meilleure couverture de tous les territoires en téléphonie mobile

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, en remplacement de M. Jean Boyer, auteur de la question n° 665, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. Claude Biwer. Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de notre collègue Jean Boyer, qui m'a demandé de le représenter ce matin. Je le fais d'autant plus volontiers que j'aurais pu moi-même poser cette question orale, tant les difficultés que connaît son département, la Haute-Loire, ressemblent à celles auxquelles je suis confronté dans mon département, la Meuse. En matière de téléphonie mobile et d'Internet à haut débit, ce sont souvent les départements ruraux qui sont les moins adaptés à ce jour. Tel est bien le cas de ceux que nous représentons l'un et l'autre.

S'agissant de la téléphonie mobile, des avancées significatives, en partenariat avec les collectivités territoriales et les différents opérateurs, ont été engagées d'une manière exceptionnelle, multipliant ainsi les projets destinés à la mise en place de relais de transmission dans les zones dites « blanches ».

Sans l'initiative gouvernementale, que je tiens à saluer, sans la définition d'un accord entre les trois opérateurs présents sur le marché mais également avec le concours, souvent décisif, des collectivités territoriales - des départements en particulier mais aussi, très souvent, des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale -, le désenclavement autour de la téléphonie mobile n'aurait pu voir le jour.

Cependant, madame la secrétaire d'Etat, l'inquiétude va grandissant concernant les zones dites « grises », c'est-à-dire les zones où, pour l'instant, un seul opérateur téléphonique intervient, car, ces zones n'étant de ce fait plus considérées comme prioritaires, elles pourraient devenir demain de véritables zones d'ombre sur la carte de France, ce qui limiterait considérablement leur accessibilité.

Or, à l'image du haut débit, la téléphonie mobile avec ses innovations technologiques sans cesse renouvelées participe non seulement au développement économique mais également à l'attractivité des territoires, quels qu'ils soient. Inutile de préciser que, si ces technologies sont absentes ou défaillantes, les entreprises qui ne peuvent en bénéficier auront tôt fait de s'implanter ailleurs, sous des cieux plus cléments !

Sans une bonne couverture par tous les opérateurs, des pans entiers de nos espaces les plus fragiles, en particulier les zones de montagne, auxquelles j'ajouterai certaines zones de plaine très éloignées des centres urbains, seront pénalisés et risquent une nouvelle fois de subir les conséquences cumulatives de nombreux handicaps.

Pour toutes ces raisons, je vous serais reconnaissant, madame la secrétaire d'Etat, de bien vouloir préciser quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour que les zones dites « grises » puissent bénéficier de la couverture de tous les opérateurs présents sur le marché à partir d'un seul pylône, évitant ainsi une démultiplication des équipements et favorisant l'accessibilité de tous les usagers à cette nouvelle technologie.

Par ailleurs, pourriez-vous nous indiquer quelles sont les mesures rationnelles et efficaces que le Gouvernement compte adopter afin qu'il n'y ait pas une démultiplication d'initiatives isolées ?

Madame la secrétaire d'Etat, dans ce domaine de la téléphonie mobile mais aussi de l'Internet à haut débit, il ne faudrait pas que les zones « grises » d'aujourd'hui deviennent demain des zones totalement « blanches ».

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. Devedjian, qui est retenu par des obligations.

Comme vous l'avez très bien rappelé, un plan de couverture des zones « blanches », c'est-à-dire des zones dans lesquelles il n'y a aucun opérateur, a été engagé sur l'initiative du Gouvernement.

Une convention nationale pour la couverture en téléphonie mobile des zones « blanches » a ainsi été signée le 15 juillet 2003 entre l'Autorité de régulation des télécommunications, l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France, les trois opérateurs et le Gouvernement.

Cette convention nationale prévoit l'équipement, en deux phases, d'environ 2 000 sites permettant de couvrir 3 000 communes.

Ce plan commence à porter ses fruits. Au 1er février 2005, 673 sites de la phase I avaient fait l'objet d'un accord entre opérateurs et collectivités territoriales sur leur lieu d'implantation ; 53 protocoles départementaux étaient signés, 50 infrastructures étaient mises à disposition d'opérateurs par les collectivités et 32 sites étaient ouverts commercialement.

