M. Bruno Sido. On en est loin !

M. Philippe Marini, rapporteur général. De ce point de vue, mes chers collègues, la commission se réjouit des deux amendements présentés par le Gouvernement, qui concernent notamment les personnels techniciens, ouvriers et de services, TOS, et joueront, pacta sunt servanda... - les pactes doivent être respectés -,...

M. Denis Badré. Très bien !

M. Jean-Jacques Jégou. Il fait même les sous-titres ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. ... sur la quote-part du taux de la taxe intérieure sur les produits pétroliers transférée aux régions et de la taxe sur les conventions d'assurance transférée aux départements.

En présentant au Sénat ces deux amendements qui sont lourds pour les finances publiques, le Gouvernement exerce ses responsabilités et tient sa parole. Il faut lui en donner acte.

M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien ! C'est ce que j'avais proposé !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Troisièmement, il faut éviter, mes chers collègues, de favoriser une catégorie de collectivités par rapport à une autre.

M. le président. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela constitue en quelque sorte le contrepoint d'un autre principe selon lequel il ne saurait y avoir de tutelle d'une collectivité sur une autre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien ! Il faut dire cela à M. Devedjian !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Lorsqu'on aborde les questions de finances communales, départementales ou régionales, il faut toujours garder cet impératif à l'esprit.

Monsieur le ministre, nous en avons fait hier soir la démonstration ensemble sur un point particulier, à l'occasion de l'examen d'une disposition proposée par l'Assemblée nationale, qui est certes excellente, mais dont l'un des aspects crée un écart entre communes et départements. Par la voix de notre collègue Louis de Broissia (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP), des présidents de conseils généraux se sont très légitimement élevés contre cette différence de traitement.

M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous nous sommes aussitôt efforcés d'en tirer les conséquences. C'est l'objet de l'amendement que la commission des finances présentera à l'article 12.

Quatrièmement, il s'agit de ne pas remettre brutalement en cause l'équilibre budgétaire d'une collectivité, c'est-à-dire de ne pas rendre la vie impossible à un maire, à un président d'intercommunalité, de conseil général ou de conseil régional, en perturbant les conditions majeures de l'équilibre de son budget.

M. Alain Le Vern. C'est déjà fait !

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est là qu'interviennent les variables d'ajustement.

Le président de la commission des finances vient d'y faire allusion et nous en avons déjà parlé, notamment en fin de matinée. Nous devons relever un défi purement arithmétique : l'augmentation de l'enveloppe normée est indexée sur l'inflation, alors que l'augmentation de la masse d'ensemble de la dotation globale de fonctionnement l'est sur l'inflation plus la moitié du taux de croissance prévisionnel.

Nous ne pouvons que nous en réjouir et reconnaître, madame la ministre, monsieur le ministre, que la parole de l'État est respectée, que la règle du jeu antérieure demeure en vigueur.

Vous le savez, la commission des finances a refusé d'entrer dans le jeu qui aurait consisté à chercher dans l'enveloppe de la dotation globale de fonctionnement les gages d'une forte réduction des variables d'ajustement.

En vertu de l'ensemble de ces principes, elle s'est efforcée, notamment à l'aide de simulations, de faire jouer autant qu'elle a pu les différentes variables les unes par rapport aux autres. Elle est donc en mesure de proposer aujourd'hui un amendement qui vise à réduire l'impact non seulement des baisses de dotation de compensation de la taxe professionnelle, mais aussi des baisses de dotation de compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties.

Vous le savez, ce sont des problèmes très délicats. Ainsi, la DCTP, qui est la vieille variable d'ajustement, baisse chaque année. Son assiette ayant fortement diminué en valeur absolue, la baisse qu'il faudrait pratiquer cette année se traduirait, en termes d'attribution individuelle dans chaque budget, par une diminution de 26 %. Nous connaissons des villes, des communes, des départements pour lesquels cette réduction est proprement insupportable. Dès lors, nous avons entrepris de rechercher une solution non pour supprimer cette contrainte, mais pour l'atténuer et, espérons-le, la rendre vivable.

