Séance du 30 juin 1998







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Lanier, pour explication de vote.
M. Lucien Lanier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma participation à la récente mission du Sénat en Nouvelle-Calédonie m'a permis de constater sur place les faits tels qu'ils sont.
Les accords de Matignon ont rétabli pendant dix ans sur le territoire un calme nécessaire. Ils ont permis à des communautés diverses de se concerter et de s'entretenir, non plus d'agitations passionnelles et partisanes, mais de l'avenir autant économique que politique ou administratif du territoire.
Or l'accord de Nouméa conclut avec sagesse que cette concertation de communautés diverses doit se poursuivre sans qu'intervienne une décision, actuellement possible mais éventuellement brutale, qui couperait net une évolution au cours aujourd'hui satisfaisant.
L'accord de Nouméa est le fait d'hommes aux origines différentes qui ont tous l'amour de leur territoire. Sommes-nous plus savants qu'eux ? Possédons-nous une vérité meilleure que la leur, alors que nous l'aurions conçue à 20 000 kilomètres du territoire ?
L'accord cherche à apaiser des racismes latents, voire à y mettre fin, à équilibrer un avenir économique possible, sans lequel il n'y aura aucun avenir politique pour la Nouvelle-Calédonie dans l'immensité du Pacifique, à concilier un droit coutumier et un droit écrit, ce qui demande du calme et du temps, à concilier aussi la diversité des communautés, à sublimer le passé et à préparer l'avenir, mais surtout à faire s'épanouir avec pragmatisme l'harmonie de la paix française dans la paix calédonienne.
C'est la raison pour laquelle je voterai la réforme constitutionnelle. (Applaudissements sur certaines travées du RPR, ainsi que sur les travées de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Tui.
M. Basile Tui. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après avoir voté les trois articles de ce projet de loi constitutionnelle, je voterai, bien sûr, également l'ensemble de ce texte. Cependant, je souhaiterais revenir sur trois points.
Tout d'abord, la motivation essentielle de mon vote favorable réside dans le fait que ce projet de loi représente à mes yeux à la fois la conciliation d'opinions diverses, parfois opposées, la construction d'une Calédonie dans la paix, l'élaboration d'un grand projet politique pour ce territoire et ses différentes communautés ainsi que la prise en compte, dans l'article 2, des populations vivant depuis de nombreuses années en Nouvelle-Calédonie.
Ce dernier élément concerne environ 17 000 Wallisiens et Futuniens, désormais rassurés sur le sort qui leur est réservé.
Toutefois, et c'est ma deuxième remarque, une interrogation demeure s'agissant de ceux qui se sont récemment installés dans ce territoire voisin ou des candidats au départ, pour qui cette émigration est une question de survie.
Car il ne faut pas oublier, d'une part, que les îles Wallis-et-Futuna n'offrent pas de possibilité d'acquérir une véritable formation professionnelle et que, d'autre part, dans ces îles, seule une personne active sur huit parvient à trouver un emploi.
Je formule donc ici l'espoir de toute une population : celui de ne pas se voir refuser la possibilité de tenter sa chance - souvent sa seule chance - en Nouvelle-Calédonie.
C'est pourquoi je souhaite vivement que le futur accord destiné à régir les relations entre nos territoires bénéficie en priorité aux différentes populations franco-océaniennes du Pacifique.
Enfin, je veux dire toute ma confiance dans la sagesse des futurs cosignataires qui représenteront les territoires concernés et du Gouvernement français. Je sais qu'ils sauront prendre en compte les préoccupations de chacun, notamment celles des personnes qui n'entrent pas dans le champ de l'article 2, et je les en remercie infiniment. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à saluer le travail de tous ceux qui ont permis, de près ou de loin, de parvenir à l'accord intervenu à Nouméa le 5 mai dernier.
La recherche d'une solution consensuelle pour l'avenir de ce territoire d'outre-mer a, bien entendu, constitué la meilleure voie possible pour maintenir la paix et préparer un futur plein d'espoir pour la population de Nouvelle-Calédonie. J'en atteste en tant que rapporteur spécial du budget des départements et territoires d'outre-mer.
Cette entente sur l'évolution et le destin du territoire procure un véritable soulagement pour tous, même si certaines interrogations sérieuses demeurent. Notre excellent rapporteur, M. Jean-Marie Girault, les ayant évoquées ce matin, je n'y reviendrai donc pas.
Les échéances, à savoir la consultation référendaire des habitants de Nouvelle-Calédonie qui doit intervenir avant le 31 décembre 1998, imposent que les discussions et l'adoption des textes relatifs à ce territoire s'effectuent rapidement.
C'est pourquoi il serait plus qu'opportun que le projet de loi organique qui précisera les orientations de l'accord de Nouméa soit présenté au Parlement dans les meilleurs délais, afin que l'évolution institutionnelle se produise dans de bons termes.
En dépit du soutien que la majorité des sénateurs du groupe des Républicains et Indépendants apportera aujourd'hui à ce texte et lors du Congrès à Versailles, je me dois d'exprimer une certaine réserve sur la déclaration de repentance formulée dans le préambule de l'accord signé à Nouméa.
Enfin, je tiens à rendre hommage au remarquable travail accompli par le rapporteur, M. Jean-Marie Girault, et le président de la commission des lois, M. Jacques Larché, qui ont recherché en amont, avec l'Assemblée nationale, un texte consensuel, sur ce sujet si important.
Ils y sont parvenus, ce qui est le gage de la volonté de tous les acteurs de permettre à la Nouvelle-Calédonie de se construire un destin sûr et serein, dans le respect mutuel des différentes cultures.
Ainsi, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est un message d'espérance, de tolérance et d'avenir que nous adressons aujourd'hui aux Calédoniens. J'espère personnellement que ce processus conduira, au-delà de la période de quinze à vingt ans, au maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République française. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. René Monory remplace M. Jean Faure au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Le Sénat va procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.
En application de l'article 60 bis , alinéa 1, du règlement, la conférence des présidents a décidé qu'il serait organisé un scrutin public à la tribune, dans les conditions fixées par l'article 56 bis du règlement.
Il va donc être procédé au scrutin public à la tribune.
Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal.

(Le sort désigne la lettre F.)
M. le président. Le scrutin sera clos quelques instants après la fin de l'appel nominal.
Le scrutin est ouvert.
Huissiers, veuillez commencer l'appel nominal.

(L'appel nominal a lieu.)
M. le président. Le premier appel nominal est terminé. Il va être procédé à un nouveau appel nominal.

(Le nouvel appel nominal a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
J'invite MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 113:

Nombre de votants 308
Nombre de suffrages exprimés 297
Majorité absolue des suffrages 149
Pour l'adoption 287
Contre 10

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

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