SEANCE DU 30 MAI 2001


DIVERSES DISPOSITIONS
D'ORDRE SOCIAL, ÉDUCATIF ET CULTUREL

Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 322, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.
Rapport n° 339 (2000-2001) et avis n° 335 (2000-2001).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du Gouvernement porte sur un certain nombre de dispositions dont la mise en oeuvre requérait une certaine urgence et dont la spécificité appelait le regroupement dans un tel texte. Mon intervention portera sur l'ensemble des dispositions de ce projet de loi, tandis que mes collègues auront l'occasion d'intervenir eux-mêmes plus tard dans la discussion générale, puis dans la discussion des articles.
Le titre Ier du projet de loi porte sur l'indemnisation du chômage et sur les mesures d'aide au retour à l'emploi.
Au terme d'une longue négociation, les partenaires sociaux ont conclu le 19 octobre 2000 une nouvelle convention relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage.
Depuis cette date, il est important de le rappeler, une réforme des statuts de l'UNEDIC a été adoptée, à laquelle ont adhéré l'ensemble des organisations syndicales représentatives, garantissant ainsi la gestion véritablement paritaire du nouveau régime d'assurance chômage. Je m'en réjouis, car cela témoigne d'un apaisement des tensions auxquelles avait donné lieu la négociation de la nouvelle convention.
L'Etat, vous le savez, a pris lui-même une part active à ce difficile processus de négociation en manifestant son attachement à la prise en compte de quatre objectifs : premièrement, l'amélioration de l'indemnisation des chômeurs ; deuxièmement, le développement de l'aide personnalisée pour le retour à l'emploi, dans des conditions respectueuses des droits et obligations fixés par le code du travail, sans que cela conditionne autrement le droit à l'indemnisation ; troisièmement, la baisse mesurée et progressive des cotisations, garantissant l'équilibre à moyen terme du régime d'assurance chômage ; enfin, quatrièmement, la clarification des relations financières entre l'UNEDIC et l'Etat.
Dans la mesure où la convention, dans son état final du 19 octobre 2000, ne contrevenait plus au code du travail et prenait en compte les principes que je viens de rappeler, elle a été agréée par arrêté du 4 décembre 2000 et publiée au Journal officiel du 6 décembre 2000.
Cette décision est donc intervenue au terme d'une longue procédure et d'une modification très substantielle du contenu des règles d'assurance chômage.
Je rappelle, en particulier, qu'entre les conventions antérieures non agréées - celles des 29 juin et 23 septembre 2000 - et la convention qui a été agréée, un certain nombre de faits sont intervenus.
Tout d'abord, la signature du plan d'aide au retour à l'emploi, le PARE, qui était conçue comme la souscription d'un contrat d'adhésion et une condition de droit à l'indemnisation, est devenue une formalité sans conséquence sur le versement des allocations.
Ensuite, la baisse des cotisations, d'abord fixée à 71,4 milliards de francs sur trois ans, puis à 56,2 milliards de francs, a finalement été ramenée à 28,4 milliards de francs, les autres baisses éventuelles n'intervenant que si la situation le permet.
Enfin, toute prétention de contrôle et de sanction de l'obligation de recherche d'emploi par l'UNEDIC a été abandonnée, seul le service public de l'emploi restant habilité à y procéder.
Ce rappel étant fait, je crois nécessaire de réitérer l'analyse des apports positifs de la nouvelle convention qui ont été à la base de la décision d'agrément.
Cette convention améliore tout d'abord significativement l'indemnisation des demandeurs d'emploi, avec la suppression de la dégressivité des allocations. Les fins de contrat précaire sont mieux prises en compte puisque les demandeurs d'emploi sont indemnisés dès lors qu'ils ont travaillé quatre mois au cours des dix-huit derniers mois, au lieu des huit derniers mois auparavant. Au total, près de 200 000 personnes supplémentaires pourront être indemnisées par le régime d'assurance chômage.
Par ailleurs, l'accompagnement personnalisé des demandeurs d'emploi est renforcé, comme le Gouvernement en a manifesté le souhait. Les programmes « nouveau départ » mis en oeuvre par l'ANPE pour les chômeurs les plus en difficulté ou les programmes TRACE pour les jeunes ont fortement contribué à ce que la baisse du chômage profite à tous.
La nouvelle convention élargit le bénéfice de cet accompagnement personnalisé vers l'emploi, grâce à des moyens supplémentaires apportés par le régime d'assurance chômage. Le PARE informe le demandeur d'emploi de ses droits et obligations et le PAP, le projet d'action personnalisé, récapitule les actions convenues avec l'ANPE. Les conditions pour percevoir les allocations d'assurance chômage restent, dans ce cadre, celles qui sont prévues par le code du travail. Le refus du demandeur d'emploi de signer ces documents ne constitue donc pas un motif de refus ou de suppression des allocations de chômage. Elles comprennent naturellement l'obligation de mener une recherche active d'emploi, déjà prévue par la loi. La mise en oeuvre de l'accompagnement des chômeurs, le contrôle de la recherche d'emploi et les sanctions éventuelles restent du ressort exclusif du service public de l'emploi.
Sur trois ans, les mesures en faveur des chômeurs - indemnisation et aide personnalisée - représenteront environ 45 milliards de francs. La convention du 19 octobre, contrairement aux textes antérieurs, qui n'avaient pas été agréés, réserve explicitement 15 milliards de francs pour la mise en oeuvre de l'accompagnement personnalisé.
La baisse des cotisations sera mesurée et progressive. La première baisse, en 2001, représentera 28 milliards de francs. Les baisses envisagées pour 2002 n'interviendront que sous la condition de l'équilibre financier du régime. La diminution des cotisations profitera aux entreprises comme aux salariés.
Depuis la publication de l'arrêté d'agrément, nous avons activement travaillé à la préparation des conventions de partenariat entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC, qui doivent mettre en place les projets d'action personnalisés, en précisant les modalités d'accompagnement du retour des chômeurs à l'emploi ainsi que les relations opérationnelles et financières entre les acteurs.
Le service public de l'emploi sera seul responsable de l'accompagnement de l'ensemble des personnes privées d'emploi, quels que soient leur statut et les modalités de leur indemnisation. En posant cette exigence, l'Etat veille à ce que le traitement de tous les demandeurs d'emploi soit égalitaire et il conforte le rôle pivot dévolu au service public de l'emploi, qui est le principal garant de l'impartialité et de la non-discrimination des services offerts à l'ensemble des demandeurs d'emploi.
Les moyens de l'ANPE seront, pour ce faire, renforcés au-delà des dispositions prévues dans le contrat de progrès triennal 2000-2002. La ministre de l'emploi et de la solidarité a d'ailleurs déjà autorisé l'UNEDIC à financer 1 000 emplois nouveaux pour que l'ANPE soit en mesure, dès le 1er juillet prochain, de répondre à ces nouveaux enjeux.
Un deuxième programme de lutte contre les exclusions est en préparation, qui comportera des mesures encore plus actives en faveur des chômeurs les plus éloignés de l'emploi, en particulier les bénéficiaires du RMI, dont la possibilité de cumul entre l'allocation et les revenus d'activités sera étendue, et les jeunes : un programme TRACE renforcé permettra à 160 000 d'entre eux, contre 60 000 aujourd'hui, de bénéficier d'un accompagnement dans un itinéraire d'insertion professionnelle.
Ce rappel des étapes récentes de la reconfiguration de notre politique de lutte contre le chômage et en faveur du retour à l'emploi était nécessaire pour situer le cadre dans lequel s'inscrit le titre Ier du projet de loi qui vous est soumis et lui donner tout son sens.
Le titre Ier vise à donner une base législative au financement par l'UNEDIC des dispositifs d'aide au retour à l'emploi. Jusqu'ici, en effet, l'UNEDIC n'est habilitée, selon le code du travail, qu'à financer les allocations de chômage des demandeurs d'emploi relevant du régime d'assurance chômage.
L'article 1er décrit ainsi l'ensemble des mesures d'aide au retour à l'emploi prévues par la convention relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage du 1er janvier 2001, à l'exception du financement des contrats de qualification adulte, qui fait l'objet de l'article 2.
Ces mesures sont les suivantes : une aide à la mobilité des demandeurs d'emploi qui reprennent un emploi ; une aide dégressive à l'employeur qui embauche un demandeur d'emploi indemnisé par le régime d'assurance chômage depuis plus de douze mois ; une aide à la formation des demandeurs d'emploi qui suivent une formation ; le financement d'actions d'évaluation des compétences professionnelles et le financement des actions d'accompagnement ou de reclassement au profit des demandeurs d'emploi.
Toutes ces mesures sont destinées à favoriser le retour rapide des chômeurs vers l'emploi. En conséquence, elles devraient permettre de réduire les durées moyennes des périodes de chômage, et donc accentuer la forte baisse du chômage engagée grâce à la politique économique menée par ce gouvernement. Le taux de chômage - faut-il le rappeler ? - est passé de 12,6 % en juin 1997 à 8,7 % en mars 2001. Il devrait être de l'ordre de 8,4 % à la fin de cette année.
L'article 2 réforme les conditions du financement du contrat de qualification adulte. La convention signée par les partenaires sociaux prévoit ainsi de ménager un accès privilégié au contrat de qualification adulte en faveur des salariés involontairement privés d'emploi qui ont besoin d'acquérir une qualification favorisant leur retour à l'emploi.
Cet accès privilégié prendra la forme d'une prise en charge des coûts de formation correspondants par le régime d'assurance chômage. Cette intervention financière du régime d'assurance chômage doit être expressément autorisée par la loi dans la mesure où elle déroge au principe suivant lequel les ressources de l'UNEDIC sont exclusivement utilisées pour indemniser les salariés involontairement privés d'emploi.
L'article 3 crée une allocation de fin de formation, l'AFF. Aux termes de la même convention, les chômeurs bénéficiant d'une formation prescrite par l'ANPE continueront à percevoir l'allocation de retour à l'emploi dans la limite de la durée d'indemnisation.
L'allocation de formation reclassement, l'AFR, est donc supprimée à compter du 1er juillet 2001, de même que l'allocation de formation de fin de stage, qui avait vocation à prendre le relais de l'AFR à l'issue des droits, au titre de l'assurance chômage.
Alors que la nécessité d'accroître la qualification de la population active n'est pas contestée, il serait peu opportun de limiter la durée des formations à celle des droits à l'indemnisation en assurance. L'article 3 vise donc à créer une allocation afin de répondre à ce besoin. Il renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions d'application de cette allocation, notamment la durée maximale de versement, les catégories de bénéficiaires et le montant de l'allocation.
L'article 4 a pour objet, d'une part, d'harmoniser la base légale du régime de prescription des prestations et des contributions du régime d'assurance chômage avec celle de la sécurité sociale et, d'autre part, de valider des dispositions plus favorables tant aux employeurs qu'aux allocataires que celles que contient la convention d'assurance chômage du 1er janvier 1997.
Enfin, les signataires de la convention du 1er janvier 2001 relative à l'indemnisation du chômage et à l'aide au retour à l'emploi ont prévu, à l'article 9 de cette convention, de verser à l'Etat, au titre de la clarification financière entre ce dernier et le régime d'assurance chômage, 7 milliards de francs en 2001 et 8 milliards de francs en 2002.
L'article 5 du projet de loi vise donc à autoriser l'UNEDIC à procéder à ces versements, qui sont destinés à soutenir des actions de politique de l'emploi.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les mesures qui vous sont proposées et qui doivent permettre, à compter du 1er juillet prochain, d'offrir à tous les demandeurs d'emploi, sans distinction, des possibilités plus grandes d'accès à l'emploi grâce à un accompagnement plus personnalisé et plus complet.
En les adoptant, vous permettrez de conforter la marche engagée depuis juin 1997 pour le retour de notre pays au plein emploi et vous donnerez aux deux millions de chômeurs qui nous interpellent toujours l'espoir de bénéficier des effets de la croissance.
J'en viens maintenant aux dispositions du projet de loi relatives au Fonds de réserve pour les retraites, qui figurent au titre II, à l'article 6.
La création du fonds de réserve est une étape essentielle de la politique du Gouvernement pour assurer la pérennité de nos régimes de retraites par répartition. Il est d'ailleurs à noter que le Sénat avait fait montre d'une certaine impatience à ce sujet. Il va donc avoir satisfaction !
Notre ambition s'appuie sur deux objectifs : restaurer la capacité financière de nos régimes de retraite et consulter tous les acteurs afin de trouver la bonne méthode pour engager les réponses à venir.
La politique économique conduite depuis quatre ans permet d'envisager avec sérénité et résolution l'avenir de nos régimes de retraite par répartition. Amélioration du taux d'activité grâce à la baisse du chômage, amélioration des recettes grâce à une croissance soutenue, telles sont les premières réponses que le Gouvernement a apportées aux enjeux que constitue l'avenir de ces régimes. Je rappelle qu'en 1997 le déficit de la branche vieillesse du régime général atteignait 5 milliards de francs ; elle a connu un excédent de 3 milliards de francs pour l'année 2000.
Cet assainissement de la situation financière des régimes de retraite nous donne le temps nécessaire pour étudier les mesures complémentaires à la création du fonds en vue d'assurer leur équilibre financier à long terme.
Ce travail doit faire l'objet d'une large concertation et être préparé dans la transparence. C'est pourquoi le Gouvernement a créé le conseil d'orientation des retraites, où siègent les partenaires sociaux et des parlementaires. En matière de retraites, question qui engage notre avenir, il n'y aura de solutions durables que si elles sont discutées sereinement, évaluées de façon approfondie, comprises par tous les acteurs.
