compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures cinq.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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Décès d'un ancien sénateur

M. le président. J'ai le regret de vous faire part, avec beaucoup de tristesse et de chagrin, du décès de notre ancien collègue Hubert Durand-Chastel, un homme compétent, discret et courtois, qui fut sénateur des Français établis hors de France de 1990 à 2004. J'exprime en cet instant toute la peine que je ressens.

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Dépôt d'un rapport du Gouvernement

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des lois et sera disponible au bureau de la distribution.

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Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

taux d'encadrement pour l'accueil périscolaire

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 7, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

M. Bernard Piras. Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais attirer l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les dispositions de l'article 13 du décret n° 2006-923 du 26 juillet 2006 relatif à la protection des mineurs accueillis hors du domicile parental et modifiant le code de l'action sociale et des familles.

Selon cet article, qui remplace l'article R. 227-16 du code de l'action sociale et des familles, « pour l'encadrement des enfants scolarisés pendant les heures qui précèdent et suivent la classe, lorsqu'il relève des dispositions de l'article L. 227-4, l'effectif minimum des personnes exerçant des fonctions d'animation est fixé comme suit : un animateur pour dix mineurs âgés de moins de six ans ; un animateur pour quatorze mineurs âgés de six ans ou plus ».

Par ailleurs, il faut également préciser que ce calcul doit être réalisé par groupe d'âge - moins ou plus de six ans -, ce qui peut conduire à accroître l'effectif du personnel d'encadrement.

Une telle réglementation suscite une vive inquiétude parmi les élus locaux ou les présidents d'associations chargés de gérer l'encadrement périscolaire. Au regard de la situation actuelle, le respect de ces nouvelles normes entraînera inéluctablement une augmentation notable du prix du repas et de la garderie.

Même si le fait de ne pas déclarer la garderie périscolaire et de perdre ainsi les aides allouées par la caisse d'allocations familiales permet d'échapper à cette réglementation, il apparaît clairement qu'en cas d'accident ou de contentieux auquel serait confrontée une commune ou une association ne respectant pas ce taux d'encadrement les juges s'appuieraient sur cet article R. 227-16 pour apprécier la conformité de la garderie périscolaire en cause.

Ainsi, soit la commune ou l'association se met en conformité avec cette réglementation, ce qui engendrera une hausse significative des tarifs pour les familles, soit elle choisit de ne pas l'appliquer, prenant ainsi un risque important.

Aussi, je souhaiterais savoir si Mme la ministre de l'intérieur est en mesure de rassurer les gestionnaires de ces services.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui présente ce matin à l'Assemblée nationale le budget du ministère de l'intérieur en commission élargie.

En accueillant les enfants pendant les heures qui précèdent ou qui suivent la classe, les garderies périscolaires rendent un service essentiel pour nos concitoyens et pour les familles.

Toutefois, les règles applicables en la matière ont longtemps donné lieu à des interprétations divergentes, source d'insécurité juridique. L'ordonnance du 1er septembre 2005 relative au régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile parental à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels ou des loisirs et son décret d'application du 26 juillet 2006, pris conjointement avec le ministère chargé de la jeunesse, ont tenté de clarifier le droit.

Ce nouveau dispositif repose en fait sur la volonté de concilier deux impératifs : d'une part, clarifier et sécuriser les conditions d'organisation des différents types d'accueil périscolaire, d'autre part, conserver une marge de souplesse en fonction de chaque réalité locale.

Ainsi, conformément à l'article R. 227-1 du code de l'action sociale et des familles, seuls les accueils de loisir, sujets à déclaration, sont désormais clairement subordonnés à des normes d'encadrement strictes. Les mineurs qui fréquentent régulièrement une telle structure doivent se voir proposer un accueil d'au moins deux heures, au cours desquelles un minimum d'activités est organisé.

En revanche, si, compte tenu des réalités locales, le choix s'est porté sur un accueil moins formel, le gestionnaire est en mesure d'organiser librement le service, sans obligation de déclaration ni règle d'encadrement spécifique.

C'est en fonction de chaque réalité de terrain que la collectivité appréciera et mettra en oeuvre les mesures nécessaires à la sécurité des mineurs qu'elle accueille.

