M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est juste !

M. Éric Woerth, ministre. Nous ne pouvons pas nous satisfaire non plus que près de quatre millions de nos concitoyens éprouvent des difficultés pour accéder à un généraliste. L'égalité de tous devant les soins est une exigence constitutionnelle, et même morale. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Face à cette situation, il nous paraît raisonnable de proposer un ensemble de mesures qui appellent de nouvelles négociations conventionnelles.

Ces mesures ouvrent d'autres perspectives avec de nouveaux modes de rémunération, un exercice assoupli et des organisations renouvelées. Aucune mesure coercitive ne sera prise et la liberté d'installation, je le répète, sera garantie. La ministre de la santé est parvenue, par le dialogue, à rassurer les internes sur ce point il y a quelques semaines. Le texte initial du projet de loi a également été modifié pour permettre de les associer aux discussions conventionnelles sur les conditions d'installation. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Donnons-nous simplement les moyens d'éviter que la concentration presque naturelle des médecins n'excède par endroits les besoins de la population tandis qu'ailleurs ces derniers ne se trouvent pas satisfaits. C'est aussi une façon de répondre aux aspirations légitimes des médecins, en particulier des jeunes qui s'installent et qui espèrent une amélioration substantielle de leurs conditions de vie et de travail.

Je voudrais enfin citer une dernière réforme inscrite dans ce projet de loi : l'extension des missions de la Haute Autorité de santé.

Désormais, la Haute Autorité pourra intégrer, dans l'exercice de ses missions, une approche d'ordre médico-économique, afin de privilégier les parcours de soins les plus efficients, tant au plan médical qu'en termes de meilleure utilisation des deniers de l'assurance maladie.

Si le rétablissement des comptes de la sécurité sociale passe par une meilleure maîtrise des dépenses, appuyée sur des réformes de fond, il faut aussi chercher de nouvelles recettes.

Cette recherche doit être guidée par une exigence de solidarité, entre les acteurs de la santé et entre les générations. Cette solidarité doit être respectée par tous et exige par conséquent que nous soyons plus fermes et plus efficaces dans la lutte contre la fraude.

Les efforts que nous demandons sont équitablement partagés entre tous les acteurs : l'État ; les patients ; les professionnels de santé ; les entreprises aussi, puisqu'elles ne bénéficieront plus d'exonérations de cotisations employeur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, car ces cotisations sont faites pour inciter à la prévention ; et, enfin, l'industrie des produits de santé, puisque nous augmentons le taux de la contribution sur le chiffre d'affaires afin de tenir compte de l'accroissement très sensible des dépenses de médicaments.

Au total, si l'on tient compte du prélèvement à la source sur les dividendes instauré par le projet de loi de finances, les recettes supplémentaires s'élèveront à 2 milliards d'euros pour la sécurité sociale, dont près de 1,6 milliard pour le régime général.

Cette solidarité que nous recherchons en matière de protection sociale doit aussi s'appliquer à chacun proportionnellement à ses revenus.

La discussion à l'Assemblée nationale a permis d'enrichir ce projet de loi en y insérant une contribution sur les stock-options et sur les actions attribuées gratuitement. Cette cotisation sera affectée à l'assurance maladie.

Au-delà de la solidarité entre tous les acteurs, il y a celle qui unit les générations. C'est la deuxième solidarité. Nous la renforçons grâce au prolongement de l'activité des seniors, car il ne peut y avoir de plus en plus de pensionnés s'il y a, dans le même temps, de moins en moins de cotisants. C'est assez mathématique !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est sûr !

M. Éric Woerth, ministre. Chacun sait que la clef du redressement des comptes sociaux réside dans le prolongement de l'activité des seniors, qui, même si elles sont les personnes les plus âgées, sont encore capables de travailler.

Ce projet de loi tend donc à dissuader clairement les entreprises de faire partir les seniors en préretraite ou en retraite de façon obligatoire. Valérie Létard reviendra sur ces mesures. Nous en attendons 350 millions d'euros de recettes supplémentaires. Ces dispositions permettront d'accroître non seulement le nombre de personnes au travail, ce qui est toujours bon pour l'économie, mais aussi les recettes de la sécurité sociale. Elles sont donc doublement vertueuses.

Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exigence de solidarité impose de lutter sans faiblesse contre ceux qui la transgressent, qui la bafouent ouvertement.

La fraude, car il ne s'agit pas d'autre chose, mine l'esprit de responsabilité et le sens de la solidarité. C'est donc là aussi une affaire d'équité et de morale. On ne peut pas demander aux Français plus de solidarité et plus d'efforts si on ne s'attaque pas plus efficacement à ceux qui tentent d'abuser de la situation.

Avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous entamons la mise en oeuvre d'un plan ambitieux et très concret de lutte contre la fraude fiscale et sociale. Il s'agit de changer d'échelle, comme me l'ont demandé le Président de la République et le Premier ministre lorsqu'ils m'ont confié la mission d'être chef de file dans cette lutte contre les fraudes.

Ce plan comporte trois grands axes d'action ; d'autres apparaîtront probablement au fil du temps.

Premier axe : nous nous donnons les moyens de mieux contrôler en développant les échanges d'informations entre les différents services. C'est la base de la lutte contre la fraude. Je vais en effet tirer profit du périmètre du ministère des comptes publics pour améliorer la qualité des collaborations entre les services fiscaux et les organismes de sécurité sociale, dans le respect, bien évidemment, des prescriptions de la CNIL.

Deuxième axe : nous renforçons les pouvoirs de contrôle des organismes sociaux. Leurs agents seront habilités à recueillir des informations auprès des tiers, tels que les banques, les fournisseurs d'énergie ou de téléphonie. Ils pourront ainsi mieux contrôler la sincérité des déclarations des assurés et mieux lutter contre la fraude aux cotisations et aux prestations.

Troisième axe : nous aggravons les sanctions. Des peines plancher sont instaurées pour le travail dissimulé : les URSSAF - je me suis récemment rendu à l'URSSAF de Melun, c'est une mesure qui est particulièrement appréciée - pourront procéder à un redressement forfaitaire correspondant à six mois de salaire minimum dans le cadre de la lutte contre le travail au noir. Nous parons ainsi à l'argument de l'employeur pris en flagrant délit qui prétend toujours que le salarié non déclaré a été embauché le matin même, voire en début d'après-midi !

Les fraudes aux allocations logement seront également sanctionnées, cette fois par la suppression des prestations pour une durée pouvant atteindre un an, en fonction de la gravité des faits.

Ce plan n'est qu'un début. Tous les sujets ne sont pas couverts. Nous essayons d'être le plus concret possible. Il faut commencer non par des grands principes, mais en s'attaquant aux vastes processus de fraude, qui sont aujourd'hui souvent d'ordre mafieux.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !

M. Éric Woerth, ministre. Des organisations sont constituées pour frauder et pour voler l'État, les contribuables et les assurés sociaux. J'aurai l'occasion de venir vous rendre compte des progrès accomplis.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la sécurité sociale est l'affaire de tous ; le redressement de ses comptes implique par conséquent un effort de tous.

Le projet de loi que le Gouvernement vous soumet est, me semble-t-il, équilibré : équilibré entre maîtrise des dépenses, d'une part, et apport de recettes nouvelles, d'autre part - 2 milliards d'euros d'un côté, 2 milliards d'euros de l'autre -; équilibré parce que nous demandons des efforts à tous et que l'État fait lui-même un effort supplémentaire.

Le redressement définitif de nos comptes sociaux, auquel nous sommes tous ici, je pense, très attachés, exigera d'aller plus loin, de poursuivre sans relâche les réformes entamées et d'en engager de nouvelles. C'est ce que nous allons faire en ouvrant trois grandes concertations : sur le financement de la protection sociale, sur celui de la santé et sur les retraites.

Ces efforts ne seront possibles et efficaces que s'ils sont compris et partagés, bien évidemment, par les élus de la nation, mais aussi par nos concitoyens et les acteurs du système de santé. C'est pourquoi nous devons sans cesse rappeler à nos concitoyens le sens profond de la sécurité sociale, dont nous devons l'acte fondateur à la précédente République, ainsi que l'engagement mutuel qu'elle présuppose, la responsabilité sans faille qu'elle exige, l'adaptation permanente qu'elle nécessite.