Le travail du conseil d'orientation des retraites est essentiel. Le conseil est un espace de débat sur les défis que doivent relever nos régimes de retraite. Le récent colloque organisé le 5 avril dernier sur le thème « Age et travail » a ainsi pu confirmer que l'un des chantiers prioritaires est celui qui doit conduire à relever les taux d'activité des salariés en fin de carrière plutôt que d'écarter ceux-ci de l'emploi, comme cela se pratique encore trop souvent. Cet objectif, s'il est atteint, donnera de nouvelles marges de manoeuvre aux régimes de retraite.
C'est donc bien une démarche cohérente que met en place le Gouvernement en matière de retraites, conciliant l'amélioration immédiate de la situation financière des régimes et l'anticipation des difficultés démographiques auxquelles ils seront confrontés dans le long terme.
Ce sera le rôle du fonds de réserve pour les retraites que d'apporter cette garantie pour le long terme. Sa mission sera en effet d'accumuler des réserves financières jusqu'en 2020 et de les faire fructifier, afin de faciliter le financement des régimes de retraite par répartition dans les années qui suivront : les spécialistes parlent de « lissage » des besoins de financement. L'objectif du Gouvernement est d'atteindre un montant de réserves de 1 000 milliards de francs en 2020.
Parvenir à la constitution de réserves d'un tel montant suppose bien sûr que le fonds de réserve pour les retraites soit destinataire de ressources importantes. Le projet de loi soumis à la Haute Assemblée en énumère plusieurs, ce qui ne fera pas obstacle à ce que d'autres viennent s'y ajouter ultérieurement.
Ainsi, nous nous donnons les moyens d'atteindre l'objectif fixé par le Gouvernement de permettre au fonds de réserve pour les retraites d'accumuler 1 000 milliards de francs d'ici à 2020.
Il est vrai que les excédents de la caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, qui doivent être affectés au fonds de réserve pour les retraites seront sans doute moins importants que prévu. Cela s'explique principalement par une moindre croissance de la population active et par la revalorisation des pensions. Il est vrai aussi que le fonds de solidarité vieillesse, le FSV, sera mis à contribution pour assurer le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Sans oublier quelques autres prélèvements !
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Les dernières projections concernant la montée en charge du fonds de réserve pour les retraites ont été présentées le 2 mai devant le conseil d'orientation des retraites. Elles permettent de bien mesurer la crédibilité de l'objectif de 1 000 milliards de francs en 2020.
Cet objectif sera atteint, malgré de moindres excédents de la CNAV et le financement de l'APA. En effet, l'amélioration plus rapide que prévu de la situation de l'emploi entraîne la révision à la hausse des excédents du fonds de solidarité vieillesse d'ici à 2020, car les dépenses supportées par le FSV au titre des cotisations de retraite des chômeurs se trouvent réduites. L'amélioration de l'emploi provoque aussi une amélioration du niveau moyen des pensions, ce qui réduit plus rapidement le nombre d'allocataires du minimum vieillesse. La bonne tenue de la croissance, enfin, permet un meilleur dynamisme des recettes. L'écart structurellement favorable entre les dépenses et les ressources du FSV se trouve donc renforcé.
La disposition de la loi de financement de la sécurité sociale prévoyant la prise en charge progressive des avantages familiaux de retraite par la branche famille de la sécurité sociale, qui ne figurait pas dans les projections initiales, conduira également à renforcer la capacité de financement du FSV.
Les hypothèses économiques sur lesquelles sont fondées les projections du Gouvernement sont raisonnables.
Le Gouvernement a en effet retenu une baisse progressive du taux de chômage, qui atteindrait 4,5 % en 2010 pour se stabiliser à ce niveau. Je comprends que certains puissent être désappointés par cette évolution positive ! (M. Alain Vasselle s'exclame.)
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ne dites pas cela, monsieur le secrétaire d'Etat : personne ne se réjouit du chômage en France !
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Tant mieux ! C'est fort bien !
En tout cas, si le taux de chômage est passé de 12,7 % à 8 % en l'espace de trois ans et demi, il n'est pas déraisonnable de penser qu'il pourra baisser jusqu'à 4,5 % au cours des sept ou huit prochaines années. Cette donnée ne paraît pas reposer sur une extrapolation irréaliste.
Les hypothèses de rendement retenues par le Gouvernement pour le placement des ressources du fonds sont également prudentes : le taux de 4 % qui a été retenu est en effet nettement inférieur à la moyenne constatée au cours des cinquante ou des trente dernières années.
Le financement à court terme du fonds de réserve pour les retraites ne sera que très marginalement affecté par les retards constatés dans la cession des licences de téléphonie mobile, dites « licences UMTS ». Le fonds de solidarité vieillesse est doté aujourd'hui de 38 milliards de francs. Une part importante de la vente des licences UMTS sera affectée au fonds de réserve, lui permettant d'approcher le montant prévu de 50 milliards de francs à la fin de 2001.
Je voudrais maintenant développer les principes sur lesquels reposera le fonds de réserve pour les retraites.
Le premier d'entre eux devra être la transparence de la gestion.
La transparence, c'est d'abord la création de cet établissement public spécifique qu'est le fonds de réserve pour les retraites. Cela permettra d'individualiser très précisément les comptes.
La transparence, c'est aussi l'association des partenaires sociaux et des parlementaires à la gestion du fonds de réserve pour les retraites. Celui-ci aura la charge de l'épargne collective des Français. C'est pourquoi le projet de loi institue un conseil de surveillance du fonds, dont seront membres des parlementaires, des représentants des partenaires sociaux et des personnalités qualifiées, et qui contribuera à la définition de la politique de placement. Il aura aussi pour mission de contrôler les résultats et d'établir un rapport annuel public sur la gestion du fonds. Il sera par ailleurs consulté sur la nomination des membres du directoire, qui sera l'organe exécutif du fonds de réserve pour les retraites et qui devra rendre compte régulièrement au conseil de surveillance de la politique de placement.
La transparence s'exercera enfin avec les procédures de contrôle mises en place. Ainsi, des commissaires aux comptes seront chargés de certifier les comptes du fonds de réserve et de vérifier la sincérité de l'évaluation des actifs du fonds. Celui-ci sera également soumis au contrôle de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales.
La recherche de l'efficacité et de la sécurité des fonds est la deuxième orientation qui préside à la création du fonds de réserve pour les retraites et devra guider son action.
L'efficacité, cela signifie que l'on s'appuie sur des professionnels compétents et que l'on met en place des procédures permettant d'assurer la sécurité des fonds. C'est pour cette raison que le projet du Gouvernement associe étroitement la Caisse des dépôts et consignations à la mise en oeuvre du fonds de réserve pour les retraites.
Depuis 1816, date de sa création, la Caisse des dépôts et consignations a fait la preuve de son efficacité et de sa capacité à gérer de l'épargne collective dans le cadre de missions de service public. Le projet de loi lui confie donc une nouvelle mission de service public : assurer la gestion administrative du fonds de réserve pour les retraites. Elle devra ainsi assurer la conservation et le dépôt des titres, contrôler les risques, assurer la bonne tenue des opérations comptables, participer à la définition de la politique d'investissement.
Le souci d'efficacité et de sécurité a également conduit le Gouvernement à préciser dans le projet de loi les grands principes qui devront guider la politique d'investissement.
Les dirigeants du fonds devront ainsi respecter l'objectif et l'horizon d'utilisation des ressources du fonds : un investissement pour une durée de vingt ans n'obéit pas, en effet, aux mêmes règles qu'un placement réalisé à l'horizon de quelques mois ! Ils devront aussi respecter les principes de prudence et de répartition des risques. Le fonds de réserve a donc vocation non pas à être un acteur spéculatif sur les marchés financiers, mais bien à faire prospérer dans les meilleures conditions l'épargne des Français.
L'efficacité du fonds de réserve pour les retraites suppose également qu'il dispose d'une réelle indépendance. Il ne doit pas être soumis à des aléas politiques, aux contingences budgétaires ou aux intérêts des opérateurs sur les marchés financiers.
Dans cette pespective, le projet de loi instaure des dispositions très précises.
Le directoire, organe exécutif du fonds de réserve pour les retraites, sera composé de trois personnes chargées d'élaborer, en concertation avec le conseil de surveillance, la politique d'investissement et de la mettre en oeuvre. Il aura une grande indépendance.
Il sera composé non de représentants des administrations - qui siégeront au conseil de surveillance - mais de professionnels à la compétence reconnue. Il sera présidé par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, en cohérence avec le choix de confier à ce dernier établissement la gestion administrative du fonds de réserve pour les retraites. Enfin, les membres du directoire devront déclarer les intérêts ou les fonctions qu'ils peuvent détenir ou exercer dans toute personne morale ; ils ne pourront pas délibérer dans une affaire dans laquelle ils ont un intérêt.
Transparence, efficacité, sécurité, indépendance, tels sont donc les maîtres mots sur lesquels le Gouvernement entend instituer le fonds de réserve pour les retraites. Je ne doute pas que nous pourrons nous rejoindre sur ces principes.
J'en viens maintenant à l'article 7 du projet de loi, qui ratifie l'ordonnance du 19 avril 2001 portant réforme du code de la mutualité.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Intéressant !
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Cette ratification marque l'aboutissement d'une réforme qui touche un secteur majeur de la vie sociale de notre pays, puisqu'il couvre plus d'un Français sur deux et gère 1 300 institutions sanitaires et sociales.
Lorsqu'il a demandé au Parlement l'autorisation de procéder à cette réforme par voie d'ordonnance, le Gouvernement s'était engagé à procéder rapidement à la ratificaiton du texte. La loi d'habilitation du 3 janvier 2001 prévoyait qu'un projet de loi en ce sens devait être déposé avant le 30 juin prochain. Tel est précisément l'objet de l'article 7.
Le Gouvernement est soucieux de mener cette réforme à son terme dans les meilleurs délais. Il s'agit en effet de lever l'incertitude juridique à laquelle le monde mutualiste est confronté depuis la condamnation de la France pour la non-transposition à ce secteur des directives « Assurance » de 1992.
Cette situation critique a conduit le Gouvernement à choisir la voie de l'ordonnance, en raison de sa rapidité. Le Parlement a approuvé ce choix, qui avait été fait en accord avec le monde mutualiste.
La loi d'habilitation du 3 janvier 2001 donnait au Gouvernement un délai de quatre mois pour publier ce texte. Conformément aux engagements pris, l'ordonnance a été publiée au Journal officiel le 22 avril dernier.
Comme le Gouvernement l'avait indiqué lors des débats sur la loi d'habilitation, l'ordonnance reprend les dispositions du projet de loi qu'il avait préparé au printemps 2000.
Ce texte permet d'assurer la transposition des directives « assurances » dans ce secteur, tout en respectant son identité propre.
Ce résultat, nous le devons d'abord au travail réalisé par Michel Rocard dans le cadre de la mission que lui avait confiée le Premier ministre en 1998. Il a montré qu'il était possible de transposer ces directives tout en confortant les valeurs de solidarité et de démocratie sociale qui animent le monde mutualiste. Il a notamment défini comment les mutuelles pourraient continuer à gérer les oeuvres sanitaires et sociales. C'était là l'une des préoccupations essentielles du mouvement mutualiste, c'était aussi celle du Gouvernement.
Ce texte assure à la mutualité la sécurité juridique dont elle a besoin et l'ouvre sur l'Europe ; il lui offre un cadre législatif modernisé et adapté à ses besoins.
Conformément aux orientations dégagées par le rapport Rocard, ce texte met en oeuvre le principe de spécialité, qui prévoit que toute entreprise entrant dans le champ des directives « assurances » doit se limiter à cette activité, à l'exclusion de toute autre activité commerciale. Dans cette perspective, les mutuelles de santé devront séparer dans deux structures distinctes leurs activités d'assurance et leur action sanitaire et sociale.
Tout en respectant l'esprit et la lettre des directives, le futur code préserve les solidarités institutionnelles du mouvement mutualiste : il prévoit comment une mutuelle de santé peut continuer à gérer des oeuvres sanitaires et sociales, dès l'instant où elles représentent une activité accessoire au regard de son activité d'assurance. Il encadre les tranferts financiers entre la mutuelle d'assurance et la mutuelle gestionnaire de réalisations sanitaires et sociales. Il garantit les droits et assure la protection des intérêts des membres des organismes mutualistes, par le renforcement des règles prudentielles. Il assure, de ce fait, l'harmonisation des règles techniques et financières applicables à l'ensemble des organismes qui pratiquent des opérations d'assurance : organismes mutualistes, institutions de prévoyance et entreprises d'assurance.
Mais cette ordonnance est également l'occasion de moderniser le code de la mutualité et de consacrer, par la loi, les principes de solidarité et de démocratie sociale sur lesquels ce secteur s'est bâti.
L'ordonnance définit ainsi les « principes mutualistes » qui encadrent les pratiques tarifaires des mutuelles, notamment en interdisant aux mutuelles de santé de moduler leurs cotisations en fonction de l'état de santé de leurs adhérents. Elle entend favoriser la démocratie mutualiste, à travers plusieurs mesures symboliques, comme la création d'un statut de l'élu mutualiste et le renforcement du rôle de l'assemblée générale des organismes. Elle précise le rôle des fédérations mutualistes et consacre la place du conseil supérieur de la mutualité, organe représentatif du milieu mutualiste.
