M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Multiplier la sanction pécuniaire maximale par dix pour l’aligner sur le plafond de droit commun applicable à toutes les sanctions prononcées par la commission bancaire procède effectivement d’une bonne organisation et d’un alignement approprié.

Toutefois, on pourrait souligner le fait que la Caisse des dépôts et consignations n’est pas une banque de droit commun et elle pourrait, à ce titre, bénéficier d’un traitement particulier.

En conséquence, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je voterai contre cet amendement pour les raisons qui ont été avancées par Mme le ministre. Effectivement, la Caisse des dépôts et consignations n’est pas un établissement comme les autres et il faut, bien sûr, le marquer.

Or, justement, je crains que nous n’en fassions un établissement comme les autres. C’est dommage !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 939 est présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Massion, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 909 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le XV de cet article.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 939.

M. Richard Yung. Compte tenu de la multiplicité des statuts du personnel au sein de la Caisse – fonctionnaires de l’État, agents contractuels de droit public, de droit privé, personnel de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines –, nous pensons que ne s’applique pas le paragraphe XV, qui précise : « Les titres Ier, III et IV du livre III de la troisième partie du code du travail sont applicables à l’ensemble des personnels de la Caisse des dépôts et consignations. ».

Selon nous, un débat ultérieur sera nécessaire pour clarifier la situation. Telle est la raison pour laquelle nous proposons la suppression du paragraphe XV de l’article 41.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 909 rectifié.

Mme Odette Terrade. Même si notre hémicycle n’est pas la Samaritaine en cette période de soldes, on trouve de tout dans cet article 41 ! Nous nous demandons notamment en quoi le paragraphe XV de cet article procède d’une quelconque modernisation de l’économie.

Cet alinéa, en apparence anodin pour ceux qui ne connaissent pas le statut des personnels de la Caisse des dépôts et consignations, est source de complications, comme vient de le dire mon collègue Richard Yung.

Les personnels de la Caisse des dépôts et consignations sont composés d’agents de la fonction publique de l’État, d’agents contractuels de droit public, de personnels de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, dont le statut est calé sur celui des fonctionnaires de l’État, et de personnels de droit privé régis par le code du travail.

Les personnels de droit privé sont déjà soumis à la plupart des dispositions du code du travail, notamment les articles relatifs à l’épargne salariale et à l’intéressement.

Cet alinéa n’a d’ailleurs pas vocation à revenir sur ces dispositions, il vise seulement à élargir le périmètre des personnels concernés. Il y aurait donc lieu de n’y faire figurer que les personnels à qui l’élargissement de l’application du code du travail est proposé.

Toutefois, une indication trop limitative des textes s’y référant peut être source de complications.

Les personnels fonctionnaires sont, en effet, régis par la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État. À ce titre, leurs émoluments relèvent de cette loi et des décisions du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le Gouvernement prévoit la mise en place, dans chaque administration, et d’ici à 2010 au plus tard, d’un dispositif d’intéressement collectif adossé à la réalisation d’objectifs chiffrés et fixés annuellement pour chaque service.

Le Gouvernement posera le cadre global et chaque ministère déclinera la fixation de ses objectifs, de ses indicateurs de performance et des modalités de répartition de l’intéressement.

Pour plus de transparence et d’équité de traitement à l’égard des autres fonctionnaires, il ne paraît pas opportun de légiférer aujourd’hui pour un effectif restreint de fonctionnaires et de contractuels de droit public.

Il nous semble plus opportun de renvoyer la discussion au débat que nous ne manquerons pas d’avoir dans le cadre d’un prochain projet de loi sur le sujet. Il nous a en effet été répondu à plusieurs reprises que l’on en discuterait plus tard, à l’occasion d’un autre texte. Nous souhaiterions donc qu’il soit possible de procéder ainsi pour ce paragraphe relatif aux personnels.

Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression du paragraphe XV de l’article 41.

M. le président. L'amendement n° 940, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Massion, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le XV de cet article, remplacer les mots :

à l'ensemble des personnels

par les mots :

aux fonctionnaires et personnels de droit public

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Il s’agit d’un amendement de repli, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Malgré notre souci d’être agréables à nos collègues, nous ne sommes pas très convaincus.

Notre souci social à l’égard des personnels de la Caisse des dépôts et consignations nous empêche de priver ces derniers des dispositifs de droit commun sur l’épargne salariale et des accords d’épargne salariale et d’intéressement.