C'est ainsi que nous continuerons à faire vivre la solidarité qui nous unit et le pacte social qui en est la traduction. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est le premier de la nouvelle législature. Il traduit les axes de réforme voulus par le Président de la République s'agissant notamment des retraites, de la famille, des accidents du travail et des maladies professionnelles ou encore de la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées.

S'agissant de la branche vieillesse, nous savons que le rendez-vous de 2008 aura pour objet de conforter notre système de retraite par répartition. En attendant ce rendez-vous, disons les choses clairement : la dégradation des comptes de la branche vieillesse est un sujet de préoccupation pour le Gouvernement et pour tous.

On ne peut se contenter de se réfugier derrière les explications démographiques, notamment le « papy boom ». Il faut agir dès maintenant, et de façon équilibrée. C'est une question de responsabilité et de respect envers nos enfants. Nous avons même à leur égard une obligation de résultat, pour préserver le pacte de solidarité entre les générations.

M. François Autain. C'est mal parti !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Il n'est donc pas question d'attendre le rendez-vous de 2008 sans rien faire. Le présent PLFSS doit marquer une première rupture pour modifier réellement les comportements et agir pour l'emploi des seniors.

Nous présentons donc plusieurs mesures en faveur de l'emploi des seniors.

Vous connaissez tous les chiffres. Le taux d'emploi des personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans reste en France très inférieur à la moyenne européenne : il s'élevait à 37,6 % en 2006 contre 45,3 % pour l'Europe des Quinze, loin de l'objectif de 50 % fixé à l'horizon 2010 dans le cadre de la stratégie de Lisbonne et très loin des 70 % de la Suède.

C'est donc là une véritable exception française, et nous nous en passerions bien. C'est surtout le résultat d'un raisonnement faux, celui du partage du travail. Maintenir un salarié de cinquante-cinq ans dans l'emploi, ce n'est pas diminuer les perspectives d'un jeune. Or la France cumule ce triste double record en Europe : le taux d'emploi des seniors y est le plus faible et le taux de chômage des jeunes figure parmi les plus élevés.

Conformément aux engagements du Président de la République, le Gouvernement entend supprimer les verrous fiscaux, sociaux et réglementaires qui pénalisent celles et ceux qui voudraient continuer de travailler et qui incitent les entreprises, qu'elles soient publiques ou privées, comme les administrations, d'ailleurs, à négliger les seniors dans leur gestion des ressources humaines, comme on le constate trop souvent.

Il faut sortir des discours et des bonnes intentions et faire en sorte que les comportements changent véritablement.

S'agissant des préretraites, nous ne pouvons plus accepter qu'elles bénéficient d'un assujettissement aux cotisations et à la contribution sociale généralisée plus favorable que pour les salaires, car cela constitue aujourd'hui un encouragement de fait à la mise en préretraite. Il est donc proposé de porter de 24,15 % à 50 % le taux de la contribution créée par la loi du 21 août 2003 sur les avantages de préretraites d'entreprise.

De plus, les allocations de préretraite seront désormais assujetties à la CSG au taux de 7,5 %, tout comme les revenus d'activité. Ces nouvelles dispositions s'appliqueront uniquement aux départs en préretraite intervenant à compter du 11 octobre 2007, date de la présentation du PLFSS en conseil des ministres.

S'agissant des mises à la retraite d'office, nous ne comptons pas attendre l'extinction au 31 décembre 2009 des accords de branche qui les maintiennent à titre dérogatoire pour dissuader très fortement cette pratique.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le PLFSS prévoit de soumettre les indemnités versées dans ce cadre, qui sont aujourd'hui largement exonérées, à une contribution de 25 % en 2008, ...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. ... puis de 50 % en 2009, contribution dont le produit sera affecté à la Caisse nationale d'assurance vieillesse.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est que justice !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Voilà une décision courageuse !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Pour faire suite à la recommandation émise par le Conseil d'orientation des retraites, le COR, dans son rapport de janvier 2007, il convient également de revenir sur une disposition adoptée par amendement dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Cet amendement avait introduit jusqu'en 2014 dans certaines branches professionnelles un dispositif incitant à des départs en retraite plus précoces ; le PLFSS prévoit sa suppression.