Cette réforme, fruit d'une très large concertation avec l'ensemble des partenaires concernés, a bien pour objet de garantir la sécurité des enfants tout en laissant à chaque élu local la marge d'appréciation nécessaire pour organiser au mieux le service, en fonction des besoins des familles et des capacités de chaque collectivité.

Dans ces conditions, monsieur le sénateur, je crois pouvoir dire que ce nouveau dispositif est approprié et qu'il permet de garantir à la fois le principe de libre administration des collectivités locales et la protection des enfants.

J'espère que cette réponse saura apaiser les inquiétudes de ceux dont vous vous êtes fait le relais.

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.

M. Bernard Piras. Ma question, qui n'était pas polémique, avait pour objet de rassurer les élus en leur permettant de mieux comprendre la réglementation. Les situations étant très différentes selon la taille des collectivités locales et selon le nombre d'enfants accueillis, il faudrait que les règles soient interprétées avec plus de souplesse.

collectivités territoriales et distribution d'énergie

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 38, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

M. Francis Grignon. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur les conséquences de la mise en oeuvre de l'article 33 de la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie pour les collectivités territoriales ayant constitué un distributeur non nationalisé, un DNN, visé à l'article 23 de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz.

Le transfert de la compétence d'organisation de la distribution d'électricité à un syndicat intercommunal unique à l'échelon départemental pourrait mettre en cause l'existence même des petits distributeurs non nationalisés ou compromettre les intérêts des communes concernées.

Monsieur le secrétaire d'État, ne serait-il pas possible de différer de quelques mois l'application de l'article 33 de la loi du 7 décembre 2006 dans les départements où il existe un ou plusieurs DNN afin de permettre de mener à bien la concertation nécessaire entre la direction générale des collectivités locales, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, la FNCCR, et l'Association nationale des régies de services publics et des organismes constitués par les collectivités locales ou avec leur participation, l'ANROC ?

L'est de la France compte beaucoup de régies municipales. En particulier, il en existe une dans le chef-lieu de canton dont je suis l'élu, Erstein. Il serait dommage que ces régies municipales, très dynamiques, créatrices d'emplois de proximité et, bien sûr, d'un grand intérêt pour les communes concernées soient en quelque sorte nationalisées à l'échelon du département. C'est la raison pour laquelle je voudrais savoir s'il ne serait pas possible de différer légèrement l'application de la loi, le temps d'y apporter quelques aménagements.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de Mme la ministre de l'intérieur, qui est retenue à l'Assemblée nationale.

Votre question porte sur un sujet qui est une source de préoccupation pour de nombreux élus locaux, plus particulièrement dans l'Est. Vous-même connaissez très bien ces réalités puisque, élu d'un canton comptant sur son territoire une régie municipale dynamique, vous les vivez sur le terrain.

L'article 33 de la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie a effectivement pour objet de favoriser une organisation efficace, regroupée à l'échelon départemental.

Selon l'interprétation qu'en fait Mme la ministre, la mise en oeuvre de cet article 33 ne doit en aucun cas conduire à une remise en cause de l'existence des DNN. La libre administration des collectivités locales, dont vous vous êtes fait le relais efficace, doit être strictement respectée.

Notamment à la suite des alertes que vous avez lancées à plusieurs reprises, Mme la ministre a adressé des instructions en ce sens aux préfets. Ainsi, je vous confirme qu'il sera tenu compte de la volonté de certaines collectivités de continuer à recourir à un distributeur non nationalisé pour la distribution de l'électricité.

Sur la base de ces garanties, vous conviendrez sans doute, monsieur le sénateur, qu'il n'est pas nécessaire de différer l'application de l'article 33 de la loi du 7 décembre 2006.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne pouvais espérer meilleure réponse et vous en remercie.

conditions d'exercice de la compétence voirie pour les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. André Boyer, auteur de la question n° 41, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

M. André Boyer. Ma question, qui s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, porte sur les conditions d'exercice de la compétence voirie par les collectivités.