Il nous semble que l’interprétation au pied de la lettre de ces amendements serait vraiment très réductrice quant à leurs droits, lesquels seraient donc sensiblement plus réduits que ceux qui sont issus de la législation générale.

C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement n’est évidemment pas favorable à ces trois amendements.

Il n’y a aucune raison, en effet, de discriminer à cet égard le personnel de droit public et le personnel de droit privé.

De plus, ces amendements auraient pour effet la privation de personnels de la CDC issus notamment de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, qui ne sont pas des personnels de droit public. Ces derniers ne pourraient donc bénéficier de l’épargne salariale, laquelle serait ainsi réservée aux seuls salariés de droit public.

Au nom de l’équité, il n’est pas du tout souhaitable d’adopter ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos  939 et 909 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 940.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 41, modifié.

(L'article 41 est adopté.)

CHAPITRE III (priorité)

Moderniser la place financière française

Article 41 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Articles additionnels après l'article 42 (priorité)

Article 42 (priorité)

Le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la modernisation du cadre juridique de la place financière française. Ces dispositions ont pour objet :

1° De renforcer l'attractivité de la place financière française et la compétitivité des infrastructures de marché, des émetteurs d'instruments financiers, des intermédiaires financiers et de la gestion collective pour compte de tiers ainsi que des activités qui y sont liées tout en veillant à assurer la bonne information des investisseurs et la stabilité financière, au travers de la réforme :

a) Du Conseil national de la comptabilité en vue de créer une nouvelle autorité chargée de définir les normes de la comptabilité privée ;

b) De l'appel public à l'épargne, de l'offre au public de valeurs mobilières, de l'admission des titres sur une plate-forme de négociation et des conditions de l'augmentation de capital pour répondre à deux objectifs. La réforme visera à rapprocher le droit applicable aux émetteurs d'instruments financiers et aux prestataires de services d'investissement des normes de référence prévalant dans les autres États membres de la Communauté européenne. Elle visera également à favoriser le développement de la place financière française comme place de cotation des émetteurs français ou étrangers, en particulier de ceux qui ne souhaitent pas procéder à une offre au public ;

c) Des obligations d'information applicables aux émetteurs et des règles applicables à la diffusion et à la conservation des informations, en vue d'achever leur mise en conformité avec le droit communautaire ;

d) Du régime des actions de préférence ;

e) Du régime des rachats d'actions en vue de favoriser la liquidité des titres de la société et de simplifier les règles de publicité ;

f) Des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, des organismes de placement collectif immobilier, des sociétés d'investissement à capital fixe et des fonds d'investissement de type fermé, en vue de :

- réformer les règles relatives à la gestion collective pour compte de tiers en modernisant les règles applicables aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières réservés à certains investisseurs, en ajustant le cadre relatif à l'information des porteurs de parts ou actions de ces organismes en vue de faciliter la diffusion des fonds français à l'étranger, en développant les mécanismes permettant à ces organismes de gérer leur liquidité, en écartant l'application à ces organismes de certaines dispositions du code de commerce et en modifiant le régime des organismes de placement collectif immobilier réservés à certains investisseurs ;

- réformer le régime des sociétés d'investissement à capital fixe relevant du titre II de l'ordonnance n° 45-2710 du 2 novembre 1945 relative aux sociétés d'investissement en vue de permettre le développement des fonds fermés et la cotation des fonds d'investissement de type fermé français et étrangers ;

g) Du droit applicable aux instruments financiers et aux infrastructures de marché, en vue de :

- réformer et simplifier le droit applicable aux instruments financiers par la modification des définitions, de la nomenclature et de la présentation des dispositions qui leur sont applicables afin de rendre plus cohérent le droit des titres et d'intégrer et d'anticiper les évolutions des normes européennes et des conventions internationales en matière de droit des titres ;

- modifier la liste des participants à un système de règlement et de livraison d'instruments financiers afin de renforcer la stabilité de ces systèmes ;

h) Des limites d'indexation applicables aux titres de créance et instruments financiers à terme ;

i) De la législation applicable aux entreprises de réassurance, en vue de modifier certaines dispositions des titres Ier et II du livre III du code des assurances qui s'appliquent indistinctement aux entreprises d'assurance et de réassurance pour mieux prendre en compte la spécificité de la réassurance, notamment en matière de notification préalable à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles pour la libre prestation de service, de sanctions applicables aux entreprises de réassurance et de mesures de sauvegarde applicables par l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles ;

