M. Jean Desessard. Non ! C'était vrai du temps où les fiches étaient dressées à la main, mais cela ne l'est plus aujourd'hui avec l'informatique !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Même avec l'informatique, monsieur Desessard, cela a un coût ! La mesure me semble donc assez déraisonnable.

Mme Odette Terrade. L'APL n'est versée qu'une fois ou deux par an, en gros !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Faudrait-il encore trouver les 15 millions d'euros !

Mme Odette Terrade. Mais pour les familles, c'est important !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je le répète, il faut encore trouver de quoi assurer le financement de la mesure. De ce point de vue, le problème reste entier.

M. Jean Desessard. Moi, quand je paie une amende, c'est 12 euros !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il n'est de toute manière pas question de « déshabiller » le programme national de rénovation urbaine !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Repentin, je m'étonne que vous proposiez de prélever 15 millions d'euros sur les crédits destinés à la rénovation urbaine, car une telle disposition, en réduisant les crédits à 459 millions d'euros, les ramène sous le seuil minimal de 465 millions d'euros fixé par la loi de 2003 !

De plus, cette mesure conduirait naturellement à retarder un certain nombre d'opérations qui sont d'ores et déjà programmées en faveur de populations qui connaissent des conditions de vie très difficiles.

Cette proposition est donc absolument inacceptable. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. C'est quand même incroyable : on doit de l'argent aux gens, mais on ne leur donne pas !

Moi, j'ai une proposition à vous faire, madame la secrétaire d'État chargée des banlieues, des faubourgs et de la ville : pourquoi ne pas étendre cette règle du non-versement à tous les jeunes des quartiers ? Vous devez 15 euros ? Inutile de les payer, cela crée plus de problèmes que cela n'en résout, car finalement cela coûte plus cher.

Vous prenez un café le matin ? S'il vous en coûte moins de 15 euros, vous êtes tranquille ; vous n'avez rien à payer. Vous allez acheter des journaux ? N'en prenez que quelques-uns, afin de rester en deçà des 15 euros !

J'arrête là ma démonstration : vous aurez compris que l'on ne peut pas raisonner de cette façon-là !

Quant à l'argument du coût du traitement de ces petits versements, il était peut-être valable du temps des fiches établies à la main, mais il ne l'est plus maintenant. Je pense même qu'opérer une distinction entre les petits versements et les autres coûte plus cher. C'est d'ailleurs souvent le cas, lors de la création d'un fichier, lorsqu'on veut faire une différence entre ceux qui ont droit à quelque chose et les autres.

Pensez au temps qu'il vous faut, mes chers collègues, quand vous organisez une soirée, pour savoir qui vous invitez et qui vous n'invitez pas ! (Sourires.) Encore une fois, je suis sûr que cela coûte plus cher d'établir une différence.

Outre donc que ce système est injuste, il signifie que l'État encourage les impayés. Si vous étendiez ce principe à l'ensemble de la société, comme je vous l'ai montré tout à l'heure, il faudrait fixer le prix minimal de chaque produit à 15 euros. C'est aberrant !

Cela dit, je reconnais que la mesure a été instaurée sous un gouvernement socialiste. Ce fut une petite erreur... (Sourires.) Mais ce n'est pas une raison pour recommencer !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-188 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-191 rectifié bis, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Rénovation urbaine

Équité sociale et territoriale et soutien

40 000 000

40 000 000

Aide à l'accès au logement

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

40 000 000

40 000 000

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Madame la présidente, permettez-moi tout d'abord de répondre à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous n'allons pas nous répondre d'un amendement à l'autre !

M. Thierry Repentin. La LOLF nous contraint à trouver des solutions dont personne ici ne peut dire qu'elles sont positives. (M. Jean Desessard applaudit.) J'ai le sentiment qu'en adoptant cette réforme ni le Gouvernement ni les parlementaires n'ont trouvé les solutions susceptibles de fournir au législateur les marges de manoeuvre dont il a besoin pour accomplir sa tâche.

L'an dernier, lorsque vous avez vous-même fait passer le seuil de 24 euros à 15 euros, nous avons trouvé l'argent, tout comme, ensemble, dans le cadre de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, nous avons trouvé des marges de manoeuvre financières. Mais visiblement, nous ne savons plus en trouver cette année pour qu'au 1er janvier prochain les aides personnalisées au logement soient revalorisées.