Le problème des zones « grises » se pose de façon très différente de celui des zones « blanches », puisque, par définition, les zones « grises » sont déjà couvertes par un opérateur qui a pris le risque d'y investir.

Le plan de couverture des zones « blanches » constitue une première incitation pour les opérateurs à investir dans les zones « grises » afin d'assurer la continuité de leur service sur le territoire.

En outre, les nouvelles obligations de couverture retenues par le Gouvernement dans le cadre du renouvellement des licences de Orange et de SFR obligeront les opérateurs à assurer une couverture de 99 % de la population métropolitaine en 2006, contre 90 % actuellement, ainsi que la couverture des axes routiers principaux de chaque département. La mise en oeuvre de ces obligations diminuera donc de fait l'ensemble des zones « grises » sur le territoire.

Enfin, l'utilisation par plusieurs opérateurs des mêmes pylônes est tout à fait envisageable pour les zones « grises ». Il s'agit d'ailleurs d'une pratique largement développée chez les opérateurs afin d'éviter la démultiplication des équipements.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous avez apportées.

J'ai relevé que vous annonciez une couverture de 99 % de la population. On parle souvent d'une couverture de 80 %, 85 % ou 90 % - peu importe le chiffre - du territoire, en oubliant le terme de « population ». Or, population ou territoire, ce n'est pas pareil.

Nous plaidons aujourd'hui la cause du territoire. Il est bien évident que toutes les villes sont équipées - même si, pour y circuler, nous savons que, même à Paris, il y a parfois des ruptures de réseau -, alors que les territoires ruraux sont souvent laissés de côté.

Je me réjouis que l'accompagnement gouvernemental se poursuive. C'est une incitation à relancer le débat afin que l'on puisse bientôt communiquer de manière plus moderne sur l'ensemble du territoire !

Gaz de France et sécurité des ouvrages gaz

M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, auteur de la question n° 658, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.

Mme Michelle Demessine. Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite interroger le Gouvernement au sujet de la sécurité des ouvrages gaz, sécurité qui est sous la responsabilité de notre entreprise nationale Gaz de France.

Gaz de France a su faire face par le passé à des défis technologiques et financiers importants, mais il faut bien constater que cette entreprise nationale fonde depuis plusieurs années sa gestion sur le seul critère de rentabilité, cela afin de se présenter comme une entreprise attractive pour les capitaux privés, mais aux dépens de ses missions de service public.

Et, de fait, l'explosion qui, le 26 décembre dernier, a fait dix-sept morts à Mulhouse résulte selon toute vraisemblance de la cassure d'une canalisation en fonte. Cet accident, après ceux de Dijon, en décembre 1999, de Toulouse, en novembre 2002, et de Beaurain, en décembre 2003, sans compter un nombre important de cassures et d'explosions, met en exergue l'urgente nécessité d'éliminer les fontes cassantes du réseau de Gaz de France.

Dès 1970, ce type de canalisation n'était plus autorisé, et les techniciens de GDF mettaient en évidence la nécessité d'éliminer les anciennes fontes cassantes, en commençant par les plus dangereuses pour les personnes et pour les biens.

Ce problème bien connu de la direction, à la suite des interpellations des représentants du personnel au début des années quatre-vingt-dix, a fait l'objet d'un engagement par le conseil d'administration de GDF d'éliminer totalement ces fontes à l'horizon 2000. Ainsi, 1 600 kilomètres ont été renouvelés en 1992 et 1 700 kilomètres en 1993.

Puis, sur décision interne, la longueur renouvelée a chuté. Pis, le conseil d'administration décide en 1996 de ne renouveler que sur risque calculé ! Les longueurs renouvelées passent de 900 kilomètres en 1997 à 650 kilomètres seulement en 1999. Malheureusement, nous connaissons le résultat : on compte aujourd'hui les morts.

Cette attitude, qui fait fi de la sécurité des citoyens, conduit GDF à consacrer 2 milliards d'euros au financement d'activités internationales en 2002, mais à n'affecter la même année que 136 millions d'euros au renouvellement des fontes alors que 600 millions d'euros suffisaient pour éliminer les 6 200 kilomètres subsistant en 1999.