Fruit d'une longue concertation avec l'ensemble des parties concernées, au premier rang desquelles figurent, bien sûr, les fédérations mutualistes, ce texte marque l'aboutissement des efforts du Gouvernement sur un dossier que chacun savait délicat, et que beaucoup pensaient insoluble. Ce résultat est la démonstration de la justesse de la méthode qui avait été choisie : celle du dialogue et de la concertation. C'est pourquoi je comprends d'autant moins l'accusation de « méthode expéditive » que votre commission des affaires sociales formule dans son rapport. Mais je sais aussi que nombreux sont ceux qui auraient souhaité un débat plus large.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission, avec l'autorisation de M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Vous venez de rappeler les engagements que le Gouvernement avait pris lors de l'examen du projet de loi d'habilitation et la large concertation à laquelle vous avez procédé pour aboutir aux dispositions qui font l'objet du titre III du présent projet de loi.
Je constate simplement que le Gouvernement a oublié un des engagements, qui avait été pris par vous-même. Je me souviens de la discussion que nous avions eue ici même et au cours de laquelle la commission des affaires sociales, soutenant votre position, s'était opposée à la commission des finances dans des conditions difficiles, au motif que vous vous étiez engagé à discuter du contenu de ce code avec la représentation nationale, au moins avec le Sénat - je ne sais si vous aviez pris les mêmes engagements à l'Assemblée nationale. Or nous n'avons rien vu venir, si ce n'est, au Journal officiel , la publication du nouveau code de la mutualité. Je veux bien qu'il y ait eu une concertation ; ce qui m'étonne, c'est que vous ayez méprisé à la fois vos engagements et la représentation nationale au Sénat.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Je comprends votre commentaire. Mais compte tenu de l'obligation de ratifier l'ordonnance, cette ratification intervient à l'occasion de l'examen d'un texte plus large portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Nous avons été floués !
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Sans doute aurait-il été préférable qu'un large débat s'organise autour de la mutualité. Mais il y a aussi des impératifs de calendrier et des impatiences.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Si le Sénat est victime des impatiences...
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Si je ne suis pas toujours maître du temps, je ne suis pas non plus maître de l'ordre du jour...
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales. Le Gouvernement est maître de l'ordre du jour !
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Lorsque survient la possibilité de boucler un chantier qui se trouve dans une insécurité juridique complète et qui flotte depuis huit ou neuf ans, l'occasion ne peut être négligée.
Mais nous aurons sans doute l'occasion d'y revenir au cours du débat.
En ratifiant cette ordonnance, vous contribuerez à clore la phase d'incertitude qui avait été ouverte par la non-transposition des directives « assurance », et à offrir aux mutuelles un code rénové et modernisé, leur permettant d'affronter avec confiance les enjeux des années à venir.
Les dispositions de ce projet de loi en matière d'éducation populaire et de jeunesse, à savoir les articles 8 à 11, sont très attendues par l'ensemble des acteurs de ce secteur. Ma collègue Marie-George Buffet a tenu à les proposer à la délibération de la représentation nationale dans les plus brefs délais afin de répondre à de réels besoins exprimés sur le terrain.
Ces dispositions visent d'abord à moderniser les modalités et les conditions de l'agrément que le ministère de la jeunesse et des sports peut accorder aux associations de ce secteur. Il s'agit de préciser les critères que doivent remplir les associations intervenant dans le secteur de la jeunesse et de l'éducation populaire pour obtenir cet agrément qui conditionne les subventions du ministère de la jeunesse et des sports.
Pour des associations qui viennent d'être créées et à certaines conditions, il est également proposé d'ouvrir la possibilité d'une aide financière du ministère de la jeunesse et des sports, en attendant qu'elles engagent une démarche de demande d'agrément. Il s'agit ainsi de répondre avec souplesse et rapidité à l'expression de nouveaux modes d'engagement qui ne s'inscrivent pas d'emblée dans la durée et qu'il convient d'accompagner vers la construction de véritables projets associatifs.
Le projet de loi prévoit également de conforter les instances de concertation qui existent dans le champ de la jeunesse et de l'éducation populaire. C'est pourquoi il est proposé d'introduire dans la loi le conseil national de la jeunesse et de l'éducation populaire, qui existe depuis 1944 sous différentes appellations. Il vous est également proposé d'accorder cette reconnaissance législative au conseil national de la jeunesse que le ministère de la jeunesse et des sports a mis en place au début de l'année 1998 pour répondre à la demande des jeunes de participer à l'action publique, d'être entendus par les pouvoirs publics, de faire des propositions et d'assurer le suivi de leur mise en oeuvre.
Enfin, il s'agit d'améliorer le contrôle exercé dans le but de protéger la santé et la sécurité physique et morale des mineurs accueillis hors du domicile parental durant les congés professionnels ou scolaires, ou à l'occasion des loisirs. Il s'agit également de reconnaître, dans le même temps, la fonction éducative de ces accueils lorsqu'ils sont réalisés dans le cadre de centres de vacances ou de centres de loisirs sans hébergement.
C'est ainsi que le texte qui vous est proposé vise à écarter de toute fonction auprès des mineurs accueillis dans ce cadre les personnes condamnées pour crime ou pour des délits dont la définition suppose qu'elles présentent un danger pour ces mineurs. Les incapacités d'exercice et les mesures de police administrative sont renforcées et élargies en conséquence.
Il est également précisé que les organisateurs de centres de vacances et de loisirs doivent élaborer, mettre en oeuvre et évaluer un projet éducatif. A cela s'ajoutent des propositions d'harmonisation avec la loi du 16 juillet 1984 modifiée, relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, concernant : l'obligation pour les organisateurs et les exploitants de locaux de souscrire une assurance en responsabilité civile ; la possibilité pour les agents du ministère de la jeunesse et des sports d'être assermentés et de se voir ainsi confier des pouvoirs de police judiciaire les renforçant dans leurs missions de contrôle ; les sanctions pénales à l'égard de ceux qui ne respecteraient par les obligations fixées par le texte ou qui n'exécuteraient pas les décisions prises par l'autorité administrative.
Je tiens, enfin, à préciser que toutes ces mesures sont très attendues par les acteurs du secteur de la jeunesse et de l'éducation populaire, que Marie-George Buffet a consultés au préalable.
Le dernier volet du projet de loi traite de dispositions relatives à l'éducation et à la communication. Il s'agit des dispositions qui figurent aux articles 12 et 13 du titre V.
Par l'article 12, il vous est proposé de clarifier le cadre juridique dans lequel s'inscrivent les conventions passées par l'Institut d'études politiques de Paris avec certains lycées classés en zone d'éducation prioritaire ou en réseau d'éducation prioritaire, avec l'objectif de concourir à la diversification des voies d'accès à cet établissement. Cette nouvelle voie d'accès s'inscrira dans la tradition des « entrées parallèles » dans les écoles : il en existe déjà à l'Institut d'études politiques de Paris pour l'entrée en deuxième année, comme il en existe dans les écoles de commerce et d'ingénieurs.
L'établissement procédera à ces recrutements parallèles en augmentant le nombre de places ouvertes en première année : il n'y aura donc aucun préjudice porté à la voie d'accès principale par concours. Cette initiative expérimentale de la direction de l'Institut d'études politiques de Paris, pleinement encouragée par mon collègue Jack Lang, constitue un enrichissement pour notre société : elle permettra de diversifier les voies d'accès à un diplôme ouvrant à des secteurs professionnels de hautes responsabilités et constituera un signal fort à destination d'élèves souvent marginalisés, en dépit de leur parcours scolaire excellent.
Enfin, par l'article 13, il vous est proposé des dispositions relatives au secteur audiovisuel. Ainsi, cet article a pour objet d'assouplir la règle qui limite à 49 % la part du capital d'une chaîne de télévision que peut détenir un même actionnaire. L'enjeu consiste à accompagner et à faciliter le lancement de la télévision numérique de terre, qui permettra de développer une offre nouvelle de programmes et de la proposer à l'ensemble de nos concitoyens. Pour la réussite de ce projet, la présence d'une offre privée importante, à côté de l'offre publique, est bien évidemment fondamentale. Or, les discussions engagées à l'occasion du vote de la loi du 1er août 2000 relative à la liberté de communication ont conduit le Gouvernement à souhaiter faire évoluer un dispositif qui, appliqué de manière trop générale dans un paysage audiovisuel appelé lui-même à être profondément modifié, pouvait constituer un frein au développement de la technologie numérique. Le dispositif qui vous est proposé, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, ne vise donc pas à revenir sur un principe général auquel nous sommes attachés en ce qu'il permet de préserver le pluralisme, mais il permet, selon des modalités simples et conformes aux principes généraux du droit, de ne pas soumettre à la règle des 49 %, d'une part, les chaînes dont l'audience est inférieure à 2,5 % et, d'autre part, les chaînes qui ne sont que la duplication d'un programme principal. Le seuil des 2,5 % concerne, concrètement, les « petites chaînes », en particulier les chaînes thématiques, et plus généralement toutes les chaînes nouvelles pendant la phase de démarrage du numérique.
Il vous est aussi proposé - il s'agit désormais de l'article 15 du projet de loi - de renforcer le rôle des collectivités locales dans l'établissement des réseaux de télécommunications afin de favoriser l'essor du haut débit dont la disponibilité devient un facteur déterminant du développement équilibré de l'activité économique et de l'emploi sur l'ensemble du territoire, tel que le souhaite le Gouvernement.
Enfin, il vous est proposé de compléter le dispositif d'encadrement des cartes d'abonnement illimité au cinéma. Dans le cadre de la loi sur les nouvelles régulations économiques, des mesures en faveur des ayants droit, d'une part, et des petits exploitants, d'autre part, ont été adoptées pour éviter que ces pratiques commerciales ne menacent l'équilibre général de l'économie du cinéma. Aujourd'hui, il est proposé d'y ajouter une disposition adaptée au secteur de la moyenne exploitation.
Un certain nombre de dispositions additionnelles ont été ajoutées lors de la première lecture de ce texte à l'Assemblée nationale. Quelques-unes, importantes, concernent le secteur de l'audiovisuel : je les ai déjà évoquées. D'autres concernent des validations de concours, que je vous demanderai d'approuver comme l'ont fait les députés. Enfin, le nouvel article 21, inséré sur mon initiative, a pour objet la création, dans le cadre de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, d'une entreprise ayant un but social : la société coopérative d'intérêt collectif, la SCIC.
Ce nouveau statut diffère du statut général des sociétés coopératives par sa finalité altruiste : la SCIC n'a pas pour but la seule satisfaction de ses propres adhérents ou associés, elle vise aussi à satisfaire d'un plus large public. C'est pourquoi elle doit être régie par des règles spécifiques d'organisation et de fonctionnement visant à instaurer une nouvelle logique de partenariat entre usagers, bénévoles, salariés et financeurs.
Des collectivités locales et des entreprises privées pourront en être membres, afin de combiner des ressources publiques et privées en faveur d'initiatives économiques et citoyennes. Les sociétaires seront organisés par collèges - salariés, usagers, bénévoles, financeurs,... - et le principe « une personne, une voix » garantira l'efficacité de la société et son caractère démocratique.
Une association pourra aussi se transformer en coopérative sans perdre la personnalité morale puisqu'elles auront en commun la non-lucrativité. Pour autant, le rôle des associations dans le champ économique n'est pas contesté ; la SCIC n'a pas vocation à s'y substituer : elle complète les entités juridiques qui sont à la disposition de ceux qui développent des projets d'économie sociale et solidaire.
Telle est, mesdames, messieurs les sénateurs, la présentation que je souhaitais faire de ce projet de loi, qui a, dans votre assemblée, mobilisé le travail de deux commissions et de sept rapporteurs. J'ai conscience de l'important travail que vous avez dû accomplir dans des délais très brefs, et je vous en suis reconnaissant.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il n'est pas d'usage que le président d'une commission saisie au fond s'exprime avant les rapporteurs de cette dernière et avant les rapporteurs des commissions saisies pour avis. Je les prie donc de ne pas m'en tenir rigueur.
Je veux simplement formuler quelques brèves observations liminaires.
La commission des affaires sociales, jusqu'à hier du moins, menait conjointement l'examen de deux projets de loi portant diverses dispositions d'ordre social.
Le premier, intitulé un peu pompeusement « projet de loi de modernisation sociale », comportait, dans sa version examinée par l'Assemblée nationale en janvier dernier, 48 articles. Au moment où l'Assemblée nationale s'apprêtait à procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi en deuxième lecture, il en comportait 237.
Certes, il est bien naturel que le Parlement souhaite enrichir, au fil de la navette, les textes soumis à son examen. Mais il est plus étonnant que le Gouvernement soit l'auteur « direct » - il n'est d'ailleurs pas exclu qu'il ait inspiré quelques initiatives parlementaires - de 59 articles additionnels. C'est donc un deuxième projet de loi qui a été inséré par le Gouvernement au cours de la navette.
Le second projet de loi - qui nous préoccupe aujourd'hui - s'annonce sous le titre « bénin » d'un « projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel ». Il se caractérise pourtant par la mise bout à bout de plusieurs projets de loi, dont chacun aurait mérité une discussion approfondie mobilisant les compétences spécifiques des différentes commissions permanentes du Sénat et de celles de leurs membres les plus spécialisés dans les sujets abordés.
Il est significatif que, pour un texte comportant à l'origine 13 articles, la commission des affaires sociales ait dû nommer quatre rapporteurs, et la commission des affaires culturelles, saisie pour avis, trois rapporteurs.