Par le passé, nous pouvions faire des choses que nous ne pouvons plus faire aujourd'hui. C'est un constat sur lequel nous devrons collectivement nous interroger.

J'en viens à cet amendement, qui a un double objet.

Le premier est de doubler les dotations consacrées à l'hébergement d'urgence, c'est-à-dire aux places dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS.

Suite à la reconnaissance du droit au logement par la loi du 5 mars 2007, il est nécessaire aujourd'hui de créer des places dans les CHRS, qui proposent un accompagnement social des publics concernés.

Pour mémoire, le plan d'action renforcé pour les sans-abri, le PARSA, annoncé le 8 janvier 2007, prévoyait la création ou la transformation de 27 100 places d'hébergement ou de logement en 2007 pour les sans-abri. En fait, seules 14 000 devraient être réalisées d'ici à la fin de l'année 2007.

Selon l'analyse de l'association Les Enfants de Don Quichotte, les crédits de paiement consacrés à l'hébergement seraient en recul de 3 % par rapport à l'an dernier et, en tout état de cause, ils seraient insuffisants pour atteindre les objectifs du PARSA et améliorer les conditions d'accueil des sans-abri.

Les crédits consacrés à l'urgence sont d'ailleurs difficiles à repérer, puisqu'ils sont ventilés aussi sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », dont les crédits ont déjà été examinés. Je n'y reviens pas, le rapporteur spécial l'ayant très bien expliqué dans son intervention liminaire.

Pour l'amélioration des places d'hébergement existantes, dans le budget de la mission « Ville et logement », seuls 15 millions d'euros sont consacrés aux subventions d'investissement pour la création de nouvelles places d'hébergement. C'est évidemment bien insuffisant. La majorité en convient elle-même, puisqu'un amendement visant à doubler ces crédits avait été déposé à l'Assemblée nationale. Malheureusement, il visait à prendre ces 15 millions d'euros sur les crédits consacrés au personnel chargé de la mise en oeuvre du droit au logement. À juste titre, madame la ministre, vous avez émis un avis défavorable sur une telle ventilation nouvelle.

Ce soir, le groupe socialiste propose de ponctionner les moyens consacrés à l'action n° 3 du programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien » intitulée « Stratégie, ressources et évaluation », laquelle a pour objet de financer les multiples dispositifs d'animation de la politique de la ville.

L'amendement vise également à doubler les crédits destinés à l'action n° 3 du programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement » intitulée « Lutte contre l'habitat indigne ».

Cette action est aujourd'hui dotée de 25 millions d'euros. Nous vous proposons tout simplement de la doubler, notamment pour les opérations de résorption de l'habitat insalubre et les opérations de relogement des familles.

Les associations, au nombre desquels la Fondation Abbé Pierre, mais aussi le Secours Catholique, ATD Quart Monde et Les Enfants de Don Quichotte, le réclament. Le Premier ministre lui-même aurait admis qu'il était favorable à une telle augmentation de ces crédits. Reste que, pour lui, nul besoin de modifier le PLF, puisqu'il pourrait envisager de prendre ces millions sur le budget de l'ANAH...

Nous ne souhaitons pas, nous, socialistes, que l'ANAH perde ces crédits, déjà légèrement inférieurs à ceux de l'an passé dans ce budget. Comme vous le savez, l'ANAH a plutôt vocation à monter en puissance, notamment pour accompagner les propriétaires privés. Nous ne souhaitons donc pas qu'elle réduise son engagement. En revanche, nous sommes circonspects sur le montant des dépenses consacrées à l'action n° 2 « Revitalisation économique et emploi »

Vous le savez, madame la ministre, la priorité est désormais à la prise de responsabilités, suite à de multiples annonces et à la menace de nouveaux campements dans nos grandes villes. C'est pourquoi je ne désespère pas que vous vous montriez favorable à cette double proposition.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. S'agissant du plan d'action renforcé pour les sans-abri, Mme la ministre vous a déjà répondu. Je n'y reviens donc pas.

Pour ce qui est des 40 millions, nous connaissons les contraintes de la LOLF. Je les vis comme tous les autres parlementaires ! MM. Migaud et Lambert, qui, par un travail commun, avaient d'une certaine manière fait progresser l'organisation du débat budgétaire, sont sans doute également conscients des problèmes que cela nous pose. En tout cas, c'est la règle, et nous sommes bien obligés de nous y soumettre.

