M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 décembre 2009, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport sur le bilan de la déréglementation dans le secteur postal. Ce rapport examine l'impact en termes d'emploi, de santé au travail et d'aménagement du territoire de la transposition des directives européennes.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Depuis plus de vingt ans, l’Europe est devenue, pour les salariés du secteur postal, synonyme de déréglementation et de mise en concurrence. La privatisation de La Poste qui sous-tend ce projet de loi est, à n’en pas douter, l’aboutissement de ce processus.

La Commission européenne a d’abord adopté le Livre vert sur le développement du marché unique des services postaux, qui découle de l’Acte unique européen de 1986. Puis, en février 1994, fut approuvée la résolution du Conseil européen sur le développement des services postaux communautaires. En janvier 1999, conformément à la première directive postale européenne, adoptée en 1997, fut ouverte à la concurrence la distribution des lettres d’un poids supérieur à 350 grammes. Ensuite, en 2002, avec la transposition de la deuxième directive postale, ont été concernés les envois d’un poids supérieur à 100 grammes, le seuil étant encore abaissé à 50 grammes en janvier 2006. Enfin, est prévue pour le 1er janvier 2011 la mise en concurrence de la distribution des lettres de moins de 50 grammes, ce dernier acte de dérégulation résultant, quant à lui, de la troisième directive postale, adoptée en 2008.

On le voit bien, aux trois directives postales ont correspondu trois trains de libéralisation, les commissaires européens, à commencer par M. Barroso, n’ayant qu’une obsession : poursuivre la dérégulation qu’ils avaient entamée avec le secteur des télécommunications.

L’argument est toujours le même : il faut coûte que coûte supprimer les barrières nationales, les protections, et privilégier la mise en concurrence. L’objectif est d’aboutir à une économie libre et non faussée, fonctionnant sans aucune intervention des pouvoirs publics. Et qu’importe si la réduction des prix annoncée n’est pas toujours au rendez-vous ! Natacha Tatu, du Nouvel Observateur, observe, avec raison, que, « à Bruxelles, la dérégulation est devenue une vraie théologie et les fonctionnaires se sont mués en inquisiteurs traquant sans merci les hérétiques subventions et aides publiques ».

Chers collègues de la majorité, à l’heure où vous allez transformer La Poste en société anonyme, en renonçant ainsi au service public postal, nous entendons, pour notre part, mettre en exergue les conséquences de ces politiques pour les salariés, leur santé physique et psychique, ainsi que pour la qualité du service public offert aux Français.

M. le président. L'amendement n° 362, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement un rapport spécifique sur l'évolution globale de l'emploi et les conditions de travail dans le secteur postal au plus tard le 30 juin 2010 puis tous les deux ans.

La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement l’établissement, préalablement à toute entrée en vigueur des dispositions européennes, d’un rapport sur la situation de l’emploi et des conditions de travail dans le secteur postal. Ce rapport sera transmis au Parlement avant le 30 juin 2010, afin que ce dernier ait le temps d’en évaluer, en toute transparence, les conclusions.

Ainsi que le démontrent les expériences menées dans les autres États membres de l’Union européenne, l’ouverture totale à la concurrence aura des conséquences certaines sur l’emploi et les conditions de travail.

Force est de constater que l’ouverture du marché à la concurrence a partout entraîné des réductions d’effectifs chez les opérateurs historiques, des emplois précaires étant créés, parallèlement, chez les nouveaux acteurs. Nous redoutons donc, non sans raisons malheureusement, des conséquences similaires pour le service public postal français.

Certes, le dépôt d’un tel rapport est prévu à l’article 23 de la troisième directive postale. Toutefois, dans la perspective de l’entrée en vigueur des dispositions en question, nous souhaitons pouvoir prendre plus rapidement connaissance de l’état des conditions sociales dans le secteur postal français, puisque, comme l’indique M. le rapporteur, des incertitudes existent quant à l’évolution globale de celui-ci.

Nous espérons que la tradition sociale de La Poste, telle qu’elle est décrite dans le rapport de M. Hérisson, à savoir celle d’une entreprise publique qui « vise à renforcer les emplois stables […] et à réduire significativement le nombre de contrats à durée déterminée », ne soit pas reniée au nom de la réponse à de nouveaux défis et de la conquête de nouveaux marchés.

Pour avoir un service public de qualité, il faut l’adapter aux évolutions technologiques, sans renoncer à investir dans les ressources humaines. C’est à ce prix que La Poste, premier employeur de France après l’État, pourra rester une entreprise « pas comme les autres » !