Le texte initial du Gouvernement comportait en réalité sept « projets de loi » abordant successivement : la transcription de l'importante convention UNEDIC du 19 octobre 2000 ; le statut du fonds de réserve des retraites ; la ratification des 223 articles du nouveau code de la mutualité ; un important dispositif de réglementation des centres de loisirs accueillant des mineurs relevant de la ministre de la jeunesse et des sports ; un volet concernant l'Institut d'études politiques de Paris, introduit à la demande du ministre de l'éducation nationale, et une réforme de la loi relative à la liberté de communication, à laquelle la ministre de la culture et de la communication ne saurait rester indifférente.
En dépit de cette pluralité d'inspiration, le projet de loi n'est présenté, au nom du Premier ministre, que par la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale sont venus de surcroît s'ajouter, outre quelques dispositions diverses relatives au covoiturage, au remplacement des pharmaciens d'officine - elles sont étrangement inscrites dans le titre relatif au fonds de réserve des retraites - ou aux libéralités des comités d'entreprise, un projet de loi nouveau modifiant profondément la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et créant une nouvelle catégorie de sociétés anonymes ou de sociétés à responsabilité à capital variable, les « sociétés coopératives d'intérêt collectif » régies par le code du commerce sous réserve des douze articles que comporte l'amendement déposé en séance par le Gouvernement.
Ont également été ajoutés, d'une part, un dispositif concernant l'intervention des collectivités territoriales en matière de réseaux de télécommunications, modifiant le code général des collectivités territoriales tel qu'il résulte de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999, qui avait été renvoyée pour examen, au Sénat, à une commission spéciale et, d'autre part, une modification substantielle du code de l'industrie cinématographique, qui avait d'ailleurs été déjà modifié par la loi relative aux nouvelles régulations économiques, promulguée le 15 mai dernier.
Il n'est guère étonnant, dans ces conditions, qu'un orateur à l'Assemblée nationale ait pu évoquer un climat de « panique législative », comme celles des gens qui, forcés à un prochain départ, entassent dans leur valise ce dont ils n'avaient pas eu le temps de se préoccuper et qui meublera leur longue absence.
La commission des affaires sociales du Sénat constate, pour sa part, un climat délétère pour le respect des prérogatives les plus élémentaires du Parlement. Non seulement le Gouvernement multiplie dans l'impréparation des projets de loi dont il impose ensuite au Parlement une discussion précipitée, mais encore, il truffe ces textes, en cours de navette, de dispositifs qui sont eux-mêmes des projets de loi à part entière et qui ne sont ni délibérés en conseil des ministres ni soumis à l'avis du Conseil d'Etat.
Il n'est guère étonnant que, parfois, la machine s'enraye, comme cela a été le cas, hier, à l'Assemblée nationale. De ce point de vue, le parcours législatif de l'« économie solidaire » apparaît particulièrement « exemplaire ».
La réforme du code de la mutualité avait fait l'objet d'une demande d'habilitation à la va-vite. En dépit des assurances du Gouvernement, le débat de ratification des 223 articles de ce code va être conduit « à la hussarde ».
Poursuivant dans cette voie expéditive, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est un nouveau projet de loi sur les sociétés coopératives que vous prétendez faire enregistrer au Parlement sous la forme d'un amendement déposé en séance à l'Assemblée nationale.
La commission des affaires sociales, pour sa part, a choisi de se désolidariser de cette méthode, incompatible avec un travail législatif sérieux. Elle attire avec quelque solennité l'attention du Gouvernement sur les dangers de l'hypertrophie législative et sur les risques d'insécurité juridique qui résultent de l'improvisation et de la précipitation.
Les parlementaires représentent, selon l'article 3 de la Constitution, la souveraineté du peuple lorsque celui-ci ne l'exerce pas directement par voie référendaire.
A ce titre, et parce que c'est là la mission qui leur a été confiée par le suffrage universel, les parlementaires, députés ou sénateurs, se doivent de faire un travail sérieux, réfléchi, parce que la loi qu'ils voteront s'imposera à tous.
Le Sénat et ses commissions ne sont pas responsables des états d'âme, des palinodies, des chantages qui perturbent la majorité plurielle. Ils n'ont pas à épouser les querelles de famille, les insuffisances, les impatiences ou les faiblesses des ministres qui veulent satisfaire leurs partenaires ou calmer les exigences de telle ou telle fraction, comme aux plus beaux temps de la IVe République.
C'est pourquoi soit nous refuserons de discuter des parties du projet de loi qui nous sont présentées comme « à prendre ou à laisser », soit nous consacrerons le temps nécessaire à la discussion, à l'examen des amendements qui, eux, font partie du « droit réservé » des parlementaires.
La commission des affaires sociales a fait un énorme effort pour éviter tout blocage. Mais nous ne sommes pas prêts à accepter n'importe quoi pour des intérêts qui ne sont pas les nôtres ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Souvet, rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le titre Ier de ce projet de loi vise à donner une base légale à la convention du 1er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage. Une telle habilitation législative est en effet nécessaire à son application pleine et entière à compter - le temps presse - du 1er juillet prochain.
Mais, avant de vous présenter plus en détail les articles de ce titre Ier, il ne me paraît pas inutile, mes chers collègues, de revenir brièvement sur la négociation et le contenu de cette convention.
Ces négociations ont en effet constitué un « étrange feuilleton », selon l'expression de l'un des commentateurs les plus avisés en droit social. Ouvertes le 17 mars 2000, elles ont été marquées par « maints rebondissements » et ont donné lieu « aux péripéties les plus extravagantes ». Les partenaires sociaux ont ainsi, à deux reprises, conclu une convention que le Gouvernement a refusé d'agréer avant de se résoudre, dans un troisième temps, à prendre en considération les propositions issues du dialogue social.
Cette convention a finalement été agréée le 6 décembre dernier ; mais les « péripéties » n'allaient pourtant pas en rester là. Le Gouvernement, sans doute marqué par ses anciennes réticences, ne déposait que le 25 avril dernier à l'Assemblée nationale le présent projet de loi. Son adoption demeure pourtant un préalable à l'application de l'ensemble de la convention à compter, je le répète, du 1er juillet prochain.
Reste que le feuilleton n'est toujours pas terminé. Deux étapes sont encore à franchir d'ici au 1er juillet : l'adoption du présent projet de loi et la signature des deux conventions nécessaires à la mise en oeuvre de la convention du 1er janvier 2001. Ces deux conventions sont aujourd'hui finalisées et leur signature semble désormais imminente.
Ces négociations, fort mouvementées, ont néanmoins permis d'aboutir à une convention très novatrice.
La commission des affaires sociales avait estimé, dès novembre dernier, que « la nouvelle convention d'assurance chômage constitue une avancée décisive dans la lutte contre le chômage structurel ». Elle ne peut, bien entendu, que réitérer ici cette analyse. J'observe à ce propos que, pour l'UNEDIC, les mesures contenues dans la convention devraient permettre de réduire le nombre de chômeurs de 125 000 par an sur la durée de la convention.
Cette convention du 1er janvier 2001 présente, en effet, quatre caractéristiques principales, qui constituent, de l'avis de la commission des affaires sociales, autant d'évolutions très positives.
Elle permettra d'abord - et c'est le premier point positif - une réelle activation des dépenses d'indemnisation du chômage en faveur d'un retour rapide à l'emploi des chômeurs.
L'objectif est ici que les dépenses d'assurance chômage servent en priorité au retour à l'emploi, et non à une indemnisation, certes nécessaire mais pas forcément très incitative à la réinsertion professionnelle.
Les partenaires sociaux se sont déjà engagés, depuis quelques années, dans un tel processus d'activation des dépenses passives d'indemnisation. Je pense, en particulier, à l'accord du 8 juin 1994 sur les conventions de coopération et à l'accord du 6 septembre 1995 sur l'ARPE, l'allocation de remplacement pour l'emploi.
La convention du 1er janvier 2001 s'inscrit dans cette perspective. Mais elle va beaucoup plus loin. Elle propose en effet un élargissement très sensible des mesures d'activation ; elle prévoit aussi un accompagnement immédiat et personnalisé de chaque demandeur d'emploi dans sa démarche de retour à l'emploi.
La convention permet ainsi la mise en place, à compter du 1er juillet 2001, de nouvelles aides à l'emploi directement financées par l'UNEDIC, mais prescrites par l'ANPE. Ces aides, diverses mais complémentaires, sont les suivantes : une aide dégressive à l'employeur qui embauche un demandeur d'emploi rencontrant des difficultés spécifiques de réinsertion, cette aide pouvant être versée pendant trois ans maximum ; une aide à la mobilité géographique pour le demandeur d'emploi qui accepte un travail dans un autre bassin d'emploi que celui où il était précédemment occupé ; une aide à la formation ; un accès privilégié des demandeurs d'emploi ayant besoin d'acquérir une qualification particulière aux contrats de qualification adulte ; enfin, le financement d'actions d'évaluation des compétences professionnelles et d'actions d'accompagnement en vue du reclassement.
La convention prévoit également un soutien personnalisé et immédiat pour tout demandeur d'emploi indemnisé dans sa démarche de retour à l'emploi. C'est le plan d'aide au retour à l'emploi, ou PARE.
Le PARE, souvent diabolisé, se présente en réalité comme une généralisation et un approfondissement des dispositifs d'accompagnement individualisé déjà existants, comme le programme « Nouveaux départs » ou le programme TRACE, ou trajet d'accès à l'emploi.
A ce propos, ouvrant une parenthèse, je ne peux que déplorer le développement d'une polémique aux très forts relents idéologiques sur la nature - obligatoire ou non - du PARE. Je regrette que le Gouvernement ait, sur ce point, choisi la voie bien inutile de la dramatisation. Il n'appartient certes pas au législateur d'interpréter la convention, mais il me semble vain de multiplier les prises de positions les plus ambiguës alors que la simple lecture de la convention suffit, à elle seule, à dissiper tout doute à ce sujet.
Pour en revenir au PARE, j'observe qu'il apporte une triple amélioration par rapport aux dispositifs actuels d'accompagnement : il est immédiat, alors qu'il n'intervient qu'au bout d'un an de chômage dans le cadre du programme « Nouveaux départs », par exemple ; il est à la fois progressif et continu ; il bénéficie de moyens renforcés, 15 milliards de francs étant dégagés à cet effet par l'UNEDIC.
Voilà pourquoi la commission des affaires sociales ne peut que s'associer à cette forte initiative des partenaires sociaux.
Deuxième point positif : une amélioration de l'indemnisation des demandeurs d'emploi.
D'une part, le nombre de chômeurs indemnisés sera plus élevé. La convention prévoit en effet une révision de la durée minimale d'affiliation exigée pour ouvrir droit à indemnisation. La durée d'activité minimale est ainsi ramenée - vous l'avez précisé, monsieur le secrétaire d'Etat - de quatre mois pendant les huit derniers mois à quatre mois pendant les dix-huit derniers mois. La convention prévoit également une prise en charge spécifique des créateurs d'entreprise si l'entreprise doit cesser son activité dans les trois ans qui suivent sa création.
D'autre part, le niveau de l'indemnisation sera amélioré. La dégressivité des allocations introduite en 1992 par le dispositif de l'allocation unique dégressive est supprimée.
Troisième point positif : une baisse significative des cotisations.
Les cotisations d'assurance chômage pourraient en effet diminuer de 43,5 milliards de francs sur la période 2001-2003, si l'évolution de la situation financière de l'UNEDIC le permet. Leur taux passerait ainsi de 6,18 % en 2000 à 5,40 % en 2002.
La commission des affaires sociales ne peut que se féliciter de cette baisse. Elle se traduira en effet, pour les entreprises, par une réduction des charges favorable à l'emploi, à la compétitivité et à la croissance. En outre, elle implique une amélioration du pouvoir d'achat des salariés.
Quatrième point positif : des moyens financiers considérables, mais réalistes.
Pour contribuer à la réussite de la nouvelle convention d'assurance chômage, les partenaires sociaux ont décidé de mobiliser des moyens financiers considérables, grâce au recyclage des excédents financiers de l'UNEDIC.
Ainsi, 113 milliards de francs seront dégagés sur trois ans : 50 milliards de francs en faveur des chômeurs, 43 milliards de francs pour la baisse des cotisations et 20 milliards de francs au profit de l'Etat.
Je tiens ici à souligner l'ampleur de l'effort réalisé par les partenaires sociaux, mais aussi leur sens des responsabilités. Ils ont en effet prévu une clause de sauvegarde, afin de garantir l'équilibre financier du régime d'assurance chômage pour la durée de la convention. Ainsi, si cet équilibre n'était pas assuré, des mesures de sauvegarde, prenant notamment la forme d'une révision de l'échéancier des baisses de cotisations, pourraient bien sûr intervenir.
Ce sont ces quatre appréciations positives qui m'amènent aujourd'hui à porter un jugement très favorable sur la convention du 1er janvier 2001, et je me félicite de ce que, après tant d'occasions manquées depuis quatre ans, qu'il s'agisse des emplois-jeunes, des 35 heures, du financement de l'alternance ou des licenciements, le Gouvernement et la commission des affaires sociales du Sénat arrivent enfin à une analyse commune en vue de proposer une réponse aux problèmes de l'emploi, même si les réticences manifestées par le Gouvernement à propos de cette convention demeurent évidentes, comme en témoigne sa « conversion » pour le moins tardive et parfois ambiguë.