La situation est d'autant plus grave que, lors du conseil d'administration du 26 janvier dernier, les représentants de la direction GDF et la représentante du ministère de l'industrie ont refusé toute accélération du programme de renouvellement, en rejetant la responsabilité sur les villes au prétexte qu'elles n'acceptent pas l'ouverture des chantiers.

Bien que le Gouvernement ait abandonné aux lois du marché un bien de la nation en le convertissant en société anonyme, l'Etat reste l'actionnaire unique de Gaz de France, madame la secrétaire d'Etat.

Par ailleurs, nous vous rappelons que l'Etat est le garant de la sécurité publique.

En conséquence, nous demandons au Gouvernement d'intervenir auprès de GDF afin d'éliminer le plus vite possible de ses réseaux la totalité des fontes cassantes, ainsi que toutes les canalisations dangereuses.

Le second problème, et ce n'est pas le moindre, tient à ce qu'une très grande partie des accidents dus au gaz relèvent des installations dans les logements.

Le contrôle de ces installations dépend depuis 1992 d'un organisme de droit privé. Il en résulte que le contrôle n'est obligatoire que pour les seules installations neuves, que ce contrôle est payant pour l'usager et les installations anciennes, et que les changements d'occupants se faisant en « libre service » y échappent.

Or il est devenu indispensable de rendre ce contrôle obligatoire et systématique tous les dix ans. Son intégration dans le contrat de GDF garantirait la périodicité des contrôles et la sécurité des biens et des personnes sur le territoire national. Ce ne sont pas les élus de cette assemblée qui me contrediront, en particulier ceux qui ont la responsabilité d'une collectivité territoriale.

Ces situations particulièrement préoccupantes nous conduisent à nous interroger sur le niveau de qualité de la maintenance pratiquée sur l'ensemble des ouvrages de ce service public, maintenance prévue, je le rappelle, dans le cahier des charges de distribution publique auprès des autorités concédantes que sont les collectivités locales.

A cet égard, différentes informations sont également inquiétantes.

Ainsi, on constate un important accroissement des agressions subies par les ouvrages enterrés, du fait de la suppression des surveillants de chantiers et d'une cartographie de plus en plus défaillante.

On assiste également à une diminution des effectifs à travers de multiples réformes de structures qui éloignent de plus en plus les techniciens des ouvrages concernés.

Les formations techniques sont de moins en moins fréquentes : alors que seules les écoles de métiers de GDF dispensaient les connaissances nécessaires, elles ont été supprimées.

Le suivi des ouvrages impose des visites périodiques, mais celles-ci sont de plus en plus espacées. Or cet espacement ne permet plus une connaissance réelle de l'évolution des ouvrages.

Enfin, l'accroissement de la sous-traitance conduit à une diminution de la qualité des réalisations, à l'augmentation des coûts et, simultanément, à une perte de compétence au sein de l'entreprise.

Cette dégradation progressive de l'ensemble de la politique de maintenance des ouvrages de la distribution du gaz résulte d'une adaptation systématique de la politique aux moyens que l'on décide d'accorder et non d'une définition des besoins en partant des missions de service public.

C'est la conception même de la sécurité qui doit être remise en cause. L'entreprise Gaz de France avait d'ailleurs été critiquée par la commission d'enquête sur la sûreté des installations industrielles et des centres de recherche et sur la protection des personnes et de l'environnement en cas d'accident industriel majeur, qui, dans son rapport paru en 2002, « considère que l'un des premiers objectifs à atteindre, pour évoluer vers des situations de risques socialement acceptables, est de faire reculer la culture du secret si fortement implantée dans l'entreprise, vis-à-vis tant des salariés que des populations extérieures ».

Il ne semble pas que GDF ait tenu compte des observations des parlementaires, bien au contraire, et le cas des fontes cassantes n'est malheureusement que la partie apparente de l'iceberg.

En conséquence, madame la secrétaire d'Etat, je vous demande de bien vouloir m'éclairer sur les dispositions que compte prendre votre gouvernement pour que Gaz de France respecte intégralement ses missions de maintenance, afin de préserver le devenir des ouvrages et de tout mettre en oeuvre pour garantir la sécurité de notre réseau et pour que les accidents que nous avons connus ne puissent plus se reproduire.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Madame la sénatrice, je vous demande de nouveau de bien vouloir excuser M. Devedjian, qui est retenu par un impératif.