Nous étudions avec Christine Lagarde d'autres mesures, que nous présenterons très prochainement. L'objectif, c'est d'aller plus loin et de faire mieux que les résultats du « plan senior » de 2006, non seulement en pénalisant les entreprises qui ne jouent pas le jeu, mais également, par exemple, en encourageant celles qui le jouent. C'est, je le répète, un enjeu majeur, qui est aussi au centre de la réforme des retraites.

Certains s'interrogent sur la question de la revalorisation des pensions de retraite au 1er janvier 2008, qui est prévue à hauteur de 1,1 %.

M. François Autain. Ce n'est pas beaucoup !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. J'ai bien en tête, comme vous, d'ailleurs, que la revalorisation permet de garantir le pouvoir d'achat des retraités en prévoyant une indexation des pensions de retraite sur les prix. Or, vous le savez, le chiffre qui est fixé aujourd'hui est inférieur à la hausse des prix pour 2008. Cela s'explique par le fait que, en 2007, l'augmentation des pensions était supérieure à l'inflation. Xavier Bertrand a pris un engagement devant la représentation nationale. Vous le savez, une commission de revalorisation des pensions se réunira début décembre avec les partenaires sociaux. C'est à cette commission qu'il appartiendra de dire si, oui ou non, le pouvoir d'achat a été et sera respecté.

M. Guy Fischer. Et les patrons ? Ils ont de l'argent !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Si tel n'est pas le cas - ce sont bien les partenaires sociaux qui se prononceront -, le Gouvernement prendra ses responsabilités, notamment dans le cadre du rendez-vous de 2008.

M. Guy Fischer. C'est scandaleux !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Dans ces conditions-là, nous pourrons proposer une augmentation des pensions concernées.

M. Guy Fischer. Ce sont encore les petits qui paieront !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. La réforme de 2003 a également fixé un objectif ambitieux visant à garantir une retraite égale à 85 % du SMIC aux salariés les plus modestes ayant eu une carrière complète au SMIC. Pour y parvenir, je vous confirme que nous revaloriserons de 3 % le minimum contributif au 1er janvier 2008, qui sera ainsi porté à 633,51 euros par mois.

S'agissant de la famille, trois axes majeurs sont retenus pour le PLFSS.

D'abord, un effort particulier sera engagé en direction des familles les plus modestes pour leur offrir plus de choix dans les modes de garde de leurs enfants.

Aujourd'hui en effet, pour une famille qui fait appel à une assistante maternelle agréée, le reste à charge est supérieur à celui d'une place en crèche. Il faut donc mettre fin à cette distorsion si l'on veut qu'existe un choix réel entre les différents modes de garde.

C'est pourquoi il est prévu d'augmenter de 50 euros par mois le complément de libre choix du mode de garde de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant, en faveur des quelque 60 000 familles qui se trouvent sous le premier seuil de ressource prévu pour cette prestation, c'est-à-dire celles dont les revenus annuels sont inférieurs à 19 225 euros. La prestation passerait ainsi de 375 euros à 425 euros par mois.

Ensuite, nous voulons rendre nos prestations plus efficaces, car plus adaptées aux besoins des allocataires.

Une première mesure vise à instaurer une majoration unique des allocations familiales à quatorze ans, qui remplacera les actuelles majorations versées en deux fois, à onze ans et à seize ans, et dont le montant sera équivalent, à quatorze ans, à celui qui est appliqué actuellement à seize ans, soit 59,57 euros par mois. Cela nous permettra d'être plus en phase avec la réalité vécue par les familles. Les études montrent en effet que c'est à quatorze ans que s'accroît le coût d'un enfant. Cette nouvelle disposition ne s'appliquera bien sûr que pour l'avenir.

La seconde mesure, qui correspond à une demande forte des associations familiales, concerne la modulation de l'allocation de rentrée scolaire en fonction de l'âge. Nous savons pertinemment, et le Président de la République l'a lui-même rappelé, que le coût de la rentrée au lycée est plus élevé qu'à l'école primaire. Nous proposons donc d'inscrire dans la loi le principe de la modulation, et nous fixerons, dans la plus grande concertation, avec les partenaires sociaux et les parlementaires, les modalités précises du barème par voie réglementaire.