Ces appréciations positives resteront cependant lettre morte si la convention du 1er janvier 2001 n'est pas appliquée, or cela reste aujourd'hui pour partie subordonné à l'adoption de mesures législatives.
En effet, le code du travail n'autorise pas l'utilisation des ressources de l'UNEDIC à une autre fin que l'indemnisation des chômeurs. Il est donc nécessaire de modifier la loi pour permettre la mise en oeuvre de la convention.
Une telle pratique n'est d'ailleurs pas inédite. Ainsi, la loi du 4 février 1995 a donné une base légale aux conventions de coopération, et la loi du 21 février 1996 a habilité l'UNEDIC à financer le dispositif de l'allocation de remplacement pour l'emploi, l'ARPE. J'observe que, dans les deux cas, le Sénat avait adopté ces dispositions à l'unanimité.
J'en viens maintenant aux cinq articles du titre Ier.
L'article 1er autorise le financement par l'UNEDIC des mesures d'aide au retour prévues par la convention du 1er janvier 2001 : aide à la mobilité, aide dégressive à l'employeur, aide à la formation, actions d'accompagnement personnalisées, qui toutes seront prescrites par l'ANPE.
L'article 2 autorise le régime d'assurance chômage à financer les contrats de qualification pour adultes et prolonge le délai ouvert aux partenaires sociaux pour pérenniser le dispositif jusqu'au 30 juin 2002.
En effet, il s'agit, je le rappelle, d'un dispositif expérimental introduit par la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions. C'est un programme utile qui doit permettre à des chômeurs très éloignés de l'emploi d'acquérir, par la voie de l'alternance, une qualification reconnue, mais il fonctionne mal : alors que le Gouvernement visait un objectif de 25 000 contrats en 2000, moins de 7 000 ont été effectivement signés.
La convention du 1er janvier 2001 devrait permettre une relance de ce dispositif. L'UNEDIC prévoit en effet de financer, à hauteur de un milliard de francs par an, les coûts de formation.
J'ajoute que les partenaires sociaux semblent également très proches d'un accord sur la pérennisation du dispositif, puisque la signature pourrait intervenir en juin ou en juillet prochains.
L'article 3 institue une allocation de fin de formation, afin de permettre aux demandeurs d'emploi de continuer à être indemnisés au-delà de la durée des droits à l'assurance chômage si la formation qu'ils ont entamée, sur prescription là encore de l'ANPE, n'est pas achevée. Il serait en effet absurde de devoir limiter la durée des formations proposées aux chômeurs, en l'alignant sur la durée de leurs droits à l'assurance chômage.
L'article 4, très technique, vise à donner une base légale au nouveau régime de prescription applicable aux contributions et aux allocations de l'assurance chômage, qui a été fixé par la convention.
L'article 5, enfin, autorise l'UNEDIC à verser à l'Etat 15 milliards de francs entre 2001 et 2002.
La convention d'assurance chômage aborde en effet la question dite de la « clarification des relations financières UNEDIC-Etat ».
Il est vrai que, à défaut d'être véritablement opaques, les relations financières entre l'Etat et l'UNEDIC sont complexes.
Ainsi, l'aggravation du chômage au début des années quatre-vingt-dix avait provoqué une dégradation rapide des comptes de l'UNEDIC, et l'Etat avait alors été dans l'obligation de soutenir financièrement le régime d'assurance chômage. La situation financière de l'assurance chômage s'est très sensiblement redressée depuis 1995, et les perspectives financières de l'UNEDIC apparaissent désormais bien plus favorables.
Dans ces conditions, l'Etat a souhaité que les partenaires sociaux introduisent dans la nouvelle convention d'assurance chômage une « clause de retour à meilleure fortune ». Il est d'ailleurs à noter que les deux conventions que le Gouvernement a refusé d'agréer étaient à la fois moins explicites et, surtout, moins généreuses pour l'Etat : la première ne comportait aucune disposition relative à ce sujet ; la seconde comprenait un article de principe qui allait en ce sens, mais sans prévoir d'engagement chiffré.
L'article 9 de la convention, article qui n'a d'ailleurs pas été agréé par l'arrêté du 4 décembre dernier, fixe les règles d'une telle clarification des relations financières entre l'UNEDIC et l'Etat.
Il prévoit ainsi le versement par l'UNEDIC à l'Etat de 7 milliards de francs en 2001, puis de 8 milliards de francs en 2002.
Il prévoit également le renoncement de l'UNEDIC au versement d'une subvention de 5 milliards de francs en octobre 2002, afin de rembourser les emprunts contractés par le régime d'assurance chômage.
Le présent article vise à donner une base légale à cet article 9 de la convention. En l'état actuel de la législation, je le rappelle, l'UNEDIC n'est en effet pas autorisée à verser une contribution au budget de l'Etat. En conséquence, le présent article autorise - sans l'y obliger, je le souligne - l'UNEDIC à verser à l'Etat 7 milliards de francs en 2001 et 8 milliards de francs en 2002.
Ces cinq articles ont été adoptés par l'Assemblée nationale sans véritable modification, mais dans un climat souvent houleux, on en conviendra. La commission des affaires sociales proposera d'ici quelques minutes au Sénat de faire de même, dans un climat, je l'espère, plus apaisé.
Mais je souhaiterais auparavant exprimer deux souhaits, deux craintes et deux regrets.
Le premier souhait part d'une constatation.
La mise en oeuvre des mesures prévues par la convention - et par le projet de loi - repose sur la seule ANPE, et leur efficacité dépendra donc, en définitive, de la capacité de cette dernière à se mobiliser. La commission des affaires sociales espère que l'ANPE pourra bénéficier du soutien de l'Etat, afin qu'elle puisse faire face à ses nouvelles missions dans les meilleures conditions. Il apparaît notamment nécessaire de revoir le contrat de progrès signé entre l'ANPE et l'Etat, qui porte sur la période 1999-2003, car son équilibre sera, à mon sens, profondément modifié par la nouvelle convention.
Le second souhait concerne, plus largement, la politique de l'emploi menée par le Gouvernement.
En signant la convention, les partenaires sociaux ont en effet consenti un effort tout particulier en faveur des demandeurs d'emploi relevant du régime d'assurance chômage. Ils ont également fait preuve de leur solidarité vis-à-vis des autres demandeurs d'emploi en élargissant le champ de l'indemnisation par l'UNEDIC. En cela, les partenaires sociaux ont amplement épuisé, me semble-t-il, le domaine de leurs compétences.
Il reste qu'aujourd'hui 58 % des demandeurs d'emploi relèvent non pas de l'assurance chômage, mais de la solidarité nationale. Il serait donc logique que l'Etat prenne à son tour ses responsabilités et intervienne vigoureusement en faveur du retour à l'emploi et de l'amélioration de la situation des chômeurs non indemnisés par l'UNEDIC. Pour ce faire, la convention du 1er janvier 2001 lui donne les marges de manoeuvre financières nécessaires, au titre précisément de la clarification des relations financières entre l'Etat et l'UNEDIC.
La commission des affaires sociales ne peut donc que souhaiter que l'effort consenti par les partenaires sociaux en faveur des chômeurs indemnisés s'accompagne d'un effort de même ampleur de l'Etat en faveur des chômeurs non indemnisés.
A ce propos, il importe notamment de veiller à une meilleure prise en compte des agents contractuels des collectivités locales et des autres fonctions publiques. Ces agents ne sont en effet pas affiliés, sauf exception, au régime d'assurance chômage. Dès lors, on ne peut que souhaiter qu'ils puissent également bénéficier des mesures d'aide au retour à l'emploi mises en oeuvre par l'ANPE, sinon il faudra prévoir une multitude de PARE et un dispositif à nombreuses vitesses. Se posera là un vrai problème, sauf si l'on décide de faire bénéficier les agents contractuels des fonctions publiques des mesures d'aide au retour à l'emploi ou de les priver du PARE et de leur laisser le bénéfice des indemnités anciennes, ce qui n'améliorerait cependant en rien leur situation.
Mes craintes rejoignent d'ailleurs mon dernier souhait.
Ma première crainte naît, là encore, d'un constat.
La convention du 1er janvier 2001 se traduit en effet par une substitution progressive des partenaires sociaux à l'Etat pour le financement de la politique de l'emploi.
Ainsi, en matière de formation des chômeurs, l'aide à la formation se substituera à l'actuelle allocation formation-reclassement. Or cette dernière est actuellement financée à concurrence de 41 % par le budget de l'Etat.
De la même manière, s'agissant du soutien personnalisé aux demandeurs d'emploi, l'UNEDIC financera l'ANPE en lieu et place de l'Etat : 3,1 milliards de francs devraient être consacrés à cette fin en année pleine, alors que le budget de l'agence est actuellement d'environ 8 milliards de francs. Les trois huitièmes, c'est tout de même beaucoup !
Au travers de ces exemples se profile un risque : celui du désengagement budgétaire de l'Etat. Il ne faudrait pas que la politique de l'emploi du Gouvernement en vienne à se résumer à un simple problème de financement des 35 heures.
Ma seconde crainte concerne l'affectation à venir des 15 milliards de francs versés par l'UNEDIC.
Les partenaires sociaux ont exprimé le souhait, dans le texte de la convention, que « cette ressource exceptionnelle soit affectée au financement d'actions en faveur des demandeurs d'emploi relevant du régime de solidarité ».
Je ne peux douter a priori de l'engagement du Gouvernement sur ce point, mais je constate que, en l'état actuel des choses, aucune mesure d'affectation n'est prévue.
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité nous a annoncé, lors de son audition, qu'elle n'envisageait pas de créer un fonds de concours. Cette procédure, qui relève de la seule initiative du Gouvernement, est pourtant la seule qui permette d'assurer l'affectation de recettes non fiscales dans la plus totale transparence et dans le respect du cadre fixé par l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Je souhaiterais donc demander de nouveau pourquoi est écartée cette solution du fond de concours.
Aussi, au regard de cette incertitude et à titre conservatoire, la commission des affaires sociales présentera-t-elle au Sénat un amendement visant à apporter une réponse, ou tout au moins une précision, s'agissant de l'usage du versement de l'UNEDIC, afin qu'il soit conforme au voeu exprimé par les partenaires sociaux.
Si l'examen de ce projet de loi attise quelques craintes, il alimente aussi des regrets.
Mon premier regret tient aux procédures retenues par le Gouvernement, procédures qui risquent d'être lourdes de conséquences pour les demandeurs d'emploi.
Je regrette ainsi que le Gouvernement ait, par deux fois, refusé d'agréer les conventions conclues par les partenaires sociaux, reportant par là même de six mois l'application des nouvelles mesures en faveur du retour à l'emploi.
Je regrette également que le Gouvernement ait laissé passer près de cinq mois entre sa décision d'agréer la convention et le dépôt du présent projet de loi, alors même que celui-ci doit être définitivement adopté avant la fin de la session.
Je regrette enfin que le Gouvernement ait choisi de « noyer » ces dispositions dans un projet de loi portant diverses mesures d'ordre social, comme l'a rappelé M. le président de la commission des affaires sociales, alors qu'elles auraient à l'évidence mérité de faire l'objet d'un texte de loi spécifique. Sans doute faut-il y voir le souci de ménager certains groupes de la majorité plurielle ou de s'assurer de leur soutien. Il n'en reste pas moins que le dépôt d'un projet de loi distinct aurait peut-être permis une adoption conforme de celui-ci par les deux assemblées dès la première lecture ; cela aurait alors permis l'entrée en vigueur de la convention dans de bien meilleures conditions. Mon second regret touche à l'interprétation inutilement restrictive de la convention que fait parfois le projet de loi.
Cette interprétation restrictive est tout particulièrement évidente en ce qui concerne les conditions d'attribution des aides au retour à l'emploi. La convention du 1er janvier 2001 renvoyait leur définition au dialogue social, mais le Gouvernement a choisi d'introduire dans le projet de loi de nouveaux critères d'attribution non prévus par la convention : ainsi en va-t-il de la nature des contrats de travail, des conditions de cumul avec d'autres aides à l'emploi, de la situation de l'employeur vis-à-vis de l'emploi et du licenciement.
Or non seulement ces critères sont parfois en contradiction avec l'esprit et la lettre de la convention, mais ils n'apparaissent pas non plus toujours pertinents.
Ainsi, l'aide à la mobilité et l'aide dégressive à l'employeur sont réservées aux seules embauches en contrat à durée indéterminée ou en contrat à durée déterminée d'au moins douze mois. Pourquoi exclure, par exemple, les embauches sous contrat de travail temporaire d'une durée d'au moins douze mois ? La cohérence est donc bien incertaine. Le Sénat, monsieur le secrétaire d'Etat, aimerait vous entendre sur ce point.
De même, s'agissant de l'aide dégressive, la condition de non-cumul avec d'autres aides à l'emploi apparaît si curieuse que même la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale - peu suspecte d'opposition au dispositif du Gouvernement - avait envisagé, dans un premier temps, de la supprimer.
Pour autant, dans le souci de garantir l'application rapide de la convention et après l'audition de l'ensemble des partenaires sociaux gestionnaires de l'UNEDIC, la commission des affaires sociales n'a pas jugé utile de vous proposer ici une nouvelle rédaction du projet de loi. Il est vrai que ces interprétations restrictives, si elles apparaissent à l'évidence abusives, ne conduisent pas à une dénaturation des propositions issues du dialogue social.