La taxe foncière sur les propriétés non bâties concerne des collectivités de nature différente. Certes, nos collègues de l'Assemblée nationale ont « immunisé » les communes rurales. Tant mieux ! Grâce leur soit rendue ! Il reste toutefois un certain nombre de départements ruraux dont le potentiel financier est sensiblement inférieur à la moyenne et qui, si nous n'y prenons garde, seront confrontés à des problèmes de gestion budgétaire très difficiles à résoudre, sauf à augmenter brutalement la fiscalité locale.

Telle est, mes chers collègues, la démarche que la commission vous proposera de suivre à travers plusieurs amendements. J'insiste en particulier sur l'un d'entre eux, déposé à l'article 12 du projet de loi de finances, dont la commission demandera l'examen en priorité par le Sénat.

Pour conclure, je veux évoquer l'avenir. Quelles règles du jeu établir pour le futur ? L'État est engagé dans deux exercices essentiels et stratégiques, à savoir la revue générale des politiques publiques et celle des prélèvements obligatoires.

La première d'entre elles concerne essentiellement l'État, mais les compétences étant souvent imbriquées ou complémentaires, si l'État fait évoluer ses modes d'action, naturellement, les collectivités territoriales devront aussi modifier les leurs.

Par ailleurs, la maquette de l'administration territoriale est appelée à évoluer. Dès lors, nos interlocuteurs vont relever d'une organisation différente et les collectivités territoriales que nous représentons devront en tirer toutes les conséquences sur leur propre mode de gestion.

En ce qui concerne la revue générale des prélèvements obligatoires, il serait logique qu'elle s'intéresse aussi à la fiscalité locale. Nous sommes bien placés dans cet hémicycle, mes chers collègues, pour savoir qu'il y a en la matière beaucoup d'archaïsme mais pas de miracle ! De surcroît, les propositions ou idées de réforme sont légion ; en général, elles sont séduisantes, mais, s'agissant d'un art d'exécution extrêmement délicat, quand on en vient aux simulations et aux projections sur la réalité, en général, l'unanimité n'est plus au rendez-vous !

Il faudra donc être en mesure de raisonner globalement et économiquement, et se demander quelles ressources prendre en compte pour ce qui concerne non seulement les impôts sur les personnes et sur les ménages, mais aussi les impôts sur les entreprises. Le raisonnement devra être effectué dans le cadre de l'impératif de compétitivité auquel la France, prise dans son ensemble, ainsi que chaque collectivité, sur son propre territoire, doivent répondre.

Madame le ministre, monsieur le ministre, nous sommes conscients qu'il va falloir aussi se livrer à une revue des dotations. Nous nous souvenons que la dernière réforme de la DGF n'est pas si vieille que cela puisque, si ma mémoire et bonne, elle a figuré dans la loi de finances de 2004. Alain Lambert, lorsqu'il défendait ce texte à l'époque, a porté ce projet. Nous avons beaucoup dialogué à ce sujet et nous pensions, en toute bonne foi, avoir déjà beaucoup simplifié le système. Mais nous constatons aujourd'hui que cela ne suffit pas et qu'il va certainement falloir procéder à une réforme plus générale et plus ambitieuse.

M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour terminer, je souhaite faire deux remarques.

En tant que gestionnaires locaux, pour ceux d'entre nous qui exercent ces fonctions, nous sommes très attachés à nos responsabilités. Il est essentiel que l'on nous permette de les exercer en pleine autonomie, dans le respect de la loi républicaine. Il est essentiel aussi que le public, nos électrices et électeurs, sache bien identifier les responsabilités des uns et des autres...

M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. ... et que l'État, une fois la règle du jeu définie ou redéfinie, tout en respectant les quatre conditions de l'équité que j'ai exposées au début de mon propos, sache faire vivre le nouveau système dans la durée et nous apporter la visibilité dont nous avons absolument besoin.

C'est donc animée par les principes que j'indiquais et en se référant aux analyses que j'ai brièvement résumées que la commission des finances aborde l'examen de la partie de ce débat budgétaire qui est consacrée aux collectivités locales. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme viennent de l'indiquer Philippe Marini et Jean Arthuis, nous entrons dans une nouvelle étape des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales.

En effet, l'objectif de maîtrise des dépenses publiques est étendu aux finances locales. La norme de progression des dotations aux collectivités territoriales est ajustée sur celle que l'État applique à son propre budget. Au-delà de ces dotations, l'État doit également assurer la compensation des nombreuses compétences transférées aux collectivités territoriales depuis quatre ans. L'ensemble de ces paramètres doit être pris en compte pour apprécier la situation financière des collectivités territoriales.

