M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !

M. Guy Fischer. Alors, soyez présent !

M. Didier Boulaud. Où est-elle, cette majorité ?

M. Roland Courteau. Elle ne se voit pas !

M. Gérard Longuet. Nous sommes ici les représentants d’une majorité, et la vie parlementaire, mes chers collègues, a ses règles propres. Vous en avez tous une trop grande expérience, devant laquelle je m’incline, pour oublier que le règlement a prévu, justement, le cas dans lequel nous nous trouvons à cet instant. Car une majorité, même voulue par les électeurs, ne peut pas être mobilisée à tout instant. (Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Je respecte votre majorité physique, respectez notre majorité politique, qui a été voulue, elle, par les grands électeurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Rires et protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Bertrand Auban. C’est ridicule !

M. Gérard Longuet. Vous avez une majorité physique de circonstance, tant mieux pour vous, c’est un heureux hasard, et les postiers y seront sensibles.

Lorsque le rapporteur s’exprime, lorsque la commission s’exprime, lorsque la majorité s’exprime, c’est au nom des grands électeurs qui ont voulu donner à notre assemblée une majorité claire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations véhémentes sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Exactement !

M. Gérard Longuet. Je n’entends pas que cette majorité s’incline devant le rendez-vous malicieux et hasardeux d’une minorité qui, certes, ce soir, je le reconnais, a su battre le ban et l’arrière-ban pour une soirée d’animation. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Guy Fischer. Et en plus, le mépris !

M. Gérard Longuet. Mais ce n’est pas cela, la démocratie. (Protestations sur les mêmes travées.)

La démocratie, c’est l’expression du peuple par les grands électeurs qui nous élisent.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le président, je vous demande d’appliquer le règlement. Nous enchaînerons les scrutins publics, mais c’est la condition de l’expression de notre majorité. (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations et huées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Bertrand Auban. Ce n’est pas brillant !

Mme Nicole Bricq. C’est hasardeux !

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, pour explication de vote.

M. Philippe Richert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs orateurs ont laissé entendre ce soir que la défense de La Poste, la défense du service public, était l’apanage de sénateurs siégeant d’un côté de l’hémicycle cependant que, sur les autres travées, des hommes et des femmes inconscients des enjeux locaux auraient tout juste le droit de s’exprimer, et encore, à temps compté.

M. Didier Guillaume. Personne n’a dit cela !

M. Bernard Piras. Personne ne l’a dit ! Vous n’avez pas écouté !

M. Philippe Richert. J’ai écouté !

M. Roland Courteau. Vous n’étiez pas là !

M. Philippe Richert. Un seul orateur, je l’ai d’ailleurs applaudi, a observé à un moment du débat qu’un consensus régnait ici sur le fait que ce service public méritait d’être défendu par tous et qu’il était défendu par tous. Dans ces conditions, est-il vraiment indispensable de prendre ce ton professoral (Rires sur les travées du groupe socialiste.),…

M. Didier Boulaud. Non, vous n’êtes pas mon professeur !

M. Philippe Richert. … ce ton de donneurs de leçons systématiques sur les valeurs, sur les territoires, sur le service public ?

Je respecte tout à fait vos arguments. Permettez que nos positions ne soient pas les vôtres et que nous puissions les exprimer en recourant aux voies et moyens prévus dans le règlement, qui contient les modalités de fonctionnement du Sénat que nous avons choisies.

Nous devrions pouvoir nous écouter davantage, mieux tenir compte des uns et des autres et, dans le respect de chacun, continuer d’avancer. C’est en tout cas le vœu que, à titre personnel, je forme.

M. Didier Guillaume. Nous sommes d’accord !

M. Bertrand Auban. Si ce n’est pas une leçon...

M. Philippe Richert. Vous avez vos positions, et je les respecte.

M. Didier Guillaume. L’inverse est vrai !

M. Philippe Richert. Acceptez que la majorité du Sénat…

M. Jean Desessard. Il faut qu’elle siège !

M. Daniel Raoul. Vous êtes minoritaires !

M. Philippe Richert. … puisse adopter une position différente et utiliser, tout simplement, les voies et moyens prévus dans le règlement.

