PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

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Charges communes - Etat B - Titres III et IV (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2004
Deuxième partie

INTEMPÉRIES DANS LE SUD DE LA FRANCE

M. le président. Mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, à l'ouverture de cette séance, et au nom du Sénat tout entier, permettez-moi de témoigner de notre solidarité et de notre sympathie à l'égard des victimes des terribles intempéries qui frappent durement le sud de la France.

Face aux inondations, parfois meurtrières, les élus locaux, notamment les maires, mais aussi les personnels, pompiers comme militaires, se trouvent, une fois encore, en première ligne sur le front de l'urgence, pour protéger les populations et porter secours aux sinistrés.

Après le drame, il faudra réparer les dommages, dans la mesure du possible : je souhaite que des moyens financiers soient rapidement mobilisés pour manifester aux victimes, en cet instant de détresse, la solidarité de la nation.

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est particulièrement mobilisé et, depuis trois jours maintenant, tous les moyens disponibles sont déployés.

M. le Premier ministre a, en particulier, activé le comité de gestion interministériel de crise, et les ministres concernés ont veillé par leur présence sur le terrain, mais également depuis Paris, à ce que les premiers secours puissent arriver rapidement.

J'ajoute que les premiers dossiers de demande de déclaration d'état de catastrophe naturelle ont d'ores et déjà été examinés avec la plus grande attention, notamment celui de Marseille.

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QUESTIONS D'ACTUALITÉ

AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Conformément à la règle posée à l'unanimité par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent, chacun, de deux minutes trente.

Chaque intervenant aura à coeur, par courtoisie, de respecter le temps de parole qui lui est imparti, afin que toutes les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission télévisée.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE

M. le président. La parole est à M. André Boyer.

M. André Boyer. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

M. René-Pierre Signé. Il n'est pas là !

M. André Boyer. Voilà deux mois, jour pour jour, les vingt-cinq chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union élargie lançaient solennellement à Rome les travaux de la conférence intergouvernementale chargée d'adopter la future Constitution européenne.

Ce rendez-vous attendu a révélé d'emblée combien l'exercice s'annonçait délicat et incertain. Tandis que les six pays fondateurs mettaient en garde contre toute tentative de « détricotage » du texte de la Convention, des divergences profondes sont apparues avec d'autres groupes d'Etats sur des points majeurs : système de vote au Conseil, composition de la Commission, extension de la majorité qualifiée, référence à l'héritage chrétien et approfondissement de la politique de défense.

On aurait voulu croire que les uns et les autres s'étaient simplement prêtés au jeu de rôles traditionnel d'un début de négociation. Malheureusement, après huit semaines de travaux, force est d'admettre que les chances sont faibles d'aboutir à un consensus au Conseil européen des 12 et 13 décembre.

L'accord sur la défense européenne intervenu à Naples, lors du « conclave » des ministres des affaires étrangères, ne saurait masquer en effet la persistance des blocages sur les autres points et l'isolement croissant des pays favorables au projet de la Convention.

Par ailleurs, cet accord, qui reprend le contenu de celui qui a été négocié la semaine dernière entre Paris, Londres et Berlin sur les coopérations structurées et la clause de défense mutuelle, ne fait aucune allusion à la capacité de planification et de conduite d'opérations, sans doute par souci de ménager nos relations avec les Américains, qui craignent un affaiblissement de l'Alliance atlantique avec l'émergence d'une défense européenne autonome. Mais ce volet de l'accord tripartite est crucial.

Je souscris, bien sûr, aux propos de M. de Villepin à l'issue du conclave : « Un échec de la conférence intergouvernementale ne manquerait pas d'affaiblir durablement l'Union européenne, mais nous ne pouvons nous satisfaire d'une Constitution au rabais. » Néanmoins, compte tenu du rapport de forces actuel, il paraît difficile d'envisager un succès lors du prochain sommet sans consentir à faire des concessions.

Quelles sont les limites, affichables aujourd'hui, que le Gouvernement s'est fixées ? L'introduction d'une « clause de rendez-vous » sur les points clés de la négociation pourrait-elle être une solution de compromis ? Dans ce cas, je crois que l'expression : « Constitution européenne », qui a fait naître chez les Français, notamment chez les jeunes, l'espoir d'une Europe ambitieuse et généreuse, deviendrait tout à fait impropre.

Au moment où nous nous apprêtons à autoriser la ratification du traité d'élargissement, et à six mois des élections européennes, vous comprendrez que les parlementaires comme les citoyens souhaitent avoir une idée de ce que sera la future architecture de l'Union.

M. René-Pierre Signé. En somme, c'est une question d'architecture !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord vous prier d'excuser mon collègue Dominique de Villepin, qui participait ce matin à une réunion ministérielle de l'OTAN qu'il a dû quitter en début d'après-midi pour rejoindre le Président de la République en Tunisie.

Vous avez rappelé les échéances décisives auxquelles est confrontée l'Europe, particulièrement l'élargissement de l'Union.

Le Sénat sera appelé, mercredi prochain, à autoriser la ratification du traité d'adhésion des dix nouveaux Etats membres. Cet élargissement commande une ambition nouvelle, pour une Europe que nous voulons plus efficace, plus démocratique, plus transparente.

L'oeuvre de la Convention européenne présidée par Valéry Giscard d'Estaing, ce projet de Constitution forgé dans des conditions remarquables de transparence et de démocratie, répond à cette ambition.

La Convention a proposé, vous le savez, plusieurs avancées très importantes : dans le domaine économique et social, dans le domaine culturel aussi, avec le maintien de la diversité culturelle, dans le domaine de la justice et de la sécurité publique et, enfin, dans le domaine institutionnel.

La semaine prochaine, à Bruxelles, vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, il s'agira de conclure la conférence intergouvernementale. Dans cette phase finale, chacun dramatise les enjeux. Mais la conférence avance, comme le montre le conclave de Naples auquel vous faisiez référence et qui a été l'occasion pour Dominique de Villepin de rappeler le plein soutien de la France au projet de la Convention et de progresser sur de très nombreux points, en particulier la défense.

M. René-Pierre Signé. Et le social ?

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat. Vous avez regretté l'absence de toute mention de la capacité de planification et de conduite d'opérations : c'est normal, car ce sujet ne relève pas de la Constitution, mais l'engagement du Gouvernement à son égard est total.

Je vous le confirme, la France n'acceptera pas une Constitution au rabais. L'attente est grande ; nous voulons que l'Europe y réponde ; nous croyons que les gouvernements seront au rendez-vous des peuples.

M. René-Pierre Signé. Référendum !

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat. Telle est notre ambition ; telle est notre volonté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

INONDATIONS DANS LE SUD DE LA FRANCE

M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.

M. Alain Dufaut. Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, à l'heure où je vous parle, des milliers de Provençaux et, depuis hier, des habitants du Languedoc-Roussillon vivent dans la détresse à cause d'inondations d'une intensité exceptionnelle, qui donnent à tous les systèmes de protection en place un aspect totalement dérisoire.