Par ailleurs, nous souhaitons que la stratégie de Lisbonne, qui consiste notamment « à promouvoir la croissance » et à « créer davantage d’emplois et des emplois de meilleure qualité », selon les termes employés lors du Conseil européen de mars 2005, préside à la transposition de la troisième directive postale, dont nous contestons néanmoins toujours le bien-fondé, ainsi que les objectifs qui la sous-tendent.

M. le président. L'amendement n° 357, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 juin 2010, le Gouvernement soumet au Parlement un rapport sur les conditions de l'application de la directive 97/67/CE modifiée par la directive 2002/39/CE au secteur postal français.

La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Cet amendement, qui s’inscrit dans la même veine que le précédent, vise à assurer au Parlement une information précise et transparente sur les conditions d’application des directives postales européennes, ainsi qu’à prévoir une mission d’évaluation. Cette information ne serait pas un luxe ; elle aurait même dû être un préalable à l’élaboration du projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis.

Depuis la première directive postale de 1997, la Commission européenne a obligation d’élaborer régulièrement des rapports sur l’application des directives postales, rapports qui se fondent sur des études « indépendantes ». À nos yeux, ce dernier point pose problème, car la réalisation de ces études est confiée à des cabinets d’audit dont le travail aboutit invariablement à la même conclusion : il faut restructurer les entreprises et réduire les coûts.

Peut-on confier l’évaluation de l’accomplissement de missions de service public à des cabinets d’audit qui n’ont aucune obligation de prendre en compte les objectifs sociaux, économiques et politiques des traités européens, pas plus que l’exigence de cohésion économique et sociale ou le rôle des services publics ? Ne laissons pas les services publics être traités comme de simples entreprises !

J’ajoute que les conclusions tirées par la Commission européenne sont elles aussi purement idéologiques : comment peut-on accepter que des commissaires européens considèrent que l’organisation d’un service postal universel et le maintien d’un secteur réservé sont un « obstacle juridique » à l’application de « règles du jeu équitables ». Mais oui, cette formulation figure bien dans la troisième directive postale ! C’est un joli euphémisme pour désigner la concurrence organisée par les seules forces des marchés. Nous sommes loin de la concurrence régulée et maîtrisée des services, que chacun ici appelle de ses vœux.

L’évaluation que j’évoquais doit donc être reprise en main à l’échelon politique, comme en témoigne éloquemment la révision de la directive dite Bolkestein, première mouture de la directive relative aux services, révision obtenue grâce à l’implication des parlementaires de toute l’Union européenne.

Les parlementaires des différents États membres seraient parfaitement à même d’effectuer ce travail indispensable. La troisième directive postale impose à la Commission européenne de fournir un nouveau rapport d’évaluation à l’horizon de 2013, échéance qui nous paraît bien tardive. Le dernier rapport, qui date de l’été 2009, n’est pour l’instant disponible qu’en anglais.

Que le Parlement puisse évaluer, indépendamment des études commandées par la Commission européenne, les conséquences réelles de l’application des directives européennes postales déjà en vigueur avant toute éventuelle application de la troisième directive postale nous paraît un minimum. Nous souhaitons une évaluation plus politique que celle des cabinets privés.

M. le président. L'amendement n° 358, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement tous les deux ans, et pour la première fois au plus tard avant le 30 juin 2010, un rapport sur les tarifications commerciales du secteur postal.

La parole est à M. Martial Bourquin.

M. Martial Bourquin. Cet amendement vise à établir une véritable transparence des tarifications commerciales du secteur postal, en demandant au Gouvernement la remise d’un rapport sur ce sujet au Parlement.

On peut s’inquiéter des tentations que peut éprouver La Poste de facturer, notamment aux PME, la distribution du courrier à une heure qui était jusqu’à présent considérée comme normale. Selon un journal satirique dont la qualité des enquêtes ne peut être mise en cause, les entreprises devraient désormais payer triple tarif pour recevoir leur courrier avant onze heures du matin, ce qui est pour elles une absolue nécessité.

On n’ose imaginer les conséquences d’une telle politique tarifaire, qui manque totalement de transparence, sur le budget des PME, surtout pour celles d’entre elles qui sont situées dans des zones peu denses et dont l’activité est essentielle pour la vitalité de leur territoire !

Cette tendance ne pourrait être que renforcée par l’application de la logique de la troisième directive postale, dont il nous est proposé de transposer certaines dispositions, et non des moindres.

La mise en question du financement du service postal universel, la fin du secteur réservé et la fixation des prix en fonction des coûts auront des incidences notables sur les tarifs.

Un sénateur de l’UMP. Ce n’est pas vrai !