Voilà pourquoi la commission des affaires sociales vous propose, mes chers collègues, d'adopter conformes les articles de ce titre Ier ou, tout au moins, les quatre articles conditionnant l'application des nouveaux dispositifs de retour à l'emploi dès le 1er juillet prochain puisque, sur le cinquième, vous le savez, nous avons déposé un petit amendement de précision. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 6 du projet de loi insère neuf nouveaux articles dans le code de la sécurité sociale. Son importance est majeure, puisqu'il crée le fonds de réserve pour les retraites. Certes, ce fonds existait déjà depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, mais sous la forme provisoire d'une « deuxième section » comptable du fonds de solidarité vieillesse.
La commission des affaires sociales avait considéré, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, qu'il était urgent de doter le fonds de réserve d'un véritable statut. Elle n'était pas isolée dans cette démarche, puisque notre excellent collègue Claude Domeizel avait également déposé un amendement dont l'ambition était similaire. Sur la démarche à adopter, nous avions donc une position presque consensuelle.
M. Claude Domeizel. Cela arrive !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Dans ces conditions, nous ne pouvons que nous féliciter de la présence du titre II dans ce projet de loi, encore que le sujet aurait mérité un projet de loi autonome, il faut le reconnaître.
Toutefois, la commission des affaires sociales souhaite rappeler que le fonds de réserve ne constitue en aucun cas une solution pour contribuer de manière efficace au financement des retraites : les difficultés que rencontre le Gouvernement pour l'augmenter ne font que confirmer ce constat.
De plus, le projet de loi, par ses absences et ses déficiences, montre que des questions fondamentales restent à trancher.
Je souhaiterais d'abord rappeler que le fonds de réserve est une réponse largement incomplète au défi du financement des retraites.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous le savez bien : « gouverner, c'est prévoir ». Pourtant, le dossier de la réforme des retraites, qui devait reposer sur le triptyque « diagnostic, dialogue, décision », est désormais enterré...
M. Claude Domeizel. Comment ça ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Domeizel, je vais vous rafraîchir la mémoire, si besoin est !
Le Premier ministre, le 21 mars 2000, a fait connaître ses « grandes orientations », qui ne répondent en rien au défi majeur du financement des retraites.
Sous la pression d'un diagnostic - celui du rapport Charpin - qui confirmait, soit dit en passant, ceux qui avaient déjà été formulés en 1991 et en 1995, le Gouvernement se devait de prendre des initiatives, sauf à faire apparaître clairement qu'il avait définitivement renoncé à ouvrir le dossier des retraites.
La création d'une commission, le « conseil d'orientation des retraites », chargée d'être « vigilante » et de remettre un rapport en 2002 ne pouvait, à l'évidence, à elle seule, persuader les Français que l'avenir de leur retraite était garanti.
Un rapport tous les trois ou quatre ans, de 1991 à 2002, ne saurait, en effet, mes chers collègues, être raisonnablement considéré comme une médecine décisive.
La création d'un fonds de réserve constitue donc, dans l'immédiat, la seule mesure concrète prise par le Gouvernement depuis 1997 ; et nous sommes en 2001 !
M. Claude Domeizel. Ce n'est pas la seule !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Ce fonds, qui devait être alimenté à hauteur de 1 000 milliards de francs selon M. Jospin, devait avoir pour « vertu pédagogique » de frapper l'opinion et donner ainsi l'illusion que, de rapport en rapport, de concertation en concertation, le Gouvernement avait engagé une véritable réforme des retraites.
Mais il convient de rappeler que ce montant, à supposer qu'il soit atteint, ne correspond en rien aux besoins de financement des régimes.
Ces besoins de financement, ils viennent d'être rappelés, le 17 mai dernier, par le conseil d'orientation des retraites. Les chiffres communiqués, qui s'appuient sur une hypothèse d'un taux de chômage de 4,5 %, comme vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, ne font que confirmer ceux du rapport Charpin. Il n'y a donc rien de neuf en la matière.
A titre d'exemple, le déficit de la seule caisse nationale d'assurance vieillesse atteindrait 71,6 milliards de francs en 2020. Je rappelle que son déficit cumulé serait compris, à cette même date, entre 600 et 920 milliards de francs, soit la majeure partie des 1 000 milliards de francs annoncés.
Affirmant, tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, que, grâce à l'action du Gouvernement, la situation de la caisse nationale d'assurance vieillesse s'était améliorée, vous avez cité deux chiffres : en 1997, à votre arrivée au pouvoir, la CNAV accusait un déficit de cinq milliards de francs ; aujourd'hui, en 2001, elle accuse un résultat excédentaire de trois milliards de francs. Et vous en tirez la conclusion que l'action du Gouvernement a été tout à fait dynamique et positive, et que les mesures prises ont permis d'améliorer la situation.
M. Claude Domeizel. C'est vrai !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous omettez de dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que ces bons résultats sont la conséquence mécanique de l'évolution des différentes tranches d'âge. Aujourd'hui, ce sont les tranches d'âge les plus creuses qui arrivent à l'âge de la retraite, ce qui explique l'essentiel de ce résultat positif. D'ailleurs, il suffit de se tourner vers les représentants de la CNAV, son directeur ou son président, pour en avoir la confirmation.
Je ne dis pas que l'amélioration de la situation conjoncturelle sur le plan économique et social n'a pas apporté une part contributive à cette amélioration, mais elle n'explique pas, à elle seule, cette situation. Il existe d'autres éléments que vous vous gardez bien d'avancer parce que, évidemment, ils ne sont pas de nature à valoriser l'action ministérielle sur le dossier des retraites.
Mes chers collègues, le rapport de contrôle sur le fonds de réserve que j'ai eu l'honneur de présenter devant la commission le 19 avril dernier a montré que la perspective des « 1 000 milliards de francs » se fondait sur des hypothèses macro-économiques favorables, et sous réserve d'une stricte indexation sur les prix de l'évolution des pensions.
Ce rapport a analysé également les différentes « ponctions » effectuées sur le fonds de solidarité vieillesse, qui est le principal « contributeur » du fonds de réserve, pour financer les trente-cinq heures, pour financer l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA - vous avez eu l'objectivité de le dire, monsieur le secrétaire d'Etat - mais également - vous ne l'avez pas indiqué, monsieur le secrétaire d'Etat, et je me permets de le rappeler à nos collègues - le règlement de la dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires de l'association générale des institutions de retraites des cadres, l'AGIRC, et de l'association des régimes de retraites complémentaires, l'ARRCO.
Tout le mécanisme de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a été de tenter de compenser ces ponctions par de nombreux abondements. A vous entendre, vous avez trouvé la formule qui permet de ne pas « déshabiller » le fonds de solidarité vieillesse. En fait, vous avez transféré sur la branche « famille » une partie des dépenses qui étaient à la charge du FSV, à savoir les bonifications pour enfants. Vous n'avez donc fait que déplacer le problème du fonds de solidarité vieillesse vers la branche « famille », une branche qui est aujourd'hui excédentaire mais qui sera, à moyen terme et à long terme, dans une situation déficitaire. Ainsi, vous avez habillé Paul pour déshabiller Pierre et bouché un trou en un creusant un nouveau !
C'est que la compensation décidée ne va pas égaler la totalité des prélèvements effectués, et même si la branche « famille » prend en charge les majorations de retraite pour âge, jusqu'alors financées par la branche « vieillesse », les ponctions opérées, qui sont de l'ordre de 540 milliards de francs - sans compter l'effet sur les produits financiers - dépassent les compensations, qui ne sont que de 415 milliards de francs.
Donc, monsieur le secrétaire d'Etat, la mesure que vous avez prise se traduit par un manque pour le fonds de solidarité vieillesse, donc pour le fonds de réserve, puisque celui-ci est alimenté par le produit des excédents du fonds de solidarité vieillesse.
Dans mon rapport écrit, j'insistais en outre sur le démarrage particulièrement « poussif » du fonds de réserve, les prévisions affichées par les lois de financement de la sécurité sociale pour 2000 et 2001 n'étant pas respectées. Ainsi, le fonds de réserve est en retard sur son plan de marche, puisqu'il manquera, à la fin de l'année 2001, plus de 15 milliards de francs, en raison, notamment, de la « déconfiture » des licences UMTS. Or le respect scrupuleux de l'échéancier des abondements du fonds est fondamental, car le retard ne se rattrape jamais.
D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, je relève dans vos propos liminaires que, d'ici à la fin de l'année 2001, grâce au produit des licences UMTS, nous devrions compter sur 50 milliards de francs, au lieu des 38 milliards de francs affichés en loi de financement de la sécurité sociale. Vous oubliez de dire que, dans cette même loi de financement, était prévu un abondement d'un niveau bien supérieur à celui que vous avez annoncé aujourd'hui ! Si ce qu'avait annoncé M. le Premier ministre en mars 2001 avait été respecté, nous aurions disposé, à la fin de l'exercice 2001, non pas de 50 milliards de francs mais d'environ 76 milliards de francs, voire de 78 milliards de francs.
Donc, non seulement un retard est pris en ce qui concerne l'abondement du fonds de réserve, mais ce retard va avoir des conséquences négatives sur le niveau des produits financiers qui auraient dû résulter du placement des sommes : les 50 milliards de francs ne produiront évidemment pas les mêmes intérêts que les 78 milliards de francs.
Donc, le montant des produits financiers diminue de dix milliards de francs, alors même que le montant des abondements augmente de 190 milliards de francs par rapport à la prévision initiale. C'est bien l'aveu que le fonds de réserve connaît un retard dans son plan de marche, puisque le montant des produits financiers sera d'autant plus important que les abondements l'auront été en début de période, ce qui ne sera pas le cas.
Mais, par un grand mystère, les excédents du fonds de solidarité vieillesse et de la C3S progressent miraculeusement, passant de 400 milliards de francs à 650 milliards de francs.
M. le Premier ministre n'avait donc pas été informé de cette croissance que l'on vient de découvrir, comme par hasard, au moment où ce projet de loi vient en discussion devant le Parlement, à la suite d'ailleurs de l'examen sur pièces et sur place que nous avons fait effectué tant au ministère de l'économie et des finances qu'au ministère de l'emploi et de la solidarité...
Lors de son audition par la commission des affaires sociales, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, en est toutefois restée à l'objectif des 1 000 milliards de francs alors que le chiffre de 1 180 milliards de francs avait été présenté au conseil d'orientation des retraites.
S'agit-il d'un changement d'hypothèses économiques ?
Les projections de mars 2000 reposaient déjà sur des hypothèses fort optimistes, notamment un taux de chômage de 4,5 %. Il est donc impossible de recourir une nouvelle fois à cette explication, censée justifier la « chute » des cotisations prises en charge par le FSV.
Les excédents du FSV auraient-ils été sous-estimés en mars 2000 ? Leur affectation au fonds de réserve aurait-elle reposé sur une clef de répartition demeurée secrète ?
J'ai demandé à Mme la ministre, lors de son audition par la commission, de présenter en toute transparence ces données ; elle m'a promis de me les communiquer ultérieurement. J'espère que vous êtes en possession de ces informations, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je ne les ai pas entendues tout à l'heure. J'imagine que, dans la réponse que vous ferez aux orateurs, vous nous apporterez les informations que Mme Guigou s'était engagée à fournir à la commission des affaires sociales au moment de l'examen du texte.
Le seul argumentaire oral dont nous disposons à la date d'aujourd'hui montre des exédents du FSV multipliables à l'infini. Je suis amené ainsi, mes chers collègues, à poser la question : s'agit-il d'une forme moderne de la multiplication des pains ?
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il faudrait l'utiliser en Afrique !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je vous renvoie à mon rapport écrit, où vous pourrez lire avec intérêt les commentaires que je fais à ce sujet.
Venons-en au dispositif lui-même prévu par l'article 6 du présent projet de loi.
Le texte frappe d'abord par ses déficiences, particulièrement inhabituelles pour un projet soumis à l'examen des assemblées.
Les régimes bénéficiaires du fonds seraient le régime général et les régimes alignés, l'ORGANIC, l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, et la CANCAVA, la caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale. Or, mes chers collègues, l'exclusion des autres régimes d'assurance vieillesse ne repose sur aucun fondement constitutionnel, compte tenu notamment des sources d'alimentation du fonds.
Compte tenu notamment des sources d'alimentation du fonds, le Gouvernement nous explique, dans ses réponses au questionnaire, qu'il s'agit des régimes ayant engagé une réforme en 1993.
Je me félicite au passage de cet hommage tardif à la loi de 1993, qui avait été présentée par M. Balladur ! Mais s'agit-il d'un critère suffisamment efficient ?
Les relations entre le directoire et le conseil de surveillance sont placées sous de curieux auspices.
L'article L. 135-8 prévoit que, sur proposition du directoire, « le conseil de surveillance fixe les orientations générales de la politique de placement des actifs du fonds. » Que se passe-t-il si le conseil de surveillance n'est pas d'accord ? Presque rien ! Le directoire présente une nouvelle proposition. Et si cette proposition n'est pas approuvée, « le directoire met en oeuvre les mesures nécessaires à la gestion du fonds. » Ce mécanisme, en dehors de son caractère particulièrement subtil, semble parfaitement inadéquat, vous l'admettrez, pour assurer un réel contrôle.
De manière générale, le conseil de surveillance n'est ni un organisme de contrôle ni un organisme décideur : est-il prévu - c'est un peu le sentiment que nous pouvons avoir - par simple souci d'affichage ?
Rien n'est envisagé pour assurer au fonds de réserve un statut « indépendant » des contingences politiques, contrairement à ce qui est affirmé : le directoire, qui a de fait tous les pouvoirs, est composé de trois membres nommés par le Gouvernement, le conseil de surveillance comprend notamment des représentants de l'Etat, etc.