Mes observations porteront donc sur l'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, sur la compensation financière des transferts, créations et extensions de compétences et sur la maîtrise des finances locales.

Tout d'abord, l'évolution des dotations placées au sein de l'enveloppe normée fera désormais l'objet d'un contrat de stabilité.

Après les travaux du Conseil économique et social et de Pierre Richard sur les dépenses publiques locales, le premier rapport du Conseil d'orientation des finances publiques, paru au mois de février dernier, recommandait que le rythme d'évolution des dotations aux collectivités territoriales soit rendu compatible avec celui des dépenses de l'État.

Certes, en première analyse, les collectivités territoriales paraissent échapper aux préoccupations relatives à la situation d'ensemble de nos finances publiques, marquée par une augmentation continue de la dette depuis vingt-cinq ans.

En effet, comme vous le savez, mes chers collègues, les collectivités territoriales sont faiblement endettées. En 2005, la dette des administrations publiques locales ne représentait que 10 % de la dette publique. Elle a même connu une diminution entre 1996 et 2002.

Par ailleurs, comme le rappelle Pierre Richard dans son rapport, les collectivités locales obéissent à des règles financières nettement plus strictes que celles que s'applique l'État. Elles doivent, en effet, financer l'ensemble de leurs dépenses de fonctionnement par des recettes propres et ne peuvent recourir à l'endettement que pour financer leurs investissements.

Mais les difficultés rencontrées par l'État sont aussi celles des collectivités, dans la mesure où l'État est, de manière croissante, leur premier financeur.

Ensuite, l'augmentation structurelle des dépenses sociales oblige l'État comme les collectivités à agir sur leurs propres niveaux de dépenses, afin de limiter la progression du taux de prélèvements obligatoires, qui a atteint, je vous le rappelle, 44,2 % du PIB en 2006.

Le rythme d'évolution rapide des dépenses et de la fiscalité invite également à s'interroger. Ainsi, à périmètre constant, les dépenses publiques locales ont crû de plus de 40 % depuis 1996, soit presque deux fois plus vite que les dépenses publiques totales.

Le projet de loi de finances pour 2008 inaugure, par conséquent, un nouveau partenariat financier entre l'État et les collectivités.

L'article 12 institue un contrat de stabilité, visant à indexer les dotations aux collectivités territoriales sur la seule inflation, hors tabac. Ces dotations connaîtront donc la même progression que les dépenses de l'État.

Cependant, comme l'ont indiqué Jean Arthuis et Philippe Marini, l'indexation de la dotation globale de fonctionnement est préservée. La DGF progressera donc au rythme de l'inflation majoré de 50 % de la croissance du PIB, soit de 2,725 %.

Le rapport Richard proposait la mise en place d'une procédure de diagnostic partagé entre l'État et les collectivités locales ; à partir de ce diagnostic, les collectivités territoriales et l'État négocieraient un contrat pluriannuel.

Il est vrai que le principe de l'annualité budgétaire ne permet pas l'inscription dans la loi de finances d'un engagement pluriannuel.

M. Alain Lambert. Cela viendra !

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Cependant, la définition d'un partenariat à moyen terme entre le Gouvernement et les collectivités paraît nécessaire pour donner à celles-ci un horizon.

À cet égard, je rappelle que les collectivités territoriales réalisent plus de 70 % des dépenses d'investissement public dans notre pays. Ce rôle moteur ne peut être maintenu que si les collectivités connaissent leur horizon financier à moyen ou long terme.

De même, la remise en cause des conditions d'indexation de la DGF aurait des conséquences lourdes sur l'objectif de péréquation, qui doit pourtant être poursuivi.

Depuis 2007, le comité des finances locales dispose d'ailleurs de marges de manoeuvre élargies en matière d'indexation des différentes parts de la dotation forfaitaire des communes, des départements et des régions, afin de dégager davantage de ressources en faveur de la péréquation, et il les a déjà utilisées.

Ces mécanismes ont permis, en 2007, un gain de plus de 21,5 millions d'euros au profit de la péréquation. Ils doivent être préservés.

S'agissant, ensuite, de la compensation des transferts de compétences, il convient de saluer les efforts accomplis par l'État.