M. Martial Bourquin. Cette situation pourrait d’ailleurs être encore aggravée par l’adoption éventuelle d’une proposition de directive relative à la suppression de l’exonération de la TVA pour les services postaux que la Commission européenne vient de soumettre à nouveau au Conseil. Nous reviendrons plus longuement sur les conséquences d’une telle proposition.

En conclusion, l’augmentation des coûts pèsera lourdement sur les particuliers, mais surtout sur les budgets des petites et moyennes entreprises. Aussi souhaitons-nous que le Parlement puisse étudier de façon régulière les données précises de la facturation réelle des services proposés.

M. le président. L'amendement n° 363, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard au 1er janvier 2012, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport détaillé examinant l'évolution de l'emploi dans le secteur postal ainsi que celle des tarifs du service public postal depuis l'ouverture totale du marché.

La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement, qui s’inscrit dans la même logique que les précédents, a pour objet de demander au Gouvernement de transmettre au Parlement un rapport détaillé sur l’évolution de l’emploi dans le secteur postal et des tarifs du service public postal avant l’ouverture totale du marché des services postaux en Europe.

On ne peut que s’inquiéter, en effet, des conséquences de la libéralisation du secteur, que de nombreux exemples en Europe mettent désormais en lumière.

La Confédération européenne des syndicats a elle aussi appelé à une évaluation des conséquences de l’application de la troisième directive postale pour l’emploi et la situation des travailleurs avant que l’on aille plus loin dans cette voie. Elle considère également qu’il est tout à fait contraire aux objectifs du modèle social européen de se borner à remplacer les monopoles publics par des oligopoles privés, au lieu de créer des emplois meilleurs et plus nombreux, et de substituer à des emplois sûrs des emplois précaires assortis d’horaires de travail ne permettant pas de concilier vie professionnelle et vie familiale.

En un mot, l’application de cette troisième directive postale, qui concerne plus de 1,6 million de salariés, risque d’entraîner des conséquences graves et permanentes pour l’emploi. L’ « optimisation » des ressources humaines au titre de la gestion des coûts du service universel a gagné tous les pays européens qui ont ouvert leur secteur postal à la concurrence. C’est un bel euphémisme, qui masque une réalité pouvant inspirer de grandes inquiétudes.

Ainsi, en Grande-Bretagne, l’équivalent de La Poste a déjà procédé à la suppression de 35 000 emplois, et un second plan de grande ampleur est annoncé. Depuis le 23 octobre dernier, les postiers britanniques sont d’ailleurs en grève. Au nom de la compétitivité, c’est la précarité qui s’installe ! En Belgique, de faibles salaires sont désormais proposés aux jeunes, aux retraités et aux femmes au foyer qui voudraient devenir facteurs de leur quartier, cela afin de limiter le coût de la distribution du courrier. De tels emplois, rémunérés 25 euros bruts par jour, ne sont viables que si on les combine avec une pension de retraite ou des indemnités de chômage : 8 000 ont été proposés, tandis que, parallèlement, 8 000 emplois ont été supprimés en cinq ans !

Au-delà des questions d’emploi et de conditions sociales pour les salariés des services postaux, on constate partout en Europe que les services sont rendus à des prix élevés, à la fois pour les particuliers et pour les entreprises, sans que les prestations fournies se soient pour autant améliorées.

Ces constats inquiétants nous font souhaiter que soit conduite une évaluation objective de toutes les conséquences d’une ouverture plus grande, voire totale, à la concurrence. Par conséquent, nous demandons instamment au Gouvernement la remise d’un tel rapport d’évaluation avant l’entrée en vigueur de la troisième directive postale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’amendement n° 6 prévoit la remise au Parlement, avant la promulgation de la présente loi, d’un rapport étudiant les conséquences sociales de l’ouverture à la concurrence du secteur public postal.

Monsieur Danglot, j’ai du mal à comprendre votre proposition. En effet, si cette mesure était adoptée, elle serait, comme toutes les autres dispositions du texte, applicable après la promulgation de la loi. Comment peut-elle donc prévoir la remise d’un rapport avant cette échéance, sauf à remonter dans le temps ?

Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.

Les autres amendements faisant l’objet de la discussion commune visent à prévoir la remise au Parlement de rapports portant sur des sujets divers, parfois dans des délais peu réalistes. La commission est défavorable aux amendements nos 7, 362, 357, 358 et 363.

M. Guy Fischer. C’est du travail bâclé !

M. Pierre Hérisson, rapporteur. En toute sincérité, mes chers collègues, combien d’entre nous lisent les rapports dont nous demandons régulièrement la remise en élaborant des textes de loi ?