2° D'harmoniser certaines règles applicables à la commercialisation d'instruments financiers avec celles applicables à la commercialisation de produits d'épargne et d'assurance comparables, et d'adapter les produits d'assurance aux évolutions du marché de l'assurance pour :

a) Moderniser les conditions de commercialisation et la législation des produits d'assurance sur la vie, notamment la publicité, et les obligations de conseil à l'égard des assurés ;

b) Prévoir la mise en place, d'une part, à l'initiative des professionnels, de codes de conduite en matière de commercialisation d'instruments financiers, de produits d'épargne ou d'assurance sur la vie, que le ministre chargé de l'économie peut homologuer, d'autre part, l'articulation des rapports entre les producteurs et les distributeurs ;

c) Moderniser les règles relatives aux opérations pratiquées par les entreprises d'assurance pour les activités de retraites professionnelles supplémentaires ;

3° D'adapter la législation au droit communautaire en vue de :

a) Transposer la directive 2007/14/CE de la Commission, du 8 mars 2007, portant modalités d'exécution de certaines dispositions de la directive 2004/109/CE sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé ;

b) Transposer la directive 2007/44/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007, modifiant la directive 92/49/CEE du Conseil et les directives 2002/83/CE, 2004/39/CE, 2005/68/CE et 2006/48/CE en ce qui concerne les règles de procédure et les critères d'évaluation applicables à l'évaluation prudentielle des acquisitions et des augmentations de participation dans des entités du secteur financier, et prendre les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition ;

c) Transposer la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 97/7/CE, 2002/65/CE, 2005/60/CE ainsi que 2006/48/CE et abrogeant la directive 97/5/CE, et prendre les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition ;

d)  Transposer la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et la directive 2006/70/CE de la Commission, du 1er août 2006, portant mesures de mise en œuvre de la directive 2005/60/CE, et prendre des mesures pour rendre plus efficace la législation relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ainsi que des dispositions pour faciliter la mise en œuvre des mesures de gel des avoirs non terroristes décidées en application des résolutions adoptées dans le cadre du chapitre VII de la charte des Nations Unies ou des actes pris en application de l'article 15 du traité sur l'Union européenne ;

4° D'améliorer la codification pour inclure dans le code monétaire et financier les dispositions qui ne l'auraient pas encore été, remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification, et abroger les dispositions obsolètes, inadaptées ou devenues sans objet. Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication de la présente loi sous réserve des modifications introduites sur le fondement des 1° à 3° du présent article et de celles rendues nécessaires pour assurer la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes et harmoniser l'état du droit.

Ces ordonnances sont prises dans un délai de six mois à compter de la date de publication de la présente loi, à l'exception des dispositions prévues aux b et c du 3° et au 4° qui sont prises dans un délai de douze mois. Un projet de loi portant ratification est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance considérée.

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Madame le ministre, permettez-moi de dire quelques mots sur la transposition de la troisième directive « anti-blanchiment ».

L’habilitation qui nous est proposée à l’article 42 prévoit, entre autres importantes mesures, de transposer par ordonnance cette troisième directive du 26 octobre 2005. L’urgence est réelle, puisque le délai de transposition était fixé au 15 décembre 2007, et que nous avons un devoir d’exemplarité au moment où la France commence à exercer la présidence de l’Union européenne.

La directive élargit le champ des opérations et infractions concernées, potentiellement à la fraude fiscale, et met en place une approche plus graduelle et pragmatique de la vigilance. Certaines obligations sont ainsi renforcées, d’autres allégées. Le traitement des professions juridiques indépendantes a cependant constitué un point de blocage en France, après que la deuxième directive en 2005 a déjà suscité des controverses compte tenu de certaines difficultés de concilier ces nouvelles obligations de déclaration avec le principe absolu du secret professionnel à l’égard du client.

La troisième directive abroge le régime dérogatoire du « tipping off »,…

M. Richard Yung. C’est joli, ça !

M. Philippe Marini, rapporteur. …c’est-à-dire la possibilité pour les avocats de révéler à leurs clients qu’ils ont fait l’objet d’une déclaration de soupçon ou du droit de communication à Tracfin.