La compensation financière des charges résultant des transferts de compétences inscrits dans la loi du 13 août 2004 doit être intégrale, concomitante aux transferts de compétences, soumise à l'avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges.

La compensation doit, par ailleurs, être conforme à l'objectif d'autonomie financière inscrit au sein de l'article 72-2 de la Constitution.

Ainsi, la loi du 13 août 2004 prévoit que la compensation financière s'opère, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toutes natures.

Il s'agit, pour les départements, de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance et, pour les régions et les départements, de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers.

La montée en charge des compensations financières résultant de la décentralisation se traduit par un transfert cumulé de taxe spéciale sur les conventions d'assurance de 1 850 millions d'euros au profit des départements et par un transfert de TIPP cumulé, depuis 2005, de 2 755 millions d'euros en faveur des régions.

En outre, le Gouvernement a consenti des efforts substantiels pour répondre aux inquiétudes exprimées au cours des dernières années par les élus au sein de la commission consultative sur l'évaluation des charges.

Pour ce qui concerne la compensation du transfert du revenu minimum d'insertion, le RMI, et du revenu minimum d'activité, le RMA, en application de la loi du 18 décembre 2003, le Gouvernement a résolu les difficultés issues de l'effet de ciseau entre les dépenses transférées, qui ont augmenté à un rythme élevé, et les ressources de TIPP, qui ont crû à un rythme plus faible.

Le Gouvernement a, tout d'abord, accepté la création pour deux ans d'un fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, le FMDI.

Au total, ce sont presque 2 milliards d'euros supplémentaires qui auront été dégagés pour financer les dépenses relatives au RMI, dont 1 milliard d'euros versé en 2007.

Le droit à compensation ainsi augmenté couvre 100 % de la dépense réelle du RMI en 2004 et 93,5 % de la dépense en 2005. En 2006, selon les premières estimations, le taux de compensation des dépenses serait de 89,1 %, contre 80,9 % en l'absence de versements du FMDI.

Enfin, si les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales doivent être définies sur le mode contractuel, il importe également d'assurer l'autonomie fiscale des collectivités.

La maîtrise des finances locales implique que les collectivités territoriales disposent de marges de manoeuvre supplémentaires.

Depuis la fin de l'année 2006, les réflexions se sont poursuivies sur l'amélioration de la fiscalité locale, dont chacun s'accorde aujourd'hui à reconnaître l'excessive complexité.

Ainsi, le rapport fait par Philippe Valletoux, au nom du Conseil économique et social, montre de quelle façon la fiscalité locale perd progressivement les caractéristiques d'une ressource propre dont les collectivités garderaient la maîtrise. L'État est ainsi devenu le premier contribuable local au titre de la taxe professionnelle, du fait de la prise en charge des dégrèvements.

Le rapport Valletoux évoque des pistes ambitieuses pour donner à chaque catégorie de collectivité la maîtrise d'une recette fiscale globale. Il mentionne la nécessité de permettre aux contribuables d'identifier clairement le niveau territorial qui exerce le pouvoir fiscal sur chaque impôt.

La réforme de la fiscalité locale est une exigence pour le bon développement de la démocratie locale et un gage d'efficacité de la gestion des collectivités.

Ce n'est pas une réforme facile à conduire, nous en sommes tous conscients dans cette enceinte. Mais elle est nécessaire, même si nous en parlons depuis parfois des décennies. Souvenons-nous simplement que, comme le disait Sénèque, « ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles. » (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Bravo ! Belle chute !

M. le président. Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme la ministre.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord remercier le président de la commission des finances et le rapporteur général d'avoir accepté que je puisse m'exprimer dès à présent, ce qui me permet de répondre à leurs interventions ainsi qu'à celle de M. le rapporteur pour avis.

C'est Éric Woerth, dont chacun connaît la compétence, qui répondra aux autres orateurs, les circonstances m'empêchant d'assister à l'ensemble de ce débat, qui va se prolonger dans la soirée.

Comme le président de la commission des finances, le rapporteur général et le rapporteur pour avis de la commission, qui ont remarquablement présenté les enjeux, je crois que, face aux défis multiples que connaît notre société, nous avons besoin d'un État qui assure son autorité et qui assume ses responsabilités. Les événements des deux derniers jours le soulignent encore davantage.