Mais, je vous le concède bien volontiers, il serait préférable que nous soyons plus nombreux que vous en séance ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Guy Fischer. Enfin, on le reconnaît !

M. Roland Courteau. Tout ça pour en arriver là ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai écouté avec attention le président du groupe UMP, M. Longuet. Je connais sa compétence dans le domaine tout particulier dont nous traitons aujourd’hui, mais son argumentation n’a pas manqué de me surprendre.

Je me souviens d’une époque où l’on avait raillé, ô combien ! un député de gauche – il fut par la suite secrétaire d’État – qui avait déclaré en substance : « Vous avez juridiquement tort parce que nous sommes politiquement majoritaires. »

Or c’est ce que je viens d’entendre ce soir. (Protestations sur les travées de l’UMP.)

M. Gérard Longuet. C’est exactement le contraire ! Je vous répondrai !

M. Jean-Pierre Bel. Je ne vous ai pas interrompu, mon cher collègue !

Voilà quelques mois, dans nos débats sur la révision de la Constitution, nous avons essayé de faire en sorte que le Parlement soit mieux considéré et rétabli dans ses droits.

Or, ce soir, en réalité, qu’est-ce que j’entends ? Que nous devrions être une chambre d’enregistrement…

M. Jean Desessard. Absolument !

M. Jean-Pierre Bel. … qui, parce qu’il y a une majorité tout à fait évidente, se contenterait d’accepter le fait majoritaire, la séance n’étant plus qu’un grand théâtre dans lequel l’opposition resterait éternellement l’opposition et se contenterait de faire de la figuration.

M. Didier Boulaud. On peut rester chez nous !

M. Jean-Pierre Bel. Eh bien, non ! Nous sommes là, et ce soir nous sommes effectivement nombreux.

J’ai entendu bien des collègues, dans des discussions publiques, dans des conversations privées, souhaiter que nous soyons plus présents dans cet hémicycle afin que le Sénat puisse enfin donner de lui une image différente de celle que nous avons souvent déplorée.

C’est un vrai débat qui nous réunit ce soir, un débat qui nous touche tous. Car je sais bien qu’il vous touche, vous aussi, chers collègues, et que vous vous sentez tous concernés, parce que vous vivez sur vos territoires. Alors, bien sûr, la passion est là, et les sénateurs sont présents. Ne nous le reprochez pas !

Ce soir, nous sommes à la hauteur des enjeux. Ce soir, nous sommes là pour représenter des gens qui attendent beaucoup de nous, nous sommes là pour représenter nos territoires. Et nous resterons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

M. François Patriat. Je participe à ce débat depuis son début et, jusqu’ici, je suis peu intervenu. J’avoue que, ce soir, je suis à la fois choqué et surpris des termes qui ont été employés.

M. Guy Fischer. « Animation » !

M. François Patriat. Ainsi donc, le fait d’avoir été élu sur un pacte majoritaire aurait de facto pour conséquence non seulement qu’il n’y ait pour ainsi dire plus d’opposition, mais qu’en plus celle-ci doive rester minoritaire physiquement pour ne pas gêner le bon déroulement des choses !

M. François Patriat. Ces derniers jours, monsieur le ministre, vous avez souligné, aussi bien à la radio que dans la presse écrite, l’importance capitale de ce projet de loi. Ne pas être capable de réunir votre majorité sur un texte aussi important, n’est-ce pas un aveu d’échec, n’est-ce pas une forme de mise en cause ?

Nous aimons tous La Poste, mes chers collègues, mais nous l’aimons différemment.

Nous, membres de l’opposition, nous ne sommes ni dogmatiques ni archaïques : nous sommes tout simplement lucides.

Ce n’est pas être archaïque que de défendre un service postal auquel les Français sont attachés, parce qu’il est performant, parce qu’il est utile, parce qu’il correspond à la notion de service public.