La jurisprudence a développé une conception très large de la notion de voirie incluant non seulement la bande de roulement, mais également l'ensemble de ses dépendances et accessoires. Elle a aussi établi clairement que les trottoirs devaient être considérés comme des dépendances de la voie.

Par conséquent, dès lors que la compétence voirie a été transférée à une communauté de communes, cette dernière doit assurer la création, l'entretien et l'aménagement des trottoirs attenants aux voies d'intérêt communautaire. Il en va de même pour le département sur les routes départementales.

Cette conception large de la compétence voirie pose des difficultés d'interprétation quant à la nature des travaux qui incombent à l'autorité gestionnaire. Lorsqu'il s'agit notamment de la traversée des bourgs par une voie départementale, les conseils généraux se trouvent souvent confrontés à des exigences de la part des communes en matière de mobilier urbain, de plantations, d'aménagement ou d'éclairage public.

Or, si certains de ces ouvrages, comme l'éclairage public, peuvent être indispensables à l'exploitation de la voie, d'autres, bien qu'ils affectent les emprises des trottoirs, ne contribuent en rien aux besoins de la circulation routière ou n'ont qu'une fonction d'embellissement ou d'ornementation.

Dans ce cas, et même s'il est reconnu que ces derniers travaux ne relèvent pas de la compétence de l'autorité gestionnaire de la voie, les communes ne sont pas autorisées par les préfets à engager les dépenses correspondantes, en vertu des principes de spécialité et d'exclusivité.

Face à cette situation, je souhaiterais que Mme la ministre rappelle clairement les règles applicables pour un exercice effectif de la compétence voirie par les collectivités, en particulier par les départements.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de Mme la ministre de l'intérieur, qui est retenue à l'Assemblée nationale.

Votre question, délicate compte tenu des subtilités de la jurisprudence administrative, me permet de préciser un point de droit sur les responsabilités des collectivités territoriales.

Il s'agit de l'emprise de la route et de ses dépendances, dès lors que celles-ci sont nécessaires à la conservation de la route, à son exploitation ou à la sécurité des usagers

Selon la définition retenue par la jurisprudence administrative, la compétence voirie, comme vous l'avez souligné, doit être considérée de façon extensive. On aurait du mal à comprendre qu'une collectivité soit compétente uniquement pour la chaussée, tandis qu'une autre le serait pour les talus et les murs de soutènement. Même en France, il y a des limites à la subtilité de notre droit !

Toutefois, l'application concrète sur le terrain pose un problème. Comment permettre à une commune traversée par une voirie départementale de procéder à des travaux d'embellissement et d'amélioration de son environnement ?

La réponse à cette question de jurisprudence administrative est claire. Les communes qui le souhaitent peuvent procéder à des mesures d'embellissement ou d'ornementation liées à une voirie qui les traverse, alors même que celle-ci n'est pas de leur compétence.

Le critère est que les accessoires ne soient pas nécessaires pour la voie publique ou la sécurité des usagers. C'est le cas des espaces verts, des trottoirs ou des éclairages publics à finalité esthétique, comme vous venez de le mentionner, monsieur le sénateur. Par conséquent, leur aménagement et leur entretien peuvent être assurés par la commune, même si la voirie est départementale.

M. le président. La parole est à M. André Boyer.

M. André Boyer. Je remercie M. le secrétaire d'État de sa réponse qui apporte beaucoup de clarté dans ce débat entre les collectivités locales responsables et l'autorité préfectorale.

Mme la ministre de l'intérieur aura à coeur, je n'en doute pas, de transmettre cette réponse aux préfets et aux sous-préfets, qui vérifient les délibérations des conseils municipaux, des conseils des communautés de communes et des conseils généraux.

aménagement des aires de grand passage pour les gens du voyage

M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendle, auteur de la question n° 42, adressée à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme Catherine Troendle. Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur le financement des aires d'accueil, et plus particulièrement des aires de grand passage des gens du voyage.

Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a déjà apporté à l'une de mes collègues une réponse à cette question, mais de façon incomplète dans la mesure où de récentes dispositions législatives n'ont pas été prises en compte.