Nous avons aussi besoin que l'action publique soit mise en oeuvre au plus près des Français. Le besoin de ce contact direct se fait sentir. La proximité est du reste un gage d'efficacité et d'enrichissement, pour nos territoires comme pour notre relation avec nos concitoyens.

C'est pourquoi les relations entre l'État et les collectivités territoriales doivent être à la fois claires et confiantes. Je veux, pour ma part, qu'elles s'inscrivent dans un climat de confiance, une confiance qui ne soit pas simplement ponctuelle, mais qui se manifeste dans la durée.

Ces relations confiantes doivent se traduire par la mise en oeuvre d'un partenariat responsable, et ce dans tous les domaines.

Le président Arthuis disait son souhait de voir le Sénat être en mesure d'exercer une véritable expertise extérieure et, pour cela, d'avoir connaissance d'un certain nombre de données. Je suis tout à fait prête à ce que, pour ce qui le concerne, le ministère de l'intérieur vous aide au mieux à obtenir ces données qui vous sont nécessaires.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Nous l'avons déjà fait en remplissant les questionnaires qui nous ont été adressés.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. De même, j'ai maintes fois défendu l'idée que, chaque trimestre, une délégation de toutes les commissions concernées vienne directement devant l'administration du ministère de l'intérieur pour évaluer la consommation des crédits. Nous y avons tous intérêt, à commencer par moi !

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je pense qu'il s'agit là d'une garantie de la transparence et de la confiance que je souhaite établir.

La maîtrise globale de la dépense publique, la mise en oeuvre d'une véritable solidarité sur tout le territoire et la garantie d'une visibilité nécessaire aux collectivités territoriales sont constitutifs de ce partenariat confiant et durable que j'appelle de mes voeux.

Comme cela a été justement souligné par les précédents orateurs, la maîtrise de la dépense publique est une nécessité. En l'espace de vingt-cinq ans, notre dette publique a triplé, atteignant aujourd'hui les deux tiers de notre production nationale. Préparer l'avenir, en même temps que respecter nos engagements - notamment européens - suppose effectivement de mettre fin à cette tendance. C'est ce qu'a prévu le Gouvernement pour l'année 2008.

Les collectivités territoriales représentent un poste de dépenses important pour l'État. Dès lors que l'État consent un effort substantiel en contenant strictement l'évolution de ses dépenses dans la limite de l'inflation, il faut que l'effort porte sur l'ensemble de son budget, y compris sur le quart de ses dépenses qui concerne les collectivités locales. C'est la raison pour laquelle les dotations incluses dans le contrat de stabilité évolueront en 2008 comme l'inflation.

Monsieur Saugey, vous souhaiteriez la mise en place d'un contrat pluriannuel. Il est évident que, dès lors que l'on dirige une collectivité, on aurait effectivement besoin d'un tel instrument, et je comprends parfaitement votre souci de donner de la lisibilité aux collectivités. J'espère donc que, dans le cadre de la concertation avec les collectivités, nous puissions y parvenir.

Pour l'instant, le Gouvernement propose seulement un contrat d'un an, valable pour 2008. Nous devons travailler pour arriver à concilier un projet pluriannuel et le principe d'annualité budgétaire. Je sais que vous disposez en la matière de soutiens éminents ! D'ailleurs, s'agissant de l'annualité budgétaire, nous aurions sans doute à gagner à ce qu'elle évolue !

Je vois que le mon collègue chargé des comptes ne dit rien : je pense donc qu'il m'approuve ! (Sourires.)

M. Charles Pasqua. En tout cas, il ne proteste pas !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Quoi qu'il en soit, le besoin d'avoir une visibilité sur plusieurs années est bien réel.

Au-delà du contrat de stabilité, l'effort financier total en faveur des collectivités locales progresse tout de même de 3,9 %, ce qui est largement supérieur à l'inflation.

C'est en particulier le cas du FCTVA, qui connaît une croissance sensible - plus de 10 % en 2008 - et nous permettra ainsi de soutenir le très important effort financier des collectivités dont il a été question tout à l'heure. Il est d'ailleurs évident que ce sont les collectivités qui, aujourd'hui, nous permettent d'investir d'une façon très dynamique.