Monsieur le ministre, je vous ai entendu tout à l’heure rappeler que, en tant que ministre chargé de l’aménagement du territoire, vous aviez rencontré beaucoup d’élus. Alors, je vais témoigner de l’une de ces rencontres.

En 2005, vous êtes venu deux fois dans le département de la Côte-d’Or, une fois à Dijon, une fois à Beaune. J’étais présent, avec d’autres maires, le jour où vous avez été interrogé sur l’internet à haut débit et sur les « zones blanches » de téléphonie mobile. Le maire d’une petite commune située à la frontière du Morvan vous demandait de quels moyens il disposerait pour faire face au déficit d’internet, au déficit de téléphone. Vous avez répondu, la main sur le cœur, avec toute la passion et toute la sincérité que je vous connais : « L’opérateur historique y pourvoira. »

C’était en 2005.

Depuis, les communes concernées n’ont toujours pas de couverture téléphonique, n’ont toujours pas le haut débit. Aujourd’hui, c’est aux départements, c’est aux régions que l’on demande de faire le travail…

M. François Patriat. … à la place d’un opérateur historique qui a disparu, tout comme vous voulez, avec ce projet de loi, que La Poste disparaisse. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

C’est de cela que nous ne voulons pas ; c’est de ce scénario-là que nous ne voulons pas, et c’est pour cette raison que nous sommes présents aujourd’hui. Notre lucidité repose sur des faits tangibles, sur le constat d’expérience que les choses se font toujours au détriment de la population.

Ce n’est pas être archaïque, ce n’est pas être dogmatique que de lutter contre la disparition des contre-pouvoirs, que de lutter contre la disparition des instruments de la régulation, que de lutter contre la disparition des services publics, auxquels les Français sont attachés. (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Mme Marie-France Beaufils. M. Gérard Longuet a tenté de nous apporter la preuve que la procédure accélérée a été engagée sur ce texte à dessein. (M. le ministre s’entretient avec des sénateurs du groupe socialiste. – Mme Marie-France Beaufils s’interrompt.)

M. le président. Veuillez poursuivre, ma chère collègue. (Les conversations cessent.)

Mme Marie-France Beaufils. Je reprends.

Nous avons donc entendu tout à l’heure M. Longuet nous démontrer que la procédure engagée sur ce texte l’a été volontairement. Pourtant, mes chers collègues, la libéralisation totale du secteur postal n’interviendra qu’au 1er janvier 2011 !

Nous n’avons eu de cesse de le répéter depuis l’ouverture de la discussion, La Poste est un service public auquel les Français sont fortement attachés. Si nous le rappelons de nouveau, c’est bien parce que la consultation citoyenne que nous avons organisée nous en a donné une nouvelle preuve.

Nous avons volontairement qualifié cette initiative de citoyenne, car, pour ce qui est du référendum d’initiative populaire, qui est désormais prévu dans la Constitution et qui aurait pu être mis en œuvre à cette occasion, vous n’avez pas voulu prendre plus tôt les dispositions législatives permettant à cette nouvelle possibilité de référendum d’être utilisée, interdisant ainsi à la population de donner son point de vue.

Mme Annie David. Exactement !

Mme Marie-France Beaufils. Et, en plus, vous engagez la procédure accélérée sur ce texte !

Même si nous sommes les représentants de la nation, nous nous interrogeons sur ce refus d’entendre la population.

Pourquoi la disposition relative au référendum d’initiative populaire telle qu’elle est issue de la dernière révision constitutionnelle n’a-t-elle pas été mis en œuvre de façon plus rapide, alors que celle qui permet au Président de la République de s’exprimer devant les parlementaires réunis à Versailles a été, elle, rendue effective très rapidement ?

Mme Annie David. Immédiatement !

Mme Marie-France Beaufils. La réponse est simple : le Président de la République entend diriger dans les moindres orientations l’ensemble de notre travail en s’exprimant devant les assemblées réunies en Congrès, mais il refuse à la grande majorité de la population le droit de participer à un débat qui concerne son avenir !

C’est cette forme de mépris pour l’expression de l’électorat qui rejaillit aujourd'hui sur nos débats.