Le troisième axe a trait à la simplification des démarches en vue d'obtenir des prestations familiales.

Comme vous le savez, les allocataires doivent actuellement remplir une déclaration de ressources auprès de leur caisse d'allocations familiales le 1er juillet de chaque année. Dès 2008, nous supprimerons cette obligation, et c'est la déclaration d'impôt des demandeurs de prestations qui sera utilisée. Une telle mesure simplifiera la vie des allocataires, qui ne seront désormais plus contraints d'effectuer des formalités administratives redondantes.

Au-delà des mesures immédiates que je viens d'évoquer, le Gouvernement souhaite conforter notre politique familiale.

Nous entendons ainsi donner une nouvelle impulsion à la politique de la famille, en créant notamment une nouvelle structure réunissant les mouvements familiaux, les partenaires sociaux, les représentants des pouvoirs publics et les personnalités qualifiées, et ce en vue d'animer le débat et d'alimenter notre réflexion.

Cette structure permanente, qui s'inspire du Conseil d'orientation des retraites, du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et du Conseil d'orientation pour l'emploi, sera placée sous la présidence du Premier ministre. Elle nous permettra d'avoir une vision à la fois prospective et transversale de la politique de la famille, afin de pouvoir anticiper l'ensemble des défis qui se poseront dans l'avenir, tels que le droit opposable à la garde d'enfant, la dépendance, le handicap ou l'école.

J'évoquerai à présent la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale améliore la situation des ayants droit de personnes décédées d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle après le 1er septembre 2001, en clarifiant les modalités d'application de la hausse de dix points de leurs rentes, qui avait été décidée par la Haute Assemblée en 2001, au lendemain de l'explosion de l'usine AZF à Toulouse.

En outre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit des dotations aux fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante du même ordre que l'an dernier.

Ainsi, la somme allouée au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le FCAATA, progressera même de 50 millions d'euros. Vous le savez, ce dispositif ne remplit aujourd'hui pas totalement son objectif et n'apparaît pas, aux yeux de certains, comme suffisamment équitable. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.) C'est pourquoi, dans les prochains jours, Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, mettra en place un groupe de travail qui sera chargé d'étudier, dans un cadre concerté, les modalités de recentrage de ce fonds sur les personnes ayant réellement été exposées à l'amiante.

Le sujet est important, et vous savez qu'il n'est pas facile à gérer. Le groupe de travail comprendra non seulement les partenaires sociaux et les associations de malades, mais également des parlementaires pour faire suite aux travaux très riches de l'Assemblée nationale et du Sénat sur le sujet de l'amiante, auxquels nombre d'entre vous ont d'ailleurs participé. Bien entendu, l'Assemblée nationale et le Sénat, ainsi que l'ensemble des partenaires sociaux, seront force de proposition.

J'en viens à présent au secteur médico-social.

S'agissant des personnes âgées, le professeur Ménard a remis la semaine dernière le rapport de la commission sur le plan Alzheimer, dont le Président de la République lui avait confié la présidence.

M. François Autain. Parlons-en !

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Il s'agit là d'un enjeu majeur pour notre société, qui connaît actuellement une évolution profonde de la longévité et de la dépendance.

D'ici à dix ans, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans passera de 1 million à 2 millions de personnes.

M. Pierre Fauchon. Voilà une bonne nouvelle ! (Sourires.)

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Et nous savons la part que représentent dans cette population les personnes atteintes par la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées. C'est d'ailleurs tout le sens du chantier du cinquième risque social que nous conduirons.

Pour relever le défi de la longévité, le projet de loi de financement de la sécurité sociale se donne les moyens de faire plus pour les personnes âgées, avec 650 millions d'euros de mesures nouvelles, qui mettent l'accent sur plusieurs axes.

D'abord, le Président de la République s'est engagé à permettre aux personnes âgées dépendantes de rester à leur domicile, si elles le souhaitent, aussi longtemps que possible. C'est pourquoi le projet de loi de financement de la sécurité sociale poursuit l'effort de création de places de services et soins infirmiers à domicile, d'accueil de jour et d'hébergement temporaire.