Le Rhône à 7,70 mètres, il est vrai que c'est du jamais vu, chez nous !

J'étais mardi soir, sur la plus grande île fluviale du Rhône, la Barthelasse, en Avignon - elle s'étend sur 650 hectares - pour évacuer, avec les pompiers, des centaines de familles qui abandonnaient leurs domiciles, leurs biens, leurs voitures, leurs récoltes, face à l'envahissement du Rhône.

Si la formidable mobilisation des secours, sur le terrain, est exemplaire, qu'il s'agisse des services de l'Etat, de l'armée, des pompiers, des collectivités locales, on n'en constate pas moins que les sinistrés sont à la fois abattus et excédés, car, l'an dernier, en septembre 2002, ils ont vécu le même drame dans la vallée du Rhône. Souvenez-vous d'Aramon ! La fréquence des inondations tend, hélas, à augmenter. N'oublions pas non plus que le Vaucluse a connu la catastrophe de Vaison-la-Romaine en septembre 1992.

Madame le secrétaire d'Etat, cette mobilisation, forte et collective, doit s'inscrire dans le long terme. Il ne suffit pas de colmater les brèches dans l'urgence ; il faut aussi travailler sur la prévention.

Dans mon canton, sur l'île de la Barthelasse, par exemple, les syndicats de digues montent des dossiers pour conforter les digues, les rehausser, créer des chemins de sécurité pour l'évacuation des populations. Les collectivités locales, de leur côté, s'engagent sur les financements et les études préalables. Cependant, la validation de ces dossiers par les services responsables, et principalement par la Compagnie nationale du Rhône, la CNR et par Voies navigables de France n'intervient quasiment jamais. On nous impose des études hydrauliques sans fin, financées par les collectivités locales.

Franchement, nous avons le sentiment de faire face à une certaine obstruction, et cela, les populations ne peuvent plus l'admettre.

Quant au dragage du fleuve, qui incombe à l'Etat, personne ne veut prendre la décision de l'entreprendre, et pourtant, tout le monde sait que le Rhône doit être dragué pour assurer une meilleure fluidité.

M. René-Pierre Signé. Que de critiques !

M. Alain Dufaut. Seul l'établissement public Territoire Rhône essaie d'être concret et soutient les collectivités.

En fait, nous sommes convaincus que l'entretien d'un fleuve comme le Rhône et sa gestion en période de crue doivent être considérablement revus. Les catastrophes se succèdent année après année ; les populations locales et les élus locaux ont le sentiment que rien ne bouge.

M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas fini !

M. Alain Dufaut. Face à ce dramatique constat, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour remédier à cette situation et donner enfin un signe d'espoir à toutes les populations concernées ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. La catastrophe finale, c'est l'UMP !

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Tokia Saïfi, secrétaire d'Etat au développement durable. Monsieur Signé, la prévention est affaire d'anticipation des années en arrière : nous sommes donc tous concernés par le drame que les populations vivent aujourd'hui.

Monsieur Dufaut, vous avez raison d'insister sur la nécessité de prévenir les inondations.

Comme l'a dit M. Jean-François Copé, le Gouvernement et tous les services de l'Etat se sont mobilisés ces derniers jours pour sauver des vies humaines. Malheureusement, nous dénombrons cinq victimes.

Plus de 20 000 personnes ont été mises en sécurité, et je tiens à rendre hommage à la sécurité civile, car plus de 7 000 agents sont actuellement sur le terrain.

Monsieur le président, vous nous avez interpellés sur les moyens financiers ; je tiens d'ores et déjà à vous annoncer que M. le Premier ministre a débloqué hier 12 millions d'euros.

M. René-Pierre Signé. Oh là là !

Mme Tokia Saïfi, secrétaire d'Etat. Au-delà de cette mobilisation, la multiplication des phénomènes climatiques exceptionnels impose de développer une vraie politique de prévention, vous avez raison.

C'est précisément ce à quoi s'est attaché le ministère de l'écologie et du développement durable avec le vote, en juillet dernier, de la loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

Nous avons également doté de moyens humains, financiers et matériels nos services d'annonces des crues pour les transformer en services de prévision des crues. Le service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations, le SCHAPI, installé à Toulouse, comporte des personnels de très haut niveau technique.

Enfin, en avril dernier, nous avons demandé au préfet coordonnateur du bassin Rhône-Méditerranée-Corse de piloter la mise au point des maîtrises d'ouvrages du programme de prévention des inondations sur le bassin du Rhône et de les organiser, comme nous l'avons fait pour la Loire, il y a quelques années, et pour la Saône, en juin dernier. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

SUITES RÉSERVÉES À « L'AMENDEMENT GARRAUD »

SUR LE DÉLIT D'INTERRUPTION INVOLONTAIRE

DE GROSSESSE

M. le président. La parole est à Mme Yolande Boyer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Yolande Boyer. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne l'interruption involontaire de grossesse, nouveau délit créé au détour d'un amendement qui n'a rien à voir avec le texte concerné, à savoir la lutte contre la grande criminalité, et que votre ministre de la justice a accepté.

Ce n'est d'ailleurs pas la première tentative. La précédente avait eu lieu il y a six mois. Fort heureusement, la Haute Assemblée avait rejeté la disposition qu'on lui proposait.

De quoi s'agit-il, sur le fond ?

Il s'agit d'utiliser la douleur de femmes victimes d'un avortement à la suite, par exemple, d'un accident de la route pour modifier en profondeur un pan entier de notre droit.

Ce texte donne ainsi au foetus un statut juridique autonome en le reconnaissant comme une personne.

Que vous l'admettiez ou non, vous ouvrez ainsi une brèche dans le difficile équilibre obtenu par la loi Veil. Il n'y a qu'à voir la satisfaction des associations anti-avortement, qui n'ont jamais désarmé et qui reprennent du poil de la bête ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Vous remettez en cause les droits des femmes et le long combat des associations depuis les années soixante-dix.

Mme Odette Terrade. Absolument !

Mme Yolande Boyer. Enfin, vous mettez les médecins en danger. Leur responsabilité risque d'être engagée face à des problèmes liés à un examen ; je pense, par exemple, à l'amniocentèse.

Cet épisode est une fois de plus révélateur de votre méthode de gouvernement. A peine la décision est-elle prise qu'elle est déjà reniée !

En spécialiste du tango, un pas en avant, deux pas en arrière,...

M. Christian Cointat. Ce n'est pas le tango, cela !(Sourires.)

Mme Yolande Boyer. ... le garde des sceaux lance maintenant une concertation, certes, mais après le vote. Pourquoi ne pas l'avoir fait avant ? Les termes du débat étaient connus depuis plusieurs mois !