Mme Annie David. Bien sûr !

Mme Marie-France Beaufils. La votation citoyenne a montré que les Français souhaitaient donner leur point de vue sur un service public de cette importance.

Samedi dernier, dans mon département, j’ai assisté à l’ouverture de deux « multiservice » dans lesquels des points Poste avaient été installés. Pour la population, cette mise en place a été rendue nécessaire, car La Poste n’assume plus ses responsabilités : elle a même désorganisé ses services pour ne plus être en mesure le faire ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. - Exclamations ironiques sur les travées de lUMP.) Aujourd'hui, nous n’avons plus la même qualité de service !

C’est sur ces questions-là que les Français veulent s’exprimer. Vous le leur refusez. En plus, vous engagez la procédure accélérée et, comble de tout, ce soir, vous ne voulez pas de débat. (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Roland Courteau. C’est exact !

M. Guy Fischer. C’est la vérité !

Mme Annie David. Tout à fait !

Mme Marie-France Beaufils. Nous sommes les seuls à intervenir ! M. le rapporteur et quelques élus de la majorité se sont bien exprimés, mais dans la discussion générale, pas dans la discussion des articles. Nous n’avons entendu personne contester les arguments que nous avons avancés.

Mme Annie David. Personne !

Mme Marie-France Beaufils. Si vous refusez tout débat de fond, c’est peut-être parce que, vous aussi, vous avez entendu ce que disent vos électeurs, sur le terrain,...

M. Guy Fischer. Bien sûr, qu’ils l’ont entendu !

Mme Marie-France Beaufils. ... et que vous ne voulez pas le rapporter ici, dans cette enceinte.

Je regrette vivement que ce débat de fond sur l’avenir de La Poste ne puisse avoir lieu. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 16:

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 337
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l’adoption 152
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. le rapporteur applaudit également.)

Mme Annie David. La majorité est minoritaire, mais s’applaudit !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote sur l'amendement n° 367.

M. Jean-Jacques Mirassou. L'amendement n° 367 a été l’occasion de montrer que deux conceptions du service public s’opposaient, la vôtre et la nôtre. Nous en ferons la démonstration jusqu’au bout, s’il le faut, car nous ne lâcherons pas, chers collègues !

Nous n’entendons pas non plus fuir nos responsabilités, d’autant que les explications de M. Longuet ne nous ont pas convaincus, pas plus que lors du vote du Grenelle de l’environnement, quand, à l’entendre, l’opposition aurait dû s’excuser d’être majoritaire dans l’hémicycle.

La commission de l’économie s’est réunie voilà quelques minutes. On nous a expliqué en long, en large et en travers qu’il était inutile de déposer une motion tendant à soumettre ce projet de loi à référendum. Or ceux qui veulent nous persuader que cette procédure serait disqualifiée parce que la droite est majoritaire sont ceux-là mêmes qui cherchent à nous faire croire que, même s’ils sont minoritaires ce soir, ils représentent l’opinion publique. Pourquoi donc ne pas autoriser cette opinion publique à se prononcer par référendum ? Voilà une attitude bien contradictoire ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Vous refusez de prendre ce débat au sérieux et d’assumer vos responsabilités. Nous prenons les nôtres et nous continuerons, sereinement et sérieusement, de défendre notre conception du service public. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 367.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 17 :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 152
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Didier Boulaud. Formidable ! Quel succès ! Quel talent ! Quelle majorité merveilleuse !

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote sur l’amendement n° 429.

M. Bernard Frimat. Nous ne désespérons pas que la majorité puisse devenir majoritaire dans cet hémicycle ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste. - Oh ! sur les travées de lUMP.) Vous avez encore le temps de réveiller quelques-uns de vos collègues ou de les faire revenir des bureaux de poste où ils se sont retranchés pour ne pas assister à la séance ! (Sourires.)

M. Didier Boulaud. En bonnet de nuit ! En pyjama !

M. Bernard Frimat. M’adressant à Gérard Longuet, je veux lui donner acte du fait que l’utilisation du scrutin public est parfaitement conforme au règlement de notre assemblée.