Vous interrogez le ministre délégué à l'industrie sur le respect par Gaz de France de ses missions de maintenance et de surveillance de son réseau de distribution du gaz par canalisations en fonte cassante.

M. Devedjian me charge de vous dire à quel point il est comme vous extrêmement soucieux de toutes les questions de sécurité que vous évoquez.

A la suite du tragique accident de Mulhouse du 26 décembre dernier, Gaz de France s'est engagé à prendre d'urgence un certain nombre de mesures, en fixant pour objectif une résorption totale des fontes grises - soit 2 040 kilomètres répertoriés à la fin 2004 - pour la fin de l'année 2006 lorsqu'elles sont situées en zone sensible et pour la fin de l'année 2007 pour les autres.

Ces mesures seront inscrites dans le prochain contrat de service public entre l'Etat et Gaz de France.

Les autres distributeurs de gaz devront également accélérer leur programme de résorption.

Sur le terrain, les DRIRE, les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, suivront, en relation avec les responsables régionaux de Gaz de France, l'évolution de la résorption de ces canalisations.

Gaz de France s'est également engagé à faire surveiller ces canalisations trois fois par an au lieu d'une fois par an jusqu'à présent.

J'insiste sur le fait qu'il n'est pas possible de tout résorber en même temps sur la seule initiative de Gaz de France du fait de contraintes de voiries et de disponibilité des entreprises de BTP. Il revient donc aussi aux communes de faire des choix.

En ce qui concerne la sécurité des installations intérieures de gaz, les installations neuves, modifiées ou complétées doivent faire l'objet d'un contrôle par un organisme agréé par les pouvoirs publics.

Pour ce qui est des installations anciennes de gaz, un diagnostic portant sur leur sécurité sera bientôt imposé lors d'un changement de propriétaire. Cette disposition sera reprise par le ministre délégué au logement dans le cadre plus général de l'obligation d'établir un diagnostic immobilier ; les projets d'ordonnance et de décret sont en cours.

En outre, diverses actions sont actuellement menées par Gaz de France pour améliorer la sécurité des installations intérieures, notamment la réalisation de diagnostics portant sur leur sécurité, dans un cadre contractuel.

Enfin, plusieurs accidents récents ont été causés par le fonctionnement défectueux d'appareils à gaz, en particulier des appareils de cuisson. Nous avons proposé à la Commission européenne que la directive européenne applicable soit révisée à cet effet, notamment pour rendre obligatoire des systèmes automatiques de coupure en cas d'extinction de flamme.

prévention des innondations

M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, auteur de la question n° 649, adressée à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Ambroise Dupont. Ma question porte sur la coexistence de deux types de zones classées au titre de la prévention du risque d'inondation et sur les conséquences de ces deux classements sur la responsabilité des élus.

II existe deux types de classification des zones inondables. Le premier est intitulé « plan de prévention des risques d'inondation », mieux connu sous le nom de PPRI. Aux termes de la loi du 2 février 1995, ces PPRI doivent être mis en place à l'issue d'une concertation - trop souvent symbolique - entre les services de la direction départementale de l'équipement, la DDE, et les collectivités locales.

Cette classification interdit clairement aux maires et aux services d'urbanisme d'accorder un permis de construire ou tout autre certificat d'urbanisme au sein de ces zones, sauf à les assortir des conditions particulières prévues à l'article R. 421-38-14 du code de l'urbanisme.

La délivrance d'un permis de construire en méconnaissance des PPRI est de nature à entraîner la responsabilité pénale des élus, notamment sur le fondement de l'article 121-3, alinéa 3, et de l'article 223-1 du code pénal, qui sanctionnent les manquements à une obligation de sécurité mettant en danger la sécurité d'autrui.

Tout cela est clair, mais peu de ces PPRI sont aujourd'hui en place.

Le second type de zones soumises à un risque d'inondation est classifié au sein des atlas des zones inondables.