Ensuite, comme le maintien à domicile n'est pas toujours possible pour les personnes âgées les plus dépendantes, nous fournirons un effort très important pour les maisons de retraite en 2008, en finançant la création de 50 % de places supplémentaires par rapport aux prévisions et en poursuivant leur médicalisation et leur adaptation, notamment architecturale, à l'accueil des personnes atteintes de troubles du comportement.

En outre, nous mettons en oeuvre une solidarité renforcée pour les personnes handicapées, et ce quel que soit leur âge.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit la priorité que le Président de la République souhaite accorder au handicap, comme il l'a d'ailleurs rappelé devant l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales, l'UNAPEI, le 9 juin dernier.

C'est pourquoi on s'oriente, après l'achèvement du plan triennal 2005-2007, vers un effort soutenu de création de places dans les établissements et services pour enfants et adultes handicapés, avec une progression des crédits de 5,7 % et des mesures nouvelles à hauteur de 410 millions d'euros en 2008, soit 32 millions d'euros de plus qu'en 2007.

En outre, s'agissant des enfants handicapés, nous souhaitons assurer la continuité des prises en charge et mettre fin aux barrières d'âge, en étendant aux enfants le bénéfice de la prestation de compensation du handicap. Cette extension, qui prendra la forme d'un droit d'option entre les compléments d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, ou AEEH, et la prestation de compensation du handicap, sera effective au cours du premier trimestre de l'année 2008.

Par ailleurs, un plan d'investissement ambitieux sera piloté par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA. Il visera à réduire les délais souvent trop longs entre l'autorisation préfectorale et la construction effective des places et à limiter les sommes laissées à la charge des personnes hébergées ou de leur famille, qui sont encore alourdies par les frais financiers des établissements. À cette fin, nous profiterons de l'expérience acquise par la CNSA à l'occasion des précédents plans de modernisation du bâti des années 2006 et 2007, dont le premier bilan est très positif.

D'une part, il faut étendre les compétences de la CNSA pour lui permettre d'aider non seulement la modernisation du parc existant, mais également la construction de places nouvelles.

D'autre part, un effort de soutien à l'investissement d'au moins 250 millions d'euros sera réalisé dès l'année 2008. Il sera financé sur les réserves de la CNSA, sachant qu'un euro injecté par cette caisse correspond à quatre euros supplémentaires pour l'investissement, avec l'ensemble des partenaires financeurs. Une telle action, qui aura un effet levier important, est donc nécessaire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, les semaines et les mois qui viennent seront marqués par des réformes importantes et attendues en matière de protection sociale.

Dans le champ de la vieillesse, il s'agira, bien entendu, de la réforme des régimes spéciaux et de celle des retraites.

Dans le champ de la famille, une nouvelle instance permettant de partager et de faire partager une vision large et prospective de la politique de la famille sera instituée.

Dans le champ de la dépendance, la réponse au cinquième risque social, qui constitue une attente forte de nos concitoyens, sera mise en place.

Relever le défi de la solidarité, voilà le mandat qui nous a été confié par les Français ! Nous serons au rendez-vous de nos engagements. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Pierre Fauchon. Excellente intervention !

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'État, mes chers collègues, je note que le Sénat est passionné par la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale... (Sourires.) Heureusement que nos collègues de la commission des affaires sociales sont bien présents.

M. Guy Fischer. Il en manque !

M. François Autain. Sur les bancs du Gouvernement, c'est également dégarni !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Non, M. Éric Woerth et Mme Valérie Létard sont là. Cela fait du monde !

Pour la troisième année consécutive, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 s'inscrit dans le cadre juridique rénové de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

M. Guy Fischer. Parlons-en !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Ainsi, et pour la première fois, nous avons la possibilité de comparer, à l'aide des mêmes règles et des mêmes tableaux, les exercices de trois années, en l'occurrence 2006, 2007 et 2008.

C'est là un intérêt majeur de la nouvelle architecture des lois de financement, qui nous a permis de renforcer nos moyens d'appréciation et de contrôle.