Cela étant, comme notre collègue choisit soigneusement ses mots, je m’interroge à propos du terme « malicieux » qu’il a utilisé. Qu’un sénateur soit présent dans l’hémicycle pour débattre d’un projet de loi qu’il considère comme essentiel ne relève pas de la malice ! Il fait son travail de parlementaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

J’ai en mémoire une intervention du président du Sénat – peut-être nous rejoindra-t-il tout à l'heure pour nous permettre d’échapper aux scrutins publics ! – posant le problème de l’absentéisme des parlementaires. J’ai même lu que nos collègues de l’Assemblée nationale, toutes tendances politiques confondues, ont été révulsés de devoir « pointer » au Palais-Bourbon.

Or, ce soir, notre hémicycle est bien garni ; allez-vous nous reprocher de faire notre travail de parlementaire ?

Si ce texte est aussi essentiel, aussi fondamental que vous le prétendez, chers collègues, vous qui vous posez en sauveurs de La Poste et qui, dites-vous, allez lui assurer, au travers de ce projet de loi, un avenir radieux et européen, pourquoi n’avez-vous pas fait l’effort d’être présents en nombre suffisant ? (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est clair !

Mme Françoise Henneron. Mais nous sommes là !

M. Bernard Frimat. Nous ne vous reprochons pas la position que vous soutenez. C’est votre droit, et chacun dans cette assemblée défend ses convictions et vote librement, comme il le souhaite, sur le texte présenté.

Sur le fond, donc, vous avez une position, nous en avons une autre, que Michel Teston a présentée hier dans une intervention tout à la fois synthétique et claire. Nous aurons l’occasion d’en débattre, si du moins nous obtenons des réponses sur le fond, tant du Gouvernement que de la commission.

Le débat, c’est le b.-a.-ba de la démocratie.

Mais nous sommes arrivés aujourd’hui à une situation qui ne peut se régler autrement que si vous êtes, vous, physiquement, à la hauteur de vos engagements juridiques.

Il peut arriver à tous les groupes, y compris au nôtre, de ne pas être en nombre suffisant. Je dois reconnaître que, présidant la séance, il m’est arrivé parfois de voir devant moi des travées un peu plus désertes que ce soir.

Réjouissons-nous donc de cette volonté des parlementaires d’exercer leurs fonctions d’élus de la nation, de venir dans cette enceinte défendre solidement leurs convictions.

La Poste est un sujet sensible, nous le savons. Quelles que soient vos opinions sur la votation, il n’est jamais anodin que plus de 2 millions de personnes se déplacent pour participer à une opération citoyenne.

Demain, nous vous proposerons de permettre à tous les Français d’y participer, car, à travers La Poste, vous touchez au lien social, extrêmement important dans notre pays, et au fond, vous le reconnaissez vous-mêmes, sans avoir de garanties.

En tout état de cause, mes chers collègues, les scrutins publics vont se poursuivre. Nous ne multiplierons pas les explications de vote, mais nous en ferons quelques-unes pour animer cette séance et faire en sorte que la mission du président de séance, qui serait sinon limitée aux seules annonces de scrutin public, soit moins horriblement triste ! (Sourires.)

Mes chers collègues, réjouissons-nous de la vitalité du Sénat ! Nous avons sans doute ce soir un avant-goût de ce qui nous attend en 2011, quand nous serons majoritaires ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote. (Les membres du groupe socialiste scandent « Desessard ! Desessard ! »)

M. Jean Desessard. Si nous étions au Palais-Bourbon, aujourd’hui, dans la même situation, …

M. Jackie Pierre. Nous sommes au Sénat, ici !

M. Jean Desessard. … ces amendements auraient été adoptés, puisque le règlement de l’Assemblée nationale n’autorise qu’une seule délégation de vote par parlementaire, conformément à la Constitution, il convient de le rappeler.

Pourquoi le Sénat ne la respecte-t-il pas ? Le règlement du Sénat est-il plus fort que la Constitution française ?