Le respect des règles de déontologie imposées aux membres du directoire constitue à l'évidence un monument ; vous allez vous en rendre compte très rapidement.
L'article L. 135-12 prévoit ainsi, de manière sage, qu'aucun « membre du directoire ne peut délibérer dans une affaire dans laquelle lui-même ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il exerce des fonctions ou détient un mandat ou a un intérêt. » Nous ne pouvons qu'approuver.
Permettez-moi cependant de formuler une première remarque, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues.
Comme le président du directoire est par ailleurs le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, il lui sera à mon sens particulièrement difficile d'exercer pleinement ses fonctions. Les deux autres membres risquent, dans la plupart des cas, de délibérer seuls.
Mais, surtout, grave incohérence de ce texte, le président du directoire sera amené à s'informer lui-même des intérêts qu'il détient ou vient à détenir et des fonctions qu'il exerce ou vient à exercer dans une activité économique et financière.
Enfin, le respect des obligations et interdictions est du ressort du président du directoire : il devra ainsi contrôler lui-même s'il s'est informé correctement et suffisamment à temps ! Vous avouerez que c'est un peu cocasse.
La notion de « gestion administrative », dans l'acception que semble en donner le Gouvernement, est particulièrement impropre. En effet, ce dernier mélange visiblement la gestion interne de l'établissement, qui comprend la gestion informatique, la gestion des ressources humaines, avec la gestion budgétaire, la gestion comptable et la conservation des titres. Or, il importe de clarifier cette notion, afin d'apprécier en toute transparence le champ de l'intervention de la Caisse des dépôts et consignations.
Le texte frappe également par ses absences.
Il n'aborde pas la question centrale de la répartition entre régimes bénéficiaires, à partir de 2020, des sommes capitalisées dans le fonds de réserve. Les 1 000 milliards de francs seront-ils répartis en fonction des besoins des régimes ou au prorata de l'importance des régimes dans le système français de retraite ? Cette question pourra être, il est vrai, utilement précisée d'ici à 2020. Le projet de loi est donc un texte d'attente.
Le texte ne précise pas par ailleurs les règles prudentielles auxquelles doit obéir ce fonds, ce qui paraît particulièrement grave compte tenu de l'objectif affiché par le Gouvernement d'obéir aux « principes de prudence et de répartition des risques ».
La question de l'exercice des droits de vote du fonds de réserve semble « taboue ». Or elle présente à l'évidence un sens, à partir du moment où le fonds gérera « 1 000 milliards de francs » et sera nolens volens un « investisseur institutionnel » important.
Dans ces conditions, la commission des affaires sociales a décidé de vous proposer un schéma alternatif, garantissant au fonds de réserve son indépendance et sa transparence.
Les quinze amendements qu'elle a adoptés permettent de répondre à la plupart des questions laissées pendantes par la rédaction du projet de loi.
J'ajoute que ce dispositif sera utilement précisé, sur un certain nombre de points, par des amendements particulièrement pertinents de notre excellent collègue Jean Chérioux, que la commission a approuvés ce matin.
Voici les grandes lignes de ce dispositif.
Le fonds serait un établissement spécial, placé, comme la Caisse des dépôts et consignations, sous la surveillance et la garantie de l'autorité législative, se substituant à la « tutelle » ministérielle qui caractérise les établissements publics administratifs.
Sans aller peut-être jusqu'à une loi constitutionnelle, à laquelle faisait référence, là encore, notre excellent collègue Jean Chérioux, qui a évoqué la caisse d'amortissement de 1926, un statut « spécial » semble le moins que l'on puisse faire pour un fonds qui doit garantir les retraites des Français à compter de 2020.
Il est vrai que, si nous en avions eu le temps et si nous l'avions pu, l'idéal eût été une réforme constitutionnelle visant à garantir complètement l'alimentation du fonds, ses placements et le résultat de ceux-ci au profit du fonds de réserve pour les retraites des différents régimes.
Les régimes bénéficiaires ne seraient pas précisés, afin de n'interdire a priori à aucun Français la possibilité de bénéficier du concours du fonds de réserve. Si le texte était maintenu en l'état, nous pourrions nous poser la question du caractère anticonstitutionnel du dispositif prévu.
Les membres du directoire seraient nommés de manière solennelle, en raison de leur expérience et de leurs compétences professionnelles, par le Président de la République et les présidents des assemblées. Telle est la proposition que je vous soumets, au nom de la commission des affaires sociales.
Le conseil de surveillance bénéficierait de véritables pouvoirs de contrôle.
La notion de gestion administrative serait précisée et celle-ci serait confiée à la Caisse des dépôts et consignations, établissement placé depuis 1816 sous le sceau de la « foi publique ». Nous restons donc dans l'esprit souhaité à cet égard par le Gouvernement.
Nous nous félicitons du choix opéré par le Gouvernement, qui est de nature à rassurer les Français. Mais, dans ces conditions, il est évident que la caisse ne pourrait pas participer aux appels d'offre portant sur la gestion financière des ressources du fonds : ainsi serait-t-il prévu explicitement une véritable « muraille de Chine » pleinement efficace, à laquelle fait d'ailleurs souvent référence la Caisse des dépôts et consignations elle-même.
La description des règles prudentielles serait renvoyée à un décret en Conseil d'Etat, tandis que le texte législatif préciserait une notion de « ratios d'emprise », empêchant que le fonds ne puisse détenir plus de 5 % des actions en provenance du même émetteur, afin d'éviter qu'il ne se transforme en un actionnaire trop zélé du capitalisme français.
Le fonds ne doit servir qu'à une seule mission : contribuer au financement des retraites des Français. Il ne doit servir à rien d'autre, quels que soient les arguments utilisés pour faire des « exceptions » à cette règle d'or.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, telles sont les principales observations que souhaitait faire la commission des affaires sociales sur le titre II du projet de loi, relatif au fonds de réserve pour les retraites.
J'espère que l'argumentation que je viens de développer devant vous aura été suffisante pour vous convaincre de l'intérêt qu'il y aura à développer le dispositif alternatif que vous propose la commission des affaires sociales.
J'espère également que le Gouvernement aura été sensible à nombre d'arguments qui plaident en faveur d'une complète indépendance et transparence de la gestion du fonds de réserve. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jourdain, rapporteur.
M. André Jourdain, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le titre III du projet de loi est composé d'un seul article, l'article 7, qui prévoit de ratifier l'ordonnance du 19 avril 2001, relative à la transposition des directives « Assurance » aux mutuelles et à la réforme du code de la mutualité.
Avant d'analyser cette ordonnance, je souhaiterais rappeler en préambule que cette transposition a été un « long chemin semé d'embûches ».
Tout d'abord, le secteur de la mutualité a demandé dès l'origine son assujettissement aux directives « Assurance » de 1992.
Ces directives ont été transposées par loi ordinaire, dès 1993 et 1994, aux compagnies d'assurance et aux institutions de prévoyance, mais elles n'avaient toujours pas été transposées à la mutualité.
Les gouvernements successifs ont tenté, à de nombreuses reprises, de transposer ces directives aux mutuelles, en demandant des rapports : le rapport Bacquet en avril 1994, puis le rapport Rocard en avril 1999 ont ainsi étudié les pistes d'une transposition « adaptée » à la spécificité mutualiste mais respectant les règles édictées par Bruxelles.
Le choix d'une transposition « sèche » des directives a été écarté au bénéfice d'une refonte globale du code de la mutualité, permettant de prendre en compte, par le même texte, des demandes anciennes émanant du secteur mutualiste.
Alors même qu'un projet de loi avait été enfin préparé par le Gouvernement et présenté au Conseil d'Etat au début du mois de juillet 2000, la présentation de ce projet s'est transformé in extremis en une « communication relative à la réforme du code de la mutualité » précisant que le Gouvernement choisissait de procéder par ordonnances.
Le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer par ordonnances des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire, projet de loi pour lequel la commission des affaires sociales m'avait fait l'honneur de me nommer rapporteur pour avis, a été discuté à l'automne au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, avant de faire l'objet d'un accord en commission mixte paritaire.
L'ordonnance dont la ratification nous est demandée a été prise en application de l'article 4 de la loi du 3 janvier 2001.
Suivant les conclusions de la commission des affaires sociales, le Sénat avait adopté l'article autorisant l'habilitation. Notre commission avait estimé qu'il convenait de privilégier « l'impératif de rapidité ».
Mais cet accord s'appuyait sur une condition expresse : l'engagement d'un véritable débat lors de la ratification. En outre, la commission des lois et son rapporteur, M. Daniel Hoeffel, avaient été à l'origine d'un amendement à l'article 5 du projet de loi, devenu l'article 6 de la loi, réduisant de six mois à quatre mois le délai prévu pour prendre l'ordonnance.
Enfin, selon la loi, « des projets de loi de ratification des ordonnances « devaient » être déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du deuxième mois » à compter de l'expiration des quatre mois précédemment prévus.
Je suis amené à faire un court développement sur le contenu de l'ordonnance du 19 avril 2001.
Il convient de noter tout d'abord que le Gouvernement a respecté les délais fixés par la loi du 3 janvier 2001, puisque l'ordonnance a été prise le 19 avril 2001, voilà donc un peu plus d'un mois.
Cette ordonnance comprend neuf articles.
Je citerai plus particulièrement son article 1er, qui renvoie à la partie législative du code de la mutualité, présentée en annexe de l'ordonnance, les articles 4 et 5, qui précisent les conditions d'entrée en vigueur du code de la mutualité, et les articles 6 et 7, qui comprennent des dispositions relatives aux entreprises d'assurance régies par le code des assurances et aux institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale, qui sont dotées d'une nouvelle procédure de liquidation spéciale et d'un fonds de garantie propre au secteur paritaire. Ces articles instituent en outre une taxe visant à financer les frais de contrôle de la commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance.
Le nouveau code de la mutualité est composé de six livres, qui comprennent à la fois certaines dispositions actuellement en vigueur et de nouveaux articles réformant en profondeur le régime juridique des organismes mutualistes.
La lecture des 223 articles du code montre que ce texte mériterait d'être enrichi, précisé et modifié par le débat parlementaire. Ce sera le deuxième point de mon exposé.
La commission des affaires sociales doute tout d'abord de la stricte conformité du texte de l'ordonnance aux directives « Assurance » au regard de trois éléments : le principe de spécialité, la liberté de réassurance et la notion de contrat de substitution.
De manière générale, la délimitation précise des dérogations aux règles communautaires et, plus particulièrement, la définition des activités accessoires que pourraient continuer d'assurer les mutuelles d'assurance relèvent du pouvoir règlementaire. Or ces décrets sont actuellement en cours de rédaction et n'ont pas été transmis, par voie de conséquence, à Bruxelles. Nous n'avons aucune assurance sur leur « eurocompatibilité ».
Le Gouvernement a indiqué, en commission, que ces décrets « devraient traduire très pragmatiquement le dispositif législatif retenu » ; cette traduction « très pragmatique » risque toutefois d'être difficile à opérer en l'absence de travaux parlementaires et de tout dialogue, comme celui que vous évoquiez tout à l'heure, au moins avec notre assemblée.
Deux dispositions me paraissent hautement critiquables : la procédure d'agrément et la tenue du registre national des mutuelles par le conseil supérieur de la mutualité.
L'article 5 de l'ordonnance du 19 avril 2001 prévoit ainsi que les mutuelles, les unions et les fédérations qui ont été créées avant la publication de la présente ordonnance et qui n'auront pas accompli, dans un délai d'un an, les démarches nécessaires à leur inscription au registre national des mutuelles, tenu par le secrétariat général du conseil supérieur de la mutualité, seront purement et simplement dissoutes.
La sanction est à l'évidence disproportionnée. Il aurait été préférable de prévoir un mécanisme simplifié, précisé par décret en Conseil d'Etat, pour l'agrément de mutuelles dont l'existence peut parfois remonter à plus de cent ans.
Il est en outre curieux de confier cette tâche au Conseil supérieur de la mutualité, organe consultatif : la tenue d'un registre national par le greffe des tribunaux de grande instance semblait une solution juridiquement plus sûre.
Enfin, la composition du nouveau Conseil supérieur de la mutualité est fixée, selon l'article L. 411-3 du code, par décret en Conseil d'Etat. Il aurait été préférable de préciser dans la loi cette composition, compte tenu notamment du nouveau rôle qui est confié à cet organe.
D'autres dispositions appelleraient des modifications. L'articulation entre les systèmes fédéraux de garantie et le fonds de garantie contre la défaillance des mutuelles et des unions pratiquant des opérations d'assurance me paraît ainsi complexe.
S'agissant du fonctionnement des mutuelles, l'article L. 114-19 marque une confusion entre la notion de dirigeants salariés et celle de mandataires sociaux. La limite d'âge - soixante-dix ans - posée à l'article L. 114-22 paraît étrange compte tenu du mode d'élection, par l'assemblée générale, des administrateurs. L'article L. 114-26 me semble aller dans le sens d'une « professionnalisation excessive » des administrateurs en prévoyant un certain nombre de dérogations très larges au principe de gratuité des fonctions.
Enfin, et c'est une absence regrettable, le nouveau code de la mutualité ne comporte aucune disposition relative à la fiscalité des mutuelles.