Je pourrais citer d'autres exemples, dans d'autres domaines, d'utilisation par le Gouvernement de la méthode du « ballon d'essai » : je lance, et j'attends le retour !

Nombreux sont nos concitoyens qui ont envie de vous dire : assez de cafouillages et de dérapages ! Mais quelle image donnez-vous de l'action politique !

Il y aurait encore beaucoup à dire, mais le temps est compté. J'en viens donc à ma question. (Ah ! sur les travées de l'UMP.)

Elle est claire, nette et précise : allez-vous, oui ou non, retirer purement et simplement non seulement pour aujourd'hui, mais aussi pour demain, ce texte inutile et inacceptable sur l'interruption involontaire de grossesse ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la sénatrice, personne ne peut penser un seul instant que le Gouvernement veuille remettre en cause le droit à l'IVG. (Bravo ! et applaudissements sur les travées l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Simon Sutour. Oh si ! Il y a toutes les raisons de le penser !

M. Robert Bret. Il semble que ce soit l'objectif !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Il s'agit là d'un acquis irréversible et d'une liberté fondamentale dont je me sens aussi, en titre, garante, puisque je suis en charge des droits de la femme. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Simon Sutour. Le titre ne suffit pas !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Au demeurant, M. le garde des sceaux, Dominique Perben, a immédiatement fait référence à cette loi, qui est fondamentale, lors de l'examen de l'amendement en question.

Cependant, c'est vrai, des ambiguïtés demeurent sur cette disposition d'initiative parlementaire. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo. Cet amendement, nous n'en voulons pas !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Je suis sensible à ces ambiguïtés, et le Gouvernement aussi.

M. René-Pierre Signé. Le ministre l'a soutenue, cette disposition !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. C'est pourquoi - et c'est une méthode qui est ouverte, transparente et intelligente (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Approbations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Gournac. Exactement !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. ... la concertation a été engagée avec les associations...

Mme Nicole Borvo. On vote un amendement et on mène la concertation après !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. ... pour que, effectivement, un éclairage utile soit apporté et permette de concilier une loi qui, je le répète, est fondamentale et constitue un acquis irréversible. (Eh oui ! sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Mahéas. C'est une loi... pour l'instant !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. C'est un acquis irréversible. Comment faut-il que le vous le dise ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En retirant cette disposition !

Mme Nicole Borvo. Vous le remettez en cause à l'occasion d'un texte qui traite de la grande criminalité !

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Il s'agit donc de concilier cet acquis irréversible avec une juste interrogation, puisque vous avez vous-même évoqué le drame que connaissent certaines de ces femmes.

Madame la sénatrice, je puis vous assurer que, à titre personnel, je suis particulièrement sensible à ce sujet. J'ai d'ailleurs réuni hier les membres de la commission permanente du conseil supérieur de l'information sexuelle afin que toutes les ambiguïtés soient levées dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socilaiste et du groupe CRC.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Retirez l'amendement !

LUTTE CONTRE LE SIDA

M. le président. La parole est à M. Serge Franchis.

M. Serge Franchis. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé.

La seizième journée mondiale de lutte contre le sida a offert l'occasion d'actualiser notre connaissance de l'état de progression de cette pandémie.

Je rappellerai quelques chiffres : 40 millions de séropositifs dans le monde, dont les trois quarts en Afrique et 7,5 millions en Asie ; 11 millions d'enfants africains orphelins, 20 millions en 2010 ; un décès toutes les dix secondes ; 14 000 infections quotidiennes ; une espérance de vie inférieure à trente ans dans tel ou tel Etat. Or 50 000 Africains seulement auraient accès aux soins.

Le plan d'envergure annoncé par l'Organisation mondiale de la santé, qui vise à mettre sous traitement trois millions de malades d'ici à 2005, bien qu'il soit insuffisant, est un signe d'espoir et de progrès que l'implication de bailleurs de fonds, l'arrivée des médicaments génériques et la baisse du prix des traitements rendent crédible.

Jusqu'ici, la volonté politique de la communauté internationale a fait défaut. Le directeur de l'OMS rappelle que « la prévention et le traitement du sida constituent peut-être la tâche la plus difficile à laquelle le monde ait jamais été confronté ».

En France, après six années consécutives de baisse, le nombre de nouveaux cas de sida ne diminue plus. Quant aux cas d'infection par le VIH diagnostiqués, ils s'établissent à 3 000 entre le mois de mars et le 15 novembre dernier.

Dès lors, ma question est la suivante : devant cette situation extrêmement préoccupante - selon les termes mêmes d'une déclaration récente du Président de la République - qui mobilise d'importants moyens de nos services de santé, n'envisagez-vous pas, monsieur le ministre, dans le cadre de votre politique de prévention, de lancer une campagne de communication qui s'inscrive désormais de manière quasi permanente dans l'univers quotidien de la population, en particulier des jeunes, qui, connaissant désormais l'efficacité des trithérapies, a pu être conduite à négliger l'usage du préservatif ?

En outre, pensez-vous pouvoir renforcer le dépistage et la prise en charge des personnes contaminées originaires d'Afrique subsaharienne, qui sont souvent en situation de précarité dans notre pays ?

Pouvez-vous, enfin, indiquer à la Haute Assemblée quelle est la part d'engagement de la France dans la mobilisation internationale ainsi qu'en matière de recherche publique ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Jean-François Mattei qui comme vous le savez, accompagne le Président de la République en Tunisie. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Sueur. Pour défendre les droits de l'homme ? (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Henri de Raincourt. Et Mitterrand, qu'a-t-il fait ?

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Vous n'êtes jamais allés en Tunisie, vous, avec le gouvernement précédent ? (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie ! Seule Mme le secrétaire d'Etat a la parole.

Ne vous laissez pas interrompre, madame.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Monsieur Franchis, je partage votre analyse : la situation est très préoccupante. La lutte contre le sida doit impérativement rester une priorité forte de la politique de santé publique.

Cette année, malgré un contexte économique difficile, Jean-François Mattei a tenu à ce que le budget de santé publique consacré à la lutte contre le VIH soit reconduit en totalité, à hauteur de 64 millions d'euros. Il en sera de même pour l'année 2004.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il aurait fallu l'augmenter !

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Le succès de notre politique réside - ce point est très important - dans notre capacité à accentuer nos efforts en direction des publics les plus exposés tout en maintenant la vigilance du grand public, en particulier des jeunes.

L'année dernière, la campagne télévisée portait sur l'incitation au dépistage et s'adressait directement aux personnes les plus exposées. Elle a permis de voir augmenter le recours au dépistage ; de même, les appels des migrants d'Afrique subsaharienne à Sida Info Service sont en progression de 73 %. Cette campagne a été rediffusée en juillet 2003.