Quant à ponctionner des crédits sur le programme « Équité sociale et territoriale et soutien », bien évidemment, je ne peux y être favorable. Tout à l'heure, vous disiez que les budgets de communication étaient trop importants. Cela m'étonnerait tout de même beaucoup que ces 40 millions d'euros soient uniquement consacrés à de la communication ! Je suis tout à fait d'accord pour que la Délégation interministérielle à la ville se centre sur le pilotage et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances sur l'opérationnel. Mais il faut laisser à la DIV ses moyens ! Il serait totalement déraisonnable de les supprimer comme vous voulez le faire.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Comme vient de le dire excellemment le rapporteur spécial, en aucun cas il n'est possible de diminuer les crédits des programmes « Équité sociale et territoriale et soutien » de la politique de la ville. C'est même invraisemblable de l'envisager !

De plus, l'essentiel des crédits de ce programme sont contractualisés dans les contrats urbains de cohésion sociale, CUCS, qui viennent d'être signés, en 2007. Or, naturellement, l'État entend honorer sa signature.

En dernier lieu, le rapport de la Cour des comptes réalisé à la demande de votre assemblée préconise de renforcer l'évaluation au titre de ce programme.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme  Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Cet amendement présenté dans le même esprit que celui qui porte sur les aides personnelles au logement participe des orientations que nous avions déjà défendues lors de la discussion de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

Ce qui est à porter au crédit de la proposition qui nous est faite est, bien entendu, le contenu même du rapport du comité de suivi de la loi de mars 2007.

Dans son premier rapport, le comité de suivi de la loi sur le droit au logement opposable souligne en effet la nécessité d'inscrire l'hébergement d'urgence dans les parcours d'insertion et d'exercice du droit au logement, ce qui suppose des moyens financiers adaptés, moyens financiers qui ne peuvent qu'aller de pair avec les objectifs affichés de réalisation de places de CHRS, entre autres.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-191 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-47 rectifié, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

3.000.000

3.000.000

Équité sociale et territoriale et soutien

17.500.000

17.500.000

Aide à l'accès au logement

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

14.500.000

14.500.000

TOTAL

17.500.000

17.500.000

17.500.000

17.500.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il s'agissait d'un amendement d'appel qui visait à la clarification des rôles respectifs de la DIV, la Délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain, et de l'ACSé, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances.

À de nombreuses reprises, nous avions souhaité que les crédits expérimentaux qui étaient maintenus en gestion auprès de la DIV puissent être transférés à l'ACSé, de même que ceux qui étaient destinés à l'outre-mer.

Vous nous avez annoncé, madame la ministre, que vous y étiez favorable. Cet amendement n'ayant donc plus lieu d'être, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° II-47 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-115 rectifié, présenté par MM.  Dallier et P. André, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

2.704.651

2.704.651

Équité sociale et territoriale et soutien

11.339.632

11.339.632

Aide à l'accès au logement

 

14.044.283

 

14.044.283

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

14.044.283

14.044.283

14.044.283

14.044.283

SOLDE

0

0

La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Cet amendement, qui est cosigné par Pierre André, n'est, lui, absolument pas un amendement d'appel !

Je l'ai écrit dans le rapport et je l'ai dit à la tribune, l'Assemblée nationale, en seconde délibération, a « raboté » les crédits du programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien » et du programme 202 « Rénovation urbaine » respectivement de 11 339 632 millions d'euros et de 2 704 651 millions d'euros, ce qui ne nous paraît pas acceptable.

Les crédits de la politique de la ville ne peuvent pas servir de variable d'ajustement, Jean-Louis Borloo nous l'avait toujours dit ici et il avait, me semble-t-il, parfaitement raison. C'est pourquoi nous proposons d'en revenir à la proposition initiale du Gouvernement, qui nous avait semblé une base pertinente lors de la présentation de ce budget.

Rappelons que la hausse des crédits de paiement affectés au programme 147 était déjà relativement modeste. Par conséquent, la diminution qui a été adoptée par l'Assemblée nationale, un vendredi soir, très tard, ne peut pas être acceptée.

Je rappelle que le programme 147 permet de financer, notamment, les associations, les équipes de réussite éducative, les ateliers santé-ville et les adultes relais.