Ces atlas des zones inondables sont établis par les directions régionales de l'environnement, les DIREN, dans le cadre des obligations de l'Etat en matière de prévention des risques naturels majeurs prévues par le décret du 11 octobre 1990.

Ces documents portent à la connaissance des collectivités locales et du public les informations disponibles sur les risques d'inondation sous forme de textes et de cartes. Ils sont établis à partir des relevés des évènements historiques connus et d'études de modélisation. Ne faisant l'objet d'aucune concertation avec les élus locaux, ils font parfois l'objet de modifications importantes sans qu'aucun événement nouveau ne soit intervenu pour justifier l'extension des périmètres concernés et l'aggravation de l'aléa du risque envisagé. Ainsi, dans le Calvados, l'atlas des zones inondables, mis à jour en 2003, vient de connaître une nouvelle mise à jour en novembre 2004, qui étend les zones inondables bien au-delà du périmètre des plus hautes eaux et remplace, pour de nombreux secteurs, le classement zone alluviale à risque mal identifié par un classement zone inondable.

Les atlas des zones inondables recouvrent donc des zones très larges dans lesquelles les risques d'inondation ne sont souvent pas avérés, voire sont tout à fait improbables. Il est dès lors très difficile pour les maires d'en tenir compte, notamment pour refuser un permis de construire, sans entraîner un fort mécontentement général.

De plus, cette double classification crée une instabilité dans les informations portées à la connaissance des élus locaux et du public qui risque de décrédibiliser la politique générale en matière de prévention des risques majeurs.

Surtout, il semble qu'aux termes du décret du 11 octobre 1990 les seules obligations des maires découlant de ces atlas des zones inondables consistent en une information du public sur les risques encourus ; il n'incombe nullement aux maires de les prendre en compte lors de la délivrance des documents d'urbanisme.

Monsieur le ministre, je vous remercie de m'indiquer si les élus locaux et les maires qui ne tiennent pas compte des atlas des zones inondables, notamment lors de l'élaboration des documents d'urbanisme et de la délivrance des permis de construire, engagent leur responsabilité administrative, civile et surtout pénale de la même manière qu'en cas de méconnaissance des PPRI.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur les responsabilités des autorités locales compétentes en matière d'urbanisme qui ne tiendraient pas compte, lors de l'élaboration des documents d'urbanisme ou de la délivrance de permis de construire, des informations sur les risques d'inondation contenues dans les atlas des zones inondables.

Vous faites, à bon droit, la distinction entre deux types de documents qui n'ont ni la même valeur juridique ni, par conséquent, les mêmes implications en termes de responsabilités : d'une part, les plans de prévention des risques naturels prévisibles, servitudes d'utilité publique annexées aux plans locaux d'urbanisme et directement opposables aux tiers et, d'autre part, les atlas des zones inondables, documents purement informatifs qui comportent notamment une cartographie des phénomènes historiques recensés.

Cependant, comme le rappelle la circulaire ministérielle du 4 novembre 2003 relative à la politique de l'Etat en matière d'établissement d'atlas des zones inondables, ces derniers constituent des documents de référence pour la connaissance des phénomènes d'inondation. Il est d'ailleurs de la responsabilité de l'Etat de les porter à la connaissance des autorités locales pour que celles-ci les prennent en compte, en tant que de besoin, dans leurs décisions en matière d'urbanisme.

Par conséquent, bien que dépourvus de valeur réglementaire et ayant vocation à être actualisés ou enrichis avec le temps, ces atlas représentent, au moment de leur transmission, un certain état des connaissances sur les risques d'inondation. Ils doivent, à ce titre, contribuer à orienter la réflexion des collectivités territoriales sur le développement et l'aménagement de leur territoire au travers des documents d'urbanisme. Ils doivent également inciter ces mêmes collectivités à apprécier les conditions de délivrance des autorisations en droit des sols au regard des impératifs de sécurité publique, en application notamment de l'article R. 111- 2 du code de l'urbanisme.

Les responsabilités encourues par les autorités compétentes en matière d'urbanisme sont largement reconnues sur le plan administratif dans le cas où un permis de construire a été délivré sans tenir compte des risques connus.