M. Guy Fischer. Il n’y a que vous, bien sûr !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre. Même avis que la commission, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote sur l’amendement n° 6.

M. Claude Bérit-Débat. Je trouve que la réponse de M. le rapporteur est tout de même un peu légère !

En effet, il nous reproche de prévoir des délais trop courts pour la remise des rapports sollicités, alors que notre amendement n° 363 fixe comme date butoir le 1er janvier 2012 ! Ce n’est quand même pas là une échéance trop rapprochée !

En outre, il me semble normal, et même indispensable, de pouvoir évaluer les conséquences sur l’emploi et sur les tarifs du service public, par exemple, de l’ouverture du secteur postal à la concurrence. Nous sommes les porte-parole des citoyens, notamment des 2,4 millions d’entre eux qui, voilà un mois, ont voté contre vos propositions, même si vous ne voulez pas l’entendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.

M. Bernard Vera. Il nous paraîtrait plus qu’opportun d’étudier les conséquences sociales de la libéralisation et de l’ouverture à la concurrence du secteur postal, en France et dans les autres pays d’Europe. Pourquoi refuser que soient évalués, dans des conditions sérieuses, les effets de cette évolution ? Pourquoi refuser la transparence et la connaissance des faits, sinon pour occulter les conséquences sociales, que l’on sait néfastes, de l’ouverture à la concurrence, fût-elle partielle comme en France : réduction et précarisation des emplois, diminution du nombre des bureaux de poste, restriction des services offerts ? La réalisation d’une telle étude interdirait de les nier

Depuis 2001, La Poste a ainsi perdu 25 000 emplois, et 600 bureaux de poste ont été fermés en 2007. Très concrètement, cela signifie une baisse du nombre de facteurs, et donc un allongement des tournées en zones rurales ou périurbaines. Cela signifie aussi que, pour assurer des missions de service public qui ne sont pas entièrement financées par l’État, La Poste joue sur la qualité de la couverture territoriale, les services aux usagers et les conditions de travail du personnel.

Il est intéressant de noter que, pour la première fois depuis la création de La Poste, on assiste à une baisse du volume du courrier, à hauteur de 3 % en 2008. Or La Poste évalue à 100 millions d’euros par an l’incidence financière d’une baisse de 1 % du volume du courrier.

Dans le contexte actuel d’ouverture à la concurrence, La Poste obéit à une logique de recherche de nouvelles parts de marché, au prix d’une dégradation du service, de la suppression de bureaux de poste et d’emplois !

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. La réponse qui nous a été faite m’a quelque peu surpris.

Aujourd'hui, on le sait, les PME connaissent de grandes difficultés, souffrent d’une grave pénurie de liquidités : l’année à venir sera très difficile pour elles. Ma question sera simple : comment pourraient-elles, dans ces conditions, payer trois fois plus cher qu’aujourd’hui pour que le courrier leur soit délivré avant onze heures ?

On ne nous répond pas sur le fond, alors que de telles questions le méritent et que l’on nous propose d’avoir un débat solide et sérieux…

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. Mon explication de vote portera en fait sur l’amendement n° 357.

La troisième directive postale devrait entrer en application à compter du 1er janvier 2011. À ce jour, des études ont été commandées à l’échelon européen pour tenter de mesurer les effets de la mise en œuvre des deux premières directives, mais aucune véritable évaluation de cet ordre n’a été conduite par les administrations françaises.

Avant que la troisième directive postale n’entre en vigueur, il nous semble pourtant absolument indispensable que le Parlement français puisse évaluer, et ce indépendamment des études commandées par la Commission européenne, les conséquences réelles de l’application des deux directives précédentes. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé l’amendement n° 357.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. En commission, il nous avait été suggéré d’enrichir le débat et le projet de loi par des amendements, dont M. le ministre a dit qu’il était disposé à les prendre en considération s’ils apportaient quelque chose.

Permettez-moi de vous relire l’amendement n° 362 : « Le Gouvernement présente au Parlement un rapport spécifique sur l’évolution globale de l’emploi et les conditions de travail dans le secteur postal au plus tard le 30 juin 2010, puis tous les deux ans. » Très franchement, je ne vois pas en quoi cet amendement mérite d’être rejeté par la commission. Nous ne demandons rien d’extraordinaire !

M. Patrice Gélard. Cette disposition ne sera pas appliquée !

M. Yannick Botrel. De mon point de vue, non seulement il apporte quelque chose, mais, alors que l’on a reproché aujourd’hui à l’opposition de faire de l’obstruction sur un certain nombre de sujets, il contribue à faire avancer le débat sur un point dont l’importance ne doit échapper à personne : il s’agit en effet des ressources humaines d’une grande entreprise, La Poste, et des égards que nous devons à un personnel sur lequel, les uns et les autres, nous ne tarissons pas d’éloges.

