peut-être plus grave, vous faites une erreur sur le sens qu'il faut donner au terme à employer, et cela touche plus profondément à la question en un sens.
De toute façon, il me suffirait de dire que vous faites une erreur de fait.
En effet, ce qui a été annulé par le Conseil constitutionnel, dans sa plus grande sagesse, ce n'est pas du tout la composition pénale, c'est l'injonction pénale.
M. Jean-Jacques Hyest. Oui !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Et, ce qui a été finalement voté, c'est l'injonction pénale.
C'est donc sous ce « chapeau » que notre texte a été soumis au Conseil constitutionnel.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je me rends !
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Vous renoncez, monsieur Dreyfus-Schmidt, et je crois que vous ne voulez même pas entendre le second point de ma démonstration, pourtant le plus intéressant !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je me suis rendu aux explications de M. le rapporteur, mais s'il ne m'avait pas dit en commission que le terme retenu en définitive par le Parlement la dernière fois était celui de « composition pénale », je ne me serais peut-être pas trompé comme je viens de le faire ! Mais le Sénat me pardonnera...
M. le président. Vous êtes tout pardonné, monsieur Dreyfus-Schmidt.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 53, MM. Pagès et Duffour, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 41-3 à insérer dans le code de procédure pénale.
Par amendement n° 10, M. Fauchon, au nom de la commision, propose, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 41-3, de remplacer les mots : « indemnité compensatrice » par les mots : « amende de composition ».
La parole est à M. Pagès, pour défendre l'amendement n° 53.
M. Robert Pagès. Il tombe !
M. le président. L'amendement n° 53 n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 41-3 du code de procédure pénale.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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