Madame la ministre, je me permets de vous reposer la question, puisque vous n'y avez pas répondu : l'augmentation du nombre de contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, qui sont plus nombreux que les précédents contrats de ville - on dénombre en effet 144 nouveaux contrats - entraîne-elle une dilution des crédits ? Si tel est le cas, le fait de « raboter » encore les crédits de paiement du programme 147 serait, à mon avis, une grave erreur.

Mes chers collègues, nous avons déposé cet amendement Pierre André et moi-même à titre personnel. Je souhaite véritablement que le Sénat l'adopte, même s'il nous faut ensuite trouver les moyens de compenser les sommes que nous vous proposons d'inscrire en faveur du programme 147.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le rapporteur spécial Dallier pense que l'amendement des sénateurs André et Dallier est excellent ! (Sourires.)

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. C'est limite !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Dallier, je vous répondrai un peu longuement, car votre question est importante et mérite des précisions.

Le programme « Aide à l'accès au logement » supporte quasiment exclusivement la contribution de l'État au financement des aides personnalisées au logement, qui bénéficient à tous les ménages modestes remplissant certaines conditions de ressources et de loyers.

Les aides personnelles au logement constituant des dépenses obligatoires qui doivent impérativement être financées, elles nécessitent des ressources pérennes et croissantes pour financer leur revalorisation.

Le montant des crédits inscrits en 2008 sur ce programme a été déterminé en ce sens, en tenant compte tant de l'évolution tendancielle de ces prestations que de leur revalorisation, qui, comme le Premier ministre s'y est engagé, atteindra 2,76 % en 2008. Il s'agit d'une mesure concrète en faveur du pouvoir d'achat des ménages les plus modestes.

Dans ce contexte, vous comprendrez qu'il n'est pas souhaitable de réduire les crédits du programme « Aide à l'accès au logement », sauf à ne pas compenser à la sécurité sociale le coût réel des aides distribuées. Au demeurant, je connais l'attachement de la commission des finances à la sincérité de la budgétisation.

Abonder les crédits de la politique de ville est, naturellement, un souhait légitime, car ceux-ci doivent être à la hauteur de nos ambitions. Croyez bien que Mme Amara et moi-même y veillons tout particulièrement. Toutefois, il faut rappeler qu'une grande partie des crédits dédiés à la rénovation urbaine n'ont pas été consommés en 2007 et que les dotations des programmes 147 et 202 pour 2008 prévoient d'ores et déjà de soutenir la montée en puissance de la politique de la ville.

Par ailleurs, j'aimerais relativiser la portée des annulations votées en seconde délibération par l'Assemblée nationale. Dans leur ensemble, celles-ci visaient à gager l'ouverture de crédits découlant des différents votes de l'Assemblée nationale. Elles ont été réparties sur l'ensemble des programmes du budget général, hormis ceux qui comportent essentiellement des dépenses inéluctables, comme c'est le cas pour le programme « Aide à l'accès au logement », ou ceux qui retracent des politiques tout à fait particulières, notamment le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables ».

J'ajoute que ces réductions s'imputeront sur les crédits mis en réserve et qu'elles n'amputeront pas, par conséquent, les marges de manoeuvre des gestionnaires.

Vous avez également évoqué, monsieur Dallier, les contrats urbains de cohésion sociale. Si 144 nouveaux CUCS ont bien été signés au titre de la politique de la ville, ils ne représentent que 7 % des communes et 2 % à 3 % des crédits.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous serais reconnaissante de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Dallier, l'amendement n° II-115 rectifié est-il maintenu ?

M. Philippe Dallier. Avant d'en décider, je dois vous dire, madame la ministre, que je n'ai pas très bien compris l'explication que vous venez de me donner.

En effet, par rapport aux territoires que couvraient les anciens contrats de ville, le présent dispositif de contractualisation est plus vaste puisque l'on dénombre déjà 144 CUCS supplémentaires. Cet élargissement à des territoires non couverts précédemment doit, selon moi, susciter des dépenses de subventionnement nouvelles. Or vous êtes en train de me dire que, avec moins de crédits de paiement en 2008 qu'en 2007, on peut prendre en charge 144 CUCS supplémentaires !

À défaut de preuves concrètes précisant, CUCS par CUCS, les sommes à imputer, je ne peux pas comprendre l'argument qui m'est opposé. Ce n'est pas faute d'avoir demandé ces éléments au cours des auditions auxquelles j'ai procédé. Mais je ne les ai pas obtenus ! Je suis donc aujourd'hui tout à fait fondé à penser que les crédits du programme 147 seront, avec la signature de ces 144 CUCS, en quelque sorte dilués. Aucun élément ne me permet de penser le contraire.