Mes chers collègues, cette troisième application confirme la justesse de nos analyses antérieures, car - vous vous en souvenez - nous avons dès l'origine souhaité améliorer la présentation des projets de loi de financement de la sécurité sociale, étendre leur champ d'intervention, clarifier les relations entre l'État et la sécurité sociale, renforcer l'autonomie de cette dernière, parfaire la qualité des annexes et accroître nos moyens de contrôle sur l'application des lois de financement.

C'est précisément ce à quoi procède désormais le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et je m'en réjouis. Je suis donc satisfait que le Gouvernement ait répondu positivement à nos attentes et à nos appels de l'année dernière.

À l'époque, j'avais mis en évidence des insuffisances dans la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or nombre de progrès ont été réalisés dans le texte qui nous est aujourd'hui présenté. Je m'en félicite, et je salue les initiatives prises par M. le ministre en la matière.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur le ministre, les améliorations que vous avez apportées s'inscrivent dans la perspective du renforcement du cadrage pluriannuel.

Comme vous l'avez souligné, vous avez notamment étayé l'annexe B, afin de justifier plus solidement les évolutions prévues. Ainsi, cette année, deux scénarios économiques, en lien avec les hypothèses associées au projet de loi de finances, sont envisagés dans le document, ce qui n'était pas le cas l'année dernière. De même, deux valeurs sont retenues pour l'ONDAM, ce qui est intéressant pour montrer l'effet d'un tel agrégat sur les comptes sociaux. En outre, les explications sont un peu plus fournies.

Les hypothèses retenues n'en restent pas moins éminemment volontaristes, ce qui est sans doute intrinsèque à ce type d'exercice.

Par ailleurs, nous disposons également d'un chiffrage plus précis et plus exhaustif des mesures nouvelles, et ce tant en recettes qu'en dépenses, comme cela existe déjà pour le projet de loi de finances. Par conséquent, il s'agit non pas d'une innovation, mais bien d'un alignement sur le régime applicable au projet de loi de finances.

Pour la première fois, tous les articles ont un exposé des motifs et - M. le ministre l'a souligné - des compléments ont été apportés aux annexes 8 et 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

En outre, nos remarques sur les programmes de qualité et d'efficience, les PQE, en particulier s'agissant du choix et du contenu des indicateurs associés aux différents programmes, ont été, dans une large mesure, prises en compte.

En revanche - certes, on ne peut pas tout faire d'une année sur l'autre, et sans doute M. Woerth y veillera-t-il l'an prochain -, notre demande concernant une présentation des montants inscrits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale en millions d'euros, et non en milliards d'euros arrondis à la centaine de millions d'euros près, n'a toujours pas été entendue.

Pourtant, dans les projets de loi de finances, les comptes sont bien présentés à l'euro près. Dès lors, peut-on espérer un chiffrage des mesures plus précis dans les prochains projets de loi de finances ? En effet, une présentation à la centaine de millions d'euros près laisse nos concitoyens, notamment ceux qui gagnent le SMIC ou qui bénéficient du RMI, un peu rêveurs... (Murmures approbateurs sur les travées du groupe socialiste.)

M. François Autain. Et ce ne sont pas les seuls !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Les Français se demandent pourquoi leurs dépenses sont calculées à l'euro près alors que les montants mentionnés dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne sont même pas évalués à 100 millions d'euros près !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Quand on aime, on ne compte pas ! (Sourires.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. Pour clore ces remarques générales, je voudrais tout de même souligner le contexte nouveau dans lequel intervient la discussion.

Comme je l'ai déjà évoqué, nous avons désormais un interlocuteur unique pour le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, en l'occurrence M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. C'est évidemment une excellente chose, qui nous permettra de sortir enfin - du moins, je l'espère - des querelles stériles de frontières et de tuyauteries entre les deux ensembles financiers.

De fait, de réels progrès ont été réalisés. D'autres sont encore possibles. Comme je les ai déjà présentés dans le rapport de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, je n'y reviens pas.

Afin de vous faire part des observations de la commission des affaires sociales sur la situation générale des comptes sociaux, je voudrais évoquer le contenu du projet de loi, et notamment ses équilibres. J'aborderai ensuite le volet « assurance maladie ».

Contrairement à ce que nous espérions voilà un an, l'année 2006 et, plus encore, l'année 2007 n'ont pas été des années de redressement des comptes sociaux.