Par ailleurs, le 27 novembre dernier, le ministre de la santé a présenté la nouvelle campagne, qui porte sur la promotion du préservatif et vise à inscrire celui-ci dans l'univers quotidien. Cette campagne est en cours de diffusion depuis le 28 novembre et se poursuivra jusqu'au 18 décembre : en moyenne, 90 % de la population verra ces spots plus de dix fois.

Elle sera accompagnée de différentes actions visant à promouvoir l'accessibilité des préservatifs masculins et féminins.

En outre, toujours à la demande du ministre de la santé, plusieurs hôpitaux ont mis en place des consultations de prévention s'adressant aux personnes séropositives et à leurs partenaires.

Enfin, le partenariat instauré entre les ministères de la santé, de l'éducation nationale et de l'agriculture vient d'être renforcé par le contrat-cadre de partenariat en santé publique, qui prévoit des actions dans le domaine de l'éducation à la sexualité, de la prévention des infections sexuellement transmissibles, du sida et des grossesses non désirées.

M. René-Pierre Signé. Rideau !

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Pour terminer, monsieur le sénateur, je préciserai que, sur le plan international, la solidarité de notre pays s'est manifestée depuis plusieurs années par un engagement fort de la France en faveur de l'accès aux traitements des pays en voie de développement. Le ministre de la santé a également soutenu le programme ESTHER - Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau contre le sida -, dont Bernard Kouchner vient d'accepter la présidence. Enfin, le Président de la République lui-même a annoncé récemment le triplement de notre contribution annuelle au Fonds mondial contre la tuberculose, le paludisme et le sida.

Vous le voyez, il n'est pas question de relâcher notre effort et de laisser s'essouffler la lutte contre le sida, ni sur le plan national ni sur le plan international. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées de RDSE.)

M. René-Pierre Signé. Elle a besoin d'encouragements !

INTÉGRATION DES HANDICAPÉS

AU SEIN DES UNIVERSITÉS

M. le président. La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, dans le cadre tant de l'« année européenne des personnes handicapées » que de la prochaine réforme de la loi de 1975, souhaitée par le Président de la République, un projet d'intégration en direction des étudiants handicapés a retenu toute mon attention.

Il s'agit du projet de création d'une résidence universitaire « intégrative » sur le campus de Nanterre, soutenu par l'association Soutien-entraide-dévouement, dont l'objectif est de permettre à une vingtaine d'étudiants lourdement handicapés de poursuivre leurs études à l'université tout en disposant d'un hébergement adapté.

Je rappelle à cet égard qu'il n'existe actuellement, dans toute la région parisienne, aucun logement adapté dans une quelconque résidence universitaire ou sur un campus étudiant. Pourtant, le nombre de jeunes handicapés accédant à l'université a plus que doublé en dix ans.

Cette absence de logements met de nombreux étudiants handicapés dans l'obligation de quitter leur région d'origine pour aller faire leurs études ailleurs, ou d'y renoncer purement et simplement ! Ainsi, de nombreux jeunes, qui, souvent au prix d'efforts considérables, sont parvenus jusqu'au baccalauréat, voient se refermer devant eux les portes de l'intégration universitaire, et donc, plus tard, l'intégration sociale et professionnelle, et cela pour un simple problème d'hébergement.

Monté en partenariat avec la faculté de Nanterre, le CROUS - centre régional des oeuvres universitaires - de Versailles, le conseil régional d'Ile-de-France et le conseil général des Hauts-de-Seine, ce projet de résidence intégrée semblait pourtant avoir toutes les chances d'aboutir, les financements ayant été trouvés.

Or, depuis septembre 2002, un blocage est apparu à la direction du CROUS de Versailles remet durablement en cause l'ensemble du projet.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il a été gelé !

M. Nicolas About. Sur le site initialement envisagé, préférence serait désormais donnée à des étudiants valides !

L'adaptation de logements pour des étudiants handicapés serait repoussée d'autant. Certains évoquent les jeux Olympiques de 2012 ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, est-ce une provocation délibérée de la part du CROUS, en cette année où le Président de la République a réaffirmé le handicap comme priorité ? Les étudiants handicapés, qui avaient placé tous leurs espoirs dans ce projet, sont aujourd'hui dans l'incompréhension la plus totale et s'interrogent sur leur avenir. Pouvez-vous, monsieur le ministre, les rassurer ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. René-Pierre Signé. Les étudiants sont « à bout » !

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à excuser mon collègue Luc Ferry, qui aurait souhaité pouvoir répondre personnellement à cette question importante mais qui est retenu avec Michèle Alliot-Marie à la Sorbonne, où ils participent au colloque « Education à la défense ».

M. Jean-Pierre Sueur. Il n'est pas en Tunisie ?

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée. Vous l'avez rappelé, l'intégration des étudiants handicapés s'inscrit dans le cadre plus large des efforts engagés par le Gouvernement en faveur de l'autonomie des personnes handicapées dans la cité.

L'accessibilité sous toutes ses formes est l'une des priorités du chantier présidentiel que constitue la politique du handicap.

Je tiens à vous rappeler que les établissements d'enseignement supérieur accueillent, en 2003, près de 7 700 étudiants en situation de handicap. Ce chiffre ne cesse d'augmenter, et il est sans doute partiellement sous-évalué : en effet, certains étudiants handicapés ne souhaitent pas se déclarer comme tels et ne sont donc pas recensés à ce titre par les services de la scolarité.

C'est dans le cadre des contrats quadriennaux que cet effort se traduit, d'abord par le souci de l'amélioration constante de l'accessibilité du cadre bâti et des campus en général. Il se concrétise encore par la création de permanences d'accueil pour les étudiants handicapés : il faut en effet qu'une personne qualifiée et disponible puisse les accompagner dans leurs démarches et leur faciliter l'accès aux études. Il se manifeste, enfin, par un accompagnement dans les études, qui peut prendre des formes diverses : soutien, tutorat, auxiliaires de vie. Ce dernier dispositif, qui, pour l'enseignement supérieur, relève de la responsabilité du secrétariat d'Etat aux personnes handicapées, propose aussi des codeurs en langage parlé complété, des interprètes en langue des signes, des transcriptions en Braille...

Dans le cadre du plan d'accompagnement social, le logement des étudiants handicapés fait partie de nos priorités.

Dans cette perspective, le directeur de l'enseignement supérieur présidera, le 19 décembre prochain, une réunion sur ce sujet, qui se tiendra au ministère. Y seront associés les recteurs de Paris, de Créteil et de Versailles, la région d'Ile-de-France, le ministère de la santé, les mutuelles étudiantes ainsi que le directeur de la Cité universitaire internationale.

Sera examinée la possibilité de créer à très court terme une résidence universitaire intégrative en Ile-de-France, dont il conviendra de déterminer le lieu précis d'implantation ainsi que la capacité d'accueil. Compte tenu de la nécessité d'un accompagnement médical, ce dossier ne pourra être traité qu'en étroite collaboration avec le ministère de la santé.