Monsieur Marini, le Sénat examinera tout à l'heure votre proposition visant à limiter la baisse de la dotation de compensation de la taxe professionnelle et de la compensation du foncier non bâti des départements. Je comprends votre objectif, dès lors qu'il s'agit de soutenir des collectivités fragiles.

M. François Marc. Et les autres ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je ne doute pas que le Sénat, qui est à l'écoute des collectivités, trouvera une solution équitable et respectueuse de tous les niveaux de collectivités.

M. Charles Pasqua. Et l'argent qui va avec ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le Gouvernement a été également attentif à la situation financière des départements. C'est pourquoi j'ai proposé que le projet de budget pour 2008 élargisse le bénéfice du produit des amendes issues des radars aux départements : 30 millions d'euros sont prévus à ce titre pour 2008. (Murmures sur de nombreuses travées.)

J'entends parfaitement ceux qui considèrent que cela fait peu et qu'il faudrait aller plus loin.

M. Charles Pasqua. En effet !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à vos propositions sur les modalités de répartition de ces fonds.

Je voudrais toutefois rappeler que, sur la totalité des amendes, nous avons aussi à prendre en charge l'installation de nouveaux radars - car il y en aura de nouveaux l'an prochain - et un certain nombre d'améliorations du réseau routier, même si je sais par ailleurs que les collectivités y participent également.

La solidarité de l'État envers les collectivités en difficulté est un autre élément du partenariat confiant que nous devons établir.

À cet égard, monsieur Saugey, soyez assuré que le Gouvernement a, tout comme vous, à coeur de soutenir tout particulièrement les collectivités confrontées à des difficultés.

C'est d'ailleurs pour répondre à cet objectif que j'ai souhaité préserver le montant et la progression de la dotation globale de fonctionnement. Cette dotation, m'a-t-il semblé, ne pouvait se trouver diminuée du jour au lendemain. Or, trois mois, c'est bien le lendemain quand on a un budget de fonctionnement à établir. Cette année, j'ai donc obtenu, ce dont je remercie Éric Woerth et le Premier ministre, qui a arbitré en la matière, que l'indexation de la DGF demeure inchangée, comme cela a déjà été dit, ce qui permettra une progression de 2,08 % en 2008, représentant tout de même une augmentation en volume de 817,2 millions d'euros.

Cela va en outre et surtout permettre d'augmenter un certain nombre de dotations de péréquation. En effet, la progression de la DGF autorise une hausse de la dotation de solidarité urbaine d'au moins 90 millions d'euros, ce qui lui fera passer le cap du milliard d'euros en 2008. Nous savons qu'il s'agit d'un soutien essentiel pour les maires qui sont en première ligne dans les quartiers difficiles et qui ont besoin de ces moyens pour développer le lien social.

La croissance de la DGF rendra également possible un effort soutenu pour les communes rurales, notamment à travers la dotation de solidarité rurale, qui progressera pour sa part de 9,43 %.

La progression de la péréquation dans la DGF bénéficiera aussi aux départements. À cet égard, monsieur Arthuis, je connais votre inquiétude concernant le montant de la dotation de fonctionnement minimale des départements qui y sont éligibles depuis 2005.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je tiens à vous assurer que ces départements - parmi lesquels figure le vôtre, la Mayenne - connaissent des augmentations plus fortes que les autres. (M. le président de la commission sourit.)

L'écart de dotation entre les 39 nouveaux départements éligibles et les 24 départements qui les avaient précédés s'est considérablement réduit. En 2007, les attributions des uns et des autres vont être très proches, alors que, je vous le rappelle, en 2004, l'écart allait de 1 à 3,6.

L'effort de solidarité se traduira également par la création d'un fonds de solidarité propre aux collectivités territoriales, qui permettra de répondre à des sinistres localisés ou d'ampleur limitée tels ceux que nous avons connus à la fin du printemps et pendant l'été derniers, marqués par des modifications météorologiques sortant totalement de ce que nous connaissions jusqu'à présent, et pour lesquels les règles normales de déclaration de catastrophe naturelle s'appliquent mal.

Il y aura donc désormais un fonds particulier qui nous permettra de répondre à des sinistres eux-mêmes très particuliers. Bien entendu, l'État continuera toutefois d'assumer toutes ses responsabilités dans le domaine des catastrophes naturelles.