De surcroît, madame la ministre, l'Assemblée nationale en votant, en seconde délibération, une diminution des crédits du programme 147, a osé faire ce que personne n'avait fait avant : depuis 2005, je me permets de le dire, c'est la première fois que ces crédits sont remis en cause. Je sais que Jean-Louis Borloo devait être très attentif à cette question. Peut-être certains, à Bercy, considèrent-ils que l'on peut d'un clic sur un tableau Excel enlever tel pourcentage d'un programme ! Or nous avons fait les calculs, et il en ressort que le programme 147 est proportionnellement plus touché que beaucoup d'autres, avec des crédits en diminution de 1,5 %, si mes souvenirs sont exacts.

Je ne sais pas comment on procède quand il s'agit de rééquilibrer le budget, mais je ne comprends pas la logique politique qui consiste à diminuer les crédits de la politique de la ville à l'heure où, chacun le sait, le dossier est d'une particulière actualité.

Je ne vous demande pas un effort budgétaire trop important, madame la ministre. Bien évidemment, les aides personnelles au logement seront revalorisées, vous avez raison de le rappeler, de 2,76 %. Mais vous savez bien que ces crédits sont purement évaluatifs, puisque, de toute façon, nous avons l'obligation de répondre à la demande. Il est donc très difficile d'évaluer la somme nécessaire en début d'année, puisque le nombre d'ayants droit, par exemple, varie en cours d'exercice.

Par conséquent, la suppression de ces 14 millions d'euros du programme « Aide à l'accès au logement » ne conduit absolument pas à remettre en cause ces aides personnelles. Elles sont là ; elles existent : le Gouvernement devra bien évidemment faire le nécessaire pour assurer leur paiement à tous ceux qui y ont droit. Les barèmes sont clairs et nets ; ces aides ne sont pas attribuées à la tête du client !

Ce n'est pas un simple problème de gestion, c'est un vrai problème politique. Tout comme je l'ai fait, mercredi soir, à propos de la dotation de solidarité urbaine, j'en appelle à la majorité, en lui disant, même si cela peut déplaire, que le fait de ne pas abonder les crédits du programme 147 de ces 14 millions d'euros constitue une grave erreur politique. Je ne comprends pas la logique qui veut que les crédits baissent, alors que le nombre de CUCS augmente.

J'aimerais que Pierre André s'exprime également pour me soutenir. S'il a cosigné cet amendement, vous pouvez nous faire confiance, madame la ministre, c'est pour de bonnes raisons. L'effort budgétaire demandé n'est pas très important ; il faut que nous le fassions !

Je ne peux donc pas retirer l'amendement n° II-115 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Je conçois que vous n'ayez pas compris ma réponse sur les CUCS, laquelle, je le reconnais, manquait de précision.

D'ores et déjà, je m'engage à vous faire parvenir une liste très précise des CUCS.

Les 144 nouveaux contrats concernent de toutes petites communes, qui ne représentent que 7 % de l'ensemble, pour un montant total de 2 %, ce qui est très peu. Franchement, il n'y a pas de problème particulier dans cette affaire.

En revanche, monsieur Dallier, je ne peux pas vous laisser sous-entendre que le Gouvernement, notamment son ministre du logement et de la ville, ne serait pas attentif aux besoins de budgétisation de la politique de la ville en général et du programme 147 en particulier. Cela, je ne peux pas l'accepter !

En effet, mes convictions sociales et humanistes font que je n'aurais jamais laissé passer cette modification de la répartition des crédits sans de solides raisons ! Et il en va de même pour Mme Amara.

Figurez-vous, monsieur Dallier, que nous voulons que les budgets soient sincères, raison pour laquelle nous sommes en train de les réexaminer avec le souci d'approcher la réalité des choses. Si nous disposons cette année de financements pour le programme 147, c'est parce qu'il existe des réserves, l'ACSé ayant moins dépensé, compte tenu de la lenteur qui affecte la réalisation de ses constructions.

Si ces financements n'existaient pas, je n'aurais pas accepté la mesure votée par l'Assemblée nationale. Permettez-moi de vous le dire, ce n'est pas Bercy qui a modifié des tableaux sur Excel !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je ne voudrais pas, madame la ministre, que vous preniez en mauvaise part ce que je vous ai dit. Pour autant, je ne comprends toujours pas !