Concernant le projet spécifique sur le campus de Nanterre, que vous avez évoqué, monsieur le sénateur, Luc Ferry vous propose que soit organisée une réunion avec le recteur de Versailles, le conseil général des Hauts-de-Seine, la région d'Ile-de-France, le CROUS de Versailles et, évidemment, vous-même. Vous savez que la création de logements adaptés a permis l'intégration d'étudiants handicapés à Grenoble et à Nancy. Nous tiendrons compte de ces expériences réussies pour résoudre ce problème important. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

SERVICE MINIMUM GARANTI

DANS LES TRANSPORTS PUBLICS

M. le président. La parole est à M. Bernard Plasait.

M. Bernard Plasait. Monsieur le ministre des transports, 81 % des Français sont pour ; 85 % des salariés du secteur privé, mais aussi 77 % des salariés du secteur public l'approuvent ; 92 % des sympathisants de notre majorité, mais aussi 76 % de ceux de l'opposition l'appellent de leurs voeux.

M. Jean-Pierre Sueur. Cela doit être une augmentation !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On a voté ?

Mme Nicole Borvo. On n'a pas fait de référendum, que je sache !

M. Bernard Plasait. Tels sont les résultats d'un sondage de l'institut BVA réalisé en mai dernier...

Vous l'avez compris, mes chers collègues : il s'agit de l'instauration d'un service minimum garanti dans les transports en commun en cas de grève ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Mme Nicole Borvo. On vous souhaite bien du plaisir !

M. Bernard Plasait. Mais le service minimum, c'est l'Arlésienne ! Il est évoqué à chaque grève dans les transports, mais il s'évapore aussitôt, au motif que l'on ne peut ni négocier ni légiférer dans l'urgence, à chaud !

Aujourd'hui, loin de l'atmosphère surchauffée des périodes de grève, le sujet est d'actualité. Tout le monde en parle,...

Mme Nicole Borvo. Voilà dix ans que vous en parlez !

M. Bernard Plasait. ... et le Gouvernement s'en préoccupe. Tant mieux !

Toutefois, il est vrai que la question est délicate, car il s'agit de trouver le juste équilibre entre le droit de grève, droit sacré s'il en est,...

Mme Hélène Luc. C'est un droit sacré, oui !

M. Bernard Plasait. ... et le droit au transport pour aller travailler, que l'on devrait considérer comme tout aussi sacré. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Roland Muzeau. Et le droit au travail ?

M. Robert Bret. Et le pouvoir d'achat ?

Mme Nicole Borvo. Le travail aussi est sacré !

M. Bernard Plasait. A juste titre, le Gouvernement veut réhabiliter le travail. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo. On le voit !

M. Jacques Mahéas. C'est pour cette raison qu'il gèle les salaires des fonctionnaires !

M. Marcel Debarge. Vivent les sondages Raffarin !

M. Bernard Plasait. Il serait donc sans doute souhaitable que, dans l'avenir, le droit de grève puisse s'exercer sans que soient interdits de travail les non-grévistes.

Alors, monsieur le ministre, puisque vous avez osé lever le tabou,...

Mme Nicole Borvo. Il y a d'autres tabous à lever !

M. Bernard Plasait. ... ce qu'aucun gouvernement n'avait eu le courage de faire avant vous, pourquoi ne pas proposer une loi-cadre,...

Mme Hélène Luc. Essayez, vous verrez !

M. René-Pierre Signé. Demandez à Juppé ! M. Bernard Plasait. ... qui instaure le service garanti et qui conduise à la négociation de ses modalités précises pour chacun des modes de transport régulier de voyageurs ?

M. Bernard Piras. Faites-le avant le 21 mars !

M. Bernard Plasait. On gagnerait ainsi beaucoup de temps !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Plasait !

M. Bernard Plasait. Je peux vous assurer que, si vous leur faites ce beau cadeau de fin d'année, les millions d'automobilistes coincés dans des embouteillages interminables, les millions de Franciliens qui, à chaque grève, sont exaspérés d'être pris en otages, vous diront un grand merci ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo. Essayez donc de prendre le métro un jour de service minimum !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, la continuité du service public pour répondre à la nécessité de se déplacer, même en cas de grève, est indispensable. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

Pourquoi ? Pour une raison d'équité, mesdames, messieurs les sénateurs, à laquelle tout le monde peut souscrire ! Car, en cas de grève, notamment de grève dans les transports, ce sont souvent les gens les plus fragiles, les gens les plus modestes, ceux qui n'ont pas de voiture, ceux qui ont besoin d'aller se faire soigner, ceux qui ont besoin d'aller en formation, ceux qui ont besoin de leur journée de travail, aussi, pour boucler la fin de mois, ce sont eux qui ont le plus grand besoin de se déplacer ! (Nouvelles marques d'approbation sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Henri de Raincourt. Oui, ils ont besoin de travailler !

M. Jacques Mahéas. Surtout de travailler le lundi de Pentecôte !

M. Gilles de Robien, ministre. Il faut donc réaliser ce juste équilibre entre deux principes constitutionnels : le droit de grève et la continuité du service public.

M. René-Pierre Signé. C'est pour cela que vous supprimez le droit de grève !

Mme Nicole Borvo. Il faut que les plus faibles aussi aient le droit de grève !

M. Gilles de Robien, ministre. Pour atteindre cet équilibre, monsieur le sénateur, je ne vois qu'une seule méthode : c'est celle du dialogue, de la concertation et de la pédagogie.

Nous allons, bien sûr, utiliser cette méthode : c'est celle du Gouvernement, et elle ne variera pas. Il ne s'agit pas de repousser un problème, il ne s'agit pas de se réfugier dans l'immobilisme !

Mme Nicole Borvo. Quand il n'y aura plus de service public, sa continuité sera assurée !

M. Robert Bret. Ce sera la continuité sans le service public !

M. Gilles de Robien, ministre. Il s'agit, autour de cette question grave, qui est une question de société, de trouver le partenariat le plus large pour réussir cette réforme.

Dix syndicats des transports sur quinze m'ont accompagné à travers l'Europe, et chacun a pu constater que nombre d'exemples étaient positifs,...

Mme Nicole Borvo. Certains sont négatifs ! C'est comme les prisons !

M. Gilles de Robien, ministre. ... et que d'autres étaient moins intéressants. Aucun n'est transposable intégralement dans notre pays.

J'ai remarqué aussi que le système de l'alarme sociale, comme il existe par exemple à la RATP, lorsque je le décrivais, suscitait de l'envie dans bien des pays européens !

Aujourd'hui, nous disposons de cette expérience. J'estime que la première des priorités, c'est justement de tout faire pour éviter le recours à la grève,...

M. Jacques Mahéas. C'est intelligent !

M. Gilles de Robien, ministre. ... recours à la grève qui est toujours un échec pour les salariés, notamment, je l'ai dit, pour les plus modestes. Et si le conflit se produit néanmoins, il faut respecter l'usager, il faut respecter le client. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.