En matière pénale, ne pas tirer de conclusion directe, dans le domaine de l'urbanisme, d'un atlas des zones inondables n'est pas en soi constitutif d'un manquement à une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement au sens de l'article 223-1 ou de l'article 121-3 du code pénal, comme le serait en revanche la violation d'une règle édictée par un plan de prévention des risques, un PPR.

En revanche, et j'insiste sur ce point, en application du même article 121-3 du code pénal, le juge pénal pourrait qualifier de faute caractérisée ayant exposé la vie d'autrui à un risque d'une particulière gravité qui ne pouvait être ignorée la délivrance d'un permis de construire dans une zone identifiée comme soumise à un risque d'inondation important.

M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont.

M. Ambroise Dupont. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous avez apportées sur la classification et la hiérarchie des documents. Toutefois, il ne m'apparaît pas clairement que la vie des maires en sera simplifiée.

Aujourd'hui, les services de l'Etat, notamment la DDE, service instructeur en matière de documents d'urbanisme et de permis de construire, émettent purement et simplement un avis défavorable à toute construction qui se trouve ressortir de l'atlas des zones inondables.

On nous dit, année après année, que la carte évolue en fonction des travaux destinés à rendre constructibles des terrains aujourd'hui situés en zone dite inondable. Vous reportez ainsi un risque, puisque les travaux qui aboutissent à des remblaiements, dont on ne mesure pas toujours les effets, conduisent à créer de nouvelles zones inondables, lesquelles n'auront pas été signalées dans le précédent atlas ayant permis la délivrance du permis de construire.

Nous allons au devant de grandes difficultés et, s'il n'y a pas une lecture commune des services de l'Etat des divers documents établis dans ce domaine, les maires ne pourront pas facilement assumer la responsabilité qui leur est confiée.

Monsieur le ministre, les zones inondables figurent en rouge dans les PPRI. Il ne faudrait pas que ces atlas des zones inondables « rougissent » à la vitesse grand V, sous peine de bloquer tout développement.

mesures de prévention et d'alerte au tsunami en méditerranée

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 656, adressée à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Roland Courteau. Depuis le 26 décembre 2004 et le raz-de-marée qui a dévasté les rives de l'Asie du Sud, les populations qui résident à proximité des côtes s'interrogent sur l'existence d'un risque et sur le degré de protection dont elles sont susceptibles de bénéficier. Le problème se pose peut-être plus particulièrement pour la Méditerranée puisque la tectonique des plaques fait de cette mer une zone à forts risques sismiques. Par le passé, des séismes particulièrement meurtriers, suivis de tsunamis, ont bien eu lieu sur cette mer.

Certes, chacun sait que le risque est moins important que dans l'océan Indien ou dans l'Océan Pacifique et qu'il est relativement éloigné dans le temps. Il n'empêche que ce risque existe et qu'en raison de la sensibilisation toute particulière à ce problème depuis le 26 décembre dernier les populations éprouvent une certaine angoisse, qu'il ne faut toutefois pas exagérer. Le fait que nous ne disposions d'aucun système d'alerte en Méditerranée n'y est pas étranger.

Je ne sous-estime pas, monsieur le ministre, la complexité de la question. Tout d'abord, la mise en place d'un tel système ne concerne pas, j'imagine, un seul pays. Elle exige donc une concertation et une collaboration de l'ensemble des pays du pourtour de la Méditerranée, notamment de la Méditerranée occidentale.

Ensuite, l'étroitesse de cette mer peut constituer un facteur aggravant, puisqu'un raz-de-marée consécutif, par exemple, à un séisme au large du Maghreb atteindrait nos côtes très rapidement : j'ai entendu parler de soixante minutes environ, ce qui implique un dispositif d'alerte très réactif.

Je ne voudrais pas que mes propos soient considérés comme alarmistes, mais nous ne devons rien négliger, car de tels phénomènes sont imprévisibles.

Face à de tels risques majeurs, il est normal que les populations souhaitent être informées sur le degré de protection existant, notamment en Languedoc-Roussillon - mais cela concerne également la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, monsieur le président - où les côtes sont par endroit tellement basses qu'elles subiraient, y compris dans le cas d'un raz-de-marée de faible amplitude, des dégâts considérables.