M. Philippe Richert. C’est n’importe quoi !

M. Jean Desessard. Si nous appliquions la Constitution, nous aurions la majorité, ce soir ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Mme Jacqueline Panis. Il ne faut pas tout mélanger !

M. Jean Desessard. Selon la loi fondamentale française, un parlementaire ne peut être porteur que d’un seul mandat. Cette disposition vise à permettre le vote personnel des parlementaires ! (M. Philippe Richert proteste.) Aux élections, le système uninominal…

Mme Jacqueline Panis. Et La Poste ?

M. Jean Desessard. … est fait précisément pour donner la possibilité à des personnes de se présenter indépendamment des partis.

Il est tout de même formidable que le Sénat pratique le vote par parti, le vote par groupe ! (M. Philippe Richert et Mme Jacqueline Panis s’exclament.) À l’Assemblée nationale, on ne voit plus un porteur de bulletins voter pour l’ensemble de son groupe ! (M. François Trucy lève les bras au ciel.)

Pourquoi le Sénat, qui se veut moderne, conserve-t-il un système archaïque qui permet à un seul de voter pour cent quarante, alors que c’est contraire à la Constitution ?

M. le président. Monsieur Desessard, ce soir, ce n’est pas le cas. On ne peut pas dire que tel ou tel vote pour cent quarante de ses collègues !

M. Didier Guillaume. On n’en est pas loin !

M. Jean Desessard. Le scrutin public, c’est quoi ?

M. le président. En trente-deux ans d’expérience, j’ai rarement vu cent quinze parlementaires présents en séance à vingt-trois heures trente, comme ce soir !

M. Martial Bourquin. C’est La Poste !

M. Jean Desessard. C’est précisément pourquoi je vous propose un vote individuel !

M. le président. J’applique le règlement du Sénat. S’il y a lieu de le modifier, la conférence des présidents y réfléchira.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, vous avez le droit de m’interrompre, mais, si vous prenez la parole pour me contredire, je vous demande de bloquer le compteur ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.- Vives protestations sur les travées de lUMP.) Il n’existe pas dans cette enceinte de pouvoir absolu, à l’image de celui que l’on reproche à l’Élysée de tenter d’installer. J’ai le droit de parler et vous avez celui de me couper si vous l’estimez absolument indispensable, mais il faut le décompter de mon temps de parole !

Permettez-moi donc de poursuivre. (Oh ! sur les travées de lUMP.)

Oui, je sais, mes propos vous gênent, mais croyez-vous que cela me fasse plaisir (Oui ! sur les travées de lUMP) qu’un seul de nos collègues puisse déposer dans l’urne cent quarante bulletins et que l’on donne souvent l’impression, de cette manière, que trois cent quarante parlementaires ont voté, alors qu’une dizaine seulement étaient présents ? (Exclamations sur les travées de lUMP.)

L’Assemblée nationale a vécu des moments importants, précisément parce que le scrutin a donné lieu à des votes-surprises, certains députés n’ayant pas voté comme on s’y attendait.

Au Sénat, c’est impossible, parce que le scrutin public est en quelque sorte un vote bloqué, mais c’est anticonstitutionnel ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

Si vous me dites que cela ne figure pas dans la Constitution, je vais chercher à l’instant mon exemplaire et je reviens vous lire l’article pertinent à la prochaine explication de vote ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Je donne acte à M. Frimat d’avoir reconnu que le recours au scrutin public était conforme à notre règlement et je remercie M. le président de séance d’avoir rappelé qu’il n’avait jamais vu notre assemblée aussi fournie à cette heure.

M. Bertrand Auban. Pour La Poste !

M. Gérard Longuet. Nous ne pouvons que nous en réjouir, compte tenu de l’intérêt que nous portons les uns et les autres au sujet.

Monsieur Desessard, vous avez été quelque peu excessif, mais ce n’est pas franchement une surprise. Reconnaissez cependant que de nombreux sénateurs sont présents, le scrutin public ne faisant que prolonger cette présence.