Je préfère donc prendre un peu plus de temps et aboutir à une réforme durable dont les fondamentaux seront partagés par le plus grand nombre. Cela permettrait de montrer que notre culture du service public, c'est aussi la conciliation de l'exercice du droit de grève avec la continuité du service public. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE)

Mme Nicole Borvo. Renforcez les services publics, ce sera bien !

M. Alain Fouché. Bravo, le Gouvernement !

M. Jacques Mahéas. M. le ministre a raison. Patience !

M. René-Pierre Signé. S'ils sont contents avec ça...

PROJET D'AMNISTIE FISCALE

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Henri de Raincourt. Ah !

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le ministre, après le vote d'énormes avantages fiscaux pour les entreprises et les plus gros contribuables, MM. Carrez et Marini, membres influents de votre majorité, proposent maintenant d'instaurer une amnistie fiscale, autrement dit une prime aux fraudeurs du fisc.

M. Alain Gournac. C'est affreux !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Ils veulent permettre à ceux qui se sont soustraits à l'impôt, c'est-à-dire à la solidarité nationale, en transférant illégalement des capitaux à l'étranger...

M. Henri de Raincourt. Pourquoi illégalement ?

M. Jean Bizet. A cause de vous !

Mme Marie-Claude Beaudeau. ... de les rapatrier en France, moyennant un prélèvement libératoire fixé à un taux ridiculement bas.

Ils se verraient ainsi exemptés du remboursement de l'impôt dû et due toute pénalité. Pour solde de tout compte, ils s'acquitteraient d'un prélèvement inférieur à ce qu'un salarié de bonne foi qui n'a pas pu régler ses impôts à temps doit payer au seul titre des intérêts de retard.

Avec cynisme, MM. Carrez et Marini prétendent vouloir favoriser l'emploi et réhabiliter la valeur travail.

M. Philippe François. Ils ont raison !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Le monde du travail a autre chose à faire de son argent que de le placer au Luxembourg. Lui, il ne fraude pas !

Pourtant, c'est bien sur lui et sur ses représentants que s'abattent les sanctions, que se multiplient les recours patronaux devant les tribunaux pour le seul exercice de leur liberté syndicale.

M. Joseph Ostermann. Oh !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Comment peut-on affirmer que l'amnistie fiscale, cette incitation à l'incivisme, pourrait apporter de l'argent dans les caisses d'Etat ?

En revanche, c'est une formidable opportunité qui serait offerte pour le blanchiment d'argent sale, l'anonymat des retours de fonds étant au coeur de ces propositions.

Au nom de l'harmonisation européenne, c'est la course au dumping fiscal, l'alignement sur les paradis fiscaux que votre majorité propose. MM. Carrez et Marini laissent entendre que l'évasion fiscale atteint des niveaux considérables, et, en même temps, monsieur le ministre, vous supprimez 900 postes d'agents des impôts...

M. Henri de Raincourt. Ils ne servent à rien !

Mme Marie-Claude Beaudeau. ... qui pourraient être affectés à la répression de la délinquance financière.

Aujourd'hui, les entreprises ne peuvent être contrôlées par le fisc qu'une fois tous les soixante-neuf ans en moyenne...

M. Henri de Raincourt. C'est déjà beaucoup !

Mme Marie-Claude Beaudeau. ... et le secret bancaire continue à sévir.

M. Alain Gournac. C'est faux !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le ministre, irez-vous jusqu'à adresser à ceux qui spéculent contre l'emploi sur les marchés financiers mondiaux ce signal : « Trichez tranquilles, vous pourrez toujours rapatrier vos capitaux impunément ! »

M. Marcel-Pierre Cléach. C'est la lutte des classes !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le ministre, voici ma question : allez-vous désavouer cette proposition d'amnistie fiscale dont M. Alain Lambert dit qu'elle n'est pas taboue ? Pour le Gouvernement, c'est l'amnistie sociale qui semble être taboue ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. René-Pierre Signé. Après l'IVG, l'ISF !

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Madame Beaudeau, je vous rassure, ce projet n'est pas à l'ordre du jour des réflexions du Gouvernement.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais qu'en pense-t-il ?

M. Jacques Mahéas. Il émane du rapporteur général M. Carrez !

M. Francis Mer, ministre. M. Lambert l'a déclaré, et je vous le confirme. Nous avons bien trop d'autres sujets à traiter, y compris en matière fiscale !

M. Robert Bret. Les élections, par exemple !

M. Francis Mer, ministre. Quant à la « performance » de la direction générale des impôts que vous avez évoquée, selon vous, plus il y aurait d'inspecteurs des impôts, mieux les entreprises seraient contrôlées.

Sachez, madame Beaudeau, que la qualité d'un service n'est pas directement ni proportionnellement liée à la quantité des effectifs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme Nicole Borvo. Il faut le dire à M. Sarkozy ! S'il y avait moins de policiers, tout irait mieux !

M. Francis Mer, ministre. Vous avancez des moyennes qui n'ont pas de sens, madame. Lorsque l'on divise le nombre d'entreprises surveillées chaque année par le nombre total des entreprises, y compris les entreprises unipersonnelles, on obtient peut-être soixante-neuf ans, mais cette division n'a aucune signification.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Francis Mer, ministre. Y compris en matière de rendement fiscal, je me dois de conduire une politique ciblée sur les enjeux importants. Qu'un certain nombre de petites entreprises, voire de très petites entreprises, échappent pendant toute leur vie aux contrôles fiscaux...

Mme Nicole Borvo. Mieux vaut s'occuper de François Pinault, c'est sûr !

Mme Odette Terrade. Il n'y a que les grosses entreprises qui y échappent !

M. Francis Mer, ministre. ... c'est peut-être grave du point de vue de l'esprit civique, esprit, chacun le sait, qui nous anime tous, mais, en tout cas, ce ne l'est pas pour les finances de l'Etat.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Si vous aviez contrôlé Gemplus !

M. Francis Mer, ministre. Nous devons, dans ces domaines, mener une politique intelligente, et c'est ce que nous nous efforçons de faire.

Nous investissons beaucoup, y compris dans les services informatiques, pour améliorer la qualité de nos performances afin que le maximum d'entreprises puissent être contrôlées et d'une manière générale, afin que le plus d'argent possible entre dans nos caisses.

Cela va de soi, mais n'en tirez pas des conclusions erronées. Ce n'est pas parce que nous multiplierons par deux le nombre d'inspecteurs des impôts que nous aurons deux fois plus de rentrées fiscales ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Bernard Piras. On n'a pas dit cela !