Les communes de plus de 5 000 habitants sont contraintes non seulement de se doter d'une aire d'accueil des gens du voyage, souvent limitée à quelque vingt ou vingt-cinq places, mais aussi de participer au financement des grandes aires de rassemblement. De la sorte, elles se trouvent doublement taxées, au regard, d'abord, de leur obligation individuelle, puis de leur obligation collective.

Nombreux sont les maires de mon département qui se sont émus de cette lourde contrainte, compte tenu du coût de la réalisation d'une aire, auquel s'ajoute celui, non moins considérable, de la remise en état des lieux.

Face à cette situation, on ne peut que se réjouir des récentes dispositions de l'article 89 de la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement relatif aux aires de grand passage destinées à répondre aux besoins des déplacements des gens du voyage, qui prévoient la possibilité pour le représentant de l'État dans le département de faire application d'un taux maximal de subvention de 100 % du montant des dépenses engagées dans le délai imparti, dans la limite d'un plafond fixé par décret.

Dès lors, je souhaiterais savoir dans quel délai il est permis d'espérer la parution de ce décret. Je souligne toutefois le fait que l'application de ce taux n'est jamais qu'une faculté, de sorte que toutes les difficultés ne sauraient être résolues.

Par ailleurs, s'agissant de subventions complémentaires que la région, le département ou les caisses d'allocation familiales pourraient également accorder, j'apprécierais, madame la ministre, que vous m'apportiez des précisions sur le financement de ces subventions ainsi que sur leurs modalités d'attribution et de mise en place.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Madame le sénateur, je ne suis pas certaine d'apporter toutes les réponses que vous souhaitez, car la question que vous posez est, vous le savez, délicate. Le financement de l'accueil des gens du voyage est un problème ancien et récurrent.

La loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage a posé le principe de la participation des communes à l'accueil de ces familles dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles.

L'élaboration d'un schéma départemental d'accueil des gens du voyage prévoit, en fonction des besoins constatés, le nombre, la localisation et la capacité des aires permanentes d'accueil à créer.

Dans un délai de deux ans suivant la publication de ce schéma, ou de quatre ans en cas de dérogation, les communes figurant au schéma doivent réaliser les investissements nécessaires. Nous savons les difficultés qu'elles rencontrent pour respecter cette obligation légale.

L'objectif est de développer les capacités d'accueil des gens du voyage, de tendre vers une meilleure répartition sur le territoire de ces aires, qui suscitent souvent des réactions passionnées sur le terrain, nous le savons tous.

Il s'agit d'équilibrer ces capacités d'accueil, d'alléger la pression sur les aires existantes et de réduire les stationnements illicites encore nombreux, faute de places disponibles suffisantes.

En contrepartie, et pour aider les communes, l'État soutient de manière significative l'investissement et le fonctionnement des aires.

En investissement, les opérations nouvelles ou la réhabilitation des aires créées avant la loi sont subventionnées à hauteur de 70 % de la dépense subventionnable, qui est plafonnée à 15 245 euros par place de caravane pour les nouvelles aires et à 9 147 euros par place pour la réhabilitation des aires.

Concernant la question plus particulière des aires de grand passage que vous m'avez posée, l'article 89 de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement prévoit, comme vous l'indiquez, la possibilité pour le préfet, après avis de la commission consultative départementale, de porter le taux maximal de subvention à 100 % du montant des dépenses engagées dans le délai légal, dans la limite du plafond de dépense subventionnable, qui est fixé, madame le sénateur, à 114 336 euros.

Cette disposition récente vise à modifier les modalités de financement des aires de grand passage dans le cas où leur réalisation rencontre encore des difficultés. C'est notamment le cas des départements en Île-de-France, compte tenu des prix du foncier. Le taux maximal de 100 % est applicable dans la mesure où la commission consultative départementale a été consultée et où des difficultés sont rencontrées au niveau local pour la réalisation de ces aires.

Un bilan complet de l'exécution de ces schémas sera présenté à la commission nationale consultative des gens du voyage.

Par ailleurs, madame le sénateur, afin de prendre en considération les difficultés des maires, je me suis entendu avec mon collègue du budget, Éric Woerth, pour proroger d'un an, sur l'ensemble de l'année 2008, le dispositif de financement des aires d'accueil pour les gens du voyage, créées dans le cadre des schémas départementaux.