Vous nous dites que ces 144 nouveaux CUCS représentent 7 % des communes et 2 % ou 3% des crédits. Mais raison de plus, madame la ministre ! Comment pouvez-vous accepter de voir diminuer les crédits de paiement du programme 147, alors que la population concernée par ces contrats est en augmentation ?

Je suis désolé, mais, avec la meilleure volonté du monde et avec toute la solidarité à l'endroit de la majorité que l'on peut imaginer, je ne comprends toujours pas ! Non pas que je sois buté sur le sujet, ...

M. Jean Desessard. Si ! C'est l'entêtement du visionnaire !

M. Philippe Dallier. ... mais, si la démonstration était claire, elle s'imposerait à tous !

Je souhaite cependant rendre hommage à l'ACSé et à votre ministère, puisque, cette année, pour la première fois, les associations percevront, dans les trois premiers mois de l'année, les subventions auxquelles elles ont droit.

Mais imaginez ce qui va se passer avec ce nombre de CUCS supplémentaires...

Mme Christine Boutin, ministre. Mais non !

M. Philippe Dallier. Que votre administration me démontre le contraire, madame la ministre ! Je suis navré, je n'ai pas obtenu ces informations, bien que je les aie demandées avant et pendant mes auditions, et encore aujourd'hui. Je me dois d'agir en parlementaire responsable et de veiller, moi aussi, madame la ministre, à la sincérité des budgets. Dans cette optique, je demande simplement que l'on en revienne aux crédits que vous aviez présentés avant qu'ils ne soient rabotés par l'Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Pardonnez-moi d'intervenir dans ces querelles de famille, de famille politique, s'entend (Sourires.), mais, après tout, elles nous concernent.

M. Dallier nous intéresse à plusieurs titres : il est sénateur-maire et rapporteur spécial de la mission « Ville et logement » pour 2008. Les ministres ont jugé son rapport excellent, fiable, crédible, et allant dans le bon sens. En outre, Mme la secrétaire d'État a dit qu'elle écouterait les élus des villes de banlieue et qu'elle était prête à prendre en considération leurs arguments.

Donc, il n'est pas illégitime de reprendre l'argumentaire de M. Dallier à l'appui de son amendement : « Ces crédits avaient pourtant fait l'objet d'un effort particulier maintenu depuis les événements de l'automne 2005. Alors que le Gouvernement annonce un ?plan Marshall des banlieues ? pour le début de l'année 2008, ces restrictions budgétaires, auxquelles s'ajoute la moindre augmentation de la dotation de solidarité urbaine [...] constituent un signe négatif qui sera perçu comme un recul de la politique de l'État en faveur des quartiers les plus en difficulté. »

Tout est dit !

M. Jean-Pierre Caffet. Il a raison !

M. Jean Desessard. Merci, monsieur Dallier, d'avoir été aussi clairvoyant. ! J'avais dit à peu près la même chose lors de mon intervention liminaire, mais vous m'avez surpassé non seulement en fougue mais surtout en autorité puisque, en tant que rapporteur spécial et membre de la majorité présidentielle, vous êtes bien placé pour parler de ces sujets. Merci encore de l'avoir fait, mon cher collègue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, comme je l'ai souligné dans mon intervention liminaire, l'un des aspects délicats des crédits de la mission « Ville et logement » tient au fait qu'ils sont depuis de trop longues années sujets à régulation budgétaire.

La régulation budgétaire signifie, notamment, que l'on regarde, au détour du collectif budgétaire de fin d'année, quel est l'état de consommation des crédits de paiement autorisés en loi de finances initiale et combien d'économies dites de « constatation » on peut réaliser.

Dans les faits, s'agissant de cette mission, nous sommes loin de la simple constatation de l'inutilité des « réserves de précaution ».

Tout d'abord, cela vient d'être dit, l'État ne respecte pas les termes de la loi d'orientation et de programmation pour la ville d'août 2003.

Je le rappelle, l'article 7 de cette loi disposait que, entre 2004 et 2008, l'État devait engager chaque année 465 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement. Or aucun des budgets votés depuis cette loi de programmation n'a respecté cet engagement, et les crédits pour 2008 consacrent l'abandon pur et simple de cette obligation !