M. René-Pierre Signé. Il n'y a pas eu de réponse !

DÉCENTRALISATION ET FISCALITÉ LOCALE :

PÉRÉQUATION ENTRE COMMUNES

M. le président. La parole est à M. Philippe Darniche.

M. Philippe Darniche. Monsieur le président, mesdames, messsieurs les ministres, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

M. Jacques Mahéas. Il n'est pas là !

M. René-Pierre Signé. Ah ! L'absentéisme des ministres !

M. Philippe Darniche. Elu d'un territoire rural comme bon nombre de mes collègues ici présents, je souhaite attirer particulièrement son attention sur les difficultés des communes rurales à la veille de la prochaine réforme des dotations de l'Etat.

Je salue avec enthousiasme l'initiative de la décentralisation, car elle est indispensable au futur équilibre de nos territoires. Cependant, après avoir soutenu les trois premiers textes qui nous ont été présentés, je m'inquiète - comme tous les maires ruraux - des orientations...

M. Roland Muzeau. Vous avez tort : tout va bien !

M. Philippe Darniche. ... qui pourraient intervenir dans le cadre de la prochaine loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales, qui viendra prochainement en discussion au sein de notre Haute Assemblée.

Entre les deux derniers recensements démographiques de notre pays, un million de Français ont choisi de quitter le monde urbain en faveur du monde périurbain et rural pour y trouver une bonne qualité de vie.

Nous devons aujourd'hui répondre aux exigences accrues de nos populations en termes de service rendus. Les écarts de charges entre le monde urbain et le monde rural ne sont pas représentatifs des attentes des besoins de proximité des zones rurales.

C'est pourquoi, connaissant la volonté, réaffirmée récemment au congrès des maires et des présidents de communauté, du Premier ministre de soutenir un développement harmonieux de notre pays, je souhaite connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre pour réduire les écarts trop importants - notamment au regard de la dotation globale de fonctionnement - entre les communes urbaines et rurales.

Dans le cadre de l'intercommunalité, ensuite, comment envisagez-vous de réduire l'écart de dotation par habitant entre les communautés d'agglomération et les communautés de communes ? On sait en effet que les 143 communautés d'agglomération perçoivent en moyenne par habitant deux fois et demie plus que les 2 200 communautés de communes de France. (Applaudissment sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Robert Bret. C'est constitutionnel ! Il n'y a donc pas de souci à se faire !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre enthousiasme.

Mme Nicole Borvo. Il est bien le seul !

Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est parce qu'il y a la télévision !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Les écarts entre collectivités ne peuvent se justifier que lorsqu'ils sont fondés sur l'équité,...

M. René-Pierre Signé. Vous ne savez pas ce que c'est !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... c'est-à-dire qu'à des situations différentes peuvent correspondre des dotations différentes. Mais, sur le fond, vous avez raison, car il existe en effet de grandes disparités, ...

M. Jean-Pierre Sueur. Ah !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... les plus grandes apparaissant surtout entre communautés urbaines et communautés de communes à fiscalité additionnelle.

Ainsi, dans les communautés urbaines, la moyenne de la dotation globale de fonctionnement est de 80,6 euros par habitant, alors que dans les communautés de communes à fiscalité additionnelle elle n'est que de 18,2 euros par habitant.

Il s'agit donc d'un écart considérable, auquel s'ajoute un grand écart entre les potentiels fiscaux puisque, pour les communautés urbaines, la moyenne est de 477 euros par habitant, alors que pour les communautés de communes à fiscalité additionnelle elle est de 77 euros par habitant.

M. Robert Bret. Il y a aussi des écarts en ce qui concerne les transferts de compétences !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il est donc clair que ce système, qui est le produit de l'histoire et de ce que l'on appelle les droits acquis, est inéquitable.

M. René-Pierre Signé. Mais non...

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement avait annoncé qu'il mettait la péréquation à son programme de l'année 2004 : sa mise en oeuvre est déjà engagée avec la réarchitecturation de la dotation globale de fonctionnement dans le projet de budget pour 2004.

M. Jean-Pierre Sueur. Les crédits de la péréquation sont en baisse dans le budget !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. On vous a déjà répondu, monsieur Sueur, sur ce point. Répéter comme un perroquet des erreurs n'en fait pas des vérités ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous êtes injurieux, monsieur le ministre !

Mme Nicole Borvo. Toujours des insultes !

M. René-Pierre Signé. Nous voulons des excuses !

Mme Hélène Luc. Drôle de respect pour la représentation nationale !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le comité des finances locales, à la demande du Gouvernement, a déjà constitué un groupe de travail sur la péréquation. Et le Sénat lui-même a produit un rapport, cosigné par MM. François-Poncet et Belot, sur les inégalités entre départements.

Donc, l'année prochaine, en 2004,...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous vous répétez !

M. Robert Bret. C'est un perroquet !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... nous devrons choisir les critères qui permettront de faire enfin de cette obligation constitutionnelle une réalité, et non plus un thème pour vos discours. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jacques Mahéas. Minable !

M. René-Pierre Signé. Ils se croient tout permis !

DÉSINDUSTRIALISATION DANS LA RÉGION

DE CHÂTEAUBRIANT (LOIRE-ATLANTIQUE) :

SOCIÉTÉ FOCAST

M. le président. La parole est M. Charles Gautier.

M. Charles Gautier. Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je suis préoccupé par la situation du pays castelbriantais, bassin de la Loire-Atlantique d'environ 30 000 personnes.

Actuellement, le total des suppressions d'emploi s'élève à 500. Une cellule de reclassement commune à l'ensemble des salariés concernés vient d'être réclamée. Or l'Etat semble se désengager de ce problème puisque, selon le projet de loi relatif aux responsabilités locales, cette compétence reviendrait aux collectivités territoriales, qui ne disposent que de très peu de moyens en ce domaine ; et quand bien même elles les auraient, l'Etat peut parfois jouer un rôle contraire aux nécessités locales.

Votre ministère a accepté, via le comité interministériel de restructuration industrielle, un moratoire d'une durée exceptionnelle de sept ans sur les dettes fiscales, d'un montant de 48 millions d'euros, pour le groupe Valfond, propriétaire de la société Focast à Châteaubriant. Dans le même temps, vous avez signé un protocole avec l'actionnaire principal, l'Union des banques suisses, et accepté le plan de restructuration présenté par Valfond, véritable vente par appartements. Ces ventes ont, pour la plupart, été effectuées en direction d'anciens cadres de Valfond qui, une fois les acquisitions effectuées, ont procédé à des plans de licenciements.

Les conséquence ont été les suivantes : des licenciements ont eu lieu à Argentan - 240 en juillet et 130 en novembre -, à Laval - 30 -, à Bléré - 120 -, à Saint-Dizier - 200 - et à Châteaubriant - 190.

Ces cas particuliers sont révélateurs d'un processus se généralisant dans les grands groupes industriels français Valfond, Metaleurop, General Trailers, etc.

Le ministère des affaires sociales aura-t-il autant d'attention pour les salariés que le ministère de l'industrie en a eu pour les actionnaires ?