Le financement de l'État n'est pas exclusif et d'autres financements complémentaires peuvent être recherchés. Le conseil général et les caisses d'allocations familiales peuvent participer au financement d'une aire de grand passage. Malheureusement, madame le sénateur, dans la mesure où cela dépend uniquement du volontariat, il existe de grandes différences entre les départements. J'encourage les conseils généraux à participer à cette oeuvre de solidarité nationale.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendle.

Mme Catherine Troendle. Madame la ministre, je vous remercie de la clarté de vos propos. Consciente de la complexité de ma question, je suis très sensible au fait que vous ayez réussi à obtenir une prorogation du délai, qui nous permettra d'envisager avec plus de sérénité la mise en place de ces aires.

Comme vous, je regrette qu'il existe des disparités entre les départements, notamment en raison d'une politique volontariste. Je souhaiterais une harmonisation, mais elle n'est probablement pas possible.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Madame le sénateur, si j'ai réussi à obtenir une prorogation d'un an, j'appelle l'attention des élus sur le fait que je ne pourrai pas le faire indéfiniment.

bilan de la mise en oeuvre des droits des usagers institué par la loi du 2 janvier 2002

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 23, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.

M. Georges Mouly. La loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale avait pour objectif de « remettre l'usager accueilli ou accompagné au centre du dispositif ».

Au-delà du débat, certes essentiel, sur la notion même de droits de l'usager, selon que l'on se place du point de vue du libre choix de la prise en charge - et donc de l'adéquation de l'offre en équipement - ou du point de vue plus strict des droits reconnus à l'usager au sein des établissements et des services, on ne saurait négliger l'influence de cette loi, mais aussi l'influence des instruments que celle-ci a mis en oeuvre au profit des droits fondamentaux réaffirmés ou reconnus à l'usager.

Cependant, certains de ces droits ne restent-ils pas encore théoriques, comme le droit d'accès au dossier, en l'absence de mesures réglementaires concernant la désignation par les pouvoirs publics des personnes qualifiées permettant aux usagers de faire valoir leurs droits ? D'autres ne restent-ils pas illusoires - le mot est peut-être un peu fort -, comme le libre choix des prestations ?

De plus, des dispositions ultérieures sont venues contrarier l'universalité souhaitée en 2002, notamment le droit d'option pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile.

L'approche des droits de l'usager semble bien répondre à un souci d'approche globale, et le droit au libre choix suppose évidemment un équipement suffisant.

Or, ce texte a profondément bouleversé le régime des autorisations en liant tout projet de création ou d'extension à son financement. Cette disposition a certes permis d'alléger la pression sur les pouvoirs publics ; mais, si l'on s'interroge sur l'application de la loi du 2 janvier 2002, on peut se demander, madame la secrétaire d'État, si elle a réellement bénéficié aux usagers.

Les efforts consentis depuis 2002 pour augmenter les enveloppes de crédits - efforts non démentis à ce jour - sont sans précédent, mais il faut bien reconnaître que l'essentiel de leurs effets a été de contribuer à combler le retard.

Les dotations limitatives de crédits conduisent à écarter des dépenses qui, bien que nécessaires, excèdent les enveloppes ; les dispositifs de convergence tarifaire risquent de conduire à la standardisation des coûts et à l'uniformisation des financements au détriment, précisément, de l'individualisation promue par la loi de 2002. Les outils d'évaluation prévus pour faire remonter les besoins semblent n'avoir pas ou avoir peu fait l'objet d'investissements.

Dans ces conditions, peut-on durablement préconiser des politiques de professionnalisation, de qualification et de rémunération attractive pour orienter les professionnels vers ces métiers exigeants, des politiques également de modernisation des établissements ? La question, vous en conviendrez, est d'importance. Est-il envisageable de demander aux gestionnaires d'individualiser la réponse à l'usager, de faire du « sur-mesure », et, dans le même temps, de leur imposer des coûts standards et des objectifs communs ? Cela paraît difficilement conciliable, vous en conviendrez tout autant !