Les amendements portant sur les crédits de la mission ont donc un défaut - n'en déplaise aux auteurs -, celui d'organiser le partage de la misère, faute pour Gilles de Robien, puis Jean-Louis Borloo, et désormais vous-même, madame la ministre, d'avoir pu respecter la parole de l'État !

Ensuite, la rareté des crédits de l'État a une conséquence : elle prive l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, d'une partie de ses moyens, malgré ce que peut en dire notre collègue Jean-Paul Alduy.

En dépit du rythme, en apparence satisfaisant, de la poursuite du programme de rénovation urbaine, nous sommes encore loin du compte.

Ainsi, plus de la moitié des constructions de logements locatifs sociaux - cet ensemble ne constituant au demeurant qu'environ 11 % des 421 000 logements construits en 2006 -ne fait que remplacer les logements sociaux détruits dans le cadre des opérations de rénovation urbaine ou vendus à leurs occupants.

Le parc locatif social, qui est censé répondre aux besoins croissants et urgents des mal-logés, augmente donc de manière particulièrement faible avec, pour l'année 2005, par exemple, un accroissement de 24 200 unités seulement !

Comment veut-on répondre aux 1,3 million de demandeurs de logements avec un parc progressant de moins de 25 000 logements par an ? Dans ces conditions, il faudrait cinquante ans pour éponger le déficit de construction !

Tailler dans les crédits de l'ANRU, comme on a taillé hier dans la dotation de solidarité urbaine, c'est laisser les élus locaux des communes de banlieue aux prises avec les difficultés des habitants des quartiers !

C'est laisser ces habitants démunis, malgré l'abondance de l'argent public, face à la crise du logement, aux discriminations à l'embauche, aux inégalités de formation et d'éducation !

C'est organiser le saupoudrage au petit bonheur la chance des aides publiques, ce qui est d'autant plus vérifiable que les financements de l'ANRU sont d'importance variable...Par exemple, à Meaux, M. Jean-François Copé a obtenu un financement de l'ANRU à hauteur de 64 % de son programme destiné à la rénovation urbaine sur la Pierre Collinet et sur Beauval, alors que le programme portant sur la cité des Quatre Mille, à la Courneuve, n'est financé par l'Agence qu'à hauteur de 35 %.

De même, le taux de subvention de l'ANRU est de moins de 30 %, par exemple, pour un programme que je connais quelque peu, celui du Grand Ensemble d'Orly.

Dès lors, nous n'entrerons pas dans les arcanes de cette misère partagée qui est organisée par l'amendement no II-115 rectifié, ainsi que par les amendements précédents nos II-47 rectifié et II-129.

M. Philippe Dallier. La « misère partagée » ! J'aurai tout entendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre André, pour explication de vote.

M. Pierre André. Tout d'abord, je veux dire à Mme la ministre que pas une seconde nous ne mettons en doute sa volonté de mener à bien cette politique de la ville, et nous lui réaffirmons notre soutien plein et entier.

Ensuite, je demanderai à mon collègue Philippe Dallier de garder son calme, surtout à cette heure tardive. Ce sera mieux pour sa santé, et, de toute manière, il ne sert à rien de s'énerver. (Sourires.)

Madame la ministre, nous pensions vous aider en retournant à la proposition initiale du Gouvernement dans le cadre de la discussion budgétaire.

Nous regrettons l'existence d'une forte sous-consommation des crédits, que j'ai signalée à plusieurs reprises. Puisque l'on nous annonce un plan extrêmement important, ne pourrions-nous pas convenir de revoir l'année prochaine les crédits annulés cette année ?

Il faut savoir que ce qui nous intéresse, nous, les maires, c'est la traduction sur le terrain des propos qui sont tenus dans cette enceinte. Or nous sommes désorientés quand les services de l'État nous demandent de prévoir, d'ores et déjà, une diminution de 15 % sur le budget de l'an prochain pour la réussite éducative et à peu près la même baisse pour les CUCS. Nous pouvons donc parfois être énervés quand nous regagnons l'hémicycle, comme Philippe Dallier à l'instant.

J'aurais voulu être agréable à mon collègue, tant il met de conviction dans son engagement en faveur de la politique de la ville, mais j'estime que nous devons nous montrer raisonnables et laisser la sagesse du Sénat s'exprimer.

C'est pourquoi je me retire de la liste des signataires de cet amendement, madame la ministre, en vous faisant confiance pour un an !