Les difficultés se cristallisent avant tout sur la question des contacts directs ou indirects entre les avocats et Tracfin. Le bâtonnier ne disposerait plus du pouvoir d’appréciation de l’opportunité de la transmission. Selon le nouveau régime, il devrait toutefois rester un intermédiaire, disposant d’un pouvoir d’appréciation de la stricte recevabilité juridique de la déclaration de soupçon au regard du champ délimité par la directive, telle qu’interprétée par le Conseil d’État dans son arrêt du 10 avril 2008. Je rappelle que cet arrêt a exclu les consultations juridiques du champ des déclarations à Tracfin.

Compte tenu de l’urgence de la transposition et du caractère sensible de ce sujet pour des professionnels dont la déontologie est un des actifs les plus précieux, je souhaiterais, madame le ministre, que vous puissiez nous préciser les axes du compromis qui aurait apparemment été trouvé avec le Conseil national des barreaux.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur, vous m’interrogez sur la relation que nous avons avec les représentants des professions juridiques, en particulier ceux de la profession d’avocat, sur la question de l’application de la troisième directive anti-blanchiment et sur la préservation d’une partie du fond de commerce de cette profession qui tiendrait au secret professionnel qu’ils peuvent utiliser, notamment dans un certain nombre de correspondances avec leurs clients.

Cette concertation, qui est en cours, devrait aboutir je l’espère très rapidement, d’ici à la mi-juillet. S’agissant des avocats, je suis particulièrement encouragée par le dialogue fructueux engagé avec le Conseil national des barreaux. Nous sommes maintenant proches d’une solution susceptible de répondre aux besoins de la transposition et aux impératifs bien légitimes de la profession.

Quels sont les principes qui guident le Gouvernement dans la question de la soumission des professions juridiques aux obligations anti-blanchiment ?

Tout d’abord, naturellement, l’application rigoureuse des règles qui découlent de la Constitution ou de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, régissant l’exercice de la profession d’avocat et tout particulièrement les garanties qui entourent la relation entre l’avocat et son client.

À cet égard, le texte tiendra pleinement compte de l’arrêt important rendu par la Cour de justice en juin 2007 relatif à la soumission des activités de nature juridictionnelle des avocats aux obligations anti-blanchiment. La loi dira clairement que de telles activités doivent être soustraites de ces obligations.

La volonté du Gouvernement est également que le texte tire toutes les conséquences de l’arrêt rendu en avril par le Conseil d’État, notamment en sortant la consultation juridique du champ du droit de communication – j’insiste sur les termes « consultation juridique » –, sauf, bien évidemment, si elle est faite aux fins de blanchiment, auquel cas l’exception ne s’appliquerait pas !

Par ailleurs, le Gouvernement ayant décidé de garder l’intermédiation du bâtonnier, une stricte étanchéité entre le service Tracfin et les avocats sera établie. Tel était le souhait de la profession, et cela nous paraît tout à fait compatible avec la transposition.

Enfin, le Gouvernement usera également les facultés offertes par la directive pour établir des garanties supplémentaires, en prévoyant notamment la faculté pour l’avocat de tenter de dissuader son client de prendre part à une activité illégale et en ne l’obligeant pas à déclarer à Tracfin ses clients qu’il ne serait pas parvenu à identifier.

Je pense que cette approche est équilibrée et qu’elle doit permettre de mener à son terme la concertation avec les professionnels.

Par ailleurs, il est utile de préciser ce que l’on entend par la notion de « consultation juridique » par opposition à la terminologie de « conseil juridique ».

La « consultation juridique » est l’activité à laquelle fait référence la troisième directive et le pendant en langue française de la notion de « legal opinion » que l’on trouve dans la directive en langue anglaise.

En revanche, la notion de « conseil juridique » n’est plus définie en droit français depuis la fusion des professions judiciaires et juridiques. Elle est donc susceptible de créer davantage de confusion et de faire l’objet d’une interprétation contraire à la directive, alors que la notion de « consultation juridique » est désormais bien comprise par les professionnels.

Telles sont les explications que je voulais vous fournir en la matière.

M. Philippe Marini, rapporteur. Je vous remercie, madame le ministre.

M. le président. Sur l’article 42, je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 482 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 941 est présenté par Mme Bricq, MM. Repentin et Massion, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour présenter l’amendement n° 482.

M. Jean-Claude Danglot. Comme nous l’avons exprimé à diverses reprises, notre groupe s’oppose au recours aux ordonnances qui prive le Parlement d’un vrai débat sur le fond. Si cet article est voté, ce sera le cas, par exemple, de la troisième directive anti-blanchiment.