S'il est vrai, monsieur le ministre, que les séismes sont imprévisibles, les raz-de-marée qui les suivent sont, eux, prévisibles. Or il existe en France un centre sismologique qui assure l'alerte sismique pour l'ensemble de la Méditerranée.

Les scientifiques considèrent aujourd'hui que nous disposons du savoir nécessaire et que les compétences sont réunies pour mettre en place un système d'alerte au tsunami, fonctionnant, dans des délais très brefs, par liaison de stations sismiques à des centres de collecte de données transmises par satellite. Il reste à savoir qui coordonnerait l'ensemble et, surtout, à s'assurer que les financements seront bien au rendez-vous.

Il reste également à savoir comment préparer, sensibiliser les populations, et les rendre aptes à recevoir les informations pour organiser leur autoprotection. Il convient, en outre, d'évaluer la capacité des institutions à réagir dans des temps très brefs sans que les populations soient, pour autant, maintenues dans un état de « suralerte » qui serait, à bien des égards, préjudiciable.

J'admets que la question est compliquée. Si je me devais, monsieur le ministre, de cibler ce dossier sur la Méditerranée occidentale, la question se pose également pour la façade atlantique et pour l'outre-mer. En ce qui concerne l'ensemble de ces zones, le président du groupe socialiste, M. Jean-Pierre Bel, a d'ailleurs fait part au bureau du Sénat de l'opportunité de saisir l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, lequel pourrait utilement nous éclairer. J'aimerais, monsieur le ministre, connaître votre sentiment sur ce point.

Pour conclure, je souhaite simplement que vous puissiez faire le point aujourd'hui sur l'état d'avancement du dossier relatif à la Méditerranée.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Vous m'interrogez, monsieur le sénateur, sur les mesures que j'entends prendre en matière de prévention et d'alerte au tsunami en Méditerranée. C'est là une question qui a fait l'objet d'un colloque auquel j'ai participé, il y a quelques jours, et qui s'est déroulé à Nice, sous la présidence de M. Christian Estrosi, président du conseil général.

En termes de probabilité, d'occurrence et d'importance des dégâts, le risque direct lié aux séismes est bien plus important que celui qui résulte d'un tsunami.

Aussi, j'ai présenté, le 8 décembre dernier, les grandes orientations d'un programme national de prévention du risque sismique. Le détail opérationnel de ce plan sera rendu public dans les prochaines semaines. Ce programme comprendra des mesures en matière de prévention et d'alerte au tsunami en Méditerranée, qui seront engagées dès 2005.

La première de ces mesures vise à pouvoir alerter les autorités et la population. Il s'agit de mettre en place et de coordonner, sous l'égide de l'UNESCO, un système d'alerte en Méditerranée. Il devra être adapté aux spécificités locales, notamment à la faible étendue de cette mer. Je rappelle qu'un système, également placé sous l'égide de l'UNESCO, existe déjà dans le Pacifique.

La deuxième mesure consiste à évaluer et à cartographier les risques Il s'agira de définir, sur le pourtour méditerranéen, les zones présentant un risque maximum vis-à-vis des effets d'un tsunami, à partir de la connaissance des tsunamis historiques, du contexte tectonique et sismique. Il semble bien qu'il y ait, selon les situations géographiques en Méditerranée, des différences de risques qui demandent naturellement à être évaluées.

La troisième mesure tend à renforcer l'éducation. Le comportement des enfants ayant souvent une influence importante sur celui des parents, il est en particulier essentiel de les sensibiliser aux risques naturels et notamment au risque de tsunami : un comportement adapté du citoyen peut éviter des pertes humaines importantes. A cet égard, j'ai eu l'occasion de constater que, dans le système scolaire français, des initiatives avaient déjà été prises, en particulier autour de la Méditerranée, et j'en félicite leurs auteurs. Il conviendra de systématiser cette sensibilisation.

La quatrième mesure a pour objet de sensibiliser les populations exposées. La culture du risque est en effet souvent faible et, plus le temps passe, plus le risque est oublié.

C'est la raison pour laquelle des campagnes de sensibilisation seront conduites auprès des différentes catégories de populations exposées telles que les habitants, les touristes et les professionnels du tourisme.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je remercie M. le ministre de sa réponse, mais il n'a pas évoqué la question du financement.