Par conséquent, il me semblerait normal de procéder à un inventaire, ce qui nous permettrait ensuite de dresser des bilans d’étape et de prendre la mesure des évolutions à attendre.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Nous sommes tous très attachés au développement économique, et nous voulons que les entreprises puissent traverser ces temps de crise dans les meilleures conditions possibles.

En présentant l’amendement n° 358, M. Bourquin a souligné qu’il n’était pas normal que les entreprises doivent payer deux ou trois fois plus cher pour recevoir leur courrier avant onze heures – courrier qui comprend notamment des commandes. Est-il normal que les entreprises doivent payer deux ou trois fois plus cher pour pouvoir envoyer un devis ou un dossier à un client après l’heure limite de dépôt du courrier, fixée dans certaines zones beaucoup trop tôt dans la journée ?

Or c’est bien là le sujet qui nous intéresse ! En matière de développement économique, la dérégulation du service de distribution du courrier, telle qu’elle est en train de se mettre en place, privera les entreprises d’une part importante de leur réactivité.

C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste a déposé l’amendement n° 357. Il ne s’agit pas de demander un rapport supplémentaire : d’ailleurs, il est bien possible que le Gouvernement commande beaucoup plus de rapports que le Parlement ! Nous voulons simplement pouvoir examiner sereinement la situation, notre objectif étant de maintenir un niveau élevé d’activité économique sur l’ensemble du territoire. Bien sûr, l’aménagement du territoire passe par le maintien de 17 000 points de contact de La Poste, mais il faut également que les entreprises de notre pays puissent continuer à travailler et à communiquer avec leurs clients et leurs partenaires.

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

M. Gérard Le Cam. Nous souhaitons pouvoir disposer d’un véritable état des lieux du secteur postal en France, avant toute transposition en droit interne de la directive européenne censée être à l’origine du changement de statut juridique de La Poste.

En effet, à l’heure où le Gouvernement voudrait faire franchir à La Poste une étape de plus dans sa conversion en entreprise entièrement commerciale, il est à nos yeux indispensable de dresser un bilan de la déréglementation de ce secteur, et ce de toute urgence : une telle étude d’impact, qui n’a jamais été réalisée, doit être menée dans les meilleurs délais, c’est-à-dire avant le 31 décembre prochain. Il est nécessaire que soient examinées concrètement et minutieusement les incidences de ce changement de structure, notamment en termes d’emploi, de santé des travailleurs et d’aménagement du territoire.

La transformation de l’établissement public industriel et commercial qu’est aujourd’hui La Poste en une société anonyme aura des conséquences très lourdes pour le personnel. Il n’est qu’à voir les problèmes que lui pose déjà la coexistence de deux régimes juridiques différents, avec l’empilement des statuts, les bricolages, les rafistolages auxquels donne lieu la création d’un véritable « ornithorynque juridique », certains personnels, dits les « ni-ni », n’étant ni des salariés de droit privé, ni de véritables fonctionnaires.

Le changement de statut doit également être précédé d’une étude sérieuse visant à mettre en lumière ses conséquences pour la santé au travail des salariés actuels et futurs de La Poste. À l’heure où l’on commence à mesurer l’étendue et la gravité de la souffrance au travail et où des missions parlementaires se constituent sur ces sujets, tandis que l’actualité nous rappelle chaque jour les dégâts humains causés par l’ultralibéralisme, il nous semble indispensable de nous interroger sur ces réalités et de commander un rapport portant notamment sur ces thèmes primordiaux.

Enfin, il convient également de mesurer l’impact de cette réforme sur l’aménagement du territoire, car elle risque d’engendrer une forte réduction de la présence postale.

C’est pourquoi il est selon nous nécessaire que ce rapport soit élaboré par le Gouvernement et adressé aux représentants de la nation avant le 30 décembre prochain.

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.

M. Patrice Gélard. Mes chers collègues, nous avons adopté l’année dernière une révision constitutionnelle qui a renforcé une mission que nous exercions peu dans le passé, celle de contrôle.

Il nous revient donc d’établir les rapports supplémentaires que certains d’entre vous réclament au Gouvernement : il nous appartient, durant les deux semaines consacrées chaque mois au contrôle sénatorial de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques, de nous atteler à cette tâche.

Par ailleurs, en ce qui concerne l’application des directives européennes, je vous rappelle que les compétences de la commission des affaires européennes ont été accrues. C’est à elle qu’il incombe désormais de nous remettre des rapports sur toutes ces questions.