La question de l'assujettissement des mutuelles à la taxe sur les conventions d'assurance ou de l'exonération des compagnies d'assurance sous réserve d'engagements de non-discrimination reste posée. D'autres exonérations fiscales sont en cause, comme l'a montré la lettre du 14 février dernier adressée par la commission au gouvernement français.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il serait bon, je crois, que vous précisiez les intentions du Gouvernement sur ce sujet sensible.
Après cette présentation rapide, et nécessairement rapide, de l'ordonnance du 19 avril 2001, il convient maintenant que le Sénat puisse prendre une décision.
La ratification de cette ordonnance nécessite un accord sur le principe de cette ratification « à la hussarde », comme l'a dit le président Delaneau, et un assentiment sur le fond.
Sur le principe, M. Jean-Jack Queyranne avait déclaré au Sénat, lors du débat sur le projet de loi d'habilitation : « Naturellement, au terme de la procédure, le Parlement sera amené à se prononcer sur les projets de loi de ratification que le Gouvernement déposera. Ces projets regrouperont les ordonnances par matière, ce qui permettra, lors de leur discussion, d'aborder les questions de façon plus précise encore. A cette occasion, chaque parlementaire pourra, bien sûr, exercer son droit d'amendement. »
Le Gouvernement n'était pas avare de promesses. Je cite encore : « Le recours à la procédure de l'ordonnance s'accompagne d'un engagement du Gouvernement à déposer et à inscrire à l'ordre du jour des assemblées un projet de loi de ratification donnant ainsi au Parlement la possibilité d'exercer son droit d'initiative pour réformer le code. »
La commission des affaires sociales doute du respect et du « cahier des charges » préconisé par M. Queyranne - un projet de loi par thème !...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est mal parti !
M. André Jourdain, rapporteur. ... et du Gouvernement, au regard de la présence, au sein d'un nouveau texte fourre-tout, assorti immédiatement de l'urgence et intervenant sur un nombre très important de sujets, d'un article autorisant cette ratification.
Sur le fond, comme j'ai pu vous en donner des exemples, le dispositif pris par l'ordonnance du 19 avril 2001 appelle un certain nombre d'interrogations et apparaît, à l'évidence, éminemment perfectible.
Dès lors, la commission des affaires sociales était réduite au choix de suggérer au Sénat ou la suppression pure et simple de cet article ou l'adoption d'une série d'amendements sur un certain nombre d'articles « stratégiques ».
Cette dernière option aurait cependant consisté à avaliser le « mauvais coup » fait au Sénat et à adopter conformes un certain nombre d'articles passés inaperçus. En effet, compte tenu des délais auxquels le Gouvernement astreint le Parlement, plus singulièrement les commissions chargées des affaires sociales, la commission n'a pas pu entreprendre le travail, nécessaire, consistant à auditionner l'ensemble des acteurs du monde de la prévoyance complémentaire.
Aussi la commission des affaires sociales a-t-elle été contrainte de revenir à la première solution, protestant sur le principe de cette atteinte aux droits du Parlement et montrant, sur le fond, son scepticisme à l'égard de la réforme engagée.
Telles sont les raisons, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, qui conduiront la commission des affaires sociales à proposer au Sénat l'adoption d'un amendement de suppression de l'article 7. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les dispositions du titre IV du présent projet de loi sont relatives à la jeunesse et à l'éducation populaire. Celles du titre V traitent de l'éducation et de la communication. Par ailleurs, et à l'occasion de l'examen du texte en première lecture, l'Assemblée nationale a adopté, dans le titre V, de nouvelles dispositions extrêmement variées.
Certains des articles des titres IV et V ont été délégués, au fond, à la commission des affaires culturelles. Il s'agit, notamment, de l'article 12, relatif aux compétences du conseil de direction de l'Institut d'études politiques de Paris, et de l'article 13, aménageant le dispositif anti-concentration applicable à la télévision numérique hertzienne terrestre. Comme il est d'usage en ce cas, je céderai la parole, sur ces articles, à nos éminents collègues de la commission des affaires culturelles.
La commission des affaires sociales est saisie, quant à elle, des articles 11, 15, 19, 20, 21 et 22. Il s'agit d'un ensemble hétéroclite qui, en interdisant toute tentative de synthèse, favorise, malheureusement, une énumération peut-être fastidieuse.
J'évoquerai tout d'abord l'article 11, qui vise à définir, dans le code de l'action sociale et des familles, une législation unifiée et actualisée pour l'ensemble des centres de loisirs accueillant des mineurs.
En effet, les modalités d'organisation et de fonctionnement de ces centres sont actuellement régies par des textes réglementaires parcellaires, et souvent différents selon la catégorie de centres concernés. Il est donc apparu opportun de procéder à la modernisation de cette réglementation. Les modifications ainsi proposées concernent à la fois les centres de vacances et de loisirs qui hébergent les mineurs et les centres de loisirs sans hébergement.
Cette refonte législative renforce ou complète les obligations déjà définies dans le cadre des textes réglementaires en vigueur. A l'exception des garderies périscolaires, ces centres de vacances ou de loisirs devront ainsi se doter d'un projet éducatif.
Par ailleurs, les personnes organisant l'accueil des mineurs seront soumises au régime de la déclaration préalable, auprès du représentant de l'Etat dans le département. Elles devront également, ainsi que les personnes exploitant des locaux où se déroule l'accueil, souscrire obligatoirement une assurance. Elles seront, de même, tenues d'informer les responsables légaux des mineurs de l'intérêt de souscrire un contrat d'assurance couvrant les dommages corporels.
L'article 11 élargit en outre la définition des incapacités professionnelles interdisant à une personne d'organiser un centre d'accueil pour mineurs, ou de participer à son organisation. Les infractions concernées sont ainsi définies de manière plus précise et plus étendue que dans les textes réglementaires actuels. De plus, ces incapacités professionnelles sont applicables dorénavant à toute personne intervenant, à quelque titre que ce soit, dans l'accueil des mineurs.
Par ailleurs, cet article renforce, d'une part, les sanctions pénales applicables en cas de non-respect de la réglementation et, d'autre part, le dispositif de surveillance de la conformité des conditions d'accueil des mineurs à cette réglementation. A l'instar de ce qui est déjà en vigueur en matière de contrôle des activités physiques et sportives, les inspecteurs de la jeunesse et des sports pourront ainsi être assermentés afin de procéder au constat des infractions éventuelles, en liaison, le cas échéant, avec un magistrat de l'ordre judiciaire, et dans le respect des principes généraux protégeant le domicile privé.
Enfin, le dispositif proposé dans l'article 11 donne une base légale aux pouvoirs de police administrative du représentant de l'Etat dans le département, qu'il s'agisse de prononcer une interdiction d'exercice à l'encontre des personnes participant à l'accueil des mineurs ou de décider la fermeture des locaux concernés.
Tel est, nécessairement résumé, le dispositif prévu par l'article 11 du projet de loi.
A l'occasion de sa discussion en première lecture à l'Assemblée nationale, des voix se sont élevées pour protester contre les contraintes ainsi mises à la charge des personnes ou des organismes responsables de centres d'accueil pour les mineurs. A l'examen, une telle appréciation paraît quelque peu exagérée dans la mesure où le dispositif législatif qui nous est aujourd'hui soumis reprend, en grande partie, des textes réglementaires déjà en vigueur.
Par ailleurs, en donnant davantage de cohérence aux règles applicables, cette législation permettra de répondre aux exigences croissantes des parents en ce qui concerne la sécurité de leurs enfants.
La commission des affaires culturelles, saisie pour avis sur cet article 11, partage d'ailleurs cette analyse puisqu'elle soumettra au Sénat d'excellents amendements visant à améliorer, sur certains points particuliers, le dispositif prévu.
La commission des affaires sociales vous proposera donc d'adopter cet article 11, sous réserve des amendements présentés par votre commission des affaires culturelles, auxquels elle souscrit entièrement.
L'article 15 est relatif, quant à lui, au régime juridique des réseaux de télécommunication à haut débit installés par les collectivités locales.
Puisque la responsabilité de cet article échoit à la commission des affaires sociales, je souhaiterais en dire quelques mots. Je fais, par avance, appel à votre indulgence en raison des aspects extrêmement techniques de ce dossier.
Afin de créer un environnement favorable à l'installation d'entreprises sur leur territoire, et compte tenu de l'absence constatée d'offres par les opérateurs traditionnels, diverses collectivités territoriales ont décidé, au cours des dernières années, de procéder elles-mêmes à l'installation de réseaux de télécommunication à haut débit. Il s'agit d'infrastructures dites de fibres noires ; cela signifie qu'elles sont installées par les collectivités territoriales, mais que leur exploitation est ensuite confiée à des opérateurs de télécommunication.
Afin de donner à ces infrastructures une base juridique incontestable, le Sénat avait adopté, à l'occasion du débat sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire de 1999, et sur proposition, notamment, de nos collègues Gérard Larcher et Pierre Hérisson, un dispositif législatif organisant ces installations dans un cadre équilibré. L'Assemblée nationale n'avait malheureusement pas suivi les propositions du Sénat : elle avait préféré adopter un autre dispositif, limitant singulièrement les initiatives des collectivités territoriales en ce domaine.
Devant les difficultés suscités par cette réglementation, le comité interministériel sur la société de l'information en date du 10 juillet 2000 a proposé de modifier, dans le cadre du projet de loi sur la société de l'information, ce dispositif dans un sens moins restrictif et contraignant.
Sans attendre, le Gouvernement a déposé, lors de la première lecture du présent projet de loi, un amendement visant à procéder aux modifications nécessaires. Ainsi présentée comme une initiative gouvernementale, cette nouvelle rédaction s'inspire en fait directement de la disposition adoptée par le Sénat, en 1999, lors de l'examen du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.
Deux nouvelles précisions sont toutefois apportées par le nouveau dispositif. Tout d'abord, autorisation est donnée aux collectivités territoriales de déduire du coût de location facturé aux opérateurs les subventions publiques qui peuvent être consenties dans certaines zones géographiques. Par ailleurs, les collectivités territoriales pourront mettre les infrastructures concernées à la disposition, non seulement des opérateurs, mais également d'utilisateurs finals.
La commission des affaires sociales se félicite de l'hommage ainsi rendu par le Gouvernement à l'initiative de nos collègues Gérard Larcher et Pierre Hérisson. Elle vous proposera donc d'adopter cet article 15.
Les autres articles adoptés par l'Assemblée nationale à la fin du titre V forment un ensemble pour le moins disparate. Pour y mettre de l'ordre, la commission vous proposera, en premier lieu, de les regrouper au sein d'un nouveau titre VI, intitulé, sans aucune prétention à l'originalité : « Dispositions diverses ». (Sourires.)
Le premier article de ce nouveau titre sera l'article 19 du projet de loi, qui vise à autoriser la prise en compte, dans le cadre des accidents de trajet définis par le code du travail, des accidents survenus à l'occasion d'un covoiturage régulier. Il s'agit d'une précision qui, sans être absolument indispensable, n'est pas contradictoire avec les dispositions du code du travail ou la jurisprudence définie, en ce domaine, par la Cour de cassation. En outre, le concept du covoiturage est aujourd'hui parvenu à l'âge de la maturité législative, notamment depuis le vote de la loi de 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie. La commission vous proposera donc d'adopter cet article 19.
Elle vous proposera également d'insérer, après l'article 19, le dispositif initialement prévu à l'article 6 bis du projet de loi. Par souci de cohérence, notre collègue Alain Vasselle, rapporteur du titre II dans lequel l'article 6 bis a été introduit à l'Assemblée nationale, vous en proposera la suppression. En effet, cet article 6 bis, relatif aux modalités du remplacement temporaire des pharmaciens titulaires d'officine, n'a aucun rapport avec l'objet du titre II, à savoir le fonds de réserve des retraites. En revanche, le dispositif prévu est, en tant que tel, utile et répond aux voeux des professionnels concernés. La commission des affaires sociales vous proposera donc de le réintroduire sous forme d'article additionnel après l'article 19.
En revanche, nous estimons inopportun d'autoriser, comme le prévoit l'article 20, les comités d'entreprise à verser, sur les ressources qui leur sont affectées, des subventions à des associations à caractère social ou humanitaire. Cette disposition ne pourrait que susciter les réserves, sinon la franche hostilité, des salariés dont le comité d'entreprise ne dispose pas nécessairement de moyens financiers abondants. Elle pourrait, en outre, placer les entreprises et leurs responsables dans des situations parfois délicates. La commission vous proposera donc la suppression de cet article 20.
L'article 21, qui résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement, vise à créer une nouvelle catégorie de société coopérative, à savoir la société coopérative d'intérêt collectif. Pour se faire, cet article, complexe et volumineux, introduit douze nouveaux articles dans la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, qui en compte actuellement quarante-cinq.
Faute de pouvoir procéder à un examen approfondi d'une innovation aussi importante pour le mouvement coopératif et associatif, et compte tenu de la désinvolture ainsi manifestée par le Gouvernement à l'égard du Parlement, la commission des affaires sociales vous proposera d'adopter un amendement de suppression de l'article 21. Je reviendrai plus en détail sur ce sujet important lors de la présentation de l'amendement en question.
Enfin, l'article 22 procède à la validation législative de mesures individuelles, concernant des enseignants ou des étudiants des écoles d'architecture, dont le fondement juridique, à savoir divers actes administratifs, a été annulé pour vice de forme. Il s'agit d'une mesure technique n'appelant aucune observation particulière, et la commission des affaires sociales vous proposera de l'adopter.
J'en ai ainsi terminé, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec la présentation des titres IV et V du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) M. le président. Nous allons maintenant interrompre nos travaux. Nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)