Cinq ans après le vote de la loi, quel est l'état des lieux ? Alors que l'application de la loi du 11 février 2005 en faveur des personnes handicapées a déjà fait l'objet, vous le savez mieux que quiconque, d'un débat au Sénat et d'une mission de réflexion, le problème se pose toujours de la conciliation des droits de l'usager et de la régulation de l'offre.

Dans les faits, les droits des usagers ont-ils réellement progressé ? Est-il envisagé d'en faire l'analyse aujourd'hui, en toute impartialité, bien évidemment - ai-je besoin d'y insister ! -, pour tenter de répondre à cette question, dont l'importance, me semble-t-il, ne saurait échapper à quiconque s'intéresse au sujet ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le sénateur, la loi de 2002, vous l'avez souligné, a été une loi refondatrice du secteur social et médico-social, qu'elle a touché de manière transversale. Les institutions, les usagers et leurs représentants, les pouvoirs publics - État et collectivités locales - ainsi que les organismes de sécurité sociale ont dû s'approprier des outils totalement nouveaux qui organisent non seulement les droits des usagers, mais aussi la gouvernance et le financement de ce secteur.

La loi du 11 février 2005 a encore renforcé le droit en faveur de l'usager en l'inscrivant au coeur du dispositif. Si je cite cette loi, à dessein, c'est parce qu'elle est significative de la philosophie qui nous anime : faire de tous nos concitoyens handicapés des acteurs de leur propre vie et du développement de notre société. C'est cette révolution que nous devons mettre en oeuvre par la traduction concrète de tous les droits consacrés par ce texte. C'est également cet esprit qui inspire notre réflexion dans le domaine du grand âge.

La majeure partie des textes d'application de ces deux lois est parue, et les effets en sont d'ores et déjà perceptibles sur les territoires et pour les usagers. Bien sûr, et l'expérience de ces trois dernières années le prouve, des ajustements sont encore nécessaires. C'est pourquoi j'ai décidé de mettre en place - il sera installé cet après-midi même - un comité de suivi de la réforme de la politique du handicap comprenant des représentants des associations, les départements et les services de l'État.

De plus, en 2008, je compte inscrire à l'évaluation des outils de la loi du 2 janvier 2002 un volet spécifique portant sur la mise en oeuvre des droits des usagers, qu'il s'agisse du contrat de séjour, du règlement de fonctionnement, du projet d'établissement ou de service, ou du conseil de la vie sociale. Il s'agira d'évaluer la traduction concrète de la mise en place de tous ces dispositifs. Cette évaluation ad hoc, que je veux voir s'attacher notamment au point de vue des usagers et des professionnels, s'appuiera bien sûr sur les enquêtes et les études qualitatives réalisées par mes services.

Parallèlement, grâce à la création en 2007 de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, s'organise dans ce secteur une double démarche d'évaluation interne et externe des établissements et services, également prévue dans la loi du 2 janvier 2002. Ce processus d'évaluation, dont vous rappelez à juste titre la nécessité, nous permettra d'apporter des éléments de réponse précis aux interrogations que vous avez soulevées.

En outre, je me suis engagée dans une démarche visant à mieux définir la qualification des personnels, soignants ou non soignants, de la filière médico-sociale. Cette question est fondamentale, car, nous le savons, les besoins seront très importants dans ce secteur. Je prépare donc un plan des métiers du médico-social, dont je cernerai les contours en menant tout d'abord quelques expérimentations dans un petit nombre de régions. Nous allons à cette fin signer des conventions pluriannuelles avec les conseils régionaux volontaires pour développer les formations sociales et médico-sociales, de façon à être en mesure de pourvoir plusieurs milliers d'emplois.

L'ensemble de ces démarches conjointes confirme, monsieur le sénateur, mon engagement en faveur du respect des droits des usagers : les lois qui ont été votées doivent trouver une traduction concrète dans leur vie quotidienne.

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie sincèrement, et je regrette d'autant moins d'avoir posé ma question que votre réponse me paraît tout à fait satisfaisante : vous abordez tous les aspects du sujet, vous envisagez la mise en place de tout ce qui est nécessaire et pour contrôler, et pour avancer. C'est la traduction de votre volonté, que chacun ici veut bien reconnaître.