Quand le président de la République fustigeait les « patrons voyous » au sujet de Metaleurop, était-ce de belles incantations, ou bien attendait-il de son gouvernement une réaction en faveur des salariés ?

L'Etat est-il dans son rôle en proposant une porte de sortie, à la charge du contribuable, permettant aux actionnaires de fuir leurs responsabilités ?

Mme Danièle Pourtaud. Eh oui !

M. Charles Gautier. Le Gouvernement ne peut-il pas revenir sur ses aides et consacrer ces sommes au reclassement des salariés et à la redynamisation des bassins d'emplois sinistrés ?

En bref, quelle action le Gouvernement entend-il mener contre les « patrons voyous » ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la situation douloureuse...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Exactement !

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. ... des salariés de deux entreprises de la région nantaise, Focast à Châteaubriant et General Trailers à Nort-sur-Erdre, qui font l'objet d'un redressement judiciaire.

M. René-Pierre Signé. Et il y en a d'autres !

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. L'Etat ne se désengage pas.

Je vous rappelle, monsieur Gautier - mais vous le savez parfaitement -, que, s'agissant de Focast, filiale de Valfond, l'Etat a jusqu'à présent permis grâce à un vaste plan la poursuite des activités sur le site de Châteaubriant.

Sur le plan général, je veux rappeler une vérité incontournable : l'activité industrielle de notre pays n'est pas en déclin. Elle demeure dynamique, avec un niveau de productivité élevé, mais j'ai bien conscience que ce constat ne saurait apaiser l'inquiétude légitime de ceux qui sont directement frappés par les mutations.

Vous avez parlé du rôle de l'Etat. La responsabilité première du Gouvernement est, en même temps qu'il prépare nos industries à saisir toutes les chances qu'offrira la reprise, d'accompagner les restructurations, sur le plan social comme sur le plan territorial.

Ainsi, sur le plan social, le redressement judiciaire s'accompagne d'une période de six mois d'observation, qui sera mise à profit afin d'envisager toutes les solutions, qu'il s'agisse de la poursuite des activités ou de leur cessation.

Je puis vous assurer que, si cette dernière hypothèse était retenue, avec François Fillon, nous serions particulièrement attentifs à ce que tous les salariés, sans exclusion, puissent bénéficier d'un reclassement équitable.

M. René-Pierre Signé. Merci de votre bon coeur ! Que de compassion !

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Sur le plan territorial, je vous signale que, la semaine dernière, à l'occasion de la révision du contrat de plan Etat-région, des mesures importantes ont été prises pour assurer le désenclavement routier et ferroviaire de cette région. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

PUBLICATION DES DÉCRETS D'APPLICATION

DE LA LOI SUR L'ACTION SOCIALE ET MÉDICO-SOCIALE

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale appelle, pour sa mise en oeuvre, de nombreux décrets et arrêtés dont beaucoup tardent à paraître, même si certains sont parus récemment.

En tout état de cause, la parution du décret budgétaire et comptable a précédé de quelques jours seulement la date de dépôt des budgets des établissements et services auprès de leur tutelle. De ce fait, force est de constater que les possibilités de recours en cas de désaccord sont restreintes.

Pour ce qui concerne les établissements et les services sous compétence de l'Etat, la situation est particulièrement difficile eu égard aux enveloppes de crédits alloués.

Aujourd'hui, les établissements et les services ont déjà optimisé leur fonctionnement et leur budget. Ils ne disposent pas de marges de manoeuvre. En effet, aux augmentations réglementaires s'ajoutent les incidences budgétaires de la réduction du temps de travail, les travaux imposés à tous les niveaux par l'évolution de normes diverses et variées, les abattements appliqués aux dotations de 2003 du fait d'un taux d'évolution des enveloppes départementales insuffisant.

Par ailleurs, la loi du 2 janvier 2002 a entraîné de nouvelles charges - diagnostics, évaluations, mise en oeuvre de projets individuels de la charte d'accueil - et d'autres encore mais sans prévoir les moyens correspondants.

Avant que ne surgissent d'importantes difficultés qui ne pourraient que pénaliser la prise en charge des populations accueillies - ce qui serait paradoxal en cette année consacrée à la cause des personnes handicapées -, les crédits alloués ne pourraient-ils être accordés à la hauteur des besoins créés par l'application de dispositions législatives ou réglementaires qui ont, par ailleurs, fait l'objet d'un large consensus ?

Ne serait-il pas souhaitable d'aligner la préparation et la rédaction des décrets et arrêtés sur la réalité du fonctionnement des établissements concernés ? Ne faut-il pas autant que possible éviter une approche purement technique qui rendrait en pratique les dispositions inapplicables à la réalité du secteur social et médico-social ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Je vous sais gré, monsieur Mouly, de l'attention constante que vous portez à la cause des personnes handicapées.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Comme nous tous !

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Les décrets d'application relatifs à la loi du 2 janvier 2002 ont nécessité, comme la loi elle-même, beaucoup de concertation, et donc beaucoup de temps. Mais les principaux, concernant les personnes handicapées et les établissements médico-sociaux, sont maintenant sortis, monsieur le sénateur.

Il s'agit d'abord du décret budgétaire et comptable, paru le 22 octobre dernier, qui vise à moderniser et à simplifier le régime comptable, tarifaire et financier.

Ce texte prévoit en outre, puisqu'il n'est sorti qu'au mois d'octobre, des dispositions transitoires qui vont permettre d'assurer le respect des droits liés à la procédure contradictoire en reportant d'un mois le délai de dépôt des propositions budgétaires.

D'autres textes importants sont parus au Journal officiel du 29 novembre dernier : les règles de fonctionnement des établissements, les droits des usagers, le régime d'autorisation.

Enfin, d'ici à janvier 2004, deux autres décrets très importants vont sortir. Il s'agit du décret relatif à l'accueil temporaire, qui est tant attendu et qui est à la signature, et du décret relatif aux services de soins infirmiers d'aide à domicile pour les personnes handicapées.

Par ailleurs, le Gouvernement est conscient des nouvelles charges entraînées par ces réformes.

Des mesures ont été prises pour en tenir compte : les accords de branche sur le travail de nuit, la rénovation, sur l'initiative des partenaires sociaux des conventions collectives, le taux d'évolution budgétaire, bien supérieur à l'inflation. Je rappelle en effet que, dans un contexte budgétaire difficile - et je parle sous le contrôle de M. le ministre des finances -, le budget des personnes handicapées a été sauvegardé, selon la volonté du Président de la République, puisqu'il augmente d'environ 6 % en 2003 et en 2004.

Enfin, l'application des indicateurs d'activité budgétaire et comptable permettra, à terme, d'atténuer, puis de résorber les disparités entre les établissements, les départements, les régions, et de mettre en place une allocation de ressources votée par le Parlement qui sera, j'en suis sûre, beaucoup plus équitable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Serge Vinçon.)