Enfin, avoir un partenariat de confiance, cela signifie être à l'écoute des besoins des collectivités. Et, dans ce domaine, intervient le souci de la visibilité. Nous avons besoin de savoir où nous allons parce que les politiques que nous menons portent de plus en plus fréquemment sur plusieurs années, voire sur le long terme.

La visibilité suppose d'abord une stabilité du partage des compétences entre l'État et les collectivités territoriales. De multiples actions de décentralisation sont intervenues ces dernières années. Je crois que tout le monde souhaite pour l'instant une pause dans ce mouvement, de façon à savoir exactement qui fait quoi et qui est responsable de quoi.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le projet de loi de finances pour 2008 ne comprend donc pas de nouvelle mesure de transfert de compétence. Il prévoit simplement les crédits nécessaires pour des transferts de compétences déjà décidés, par exemple celui des techniciens et ouvriers spécialisés de l'éducation nationale. Je pense aussi au partage des services des directions départementales de l'équipement qui sont transférés aux collectivités territoriales.

La visibilité, c'est aussi le maintien de la progression de la DGF, que j'ai souhaité, de façon que les collectivités aient une visibilité d'au moins dix-huit mois.

Le partenariat de confiance passe également par l'association des collectivités locales à toutes les décisions qui les concernent. C'est un point, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous avez souvent évoqué devant moi.

Il est vrai qu'il y a les dotations et les transferts de compétences, mais on ne peut oublier qu'un certain nombre de contraintes naissent également des normes que nous établissons et qui ont des conséquences sur les acteurs locaux que vous êtes pour la plupart.

Qui, parmi nous, ne s'est jamais trouvé confronté à la situation où, alors que la construction d'un nouvel équipement s'achève, on constate que les normes ont déjà changé, ce qui entraîne alors des coûts supplémentaires parfois considérables ?

La Conférence nationale des exécutifs, installée par le Premier ministre, associera l'État et les collectivités territoriales sur toutes les décisions qui concernent ces dernières. S'agissant des normes susceptibles d'avoir une incidence financière, la commission consultative sur l'évaluation des normes, mise en place au sein du Comité des finances locales, permettra, à partir de 2008, de faire jouer aux responsables des collectivités un rôle de premier plan en les associant à leur élaboration.

Enfin, nous sommes tous d'accord sur ce point : la réforme de la fiscalité locale est aujourd'hui non plus un projet, mais une exigence.

Monsieur le président de la commission, vous avez eu raison de souligner l'obsolescence de la fiscalité actuelle, tout du moins celle de ses références. Au-delà de ce constat, monsieur le rapporteur général, il est, c'est vrai, sans doute très difficile d'avoir l'unanimité en ce domaine.

Pour autant, il faut avancer : c'est la seule façon d'assurer aux collectivités leur autonomie dans la durée, mais aussi la lisibilité dont elles ont besoin pour mener leurs politiques.

De cette réforme je fais donc une priorité, et je proposerai bientôt aux parlementaires un calendrier et une méthode. Je sais que nous partageons les mêmes ambitions en la matière, même s'il n'est pas certain que cette réforme, une fois menée à son terme, fasse l'unanimité. En tout cas, je souhaite, comme l'a fait le Président de la République devant l'Association des maires de France, que nous ayons, au moins au départ, un consensus sur le contenu, sur la méthode et sur les principes ; à nous, ensuite, de travailler.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la maîtrise de l'équilibre de nos finances publiques relève de notre responsabilité à tous. Nous devons oeuvrer pour l'atteindre, et nous avons intérêt à travailler tous ensemble. Je suis convaincue que les fruits de notre travail commun bénéficieront à chacun : aux collectivités, à l'État, à nos concitoyens, à la France. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville.

M. Yves Fréville. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ne nous leurrons pas : ce budget représente un choc pour les collectivités locales.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Le choc n'est pas encore intervenu !

M. Yves Fréville. En effet, nous allons changer de règle : nous allons passer d'un contrat de partage des fruits de la croissance à un contrat de stabilité.

Oh, je sais bien que 0,7 point d'augmentation en moins c'est peu. Mais, appliqué à 45 milliards d'euros de dotation, cela représente un chiffre substantiel !

Quoi qu'il en soit, ce choc, nous l'acceptons.