Le rapport de la commission invoque l’urgence « compte tenu du retard pris par la France pour transposer cette directive » – le délai était fixé au 15 décembre 2007 – et « l’imminence de la présidence française de l’Union européenne ».

La France, comme treize autres pays de l’Union, a reçu le 5 juin dernier un avis motivé dans le cadre de la procédure d’infraction prévue à l’article 226 du traité CE.

Madame la ministre, vous avez indiqué, lors du débat à l’Assemblée nationale, que le retard pris était notamment dû aux consultations « multiples et laborieuses » entreprises avec les professionnels.

Laborieuses effectivement, puisque cette directive pose un certain nombre de problèmes, dont la profession d’avocats, vous le savez, s’est inquiétée, comme elle s’était inquiétée lors de la transposition de la deuxième directive, et à juste titre !

Rappelons que la Cour de justice des Communautés européennes, dans une décision du 26 juin 2007, la Cour constitutionnelle belge, le 23 janvier 2008, et le Conseil d’État, dans un arrêt rendu le 10 avril dernier, ont contesté un certain nombre de dispositions contenues dans la deuxième directive.

Comme le rappelle le rapport d’information réalisé au nom de la commission des lois dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, le Conseil d’État a annulé deux points importants du décret transposant la deuxième directive. Il a notamment exclu des obligations de vigilance les informations détenues ou reçues lors d’une consultation juridique.

Le blanchiment d’argent, de par son ampleur, est un problème majeur, un défi économique, politique et éthique, qu’il faut résolument combattre. L’Union européenne, notamment sous la présidence française, a bien évidemment un rôle à jouer. Elle devrait d’ailleurs ne plus tolérer des paradis fiscaux sur son territoire. Or cette question reste taboue.

Tous ces éléments nous confortent dans l’idée que le passage par voie d’ordonnance nous priverait d’un examen approfondi, pourtant nécessaire, de ces questions.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, qui vise à supprimer l’article 42.

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 941.

Mme Bariza Khiari. Nous demandons la suppression de l’article 42, qui tend à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures destinées à moderniser le cadre juridique de la place financière française.

Cette habilitation est extrêmement large. Elle ne porte pas seulement, comme souvent, sur la transposition de directives européennes ; elle va beaucoup plus loin. Elle concerne, notamment, la création d’une autorité administrative indépendante dans le domaine de la comptabilité d’entreprise.

Elle vise également l’appel public à l’épargne, ce qui n’est pas anodin. Une telle réforme, parfois pertinente sous certains aspects, mériterait que le Parlement y soit associé.

En ce qui concerne la réforme de la gestion pour compte de tiers, qui devrait permettre le développement de hedge funds en France, si les souplesses introduites concernent des fonds destinés à des investisseurs avertis, la déréglementation peut avoir des répercussions fâcheuses sur l’ensemble des investisseurs.

À propos de l’extension des règles de commercialisation des produits financiers à l’assurance vie, quatre lois sont déjà intervenues sur le sujet depuis 2002.

L’habilitation prévue à l’article 42 n’est pas la seule de ce projet de loi, qui contient au moins six autres habilitations à légiférer par ordonnance. L’utilisation de cette procédure est trop fréquente.

L’article 42 ne concerne pas seulement des sujets purement techniques. Ce n’est pas parce que le droit financier se caractérise par une certaine complexité qu’il ne mérite aucun débat politique. Souvent, en effet, les enjeux sont de nature politique.

Ces dernières années, des pans entiers du code monétaire et financier et du droit boursier ont ainsi échappé à l’examen du Parlement, ce qui est regrettable et pourrait nous amener à penser qu’il s’agit d’un contournement.

Essayons donc de limiter au maximum les habilitations à légiférer par ordonnance, même si ces dernières peuvent être nécessaires sur un certain nombre de sujets.

M. le président. Les deux amendements suivants sont présentés par M. Marini, au nom de la commission.

L'amendement n° 39 est ainsi libellé :

Compléter le 1° de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

...) Du régime de l'information sur les participations significatives dans les sociétés cotées et les déclarations d'intention ;

...) Du régime de l'information sur les droits de vote attachés aux opérations de cession temporaire d'actions en période d'assemblée générale, dans un objectif de plus grande transparence ;

L'amendement n° 40 est ainsi libellé :

Après le 1° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

1° bis. De fusionner la Commission bancaire et l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles afin de disposer d'un régulateur prudentiel unique pour les acteurs financiers réglementés ;

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.